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Droits de douane américains : les conséquences pour l’industrie automobile mondiale

Droits de douane américains : les conséquences pour l’industrie automobile mondiale

Donald Trump, le président des États-Unis, a mis sa menace à exécution en annonçant mercredi 26 mars des droits de douane de 25 % sur les véhicules automobiles qui ne sont pas produits aux États-Unis. Les constructeurs chinois mais aussi européens pourraient être lourdement touchés. Mais aussi l’industrie automobile mexicaine et canadienne. Quels pays et quels constructeurs sont les plus exposés ?

par Vincent Vicard
Économiste, adjoint au directeur, CEPII

Pauline Wibaux
Économiste, CEPII

Thierry Mayer
Professeur d’économie à Sciences-Po, conseiller scientifique, CEPII

Déclaration d’intérêts dans The Conversation

Le secteur automobile tient une place centrale dans les déclarations de Donald Trump sur les déficits commerciaux et les menaces de mesures protectionnistes à l’encontre de l’Union européenne (UE) comme du Canada ou du Mexique. S’élevant à 270 milliards de dollars en 2023, soit près du quart du déficit commercial total des États-Unis, le déficit sur les échanges de véhicules automobiles est en effet l’un des principaux postes du déficit commercial américain après les biens de consommation.

Les droits de douane annoncés par Donald Trump avant son élection couvrent un spectre beaucoup plus large de produits puisqu’il a menacé d’instaurer des droits de douane de 10 voire 20 points de pourcentage supplémentaires sur l’ensemble des importations américaines. Depuis son élection, les pays visés explicitement constituent d’importants pays d’origine des véhicules automobiles vendus sur le marché américain : Mexique et Canada, sous la menace de droits de 25 %, et l’Union européenne menacée de 10 % de droits de douane supplémentaire. À eux seuls, le Mexique et le Canada ont exporté 2,6 millions de véhicules particuliers vers les États-Unis en 2023, soit 21 % des ventes totales du marché (l’UE représente 6 %), sans compter les pièces et composants qui peuvent traverser plusieurs fois les frontières.

De tels niveaux de droits de douane auraient assurément un impact majeur sur les tissus industriels « automobile » des pays visés, mais aussi par ricochet sur les constructeurs automobiles opérant dans ces pays. Le secteur automobile se caractérise en effet par sa dimension locale ou continentale, de telle sorte que les constructeurs investissent dans des unités de production proches de leurs marchés de consommation. Soit, pour les consommateurs américains, des usines aux États-Unis ou en Amérique du Nord.

Volkswagen, par exemple, ne produit que 40 % de ses véhicules vendus aux États-Unis en Allemagne, contre près des deux tiers en Amérique du Nord. Son usine de Chattanooga dans l’État du Tennessee, où sont produites les Passat, Atlas et ID4, lui assure un accès aux consommateurs américains sans droits de douane. Alors que celle de Puebla, au Mexique – la plus grande du pays, produit des modèles comme la Jetta, la Tiguan ou la Taos. La mise en place de droits de douane sur les importations en provenance du Mexique affecterait donc directement les ventes des modèles produits dans l’usine de Puebla, et incitera Volkswagen à modifier ses décisions d’approvisionnement pour le marché américain.

Pour étudier ces réactions, nous utilisons un modèle de choix de production et de localisation de l’activité des entreprises multinationales dans le secteur automobile. Celui-ci considère les décisions de production et d’approvisionnement au niveau de chaque entreprise multinationale. Il évalue aussi comment l’instauration et le maintien de barrières tarifaires sur le moyen terme modifient le niveau des ventes et le lieu de production de chaque modèle pour un marché national donné (à plus long terme, les entreprises sont susceptibles de fermer et d’ouvrir des usines). Les simulations effectuées s’appuient sur les flux observés en 2023 pour les véhicules particuliers (excluant notamment les pick-ups).

Sans surprise, l’impact des annonces récentes de Donald Trump (droits de douane de 25 % sur le Canada et le Mexique et droits de douane additionnels de 10 % pour l’UE, soit 12,5 % en ajoutant les droits de douane de 2,5 % existant aujourd’hui sur les importations de véhicules particuliers par les États-Unis) serait massif pour les industries automobiles canadiennes et mexicaines, qui connaîtraient des baisses de production de 71 % et de 57 % respectivement.

Les pays européens moins exposés que le Canada et le Mexique
Plusieurs pays européens seraient également touchés, la Suède et l’Italie en tête avec des baisses de production supérieures à 7 % et 4 % respectivement. La Slovaquie, la Hongrie et l’Allemagne connaîtraient également une baisse de leur production, bien que plus limitée.

De l’autre côté, la production automobile américaine progresserait de 26 %. Cette hausse se ferait cependant au détriment des consommateurs qui verraient les prix augmenter. À noter que la mise en œuvre de représailles tarifaires des pays visés par les mesures américaines aurait peu d’impact sur la production du Mexique ou du Canada mais réduirait la hausse de la production sur le territoire des États-Unis de 7 points de pourcentage, à + 19 %.

Les effets sur les constructeurs ne recoupent pas nécessairement ceux sur leur pays d’origine. Leur exposition au conflit commercial en cours dépend de leurs lieux de production et de leur capacité à allouer à nouveau leur production à destination des consommateurs américains dans des usines non ciblées par des droits de douane.

Volkswagen, Stellantis, et dans une moindre mesure Honda, qui importent aujourd’hui plus du tiers de leurs véhicules particuliers vendus aux États-Unis du Mexique ou du Canada, serait les plus touchés, avec des baisses de ventes d’environ 152 000 véhicules pour Volkswagen et 90 000 pour Stellantis (tableau 2, plus bas). Au sein de ces constructeurs, certaines marques seraient particulièrement affectées. Par exemple, Chrysler (une marque de Stellantis), dont l’ensemble des véhicules particuliers vendus aux États-Unis sont produits au Canada, verrait ses ventes sur le marché américain chuter de près de 50 %.

De manière intéressante, certains constructeurs perdraient particulièrement à la mise en place de représailles commerciales, comme Ford, Stellantis ou BMW. Non seulement ces constructeurs exportent des États-Unis vers les pays ciblés mais leurs importations de biens intermédiaires de leur pays d’origine seraient également affectées par les représailles commerciales.

