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Prix plancher en agriculture : les effets pervers

Prix plancher en agriculture : les effets pervers

 

 

Jeudi 4 avril, les députés ont adopté en première lecture, malgré l’opposition du camp présidentiel, une loi en faveur de « prix minimal d’achat des produits agricoles ». Le texte proposé par les élus Europe Écologie les Verts, et qui ne sera probablement pas voté par le Sénat, part d’une intention louable. Nécessaire peut-être au regard de la faiblesse de prix qui parfois ne couvrent pas les coûts des productions agricoles. L’idée d’aligner par la loi les prix de vente des agriculteurs à leurs coûts de revient déterminés par les experts des chambres d’agriculture ou des interprofessions, notamment, est indubitablement séduisante. Elle contient pourtant en germe des conséquences délétères qui pourraient dégrader à terme la santé économique de filières déjà mal en point. La loi semble être proposée sans étude préalable de fond sur ses effets complets sur les marchés. Or, deux problèmes principaux pourraient bien se poser. Le premier est technique. Il concerne la fixation du prix plancher, son niveau. Le second est économique et porte sur l’impact du prix plancher pour le consommateur. Les deux points sont liés. Commençons, dans l’ordre par le niveau de prix à fixer.

par

Jean-Marie Cardebat
Professeur d’économie à l’Université de Bordeaux et Prof. affilié à l’INSEEC Grande Ecole, Université de Bordeaux

Benoît Faye
Full Professor Inseec Business School, Chercheur associé LAREFI Université de Bordeaux Economiste des marchés du vin, de l’art contemporain et Economiste urbain, INSEEC Grande École dans The Conversation
Dans toutes les filières, agricoles comme industrielles, les entreprises sont hétérogènes et diffèrent par leurs niveaux de productivité et de qualité. Les exploitations disparates en productivité ont dès lors des coûts différents pour produire un bien similaire et les plus productives enregistrent des profits supérieurs. Augmenter les prix de vente par la loi risquerait ainsi de faire apparaître des surprofits chez les plus productifs. Le système avantagerait donc des acteurs qui n’en avaient pas besoin. C’est une première source d’inefficience.

La seule réponse à ce problème est d’adapter le prix par catégorie d’exploitation. Cela peut être fait grossièrement en regardant notamment leur taille : plus grande est l’exploitation, plus elle pourra en théorie bénéficier d’économies d’échelle et donc d’une meilleure productivité. Pareille approche resterait toutefois tant approximative que complexe car il faudra un prix par catégorie.
Les choses se complexifient plus encore lorsque l’on considère des biens qui se différencient les uns des autres par leur qualité. Un prix plancher va surtout augmenter le prix de la qualité inférieure. Par réaction, les exploitants des qualités immédiatement supérieures vont augmenter leurs prix pour signaler leurs qualités supérieures justement et ne pas se retrouver dans la situation de vendre moins cher un bien de qualité supérieure. Par effet de report de tranche de qualité en tranche de qualité, c’est l’ensemble de l’échelle des prix le long de la gamme qui va s’élever. Pourtant, là encore, aucune hausse de prix n’était justifiée à la base pour les qualités supérieures. Un effet de rente, de surprofit, apparaît de nouveau.

L’expérience dans d’autres domaines montre que l’échelle des prix devrait en fait se resserrer. Un bon exemple de cette dynamique de propagation vers le haut d’une hausse des prix en bas de l’échelle est donné par le prix du travail avec les hausses régulières du salaire minimum (smic en France). L’effet s’estompe à partir d’un niveau de salaire supérieur ou égal à 1,5 smic. Dès lors, on peut anticiper une contagion de hausse d’un prix plancher s’atténuant à mesure que l’on monte dans l’échelle des qualités et donc des prix.

Plus à perdre qu’à y gagner ?
Toutefois, les conséquences de prix plancher en termes de rentes pour les exploitants les plus productifs et les plus qualitatifs ne paraissent pas être le principal problème pour la filière agricole. Le plus gros écueil pourrait venir du consommateur. Quid de l’évolution de la demande face à une hausse des prix consécutive à la mise en place d’un prix plancher ?

L’effet passe par deux mécanismes que l’on nomme élasticités-prix directes et élasticités-prix croisées de la demande de biens agricoles par le consommateur final. L’élasticité-prix directe de la demande d’un bien mesure en pourcentage la variation de demande consécutive à une variation de prix de ce bien. Concrètement, de combien diminue la demande lorsque le prix augmente de 10 % ?

Dans une étude préliminaire portant sur la filière viticole française, nous avons calculé pour des vins d’entrée de gamme vendus en grande surface des élasticités pouvant dépasser l’unité : c’est-à-dire que la demande varie dans une proportion plus importante que les prix. Ces travaux sont cohérents avec d’autres, déjà publiés qui mesurent ces élasticités-prix à l’export pour la demande étrangère. Le chiffre d’affaires des producteurs va alors baisser : le prix multiplié par la quantité vendue va diminuer sous l’effet de la baisse de la consommation plus importante que la hausse du prix.

Le consommateur y perd encore plus. Finalement, c’est le surplus social qui s’est dégradé avec une perte marquée pour le consommateur dont le transfert vers le producteur, via la hausse du prix de vente, ne suffit pas à améliorer la situation de ce dernier. Les deux perdent et c’est donc une perte sociale nette.

Le consommateur peut aussi réaliser des reports de consommation face à une hausse des prix d’un bien donné : vers des biens de qualité supérieure, vers des biens importés ou vers des substituts proches, qui tous deviennent en termes relatifs moins cher au regard du bien dont le prix a augmenté. C’est là le jeu des élasticités-prix croisées entre différents biens.

L’exemple du vin est là encore riche en enseignements. Nos premiers résultats montrent que ces effets de report semblent bien à l’œuvre. La hausse du prix en entrée de gamme pourrait pousser le consommateur vers un niveau de qualité supérieure, précipitant ainsi la baisse de chiffre d’affaires pour le vin d’entrée de gamme. L’exact opposé de l’effet désiré par la loi.

Pire, l’effet de report peut aller vers les biens importés et donc entrainer une perte nette à l’échelle nationale. Dans certains secteurs l’origine est moins regardée que dans d’autres et une étiquette « UE » suffit parfois à rassurer le consommateur sur un certain niveau de qualité. Enfin, l’effet de report peut même faire sortir le consommateur d’une filière. C’est le cas pour le vin ou un prix plancher peut amener un arbitrage du consommateur favorable à la bière ou autre boisson jugée substituable.
Les conditions de réussite de la loi tiennent ainsi aux filières visées : elles doivent être au maximum homogènes en productivité et en qualité pour minimiser les effets de rentes et de reports. Elle doit en outre porter sur des biens agricoles dont la demande est faiblement élastique au prix, donc des biens dont il est difficile de se passer pour le consommateur. Ainsi, pour le producteur, la perte de vente restera limitée et plus que compensée par la hausse du prix. En outre, les substituts, importés ou non, doivent être peu nombreux pour éviter les reports. Les pouvoirs publics devront trancher cette question délicate des produits éligibles pour lesquels la loi n’aurait pas d’effets adverses. Selon le texte voté à l’Assemblée nationale, c’est une « conférence publique » par filière qui fixerait ces minima, conférence qui ne serait convoquée « qu’à la demande d’une majorité des producteurs » de la filière en question.
Les pouvoirs publics devront également décider du sort des invendus générés par une hausse des prix. Qui va payer leur destruction ? À coup sûr une indemnisation sera demandée par les producteurs qui vont voir leurs stocks gonfler. Toutes ces questions vont apparaître en boomerang de la loi. Est-ce que tout cela a été pesé, évalué, budgété au moment du vote ? N’y aurait-il pas des mesures à prendre en amont pour éviter ces effets en aval ?

Une grande partie du problème venant de la hausse du prix pour le consommateur final, il faudrait que le prix plancher n’affecte pas le consommateur pour éviter les conséquences adverses décrites plus haut. Deux solutions. Soit l’État subventionne le prix plancher en compensant l’écart entre le prix de marché et le prix plancher pour que la chaine des intermédiaires conserve les mêmes prix et que rien ne change pour le consommateur final. Soit les intermédiaires absorbent dans leurs marges la hausse du prix liée à la loi. Si la hausse est mesurée elle pourra être absorbée dans le cadre de négociations associant tous les acteurs et, pourquoi pas, dans le cadre d’une énième discussion sur la loi Egalim.

Dans tous les cas, dans les filières agricoles (comme dans la plupart des filières d’ailleurs), l’essentiel de la création de valeur se fait dans les derniers stades de la chaine de valeur, les stades de la commercialisation. La valeur n’augmente pas de façon linéaire de l’amont à l’aval du processus de production d’un bien, elle augmente de façon exponentielle : peu au début, beaucoup à la fin. Cela a été bien documenté dans le vin par exemple. Une réflexion de fond sur le partage de la valeur entre les acteurs, l’organisation industrielle et les mécanismes de gouvernance des filières agricoles s’impose. Ce travail était certainement préalable à une loi sur les prix planchers.

Agriculture–prix plancher : des effets pervers

Agriculture–prix plancher : des effets pervers

 

Jeudi 4 avril, les députés ont adopté en première lecture, malgré l’opposition du camp présidentiel, une loi en faveur de « prix minimal d’achat des produits agricoles ». Le texte proposé par les élus Europe Écologie les Verts, et qui ne sera probablement pas voté par le Sénat, part d’une intention louable. Nécessaire peut-être au regard de la faiblesse de prix qui parfois ne couvrent pas les coûts des productions agricoles. L’idée d’aligner par la loi les prix de vente des agriculteurs à leurs coûts de revient déterminés par les experts des chambres d’agriculture ou des interprofessions, notamment, est indubitablement séduisante. Elle contient pourtant en germe des conséquences délétères qui pourraient dégrader à terme la santé économique de filières déjà mal en point. La loi semble être proposée sans étude préalable de fond sur ses effets complets sur les marchés. Or, deux problèmes principaux pourraient bien se poser. Le premier est technique. Il concerne la fixation du prix plancher, son niveau. Le second est économique et porte sur l’impact du prix plancher pour le consommateur. Les deux points sont liés. Commençons, dans l’ordre par le niveau de prix à fixer.

par 

Jean-Marie Cardebat
Professeur d’économie à l’Université de Bordeaux et Prof. affilié à l’INSEEC Grande Ecole, Université de Bordeaux

Benoît Faye
Full Professor Inseec Business School, Chercheur associé LAREFI Université de Bordeaux Economiste des marchés du vin, de l’art contemporain et Economiste urbain, INSEEC Grande École dans The Conversation 
Dans toutes les filières, agricoles comme industrielles, les entreprises sont hétérogènes et diffèrent par leurs niveaux de productivité et de qualité. Les exploitations disparates en productivité ont dès lors des coûts différents pour produire un bien similaire et les plus productives enregistrent des profits supérieurs. Augmenter les prix de vente par la loi risquerait ainsi de faire apparaître des surprofits chez les plus productifs. Le système avantagerait donc des acteurs qui n’en avaient pas besoin. C’est une première source d’inefficience.

