Heures supplémentaires : mauvaise mesures pour les entreprises et les salariés
Finalement F. Fillon a décidé de revenir sur la défiscalisation des heures supplémentaires en les plafonnant ; il rejoint donc une partie des propositions de M. Aubry qui a qualifié la défiscalisation qualifiée d’ »hérésie économique qui bloque les embauches ». Martine Aubry qui a mis en place les 35 heures (loi Aubry 1 du 13 juin 1998).ne se renie pas, on peut cependant s’interroger sur la pertinence d’une telle mesure. Si les heures supplémentaires ont été totalement défiscalisées, c’est précisément du fait du handicap de compétitivité que constituent les 35 heures. Pratiquement aucun pays au monde n’a décidé la réduction du temps de travail à 35 heures ; la moyenne en Europe est de 38,6 heures. Les 35 heures ont plombé l’économie française et largement participé à la délocalisation des productions industrielle, agricoles et même de services. F. Fillon comme M. Aubry oublient encore une chose, avec le tassement de la demande, le volume d’heures supplémentaires va nettement diminuer, les recettes à attendre de cette défiscalisation seront donc très en dessous de ce qui est attendu. C’est une très mauvaise nouvelle pour la compétitivité des entreprises et le pouvoir d’achat des salariés.Une grave erreur de diagnostic économique.
La France est à peu près le seul pays à avoir décidé des 35heures et ne parvient pas à se remettre du handicap de compétitivité que cela a représenté. La défiscalisation joue en quelque sorte un rôle d’amortisseur mais le surcoût est cependant réel pour les entreprises qui dépassent ce seuil. Pour celles qui n’ont pas souhaité dépasser cette limite, il a fallu embaucher, d’où encore des surcoûts. Il ne faut pas chercher ailleurs les facteurs explicatifs de l’extraordinaire accélération du mouvement de délocalisation dans l’industrie, dans l’agriculture et dans les services. Outre le handicap de compétitivité des 35 heures, on ne peut passer sous silence la question taboue : à savoir la dégénérescence de la valeur travail. A la valeur travail s’est substituée la culture RTT. Dans les secteurs qui embauchent, comme le transport par exemple, il est très difficile de recruter. Même les cadres dans une large majorité préfèrent désormais une durée du travail réduite au pouvoir d’achat et à l’avancement. Personne ne les contraint pourtant à assumer cette fonction; elle a des avantages notamment en terme de revenus voire de notoriété mais elle a aussi ses contraintes. Le pays est miné par la culture RTT. L’une des principales mesures économiques qu’entend prendre Martine Aubry est de décourager ceux qui acceptent les heures supplémentaires (Patrons ou salariés). Il est évident que les propositions de madame Aubry ne sont pas à la hauteur des enjeux de la crise et que cette dernière persiste dans l’ignorance des réalités économiques. Faut-il rappeler que les 35 heures ont été décidées dans un conteste très particulier. En 1997 ; la gauche ne s’attendait nullement à obtenir la majorité parlementaire. Il a fallu à la hâte lancer quelques slogans et finalement retenir la proposition syndicale des 35 heures. Cette proposition était faite depuis longtemps par la CFDT mais elle ne visait pas à obtenir le même salaire qu’avec 40 heures. C’est là la grande différence. D’une certaine manière, il s’agit d’un détournement de revendication, revendication qui n’a pas même été négociée entre les partenaires et qui a été imposée par la loi. Durée du travail dans les principaux états industriels européens
PAYS |
Durée conventionnelle moyenne de temps de travail par pays |
Estonie, Grèce, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne et Slovénie |
40 |
Irlande et Luxembourg |
39 |
Suède |
38,8 |
Slovaquie |
38,7 |
Autriche et Espagne |
38,5 |
Portugal |
38,4 |
Belgique, Chypre, Italie, République Tchèque |
38 |
Allemagne |
37,6 |
Finlande |
37,5 |
Royaume-Uni |
37,2 |
Danemark et Pays-Bas |
37 |
France |
35 |
NB : Dans son dernier rapport réalisé en 2004 pour la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, l’Observatoire européen des relations industrielles de la Fondation indique que la durée moyenne de travail d’un citoyen européen est de 38,6 heures par semaine dans l’UE à 25.
On comprend bien la philosophie de la majorité des socialistes puisqu’ils sont en grande majorité salariés du secteur public où la rigueur de gestion n’est pas la principale préoccupation. En surenchérissant le coût du travail, on plombe un peu plus la compétitivité alors que nous avons déjà l’un des plus fort taux de prélèvement obligatoire. Plus d’impôt tue l’impôt. Ce qui se passe en France notamment avec notre croissance zéro depuis le second trimestre. Plus d’impôt, c’est moins de compétitivité, moins de production, plus de chômage et au final moins de recettes fiscales et davantage d’endettement. En effet, Le taux de prélèvements obligatoires (TPO) apparaît déjà relativement élevé en France par rapport aux autres grands pays développés. En 2006, le TPO calculé par l’OCDE, selon des modalités légèrement différentes de celles de l’INSEE, s’élevait ainsi à 44,2 % en France (43,6 % en 2007), contre 37,1 % au Royaume-Uni, 35,6 % en Allemagne, 28 % aux États-Unis, 27,9 % au Japon et 35,9 % en moyenne dans l’OCDE. La baisse du TPO est ainsi devenue un objectif emblématique de la baisse des impôts. Pour excuser la gauche et son déni d’économie, on ne peut que regretter que la droite n’ait pas eu le courage de supprimer purement et simplement les 35 heures. F Fillon ne peut en période électorale manifester ce courage, il se rabat donc sur les vieilles recettes étatistes pour taxer le travail (qui pourtant est à l’originel du processus de délocalisation) alors qu’il faudrait faire l’inverse et transférer une partie des coûts sociaux sur la consommation. On détricote, ce qui était au départ mal tricoté mais au final, on obtient un ouvrage encore plus mal ficelé. Certes on viendra le moment venu à la suppression des 35 heures (après les élections). Comme les grecs, nos dérives économiques, financières, sociales se paieront chèrement. L’horizon n’est pas si loin.