Plusieurs constructeurs bénéficieraient en revanche des droits de douane imposés par le gouvernement Trump. Parmi les marques américaines, General Motors et Tesla verraient leur production augmenter de 42 000 et 81 000 véhicules. Des gagnants également parmi les constructeurs asiatiques – Hyundai, Subaru et Toyota – qui produisent largement aux États-Unis ou importent du reste du monde pour servir les consommateurs américains.

Les résultats de nos simulations confirment que la mise en place de droits de douane sur les importations en provenance du Canada et du Mexique aurait des impacts dramatiques sur la production automobile des deux pays s’ils étaient maintenus sur le long terme. Pour l’UE, la menace de droits additionnels de 10 % aurait un impact plus limité sur la production. Certains constructeurs européens (Volkswagen et Stellantis), qui produisent au Canada et au Mexique, seraient cependant particulièrement exposés au conflit commercial en cours. Les mesures réellement mises en place par l’administration américaine sont susceptibles de largement évoluer, comme le montrent ces premières semaines de présidence de Donald Trump, et nécessiteront d’en réévaluer les conséquences pour les pays ciblés et les constructeurs.

L’industrie automobile mondiale dans la tourmente avec Trump

L’industrie automobile mondiale dans la tourmente avec Trump


Compte tenu de l’internationalisation des processus de production, l’industrie automobile mondiale va entrer dans une période très tourmentée. Une véritable secousse qui va toucher à peu près tous les pays producteurs du Japon, au Canada en Europe notamment et y compris aux États-Unis.

Une industrie déjà bousculée par la perspective de mutation de la motorisation qui ne se déroule pas au rythme prévu au point par exemple que la commission européenne recule sur le calendrier de substitution de l’électrique au thermique. Visiblement Trump ne connaît pas grand-chose de l’économie complexe et de l’internationalisation des échanges.

Sans parler du fait que le président américain semble ignorer que la balance globale bien plus services (tech notamment) est profitable aux Américains. La conséquence macro-économiques sera de renchérir parfois dans des conditions invraisemblables la compétitivité des constructeurs et d’amputer de manière significative le pouvoir d’achat des consommateurs avec le risque de plomber la croissance globale

Dès le 2 avril, ce nouveau prélèvement sera ajouté « de manière permanente » au tarif douanier de 2,5 % actuellement en vigueur. Il va non seulement frapper les véhicules finis, mais aussi les moteurs, transmissions, groupes motopropulseurs, et composants électroniques qui sont importés aux États-Unis, puis assemblés dans des usines américaines.

L’IA, test pour l’industrie européenne

 L’IA,  test pour l’industrie  européenne

L’intelligence artificielle est mise en avant lors de sommets et salons, mais la politique industrielle européenne ne s’est toujours pas mise à la hauteur du défi. Or, la domination américaine et chinoise dans l’IA révèle l’insouciance de l’Europe face aux risques, et son inconscience des enjeux économiques et géopolitiques qui se jouent. Il est urgent d’agir, à commencer par un Small Business Act européen. Par Quentin Adam, CEO de Clever Cloud. (dans La Tribune)

Le rapport Draghi, publié en septembre 2024, met en évidence une réalité inquiétante : l’Europe est en train de décrocher. L’écart de productivité avec les États-Unis est passé de 15 % en 2002 à 30 % en 2023. Ce n’est plus un simple retard, c’est une descente programmée vers l’insignifiance technologique.

Pendant que nous débattons et tergiversons, la prédominance américaine dans l’IA se renforce avec des projets comme Stargate et les avancées d’OpenAI, Google et les autres GAFAM. Par ailleurs, la Chine prouve avec DeepSeek sa capacité à proposer des alternatives compétitives avec des budgets asymétriques. Ces avancées ne sont pas neutres : elles imposent des narratifs étatiques et des biais culturels propres aux pays qui les développent.

L’Europe ne peut plus se contenter d’être un simple spectateur passif de cette dynamique. Des initiatives comme Mistral AI montrent que l’Europe peut encore jouer un rôle majeur. Mistral aurait pu rester une entreprise 100 % française et européenne, mais faute de soutien adéquat, elle a dû se tourner vers des capitaux américains. Ce n’est pas une fatalité, c’est un signal d’alarme. Nous avons la responsabilité de conserver nos talents, nos technologies et notre souveraineté sur le territoire européen.

Il est urgent de prendre conscience que nous avons les clés de notre avenir. Une solution simple et efficace existe : un Small Business Act européen. Il s’agirait d’obliger les grandes entreprises et les administrations publiques à réserver un pourcentage significatif de leurs commandes aux PME technologiques européennes. C’est la seule solution pour faire croître les entreprises.

L’ambition n’est pas simplement de conserver des emplois, mais bien d’en créer de nouveaux et de structurer un écosystème économique durable. Nous avons besoin d’entreprises dirigées par des leaders technologiques, des ingénieurs formés qui comprennent profondément les enjeux du secteur. Les succès comme Mistral AI prouvent qu’il faut des ingénieurs à la tête de nos entreprises, tout comme c’est le cas pour la totalité des GAFAM ou encore pour des entreprises chinoises comme DeepSeek. Cela doit changer, et c’est simple à mettre en place via les fonds de fonds de Bpifrance.

Il est temps d’arrêter d’investir uniquement dans des gestionnaires et de financer ceux qui savent construire. Par ailleurs, cette révolution technologique ne doit pas se limiter aux seules entreprises de la tech. Nous devons irriguer l’ensemble du tissu économique en intégrant ces technologies dans l’industrie traditionnelle, l’agriculture, la logistique et l’ensemble des secteurs productifs. L’IA et les infrastructures numériques doivent être utilisées pour rendre plus performantes toutes nos entreprises, et pas seulement celles de la tech. L’objectif n’est pas seulement de créer quelques champions visibles, mais bien de moderniser tout le socle économique français et européen.

L’Europe est au pied du mur. L’opportunité de nous ressaisir est encore là, mais nous avons atteint un point de non-retour. Si nous ne nous réveillons pas maintenant, nous perdrons à jamais notre place dans l’économie numérique mondiale.

The Law of Accelerating Returns, théorisée par Ray Kurzweil, explique que les avancées technologiques s’accélèrent de façon exponentielle à mesure que de nouvelles briques sont développées. Cela signifie que même en ayant pris du retard, il est possible de rebâtir un écosystème numérique en s’appuyant sur les progrès récents, à condition d’investir stratégiquement.

