Archive pour le Tag 'virus'

Santé- variant du virus Mpox : des transmissions locales

Santé- variant du virus Mpox :  des transmissions locales

Deux personnes ont contracté le nouveau variant du virus Mpox au Royaume-Uni après avoir été en contact avec un malade revenu d’Afrique, ce qui en fait les premières transmissions locales hors d’Afrique, a annoncé mardi 5 novembre l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Ces deux personnes vivent  »dans le même foyer qu’une personne testée positive peu de temps après un voyage dans plusieurs pays africains », précise l’OMS, ajoutant que ce sont « les premiers cas transmis localement en Europe et même les premiers en dehors d’Afrique » depuis août 2024.

. Une semaine plus tôt, l’agence britannique avait détecté à Londres un premier cas d’infection de ce nouveau variant. D’autres avaient précédemment été détectés en Allemagne, en Suède et dans plusieurs pays d’Asie.

Auparavant appelé variole du singe, le Mpox est une maladie virale qui se propage de l’animal à l’homme mais se transmet aussi entre humains, provoquant fièvre, douleurs musculaires et lésions cutanées. Depuis plusieurs mois, une nouvelle épidémie touche l’Afrique, les chiffres d’infection les plus élevés se trouvant en République démocratique du Congo (RDC), au Burundi et au Nigeria.

Afrique- Rwanda : alerte virus de Marburg

Afrique- Rwanda : alerte virus de Marburg

Le virus de Marburg particulièrement mortel provoque une fièvre hémorragique similaire à Ebola. Le bilan, depuis l’annonce des premières infections à ce virus le 28 septembre, s’élève à 12 morts, des travailleurs médicaux pour la plupart. Selon le ministère de la Santé rwandais, quelque 41 cas d’infection ont été recensés. 

Avec un taux de mortalité pouvant aller jusqu’à 88%, ce virus très dangereux cause une forte fièvre souvent accompagnée d’hémorragies touchant plusieurs organes. Le virus de Marburg fait partie de la famille des filovirus, à laquelle appartient également le virus Ebola, qui a déjà causé plusieurs épidémies meurtrières en Afrique.

Santé- Progression des virus exotiques

Santé- Progression des virus exotiques

Virus Usutu, virus Zika, virus du chikungunya ou de la dengue… Au cours des dernières années, ces noms aux consonances exotiques se sont fait une place dans les médias français. Et pour cause : responsables de maladies qui ne sévissaient jusqu’à présent que dans des régions éloignées, ces virus sont en train de s’extraire des régions où ils ont longtemps été endémiques pour partir à la conquête de notre planète. La France n’est pas à l’abri de cette menace, ni dans les outre-mer ni dans les régions métropolitaines, comme en témoignent les implantations en cours de certains de ces virus autour de l’arc méditerranéen.

par Yannick Simonin
Virologiste spécialiste en surveillance et étude des maladies virales émergentes. Professeur des Universités, Université de Montpellier dans the conversation

Alors que l’année 2022 a vu exploser en France métropolitaine les cas de dengue « autochtones » (autrement dit contractée en métropole), et qu’une infection – elle aussi autochtone – par le virus du Nil occidental a été détectée pour la première fois en Nouvelle-Aquitaine, où en est la situation ? Quels sont les virus à surveiller en priorité ?

Bon nombre de maladies infectieuses émergentes sont transmises à l’être humain par l’intermédiaire d’un animal «vecteur», souvent un arthropode suceur de sang tels que les moustiques, les moucherons culicoides, les phlébotomes ou encore les tiques.

Dans un tel cas, si la maladie est causée par un virus, on parle d’«arbovirose», et le virus impliqué est décrit comme un «arbovirus» (de l’anglais «arthropod-borne virus», «virus transmis par les arthropodes»).

Dans la liste des maladies prioritaires que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) établit chaque année depuis 2015, ne figurent que des maladies virales, parmi lesquelles trois arboviroses (sur neuf maladies recensées) : maladie à virus Zika, fièvre hémorragique de Crimée-Congo et fièvre de la vallée du Rift.

Un point important à souligner concernant les arboviroses est qu’il s’agit pour la plupart de zoonoses. Autrement dit, elles proviennent initialement d’animaux domestiques ou sauvages porteurs de l’agent de la maladie. Celui-ci est transmis dans un second temps à l’être humain, lorsque ce dernier est piqué par un arthropode vecteur qui a auparavant prélevé le sang d’un animal infecté. Ce qui se passe ensuite dépend notamment de l’arbovirus transmis.

Certains peuvent passer d’un être humain à l’autre, toujours par l’intermédiaire d’un vecteur. D’autres pourront aussi se propager en parallèle grâce à d’autres modes de transmission (le virus Zika peut être transmis par les moustiques et par voie sexuelle, par exemple). Il arrive aussi que certains arbovirus ne se transmettent pas entre êtres humains : on dit alors que l’humain est une «impasse épidémiologique». C’est le cas par exemple du virus West Nile ou du virus de la vallée du Rift.

Parmi les principaux acteurs de la propagation des arboviroses figurent les moustiques, en particulier le moustique tigre (Aedes albopictus). Parti récemment à l’assaut de notre territoire, il s’y est rapidement installé. Or, à lui seul, il est en mesure de propager plusieurs virus «exotiques».

Catalysée par le commerce international, l’expansion du moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur de plusieurs virus «exotiques» s’est avérée très rapide.

Originaire d’Asie, ce petit moustique noir au corps et aux pattes rayés de blanc à été détecté pour la première fois dans le sud de la France en 2004, à Menton. Moins de vingt ans plus tard, il est présent dans 71 départements métropolitains sur 96 (contre 64 en 2021 et 58 en 2020). Dans les années à venir, l’extension de son territoire sera inexorable.

En moins de deux décennies, le moustique tigre a envahi la majeure partie du territoire français métropolitain. Ministère des Solidarités et de la Santé – Direction générale de la Santé

Une des particularités de ce moustique est sa capacité à transmettre divers virus responsables de maladies, dont les plus connus sont probablement le virus Zika, celui du chikungunya, ou encore celui de la dengue.

La dengue : une tendance à la hausse des cas autochtones
Le virus de la dengue semble avoir trouvé dans les régions du sud de notre pays un terrain de jeu propice. En effet, si le nombre de cas de dengue reste limité en France métropolitaine, estimé à moins d’une trentaine ces dernières années, la tendance à la hausse se confirme néanmoins.

En témoigne la multiplication des cas dits «autochtones», ce qui signifie que la maladie a été contractée sur notre territoire, contrairement aux infections importées, qui se déclarent en France mais ont été contractés à l’étranger, lors d’un voyage. Les départements du sud et du sud-est de la France tels que l’Hérault, le Gard, le Var ou les Alpes-Maritimes sont les plus exposés à la maladie notamment en raison de la conjonction d’une forte densité de moustiques tigres et de zones fortement urbanisées.

L’année 2022 a été exceptionnelle en termes de circulation de la dengue dans l’hexagone : 66 cas ont été identifiés au cours de neuf épisodes de transmission autochtone ayant touché 6 départements.

Le moustique tigre Aedes albopictus est reconnaissable aux bandes blanches qui strient ses pattes. Il est notamment le vecteur des virus de la dengue et du chikungunya ainsi que du virus Zika.

Mais ce nombre de cas est certainement largement sous-estimé, car la dengue est largement asymptomatique (dans 50 % à 90 % des cas selon les épidémies). Par ailleurs, chez les personnes symptomatiques, les symptômes de la maladie (fièvre, maux de tête, douleurs musculaires…) peuvent facilement être confondus avec ceux de la grippe ou plus récemment du Covid.

Si l’affection provoquée par le virus de la dengue est le plus souvent bénigne, celui-ci peut néanmoins entraîner une forme potentiellement mortelle, dans environ 1 % des cas. Cette forme de dengue est dite «hémorragique», car s’accompagnant de saignements au niveau de multiples organes. Par ailleurs, certaines atteintes neurologiques ont également été rapportées.

Identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé pendant plusieurs décennies en Afrique, en Inde et en Asie, ainsi que dans l’océan Indien. C’est d’ailleurs l’épidémie qui a frappé la Réunion, l’Île Maurice, Mayotte et les Seychelles en 2005 qui a participé à le faire connaître du public français.

La «maladie de l’homme courbé» (traduction possible de «chikungunya», un terme issu du Makondé, langue bantoue parlée en Tanzanie) se caractérise notamment par l’apparition de fièvre et de douleurs articulaires sévères. Très invalidantes, ces dernières touchent souvent les mains, les poignets, les chevilles ou les pieds. Des maux de tête et des douleurs musculaires, ainsi que des saignements des gencives ou du nez ont été fréquemment décrits. La convalescence peut durer plusieurs semaines, et les douleurs peuvent persister parfois pendant plusieurs années.

Les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été détectés en France en 2010, dans le Var. Depuis, une trentaine de cas autochtones ont été répertoriés dont deux foyers importants, un dans la ville de Montpellier en 2014 (11 cas confirmés et 1 cas probable) et le second dans le var en 2017 avec 17 cas répertoriés.

Le virus du chikungunya se fait discret en France ces dernières années, avec 3 cas importés en 2021 et 5 pour l’année en cours, selon le décompte de Santé publique France. Cependant, ce virus reste très surveillé, notamment parce que sa dissémination par le moustique tigre dans les régions européennes tempérées n’est pas à exclure.

Le virus Zika avait quant à lui a défrayé la chronique en 2015-2016. Il avait été à l’origine d’une épidémie de très grande ampleur, principalement en Amérique latine. Plus d’un million de personnes avaient été infectées. L’atteinte la plus grave associée à ce virus est le développement d’une microcéphalie (réduction du périmètre crânien du fœtus) chez les femmes enceintes infectées.

En France deux cas autochtones avaient été identifiés en 2019, dans le département du Var, sans que les chaînes de transmission, notamment vectorielles, n’aient pu être clairement établies.

Figurant toujours sur la liste des 10 maladies les plus à risque établie par l’Organisation mondiale de la santé, ce virus a cependant mystérieusement quasiment disparu des radars depuis quelques années. Son retour sur le devant de la scène virale est toutefois très loin d’être exclu : il a notamment fait à nouveau parler de lui très récemment en Thaïlande, et 5 voyageurs ont développé la maladie en Allemagne, Royaume-Uni et Israël, après avoir visité ce pays d’Asie du Sud-Est.