La seule réponse à ce problème est d’adapter le prix par catégorie d’exploitation. Cela peut être fait grossièrement en regardant notamment leur taille : plus grande est l’exploitation, plus elle pourra en théorie bénéficier d’économies d’échelle et donc d’une meilleure productivité. Pareille approche resterait toutefois tant approximative que complexe car il faudra un prix par catégorie.
Les choses se complexifient plus encore lorsque l’on considère des biens qui se différencient les uns des autres par leur qualité. Un prix plancher va surtout augmenter le prix de la qualité inférieure. Par réaction, les exploitants des qualités immédiatement supérieures vont augmenter leurs prix pour signaler leurs qualités supérieures justement et ne pas se retrouver dans la situation de vendre moins cher un bien de qualité supérieure. Par effet de report de tranche de qualité en tranche de qualité, c’est l’ensemble de l’échelle des prix le long de la gamme qui va s’élever. Pourtant, là encore, aucune hausse de prix n’était justifiée à la base pour les qualités supérieures. Un effet de rente, de surprofit, apparaît de nouveau.

L’expérience dans d’autres domaines montre que l’échelle des prix devrait en fait se resserrer. Un bon exemple de cette dynamique de propagation vers le haut d’une hausse des prix en bas de l’échelle est donné par le prix du travail avec les hausses régulières du salaire minimum (smic en France). L’effet s’estompe à partir d’un niveau de salaire supérieur ou égal à 1,5 smic. Dès lors, on peut anticiper une contagion de hausse d’un prix plancher s’atténuant à mesure que l’on monte dans l’échelle des qualités et donc des prix.

Plus à perdre qu’à y gagner ?
Toutefois, les conséquences de prix plancher en termes de rentes pour les exploitants les plus productifs et les plus qualitatifs ne paraissent pas être le principal problème pour la filière agricole. Le plus gros écueil pourrait venir du consommateur. Quid de l’évolution de la demande face à une hausse des prix consécutive à la mise en place d’un prix plancher ?

L’effet passe par deux mécanismes que l’on nomme élasticités-prix directes et élasticités-prix croisées de la demande de biens agricoles par le consommateur final. L’élasticité-prix directe de la demande d’un bien mesure en pourcentage la variation de demande consécutive à une variation de prix de ce bien. Concrètement, de combien diminue la demande lorsque le prix augmente de 10 % ?

Dans une étude préliminaire portant sur la filière viticole française, nous avons calculé pour des vins d’entrée de gamme vendus en grande surface des élasticités pouvant dépasser l’unité : c’est-à-dire que la demande varie dans une proportion plus importante que les prix. Ces travaux sont cohérents avec d’autres, déjà publiés qui mesurent ces élasticités-prix à l’export pour la demande étrangère. Le chiffre d’affaires des producteurs va alors baisser : le prix multiplié par la quantité vendue va diminuer sous l’effet de la baisse de la consommation plus importante que la hausse du prix.

Le consommateur y perd encore plus. Finalement, c’est le surplus social qui s’est dégradé avec une perte marquée pour le consommateur dont le transfert vers le producteur, via la hausse du prix de vente, ne suffit pas à améliorer la situation de ce dernier. Les deux perdent et c’est donc une perte sociale nette.

Le consommateur peut aussi réaliser des reports de consommation face à une hausse des prix d’un bien donné : vers des biens de qualité supérieure, vers des biens importés ou vers des substituts proches, qui tous deviennent en termes relatifs moins cher au regard du bien dont le prix a augmenté. C’est là le jeu des élasticités-prix croisées entre différents biens.

L’exemple du vin est là encore riche en enseignements. Nos premiers résultats montrent que ces effets de report semblent bien à l’œuvre. La hausse du prix en entrée de gamme pourrait pousser le consommateur vers un niveau de qualité supérieure, précipitant ainsi la baisse de chiffre d’affaires pour le vin d’entrée de gamme. L’exact opposé de l’effet désiré par la loi.

Pire, l’effet de report peut aller vers les biens importés et donc entrainer une perte nette à l’échelle nationale. Dans certains secteurs l’origine est moins regardée que dans d’autres et une étiquette « UE » suffit parfois à rassurer le consommateur sur un certain niveau de qualité. Enfin, l’effet de report peut même faire sortir le consommateur d’une filière. C’est le cas pour le vin ou un prix plancher peut amener un arbitrage du consommateur favorable à la bière ou autre boisson jugée substituable.
Les conditions de réussite de la loi tiennent ainsi aux filières visées : elles doivent être au maximum homogènes en productivité et en qualité pour minimiser les effets de rentes et de reports. Elle doit en outre porter sur des biens agricoles dont la demande est faiblement élastique au prix, donc des biens dont il est difficile de se passer pour le consommateur. Ainsi, pour le producteur, la perte de vente restera limitée et plus que compensée par la hausse du prix. En outre, les substituts, importés ou non, doivent être peu nombreux pour éviter les reports. Les pouvoirs publics devront trancher cette question délicate des produits éligibles pour lesquels la loi n’aurait pas d’effets adverses. Selon le texte voté à l’Assemblée nationale, c’est une « conférence publique » par filière qui fixerait ces minima, conférence qui ne serait convoquée « qu’à la demande d’une majorité des producteurs » de la filière en question.
Les pouvoirs publics devront également décider du sort des invendus générés par une hausse des prix. Qui va payer leur destruction ? À coup sûr une indemnisation sera demandée par les producteurs qui vont voir leurs stocks gonfler. Toutes ces questions vont apparaître en boomerang de la loi. Est-ce que tout cela a été pesé, évalué, budgété au moment du vote ? N’y aurait-il pas des mesures à prendre en amont pour éviter ces effets en aval ?

Une grande partie du problème venant de la hausse du prix pour le consommateur final, il faudrait que le prix plancher n’affecte pas le consommateur pour éviter les conséquences adverses décrites plus haut. Deux solutions. Soit l’État subventionne le prix plancher en compensant l’écart entre le prix de marché et le prix plancher pour que la chaine des intermédiaires conserve les mêmes prix et que rien ne change pour le consommateur final. Soit les intermédiaires absorbent dans leurs marges la hausse du prix liée à la loi. Si la hausse est mesurée elle pourra être absorbée dans le cadre de négociations associant tous les acteurs et, pourquoi pas, dans le cadre d’une énième discussion sur la loi Egalim.

Dans tous les cas, dans les filières agricoles (comme dans la plupart des filières d’ailleurs), l’essentiel de la création de valeur se fait dans les derniers stades de la chaine de valeur, les stades de la commercialisation. La valeur n’augmente pas de façon linéaire de l’amont à l’aval du processus de production d’un bien, elle augmente de façon exponentielle : peu au début, beaucoup à la fin. Cela a été bien documenté dans le vin par exemple. Une réflexion de fond sur le partage de la valeur entre les acteurs, l’organisation industrielle et les mécanismes de gouvernance des filières agricoles s’impose. Ce travail était certainement préalable à une loi sur les prix planchers.

Baisse de croissance en Chine: des effets aussi en France

Baisse de croissance en Chine: des effets  aussi en  France 

L’Allemagne est à la fois le premier client et fournisseur de la France. En 2022, l’Allemagne représente 13,8 % des exportations françaises (devant l’Italie, à 9,3 %) et 12,0 % des importations françaises (devant la Chine, à 10,1 %). L’Allemagne est également le premier moteur économique de l’ensemble de l’union économique. Pour L’Allemagne l’institut de statistiques français chiffre l’impact du ralentissement chinois entre 0,2% et 0,4% de PIB. Il faut dire que l’Allemagne a pendant très longtemps exporté principalement des biens manufacturés vers la Chine (60% des importations chinoises), notamment des voitures thermiques. 

Sur le total des importations chinoises, la part des biens s’est effondrée pour atteindre un point bas en 2022 à 51%. L’entrée de la Chine dans l’OMC depuis les années 2000 a complètement bouleversé le modèle capitaliste chinois en quelques années.

La baisse de croissance de la Chine a forcément des conséquences moindres mais cependant important sur la France. Le trou d’air( croissance zéro au premier trimestre) provient en effet en France de la stagnation voire du recul de la consommation, de la baisse des investissements mais aussi du tassement des exportations.

Effets de L’IA générative : positifs sur la croissance ?

Effets de L’IA générative :  positifs sur la croissance ?

Une annonce tout à fait hypothétique : la quantification de l’effet positif de l’intelligence artificielle sur l’économie. D’après un rapport officiel diffusé par l’Elysée, l’intelligence artificielle pourrait générer des gains de croissance de 10 à 15 % d’ici une vingtaine d’années. Des chiffres très discutables. La première raison c’est qu’on mélange l’intelligence artificielle générative des autres formes d’intelligence artificielle qui déjà automatise les processus de production et de distribution. D’une certaine manière, l’intelligence artificielle est mise à toutes les sauces sans doute par effet de mode. Ce qui est sûr, c’est que l’intelligence artificielle tout court va continuer de se développer et est déjà largement à l’œuvre.Il faudra toutefois faire le moment venu un bilan pertinent des pertes et des créations d’emplois notamment dans les services qui seront largement affectés.Essayer de quantifier les effets de l’intelligence artificielle sur la croissance relève de la recherche dans le marc de café. On pourrait tout aussi bien annoncer que l’intelligence artificielle va détruire 100 milliards s ou au contraire augmenter de à 600 milliards le PIB.

Ce qu’on peut dire avec une certaine certitude c’est que l’intelligence artificielle va continuer de pénétrer l’économie et qu’il faut continuer de s’y préparer avec la formation et les investissements. Tout le reste relève de la spéculation

D’après l’Élysée, le rapport du comité interministériel sur l’intelligence artificielle générative prévoit un effet positif de l’IA sur l’économie française dès 2030, avec une hausse de PIB entre 250 milliards d’euros et 400 milliards. Ce texte sera rendu public demain, à la suite d’une remise officielle au président Emmanuel Macron.

Co-directeur du comité avec la chercheuse Anne Bouverot, l’économiste Philippe Aghion va présenter dans le rapport des « chiffres inédits sur le potentiel de création de valeur de l’IA », dixit l’Elysée. Le constat y serait au beau fixe : les effets positifs de l’IA générative sur l’emploi devraient largement dépasser les effets négatifs. Tout un chapitre est d’ailleurs dédié à la thématique « IA créatrice ou destructrice d’emploi ». « Le rapport évoque une hausse du PIB potentielle de 250 à 400 milliards d’euros grâce à l’IA à l’horizon 2030 », chiffre la présidence. Pour rappel, le PIB se situait à 2.640 milliards d’euros en 2022.

 

 

 

Intelligence artificielle (AI Act) ) : une loi pour réguler les effets néfastes

  • Intelligence artificielle : une loi pour réguler les effets néfastes
  • L’AI Act a pour objet d’interdire les effets pervers de l’intelligence artificielle notamment en matière de liberté en Europe . Mais ce n’est forcément qu’un premier pas car on est loin de mesurer ce que seront toutes les conséquences du développement d’une telle technologie qui va s’introduire dans tous les aspects de la vie économique, sociale, politique et culturelle. Le texte européen    interdit certains usages de ces technologies, comme les systèmes de notation citoyenne et de manipulation du comportement ou l’identification biométrique à distance des personnes dans les lieux publics, sauf pour certaines missions liées à la sécurité, dont la lutte contre le terrorisme. « Cette législation n’est que le commencement », a relevé le corapporteur Dragos Tudorache (Renew) soulignant que l’intelligence artificielle continuait d’évoluer rapidement.