Ainsi, nous devons mettre en place un plan ambitieux basé sur :

  • l’investissement massif dans les technologies stratégiques (cloud, IA, infrastructures numériques).
  • l’alignement des politiques industrielles, commerciales et concurrentielles pour favoriser nos entreprises.
  • le soutien actif aux talents techniques et la valorisation de nos ingénieurs.

Il faut également combattre les narratifs défaitistes. Lorsque le directeur de Bpifrance déclare que la France ne pourra jamais rivaliser avec les géants américains, il nourrit une culture de l’indigence, et un défaitisme d’état. C’est une erreur stratégique. L’Europe a tout pour réussir, et il est impératif de déconstruire ces discours qui nous enferment dans l’inaction.

Cela doit s’accompagner de la création d’un ministère régalien du numérique. Ce ministère, qui pourrait être échafaudé par le haut Commissariat au Plan nouvellement nommé, doit devenir un pilier stratégique de notre politique industrielle, au coté des efforts structurants de Bpifrance. C’est un impératif, pas un luxe.

Le numérique n’est pas un secteur parmi d’autres, c’est l’infrastructure du XXIᵉ siècle. Il est temps d’arrêter de croire que le numérique est un simple monde virtuel à la Matrix, une affaire de geeks. Nous sommes dans une guerre industrielle et économique. Soit nous nous réveillons, soit nous disparaissons.

Nous avons les talents, les ressources et la capacité d’innovation. Il ne manque qu’une volonté politique forte pour structurer un écosystème numérique souverain et performant. L’Europe peut encore faire le choix de la puissance numérique. Mais ce choix ne pourra être effectif qu’avec une transformation radicale de notre approche industrielle et politique. Il est temps d’un vrai wake-up moment.

Industrie–Bercy va tuer l’industrie automobile française

Industrie–Bercy va tuer l’industrie automobile française

Le malus automobile en très forte augmentation avec la surtaxe prévue par Bercy. En fait il s’agit d’un changement de mode de régulation. Les incitations à l’achat d’un véhicule électrique vont disparaître et on va taxer lourdement l’achat d’un véhicule thermique à partir de 2025;  une surtaxation qui veut varier selon la puissance des moteurs et pour les véhicules bas de gamme pourra évoluer entre 500 et 2 1000 €. De quoi tuer l’industrie automobile déjà lourdement handicapée par le manque de productivité et de compétitivité des véhicules construits et assemblés en France. On objectera que cette taxe pourrait concerner les véhicules étrangers mais ces derniers bénéficient déjà d’un net avantage de compétitivité.

Concrètement, bon nombre de véhicules grand public seront impactés par ces mesures.

Pour l’achat d’un Renault Captur il faudra ajouter en moyenne 695€ à sa facture dès le 1er mars d’après les calculs de Mobilians, l’organisation qui rassemble les chefs d’entreprise du secteur de la mobilité. Des montants qui évolueront fortement d’ici 2027. À cette date, l’achat d’un Renault Captur équipé de la motorisation TCe 90 (133 g/km pour la finition Evolution) impliquera un malus de 1 901 euros. Si la surtaxe exacte dépend évidemment de la motorisation plus que du modèle, l’organisation patronale cite également le cas du modèle Peugeot 2008, pour lequel «le montant moyen du malus passerait à 653€ en 2025 (+72% par rapport à 2024)».

 

Production industrielle française en baisse

Production industrielle française en baisse

Globalement la croissance a stagné au quatrième trimestre en France tirée notamment par le bas par la régression de la production industrielle qui diminue de de 1,2% au quatrième trimestre par rapport à la même période de 2023.

Plusieurs grosses entreprises ont décidé de réduire la voilure. Conséquence la production industrielle s’est repliée de 0,4% en décembre sur un mois et a même reculé de 1,2% au quatrième trimestre par rapport à la même période de 2023, a annoncé l’Insee ce mercredi. Sur toute l’année, elle a baissé de 0,4% par rapport à 2023, après une hausse de 0,8% par rapport à 2022.

 

 

Fiançailles rompues entre Nissan et Honda

Fiançailles rompues entre Nissan et Honda

Il n’y aura pas de mariage entre Nissan et Honda. Nissan a décidé d’interrompre les négociations unilatéralement, au terme d’un conseil d’administration tenu mercredi après-midi.

La presse japonaise a rapporté qu’Honda ne souhaitait plus qu’acquérir des actions Nissan pour transformer son rival de toujours en une simple filiale. L’état-major de ce dernier aurait vu rouge, soucieux de préserver son autonomie. « Les deux entreprises avaient discuté d’une structure de holding, mais n’ont pas pu se mettre d’accord sur des conditions telles que le ratio d’intégration, précise le quotidien NikkeiHonda a (ensuite) approché Nissan avec une proposition visant à en faire une filiale : Nissan a décidé de mettre fin aux négociations, en raison d’une forte opposition au sein de l’entreprise. »

Le 23 décembre, les dirigeants de Honda, Nissan et Mitsubishi Motors (partenaire mineur dans l’Alliance avec Renault) annonçaient devant la presse mondiale le début de négociations en vue de leur fusion d’ici à juin 2025. Cette alliance d’un jour avait pour objectif de permettre de rattraper le retard japonais sur l’électrique, aussi de sortir Nissan de sa crise financière dont le Renault fait aussi les frais puisqu’il détient encore 35 % du capital.

Fonderie de Bretagne : reprise possible par Renault

Fonderie de Bretagne : reprise possible par Renault

 

 

Auditionné par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, Luca de Meo, a été  interpelé sur la situation de la Fonderie de Bretagne, menacée de fermeture. Le directeur général du groupe Renault se dit ainsi prêt à reprendre en interne les salariés concernés.

« Personne à Renault n’est opposé à un projet de reprise. (…) Si aucun projet de reprise ne voit le jour pour cette fonderie, Renault prendra ses responsabilités », a déclaré le patron devant les députés.

Vente de voitures en janvier : baisse de 6,5 %

Vente de voitures en janvier : baisse de 6,5 %

La tendance baissière des ventes de voitures se confirme encore avec des immatriculations de voitures neuves en baisse de 6,23% en janvier-(PFA)

 

Il s’est immatriculé 114.665 véhicules particuliers dans l’Hexagone le mois dernier, a rapporté le PFA. Janvier a compté 22 jours ouvrables en 2025, comme l’année précédente.

Les immatriculations de voitures neuves du groupe Stellantis, qui regroupe notamment les marques Peugeot, Citroën, DS et Opel, ont diminué le mois dernier de 12,13% par rapport à un an plus tôt.