Même si les mécanismes favorisant l’émergence du virus Zika sont peu connus, des études de séroprévalence (présence d’anticorps dans le sang) montrent qu’il circule toujours activement dans certains territoires (notamment sur le continent africain).

Sa surveillance nécessite une vigilance particulière de la communauté scientifique, afin de se préparer à une réapparition potentielle.

Un de nos moustiques «traditionnels», Culex pipiens, présent sur l’ensemble du territoire français, est également capable de nous transmettre des virus «exotiques». C’est notamment le cas des virus West Nile (virus du Nil occidental) et Usutu, deux virus très proches pouvant occasionnellement engendrer des atteintes neurologiques sévères telles qu’encéphalites (inflammation du cerveau), méningites (inflammation des méninges) ou encore méningo-encéphalites (inflammation des méninges et du cerveau) chez l’humain.

Une étude menée par notre équipe et publiée en 2022, en collaboration avec l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), a montré que ces deux virus sont en train de s’installer durablement sur certaines zones de notre territoire, plus particulièrement dans la grande région camarguaise.

On les retrouve en effet de façon régulière non seulement dans des échantillons de sang humain, mais aussi chez des animaux tels que les oiseaux (leurs réservoirs naturels), les chiens, les chevaux et les moustiques.

De nombreux moustiques, y compris ceux du genre Culex classiquement présents en France, peuvent transmettre des virus « exotiques ». Shutterstock
Jusqu’à présent, leur impact sur la santé humaine demeure faible : deux infections par le virus Usutu ont été identifiées en France, à Montpellier en 2016 et dans les landes en 2022, tandis qu’une trentaine de cas de West Nile ont été dénombrés sur les cinq dernières années.

Il est néanmoins important de surveiller la dynamique de propagation de ces virus, car plusieurs lignées possédant des degrés de virulence plus ou moins importants circulent actuellement, ce qui incite à la prudence. D’autant plus qu’une épidémie importante a frappé l’Europe en 2018, avec plus de 2 000 cas identifiés et plus de 180 décès rapportés. En 2022 le sud de l’Europe a été à nouveau touché : l’Italie a notamment répertorié 723 cas et 51 décès associés.

En France, fin juillet 2023, un premier cas d’infection par le virus West Nile a été détecté en Nouvelle-Aquitaine, plus précisément dans la région de Bordeaux, ce qui témoigne d’une tendance à la propagation de ce virus plus au nord de l’Hexagone. En effet, les précédents cas d’infection de ce virus avaient été détectés uniquement sur le pourtour méditerranéen (en régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie).

Le passage d’une maladie de l’animal à l’être humain n’est pas forcément synonyme de flambée épidémique, ni d’épidémie à large échelle, de pandémie ou d’implantation dans de nouveaux territoires. Pour que cela se produise, de nombreux événements doivent entrer en conjonction.

Le problème est que les échanges commerciaux ou touristiques, qui progressent de façon exponentielle dans notre monde hyperconnecté, peuvent faciliter la dissémination de certains vecteurs et donc le risque de propagation des maladies.

Ce risque est encore augmenté par les changements environnementaux et climatiques. Les conditions météorologiques, en particulier la température, l’humidité de l’air et les précipitations, affectent la répartition géographique, l’activité, le taux de reproduction et la survie de ces vecteurs, notamment des moustiques.

Par ailleurs les modifications du climat et l’impact de l’être humain sur son environnement influencent parfois le comportement animal, en modifiant par exemple l’aire de répartition de certaines espèces, ce qui peut favoriser les interactions entre animaux et humains.

De tels changements environnementaux ont été à l’origine d’épidémies de fièvre hémorragique argentine, due au virus Junin. Dans les années 1950, pour intensifier la culture du maïs, des défrichages massifs ont été effectués grâce, notamment à l’emploi d’herbicides. Ce changement d’environnement a entraîné une prolifération de rongeurs dont certains étaient porteurs du virus, faisant passer la maladie au stade épidémique, notamment parmi les travailleurs agricoles. Des milliers de personnes ont alors été contaminées. Une situation similaire a aussi été observée en Asie de l’Est lors de la conversion de terres pour la culture du riz, avec le virus Hantaan responsable de la «fièvre hémorragique de Corée».

Parmi les autres facteurs favorisant les émergences de nouvelles maladies, citons notamment les facteurs socio-économiques, tels que l’augmentation des transports de bien et de personnes, notamment via le transport aérien intercontinental, ou encore l’essor toujours croissant des zones urbaines. Les fortes densités de population, qui favorisent la transmission rapide de maladies, ainsi que les difficultés d’adduction d’eau liées à l’urbanisation rapide, contribuent notamment à la prolifération de moustiques potentiellement porteurs de virus.

Preuve de l’importance de ces facteurs, durant la pandémie de Covid-19, le nombre de cas d’infections «exotiques» importés (autrement dit, rapportées de voyage) a considérablement diminué, essentiellement en raison de la baisse drastique du transport aérien international. Avec la nette reprise dudit trafic, une hausse de ces cas est en revanche attendue en 2023.

Cette situation pourrait avoir un impact sur l’apparition de foyers de cas en France, car une personne infectée arrivant sur notre territoire peut en effet transmettre à son tour la maladie à d’autres personnes, notamment si les vecteurs transmetteurs de la maladie sont présents.

En l’absence d’antiviral efficace ou de vaccin, comme dans le cas du chikungunya ou du Zika, ou lorsque le vaccin présente certaines limites (comme dans le cas de la dengue, contre laquelle le seul vaccin actuellement homologué présente l’inconvénient d’augmenter le risque d’hospitalisation et de dengue grave chez les personnes non antérieurement infectées par le virus de la dengue), la seule solution est d’anticiper l’émergence de ces pathogènes.

Le meilleur moyen d’y parvenir est de mettre en place des réseaux adaptés et réactifs, au plus près du terrain, afin d’étudier efficacement les interactions entre les animaux, les humains et leurs divers environnements, selon une approche qualifiée de One Health («Une seule santé», humaine et environnementale).

Depuis la pandémie de Covid-19, les réseaux de surveillance des maladies virales nationaux et internationaux se sont développés. Leurs capacités restent malheureusement bien en deçà de ce qui est nécessaire pour effectuer un suivi efficace de la circulation des virus à risque, non seulement dans les pays endémiques, mais aussi dans les pays où ils émergent.

L’émergence, puis la propagation rapide en 2020, du coronavirus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19, a eu un impact majeur sur notre santé, nos comportements et nos vies quotidiennes. Cette situation nous a fait brutalement prendre conscience de l’importance de surveiller et d’étudier les «nouveaux» virus.

Au-delà de ces virus jusque-là «inédits», il est aussi essentiel de se pencher sur les virus «négligés» car responsables de maladies sévissant loin de nos territoires. La propagation hors du continent africain, et en particulier en Europe, du virus Mpox, anciennement appelé variole du singe, est venu nous rappeler les enjeux liés à une telle surveillance…

Maladies- Progression des virus exotiques

Maladies- Progression des virus exotiques

Virus Usutu, virus Zika, virus du chikungunya ou de la dengue… Au cours des dernières années, ces noms aux consonances exotiques se sont fait une place dans les médias français. Et pour cause : responsables de maladies qui ne sévissaient jusqu’à présent que dans des régions éloignées, ces virus sont en train de s’extraire des régions où ils ont longtemps été endémiques pour partir à la conquête de notre planète. La France n’est pas à l’abri de cette menace, ni dans les outre-mer ni dans les régions métropolitaines, comme en témoignent les implantations en cours de certains de ces virus autour de l’arc méditerranéen.

par Yannick Simonin
Virologiste spécialiste en surveillance et étude des maladies virales émergentes. Professeur des Universités, Université de Montpellier dans the conversation

Alors que l’année 2022 a vu exploser en France métropolitaine les cas de dengue « autochtones » (autrement dit contractée en métropole), et qu’une infection – elle aussi autochtone – par le virus du Nil occidental a été détectée pour la première fois en Nouvelle-Aquitaine, où en est la situation ? Quels sont les virus à surveiller en priorité ?

Bon nombre de maladies infectieuses émergentes sont transmises à l’être humain par l’intermédiaire d’un animal «vecteur», souvent un arthropode suceur de sang tels que les moustiques, les moucherons culicoides, les phlébotomes ou encore les tiques.

Dans un tel cas, si la maladie est causée par un virus, on parle d’«arbovirose», et le virus impliqué est décrit comme un «arbovirus» (de l’anglais «arthropod-borne virus», «virus transmis par les arthropodes»).

Dans la liste des maladies prioritaires que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) établit chaque année depuis 2015, ne figurent que des maladies virales, parmi lesquelles trois arboviroses (sur neuf maladies recensées) : maladie à virus Zika, fièvre hémorragique de Crimée-Congo et fièvre de la vallée du Rift.

Un point important à souligner concernant les arboviroses est qu’il s’agit pour la plupart de zoonoses. Autrement dit, elles proviennent initialement d’animaux domestiques ou sauvages porteurs de l’agent de la maladie. Celui-ci est transmis dans un second temps à l’être humain, lorsque ce dernier est piqué par un arthropode vecteur qui a auparavant prélevé le sang d’un animal infecté. Ce qui se passe ensuite dépend notamment de l’arbovirus transmis.

Certains peuvent passer d’un être humain à l’autre, toujours par l’intermédiaire d’un vecteur. D’autres pourront aussi se propager en parallèle grâce à d’autres modes de transmission (le virus Zika peut être transmis par les moustiques et par voie sexuelle, par exemple). Il arrive aussi que certains arbovirus ne se transmettent pas entre êtres humains : on dit alors que l’humain est une «impasse épidémiologique». C’est le cas par exemple du virus West Nile ou du virus de la vallée du Rift.

Parmi les principaux acteurs de la propagation des arboviroses figurent les moustiques, en particulier le moustique tigre (Aedes albopictus). Parti récemment à l’assaut de notre territoire, il s’y est rapidement installé. Or, à lui seul, il est en mesure de propager plusieurs virus «exotiques».

Catalysée par le commerce international, l’expansion du moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur de plusieurs virus «exotiques» s’est avérée très rapide.

