Archive pour la Catégorie 'justice'

Exécution provisoire : l’effet boomerang

Exécution provisoire : l’effet boomerang

 Le procès des assistants parlementaires du RN a braqué les projecteurs sur une pratique qui écorne le principe de la présomption d’innocence et constitue un mauvais remède aux lenteurs de la justice estime Sophie Obadia, avocate dans La Tribune.

Nos concitoyens découvrent les peines d’emprisonnement assorties de l’exécution provisoire, qui sont pourtant déjà anciennes. Pierre Palmade et Nicolas Bedos viennent d’être condamnés à des peines d’emprisonnement, aménageables ou non, assorties de cette fameuse exécution provisoire. Autrement dit, ils doivent commencer à purger leur peine, en détention pour Pierre Palmade, qui sera convoqué prochainement pour être placé sous écrou dans une maison d’arrêt de la région bordelaise ; et à son domicile avec bracelet électronique pour Nicolas Bedos, après son entrevue avec le juge d’application des peines.

Le droit de ces deux justiciables à un recours effectif devant un juge d’appel est de fait quasi anéanti. La peine a commencé à s’appliquer et, le temps d’organiser un deuxième procès où tous les éléments de culpabilité et de personnalité seraient remis dans la balance, elle vient contrecarrer le cours commun des procédures qui reposait sur le principe que, dans notre droit pénal, l’appel est suspensif. Ce principe, autrefois intangible, qui assoit notamment la présomption d’innocence, n’est plus respecté, car le législateur dans un premier temps puis les magistrats dans un second temps ont estimé qu’il ne répondait plus à l’objectif devenu prioritaire de l’efficacité de l’exécution des peines en France.

La médiatisation de ces deux cas, comme un trompe-l’œil, pourrait laisser penser au lecteur que c’est une dureté réservée aux puissants. Les avocats pénalistes savent que c’est une tendance de fond venue, paradoxalement, de la répression de la délinquance des mineurs. Depuis longtemps, les mineurs condamnés voyaient souvent leur peine assortie de l’exécution provisoire afin de favoriser leur réinsertion rapide et leur « relèvement éducatif ». Mais au-delà, pour les condamnés majeurs, des peines complémentaires d’interdiction de gérer, d’inéligibilité, d’interdiction de conduire, de travailler avec des mineurs par exemple étaient déjà assorties de cette exécution provisoire.

Les prévenus du procès des assistants parlementaires du RN sont en train de prendre la mesure d’une réalité : les juges sont répressifs.

En 2009, le législateur a encore allongé la liste des délits et peines pouvant donner lieu à l’exécution provisoire, et désormais s’y ajoutent la plupart des condamnations pour violences intrafamiliales qui sont majoritairement assorties de cette exécution provisoire. Plus personne ne semble le contester. Désormais, encouragés par la loi du 23 mars 2019 visant à renforcer l’efficacité et le sens de la peine, les juges du siège, dans leur pratique, ont un usage fréquent à cette faculté de contourner le droit effectif au recours, et la motivation des décisions rappelle le plus souvent qu’il s’agit d’un objectif d’intérêt général visant à favoriser l’exécution de la peine et à prévenir la récidive.

Une formulation très large qui permet à peu près tout. Les prévenus du procès des assistants parlementaires du Front/Rassemblement national sont en train de prendre la mesure d’une réalité : les juges sont répressifs. Et, à analyser le réquisitoire, le risque pour eux ne se situe pas seulement au niveau de la peine complémentaire d’inéligibilité. Imagine-t-on les élus du Rassemblement national condamnés à de l’emprisonnement avec exécution provisoire et, au surplus, avec mandat de dépôt à l’audience ou à effet différé ? Notre droit, qui ne fait plus grand cas du double degré de juridiction, le permettrait.