Le groupe Renault (marques Renault, Dacia et Alpine) a vu quant à lui ses immatriculations en France reculer de 2,96% en rythme annuel en janvier.

(Rédigé par Camille Raynaud)

ArcelorMittal: Menace de suppressions d’emplois à Reims et Denain

ArcelorMittal: Menace de suppressions d’emplois  à Reims et Denain

 

Une nouvelle vague de suppressions d’emplois cette fois dans la sidérurgie. En cause le très net tassement de la demande mondiale et la concurrence chinoise.

 

ArcelorMittal qui emploie 15.000 salariés en France (dont 800 chercheurs en Lorraine) dans une quarantaine de sites, fait face à une situation difficile en Europe actuellement. L’un de ses principaux marchés, l’automobile, subit depuis la pandémie du Covid, une crise de grande ampleur qui a conduit à une baisse significative de ses volumes. De plus, l’acier européen est fortement concurrencé par des produits chinois à bas coûts. La Chine fait face à une surproduction dans son marché local, et elle écoule son acier en Europe en cassant les prix. Aujourd’hui, près de 30 % du marché européen est pris par des produits chinois, malgré les mesures de protection mises en place par la Commission européenne. Mais elles sont notablement insuffisantes.

Industrie de défense: L’Europe contre la France

Industrie de défense: L’Europe contre la France 

Après avoir exploré les pièges de la résurrection de la Communauté européenne de défense de 1952, le groupe Vauban décrypte la stratégie de marginalisation de la France par l’Allemagne, l’Italie et la Grande-Bretagne avec l’alliance entre Berlin et Rome dans le domaine terrestre et l’accord de Trinity House avec Londres.

« Fidèles serviteurs de l’OTAN et de Washington, animés d’un désir de mettre la France en position d’infériorité militaire et industrielle, les coalisés se sont partagés l’Europe : à l’Allemagne, la défense du flanc Nord de l’OTAN ; à l’Italie, la défense du flanc Sud joignant théâtre de la Méditerranée orientale à l’Asie-Pacifique ; au Royaume-Uni, la Turquie, la Pologne et les pays baltes en liaison avec l’Allemagne » 

L’âme de la deuxième coalition est, sans surprise, à Berlin même. Poursuivant sa politique de champions nationaux (Diehl dans les missiles ; OHB dans le spatial ; Rheinmetall plus que KMW, dans les blindés ; Hensoldt dans l’électronique de défense ; TKMS dans le naval ; Renk et MTU dans la propulsion) et de récupération des compétences qui lui font encore défaut (propulsion spatiale, satellites d’observation et aéronautique de combat et missiles), l’Allemagne a compris depuis les années 90 qu’elle obtiendrait beaucoup plus d’une France récalcitrante en faisant des alliances de revers que par la négociation directe.

En ce sens, l’actualité récente est la réédition des années 1997 à 2000, années où Berlin a proposé à Londres des fusions de grande ampleur : Siemens avec BNFL, bourse de Francfort avec celle de Londres, DASA avec British Aerospace. A chaque fois, il s’agissait moins de forger des alliances de revers que de faire pression sur la France. Trop faible pour voir clair dans ses intérêts et le jeu de ses concurrents, trop altruiste pour voir toute la naïveté et la portée de ses actes, la France de Lionel Jospin a offert la parité à l’Allemagne dans le domaine de l’aéronautique, elle qui n’en demandait au mieux que le tiers (qu’elle pesait au demeurant très justement…).

L’Allemagne, l’âme des coalitions de revers

Avec ses alliances en Italie (dans le domaine des blindés) et au Royaume-Uni (sur l’ensemble des segments), Berlin tend à Paris de nouveau le même piège : « cédez sur le MGCS et le SCAF ou nous actionnons l’alliance de revers ». L’Europe de l’industrie d’armement qui se prépare, n’est en réalité qu’une coalition contre les thèses françaises dans la défense et son indispensable corolaire, l’armement. Nulle surprise dans ce constat : dominant ses concurrents militaires et industriels grâce à l’héritage gaullien, possédant le sceptre nucléaire qui lui ménage une place à part dans le concert des grandes nations, influente par son siège au Conseil de sécurité aux Nations-Unies et ses exportations d’armement, la France est le pays à ramener dans le rang des médiocres aigris et jaloux et de la petite bourgeoisie de la défense européenne.

Rien de nouveau sous le soleil européen puisque, si l’on en croit Alain Peyrefitte, le général De Gaulle faisait déjà cette analyse : « Pour la dominer aussi, on s’acharne à vouloir la faire entrer dans un machin supranational aux ordres de Washington. De Gaulle ne veut pas de ça. Alors, on n’est pas content, et on le dit à longueur de journée, on met la France en quarantaine. » (13 mai 1964).

Marginalisée depuis la création de KANT puis de KNDS, méprisée voire sacrifiée en France même par le gouvernement de François Hollande en 2015 avec la complicité des députés UMP, l’industrie terrestre nationale ne vit que par des îlots (canons, tourelles, obus), ayant abandonné les chars (sans que la DGA ne réagisse en 2009 lors de la suppression de la chaîne Leclerc par Luc Vigneron), les véhicules blindés chenillés (choix très contestable du tout-roues), l’artillerie à longue portée et saturante ; écrasée par la férule de Frank Haun, désormais noyé dans KNDS France sans trop oser se défendre lui-même, Nexter est menacé de disparition par la double alliance KMW/Rheinmetall au sein du MGCS et Rheinmetall/Leonardo dans l’ensemble des segments.

Aveuglé par le couple franco-allemand, Paris n’a pas accordé assez d’attention à la montée en puissance de Rheinmetall, vrai champion du terrestre allemand, qui, par commandes et acquisitions, se retrouve enraciné en plein milieu du jeu allemand (comme future actionnaire de TKMS et bras armé de la politique ukrainienne de Berlin), et de la scène européenne qu’il a conquise pas à pas : en Hongrie d’abord, puis au Royaume-Uni, en Lituanie, en Roumanie, en Ukraine, en Croatie et désormais en Italie, sans oublier d’établir la relation transatlantique (avec Lockheed Martin sur le F-35, avec Textron sur la compétition Lynx et en achetant le constructeur Loc Performance Products). La toile tissée par Rheinmetall en Europe est une véritable coalition contre les positions françaises.