Originaire d’Asie, ce petit moustique noir au corps et aux pattes rayés de blanc à été détecté pour la première fois dans le sud de la France en 2004, à Menton. Moins de vingt ans plus tard, il est présent dans 71 départements métropolitains sur 96 (contre 64 en 2021 et 58 en 2020). Dans les années à venir, l’extension de son territoire sera inexorable.

En moins de deux décennies, le moustique tigre a envahi la majeure partie du territoire français métropolitain. Ministère des Solidarités et de la Santé – Direction générale de la Santé

Une des particularités de ce moustique est sa capacité à transmettre divers virus responsables de maladies, dont les plus connus sont probablement le virus Zika, celui du chikungunya, ou encore celui de la dengue.

La dengue : une tendance à la hausse des cas autochtones
Le virus de la dengue semble avoir trouvé dans les régions du sud de notre pays un terrain de jeu propice. En effet, si le nombre de cas de dengue reste limité en France métropolitaine, estimé à moins d’une trentaine ces dernières années, la tendance à la hausse se confirme néanmoins.

En témoigne la multiplication des cas dits «autochtones», ce qui signifie que la maladie a été contractée sur notre territoire, contrairement aux infections importées, qui se déclarent en France mais ont été contractés à l’étranger, lors d’un voyage. Les départements du sud et du sud-est de la France tels que l’Hérault, le Gard, le Var ou les Alpes-Maritimes sont les plus exposés à la maladie notamment en raison de la conjonction d’une forte densité de moustiques tigres et de zones fortement urbanisées.

L’année 2022 a été exceptionnelle en termes de circulation de la dengue dans l’hexagone : 66 cas ont été identifiés au cours de neuf épisodes de transmission autochtone ayant touché 6 départements.

Le moustique tigre Aedes albopictus est reconnaissable aux bandes blanches qui strient ses pattes. Il est notamment le vecteur des virus de la dengue et du chikungunya ainsi que du virus Zika.

Mais ce nombre de cas est certainement largement sous-estimé, car la dengue est largement asymptomatique (dans 50 % à 90 % des cas selon les épidémies). Par ailleurs, chez les personnes symptomatiques, les symptômes de la maladie (fièvre, maux de tête, douleurs musculaires…) peuvent facilement être confondus avec ceux de la grippe ou plus récemment du Covid.

Si l’affection provoquée par le virus de la dengue est le plus souvent bénigne, celui-ci peut néanmoins entraîner une forme potentiellement mortelle, dans environ 1 % des cas. Cette forme de dengue est dite «hémorragique», car s’accompagnant de saignements au niveau de multiples organes. Par ailleurs, certaines atteintes neurologiques ont également été rapportées.

Identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé pendant plusieurs décennies en Afrique, en Inde et en Asie, ainsi que dans l’océan Indien. C’est d’ailleurs l’épidémie qui a frappé la Réunion, l’Île Maurice, Mayotte et les Seychelles en 2005 qui a participé à le faire connaître du public français.

La «maladie de l’homme courbé» (traduction possible de «chikungunya», un terme issu du Makondé, langue bantoue parlée en Tanzanie) se caractérise notamment par l’apparition de fièvre et de douleurs articulaires sévères. Très invalidantes, ces dernières touchent souvent les mains, les poignets, les chevilles ou les pieds. Des maux de tête et des douleurs musculaires, ainsi que des saignements des gencives ou du nez ont été fréquemment décrits. La convalescence peut durer plusieurs semaines, et les douleurs peuvent persister parfois pendant plusieurs années.

Les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été détectés en France en 2010, dans le Var. Depuis, une trentaine de cas autochtones ont été répertoriés dont deux foyers importants, un dans la ville de Montpellier en 2014 (11 cas confirmés et 1 cas probable) et le second dans le var en 2017 avec 17 cas répertoriés.

Le virus du chikungunya se fait discret en France ces dernières années, avec 3 cas importés en 2021 et 5 pour l’année en cours, selon le décompte de Santé publique France. Cependant, ce virus reste très surveillé, notamment parce que sa dissémination par le moustique tigre dans les régions européennes tempérées n’est pas à exclure.

Le virus Zika avait quant à lui a défrayé la chronique en 2015-2016. Il avait été à l’origine d’une épidémie de très grande ampleur, principalement en Amérique latine. Plus d’un million de personnes avaient été infectées. L’atteinte la plus grave associée à ce virus est le développement d’une microcéphalie (réduction du périmètre crânien du fœtus) chez les femmes enceintes infectées.

En France deux cas autochtones avaient été identifiés en 2019, dans le département du Var, sans que les chaînes de transmission, notamment vectorielles, n’aient pu être clairement établies.

Figurant toujours sur la liste des 10 maladies les plus à risque établie par l’Organisation mondiale de la santé, ce virus a cependant mystérieusement quasiment disparu des radars depuis quelques années. Son retour sur le devant de la scène virale est toutefois très loin d’être exclu : il a notamment fait à nouveau parler de lui très récemment en Thaïlande, et 5 voyageurs ont développé la maladie en Allemagne, Royaume-Uni et Israël, après avoir visité ce pays d’Asie du Sud-Est.

Même si les mécanismes favorisant l’émergence du virus Zika sont peu connus, des études de séroprévalence (présence d’anticorps dans le sang) montrent qu’il circule toujours activement dans certains territoires (notamment sur le continent africain).

Sa surveillance nécessite une vigilance particulière de la communauté scientifique, afin de se préparer à une réapparition potentielle.

Un de nos moustiques «traditionnels», Culex pipiens, présent sur l’ensemble du territoire français, est également capable de nous transmettre des virus «exotiques». C’est notamment le cas des virus West Nile (virus du Nil occidental) et Usutu, deux virus très proches pouvant occasionnellement engendrer des atteintes neurologiques sévères telles qu’encéphalites (inflammation du cerveau), méningites (inflammation des méninges) ou encore méningo-encéphalites (inflammation des méninges et du cerveau) chez l’humain.

Une étude menée par notre équipe et publiée en 2022, en collaboration avec l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), a montré que ces deux virus sont en train de s’installer durablement sur certaines zones de notre territoire, plus particulièrement dans la grande région camarguaise.

On les retrouve en effet de façon régulière non seulement dans des échantillons de sang humain, mais aussi chez des animaux tels que les oiseaux (leurs réservoirs naturels), les chiens, les chevaux et les moustiques.

De nombreux moustiques, y compris ceux du genre Culex classiquement présents en France, peuvent transmettre des virus « exotiques ». Shutterstock
Jusqu’à présent, leur impact sur la santé humaine demeure faible : deux infections par le virus Usutu ont été identifiées en France, à Montpellier en 2016 et dans les landes en 2022, tandis qu’une trentaine de cas de West Nile ont été dénombrés sur les cinq dernières années.

Il est néanmoins important de surveiller la dynamique de propagation de ces virus, car plusieurs lignées possédant des degrés de virulence plus ou moins importants circulent actuellement, ce qui incite à la prudence. D’autant plus qu’une épidémie importante a frappé l’Europe en 2018, avec plus de 2 000 cas identifiés et plus de 180 décès rapportés. En 2022 le sud de l’Europe a été à nouveau touché : l’Italie a notamment répertorié 723 cas et 51 décès associés.

En France, fin juillet 2023, un premier cas d’infection par le virus West Nile a été détecté en Nouvelle-Aquitaine, plus précisément dans la région de Bordeaux, ce qui témoigne d’une tendance à la propagation de ce virus plus au nord de l’Hexagone. En effet, les précédents cas d’infection de ce virus avaient été détectés uniquement sur le pourtour méditerranéen (en régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie).

Le passage d’une maladie de l’animal à l’être humain n’est pas forcément synonyme de flambée épidémique, ni d’épidémie à large échelle, de pandémie ou d’implantation dans de nouveaux territoires. Pour que cela se produise, de nombreux événements doivent entrer en conjonction.

Le problème est que les échanges commerciaux ou touristiques, qui progressent de façon exponentielle dans notre monde hyperconnecté, peuvent faciliter la dissémination de certains vecteurs et donc le risque de propagation des maladies.

Ce risque est encore augmenté par les changements environnementaux et climatiques. Les conditions météorologiques, en particulier la température, l’humidité de l’air et les précipitations, affectent la répartition géographique, l’activité, le taux de reproduction et la survie de ces vecteurs, notamment des moustiques.

Par ailleurs les modifications du climat et l’impact de l’être humain sur son environnement influencent parfois le comportement animal, en modifiant par exemple l’aire de répartition de certaines espèces, ce qui peut favoriser les interactions entre animaux et humains.

De tels changements environnementaux ont été à l’origine d’épidémies de fièvre hémorragique argentine, due au virus Junin. Dans les années 1950, pour intensifier la culture du maïs, des défrichages massifs ont été effectués grâce, notamment à l’emploi d’herbicides. Ce changement d’environnement a entraîné une prolifération de rongeurs dont certains étaient porteurs du virus, faisant passer la maladie au stade épidémique, notamment parmi les travailleurs agricoles. Des milliers de personnes ont alors été contaminées. Une situation similaire a aussi été observée en Asie de l’Est lors de la conversion de terres pour la culture du riz, avec le virus Hantaan responsable de la «fièvre hémorragique de Corée».

Parmi les autres facteurs favorisant les émergences de nouvelles maladies, citons notamment les facteurs socio-économiques, tels que l’augmentation des transports de bien et de personnes, notamment via le transport aérien intercontinental, ou encore l’essor toujours croissant des zones urbaines. Les fortes densités de population, qui favorisent la transmission rapide de maladies, ainsi que les difficultés d’adduction d’eau liées à l’urbanisation rapide, contribuent notamment à la prolifération de moustiques potentiellement porteurs de virus.

Preuve de l’importance de ces facteurs, durant la pandémie de Covid-19, le nombre de cas d’infections «exotiques» importés (autrement dit, rapportées de voyage) a considérablement diminué, essentiellement en raison de la baisse drastique du transport aérien international. Avec la nette reprise dudit trafic, une hausse de ces cas est en revanche attendue en 2023.

Cette situation pourrait avoir un impact sur l’apparition de foyers de cas en France, car une personne infectée arrivant sur notre territoire peut en effet transmettre à son tour la maladie à d’autres personnes, notamment si les vecteurs transmetteurs de la maladie sont présents.