Le texte impose des obligations aux fournisseurs de systèmes d’IA sur le marché européen, en les classant selon le degré de risques qu’ils présentent pour les personnes. Les modèles d’IA à « usage général » devront respecter des obligations de transparence ainsi que les règles européennes en matière de droits d’auteur. À cet égard il faudra prévoir de nombreuses action d’ordre juridique dans la mesure où l’intelligence artificielle générative se contente de compiler les connaissances de producteurs et d’auteurs d’informations. Les systèmes jugés à « haut risque » (dans la santé, les infrastructures critiques, l’éducation ou les ressources humaines) seront soumis à des obligations plus strictes (maintien d’un contrôle humain, gestion des risques…).

L’AI Act interdit certains usages de ces technologies, comme les systèmes de notation citoyenne et de manipulation du comportement ou l’identification biométrique à distance des personnes dans les lieux publics, sauf pour certaines missions liées à la sécurité, dont la lutte contre le terrorisme. « Cette législation n’est que le commencement », a relevé le corapporteur Dragos Tudorache (Renew) soulignant que l’intelligence artificielle continuait d’évoluer rapidement.

 

La quasi stagnation de la croissance a des effets négatifs sur l’emploi

La quasi stagnation de la croissance a des effets négatifs sur l’emploi


Jusque-là la France pouvait s’enorgueillir d’une assez bonne situation de l’emploi mais avec la quasi stagnation de l’activité, la tendance du chômage est en train de s’inverser. La croissance au troisième trimestre a seulement affiché 0,1 % au lieu de 0,6 % pour le second.

Mécaniquement le nombre de chômeurs a donc commencé à augmenter .Le nombre de demandeurs d’emploi sans activité (catégorie A de Pôle emploi) a progressé de 0,6% au troisième trimestre. Une première depuis plusieurs mois. (Crédits : Reuters)

L’intérim, indicateur avancé du marché de l’emploi, baisse pour le troisième trimestre consécutif. Au troisième trimestre, ce secteur baisse de 1,9% (-15.300 emplois) après -0,5 % au deuxième trimestre (soit 4.300 emplois en moins) et -2,5 % au premier trimestre (-20.400 emplois). L’emploi intérimaire est légèrement au-dessous de son niveau d’avant la crise sanitaire (-0,5%).

« Le Direktør », tableau critique des effets du pouvoir dans l’organisation du travail

« Le Direktør », tableau critique des effets du pouvoir dans l’organisation du travail .

Lorsque l’on songe au monde du travail aujourd’hui, il paraît bien compliqué, pour ne pas dire cynique, d’y voir un sujet de comédie – du moins dans le sens traditionnel du terme. Qu’est-ce qui peut tant prêter à rire dans ce lot d’absurdité, voire même de mal-être, sur fond de perte de sens au travail constatée par diverses enquêtes, dont celle, récente, des chercheurs en économie et socio-économie Thomas Coutrot et Coralie Perez ?

Par Gabriel Lomellini, ICN Business School dans l’Opinion

Dans un versant « comique » (et les guillemets s’imposent pour les raisons qui vont suivre) de la vie en entreprise, Le Direktør, film sorti en 2006 du réalisateur danois Lars von Trier (actuellement diffusé sur le site d’Arte, qui lui consacre une rétrospective), dénote en ce qu’il traite directement l’organisation du travail en insistant sur ses aspects certes absurdes, mais aussi sur la violence latente des rapports de pouvoir dans l’entreprise.

Lars von Trier, coutumier des propos outranciers et polémiques, est un réalisateur plus que controversé. Mais bien plus que ses déclarations ou son attitude ouvertement provocatrice, cette réputation tient autant à l’imagerie violente déployée dans ses films, entre onirisme, crudité, sexualité et troubles mentaux, qu’à leur forme chaque fois expérimentale et travaillant aux confins de genres codifiés (policier, mélodrame, comédie, horreur…), qu’il se plaît à réinventer avec une déroutante originalité.

À ce titre, Le Direktør tranche par son côté faussement léger et badin, documentant avec une ironie cruelle la vie d’une petite entreprise danoise qui va connaître une soudaine crise. Je tiens à montrer, en m’appuyant sur un cadre théorique qui emprunte à la psychosociologie, qu’il s’agit là d’un tableau véritablement clinique de la façon dont le pouvoir opère dans l’organisation du travail contemporain, à la fois insaisissable et diffus, en même temps qu’il se greffe sur les fantasmes et l’imaginaire de chacun pour mieux les enrôler.

Commençons par rappeler brièvement l’intrigue, aussi simple que déconcertante. Ravn, dirigeant d’une PME danoise dans l’informatique en passe d’être rachetée par une société islandaise, recrute Kristoffer, un acteur au chômage, pour incarner un directeur fictif (nommé Sven), inventé de toutes pièces par ce même Ravn pour se couvrir des décisions impopulaires et désastreuses qu’il a été amené à prendre dans la gestion (cupide et malhonnête) de sa propre entreprise – flouant au passage ses propres salariés.

À l’évidence, rien n’est amené à se passer comme prévu. Et Kristoffer découvre, dans un mélange de sidération et d’incrédulité, que son avatar virtuel (en réalité utilisé par Ravn) a tantôt demandé en mariage une employée (pour éviter son départ dans l’entreprise concurrente), suggéré à une autre son homosexualité, conduit un employé au suicide par sa brutalité, et n’a eu de cesse, de manière générale, d’opter pour des décisions toutes plus iniques les unes que les autres.

Il me semble que la question au cœur du film consiste précisément à figurer ce lieu vide du pouvoir, tournant autour de son absence présumée (où est le Directeur de Tout ? Qui est-il ? Existe-t-il vraiment ? Que veut-il ?) ; absence qui se trouve être en réalité le gage de l’efficacité du pouvoir du fait même qu’il devient le réceptacle dans lequel chacun projette ses propres désirs, craintes et espérances.

Au moins deux articles de recherche en théorie des organisations ont été consacrés à ce film de von Trier, se centrant, dans les deux cas sur la question du leadership et de la nature « fictionnelle » du pouvoir.

Le premier article, par Jana Costas, chercheure en comportement organisationnel, insiste sur le rôle du secret et de l’ambiguïté dans les organisations du travail, et notamment le maintien des relations de hiérarchie du fait même du secret détenu par le dirigeant qui exerce ainsi son pouvoir. Si cet aspect du film est bien sûr présent, je ne suis pas certain qu’il soit si prépondérant.

Tout d’abord, il est légitime de considérer que les employés, et c’est d’ailleurs ce que suggère l’une des scènes finales, ne sont pas réellement dupes de la comédie mise en place par Ravn et Kristoffer. Cette hypothèse soulève par ailleurs la question du déni des salariés face à ce stratagème des plus grossiers, interrogeant les raisons motivant chacun à croire à cette affabulation. C’est d’ailleurs la question explicitement soulevée par le second article consacré au film de von Trier, rédigé par Philippe Mairesse et Stéphane Debenedetti : « Les raisons pour lesquelles la fable est acceptée restent incertaines. Si elle répond aux désirs du public, quels sont ces désirs ? »

De ce fait, bien que datant de 2006, le film illustre de manière exemplaire le basculement de formes de travail qui cherchent de plus en plus, comme ont pu le détailler Boltanski et Chiapello dans leur ouvrage, paru en 1999 mais tout à fait actuel, sur le Nouvel esprit du capitalisme, à engager des dispositions plus subjectives, telles que la motivation, les émotions, l’attitude personnelle, l’empathie, voire même le désir – ce que la sociologue Eva Illouz qualifie de « capitalisme émotionnel ». Cette dimension émotionnelle en appelle explicitement aux désirs inconscients, aux fantasmes et fragilités narcissiques de chacun.

Reste que cette dynamique passionnelle impulse des forces contradictoires et explosives dans l’organisation du travail. Ce « Directeur de Tout », à la fois omniprésent et invisible, concentre toute l’hostilité et la haine, à tel point que, acculé face à la véhémence croissante des salariés de l’entreprise à son égard, Kristoffer s’en sort par une pirouette tout à fait absurde, qui consiste rien de moins qu’à inventer un « Directeur du Directeur de Tout » situé aux États-Unis, qui serait donc son supérieur direct et le véritable agent (dans l’ombre) de tous les dysfonctionnements et frustrations ! On ne peut ici manquer de s’interroger sur la part active de déni qui contribue à maintenir cet état de fait : comment se fait-il que la supercherie, si grotesque en soi, ne puisse être reconnue pour ce qu’elle est ?

Dans cette optique, à travers une recension critique du film Tár (2022), publiée pour la revue Organization Studies, j’avais souhaité mettre en avant la dimension « fantasmatique » du pouvoir dans les organisations ; à savoir que, pour se maintenir, perdurer et exercer pleinement ses effets, le pouvoir devait en passer par un effet de séduction, procurant à celui qui s’en sert, autant qu’à ceux et celles qui aspirent à en être les détenteurs, une forme de gratification narcissique qui confine à la jouissance.

Dans le film Tár, Cate Blanchett incarne en effet une cheffe d’orchestre tyrannique éprouvant un malin plaisir à exercer son pouvoir sur ses subordonnées, tirant profit de sa position hiérarchique et des rapports de domination au sein de l’orchestre en vue d’asseoir sa propre identité. The Direktør interroge en revanche plus directement l’effet d’« attraction » du pouvoir sur celles et ceux qui en subissent les effets. Dans le cas décrit par le film, c’est comme si chacun aspirait avant tout à se sentir unique dans la relation qu’il entretien avec ce fameux « Directeur de Tout ».

C’est que selon le chercheur John Roberts, s’appuyant sur les travaux du psychanalyste français Jacques Lacan, le pouvoir opère à la fois comme un miroir et comme un leurre. Chacun y retrouve à souhait une image grandiose de lui-même, canalisant les angoisses concernant son identité et offrant simultanément une forme de réassurance. Bien que prenant la forme d’un leurre, le pouvoir n’exerce pas moins de puissants effets de déformation de la réalité, en particulier par la prégnance du déni qui vise justement à préserver cette image à la fois idéalisée et déformée. Ainsi, chacun conserve à part soi ce lien (faussement) privilégié qu’il pense entretenir avec le « Directeur de Tout », à l’exclusion des autres, alors que tout ceci ne se révèle être qu’une coquille vide.

Miroir grossissant du pouvoir, autant que déformant, et qui n’en tend pas moins un autre miroir – et peu gratifiant celui-là – au spectateur qui assiste au dénouement cruel de cette comédie d’entreprise : Kristoffer, se prenant plus que de raison au jeu de son personnage d’hommes d’affaires intransigeant et disposant des pleins pouvoirs, finit par signer l’acte de vente, livrant à leur sort les employés dès lors licenciés.