 

Puisque le respect du principe de la présomption d’innocence est écorné, puisque le droit à un recours effectif est érodé, la question devient, pour les observateurs : la justice veut-elle ainsi donner à voir un nouveau visage ? Celui de la fermeté, devenu le sujet du débat public du moment. Les juges veulent-ils ainsi répondre au plus vite aux attentes des victimes, dont la place s’élargit dans le procès pénal ? Cette volonté politique est affichée depuis 2009 au moins.

D’autres, mauvais esprits, penseront que l’inflation des peines exécutoires dès la première instance est un leurre bien commode qui permet de rattraper le temps infini perdu dans les méandres de l’enquête ou de l’information judiciaire avant la décision de jugement. En effet, ces peines avec exécution provisoire, y compris pour les condamnations assorties d’un mandat de dépôt (obligation d’être placé sous écrou), peuvent être prononcées pour des faits anciens alors que le trouble à l’ordre public n’est plus actuel mais pour l’intérêt général.

La décision rendue sur le siège, à l’issue du débat judiciaire, à l’heure du journal télé, nous plonge dans un vilain spectacle avec gros plans sur le visage du condamné.

 

Autrement dit, l’extension voire la généralisation de ce « nouveau » moyen qui restreint l’intérêt de faire appel constitue-t-il une réponse à l’épineux débat sur les lenteurs de la justice ? Si c’est le cas, c’est inadmissible, car c’est encore un mauvais remède. Tout comme il reste difficile d’accepter ces images de l’audience consacrée au dossier Palmade d’un homme traqué et hébété. L’avocat reste songeur. La décision rendue sur le siège, à l’issue du débat judiciaire, à l’heure du journal télé nous plonge dans un vilain spectacle avec gros plans sur le visage du condamné qui devra encore attendre – et c’est cruel – pour connaître le jour et l’heure de son entrée en prison.

Ces images nous montrent une nouvelle dimension de la justice contemporaine. Ici, en France. À moins que ce mandat de dépôt différé avec exécution provisoire ne soit le signe des temps, de la lutte contre la toxicomanie et ses effets sociétaux, qui n’est pas un faux débat. Une annonce ferme et symbolique du vote à venir sur le nouveau délit routier. Une décision pour l’exemple, en somme.

 

La dictature du tribunal médiatique

La dictature du tribunal médiatique

 Jade Dousselin, avocate de profession, s’interroge sur le rôle du phénomène « du tribunal médiatique » dans les affaires judiciaires. Vient-il réparer les défaillances de notre système ou est-il simplement un dangereux miroir aux alouettes ? ( dans la Tribune)

Depuis quelques mois maintenant, nous, acteurs du monde judiciaire, nous interrogeons sur ce nouveau phénomène dit « du tribunal médiatique » et sur son rôle dans nos affaires judiciaires. Mais de quoi ce tribunal médiatique est-il le nom ? Vient-il réparer les défaillances de notre système ou est-il simplement un dangereux miroir aux alouettes ? La réalité qui s’impose à nous, c’est que le tribunal médiatique oblige les auxiliaires de justice que nous sommes à l’intégrer dans l’exercice de leur fonction, afin que l’émotion ne prenne pas le pas sur la raison. Aujourd’hui, chaque fait judiciaire, réel ou supposé, est commenté, disséqué, analysé, sur-analysé par la presse et les réseaux sociaux.

Cette course à l’information et à son commentaire tend à déformer la réalité, avec comme conséquence trop fréquente une mise à mal de la vie privée des parties concernées et un piétinement de la présomption d’innocence des mis en cause. Je pense, par exemple, à l’affaire du petit Émile, à celle de M. Palmade ou encore plus récemment à celle de M. Mbappé, quand son implication n’est même pas encore confirmée. Il est des costumes trop bien taillés pour espérer que la justice parvienne un jour à vous en défaire totalement. Comment imaginer, malgré la force d’impartialité dont ils aimeraient faire preuve, que des magistrats, après des mois et des années d’habillage médiatique, puissent encore parvenir à rendre justice sans aucune influence extérieure ?