En l’absence d’antiviral efficace ou de vaccin, comme dans le cas du chikungunya ou du Zika, ou lorsque le vaccin présente certaines limites (comme dans le cas de la dengue, contre laquelle le seul vaccin actuellement homologué présente l’inconvénient d’augmenter le risque d’hospitalisation et de dengue grave chez les personnes non antérieurement infectées par le virus de la dengue), la seule solution est d’anticiper l’émergence de ces pathogènes.

Le meilleur moyen d’y parvenir est de mettre en place des réseaux adaptés et réactifs, au plus près du terrain, afin d’étudier efficacement les interactions entre les animaux, les humains et leurs divers environnements, selon une approche qualifiée de One Health («Une seule santé», humaine et environnementale).

Depuis la pandémie de Covid-19, les réseaux de surveillance des maladies virales nationaux et internationaux se sont développés. Leurs capacités restent malheureusement bien en deçà de ce qui est nécessaire pour effectuer un suivi efficace de la circulation des virus à risque, non seulement dans les pays endémiques, mais aussi dans les pays où ils émergent.

L’émergence, puis la propagation rapide en 2020, du coronavirus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19, a eu un impact majeur sur notre santé, nos comportements et nos vies quotidiennes. Cette situation nous a fait brutalement prendre conscience de l’importance de surveiller et d’étudier les «nouveaux» virus.

Au-delà de ces virus jusque-là «inédits», il est aussi essentiel de se pencher sur les virus «négligés» car responsables de maladies sévissant loin de nos territoires. La propagation hors du continent africain, et en particulier en Europe, du virus Mpox, anciennement appelé variole du singe, est venu nous rappeler les enjeux liés à une telle surveillance…

Santé -Progression des virus exotiques

Santé -Progression des virus exotiques

Virus Usutu, virus Zika, virus du chikungunya ou de la dengue… Au cours des dernières années, ces noms aux consonances exotiques se sont fait une place dans les médias français. Et pour cause : responsables de maladies qui ne sévissaient jusqu’à présent que dans des régions éloignées, ces virus sont en train de s’extraire des régions où ils ont longtemps été endémiques pour partir à la conquête de notre planète. La France n’est pas à l’abri de cette menace, ni dans les outre-mer ni dans les régions métropolitaines, comme en témoignent les implantations en cours de certains de ces virus autour de l’arc méditerranéen.

par Yannick Simonin
Virologiste spécialiste en surveillance et étude des maladies virales émergentes. Professeur des Universités, Université de Montpellier dans the conversation

Alors que l’année 2022 a vu exploser en France métropolitaine les cas de dengue « autochtones » (autrement dit contractée en métropole), et qu’une infection – elle aussi autochtone – par le virus du Nil occidental a été détectée pour la première fois en Nouvelle-Aquitaine, où en est la situation ? Quels sont les virus à surveiller en priorité ?

Bon nombre de maladies infectieuses émergentes sont transmises à l’être humain par l’intermédiaire d’un animal «vecteur», souvent un arthropode suceur de sang tels que les moustiques, les moucherons culicoides, les phlébotomes ou encore les tiques.

Dans un tel cas, si la maladie est causée par un virus, on parle d’«arbovirose», et le virus impliqué est décrit comme un «arbovirus» (de l’anglais «arthropod-borne virus», «virus transmis par les arthropodes»).

Dans la liste des maladies prioritaires que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) établit chaque année depuis 2015, ne figurent que des maladies virales, parmi lesquelles trois arboviroses (sur neuf maladies recensées) : maladie à virus Zika, fièvre hémorragique de Crimée-Congo et fièvre de la vallée du Rift.

Un point important à souligner concernant les arboviroses est qu’il s’agit pour la plupart de zoonoses. Autrement dit, elles proviennent initialement d’animaux domestiques ou sauvages porteurs de l’agent de la maladie. Celui-ci est transmis dans un second temps à l’être humain, lorsque ce dernier est piqué par un arthropode vecteur qui a auparavant prélevé le sang d’un animal infecté. Ce qui se passe ensuite dépend notamment de l’arbovirus transmis.

Certains peuvent passer d’un être humain à l’autre, toujours par l’intermédiaire d’un vecteur. D’autres pourront aussi se propager en parallèle grâce à d’autres modes de transmission (le virus Zika peut être transmis par les moustiques et par voie sexuelle, par exemple). Il arrive aussi que certains arbovirus ne se transmettent pas entre êtres humains : on dit alors que l’humain est une «impasse épidémiologique». C’est le cas par exemple du virus West Nile ou du virus de la vallée du Rift.

Parmi les principaux acteurs de la propagation des arboviroses figurent les moustiques, en particulier le moustique tigre (Aedes albopictus). Parti récemment à l’assaut de notre territoire, il s’y est rapidement installé. Or, à lui seul, il est en mesure de propager plusieurs virus «exotiques».

Catalysée par le commerce international, l’expansion du moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur de plusieurs virus «exotiques» s’est avérée très rapide.

Originaire d’Asie, ce petit moustique noir au corps et aux pattes rayés de blanc à été détecté pour la première fois dans le sud de la France en 2004, à Menton. Moins de vingt ans plus tard, il est présent dans 71 départements métropolitains sur 96 (contre 64 en 2021 et 58 en 2020). Dans les années à venir, l’extension de son territoire sera inexorable.

En moins de deux décennies, le moustique tigre a envahi la majeure partie du territoire français métropolitain. Ministère des Solidarités et de la Santé – Direction générale de la Santé

Une des particularités de ce moustique est sa capacité à transmettre divers virus responsables de maladies, dont les plus connus sont probablement le virus Zika, celui du chikungunya, ou encore celui de la dengue.

La dengue : une tendance à la hausse des cas autochtones
Le virus de la dengue semble avoir trouvé dans les régions du sud de notre pays un terrain de jeu propice. En effet, si le nombre de cas de dengue reste limité en France métropolitaine, estimé à moins d’une trentaine ces dernières années, la tendance à la hausse se confirme néanmoins.

En témoigne la multiplication des cas dits «autochtones», ce qui signifie que la maladie a été contractée sur notre territoire, contrairement aux infections importées, qui se déclarent en France mais ont été contractés à l’étranger, lors d’un voyage. Les départements du sud et du sud-est de la France tels que l’Hérault, le Gard, le Var ou les Alpes-Maritimes sont les plus exposés à la maladie notamment en raison de la conjonction d’une forte densité de moustiques tigres et de zones fortement urbanisées.

L’année 2022 a été exceptionnelle en termes de circulation de la dengue dans l’hexagone : 66 cas ont été identifiés au cours de neuf épisodes de transmission autochtone ayant touché 6 départements.

Le moustique tigre Aedes albopictus est reconnaissable aux bandes blanches qui strient ses pattes. Il est notamment le vecteur des virus de la dengue et du chikungunya ainsi que du virus Zika.

Mais ce nombre de cas est certainement largement sous-estimé, car la dengue est largement asymptomatique (dans 50 % à 90 % des cas selon les épidémies). Par ailleurs, chez les personnes symptomatiques, les symptômes de la maladie (fièvre, maux de tête, douleurs musculaires…) peuvent facilement être confondus avec ceux de la grippe ou plus récemment du Covid.

Si l’affection provoquée par le virus de la dengue est le plus souvent bénigne, celui-ci peut néanmoins entraîner une forme potentiellement mortelle, dans environ 1 % des cas. Cette forme de dengue est dite «hémorragique», car s’accompagnant de saignements au niveau de multiples organes. Par ailleurs, certaines atteintes neurologiques ont également été rapportées.

Identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé pendant plusieurs décennies en Afrique, en Inde et en Asie, ainsi que dans l’océan Indien. C’est d’ailleurs l’épidémie qui a frappé la Réunion, l’Île Maurice, Mayotte et les Seychelles en 2005 qui a participé à le faire connaître du public français.

La «maladie de l’homme courbé» (traduction possible de «chikungunya», un terme issu du Makondé, langue bantoue parlée en Tanzanie) se caractérise notamment par l’apparition de fièvre et de douleurs articulaires sévères. Très invalidantes, ces dernières touchent souvent les mains, les poignets, les chevilles ou les pieds. Des maux de tête et des douleurs musculaires, ainsi que des saignements des gencives ou du nez ont été fréquemment décrits. La convalescence peut durer plusieurs semaines, et les douleurs peuvent persister parfois pendant plusieurs années.

Les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été détectés en France en 2010, dans le Var. Depuis, une trentaine de cas autochtones ont été répertoriés dont deux foyers importants, un dans la ville de Montpellier en 2014 (11 cas confirmés et 1 cas probable) et le second dans le var en 2017 avec 17 cas répertoriés.

Le virus du chikungunya se fait discret en France ces dernières années, avec 3 cas importés en 2021 et 5 pour l’année en cours, selon le décompte de Santé publique France. Cependant, ce virus reste très surveillé, notamment parce que sa dissémination par le moustique tigre dans les régions européennes tempérées n’est pas à exclure.

Le virus Zika avait quant à lui a défrayé la chronique en 2015-2016. Il avait été à l’origine d’une épidémie de très grande ampleur, principalement en Amérique latine. Plus d’un million de personnes avaient été infectées. L’atteinte la plus grave associée à ce virus est le développement d’une microcéphalie (réduction du périmètre crânien du fœtus) chez les femmes enceintes infectées.

En France deux cas autochtones avaient été identifiés en 2019, dans le département du Var, sans que les chaînes de transmission, notamment vectorielles, n’aient pu être clairement établies.

Figurant toujours sur la liste des 10 maladies les plus à risque établie par l’Organisation mondiale de la santé, ce virus a cependant mystérieusement quasiment disparu des radars depuis quelques années. Son retour sur le devant de la scène virale est toutefois très loin d’être exclu : il a notamment fait à nouveau parler de lui très récemment en Thaïlande, et 5 voyageurs ont développé la maladie en Allemagne, Royaume-Uni et Israël, après avoir visité ce pays d’Asie du Sud-Est.

Même si les mécanismes favorisant l’émergence du virus Zika sont peu connus, des études de séroprévalence (présence d’anticorps dans le sang) montrent qu’il circule toujours activement dans certains territoires (notamment sur le continent africain).