Une question reste alors en suspens, en forme d’abîme, comme l’un des fils directeurs qui parcourent non seulement la filmographie de Lars von Trier, mais également la vie des organisations : d’où provient cette fascination par et pour le pouvoir ? Quelles gratifications, souvent inconscientes, s’y trouvent par-là même assouvies – et surtout : quelle est notre responsabilité dans cette mise en scène à laquelle nous prenons part, d’une façon ou d’une autre ? « Aucune leçon, aucune manipulation. Juste un bon moment », prononce von Trier d’une malicieuse voix off au début de son film. Qu’il nous soit permis d’en douter…

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Par Gabriel Lomellini, Assistant Professor, HR and Organizational Behavior, ICN Business School

Santé-Les effets néfastes de la voitures sous-estimés

Santé-Les effets néfastes de la voitures sous-estimés

par
Aurélien Bigo
Chercheur sur la transition énergétique dans les transports, École polytechnique

Kévin Jean
Maître de conférences en épidémiologie, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) dans The Conversation

Depuis le trajet court pour aller à la boulangerie jusqu’au départ en vacances en famille, en passant par les allers-retours au travail, les déplacements sont largement structurés par la voiture en France.

À la fois rapide, permettant des trajets porte-à-porte, confortable, ce mode de transport s’est imposé comme un véritable « couteau suisse » de la mobilité. Au point que la prédominance de la voiture a progressivement marginalisé les autres modes de transport, que ce soit la marche, le vélo, les transports en commun…

Cette situation de dépendance à la voiture est particulièrement présente en dehors du centre des plus grandes villes.

Actuellement, on estime que 80 % à 85 % des ménages français possèdent une voiture, tandis que 35 % en possèdent plusieurs.

La voiture est utilisée pour 72 % des trajets domicile-travail. Lors de ces déplacements, 9 conducteurs sur 10 sont seuls dans leur véhicule.

Enfin, tous trajets confondus, la voiture représente quasiment les deux tiers du nombre de trajets, des temps passés dans les transports ou des kilomètres parcourus par les Français.

Cette dépendance à la voiture nous amène à minimiser ses conséquences, ou à chercher des solutions qui permettent de conserver le système automobile, par exemple la promotion de la voiture électrique, souvent présentée comme « propre » ou « 0 émission », ce qui permet d’éviter de remettre en cause la place de la voiture individuelle dans la mobilité.

Mais cette minimisation touche aussi particulièrement les impacts sanitaires liés à l’usage de la voiture.

Pour désigner les biais culturels et inconscients qui façonnent notre vision des impacts de la voiture, les chercheurs en psychologie Ian Walker, Alan Tapp et Adrian Davis ont forgé le concept de motonormativité (ou motonormativity en anglais).

Ils font l’hypothèse qu’à force de considérer la voiture comme incontournable, ses impacts sur la santé sont minimisés. Pour tester cette hypothèse, ils ont interrogé plus de 2000 adultes vivant au Royaume-Uni. Ils leur ont soumis des affirmations liées à la voiture, et des équivalents en remplaçant les termes de « voiture » ou de « conduite » par un autre objet ou une autre activité.

Les chercheurs ont par exemple demandé aux personnes interrogées si elles étaient d’accord avec la proposition « Les gens ne devraient pas fumer dans les zones densément peuplées où d’autres personnes respirent leurs fumées de cigarette ». Résultat : 75 % d’entre elles acquiescent. En revanche, si l’on remplace « cigarette » par « voiture », l’affirmation devenant « Les gens ne devraient pas conduire dans les zones densément peuplées où d’autres personnes respirent leurs gaz d’échappement », seules 17 % des personnes interrogées sont en accord avec l’affirmation.

Les résultats révèlent donc parfois de fortes différences, qui démontrent une plus grande tolérance aux nuisances provenant de la voiture. Les deux phrases expriment une idée similaire, mais un double standard moral s’applique selon qu’il est question de la voiture, vue comme indispensable, ou de cigarettes où les nuisances seront moins tolérées par la population, car perçues comme non nécessaires.

Cette préférence ne se limite pas à une dimension individuelle mais a des implications plus larges sur les politiques de mobilité, d’aménagement ou de santé.

À titre d’illustration, la publicité pour les cigarettes est interdite depuis 1991 et les paquets vendus sont assortis d’images et de messages particulièrement alarmants. À l’inverse, les publicités automobiles, qui mettent en scène (de manière parfois exagérée, avec des véhicules circulant sur des routes vides) les bénéfices des voitures ne font l’objet d’aucune régulation forte.

Elles ne sont notamment accompagnées d’aucun message explicite sur leurs impacts sanitaires pourtant très significatifs.

La pollution de l’air engendrée par les voitures thermiques est le premier effet négatif de l’usage de la voiture qui vient à l’esprit. Elle ne représente cependant qu’un des effets sanitaires que les voitures provoquent sur la collectivité – ou, pour emprunter au langage économique, des « externalités négatives » de la voiture en matière de santé des populations.

Ainsi, les nuisances sonores engendrées par le trafic routier ont longtemps été sous-estimées. Elles ont pourtant des conséquences sanitaires non négligeables. L’Agence de la transition écologique (Ademe) a même récemment estimé que les coûts sociaux attribuables aux nuisances sonores (dont 55 % provient du trafic routier) seraient supérieurs à ceux attribuables à la pollution atmosphérique.

La préférence donnée à la voiture pour les infrastructures de transports s’est également faite au détriment des modes de transports qui induisent une certaine activité physique : en priorité les modes dits actifs tels que la marche et le vélo, mais aussi indirectement les transports en commun qui nécessitent généralement de la marche durant le trajet. Ainsi le manque d’activité physique, très répandu dans la population française, concerne également le domaine des transports.

Des décennies d’aménagement du territoire dans le but de favoriser la voiture ont également eu pour conséquence une forte consommation d’espace, engendrant une artificialisation des sols, une perte de biodiversité ou encore un façonnage des paysages et de l’urbanisme au profit de la voiture.

Pour une ville comme Paris, il est estimé que 27 % de la surface est allouée aux transports, dont plus de la moitié (57 %) pour la circulation et le stationnement des voitures. Cet espace a été alloué au détriment d’autres aménagements, que ce soit ceux favorables aux autres modes, aux interactions sociales mais aussi aux espaces verts, dont la proximité est associée à un risque réduit de décès. Le rôle des espaces verts est aussi majeur dans l’atténuation des phénomènes d’îlots de chaleur urbaine, qui deviennent plus fréquents et intenses avec le changement climatique.

Enfin, l’accidentalité routière est toujours responsable de plus de 3 000 décès par an en France métropolitaine, ainsi que de 240 000 blessés (dont 16 000 cas graves). Après de forts progrès depuis les années 70, la mortalité routière ne baisse plus depuis une décennie, et concerne à 70 % des accidents impliquant au moins une voiture.

Pollution de l’air, pollution sonore, consommation d’espace, inactivité physique ou encore accidentalité routière sont ainsi de multiples facettes des impacts sanitaires liés à l’usage des transports routiers, et en particulier de la voiture.

On peut encore ajouter à cela d’autres externalités négatives liées à la voiture. Il y a bien sûr l’impact sur le climat (qui aura aussi des effets sur la santé), mais aussi les embouteillages ou encore l’effet de barrière que les grandes infrastructures routières constituent pour les modes actifs (attente ou détour nécessaire pour traverser un axe).

Certes, les autres modes de transport peuvent également générer des nuisances similaires, mais c’est bel et bien la voiture qui en concentre l’écrasante majorité : une étude récente à Munich a ainsi montré que sur les externalités de l’ensemble des modes de déplacements, près de 80 % des coûts étaient liés aux voitures.

Ce « système voiture » est à l’origine d’un cercle vicieux : un aménagement du territoire et des villes centré sur la voiture renforce sa consommation d’espace et marginalise les modes de déplacement actifs (marche et vélo), qui deviennent vulnérables à la dangerosité des voitures, décourageant ainsi ceux qui pourraient opter pour ces modes vertueux du point de vue de l’activité physique. Cette situation maintient en place le système automobile, avec les conséquences sus-mentionnées en matière de climat et de pollutions de l’air ou sonore.

Les enjeux sanitaires liés à la voiture sont nombreux et au cœur d’interactions complexes. De nombreuses politiques publiques peuvent ainsi encourager à aller vers des mobilités moins impactantes pour la santé.

Une solution souvent envisagée en lien avec l’activité physique est celle de la prescription médicale à refaire du sport ou se mettre aux mobilités actives. Mais le rôle des politiques publiques ne peut se résumer à encourager des injonctions individuelles qui peuvent se révéler inopérantes si l’environnement et les aménagements ne le permettent pas.

En effet, en matière de mobilités actives, ce sont les politiques d’aménagement (du territoire, de la voirie, des infrastructures…) qui créent la demande.

Il s’agit donc avant tout d’un enjeu collectif : celui de réduire la place de la voiture dans nos villes et nos vies, de développer les mobilités actives, de transformer les usages de l’espace public, de réduire et contrôler les vitesses de circulation, d’encourager aussi les transports collectifs et les mobilités partagées (covoiturage, autopartage), des véhicules plus sobres ou encore le passage à l’électrique.

À ce sujet, dans le débat actuel concernant la décarbonation des transports, il faut souligner que la solution qui retient le plus d’attention, la voiture électrique, ne réduit que partiellement les impacts néfastes de l’automobile pour la santé publique. Si le passage à l’électrique permet de réduire la pollution de l’air et la pollution sonore (sans non plus les supprimer), il ne répondra pas aux impacts sanitaires liés au manque d’activité physique, à l’accidentalité ou à la consommation d’espace des voitures.

Le défi est vaste, mais heureusement, les leviers sont nombreux et alignés avec les préoccupations environnementales et de mobilités inclusives. Ils doivent tous être sollicités en même temps pour réduire significativement les impacts sévères et généralement sous-estimés de la voiture sur notre santé.

Les effets néfastes de la voitures sous-estimés

Les effets néfastes de la voitures sous-estimés

par
Aurélien Bigo
Chercheur sur la transition énergétique dans les transports, École polytechnique

Kévin Jean
Maître de conférences en épidémiologie, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) dans The Conversation

Depuis le trajet court pour aller à la boulangerie jusqu’au départ en vacances en famille, en passant par les allers-retours au travail, les déplacements sont largement structurés par la voiture en France.

À la fois rapide, permettant des trajets porte-à-porte, confortable, ce mode de transport s’est imposé comme un véritable « couteau suisse » de la mobilité. Au point que la prédominance de la voiture a progressivement marginalisé les autres modes de transport, que ce soit la marche, le vélo, les transports en commun…

Cette situation de dépendance à la voiture est particulièrement présente en dehors du centre des plus grandes villes.

Actuellement, on estime que 80 % à 85 % des ménages français possèdent une voiture, tandis que 35 % en possèdent plusieurs.

La voiture est utilisée pour 72 % des trajets domicile-travail. Lors de ces déplacements, 9 conducteurs sur 10 sont seuls dans leur véhicule.

Enfin, tous trajets confondus, la voiture représente quasiment les deux tiers du nombre de trajets, des temps passés dans les transports ou des kilomètres parcourus par les Français.