Le même coup de faux se prépare avec l’accord germano-britannique de Trinity House qui, même s’il ne réalisera pas toute ses prétentions faute de compétences et de moyens, érige un axe concurrent durable et redoutable dans des domaines clés pour la France : le nucléaire, les systèmes de missile à longue portée, les drones d’accompagnement des avions de combat de future génération, la robotique terrestre, la patrouille maritime.

Fidèles serviteurs de l’OTAN et de Washington, animés d’un désir de mettre la France en position d’infériorité militaire et industrielle, les coalisés se sont partagés l’Europe : à l’Allemagne, la défense du flanc Nord de l’OTAN ; à l’Italie, la défense du flanc Sud joignant théâtre de la Méditerranée orientale à l’Asie-Pacifique ; au Royaume-Uni, la Turquie, la Pologne et les pays baltes en liaison avec l’Allemagne. Les contrats industriels suivent les diplomates, avec une moisson gigantesque de chars de combat Leopard, de véhicules blindés Boxer, de l’artillerie RCH-155, de véhicules blindés de combat d’infanterie Lynx et de chars Panther et de systèmes sol-air (22 pays membres de l’initiative allemande ESSI).

Au bilan, la France est nulle part dans cette Europe qu’elle prétend pourtant bâtir ; elle n’a pas eu le courage politique de s’opposer aux dérives illégales de la Commission européenne en pratiquant la politique de la chaise vide ; son gouvernement est un mélange instable de fédéralisme affirmé, d’atlantisme assumé et de gaullisme à éclipses : comment pourrait-il mener une autre politique que celle « du chien crevé au fil de l’eau » (De Gaulle) consistant à se couler avec facilité et confort dans le mainstream institutionnel otanien au nom de l’Ukraine ? Comme lors de la IVème République, ses partis politiques sont occupés à la tambouille politicienne et ne pensent plus le monde selon les intérêts nationaux mais selon les intérêts de l’OTAN, de l’Ukraine et d’Israël.

Alors que la France s’épuise en débats stériles politiciens dans un régime devenu instable (les deux vont de pair), ses positions stratégiques en Europe se dégradent :

  • La cohérence de son système de défense reposant sur la souveraineté nationale et la défense des intérêts nationaux, au profit d’un fédéralisme européen sous tutelle américaine décrété urgent par la guerre en Ukraine et la menace russe ;
  • Sa dissuasion nucléaire, au profit d’un projet de missile conventionnel à très longue portée et d’une défense anti-missile germano-américano-israélienne à vocation européenne, deux projets promus, comme par hasard, par l’Allemagne ;
  • Son modèle d’industries nationales, monopolistiques, seules capables de concevoir, développer, produire et maintenir des systèmes d’armes souverains, au profit de fusions industrielles européennes qui placeront les armées et l’industrie françaises en position de dépendance complète des deux Bruxelles (OTAN et Union européenne) ;
  • La conduite de ses programmes d’armement, réalisée par ses ingénieurs de l’armement dont c’est le métier et la vocation, au profit de bureaucrates européens ne connaissant rien aux domaines de l’armement mais ayant le pouvoir juridique et financier ;
  • Sa liberté souveraine d’exporter de l’armement à qui elle l’entend et sans frein autre que ses intérêts et sa morale à elle, au profit de règlements européens, spécialement édictés pour la restreindre, autre projet porté par l’Allemagne.

Le pire est que ces développements ont été portés par la classe politique elle-même qui les a encouragés à coup de proposition de « dialogue sur la dissuasion »« d’autonomie stratégique européenne » ou de programmes en coopération mal négociés, en mettant de côté les aspects gênants comme les divergences de doctrine, de niveau technologique et d’analyses sur les exportations.

Le pire est également que ces développements se profilent au moment même où la France, faute de limiter son gouvernement aux seuls domaines régaliens et de créer la richesse au lieu de la taxer et de la décourager, n’a plus les moyens de sa défense : comment celle-ci pourrait-elle en effet continuer de résister à la dérive des finances publiques, à la sous-estimation systématique de tous ses besoins (des capacités négligées aux infrastructures délaissées en passant par les surcoûts conjoncturels prévisibles mais ignorés) et à la mauvaise gestion de ses finances propres (comme en témoigne le montant faramineux des reports de charges) ?

Si la LPM est officiellement maintenue en apparence, ses fondements financiers, déjà minés dès sa conception par un sous-financement général, apparaissent pour ce qu’ils sont : insuffisants à porter le réarmement national de manière durable et soutenu. Faudra-t-il comme Louis XIV vendre l’argenterie royale ? Faudra-t-il vendre des biens nationaux comme la Révolution le fit dans son incurie ? Ou lui faudra-t-il écraser d’impôts les Français comme le Premier Empire s’y est résigné pour éviter l’emprunt ?

La rupture avec les deux Bruxelles est la double condition de la renaissance nationale. Face à l’Europe coalisée contre son système de défense, la France n’aura pas d’autre choix qu’un sursaut passant par une révision fondamentale du rôle de l’État, c’est-à-dire la réduction drastique de ses interventions sociales et économiques ruineuses et inefficaces, et d’une révision complète de son cadre d’alliances, afin que celles-ci la fortifient au lieu de l’atrophier.

La guerre froide n’a pas empêché ni la politique de la chaise vide ni le retrait du commandement intégré de l’OTAN, c’est-à-dire de quitter les deux Bruxelles au profit d’une politique du grand large, et pourtant le général de Gaulle qui a pris ces deux décisions majeures, n’était ni irresponsable ni irréfléchi. Les fruits de la grande politique qu’il a voulue, sont connus : un rayonnement considérable de sa diplomatie et de ses exportations d’armement.

L’indispensable soutien à l’industrie

L’indispensable soutien à l’industrie

 

L’industrie française a besoin de choix politiques forts et courageux afin d’affronter les transformations nécessaires à la transition écologique et à la nouvelle donne internationale, souligne Vincent Vicard ,Economiste, dans une tribune au « Monde ». 

 

Comment réindustrialiser la France ? La question n’est pas nouvelle mais le contexte actuel oblige à réinterroger les politiques mises en œuvre. Car il ne s’agit pas seulement de soutenir le timide mouvement de réindustrialisation – les indicateurs restent ambivalents sur le sujet –, mais surtout de soutenir une industrie confrontée à l’intensification de la concurrence internationale et à des ruptures dans les technologies, les politiques climatiques et les relations internationales.