Sa surveillance nécessite une vigilance particulière de la communauté scientifique, afin de se préparer à une réapparition potentielle.

Un de nos moustiques «traditionnels», Culex pipiens, présent sur l’ensemble du territoire français, est également capable de nous transmettre des virus «exotiques». C’est notamment le cas des virus West Nile (virus du Nil occidental) et Usutu, deux virus très proches pouvant occasionnellement engendrer des atteintes neurologiques sévères telles qu’encéphalites (inflammation du cerveau), méningites (inflammation des méninges) ou encore méningo-encéphalites (inflammation des méninges et du cerveau) chez l’humain.

Une étude menée par notre équipe et publiée en 2022, en collaboration avec l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), a montré que ces deux virus sont en train de s’installer durablement sur certaines zones de notre territoire, plus particulièrement dans la grande région camarguaise.

On les retrouve en effet de façon régulière non seulement dans des échantillons de sang humain, mais aussi chez des animaux tels que les oiseaux (leurs réservoirs naturels), les chiens, les chevaux et les moustiques.

De nombreux moustiques, y compris ceux du genre Culex classiquement présents en France, peuvent transmettre des virus « exotiques ». Shutterstock
Jusqu’à présent, leur impact sur la santé humaine demeure faible : deux infections par le virus Usutu ont été identifiées en France, à Montpellier en 2016 et dans les landes en 2022, tandis qu’une trentaine de cas de West Nile ont été dénombrés sur les cinq dernières années.

Il est néanmoins important de surveiller la dynamique de propagation de ces virus, car plusieurs lignées possédant des degrés de virulence plus ou moins importants circulent actuellement, ce qui incite à la prudence. D’autant plus qu’une épidémie importante a frappé l’Europe en 2018, avec plus de 2 000 cas identifiés et plus de 180 décès rapportés. En 2022 le sud de l’Europe a été à nouveau touché : l’Italie a notamment répertorié 723 cas et 51 décès associés.

En France, fin juillet 2023, un premier cas d’infection par le virus West Nile a été détecté en Nouvelle-Aquitaine, plus précisément dans la région de Bordeaux, ce qui témoigne d’une tendance à la propagation de ce virus plus au nord de l’Hexagone. En effet, les précédents cas d’infection de ce virus avaient été détectés uniquement sur le pourtour méditerranéen (en régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie).

Le passage d’une maladie de l’animal à l’être humain n’est pas forcément synonyme de flambée épidémique, ni d’épidémie à large échelle, de pandémie ou d’implantation dans de nouveaux territoires. Pour que cela se produise, de nombreux événements doivent entrer en conjonction.

Le problème est que les échanges commerciaux ou touristiques, qui progressent de façon exponentielle dans notre monde hyperconnecté, peuvent faciliter la dissémination de certains vecteurs et donc le risque de propagation des maladies.

Ce risque est encore augmenté par les changements environnementaux et climatiques. Les conditions météorologiques, en particulier la température, l’humidité de l’air et les précipitations, affectent la répartition géographique, l’activité, le taux de reproduction et la survie de ces vecteurs, notamment des moustiques.

Par ailleurs les modifications du climat et l’impact de l’être humain sur son environnement influencent parfois le comportement animal, en modifiant par exemple l’aire de répartition de certaines espèces, ce qui peut favoriser les interactions entre animaux et humains.

De tels changements environnementaux ont été à l’origine d’épidémies de fièvre hémorragique argentine, due au virus Junin. Dans les années 1950, pour intensifier la culture du maïs, des défrichages massifs ont été effectués grâce, notamment à l’emploi d’herbicides. Ce changement d’environnement a entraîné une prolifération de rongeurs dont certains étaient porteurs du virus, faisant passer la maladie au stade épidémique, notamment parmi les travailleurs agricoles. Des milliers de personnes ont alors été contaminées. Une situation similaire a aussi été observée en Asie de l’Est lors de la conversion de terres pour la culture du riz, avec le virus Hantaan responsable de la «fièvre hémorragique de Corée».

Parmi les autres facteurs favorisant les émergences de nouvelles maladies, citons notamment les facteurs socio-économiques, tels que l’augmentation des transports de bien et de personnes, notamment via le transport aérien intercontinental, ou encore l’essor toujours croissant des zones urbaines. Les fortes densités de population, qui favorisent la transmission rapide de maladies, ainsi que les difficultés d’adduction d’eau liées à l’urbanisation rapide, contribuent notamment à la prolifération de moustiques potentiellement porteurs de virus.

Preuve de l’importance de ces facteurs, durant la pandémie de Covid-19, le nombre de cas d’infections «exotiques» importés (autrement dit, rapportées de voyage) a considérablement diminué, essentiellement en raison de la baisse drastique du transport aérien international. Avec la nette reprise dudit trafic, une hausse de ces cas est en revanche attendue en 2023.

Cette situation pourrait avoir un impact sur l’apparition de foyers de cas en France, car une personne infectée arrivant sur notre territoire peut en effet transmettre à son tour la maladie à d’autres personnes, notamment si les vecteurs transmetteurs de la maladie sont présents.

En l’absence d’antiviral efficace ou de vaccin, comme dans le cas du chikungunya ou du Zika, ou lorsque le vaccin présente certaines limites (comme dans le cas de la dengue, contre laquelle le seul vaccin actuellement homologué présente l’inconvénient d’augmenter le risque d’hospitalisation et de dengue grave chez les personnes non antérieurement infectées par le virus de la dengue), la seule solution est d’anticiper l’émergence de ces pathogènes.

Le meilleur moyen d’y parvenir est de mettre en place des réseaux adaptés et réactifs, au plus près du terrain, afin d’étudier efficacement les interactions entre les animaux, les humains et leurs divers environnements, selon une approche qualifiée de One Health («Une seule santé», humaine et environnementale).

Depuis la pandémie de Covid-19, les réseaux de surveillance des maladies virales nationaux et internationaux se sont développés. Leurs capacités restent malheureusement bien en deçà de ce qui est nécessaire pour effectuer un suivi efficace de la circulation des virus à risque, non seulement dans les pays endémiques, mais aussi dans les pays où ils émergent.

L’émergence, puis la propagation rapide en 2020, du coronavirus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19, a eu un impact majeur sur notre santé, nos comportements et nos vies quotidiennes. Cette situation nous a fait brutalement prendre conscience de l’importance de surveiller et d’étudier les «nouveaux» virus.

Au-delà de ces virus jusque-là «inédits», il est aussi essentiel de se pencher sur les virus «négligés» car responsables de maladies sévissant loin de nos territoires. La propagation hors du continent africain, et en particulier en Europe, du virus Mpox, anciennement appelé variole du singe, est venu nous rappeler les enjeux liés à une telle surveillance…

Virus de la dictature russe : épidémie d’accidents mortels

Virus de la dictature russe : épidémie d’accidents mortels

Prigogine l’auteur de la tentative de putsch en Russie disparaît donc dans un accident comme nombre d’autres hauts responsables contestant Poutine. Ces derniers temps la Russie enregistre une véritable épidémie d’accidents mortels rappelle Radio France.

Le 25 février 2022, moins de vingt-quatre heures après le début de la guerre menée par la Russie en Ukraine, l’un des principaux cadres de la société russe Gazprom, Alexander Tyulyakov, était retrouvé pendu dans son garage de Leningrad. Des témoins affirment que quelques heures plus tôt, l’homme avait été roué de coups par des individus non identifiés sur la voie publique.

La mort de Tyulyakov n’était pas la première perte enregistrée par Gazprom, puisque quelques semaines auparavant, le 30 janvier, c’est Leonid Shulman, autre cadre exécutif de l’entreprise, qui était décédé. Son corps sans vie, accompagné d’une note évoquant son suicide, a été retrouvé dans la baignoire de la luxueuse chambre d’hôtel qu’il occupait à Saint-Pétersbourg.

Le 1er septembre 2022, Ravil Maganov, président du conseil d’administration de la plus grande compagnie pétrolière privée de Russie, Lukoil, est tombé par la fenêtre du sixième étage de l’hôpital central de Moscou, où il séjournait en raison d’un problème cardiaque. Connu pour son opposition à la guerre en Ukraine, il n’a pas survécu.

Le 25 novembre, le milliardaire Vyacheslav Taran, qui avait fait fortune grâce aux cryptomonnaies, est mort dans un accident d’hélicoptère alors qu’il se dirigeait vers son domicile monégasque. Le passager qui devait l’accompagner a apparemment annulé son voyage à la dernière minute.

Le 9 décembre à Antibes, un autre milliardaire, le géant de l’immobilier Dmitry Zelenov, tombait dans les escaliers alors qu’il venait de dîner avec des amis.

Le Sydney Morning Herald a ainsi recensé vingt-trois morts suspectes, ou du moins inattendues, de citoyens russes connus pour leur grande richesse ou leur rang élevé dans la société. La plus ancienne de la liste est celle de Leonid Shulman et les trois dernières datent d’il y a quelques jours, puisque deux décès ont été annoncés le 24 décembre et un troisième le 25 –celui d’Alexeï Maslov, ancien chef des forces armées russes devenu le représentant militaire de son pays auprès de l’OTAN.

En moyenne, entre fin janvier et fin décembre 2022, un Russe appartenant à l’élite du pays est mort toutes les deux semaines dans des circonstances curieuses et/ou malgré sa santé de fer. Cette série de décès, dont on peut difficilement envisager qu’elle relève de la coïncidence, ressemble au point de départ d’un vaste film d’espionnage: aux quatre coins du globe, des hommes puissants, tous de nationalité russe, ont connu des morts diverses et variées –citons aussi, entre autres causes, l’empoisonnement au venin de crapaud et l’accident de bateau à moteur.

Le doute a visiblement mis du temps à se propager. Le 9 juillet 2022, une page Wikipédia intitulée «2022 Russian Businessmen Mystery Deaths» a été créée par un utilisateur anonyme pour recenser toutes les morts étranges survenues en Russie en 2022. En octobre, on a pu entendre le financier Bill Browder évoquer sur la chaîne américaine ABC ce qu’il décrivait comme une «épidémie de meurtres». Pour lui, pas d’hésitation: il y avait des contrats sur la tête de chacun de ces hommes.