Et nous, y parviendrions-nous ? Et vous, y parviendriez-vous ? Dans la presse, la hiérarchie des normes et du droit, comme nous l’entendons, s’efface souvent au profit d’un sensationnalisme toujours plus présent et pressant. Dans cet univers de l’immédiateté et de l’émotionnel exacerbés, le rôle de l’avocat est de rééquilibrer la pensée au service de fondamentaux souvent oubliés : le droit pénal juge à charge et à décharge, en fonction des faits et de la personnalité des individus concernés. La justice pénale condamne mais ne venge pas. Avant les victimes, c’est la société qu’elle doit réparer. De là naît une incompréhension : une répression, aussi forte soit-elle, peut-elle répondre à une douleur que l’on ne peut, par définition, pas quantifier ?

La question judiciaire, contrairement au sujet médiatique, répond au fait pénal, c’est-à-dire à une infraction et à son niveau de dangerosité. Pas à l’émotion qui en découle. Nous avons pu constater ces derniers mois à quel point ce gouffre peut parfois sembler infranchissable à beaucoup de citoyens, par exemple dans les affaires de délits routiers où le grand public réclame à cor et à cri des incarcérations préventives automatiques. Or, pour ces délits dits involontaires, la loi pénale impose par principe la liberté et par exception l’incarcération. Naît alors un schisme entre l’émotion populaire légitime et la réponse pénale, qui ne peut être le pendant de cette émotion. La limite à la critique de la place du média dans les affaires arrive lorsque le système judiciaire, qui devait être son rempart, devient lui-même défaillant.

Nous sommes face à deux univers défaillants qui ont le sentiment de pouvoir combler les manquements de l’un et de l’autre, sans imaginer qu’ils pourraient potentiellement les aggraver.

Et que les grands principes qui fondent notre droit – par les manquements dans leur exécution – font des médias des palliatifs. En effet, combien d’affaires auraient échappé à la justice si la presse n’avait pas été là pour briser une certaine omerta et amener dans le débat public des sujets jusqu’alors ignorés. Lorsqu’une personne est mise en cause sur la place publique pour des faits de violences, notamment à caractère sexuel, peut-on seulement brandir la présomption d’innocence comme seule réponse à la condamnation publique lorsque l’on sait les balbutiements allant jusqu’à la déficience de l’institution sur le sujet ? Nous sommes face à deux univers défaillants qui ont le sentiment de pouvoir combler les manquements de l’un et de l’autre, sans imaginer qu’ils pourraient potentiellement les aggraver.

L’émotion dont vous pensiez à un instant T qu’elle serait votre meilleur défenseur peut devenir demain le marchepied à l’injustice que vous redoutiez. Ces empressements mettent à mal nos fondements judiciaires et leur exécution concrète : l’écoute et l’accueil des victimes, la présomption d’innocence, l’impartialité de la décision pénale, la personnalisation de la peine et finalement la lutte contre l’arbitraire. C’est pour cela que le rôle de l’avocat que je suis, dans le débat public, est de créer des ponts entre ces mondes, et que j’ai la conviction que le fait de retrouver une balance médiatique permettra tôt ou tard à la justice de retrouver la sienne. Ne demandez pas à la justice d’être son propre avocat. Exigez de vous ce que vous êtes en droit d’exiger d’elle : le courage de la balance.

