La crise financière va remettre en cause, comme en Grèce, la nature et l’importance de L’Etat providence; la réforme du budget de l’Etat et du système des retraites sera inévitable. Pour les retraites, on observe que le montant moyen est de 1800 euros par mois environ pour 1700 pour le salaire moyen. Cette situation ne pourra perdurer eu égard à l’état de nos finances publiques. La France offre par ailleurs la particularité d’avoir un relatif haut niveau de retraites par rapport aux autres pays et de recourir davantage au financement public. Il s’agit donc là d’un champ de réforme prioritaire dont la gestion sera particulièrement difficile eu égard au caractère quasi tabou de la remise en cause des « avantages acquis » dans notre pays.
La France occupe la tête du palmarès mondial pour le montant des retraites qui est très au dessus de celui des autres pays. Il faut observer que ces chiffres datent du milieu des années 2000 et que le classement en 2011 a du évoluer encore en faveur de la France puisqu’il n’y pas eu dans notre pays de réforme encore très perceptible sur le montant et surtout sur les modalités de financement. La question des retraites est le plus souvent posée en termes de justice sociale et non en termes économiques. Précisément vis à vis de la justice sociale, on peut s’interroger sur le bien fondé de revenus de retraites supérieurs à ceux des salariés. En général, les besoins des retraités sont notoirement plus faibles que ceux des actifs. Beaucoup possèdent déjà un logement entièrement payé, n’ont plus à assurer la charge des enfants et bénéficient de frais de transport plus réduits en l’absence de déplacements domicile travail. Certes si la mobilité journalière est plus réduite elle est en partie compensée par la mobilité liée à des motifs de loisirs. On objectera à juste titre qu’il s’agit d’une moyenne des revenus de retraités et que la dispersion autour de cette moyenne dissimule évidemment des disparités. Cependant la reconnaissance des faibles pensions (ou des aides sociales remplaçant ou complétant ces pensions) ne saurait masquer le fait que globalement le niveau des retraites est excessif par rapport aux salaires. Aujourd’hui, les retraites ne peuvent être payées que grâce au recours à l’emprunt qui constitue en fait un report de charges sur les générations à venir qui, elles, sur les tendances actuelles, devront renoncer à de telles conditions de retraites voire ne pas en avoir du tout.
La France est très nettement en tête de tous les pays concernant le recours à la collectivité pour le financement des pensions. De l’ordre de 80% du montant des revenus des retraités sont donc financés par l’Etat. Ce qu’on nomme la solidarité nationale (retraites par répartition). En fait ce système repose sur la solidarité intergénérationnelle, les actifs payent pour les retraités. La question est de savoir si ce concept de solidarité n’est pas dévié de son objet puisque réservé à une partie de la population. Encore une fois, il est en effet inenvisageable que ceux qui payent pour les retraités puissent bénéficier le moment venu de telles conditions de retraites. On objectera bien sûr que le financement serait possible avec une croissance nettement plus vigoureuse voire avec un prélèvement plus important sur le capital.
Malheureusement la France et bien d’autres pays développés sont condamnés à la croissance molle pour des années du fait en particulier du manque de compétitivité de notre économie. Une compétitivité largement plombée par les prélèvements fiscaux dont ceux imposés par la situation financière des retraites. On peut évidemment envisager un financement plus importants en provenance des revenus du capital; cette piste sera également nécessaire mais il ne faut pas en attendre la solution miracle car les ressources qui en seront tirées seront très insuffisantes pour équilibrer le régime des retraites. A moins bien sûr de plomber encore un peu plus la compétitivité, donc la croissance et l’emploi. Bref précisément un cercle vicieux dont nous devons sortir pour préserver des « acquis sociaux » qui aujourd’hui ne répondent ni à des critères d’équilibre financier, ni même à des critères de justice sociale. Comme ces questions fondamentales sont largement taboues en France, on précède donc par petits pas, ce qui nous promet sans doute une réforme des retraites tous les 3 ou 5 ans au rythme de l’accroissement des trous financiers.