De son côté, le professeur de sciences politiques Jeffrey Winters, de l’université d’Illinois, insiste sur le fait que la plupart des défunts étaient très riches, en très bonne santé, et qu’ils disposaient de gardes du corps et d’un personnel attentif: «Ce ne sont pas le genre de personnes qui tombent par mégarde dans les escaliers ou de leur fenêtre d’hôpital.»

Estimant que la liste de ces morts suspectes va encore s’allonger, Jeffrey Winters conseille de lorgner du côté de l’Arabie saoudite, de la Chine et de la Russie, «les seuls lieux où énormément d’oligarques ont été arrêtés, emprisonnés, ou sont morts dans des circonstances étranges». Pour le professeur de sciences politiques, cela ne fait d’ailleurs guère de doute: le dénominateur commun de cet ensemble de tragédies se nomme Vladimir Poutine.

«C’est un oligarque sultanesque, affirme-t-il, l’oligarque alpha en Russie. Il peut faire les puissants ou les broyer. Pour eux, il est à la fois un gage de sécurité et un danger.» Tout dépend si le président russe estime qu’ils sont avec ou contre lui.

Selon le professeur, l’élimination progressive de certains de ces Russes d’envergure est extrêmement logique: «L’une des façons que [Poutine] a de montrer son pouvoir est de faire des exemples en choisissant certains individus dans certains groupes. Cela rappelle aux autres qu’il est celui qui beurre leurs tartines et aussi celui qui peut tout leur enlever. C’est un motif très commun dans l’histoire de l’oligarchie.»

Climat etSanté -Progression des virus exotiques

Climat et Santé -Progression des virus exotiques

Virus Usutu, virus Zika, virus du chikungunya ou de la dengue… Au cours des dernières années, ces noms aux consonances exotiques se sont fait une place dans les médias français. Et pour cause : responsables de maladies qui ne sévissaient jusqu’à présent que dans des régions éloignées, ces virus sont en train de s’extraire des régions où ils ont longtemps été endémiques pour partir à la conquête de notre planète. La France n’est pas à l’abri de cette menace, ni dans les outre-mer ni dans les régions métropolitaines, comme en témoignent les implantations en cours de certains de ces virus autour de l’arc méditerranéen.

par Yannick Simonin
Virologiste spécialiste en surveillance et étude des maladies virales émergentes. Professeur des Universités, Université de Montpellier dans the conversation

Alors que l’année 2022 a vu exploser en France métropolitaine les cas de dengue « autochtones » (autrement dit contractée en métropole), et qu’une infection – elle aussi autochtone – par le virus du Nil occidental a été détectée pour la première fois en Nouvelle-Aquitaine, où en est la situation ? Quels sont les virus à surveiller en priorité ?

Bon nombre de maladies infectieuses émergentes sont transmises à l’être humain par l’intermédiaire d’un animal «vecteur», souvent un arthropode suceur de sang tels que les moustiques, les moucherons culicoides, les phlébotomes ou encore les tiques.

Dans un tel cas, si la maladie est causée par un virus, on parle d’«arbovirose», et le virus impliqué est décrit comme un «arbovirus» (de l’anglais «arthropod-borne virus», «virus transmis par les arthropodes»).

Dans la liste des maladies prioritaires que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) établit chaque année depuis 2015, ne figurent que des maladies virales, parmi lesquelles trois arboviroses (sur neuf maladies recensées) : maladie à virus Zika, fièvre hémorragique de Crimée-Congo et fièvre de la vallée du Rift.

Un point important à souligner concernant les arboviroses est qu’il s’agit pour la plupart de zoonoses. Autrement dit, elles proviennent initialement d’animaux domestiques ou sauvages porteurs de l’agent de la maladie. Celui-ci est transmis dans un second temps à l’être humain, lorsque ce dernier est piqué par un arthropode vecteur qui a auparavant prélevé le sang d’un animal infecté. Ce qui se passe ensuite dépend notamment de l’arbovirus transmis.

Certains peuvent passer d’un être humain à l’autre, toujours par l’intermédiaire d’un vecteur. D’autres pourront aussi se propager en parallèle grâce à d’autres modes de transmission (le virus Zika peut être transmis par les moustiques et par voie sexuelle, par exemple). Il arrive aussi que certains arbovirus ne se transmettent pas entre êtres humains : on dit alors que l’humain est une «impasse épidémiologique». C’est le cas par exemple du virus West Nile ou du virus de la vallée du Rift.

Parmi les principaux acteurs de la propagation des arboviroses figurent les moustiques, en particulier le moustique tigre (Aedes albopictus). Parti récemment à l’assaut de notre territoire, il s’y est rapidement installé. Or, à lui seul, il est en mesure de propager plusieurs virus «exotiques».

Catalysée par le commerce international, l’expansion du moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur de plusieurs virus «exotiques» s’est avérée très rapide.

Originaire d’Asie, ce petit moustique noir au corps et aux pattes rayés de blanc à été détecté pour la première fois dans le sud de la France en 2004, à Menton. Moins de vingt ans plus tard, il est présent dans 71 départements métropolitains sur 96 (contre 64 en 2021 et 58 en 2020). Dans les années à venir, l’extension de son territoire sera inexorable.

En moins de deux décennies, le moustique tigre a envahi la majeure partie du territoire français métropolitain. Ministère des Solidarités et de la Santé – Direction générale de la Santé

Une des particularités de ce moustique est sa capacité à transmettre divers virus responsables de maladies, dont les plus connus sont probablement le virus Zika, celui du chikungunya, ou encore celui de la dengue.

La dengue : une tendance à la hausse des cas autochtones
Le virus de la dengue semble avoir trouvé dans les régions du sud de notre pays un terrain de jeu propice. En effet, si le nombre de cas de dengue reste limité en France métropolitaine, estimé à moins d’une trentaine ces dernières années, la tendance à la hausse se confirme néanmoins.

En témoigne la multiplication des cas dits «autochtones», ce qui signifie que la maladie a été contractée sur notre territoire, contrairement aux infections importées, qui se déclarent en France mais ont été contractés à l’étranger, lors d’un voyage. Les départements du sud et du sud-est de la France tels que l’Hérault, le Gard, le Var ou les Alpes-Maritimes sont les plus exposés à la maladie notamment en raison de la conjonction d’une forte densité de moustiques tigres et de zones fortement urbanisées.

L’année 2022 a été exceptionnelle en termes de circulation de la dengue dans l’hexagone : 66 cas ont été identifiés au cours de neuf épisodes de transmission autochtone ayant touché 6 départements.

Le moustique tigre Aedes albopictus est reconnaissable aux bandes blanches qui strient ses pattes. Il est notamment le vecteur des virus de la dengue et du chikungunya ainsi que du virus Zika.

Mais ce nombre de cas est certainement largement sous-estimé, car la dengue est largement asymptomatique (dans 50 % à 90 % des cas selon les épidémies). Par ailleurs, chez les personnes symptomatiques, les symptômes de la maladie (fièvre, maux de tête, douleurs musculaires…) peuvent facilement être confondus avec ceux de la grippe ou plus récemment du Covid.

Si l’affection provoquée par le virus de la dengue est le plus souvent bénigne, celui-ci peut néanmoins entraîner une forme potentiellement mortelle, dans environ 1 % des cas. Cette forme de dengue est dite «hémorragique», car s’accompagnant de saignements au niveau de multiples organes. Par ailleurs, certaines atteintes neurologiques ont également été rapportées.

Identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé pendant plusieurs décennies en Afrique, en Inde et en Asie, ainsi que dans l’océan Indien. C’est d’ailleurs l’épidémie qui a frappé la Réunion, l’Île Maurice, Mayotte et les Seychelles en 2005 qui a participé à le faire connaître du public français.

La «maladie de l’homme courbé» (traduction possible de «chikungunya», un terme issu du Makondé, langue bantoue parlée en Tanzanie) se caractérise notamment par l’apparition de fièvre et de douleurs articulaires sévères. Très invalidantes, ces dernières touchent souvent les mains, les poignets, les chevilles ou les pieds. Des maux de tête et des douleurs musculaires, ainsi que des saignements des gencives ou du nez ont été fréquemment décrits. La convalescence peut durer plusieurs semaines, et les douleurs peuvent persister parfois pendant plusieurs années.

Les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été détectés en France en 2010, dans le Var. Depuis, une trentaine de cas autochtones ont été répertoriés dont deux foyers importants, un dans la ville de Montpellier en 2014 (11 cas confirmés et 1 cas probable) et le second dans le var en 2017 avec 17 cas répertoriés.

Le virus du chikungunya se fait discret en France ces dernières années, avec 3 cas importés en 2021 et 5 pour l’année en cours, selon le décompte de Santé publique France. Cependant, ce virus reste très surveillé, notamment parce que sa dissémination par le moustique tigre dans les régions européennes tempérées n’est pas à exclure.

Le virus Zika avait quant à lui a défrayé la chronique en 2015-2016. Il avait été à l’origine d’une épidémie de très grande ampleur, principalement en Amérique latine. Plus d’un million de personnes avaient été infectées. L’atteinte la plus grave associée à ce virus est le développement d’une microcéphalie (réduction du périmètre crânien du fœtus) chez les femmes enceintes infectées.

En France deux cas autochtones avaient été identifiés en 2019, dans le département du Var, sans que les chaînes de transmission, notamment vectorielles, n’aient pu être clairement établies.

Figurant toujours sur la liste des 10 maladies les plus à risque établie par l’Organisation mondiale de la santé, ce virus a cependant mystérieusement quasiment disparu des radars depuis quelques années. Son retour sur le devant de la scène virale est toutefois très loin d’être exclu : il a notamment fait à nouveau parler de lui très récemment en Thaïlande, et 5 voyageurs ont développé la maladie en Allemagne, Royaume-Uni et Israël, après avoir visité ce pays d’Asie du Sud-Est.

Même si les mécanismes favorisant l’émergence du virus Zika sont peu connus, des études de séroprévalence (présence d’anticorps dans le sang) montrent qu’il circule toujours activement dans certains territoires (notamment sur le continent africain).

Sa surveillance nécessite une vigilance particulière de la communauté scientifique, afin de se préparer à une réapparition potentielle.