Justice-Meurtre de Philippine : le suspect « accepte » d’être extradé

Justice-Meurtre de Philippine : le suspect « accepte »  d’être extradé 

Taha O., Marocain âgé de 22 ans et principal suspect du meurtre de Philippine en septembre, « accepte « d’être extradé vers la France, a annoncé son avocate sur BFMTV. «Mon client a décidé d’accepter l’extradition pour être déféré aux juges français et s’exprimer sur le dossier (…). Les autorités suisses vont organiser le transfert du détenu de la Suisse vers la France», a déclaré Me Florence Yersin, son conseil en Suisse, précisant que le délai serait de «quelques jours»Taha O. a été arrêté à la gare principale de Genève le 24 septembre. La France a déposé une demande d’extradition le 9 octobre mais le suspect avait refusé dans un premier temps d’être extradé.  Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a « exhorté »  à faire évoluer notre arsenal juridique», le 25 septembre, au lendemain de l’arrestation du suspect en Suisse.

 

La presse judiciaire en danger ?

 La presse judiciaire en danger ?

 

Marine Babonneau, présidente de l’Association de la presse judiciaire, déplore, dans une tribune au « Monde », l’habitude prise par de nombreux parquets de ne plus révéler certaines informations et de faire ainsi obstacle à la liberté d’informer.

 

Une bonne justice se rend dans les tribunaux, publiquement, au nom du peuple français. Dès lors, elle ne devrait rien avoir à craindre en se découvrant devant les citoyens. On connaît la formule : « Si vous n’avez rien à cacher, vous n’avez rien à craindre. »Depuis plusieurs années, il est pourtant de plus en plus difficile pour la presse judiciaire d’accomplir son travail. Insidieusement, la justice devient un monde opaque, tourné vers lui-même, qui considère en intrus tous ceux qui osent poser des questions sur son fonctionnement. Un journaliste qui n’a pas accès à l’information, c’est un citoyen mal – ou pas – informé. Et un citoyen qui est mal informé, c’est un citoyen abreuvé de fausses informations et qui perd confiance dans les institutions. Nul ne peut se satisfaire de voir la communication confisquée, faute de sources fiables, par les syndicats de policiers, les dirigeants politiques, et les polémistes qui occupent le terrain que la justice leur abandonne.

Or, certains parquets – pas tous, heureusement ! –, dépositaires d’une parole encadrée par la loi, prennent l’habitude de livrer au compte-gouttes des non-informations pour calmer de manière artificielle la curiosité des journalistes et donc des citoyens. De quoi ont-ils peur ? Le premier d’entre eux par le nombre de magistrats, celui de Paris, refuse désormais de simplement confirmer le placement en garde à vue de telle ou telle personnalité, au nom de la présomption d’innocence. Absurde : ce mutisme contribue à encourager les ragots, rumeurs et imprécisions dont se plaignent tant les procureurs.

Par ailleurs, il est aujourd’hui fréquent de donner à la presse consigne de ne pas révéler l’identité des magistrats qui siègent aux procès. Absurde, encore, d’autant plus que tous ne le réclament pas.

Carcassonne : encore des menaces de mort envers une enseignante

Carcassonne : encore des menaces de mort envers une enseignante

Comme chaque jour il y a au moins un fait divers faisant état de violences envers des enseignants. Et comme chaque jour cela sera rangé dans la rubrique faits divers alors qu’il s’agit d’un fait de société surtout quand en plus la violence et le faite d’une adolescente fichée S !

 

Une mesure conservatoire a par ailleurs été prononcée par le chef d’établissement à l’encontre de l’élève mise en cause avant l’engagement prochain d’une procédure disciplinaire. Tout accès au lycée lui est désormais interdit. Un dispositif d’accompagnement et de suivi a été proposé à l’enseignante verbalement agressée, indique enfin le rectorat. La garde à vue de la lycéenne était toujours en cours ce mercredi soir.

La question est pour combien de temps?

 

Un projet de loi sur la «comparution immédiate» des mineurs ?

Un  projet de loi sur la «comparution immédiate» des mineurs ?