A cela s’ajoute le contexte budgétaire contraint, dans lequel on voit mal comment les efforts pourraient épargner les entreprises. Jusqu’à récemment, dans le sillage de la politique de l’offre, les politiques publiques en faveur de l’industrie ont pris la forme de mesures budgétaires non ciblées, qui ont participé au déficit public puisqu’un certain nombre des baisses d’impôts et de cotisations ont explicitement une visée de réindustrialisation ou de compétitivité. Avec l’idée que les baisses d’impôts se financeraient par un surcroît d’activité.

Aujourd’hui, ces politiques non ciblées peuvent difficilement rester l’alpha et l’oméga de la politique industrielle. Le contexte amène à les interroger et à cibler les interventions en lien avec les spécificités des activités industrielles. C’est ce tournant qu’ont pris les Etats-Unis, en 2022, avec l’Inflation Reduction Act et le Chips Act, qui subventionnent les secteurs verts et celui des microprocesseurs. C’est aussi ce qu’a fait la loi industrie verte en France. Le relâchement des règles sur les aides d’Etat au sein de l’Union européenne donne de nouvelles marges de manœuvre pour cela.

Dans ce nouveau contexte, deux enjeux apparaissent fondamentaux pour l’industrie : la nécessaire bifurcation écologique et l’adaptation à un environnement international plus conflictuel.

 

 

Ne pas sacrifier l’industrie

Ne pas sacrifier l’industrie

Vincent Moulin Wright, directeur général de France Industrie, dans la « Tribune » évoque les inquiétudes de son secteur dans un cadre budgétaire public  davantage contraignant

Dans le cadre de la loi Industrie verte, promulguée en octobre 2023, deux décrets d’application viennent d’entrer en vigueur. Tous deux ont pour principal objectif l’accélération et la simplification des procédures d’implantations d’usines. Une étape majeure, selon France Industrie, l’organisation représentative qui rassemble plus de 80 membres dont une trentaine de fédérations sectorielles.

 En octobre 2023 a eu lieu la promulgation de la loi Industrie verte. Quel bilan faites-vous un an après ?

VINCENT MOULIN WRIGHT – L’essentiel de cette loi porte sur l’accélération des délais nécessaires pour réaliser des études préalables à l’implantation d’usines. L’objectif est de les diviser par deux, de 18 mois aujourd’hui à neuf mois demain. Tous les décrets ont été pris fin juin. C’est donc encore un peu tôt pour dresser un bilan. Nous y verrons plus clair en début d’année prochaine.

Concernant le Crédit d’Impôt pour les Investissements dans l’Industrie Verte (entré en vigueur en mars 2024 avec pour objectif d’encourager les entreprises à investir dans quatre secteurs stratégiques de la transition énergétique, ndlr), les premiers chiffres vont être publiés dans les mois à venir. Mais il semblerait que cet instrument de soutien soit bien parti.

Nous pouvons aussi souligner le soutien à des filières nouvelles comme les matières premières critiques que la France ne produit pas, ou pas assez. Plusieurs projets vont s’implanter dans l’Hexagone pour la production (ouverture de mines…) et la transformation (mise en service d’usines de valorisation et de recyclage) de ces métaux. De quoi être moins tributaire des importations provenant souvent de fournisseurs situés en Chine et Afrique.

Trois décrets d’application de la loi Industrie verte en juillet dernier sont dans le viseur d’associations, notamment Notre affaire à tous et Zero Waste France qui ont déposé le 6 septembre dernier des recours gracieux demandant l’annulation de ces trois décrets qui représentent selon elles un « détricotage massif et systématique du droit de l’environnement industriel » et par conséquent une augmentation des risques de catastrophes industrielles. Une réaction ?

VINCENT MOULIN WRIGHT – La loi ne prévoit aucun recul environnemental. Elle prévoit juste une optimisation des délais dans le respect des obligations environnementales qui sont bien maintenues. Au lieu de mettre en place les uns après les autres les études et concertations préalables et les dossiers d’autorisations environnementales, cette loi propose de les faire en parallèle pour gagner du temps. La loi recherche clairement la simplification.

Il faut se réjouir de l’augmentation du nombre d’industries en France, et cette loi va accélérer l’implantation de nouveaux sites. En effet, plus nous aurons d’industries de production sur le territoire, moins nous serons dépendants des importations de produits fabriqués à l’étranger, ce qui contribuera à réduire notre empreinte carbone. Il s’agit donc d’un véritable enjeu écologique.

La réindustrialisation connaît une baisse de régime au premier semestre. De janvier à juin, Trendeo a recensé 61 annonces de fermetures d’usines ou d’ateliers de plus de 10 salariés, souvent au cours de liquidations judiciaires. Peut-on craindre une accélération de cette tendance ?

VINCENT MOULIN WRIGHT -

La vitesse de réindustrialisation semble marquer un pallier avec une dynamique un peu moins soutenue depuis un an. Notons que les mesures les plus fortes ont été lancées entre 2017 et 2022. Il faudrait donc poursuivre ce soutien avec de nouvelles mesures, tout du moins pas de mesures adverses. Mais il est vrai que le contexte économique s’est retourné. S’il y a des secteurs qui se portent bien (la Défense, le luxe, l’aéronautique…), d’autres (la chimie, l’automobile, la construction) sont en revanche en difficulté.

Depuis 2017, 300 sites industriels ont été créés mais 600 avaient fermé depuis 1990. Si le solde reste encore négatif sur le stock, le progrès est important. Il ne faut pas que cette tendance se poursuive sinon cela va devenir problématique.

Vous évoquez la nécessité de nouvelles mesures. Pouvez-vous expliquer ?

VINCENT MOULIN WRIGHT – Chacun doit s’accorder à ne surtout à ne surtout pas détricoter la politique de soutien à l’industrie, avec la poursuite de France 2030 et la sauvegarde du CIR (crédit impôt recherche), notamment. Des outils qui portent leurs fruits. L’industrie est devenue une grande cause nationale, elle ne mérite pas de devenir une variable d’ajustement budgétaire.

A ce propos, alors que le déficit public risque de dépasser les 6% cette année, le nouveau gouvernement cherche à faire des économies sur tous les plans. France 2030 est-il sous la menace de coupes budgétaires ?