Un de nos moustiques «traditionnels», Culex pipiens, présent sur l’ensemble du territoire français, est également capable de nous transmettre des virus «exotiques». C’est notamment le cas des virus West Nile (virus du Nil occidental) et Usutu, deux virus très proches pouvant occasionnellement engendrer des atteintes neurologiques sévères telles qu’encéphalites (inflammation du cerveau), méningites (inflammation des méninges) ou encore méningo-encéphalites (inflammation des méninges et du cerveau) chez l’humain.

Une étude menée par notre équipe et publiée en 2022, en collaboration avec l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), a montré que ces deux virus sont en train de s’installer durablement sur certaines zones de notre territoire, plus particulièrement dans la grande région camarguaise.

On les retrouve en effet de façon régulière non seulement dans des échantillons de sang humain, mais aussi chez des animaux tels que les oiseaux (leurs réservoirs naturels), les chiens, les chevaux et les moustiques.

De nombreux moustiques, y compris ceux du genre Culex classiquement présents en France, peuvent transmettre des virus « exotiques ». Shutterstock
Jusqu’à présent, leur impact sur la santé humaine demeure faible : deux infections par le virus Usutu ont été identifiées en France, à Montpellier en 2016 et dans les landes en 2022, tandis qu’une trentaine de cas de West Nile ont été dénombrés sur les cinq dernières années.

Il est néanmoins important de surveiller la dynamique de propagation de ces virus, car plusieurs lignées possédant des degrés de virulence plus ou moins importants circulent actuellement, ce qui incite à la prudence. D’autant plus qu’une épidémie importante a frappé l’Europe en 2018, avec plus de 2 000 cas identifiés et plus de 180 décès rapportés. En 2022 le sud de l’Europe a été à nouveau touché : l’Italie a notamment répertorié 723 cas et 51 décès associés.

En France, fin juillet 2023, un premier cas d’infection par le virus West Nile a été détecté en Nouvelle-Aquitaine, plus précisément dans la région de Bordeaux, ce qui témoigne d’une tendance à la propagation de ce virus plus au nord de l’Hexagone. En effet, les précédents cas d’infection de ce virus avaient été détectés uniquement sur le pourtour méditerranéen (en régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie).

Le passage d’une maladie de l’animal à l’être humain n’est pas forcément synonyme de flambée épidémique, ni d’épidémie à large échelle, de pandémie ou d’implantation dans de nouveaux territoires. Pour que cela se produise, de nombreux événements doivent entrer en conjonction.

Le problème est que les échanges commerciaux ou touristiques, qui progressent de façon exponentielle dans notre monde hyperconnecté, peuvent faciliter la dissémination de certains vecteurs et donc le risque de propagation des maladies.

Ce risque est encore augmenté par les changements environnementaux et climatiques. Les conditions météorologiques, en particulier la température, l’humidité de l’air et les précipitations, affectent la répartition géographique, l’activité, le taux de reproduction et la survie de ces vecteurs, notamment des moustiques.

Par ailleurs les modifications du climat et l’impact de l’être humain sur son environnement influencent parfois le comportement animal, en modifiant par exemple l’aire de répartition de certaines espèces, ce qui peut favoriser les interactions entre animaux et humains.

De tels changements environnementaux ont été à l’origine d’épidémies de fièvre hémorragique argentine, due au virus Junin. Dans les années 1950, pour intensifier la culture du maïs, des défrichages massifs ont été effectués grâce, notamment à l’emploi d’herbicides. Ce changement d’environnement a entraîné une prolifération de rongeurs dont certains étaient porteurs du virus, faisant passer la maladie au stade épidémique, notamment parmi les travailleurs agricoles. Des milliers de personnes ont alors été contaminées. Une situation similaire a aussi été observée en Asie de l’Est lors de la conversion de terres pour la culture du riz, avec le virus Hantaan responsable de la «fièvre hémorragique de Corée».

Parmi les autres facteurs favorisant les émergences de nouvelles maladies, citons notamment les facteurs socio-économiques, tels que l’augmentation des transports de bien et de personnes, notamment via le transport aérien intercontinental, ou encore l’essor toujours croissant des zones urbaines. Les fortes densités de population, qui favorisent la transmission rapide de maladies, ainsi que les difficultés d’adduction d’eau liées à l’urbanisation rapide, contribuent notamment à la prolifération de moustiques potentiellement porteurs de virus.

Preuve de l’importance de ces facteurs, durant la pandémie de Covid-19, le nombre de cas d’infections «exotiques» importés (autrement dit, rapportées de voyage) a considérablement diminué, essentiellement en raison de la baisse drastique du transport aérien international. Avec la nette reprise dudit trafic, une hausse de ces cas est en revanche attendue en 2023.

Cette situation pourrait avoir un impact sur l’apparition de foyers de cas en France, car une personne infectée arrivant sur notre territoire peut en effet transmettre à son tour la maladie à d’autres personnes, notamment si les vecteurs transmetteurs de la maladie sont présents.

En l’absence d’antiviral efficace ou de vaccin, comme dans le cas du chikungunya ou du Zika, ou lorsque le vaccin présente certaines limites (comme dans le cas de la dengue, contre laquelle le seul vaccin actuellement homologué présente l’inconvénient d’augmenter le risque d’hospitalisation et de dengue grave chez les personnes non antérieurement infectées par le virus de la dengue), la seule solution est d’anticiper l’émergence de ces pathogènes.

Le meilleur moyen d’y parvenir est de mettre en place des réseaux adaptés et réactifs, au plus près du terrain, afin d’étudier efficacement les interactions entre les animaux, les humains et leurs divers environnements, selon une approche qualifiée de One Health («Une seule santé», humaine et environnementale).

Depuis la pandémie de Covid-19, les réseaux de surveillance des maladies virales nationaux et internationaux se sont développés. Leurs capacités restent malheureusement bien en deçà de ce qui est nécessaire pour effectuer un suivi efficace de la circulation des virus à risque, non seulement dans les pays endémiques, mais aussi dans les pays où ils émergent.

L’émergence, puis la propagation rapide en 2020, du coronavirus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19, a eu un impact majeur sur notre santé, nos comportements et nos vies quotidiennes. Cette situation nous a fait brutalement prendre conscience de l’importance de surveiller et d’étudier les «nouveaux» virus.

Au-delà de ces virus jusque-là «inédits», il est aussi essentiel de se pencher sur les virus «négligés» car responsables de maladies sévissant loin de nos territoires. La propagation hors du continent africain, et en particulier en Europe, du virus Mpox, anciennement appelé variole du singe, est venu nous rappeler les enjeux liés à une telle surveillance…

Santé -Progression des virus exotiques

Santé -Progression des virus exotiques

Virus Usutu, virus Zika, virus du chikungunya ou de la dengue… Au cours des dernières années, ces noms aux consonances exotiques se sont fait une place dans les médias français. Et pour cause : responsables de maladies qui ne sévissaient jusqu’à présent que dans des régions éloignées, ces virus sont en train de s’extraire des régions où ils ont longtemps été endémiques pour partir à la conquête de notre planète. La France n’est pas à l’abri de cette menace, ni dans les outre-mer ni dans les régions métropolitaines, comme en témoignent les implantations en cours de certains de ces virus autour de l’arc méditerranéen.

par Yannick Simonin
Virologiste spécialiste en surveillance et étude des maladies virales émergentes. Professeur des Universités, Université de Montpellier dans the conversation

Alors que l’année 2022 a vu exploser en France métropolitaine les cas de dengue « autochtones » (autrement dit contractée en métropole), et qu’une infection – elle aussi autochtone – par le virus du Nil occidental a été détectée pour la première fois en Nouvelle-Aquitaine, où en est la situation ? Quels sont les virus à surveiller en priorité ?

Bon nombre de maladies infectieuses émergentes sont transmises à l’être humain par l’intermédiaire d’un animal «vecteur», souvent un arthropode suceur de sang tels que les moustiques, les moucherons culicoides, les phlébotomes ou encore les tiques.

Dans un tel cas, si la maladie est causée par un virus, on parle d’«arbovirose», et le virus impliqué est décrit comme un «arbovirus» (de l’anglais «arthropod-borne virus», «virus transmis par les arthropodes»).

Dans la liste des maladies prioritaires que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) établit chaque année depuis 2015, ne figurent que des maladies virales, parmi lesquelles trois arboviroses (sur neuf maladies recensées) : maladie à virus Zika, fièvre hémorragique de Crimée-Congo et fièvre de la vallée du Rift.

Un point important à souligner concernant les arboviroses est qu’il s’agit pour la plupart de zoonoses. Autrement dit, elles proviennent initialement d’animaux domestiques ou sauvages porteurs de l’agent de la maladie. Celui-ci est transmis dans un second temps à l’être humain, lorsque ce dernier est piqué par un arthropode vecteur qui a auparavant prélevé le sang d’un animal infecté. Ce qui se passe ensuite dépend notamment de l’arbovirus transmis.

Certains peuvent passer d’un être humain à l’autre, toujours par l’intermédiaire d’un vecteur. D’autres pourront aussi se propager en parallèle grâce à d’autres modes de transmission (le virus Zika peut être transmis par les moustiques et par voie sexuelle, par exemple). Il arrive aussi que certains arbovirus ne se transmettent pas entre êtres humains : on dit alors que l’humain est une «impasse épidémiologique». C’est le cas par exemple du virus West Nile ou du virus de la vallée du Rift.

Parmi les principaux acteurs de la propagation des arboviroses figurent les moustiques, en particulier le moustique tigre (Aedes albopictus). Parti récemment à l’assaut de notre territoire, il s’y est rapidement installé. Or, à lui seul, il est en mesure de propager plusieurs virus «exotiques».

Catalysée par le commerce international, l’expansion du moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur de plusieurs virus «exotiques» s’est avérée très rapide.

Originaire d’Asie, ce petit moustique noir au corps et aux pattes rayés de blanc à été détecté pour la première fois dans le sud de la France en 2004, à Menton. Moins de vingt ans plus tard, il est présent dans 71 départements métropolitains sur 96 (contre 64 en 2021 et 58 en 2020). Dans les années à venir, l’extension de son territoire sera inexorable.

En moins de deux décennies, le moustique tigre a envahi la majeure partie du territoire français métropolitain. Ministère des Solidarités et de la Santé – Direction générale de la Santé

Une des particularités de ce moustique est sa capacité à transmettre divers virus responsables de maladies, dont les plus connus sont probablement le virus Zika, celui du chikungunya, ou encore celui de la dengue.