Pour le Premier ministre, l’idée est  d’œuvrer à un « sursaut d’autorité » face à « l’addiction à la violence » de certains jeunes. Il souhaite ainsi « que dans certains cas, par exemple dans les cas de violence aggravée, quand vous avez plus de 16 ans, quand vous êtes récidiviste, il puisse exister une procédure, un peu comme une comparution immédiate ». Gabriel Attal tient à souligner que ce faisant, « le tribunal se prononce à la fois sur la culpabilité et la sanction, tout de suite après l’infraction ».

Une mesure fortement critiquée par les syndicats de magistrats. Pour l’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), la comparution immédiate et l’atténuation de l’excuse de minorité sont des « lignes rouges ». « Les jeunes ne sont pas confrontés assez vite à leur punition », estimait pour sa part la magistrate Béatrice Brugère dans l’Opinion.

 

 

Justice: Le Conseil constitutionnel contre le délit d’ »outrage en ligne » !

Justice: Le Conseil constitutionnel contre  le délit d’ »outrage en ligne » !

Le Conseil constitutionnel a censuré sur le fond, vendredi 17 mai, une des mesures les plus controversées du projet de loi pour sécuriser internet (SREN), celle créant un délit d’outrage en ligne pouvant être sanctionné d’une amende forfaitaire. Notons par ailleurs que le même délit par écrit est, lui, susceptible d’être sanctionné !

Le texte adopté définitivement le 10 avril prévoyait la création d’un délit d’outrage en ligne, afin de sanctionner tout contenu qui « porte atteinte à la dignité d’une personne ou présente à son égard un caractère injurieux, dégradant ou humiliant » ou « crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante » dans l’espace numérique. Mais le Conseil constitutionnel a considéré que ce délit portait une « atteinte à l’exercice de la liberté d’expression et de communication qui n’est pas nécessaire, adaptée et proportionnée ».!!!

Le délire sur les réseaux sociaux va donc pouvoir continuer !

Le Conseil constitutionnel contre le délit d’ »outrage en ligne » !

Le Conseil constitutionnel contre  le délit d’ »outrage en ligne » !

Le Conseil constitutionnel a censuré sur le fond, vendredi 17 mai, une des mesures les plus controversées du projet de loi pour sécuriser internet (SREN), celle créant un délit d’outrage en ligne pouvant être sanctionné d’une amende forfaitaire. Notons par ailleurs que le même délit par écrit est, lui, susceptible d’être sanctionné !

Le texte adopté définitivement le 10 avril prévoyait la création d’un délit d’outrage en ligne, afin de sanctionner tout contenu qui « porte atteinte à la dignité d’une personne ou présente à son égard un caractère injurieux, dégradant ou humiliant » ou « crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante » dans l’espace numérique. Mais le Conseil constitutionnel a considéré que ce délit portait une « atteinte à l’exercice de la liberté d’expression et de communication qui n’est pas nécessaire, adaptée et proportionnée ».!!!

Le délire sur les réseaux sociaux va donc pouvoir continuer !

Sécurité : juguler la violence, mais aussi de s’attaquer aux causes

 Sécurité : juguler la violence, mais aussi de s’attaquer aux causes 

 

Les annonces du gouvernement sur la justice des mineurs relèvent de l’improvisation, estime Jean-Pierre Rosenczveig , l’ancien président du tribunal pour enfants de Bobigny. Le premier ministre appelle à un « sursaut d’autorité » à l’égard des plus jeunes tenus pour être démesurément violents ou susceptibles de l’être. Comme le président de la République, qui tenait pour responsables des émeutes de l’été 2023 des enfants ayant échappé à l’autorité parentale. L’un et l’autre fustigent des parents démissionnaires et dénoncent une « culture de l’excuse ».

Ce discours sur la violence exponentielle des enfants n’est pas d’aujourd’hui. Jadis les Apaches, puis les blousons noirs, plus récemment les sauvageons. Il est court. La violence naturelle des plus jeunes est indéniable et s’est accentuée depuis les années 1980 ; pour autant, elle ne peut pas servir d’écran de fumée aux problématiques sociales profondes de notre société restées sans réponses. Surtout, assurer la sécurité exige non seulement de s’attacher à juguler des jeunes d’ores et déjà inscrits dans des processus de violence, mais à s’attaquer aux causes pour éviter de nouvelles vagues.