VINCENT MOULIN WRIGHT – Je ne sais pas. Il faut attendre le discours de politique générale de Michel Barnier et la publication de la première ébauche du budget 2025 (qui devrait être présenté le 10 octobre en Conseil des ministres, ndlr). Pour l’heure, le gouvernement fait des esquisses et prend des orientations.

Donc, aucune raison de s’inquiéter ?

VINCENT MOULIN WRIGHT -

Au contraire. France Industrie a clairement établi une ligne rouge concernant les dispositifs de soutien les plus cruciaux. En ce qui concerne le prix de l’électricité, il est impératif que l’État et EDF parviennent à mettre en oeuvre l’accord conclu à la fin de l’année dernière sur les contrats d’approvisionnement à long terme en électricité. Il faut donc redémarrer cette négociation, aujourd’hui au point mort. Par ailleurs, il est crucial de continuer à baisser les impôts de production pesant sur l’industrie. De même, il faut revenir sur l’écrêtement des allègements de charges sur les salaires médian car ils pénalisent l’industrie. Enfin, les dispositifs de soutien efficaces comme le crédit d’impôt recherche doivent absolument être maintenus.

Le nouveau gouvernement cherche à faire des économies sur tous les plans. Le crédit impôt recherche, qui coûte chaque année 7,7 milliards d’euros à l’État, est justement l’un des dispositifs en ligne de mire. Où faut-il réaliser des économies ?

VINCENT MOULIN WRIGHT – Le gouvernement doit s’atteler à réduire les dépenses publiques, alors que les recettes de l’État n’ont cessé d’augmenter au cours des dix dernières années. La pression fiscale sur les entreprises et les ménages a déjà atteint son paroxysme. Augmenter les impôts des entreprises risque de pénaliser l’attractivité et la compétitivité. La solution est d’opérer à la fois des coupes budgétaires et de travailler sur l’efficacité des dépenses publiques, que ce soit dans la sphère sociale, ou dans les dépenses de fonctionnement de l’État.

Si l’État décide d’augmenter la fiscalité sur les entreprises, cela va-t-il freiner les ambitions d’investissements des industriels français ?

VINCENT MOULIN WRIGHT – Cela dépendra de quelle façon mais ce serait un signal négatif pour les investisseurs. Il y a deux risques majeurs : affaiblir le tissu des PME et ETI, et fragiliser l’attractivité de la France.

 

L’industrialisation de la France en panne ?

L’industrialisation de la France en panne ?

Même si les investissements continuent de progresser, les sites industriels diminuent d’après une récente étude. Sans doute aussi la conséquence d’un affaiblissement très net de la croissance que subissent surtout et d’abord les PME en sous- traitance . Selon l’étude dévoilée ce dimanche soir par le cabinet Trendeo qui se concentre sur le premier semestre 2024 le nombre d’ouvertures d’usines baisse, tandis que les fermetures augmentent par rapport à l’année précédente. La  dynamique est négative depuis le mois d’avril. Entre le mois de la fête de Pâques et août, le solde net de l’indicateur de Trendeo se situe à -10 et donc une tendance à la destruction de sites industriels sur l’ensemble de la France plutôt que la création.

Selon les auteurs, la France a créé exactement 9.597 emplois dans la « production industrielle » sur les huit premiers mois de l’année 2024. Cela peut sembler une bonne performance dans un contexte d’incertitudes politiques qui a provoqué un certain attentisme chez les chefs d’entreprises. Seulement, c’est le plus faible solde net entre créations et destructions d’emplois industriels en France depuis la crise sanitaire de la Covid-19 (plus de 15.000 destructions d’emplois cette année-là). À titre de comparaison, l’année 2021 avait permis de créer plus de 17.000 emplois industriels en France, puis près de 27.000 l’année suivante et enfin quasiment 21.000 en 2023.

Mais heureusement, l’investissement n’a été aussi élevé depuis 2009 à en croire Trendeo, qui signale que les montants injectés dans l’économie avoisinent les 50 milliards d’euros sur les huit premiers mois de l’année 2024.

« Ces évolutions en sens contraire s’expliquent par une hausse continue de l’investissement moyen par projet. Cette hausse de l’investissement moyen est principalement un effet de la réindustrialisation. L’industrie, plus capitalistique, représente une part croissante des montants investis : en tendance on passe de 25% de l’ensemble de l’investissement en 2009, année de crise, à près de 50% en 2024 », analyse le cabinet.

 

Quelques jours après la publication du rapport Draghi sur la compétitivité européenne, cette nouvelle étude du cabinet Trendeo démontre encore une fois que les investissements pour refaire de la France une puissance industrielle devront être bien plus importants.

« Nous sommes certes dans une phase de croissance de l’industrie en volume, mais celle-ci est globalement équivalente au reste de notre économie et surtout largement moindre que celle de nos pairs européens. C’est très bien d’avoir, comme l’Europe et comme le souligne la Rapport Draghi, deux piliers « classique » : une politique d’accompagnement de la décarbonation (et plus généralement de la transition écologique) et une politique d’innovation de rupture (…) En sus, nous avons besoin d’un troisième pilier, un pilier qui nous manque et qui réponde à notre singularité : une politique de densification notre tissu productif, pour accompagner tous les projets des PMI et des ETI ancrées dans les territoires », partageait vendredi soir, sur le réseau social Linkedin, Olivier LLuansi, auteur tout récemment du livre « Réindustrialiser, le défi d’une génération », aux éditions Les Déviations.

 

La France doit Retrouver une compétitivité industrielle au plan européen

 La France doit Retrouver une compétitivité industrielle au plan européen

L’expert en industrie Olivier Lluansi, Enseignant à l’Ecole des mines et à l’ESCP Business School ,  pose dans une tribune au « Monde » la question de la bonne échelle à suivre pour les politiques industrielles menées par le gouvernement : la France ou bien l’Europe.

 

En ces temps de campagne électorale, nous débattons sur le rôle de l’Europe. Pour certains, l’Europe est la cause principale de notre désindustrialisation. Pour d’autres, il n’existe pas de solution à notre renaissance industrielle en dehors d’elle.

Commençons par les faits : aujourd’hui la France industrielle est tristement singulière en Europe. Grande dans notre imaginaire collectif, avec les centrales nucléaires, le TGV, les Airbus et Ariane, etc., notre industrie manufacturière ne pèse en fait que 10 % de notre création de richesse, très loin derrière la moyenne européenne de 15 %, sans mentionner les 16 % de l’Italie, les 12 % de la Belgique ou de l’Espagne, les 18 % de la Suisse (hors EU) et les 19 % de l’Allemagne. Depuis l’impasse d’une vision de l’« industrie sans usine », nous sommes en queue du peloton, au même niveau que la Grèce, et ne devançant en Europe que Malte, Chypre et le Luxembourg.