Cette dépendance à la voiture nous amène à minimiser ses conséquences, ou à chercher des solutions qui permettent de conserver le système automobile, par exemple la promotion de la voiture électrique, souvent présentée comme « propre » ou « 0 émission », ce qui permet d’éviter de remettre en cause la place de la voiture individuelle dans la mobilité.

Mais cette minimisation touche aussi particulièrement les impacts sanitaires liés à l’usage de la voiture.

Pour désigner les biais culturels et inconscients qui façonnent notre vision des impacts de la voiture, les chercheurs en psychologie Ian Walker, Alan Tapp et Adrian Davis ont forgé le concept de motonormativité (ou motonormativity en anglais).

Ils font l’hypothèse qu’à force de considérer la voiture comme incontournable, ses impacts sur la santé sont minimisés. Pour tester cette hypothèse, ils ont interrogé plus de 2000 adultes vivant au Royaume-Uni. Ils leur ont soumis des affirmations liées à la voiture, et des équivalents en remplaçant les termes de « voiture » ou de « conduite » par un autre objet ou une autre activité.

Les chercheurs ont par exemple demandé aux personnes interrogées si elles étaient d’accord avec la proposition « Les gens ne devraient pas fumer dans les zones densément peuplées où d’autres personnes respirent leurs fumées de cigarette ». Résultat : 75 % d’entre elles acquiescent. En revanche, si l’on remplace « cigarette » par « voiture », l’affirmation devenant « Les gens ne devraient pas conduire dans les zones densément peuplées où d’autres personnes respirent leurs gaz d’échappement », seules 17 % des personnes interrogées sont en accord avec l’affirmation.

Les résultats révèlent donc parfois de fortes différences, qui démontrent une plus grande tolérance aux nuisances provenant de la voiture. Les deux phrases expriment une idée similaire, mais un double standard moral s’applique selon qu’il est question de la voiture, vue comme indispensable, ou de cigarettes où les nuisances seront moins tolérées par la population, car perçues comme non nécessaires.

Cette préférence ne se limite pas à une dimension individuelle mais a des implications plus larges sur les politiques de mobilité, d’aménagement ou de santé.

À titre d’illustration, la publicité pour les cigarettes est interdite depuis 1991 et les paquets vendus sont assortis d’images et de messages particulièrement alarmants. À l’inverse, les publicités automobiles, qui mettent en scène (de manière parfois exagérée, avec des véhicules circulant sur des routes vides) les bénéfices des voitures ne font l’objet d’aucune régulation forte.

Elles ne sont notamment accompagnées d’aucun message explicite sur leurs impacts sanitaires pourtant très significatifs.

La pollution de l’air engendrée par les voitures thermiques est le premier effet négatif de l’usage de la voiture qui vient à l’esprit. Elle ne représente cependant qu’un des effets sanitaires que les voitures provoquent sur la collectivité – ou, pour emprunter au langage économique, des « externalités négatives » de la voiture en matière de santé des populations.

Ainsi, les nuisances sonores engendrées par le trafic routier ont longtemps été sous-estimées. Elles ont pourtant des conséquences sanitaires non négligeables. L’Agence de la transition écologique (Ademe) a même récemment estimé que les coûts sociaux attribuables aux nuisances sonores (dont 55 % provient du trafic routier) seraient supérieurs à ceux attribuables à la pollution atmosphérique.

La préférence donnée à la voiture pour les infrastructures de transports s’est également faite au détriment des modes de transports qui induisent une certaine activité physique : en priorité les modes dits actifs tels que la marche et le vélo, mais aussi indirectement les transports en commun qui nécessitent généralement de la marche durant le trajet. Ainsi le manque d’activité physique, très répandu dans la population française, concerne également le domaine des transports.

Des décennies d’aménagement du territoire dans le but de favoriser la voiture ont également eu pour conséquence une forte consommation d’espace, engendrant une artificialisation des sols, une perte de biodiversité ou encore un façonnage des paysages et de l’urbanisme au profit de la voiture.

Pour une ville comme Paris, il est estimé que 27 % de la surface est allouée aux transports, dont plus de la moitié (57 %) pour la circulation et le stationnement des voitures. Cet espace a été alloué au détriment d’autres aménagements, que ce soit ceux favorables aux autres modes, aux interactions sociales mais aussi aux espaces verts, dont la proximité est associée à un risque réduit de décès. Le rôle des espaces verts est aussi majeur dans l’atténuation des phénomènes d’îlots de chaleur urbaine, qui deviennent plus fréquents et intenses avec le changement climatique.

Enfin, l’accidentalité routière est toujours responsable de plus de 3 000 décès par an en France métropolitaine, ainsi que de 240 000 blessés (dont 16 000 cas graves). Après de forts progrès depuis les années 70, la mortalité routière ne baisse plus depuis une décennie, et concerne à 70 % des accidents impliquant au moins une voiture.

Pollution de l’air, pollution sonore, consommation d’espace, inactivité physique ou encore accidentalité routière sont ainsi de multiples facettes des impacts sanitaires liés à l’usage des transports routiers, et en particulier de la voiture.

On peut encore ajouter à cela d’autres externalités négatives liées à la voiture. Il y a bien sûr l’impact sur le climat (qui aura aussi des effets sur la santé), mais aussi les embouteillages ou encore l’effet de barrière que les grandes infrastructures routières constituent pour les modes actifs (attente ou détour nécessaire pour traverser un axe).

Certes, les autres modes de transport peuvent également générer des nuisances similaires, mais c’est bel et bien la voiture qui en concentre l’écrasante majorité : une étude récente à Munich a ainsi montré que sur les externalités de l’ensemble des modes de déplacements, près de 80 % des coûts étaient liés aux voitures.

Ce « système voiture » est à l’origine d’un cercle vicieux : un aménagement du territoire et des villes centré sur la voiture renforce sa consommation d’espace et marginalise les modes de déplacement actifs (marche et vélo), qui deviennent vulnérables à la dangerosité des voitures, décourageant ainsi ceux qui pourraient opter pour ces modes vertueux du point de vue de l’activité physique. Cette situation maintient en place le système automobile, avec les conséquences sus-mentionnées en matière de climat et de pollutions de l’air ou sonore.

Les enjeux sanitaires liés à la voiture sont nombreux et au cœur d’interactions complexes. De nombreuses politiques publiques peuvent ainsi encourager à aller vers des mobilités moins impactantes pour la santé.

Une solution souvent envisagée en lien avec l’activité physique est celle de la prescription médicale à refaire du sport ou se mettre aux mobilités actives. Mais le rôle des politiques publiques ne peut se résumer à encourager des injonctions individuelles qui peuvent se révéler inopérantes si l’environnement et les aménagements ne le permettent pas.

En effet, en matière de mobilités actives, ce sont les politiques d’aménagement (du territoire, de la voirie, des infrastructures…) qui créent la demande.

Il s’agit donc avant tout d’un enjeu collectif : celui de réduire la place de la voiture dans nos villes et nos vies, de développer les mobilités actives, de transformer les usages de l’espace public, de réduire et contrôler les vitesses de circulation, d’encourager aussi les transports collectifs et les mobilités partagées (covoiturage, autopartage), des véhicules plus sobres ou encore le passage à l’électrique.

À ce sujet, dans le débat actuel concernant la décarbonation des transports, il faut souligner que la solution qui retient le plus d’attention, la voiture électrique, ne réduit que partiellement les impacts néfastes de l’automobile pour la santé publique. Si le passage à l’électrique permet de réduire la pollution de l’air et la pollution sonore (sans non plus les supprimer), il ne répondra pas aux impacts sanitaires liés au manque d’activité physique, à l’accidentalité ou à la consommation d’espace des voitures.

Le défi est vaste, mais heureusement, les leviers sont nombreux et alignés avec les préoccupations environnementales et de mobilités inclusives. Ils doivent tous être sollicités en même temps pour réduire significativement les impacts sévères et généralement sous-estimés de la voiture sur notre santé.

Quels effets du bruit des éoliennes

Quels effets du bruit des éoliennes ?
par
Anne-Sophie Evrard
Chargée de recherche en épidémiologie, Université Gustave Eiffel

David Ecotière
Chercheur en acoustique environnementale – Directeur adjoint de l’Unité Mixte de Recherche en Acoustique Environnementale (UMRAE), Cerema dans the Conversation

Le bruit représente un problème majeur pour la santé publique. Il constitue selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) le deuxième facteur de risque environnemental en Europe en termes de morbidité, derrière la pollution de l’air.

Ainsi, en Europe occidentale plus d’un million d’années de vie vécues avec de l’incapacité sont comptabilisées chaque année à cause du bruit des transports, dont les effets avérés avec suffisamment d’éléments de preuve sont les perturbations du sommeil, la gêne, les risques cardiovasculaires accrus, et les difficultés d’apprentissage.

Si les impacts sanitaires du bruit des transports ont été abondamment étudiés, il n’en va cependant pas de même pour d’autres sources de bruit environnemental. C’est notamment le cas des parcs éoliens, qui connaissent un développement important en France et dans de nombreux autres pays. Avec l’impact sur le paysage, les nuisances sonores des éoliennes sont l’un des arguments le plus souvent mis en avant par les opposants à ces installations.

Néanmoins, les informations véhiculées dans la sphère publique, en particulier sur Internet, concernant la réalité des impacts de ce type de bruit et de ses effets apparaissent souvent en décalage par rapport aux connaissances qui font consensus dans la communauté scientifique. Mais quelles sont-elles ?

Comparativement à de nombreuses autres sources de bruit environnemental, d’origine humaine ou naturelle, les niveaux de bruit générés par un parc éolien sont très modérés. À l’extérieur du logement d’un riverain, ils dépassent rarement 40 dBA, soit l’équivalent du niveau de bruit dans un bureau calme.

À titre de comparaison, le niveau de bruit des transports en façade du logement d’un riverain peut aller au-delà de 70 dBA (niveau sonore seuil d’un Point Noir Bruit routier le jour).

En dépit de ces niveaux très modérés, les riverains expriment parfois une gêne due au bruit des éoliennes. Plusieurs raisons peuvent l’expliquer.

Rappelons tout d’abord que l’échelle des décibels est une échelle logarithmique, ce qui signifie que 3 décibels supplémentaires équivalent à un doublement de l’énergie sonore, et que 10 décibels supplémentaires multiplient celle-ci par 10. Cependant, si la gêne due au bruit augmente avec le niveau d’exposition sonore, son évolution ne suit généralement pas de loi simple et dépend de chaque source de bruit et de ses caractéristiques (bruit permanent, bruit impulsionnel, bruit grave/aigu, etc.).

Dans le cas du bruit généré par les éoliennes, les parcs éoliens sont situés dans des environnements essentiellement ruraux. Le bruit de fond local relativement bas de ces sites peut donc favoriser la perception du bruit émis.

La gêne rapportée pourrait aussi en partie résulter des caractéristiques particulières du signal sonore généré par les éoliennes. Il s’agit en effet d’un bruit continu, pouvant parfois présenter des tonalités marquées (bruit mécanique dans la nacelle, état de surface dégradé des pales). Ces dernières sont cependant généralement le signe d’un dysfonctionnement de l’éolienne, qui peut être corrigé.

