2022: Un sursaut de la France est nécessaire ( maire de Cannes)
Dans une interview à l’Opinion (extrait), le maire de Cannes déclare qu’il pourrait être candidat à la primaire envisagée cet automne. Avec son mouvement Nouvelle énergie, il travaille à un projet de gouvernement
Sur quoi se jouera la présidentielle de 2022 ?
Sur la présence ou non sur la ligne de départ d’une personnalité qui sera en mesure d’avoir une vision claire, un caractère fort et une détermination totale à mener une action résolue. La période actuelle présente un avantage. Comme il n’y a pas encore de cristallisation personnelle, cela permet de mettre dans le débat public les thèmes qui doivent mobiliser les Français pour les dix années à venir. Aujourd’hui il y a, selon moi, deux impératifs. Le premier est de faire émerger un diagnostic partagé. Oui, il y a un déclassement français. Notre déficit public est un très grave problème et on ne pourra pas continuer longtemps à dépenser deux fois plus que ce que l’on gagne comme actuellement. Notre déficit commercial et notre déclin industriel (la part de l’industrie manufacturière est passée de 18% du PIB à 10%, derrière l’Espagne), les ratés de notre modèle culturel et éducatif, les réalités de l’insécurité… sont des handicaps majeurs. Le second impératif est de sortir du fatalisme. « Cela a toujours été comme cela », » on n’y changera rien »… : c’est un discours qui existe à droite. Face à lui, nous devons montrer qu’une nouvelle espérance est possible. On peut être l’eldorado de l’Europe. La seule chose qui doit nous préoccuper est l’héritage que nous laisserons aux générations futures.
Quels sont les thèmes que vous voulez mettre au cœur du débat ?
La lutte contre la bureaucratie, d’abord. La réforme de l’Etat doit être la priorité des réformes. L’Etat est devenu inefficace et inorganisé. Il dilue les responsabilités et détruit de la richesse. Les tâches administratives représentent 7,7% du temps de travail. Revenir au niveau de notre allemand (3,7%) permettrait un gain de productivité de 22 milliards d’euros par an. Il faut remettre de l’efficacité dans le système et un principe de responsabilité à tous les échelons, tout comme il faut soulager le contribuable. Pour cela, il faudra partir du dynamisme entrepreneurial et local et mettre la subsidiarité au cœur de l’action publique.
Quels sont les autres sujets que vous voulez porter ?
Le déclassement éducatif m’inquiète beaucoup. Il faut faire en sorte que la France soit une grande puissance de l’instruction. Pour répondre au dérèglement climatique, il faut élaborer une stratégie scientifique, économique et politique, le contraire de la décroissance. La sécurité et la cohérence civilisationnelle doivent également être une priorité, donc la politique pénale et l’immigration. Enfin il faut réfléchir au fonctionnement de nos institutions. Quel que soit le Président, l’exécutif se retrouve très rapidement après son accession au pouvoir dans une spirale de l’échec. Emmanuel Macron en a été une nouvelle illustration. Il a même accéléré le phénomène avec sa gestion chaotique de la Covid. Un candidat à l’Elysée se présente toujours comme un super-héros qui va résoudre tous les problèmes des Français. Or, cela n’existe pas. Il faut sortir de cette infantilisation et remettre du bon sens…. Avec Nouvelle énergie, nous allons publier très bientôt les premières contributions des groupes de travail sur les institutions, la réforme de l’Etat, l’école. Sur tous les sujets, nous menons un travail de fond et élaborons des propositions destinées à constituer un projet de gouvernement.
Comment vous situez-vous par rapport à la primaire de la droite qui pourrait avoir lieu cet automne ?
Tout le monde est aujourd’hui conscient que l’on ne peut pas se permettre que la primaire ait lieu lors du premier tour de la présidentielle. A partir du moment où il n’y a pas de leadership évident, il faut bien qu’existe un processus de sélection afin de déterminer le mieux placé pour mener le travail qui n’a pas été fait depuis quarante ans.
Vous-même, pourriez-vous être candidat ?
Oui, comme d’autres. Mais ma préoccupation est ailleurs. Ce que je veux, c’est mettre dans le débat des thèmes et des propositions et que quelqu’un s’en empare. A ce stade, la priorité doit être le contenu plutôt qu’une démarche personnelle.
«Je veux sortir du débat sur les moyens de la fonction publique. Nous travaillons beaucoup sur la question de la motivation des fonctionnaires»
Et quelqu’un s’est-il d’ores et déjà emparé de ce que vous avez mis sur la table?
C’est encore trop tôt mais on peut noter des offres de qualité. Je trouve ce que produit Bruno Retailleau très cohérent et pertinent. La démarche de Michel Barnier est intéressante. Il est bien entouré ; son moratoire sur l’immigration, dont j’avais déjà parlé, est crédible. Valérie Pécresse a fait dès son entrée en campagne de la lutte contre la bureaucratie une priorité et j’en suis très heureux. La ligne de Laurent Wauquiez correspond le mieux à la sensibilité d’une grande partie de la droite. Xavier Bertrand est déterminé et professionnel…
Vous situez-vous dans la lignée de François Fillon en 2017 ?
Il y a beaucoup d’éléments communs ; c’est assez logique, j’étais dans ses équipes. Ce que je propose a été actualisé au regard de la situation actuelle et de mon vécu. Je mets aussi peut-être plus en avant la nécessité d’un redressement éducatif et scientifique. Nous devons libérer l’enseignement et mettre en place un modèle qui permette d’apporter de la raison critique à nos enfants et de leur apprendre à décoder le monde et pas simplement à coder l’informatique. Je veux également sortir du débat sur les moyens de la fonction publique. Nous travaillons beaucoup sur la question de la motivation des fonctionnaires. La France en compte plus de 5 millions, 33% des effectifs de la fonction publique se consacrent à des tâches administratives plutôt qu’à du service public en tant que tel. Si on passait à 25% comme en Allemagne, cela représenterait 450 000 agents libérés, donc permettrait à la fois de les valoriser, de renforcer le service aux usagers et d’alléger la charge sur les contribuables.
Emmanuel Macron est-il le favori de la prochaine présidentielle ?
Je ne suis pas un pronostiqueur mais un acteur engagé. En période de crise, un Président sortant a toujours potentiellement des atouts. On voit bien qu’Emmanuel Macron va jusqu’au bout surfer sur la crise de la Covid afin de tenter de maîtriser l’agenda politique. Il voudrait imposer son schéma : soit on serait avec lui, soit on serait un Gilet jaune extrémiste. Mais la vérité est plus subtile et le jeu plus ouvert. Nous sommes, comme en 1958, à un vrai virage. Les Français ont de plus en plus le sentiment qu’un sursaut est nécessaire. Soulever un espoir et les réconcilier avec la politique est possible à condition de ne pas faire du marketing et de la segmentation électorale. A nous de proposer une voie différente et forte.
0 Réponses à “2022: Un sursaut de la France est nécessaire ( maire de Cannes)”