Or, le plan avancé par le gouvernement relève de l’improvisation et de l’activisme. Il a le souci d’identifier le pouvoir sur la lutte contre l’insécurité, fonction régalienne s’il en est, sans être de nature à répondre aux enjeux.

Introduire la comparution immédiate pour les mineurs de 16 ans ? D’ores et déjà, avec le code de justice pénale des mineurs entré en vigueur en 2021, ils peuvent être jugés dans un délai d’un mois et entre-temps placés en détention provisoire. Dès 13 ans, la détention provisoire pour crime est possible, comme toutes les affaires récentes l’ont illustré.

En remettant en cause l’excuse atténuante de minorité, veut-on punir les enfants comme des adultes en consacrant une justice à l’acte et non pas à la personne qui le commet, à l’encontre du principe d’individualisation des peines ?

Attaque du fourgon pénitentiaire : Des extractions judiciaires nombreuses et dangereuses

Attaque du fourgon pénitentiaire : Des extractions judiciaires nombreuses et dangereuses

Les  extractions judiciaires constituent un extraordinaire ballet entre prison et tribunal pour les détenus dans le cas de la procédure judiciaire. Des procédures sans doute d’un autre temps qui mobilisent d’énormes moyens sans pour autant nécessairement éclairer la justice.
Des moyens techniques de communication pourraient sans doute supprimer une grande partie de ses extractions judiciaires devenues particulièrement dangereuses avec la montée de la violence comme celle de l’attaque mortelle d’Incarville qui a fait deux morts et des blessés. On pourrait aussi imaginer que les juges d’instruction dans certaines instances se déplacent dans les établissements pénitentiaires à la place des détenus.
Le fourgon transportait Mohamed Amra, âgé de 30 ans, déjà condamné 13 fois, pour qu’il soit entendu par un juge d’instruction au tribunal judiciaire de Rouen. « Ses complices ont tiré sur les escortes à l’arme lourde », a précisé le ministre de la Justice lors de son point-presse. Le détenu purgeait plusieurs peines pour des « rodéos organisés » et des vols « avec effraction ». Il est par ailleurs mis en examen pour « enlèvement et séquestration ayant entraîné la mort ».

 

 

 

Drogue à Bordeaux: prison avec sursis pour un trafiquant

Drogue à Bordeaux:  prison avec sursis pour un trafiquant 

Un verdict qui en dit long sur le fossé entre les discours de lutte contre la drogue et les mesures concrètes. Un quadragénaire pratiquant le chemsex a été condamné lundi à Bordeaux à dix mois de prison dont neuf avec sursis pour trafic de stupéfiants.

Le prévenu, resté un mois en détention provisoire, est ressorti libre du tribunal correctionnel. Le parquet avait requis trois ans d’emprisonnement dont 18 mois avec sursis.

En épluchant ses comptes bancaires et son compte Telegram intitulé «Astrotrip», les enquêteurs ont retrouvé la trace de 42.000 euros de virements reçus et d’une centaine de clients. «C’est un problème de santé publique majeur et on le voit à Bordeaux», a déclaré la représentante du ministère public Marion Mare dans ses réquisitions. «On joue aux apprentis chimistes sans rien contrôler, on est sur une dangerosité maximum de dérapage qui peut conduire à la mort.» Cette affaire est jugée après les décès de trois hommes pratiquant le chemsex depuis la mi-mars à Bordeaux. Le parquet n’a établi «aucun lien» entre ces dossiers, ni avec celui jugé lundi.

 

Montpellier -Samara :Encore des mesures disciplinaires symboliques ?