Lorsque les pales des éoliennes sont en fonctionnement, des phénomènes de « modulation d’amplitude » peuvent aussi se produire et être à l’origine d’une gêne. Ces modulations se traduisent par des fluctuations du niveau sonore au cours du temps (de l’ordre de la seconde), dont l’origine n’est pas encore clairement établie. Plusieurs pistes d’explication sont avancées et font l’objet de recherches.

Elles pourraient provenir par exemple de phénomènes de décrochage de l’écoulement de l’air autour des pales, de conditions météorologiques particulières influençant la propagation sonore, d’une directivité sonore spécifique des sources de bruit au niveau des pales en mouvement, ou encore d’interactions entre le son provenant de ces dernières et le sol.

Enfin, le bruit éolien comporte également des composantes basses fréquences (20-200 Hz, audibles) ou infrasonores (fréquences inférieures à 20 Hz, généralement considérées comme inaudibles) qui se propagent sur des distances plus importantes que des sons de fréquences supérieures. Bien que prédominants dans le spectre éolien, les infrasons générés par un parc éolien restent cependant très en deçà des seuils de perception humains connus.

Si l’existence de ces divers phénomènes est bien connue, les scientifiques s’interrogent actuellement sur la façon de les modéliser et de les intégrer dans les méthodes de prévision du bruit existantes.

Ainsi, pour progresser vers une meilleure connaissance des phénomènes physiques et mieux maîtriser le bruit émis par les éoliennes, le projet de recherche PIBE a été mis en place. Il se déploie selon trois axes : caractériser et modéliser les phénomènes de modulation d’amplitude, estimer la variabilité des niveaux sonores (en évaluant notamment l’influence de la micrométéorologie locale sur l’émission sonore au niveau des pales et sur la propagation du son), et concevoir des systèmes pour minimiser le bruit produit par les pales.

Afin d’évaluer les enjeux de santé publique que représente l’exposition aux émissions sonores des éoliennes, deux paramètres doivent être pris en compte : le nombre de personnes concernées, et la sévérité de l’effet du bruit des éoliennes sur la santé s’ils sont démontrés.

Une étude récente de l’exposition de la population de France métropolitaine au bruit éolien indique que plus de 80 % de la population exposée l’est à des niveaux inférieurs à 40 dBA.

En 2017, année de référence de l’étude, la part de la population de France métropolitaine exposée au-delà de cette valeur variait de 0,08 % (conditions nocturnes) à 0,18 % (conditions diurnes), en fonction des conditions de propagation.

À titre de comparaison, pour cette même année, la part de population de France métropolitaine exposée à plus de 40 dBA en condition nocturne était de 15 % pour le bruit routier, 7 % pour le bruit ferroviaire et de 0,7 % pour le bruit aérien.

Des articles récents synthétisant les connaissances actuelles font état d’une absence de preuves d’effets du bruit éolien sur la santé humaine, hormis en ce qui concerne la gêne.

La plupart des études disponibles ont trouvé une association positive significative entre les niveaux de bruit émis par les éoliennes et le pourcentage de personnes très gênées. En outre, à niveau sonore équivalent, le bruit engendré par les éoliennes peut être perçu comme plus gênant que celui provenant d’autres sources de bruit (de transports notamment), en raison de certaines caractéristiques acoustiques du signal sonore décrites précédemment, notamment l’existence possible d’une modulation de l’amplitude du signal.

Cependant, les seules propriétés acoustiques du bruit émis par les éoliennes n’expliquent pas l’intégralité de la gêne. En effet, celle-ci peut également dépendre d’autres facteurs non acoustiques comme la visibilité du parc éolien, l’attitude des personnes exposées envers celui-ci, ou un lien d’intérêt particulier qu’entretiendrait un riverain avec le parc (intérêt pécuniaire par exemple).

Très peu d’études ont examiné les effets du bruit éolien sur les perturbations du sommeil, les maladies cardiovasculaires, les systèmes métaboliques ou endocriniens, la cognition ou la santé mentale. L’OMS souligne donc que les preuves concernant les effets du bruit éolien sur la santé sont soit inexistantes, soit de faible qualité.

Les émissions de bruit basses fréquences ou infrasonores provenant des éoliennes sont souvent évoquées comme source potentielle de risque sur la santé humaine ou animale.

Cependant, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), dans un avis de 2017, ainsi que des travaux internationaux plus récents concluent à l’absence d’argument scientifique suffisant en faveur de l’existence d’effets sanitaires liés à ces émissions et au manque d’études sur le sujet.

Cet avis indique toutefois que de réelles situations de mal-être peuvent être rapportées par des riverains, mais que leur imputabilité au bruit des éoliennes est complexe et reste très souvent difficile à établir.

Si certaines théories relayées par des opposants (« Syndrome éolien » et « Vibro Acoustic Disease ») ont été jugées peu crédibles par cet avis, d’autres mécanismes d’effets restent à explorer, comme ceux qui pourraient concerner le système cochléo-vestibulaire et être à l’origine d’effets physiopathologiques. Situé dans l’oreille interne, ce système sensoriel contribue à la sensation de mouvement et à l’équilibre. On sait qu’il a une sensibilité particulière aux basses fréquences et aux infrasons.

Toutefois, si certains effets cellulaires ont été observés sur des animaux de laboratoire via des sons purs et intenses (mais n’équivalant pas forcément à un son de très basse fréquence chez l’être humain), leur existence reste à démontrer dans le cas humain et pour des expositions sonores similaires à celles des éoliennes (sons complexes, de moindre intensité sonore, mais de durée prolongée).

De tels effets pourraient apporter une explication à la gêne exprimée, qui serait parfois plus sévère que ne le laisseraient prévoir les estimations et mesures du champ acoustique, ou les connaissances établies concernant la sensibilité aux infrasons ou sons basses fréquences.

Comprendre les effets sur la santé du bruit des éoliennes, notamment des infrasons
Afin de pallier le manque actuel de connaissances, l’Organisation mondiale de la santé et, en France, l’Anses, ont recommandé la mise en œuvre d’études épidémiologiques portant sur un nombre important d’individus, utilisant des mesures objectives de l’état de santé des participants, et mesurant l’exposition au bruit des éoliennes de manière objective et standardisée pour un large éventail de niveaux sonores et de fréquences (en incluant les sons de basse fréquence et les infrasons).

Le projet de recherche français « RIBEolH » (Recherche des Impacts du Bruit EOLien sur l’Humain : son, perception, santé) a été mis en place pour répondre à ce besoin. En cours de réalisation, il a plusieurs objectifs :

Évaluer les effets sur la santé du bruit audible, des sons de basse fréquence ou des infrasons, émis par les éoliennes, et de mieux comprendre la gêne exprimée par certains riverains ;

Identifier les mécanismes auditifs associés à la perception des infrasons et des sons de basse fréquence émis par les éoliennes ;

Mieux connaître les effets des infrasons sur l’oreille interne ou le système nerveux central humains.

Pour y parvenir, le projet s’appuie sur deux volets complémentaires : une étude épidémiologique menée auprès de 1200 riverains de parcs éoliens en France et une étude psychoacoustique et physiologique.

Cette seconde étude consistera en la réalisation en laboratoire de mesures psychoacoustiques et physiologiques dans un environnement maîtrisé à l’aide de sons d’éoliennes mesurés ou synthétisés par un modèle physique pour différentes conditions de fonctionnement de ces éoliennes. Elle permettra de déterminer les paramètres qui ont un rôle important dans les effets du bruit émis par les éoliennes sur la sensation auditive et la gêne.

Un autre projet, appelé « EOLSOMnie » est destiné à mieux comprendre les effets du bruit des éoliennes sur le sommeil. Il consiste à mener une étude spécifique portant sur le sommeil auprès d’un sous-échantillon d’une centaine de participants à l’étude épidémiologique incluse dans le projet RIBEolH.

L’objectif est d’évaluer les effets du bruit audible émis par les éoliennes sur les paramètres individuels de sommeil et de déterminer si les sons de basse fréquence et les infrasons produits par les éoliennes modifient la physiologie du sommeil.

Les résultats de ces deux projets permettront d’alimenter de futurs travaux qui pourraient porter sur la préconisation de seuils de bruit applicables dans le cadre du développement éolien, et pour lequel les connaissances font actuellement défaut.

Mieux connaître les impacts du bruit émis par les éoliennes permettra de mieux les maîtriser, et de fournir un meilleur accompagnement du développement de l’énergie éolienne dans le respect de tous. Une étape importante pour pouvoir développer dans les meilleures conditions cette énergie renouvelable, dans le cadre de l’indispensable tr

Quels effets du bruit des éoliennes

Quels effets du bruit des éoliennes ?
par
Anne-Sophie Evrard
Chargée de recherche en épidémiologie, Université Gustave Eiffel

David Ecotière
Chercheur en acoustique environnementale – Directeur adjoint de l’Unité Mixte de Recherche en Acoustique Environnementale (UMRAE), Cerema dans the Conversation

Le bruit représente un problème majeur pour la santé publique. Il constitue selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) le deuxième facteur de risque environnemental en Europe en termes de morbidité, derrière la pollution de l’air.

Ainsi, en Europe occidentale plus d’un million d’années de vie vécues avec de l’incapacité sont comptabilisées chaque année à cause du bruit des transports, dont les effets avérés avec suffisamment d’éléments de preuve sont les perturbations du sommeil, la gêne, les risques cardiovasculaires accrus, et les difficultés d’apprentissage.

Si les impacts sanitaires du bruit des transports ont été abondamment étudiés, il n’en va cependant pas de même pour d’autres sources de bruit environnemental. C’est notamment le cas des parcs éoliens, qui connaissent un développement important en France et dans de nombreux autres pays. Avec l’impact sur le paysage, les nuisances sonores des éoliennes sont l’un des arguments le plus souvent mis en avant par les opposants à ces installations.

Néanmoins, les informations véhiculées dans la sphère publique, en particulier sur Internet, concernant la réalité des impacts de ce type de bruit et de ses effets apparaissent souvent en décalage par rapport aux connaissances qui font consensus dans la communauté scientifique. Mais quelles sont-elles ?

Comparativement à de nombreuses autres sources de bruit environnemental, d’origine humaine ou naturelle, les niveaux de bruit générés par un parc éolien sont très modérés. À l’extérieur du logement d’un riverain, ils dépassent rarement 40 dBA, soit l’équivalent du niveau de bruit dans un bureau calme.

À titre de comparaison, le niveau de bruit des transports en façade du logement d’un riverain peut aller au-delà de 70 dBA (niveau sonore seuil d’un Point Noir Bruit routier le jour).

En dépit de ces niveaux très modérés, les riverains expriment parfois une gêne due au bruit des éoliennes. Plusieurs raisons peuvent l’expliquer.

Rappelons tout d’abord que l’échelle des décibels est une échelle logarithmique, ce qui signifie que 3 décibels supplémentaires équivalent à un doublement de l’énergie sonore, et que 10 décibels supplémentaires multiplient celle-ci par 10. Cependant, si la gêne due au bruit augmente avec le niveau d’exposition sonore, son évolution ne suit généralement pas de loi simple et dépend de chaque source de bruit et de ses caractéristiques (bruit permanent, bruit impulsionnel, bruit grave/aigu, etc.).