Si la France s’est grandement désindustrialisée, ce n’est pas le cas de toute l’Europe. Cette singularité porte, en elle, une première conséquence. Puisque tous les pays de l’Union européenne (UE), grands ou moyens, et même certains « petits », disposent d’une part manufacturière dans leur création de richesse au moins 20 % supérieure à la nôtre, il est vain de blâmer le cadre européen.

Rétablir une compétition « loyale »

En termes directs, la France doit « balayer devant sa porte » et commencer par remettre à l’endroit ce que quarante ans de désindustrialisation en France ont « mis à l’envers ». Si la France souhaite peser, qu’il s’agisse de souveraineté économique, d’industrie verte ou d’équilibre commercial, elle doit assumer une ambition industrielle nationale et une compétitivité intra-européenne. Nous n’avons pas d’autre choix.

Réindustrialisation et compétitivité : c’est pas gagné

Réindustrialisation et compétitivité : c’est pas gagné

 

Si les « gros » investissements sont au rendez-vous depuis quelques années, il n’y a pas globalement de forte hausse des investissements directs étrangers vers la France. Des projets qui restent par ailleurs peu créateurs d’emplois d’après un papier de BFM. 

 
Un millésime record. 15 milliards d’euros d’annonces d’investissements de la part de grands groupes étrangers, et des patrons de multinationales toujours plus nombreux à se presser à Versailles pour le sommet Choose France. Pour l’exécutif, ces bons chiffres sont le fruit d’une politique pro-business qui n’a pas varié d’un iota depuis 2017.

 

Emmanuel Macron y voit ainsi « la reconnaissance du travail mené depuis sept ans basé sur la valorisation de nos savoir-faire, le maintien de notre énergie décarbonée, la création d’un cadre normatif favorable et la stabilité fiscale. »
Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire de son côté se félicitait ce matin que « la nation de consommateurs [redevenait] une nation de producteurs. »

Ces chiffres flatteurs suivent de quelques jours le rapport annuel du cabinet EY qui plaçait début mai la France en tête du classement de l’attractivité en Europe et ce pour la cinquième année consécutive. Avec 1194 projets d’implantation ou d’extension de sites, l’Hexagone fait mieux que le Royaume-Uni (985) et l’Allemagne (733).

Dans une Europe prise en étau entre les États-Unis et leurs généreuses subventions et la Chine prête à redécoller, la France semble faire figure d’exception.

Les facteurs d’attractivité sont nombreux. Position géographique centrale en Europe, qualité des infrastructures routières et de transports, formations d’excellence dans les domaines des mathématique et de l’ingénierie, énergie disponible, décarbonée et relativement peu coûteuse grâce au nucléaire… Ce sont les éléments mis en avant par les grands patrons de passage à Versailles.

La politique favorable aux entreprises depuis sept ans y a aussi contribué. Avec la baisse des impôts de production, la réduction du taux d’impôt sur les sociétés ou encore la création de la « flat-tax » sur la fiscalité du capital.

« Des efforts ont été faits, qui ont mis la France sur le devant de la scène, ça vaut donc la peine de les poursuivre, estime Ted Pick, le patron de la banque américaine Morgan Stanley. La France met beaucoup de sérieux et d’attention à être considérée comme un acteur mondial fiable et solide. C’est important. »
Évidemment, pour s’attirer les bonnes grâces des investisseurs internationaux, la France déroule le tapis rouge et n’hésite pas à sortir le chéquier. Pour convaincre par exemple le fabricant de batteries ProLogium d’installer son usine à Dunkerque, une subvention publique de 1,5 milliard d’euros a été proposée au groupe taïwanais. Mais c’est ce que font tous les États désireux d’attirer d’importants investissements. L’Allemagne a ainsi subventionné à hauteur de 10 milliards d’euros la future méga-usine d’Intel de Magdebourg.

Il faut néanmoins relativiser ces bons chiffres de l’attractivité française. D’abord parce que ces investissements restent peu créateurs d’emplois. Les 15 milliards d’euros de Choose France devraient créer en moyenne 179 emplois par projet (10.000 emplois annoncés pour l’ensemble des 56 projets). L’année dernière, les investissements n’étaient « que » de 13 milliards mais les emplois plus nombreux: 285 par projet (8.000 emplois annoncés pour 28 projets).

De son côté, l’étude EY (qui porte sur un autre périmètre) recence 35 emplois créés en moyenne par investissement étranger en France contre 49 en Allemagne, 61 au Royaume-Uni ou encore 299 en Espagne.

Coût du travail qui reste plus élevé que la moyenne européenne, peu de main d’oeuvre disponible, droit du travail plus contraignant… La question de l’emploi reste préoccupante en France.
Mais plus globalement, certains économistes estiment que ces annonces sont un peu l’arbre qui cache la forêt. Derrière ces annonces spectaculaires et bienvenues, l’attractivité de la France ne serait pas sur une pente aussi ascensionnelle que ça.

« L’évolution des IDE (investissements directs à l’étranger) entrants et sortants évolue en dents de scie, indique Sylvain Bersinger, du cabinet Asteres. Dans l’ensemble, il ne semble pas y avoir eu de hausse régulière de flux d’IDE entrants depuis une dizaine d’années. Au vu de la variation des flux d’IDE, il semblerait que l’attractivité du pays ait globalement stagné. »

Ainsi si les investissements étrangers se sont élevés à 34,6 milliards d’euros en 2022 en France, indique l’Insee, le montant du flux était supérieur à 35 milliards en 2018 et avait même frôlé les 40 milliards en 2015.

Concernant l’industrie, s’il y a bien un sursaut dans le pays depuis quelques années avec notamment plus de 100.000 emplois recréés, la production a elle tendance à stagner.

« En mars 2024, le volume de production industrielle était identique à ce qu’il était en janvier 2010, constate Sylvain Bersinger. [...] cela signifie que la productivité moyenne des emplois industriels diminue, ce qui peut être un signe inquiétant quant au niveau de gamme de l’industrie française si la tendance s’avérait durable. »
Si les signaux envoyés par Chose France sont positifs, le chemin vers la réindustrialisation est encore très long.

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