Montpellier -Samara :Encore des mesures disciplinaires symboliques

Après la tentative deux meurtres sur la jeune élève de 13 ans à Montpellier, il ne faut guère s’attendre à des mesures disciplinaires très significatives. Les responsables de cette tentative de meurtre qui ont agi au nom de l’intégrisme musulman se verront sans doute sous le coup de mesures symboliques. Tout simplement parce que le dispositif juridique est complètement inadapté pour les mineurs et que de toute façon la justice est systématiquement complaisante en plus d’être encombrée.

Pour cette tentative de meurtre pour des motifs religieux il n’y a pourtant que la prison qui peut constituer une sanction à la hauteur de l’enjeu.

Samara, une adolescente de 13 ans frappée début avril devant son collège de Montpellier, va reprendre les cours à distance et les élèves mis en cause dans son agression vont eux passer devant un conseil disciplinaire, a indiqué dimanche le rectorat de cette académie.

 Afin «de faire toute la lumière sur les faits»l’enquête administrative lancée par la ministre de l’Éducation Nicole Belloubet, qui avait déjà été prolongée d’une semaine mi-avril, va, elle, se poursuivre, tout comme l’enquête judiciaire menée sous l’autorité du parquet, selon la même source.

La cellule d’écoute qui avait été mise en place le lendemain de l’agression, survenue le 2 avril, afin de recueillir la parole des élèves mais aussi des personnels va rester active «au moins la première semaine de la reprise des cours». Il en est de même pour les équipes mobiles académiques de sécurité (EMAS) qui resteront mobilisées au moins la première semaine de la reprise dans ce collège.

 

Violence des jeunes : l’excuse de minorité ne doit plus être la règle (Xavier Bertrand)

Violence des jeunes : l’excuse de minorité ne doit plus être la règle (Xavier Bertrand)

 

Pour Xavier Bertrand, « il y a trop d’impunité dans notre pays ». Revenant sur la violence des mineurs, le président Les Républicains de la région des Hauts-de-France estime ce jeudi 18 avril sur BFMTV-RMC que « l’excuse de minorité ne peut plus être appliquée systématiquement ». Celle-ci consiste en « une atténuation de responsabilité » des mineurs « en raison de leur âge », précise le Code pénal.

Elle implique une « présomption de non-discernement ». « La justice considère ainsi qu’un mineur de moins de 13 ans qui commet une infraction n’est pas capable, en principe, de mesurer la portée de son acte », précise le ministère de la Justice. Par ailleurs, « les peines encourues par les mineurs sont toujours réduites de moitié par rapport à celles prévues pour les personnes majeures. »

 

« Qu’ils soient (jugés) comme des adultes », estime Xavier Bertrand, plaidant pour des « réponses qui soient dures ». Le Grenelle sur la violence des mineurs, demandé par Emmanuel Macron? « Ce n’est pas ce qu’il faut », juge-t-il, demandant des « actes ».

Selon l’élu de droite, l’excuse de minorité « ne doit plus être la règle ». S’il est déjà possible pour le juge de la lever exceptionnellement, Xavier Bertrand considère néanmoins que si cela devient la règle, les juges n’auront plus la possibilité de « mettre de côté » la condamnation d’un mineur.

Corruption Renault : accusée, Rachida Dati contre-attaque avec culot

Corruption Renault : accusée,  Rachida Dati contre-attaque avec culot

L’ex-ministre de la Justice de Nicolas Sarkozy et ex-députée européenne est mise en examen pour corruption et trafic d’influence passif par personne investie d’un mandat électif public depuis juillet 2021, dans l’enquête sur des contrats noués par une filiale de Renault-Nissan quand Carlos Ghosn en était le PDG. A l’origine de cette affaire : un flou entre les activités d’avocate et de députée européenne de Rachida Dati. Les soupçons portent sur les 900.000 euros que lui a versés entre 2010 et 2012 RNBV, filiale néerlandaise de l’alliance Renault-Nissan, alors qu’elle était avocate et députée européenne. Les investigations ont cherché à déterminer si ses honoraires correspondaient à des activités précises ou s’il s’agissait d’un emploi de complaisance ayant pu masquer un lobbying au Parlement européen, interdit pour les eurodéputés. L’ancienne garde des Sceaux qui conteste les accusations estime de son côté que l’affaire est prescrite !Rachida Dati n’hésite pas à contre-attaquer et à faire citer en justice le PDG actuel de Renault Dominique Sénart.