Dans le cas du bruit généré par les éoliennes, les parcs éoliens sont situés dans des environnements essentiellement ruraux. Le bruit de fond local relativement bas de ces sites peut donc favoriser la perception du bruit émis.

La gêne rapportée pourrait aussi en partie résulter des caractéristiques particulières du signal sonore généré par les éoliennes. Il s’agit en effet d’un bruit continu, pouvant parfois présenter des tonalités marquées (bruit mécanique dans la nacelle, état de surface dégradé des pales). Ces dernières sont cependant généralement le signe d’un dysfonctionnement de l’éolienne, qui peut être corrigé.

Lorsque les pales des éoliennes sont en fonctionnement, des phénomènes de « modulation d’amplitude » peuvent aussi se produire et être à l’origine d’une gêne. Ces modulations se traduisent par des fluctuations du niveau sonore au cours du temps (de l’ordre de la seconde), dont l’origine n’est pas encore clairement établie. Plusieurs pistes d’explication sont avancées et font l’objet de recherches.

Elles pourraient provenir par exemple de phénomènes de décrochage de l’écoulement de l’air autour des pales, de conditions météorologiques particulières influençant la propagation sonore, d’une directivité sonore spécifique des sources de bruit au niveau des pales en mouvement, ou encore d’interactions entre le son provenant de ces dernières et le sol.

Enfin, le bruit éolien comporte également des composantes basses fréquences (20-200 Hz, audibles) ou infrasonores (fréquences inférieures à 20 Hz, généralement considérées comme inaudibles) qui se propagent sur des distances plus importantes que des sons de fréquences supérieures. Bien que prédominants dans le spectre éolien, les infrasons générés par un parc éolien restent cependant très en deçà des seuils de perception humains connus.

Si l’existence de ces divers phénomènes est bien connue, les scientifiques s’interrogent actuellement sur la façon de les modéliser et de les intégrer dans les méthodes de prévision du bruit existantes.

Ainsi, pour progresser vers une meilleure connaissance des phénomènes physiques et mieux maîtriser le bruit émis par les éoliennes, le projet de recherche PIBE a été mis en place. Il se déploie selon trois axes : caractériser et modéliser les phénomènes de modulation d’amplitude, estimer la variabilité des niveaux sonores (en évaluant notamment l’influence de la micrométéorologie locale sur l’émission sonore au niveau des pales et sur la propagation du son), et concevoir des systèmes pour minimiser le bruit produit par les pales.

Afin d’évaluer les enjeux de santé publique que représente l’exposition aux émissions sonores des éoliennes, deux paramètres doivent être pris en compte : le nombre de personnes concernées, et la sévérité de l’effet du bruit des éoliennes sur la santé s’ils sont démontrés.

Une étude récente de l’exposition de la population de France métropolitaine au bruit éolien indique que plus de 80 % de la population exposée l’est à des niveaux inférieurs à 40 dBA.

En 2017, année de référence de l’étude, la part de la population de France métropolitaine exposée au-delà de cette valeur variait de 0,08 % (conditions nocturnes) à 0,18 % (conditions diurnes), en fonction des conditions de propagation.

À titre de comparaison, pour cette même année, la part de population de France métropolitaine exposée à plus de 40 dBA en condition nocturne était de 15 % pour le bruit routier, 7 % pour le bruit ferroviaire et de 0,7 % pour le bruit aérien.

Des articles récents synthétisant les connaissances actuelles font état d’une absence de preuves d’effets du bruit éolien sur la santé humaine, hormis en ce qui concerne la gêne.

La plupart des études disponibles ont trouvé une association positive significative entre les niveaux de bruit émis par les éoliennes et le pourcentage de personnes très gênées. En outre, à niveau sonore équivalent, le bruit engendré par les éoliennes peut être perçu comme plus gênant que celui provenant d’autres sources de bruit (de transports notamment), en raison de certaines caractéristiques acoustiques du signal sonore décrites précédemment, notamment l’existence possible d’une modulation de l’amplitude du signal.

Cependant, les seules propriétés acoustiques du bruit émis par les éoliennes n’expliquent pas l’intégralité de la gêne. En effet, celle-ci peut également dépendre d’autres facteurs non acoustiques comme la visibilité du parc éolien, l’attitude des personnes exposées envers celui-ci, ou un lien d’intérêt particulier qu’entretiendrait un riverain avec le parc (intérêt pécuniaire par exemple).

Très peu d’études ont examiné les effets du bruit éolien sur les perturbations du sommeil, les maladies cardiovasculaires, les systèmes métaboliques ou endocriniens, la cognition ou la santé mentale. L’OMS souligne donc que les preuves concernant les effets du bruit éolien sur la santé sont soit inexistantes, soit de faible qualité.

Les émissions de bruit basses fréquences ou infrasonores provenant des éoliennes sont souvent évoquées comme source potentielle de risque sur la santé humaine ou animale.

Cependant, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), dans un avis de 2017, ainsi que des travaux internationaux plus récents concluent à l’absence d’argument scientifique suffisant en faveur de l’existence d’effets sanitaires liés à ces émissions et au manque d’études sur le sujet.

Cet avis indique toutefois que de réelles situations de mal-être peuvent être rapportées par des riverains, mais que leur imputabilité au bruit des éoliennes est complexe et reste très souvent difficile à établir.

Si certaines théories relayées par des opposants (« Syndrome éolien » et « Vibro Acoustic Disease ») ont été jugées peu crédibles par cet avis, d’autres mécanismes d’effets restent à explorer, comme ceux qui pourraient concerner le système cochléo-vestibulaire et être à l’origine d’effets physiopathologiques. Situé dans l’oreille interne, ce système sensoriel contribue à la sensation de mouvement et à l’équilibre. On sait qu’il a une sensibilité particulière aux basses fréquences et aux infrasons.

Toutefois, si certains effets cellulaires ont été observés sur des animaux de laboratoire via des sons purs et intenses (mais n’équivalant pas forcément à un son de très basse fréquence chez l’être humain), leur existence reste à démontrer dans le cas humain et pour des expositions sonores similaires à celles des éoliennes (sons complexes, de moindre intensité sonore, mais de durée prolongée).

De tels effets pourraient apporter une explication à la gêne exprimée, qui serait parfois plus sévère que ne le laisseraient prévoir les estimations et mesures du champ acoustique, ou les connaissances établies concernant la sensibilité aux infrasons ou sons basses fréquences.

Comprendre les effets sur la santé du bruit des éoliennes, notamment des infrasons
Afin de pallier le manque actuel de connaissances, l’Organisation mondiale de la santé et, en France, l’Anses, ont recommandé la mise en œuvre d’études épidémiologiques portant sur un nombre important d’individus, utilisant des mesures objectives de l’état de santé des participants, et mesurant l’exposition au bruit des éoliennes de manière objective et standardisée pour un large éventail de niveaux sonores et de fréquences (en incluant les sons de basse fréquence et les infrasons).

Le projet de recherche français « RIBEolH » (Recherche des Impacts du Bruit EOLien sur l’Humain : son, perception, santé) a été mis en place pour répondre à ce besoin. En cours de réalisation, il a plusieurs objectifs :

Évaluer les effets sur la santé du bruit audible, des sons de basse fréquence ou des infrasons, émis par les éoliennes, et de mieux comprendre la gêne exprimée par certains riverains ;

Identifier les mécanismes auditifs associés à la perception des infrasons et des sons de basse fréquence émis par les éoliennes ;

Mieux connaître les effets des infrasons sur l’oreille interne ou le système nerveux central humains.

Pour y parvenir, le projet s’appuie sur deux volets complémentaires : une étude épidémiologique menée auprès de 1200 riverains de parcs éoliens en France et une étude psychoacoustique et physiologique.

Cette seconde étude consistera en la réalisation en laboratoire de mesures psychoacoustiques et physiologiques dans un environnement maîtrisé à l’aide de sons d’éoliennes mesurés ou synthétisés par un modèle physique pour différentes conditions de fonctionnement de ces éoliennes. Elle permettra de déterminer les paramètres qui ont un rôle important dans les effets du bruit émis par les éoliennes sur la sensation auditive et la gêne.

Évaluer les conséquences du bruit des éoliennes sur le sommeil
Un autre projet, appelé « EOLSOMnie » est destiné à mieux comprendre les effets du bruit des éoliennes sur le sommeil. Il consiste à mener une étude spécifique portant sur le sommeil auprès d’un sous-échantillon d’une centaine de participants à l’étude épidémiologique incluse dans le projet RIBEolH.

L’objectif est d’évaluer les effets du bruit audible émis par les éoliennes sur les paramètres individuels de sommeil et de déterminer si les sons de basse fréquence et les infrasons produits par les éoliennes modifient la physiologie du sommeil.

Les résultats de ces deux projets permettront d’alimenter de futurs travaux qui pourraient porter sur la préconisation de seuils de bruit applicables dans le cadre du développement éolien, et pour lequel les connaissances font actuellement défaut.

Mieux connaître les impacts du bruit émis par les éoliennes permettra de mieux les maîtriser, et de fournir un meilleur accompagnement du développement de l’énergie éolienne dans le respect de tous. Une étape importante pour pouvoir développer dans les meilleures conditions cette énergie renouvelable, dans le cadre de l’indispensable transition énergétique en cours.

Eau: effets pervers du stockage

Eau:  effets pervers du stockage

 Le stockage de l’eau dans des réservoirs est aujourd’hui la principale réponse aux sécheresses : elle n’est pourtant pas toujours efficace voire peut accroître la dépendance à l’eau. Par Florence Habets, École normale supérieure (ENS) – PSL

 

Les vagues de chaleur et de sécheresse sans précédent en France et plus largement en Europe continentale, avec une succession d’incendies et assèchement des nappes phréatiques seront, selon les projections des hydrologues, de plus en plus fréquentes, voire la « nouvelle norme ». Ces phénomènes, qui s’accélèrent, sont par ailleurs constatés dans différentes régions du monde.

On entend par sécheresse un déficit en eau par rapport à une situation normale : elle peut se traduire par le niveau des précipitations, de l’eau du sol ou des débits. On parle alors de sécheresses météorologiques, agronomiques ou hydrologiques, les trois pouvant se produire en même temps, mais ayant souvent une dynamique propre.

Ces phénomènes sont directement impactés par le dérèglement climatique, et on anticipe dans le futur des sécheresses plus fréquentes, plus étendues et plus intenses sur une grande partie du globe, et tout particulièrement en France.

Pour lutter contre les sécheresses, le stockage de l’eau est souvent prôné comme une solution. L’idée est de faire des réserves avec l’eau disponible en périodes pluvieuses (hiver) afin d’en conserver pour des usages ultérieurs (en été).

Cela se traduit notamment par la volonté de construire des barrages ou réservoirs, comme l’indiquent les projets dits de territoires, visant à stocker de l’eau et à la partager dans une même zone.

Le monde compterait plus de 16 millions de barrages, totalisant une capacité de stockage estimée entre 7 000 et 10 000 km³. Soit 2 à 3 fois les volumes d’eau contenus dans les rivières du globe.