Dans la citation, le conseil de Rachida Dati affirme que « le but recherché par Jean-Dominique Senard était d’accabler Carlos Ghosn dans une volonté générale de dénigrement et de critique des choix de son prédécesseur (avec) une volonté claire d’omerta, destinée à accabler artificiellement Madame Rachida Dati pour atteindre Carlos Ghosn ».

 

Rachida Dati a saisi le tribunal correctionnel de Nanterre via la procédure dite de « citation directe » afin de faire comparaître Jean-Dominique Senard le 23 mai.

Justice : système en crise

Justice :  système en crise

Béatrice Brugère, magistrate et secrétaire générale d’Unité Magistrats-FO, propose dans son livre « Justice, la colère qui monte » plusieurs pistes de refondation y compris répressives.( dans « le Monde »)

Livre. Ce n’est pas la voix syndicale que l’on entend le plus dans le champ médiatique. Il est donc d’autant plus intéressant de se pencher sur le premier essai de Béatrice Brugère, magistrate pénaliste depuis une vingtaine d’années, secrétaire générale du syndicat Unité Magistrats, organisation affiliée à Force ouvrière. Dans un vigoureux livre loin d’être consensuel (Justice : la colère qui monte, Editions de l’Observatoire, 286 pages, 22 euros), elle fait le portrait d’une justice traversée par diverses crises et propose plusieurs pistes de refondation, dont certaines s’inscrivent dans une vision assez répressive.Les deux premières parties de cet ouvrage d’un peu moins de 300 pages sont consacrées au constat. Le lecteur y retrouvera nombre de critiques émises d’abord par la « tribune des 3 000 » magistrats et greffiers parue dans Le Monde le 23 novembre 2021 – qui fustigeait une justice au rabais –, mais aussi dans les travaux des Etats généraux de la justice, lancés au même moment.

Le bilan dressé par Béatrice Brugère est donc sévère : malgré les hausses budgétaires et les recrutements massifs, la justice serait en panne, paralysée par des réformes trop nombreuses et inefficaces. La réponse pénale serait insuffisante, la justice civile, dégradée. La justice connaîtrait également une profonde « crise du sens » qui se déclinerait sur plusieurs points. L’autrice défend ainsi une profonde réforme du parquet visant à créer un statut rénové avec une indépendance plus forte des procureurs. Elle fustige également un manque d’« impartialité », particulièrement en ce qui concerne le Conseil constitutionnel, dont la composition serait, selon elle, beaucoup trop politique, donc susceptible de conflits d’intérêts.

La troisième et dernière partie de l’ouvrage traite des propositions. Béatrice Brugère plaide pour une refondation articulée autour d’une sorte de choc de simplification des règles et des mécanismes. Certaines propositions vont même assez loin, comme celle de créer un seul ordre de juridiction, alors que la tradition française sépare justice judiciaire et justice administrative. De même, elle défend l’idée d’une Cour suprême unique, fusionnant les fonctions des Cour de cassation, du Conseil d’Etat et du Conseil constitutionnel.

Autre volet important de sa démonstration : la justice pénale. Partisane d’une réponse ferme, Béatrice Brugère veut, entre autres, « réhabiliter la sanction », et défend l’idée de mettre en place des peines très courtes, de quinze jours maximum, dès le premier délit. Leur « effet dissuasif » serait, selon elle, très efficace contre la récidive.

 

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