Les quantités stockées ont fortement augmenté depuis le début du XXe siècle, afin de répondre à une demande croissante d’eau pour les activités humaines. Cela a permis d’étudier l’impact de ces retenues, à la fois sur la ressource et sur la demande, et d’identifier des conséquences sur l’occurrence de sécheresses.

En stockant de l’eau durant les périodes d’abondance pour en favoriser l’usage lors des périodes de basses eaux, les retenues permettent de réduire l’impact de nombreuses crues et sécheresses.

Cette efficacité est toutefois limitée aux événements peu intenses. De fait, de nombreuses études montrent que l’efficacité des barrages est très réduite pour les sécheresses longues (comme, par exemple, dans la péninsule ibérique, en Autriche ou aux États-Unis).

Au Nord de la Chine, durant les 30 dernières années, les activités humaines ont amplifié la sévérité et la durée des sécheresses – certaines durant jusqu’à plus de deux ans. En Espagne, l’analyse des sécheresses entre 1945 et 2005 a mis en évidence que les épisodes secs les plus sévères et les plus longs avaient lieu sur les bassins les plus régulés par la présence de barrages. Cela conduit en outre à un renforcement des sécheresses à l’aval des bassins.

Il apparaît ainsi que la création de grands volumes de stockage d’eau pour l’irrigation ne permet pas d’assurer une alimentation en eau lors des longues sécheresses, du fait à la fois de la difficulté à remplir les barrages et d’un usage de l’eau supérieur à la ressource.

L’amplification des sécheresses par les activités humaines est si marquée qu’a émergé la notion de sécheresse « anthropique » : elle implique uniquement les épisodes secs dus aux prélèvements et à la gestion par des réservoirs, indépendamment des conditions climatiques.

Il ne s’agit pas que d’une fatalité, liée à un besoin en eau, mais d’un cercle vicieux : un déficit en eau – c’est-à-dire un usage de l’eau supérieur à la ressource – conduit à des dégâts socio-économiques et génère une pression pour créer de nouveaux stocks d’eau : on augmente alors les réservoirs et les volumes stockés.

Mais ce gain de réserves est en fait compensé par une augmentation des usages : par exemple, l’augmentation des surfaces irriguées ou la croissance démographique qui élève la consommation en eau potable. Ces évolutions sont aggravées par des facteurs climatiques qui évoluent. De nouveaux déficits en eau apparaissent alors, et avec eux d’autres dégâts socioéconomiques.

Plutôt que de développer des stratégies de réduction des consommations, on induit une dépendance accrue aux infrastructures d’approvisionnement en eau : ce qui renforce la vulnérabilité et les dégâts économiques en cas de pénurie d’eau.

Or, le changement climatique implique de façon quasi-certaine la multiplication de ces carences.

Des études s’intéressent spécifiquement aux impacts de la gestion de l’eau sur les futures sécheresses à l’échelle globale. Mais elles n’intègrent pas ce mécanisme de cercle vicieux, et anticipent donc un nombre de réservoirs constant dans le temps. Seuls les volumes pour l’irrigation varient en fonction du climat. Dans ce contexte, qui ne tient pas compte de l’évolution des besoins en eau potable, les aménagements humains permettront de réduire de 10 % la hausse des sécheresses agronomiques, c’est-à-dire, le déficit d’eau dans les sols, mais conduiront à une augmentation de 50 % de l’intensité des sécheresses en rivière

 

La multiplication des retenues d’eau nuit à leur fonctionnalité, en limitant leur capacité de remplissage, puisqu’elles sont plus nombreuses à partager une même ressource limitée. Même si ces réservoirs ne font pas l’objet de prélèvement pour des activités humaines, ils connaissent des pertes par évaporation, ce qui réduit la ressource en eau.

Ces facteurs sont particulièrement aggravés lors de sécheresses longues, événements malheureusement voués à devenir plus fréquents dans le contexte du dérèglement climatique. Toutes les actions de réduction de la consommation en eau seront bénéfiques pour diminuer notre vulnérabilité lors de ces événements.

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Par Florence Habets, Directrice de recherche CNRS en hydrométéorologie, professeure, École normale supérieure (ENS) – PSL.

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

L’Ukraine et les effets pervers de la démondialisation

Les effets pervers de la démondialisation

La perspective d’une crise alimentaire provoquée par l’invasion russe de l’Ukraine, après deux ans de pandémie de Covid-19, pourrait plonger le monde dans une vague protectionniste, s’inquiète dans sa chronique Gilles Paris, éditorialiste au « Monde ».

 

Il est devenu banal de déplorer que « le monde d’après » volontariste et optimiste évoqué pendant la pandémie de Covid-19 ressemble à s’y méprendre au « monde d’avant ». A l’aune de la catastrophe provoquée par l’invasion russe de l’Ukraine, on ne peut que constater que ce ne sera sans doute pas le cas : il risque d’être bien pire. En témoigne la bombe à retardement que constitue le blocus russe interdisant l’exportation de céréales ukrainiennes. Ces dernières sont vitales pour de nombreux pays d’Afrique et du Moyen-Orient. Leur immobilisation génère en outre des tensions sur les cours mondiaux, sans parler de celles sur les engrais provoquées par la guerre.

Depuis des semaines désormais, les cris d’alarme résonnent dans le vide. Le président russe, Vladimir Poutine, esquive et professe une bonne volonté que dément sa détermination à faire la guerre, coûte que coûte. Au point que, pour l’historien Timothy Snyder, l’auteur du livre Terres de sang (Gallimard, 2012) consacré aux crimes de masse perpétrés par l’Allemagne nazie et la Russie stalinienne en Europe orientale, le doute n’est pas permis : « Vladimir Poutine se prépare à affamer une grande partie du monde en développement, prochaine étape de sa guerre en Europe », écrit-il, en redoutant un bégaiement de l’histoire en matière de recours à l’arme alimentaire et à la famine comme levier d’anéantissement et de coercition.

Face à une telle menace, les risques de sauve-qui-peut généralisés ne sont pas négligeables. La décision de l’Inde de stopper mi-mai les exportations de blé a été analysée comme telle, même si les autorités indiennes l’ont relativisée en indiquant que leur pays n’avait jamais été considéré, à juste titre, comme un grand exportateur de cette céréale compte tenu du poids de sa population, qui absorbe la quasi-totalité de la production nationale. Leur décision a été justifiée par les aléas climatiques, une vague de chaleur exceptionnelle, qui va peser sur les rendements.

Un mois plus tôt, l’Indonésie avait créé une première alerte en interdisant l’exportation d’huile de palme, en arguant cette fois-ci de pénuries intérieures susceptibles d’entraîner des tensions sociales. Ces exportations ont repris au cours du mois de mai. Depuis, l’Inde a également décidé de restreindre ses exportations de sucre dont elle est la deuxième exportatrice mondiale. La Malaisie a pris la même mesure à propos des exportations de poulets, au grand dam de ses voisins.

Cette série de décisions dans le domaine de l’alimentation alimente le spectre d’un mécanisme destructeur qui ne serait pas sans évoquer la vague de repliements protectionnistes enclenchée par la crise économique de 1929. Au lieu d’en limiter les effets, elle les avait au contraire décuplés.

Réforme de l’Allocation adulte handicapé: Des effets pervers

Réforme de l’Allocation adulte handicapé: Des effets pervers ? 

 

Un collectif d’universitaires et de chercheurs estime, dans une tribune au « Monde », que la proposition de loi sur la déconjugalisation de l’AAH soumise à l’Assemblée le jeudi 17 février constitue une opportunité de garantir les droits fondamentaux des personnes handicapées.

 

 

Tribune.
 Le mode de calcul actuel de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) est contraire à l’esprit de cette prestation, créée pour garantir l’autonomie financière des personnes handicapées. Le 17 juin, en examinant une proposition de loi de déconjugalisation de l’AAH, l’Assemblée nationale aura la possibilité de modifier substantiellement le mode de calcul de cette prestation et de proposer un dispositif réellement en adéquation avec les objectifs affichés de cette prestation sociale. En 1975, cette allocation voulait faire accéder à un revenu minimal et à une vie digne et autonome les personnes ne pouvant pas assurer leur subsistance par une activité salariée du fait de leur handicap. Aujourd’hui, le mode de calcul de cette prestation aboutit à des effets inverses à ceux qui étaient recherchés. La prise en compte des revenus des conjoints, qu’ils soient ou non mariés ou pacsés, implique pour nombre de bénéficiaires vivant en couple une réduction, voire une perte complète, de leur allocation.

 

Pour un couple dont le bénéficiaire n’a pas d’autres revenus que l’AAH, son allocation commence à décroître à partir de 1 016,55 euros de salaire net de son conjoint, jusqu’à s’annuler complètement au-delà de 2 271,55 euros. Un amendement sur la proposition de loi de déconjugalisation de l’AAH, déposé par le gouvernement et la majorité, se propose de rehausser le seuil de décroissance à 1 276,20 euros et de laisser pratiquement inchangé le seuil d’annulation, à 2 280,20 euros en induisant des pertes significatives pour certains couples avec enfants. Par exemple, pour un couple avec un enfant ces pertes s’étaleraient sur la tranche de salaires 2300-2850 € et, pour un couple avec deux enfants, sur la tranche de salaires 2350-3500 €.

Depuis le début de l’année 2020, un mouvement citoyen, porté par les personnes concernées elles-mêmes, a réussi à inscrire à l’agenda politique la revendication de la déconjugalisation de l’AAH. Ne plus prendre en considération les revenus du conjoint constitue un enjeu majeur pour plusieurs raisons.

Comme le montrent les nombreux récits recueillis depuis un an, les études de victimation analysées par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) ou certaines études qualitatives, la dépendance financière générée par la conjugalisation des prestations sociales augmente la probabilité de survenue de violences conjugales.

Effets secondaires des vaccins : marginaux mais ils existent

Effets secondaires des vaccins : marginaux mais ils existent

Après la suspension de la vaccination par l’AstraZeneca dans plusieurs pays, des interrogations se posent  sur les conséquences de ce vaccin mais aussi des autres. En France, l’ AstraZeneca  n’a pas été suspendu pour deux raisons d’une part parce que les études françaises démontrent que les effets secondaires sont très marginaux, d’autre part parce que le pays dépend aussi largement en ce moment de ce vaccin pour sa campagne sanitaire.

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Sur l’ensemble des 5,25 millions d’injections (première et seconde doses confondues) survenues au 4 mars, l’Agence du médicament en recensé 11.802, soit 0,22% du nombre total avec effets secondaires indésirables notamment des problèmes de coagulation du sang. Mais les autres vaccins provoquent aussi des effets secondaires.

 

Dans le détail, le vaccin de Pfizer et BioNTech a engendré 8.487 cas d’effets indésirables (soit 0,19% des 4,56 millions d’injections pratiquées), celui de Moderna, 302 cas sur 242.000 injections (0,12%) et le sérum d’AstraZeneca, 3.013 cas sur quelque 454.000 injections pratiquées à cette date (0,66% du total). Cela concerne en majeure partie des syndromes pseudo-grippaux tels que de la fièvre, des maux de tête ou de la fatigue.

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