La dengue : une tendance à la hausse des cas autochtones
Le virus de la dengue semble avoir trouvé dans les régions du sud de notre pays un terrain de jeu propice. En effet, si le nombre de cas de dengue reste limité en France métropolitaine, estimé à moins d’une trentaine ces dernières années, la tendance à la hausse se confirme néanmoins.

En témoigne la multiplication des cas dits «autochtones», ce qui signifie que la maladie a été contractée sur notre territoire, contrairement aux infections importées, qui se déclarent en France mais ont été contractés à l’étranger, lors d’un voyage. Les départements du sud et du sud-est de la France tels que l’Hérault, le Gard, le Var ou les Alpes-Maritimes sont les plus exposés à la maladie notamment en raison de la conjonction d’une forte densité de moustiques tigres et de zones fortement urbanisées.

L’année 2022 a été exceptionnelle en termes de circulation de la dengue dans l’hexagone : 66 cas ont été identifiés au cours de neuf épisodes de transmission autochtone ayant touché 6 départements.

Le moustique tigre Aedes albopictus est reconnaissable aux bandes blanches qui strient ses pattes. Il est notamment le vecteur des virus de la dengue et du chikungunya ainsi que du virus Zika.

Mais ce nombre de cas est certainement largement sous-estimé, car la dengue est largement asymptomatique (dans 50 % à 90 % des cas selon les épidémies). Par ailleurs, chez les personnes symptomatiques, les symptômes de la maladie (fièvre, maux de tête, douleurs musculaires…) peuvent facilement être confondus avec ceux de la grippe ou plus récemment du Covid.

Si l’affection provoquée par le virus de la dengue est le plus souvent bénigne, celui-ci peut néanmoins entraîner une forme potentiellement mortelle, dans environ 1 % des cas. Cette forme de dengue est dite «hémorragique», car s’accompagnant de saignements au niveau de multiples organes. Par ailleurs, certaines atteintes neurologiques ont également été rapportées.

Identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé pendant plusieurs décennies en Afrique, en Inde et en Asie, ainsi que dans l’océan Indien. C’est d’ailleurs l’épidémie qui a frappé la Réunion, l’Île Maurice, Mayotte et les Seychelles en 2005 qui a participé à le faire connaître du public français.

La «maladie de l’homme courbé» (traduction possible de «chikungunya», un terme issu du Makondé, langue bantoue parlée en Tanzanie) se caractérise notamment par l’apparition de fièvre et de douleurs articulaires sévères. Très invalidantes, ces dernières touchent souvent les mains, les poignets, les chevilles ou les pieds. Des maux de tête et des douleurs musculaires, ainsi que des saignements des gencives ou du nez ont été fréquemment décrits. La convalescence peut durer plusieurs semaines, et les douleurs peuvent persister parfois pendant plusieurs années.

Les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été détectés en France en 2010, dans le Var. Depuis, une trentaine de cas autochtones ont été répertoriés dont deux foyers importants, un dans la ville de Montpellier en 2014 (11 cas confirmés et 1 cas probable) et le second dans le var en 2017 avec 17 cas répertoriés.

Le virus du chikungunya se fait discret en France ces dernières années, avec 3 cas importés en 2021 et 5 pour l’année en cours, selon le décompte de Santé publique France. Cependant, ce virus reste très surveillé, notamment parce que sa dissémination par le moustique tigre dans les régions européennes tempérées n’est pas à exclure.

Le virus Zika avait quant à lui a défrayé la chronique en 2015-2016. Il avait été à l’origine d’une épidémie de très grande ampleur, principalement en Amérique latine. Plus d’un million de personnes avaient été infectées. L’atteinte la plus grave associée à ce virus est le développement d’une microcéphalie (réduction du périmètre crânien du fœtus) chez les femmes enceintes infectées.

En France deux cas autochtones avaient été identifiés en 2019, dans le département du Var, sans que les chaînes de transmission, notamment vectorielles, n’aient pu être clairement établies.

Figurant toujours sur la liste des 10 maladies les plus à risque établie par l’Organisation mondiale de la santé, ce virus a cependant mystérieusement quasiment disparu des radars depuis quelques années. Son retour sur le devant de la scène virale est toutefois très loin d’être exclu : il a notamment fait à nouveau parler de lui très récemment en Thaïlande, et 5 voyageurs ont développé la maladie en Allemagne, Royaume-Uni et Israël, après avoir visité ce pays d’Asie du Sud-Est.

Même si les mécanismes favorisant l’émergence du virus Zika sont peu connus, des études de séroprévalence (présence d’anticorps dans le sang) montrent qu’il circule toujours activement dans certains territoires (notamment sur le continent africain).

Sa surveillance nécessite une vigilance particulière de la communauté scientifique, afin de se préparer à une réapparition potentielle.

Un de nos moustiques «traditionnels», Culex pipiens, présent sur l’ensemble du territoire français, est également capable de nous transmettre des virus «exotiques». C’est notamment le cas des virus West Nile (virus du Nil occidental) et Usutu, deux virus très proches pouvant occasionnellement engendrer des atteintes neurologiques sévères telles qu’encéphalites (inflammation du cerveau), méningites (inflammation des méninges) ou encore méningo-encéphalites (inflammation des méninges et du cerveau) chez l’humain.

Une étude menée par notre équipe et publiée en 2022, en collaboration avec l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), a montré que ces deux virus sont en train de s’installer durablement sur certaines zones de notre territoire, plus particulièrement dans la grande région camarguaise.

On les retrouve en effet de façon régulière non seulement dans des échantillons de sang humain, mais aussi chez des animaux tels que les oiseaux (leurs réservoirs naturels), les chiens, les chevaux et les moustiques.

De nombreux moustiques, y compris ceux du genre Culex classiquement présents en France, peuvent transmettre des virus « exotiques ». Shutterstock
Jusqu’à présent, leur impact sur la santé humaine demeure faible : deux infections par le virus Usutu ont été identifiées en France, à Montpellier en 2016 et dans les landes en 2022, tandis qu’une trentaine de cas de West Nile ont été dénombrés sur les cinq dernières années.

Il est néanmoins important de surveiller la dynamique de propagation de ces virus, car plusieurs lignées possédant des degrés de virulence plus ou moins importants circulent actuellement, ce qui incite à la prudence. D’autant plus qu’une épidémie importante a frappé l’Europe en 2018, avec plus de 2 000 cas identifiés et plus de 180 décès rapportés. En 2022 le sud de l’Europe a été à nouveau touché : l’Italie a notamment répertorié 723 cas et 51 décès associés.

En France, fin juillet 2023, un premier cas d’infection par le virus West Nile a été détecté en Nouvelle-Aquitaine, plus précisément dans la région de Bordeaux, ce qui témoigne d’une tendance à la propagation de ce virus plus au nord de l’Hexagone. En effet, les précédents cas d’infection de ce virus avaient été détectés uniquement sur le pourtour méditerranéen (en régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie).

Le passage d’une maladie de l’animal à l’être humain n’est pas forcément synonyme de flambée épidémique, ni d’épidémie à large échelle, de pandémie ou d’implantation dans de nouveaux territoires. Pour que cela se produise, de nombreux événements doivent entrer en conjonction.

Le problème est que les échanges commerciaux ou touristiques, qui progressent de façon exponentielle dans notre monde hyperconnecté, peuvent faciliter la dissémination de certains vecteurs et donc le risque de propagation des maladies.

Ce risque est encore augmenté par les changements environnementaux et climatiques. Les conditions météorologiques, en particulier la température, l’humidité de l’air et les précipitations, affectent la répartition géographique, l’activité, le taux de reproduction et la survie de ces vecteurs, notamment des moustiques.

Par ailleurs les modifications du climat et l’impact de l’être humain sur son environnement influencent parfois le comportement animal, en modifiant par exemple l’aire de répartition de certaines espèces, ce qui peut favoriser les interactions entre animaux et humains.

De tels changements environnementaux ont été à l’origine d’épidémies de fièvre hémorragique argentine, due au virus Junin. Dans les années 1950, pour intensifier la culture du maïs, des défrichages massifs ont été effectués grâce, notamment à l’emploi d’herbicides. Ce changement d’environnement a entraîné une prolifération de rongeurs dont certains étaient porteurs du virus, faisant passer la maladie au stade épidémique, notamment parmi les travailleurs agricoles. Des milliers de personnes ont alors été contaminées. Une situation similaire a aussi été observée en Asie de l’Est lors de la conversion de terres pour la culture du riz, avec le virus Hantaan responsable de la «fièvre hémorragique de Corée».

Parmi les autres facteurs favorisant les émergences de nouvelles maladies, citons notamment les facteurs socio-économiques, tels que l’augmentation des transports de bien et de personnes, notamment via le transport aérien intercontinental, ou encore l’essor toujours croissant des zones urbaines. Les fortes densités de population, qui favorisent la transmission rapide de maladies, ainsi que les difficultés d’adduction d’eau liées à l’urbanisation rapide, contribuent notamment à la prolifération de moustiques potentiellement porteurs de virus.

Preuve de l’importance de ces facteurs, durant la pandémie de Covid-19, le nombre de cas d’infections «exotiques» importés (autrement dit, rapportées de voyage) a considérablement diminué, essentiellement en raison de la baisse drastique du transport aérien international. Avec la nette reprise dudit trafic, une hausse de ces cas est en revanche attendue en 2023.

Cette situation pourrait avoir un impact sur l’apparition de foyers de cas en France, car une personne infectée arrivant sur notre territoire peut en effet transmettre à son tour la maladie à d’autres personnes, notamment si les vecteurs transmetteurs de la maladie sont présents.

En l’absence d’antiviral efficace ou de vaccin, comme dans le cas du chikungunya ou du Zika, ou lorsque le vaccin présente certaines limites (comme dans le cas de la dengue, contre laquelle le seul vaccin actuellement homologué présente l’inconvénient d’augmenter le risque d’hospitalisation et de dengue grave chez les personnes non antérieurement infectées par le virus de la dengue), la seule solution est d’anticiper l’émergence de ces pathogènes.

Le meilleur moyen d’y parvenir est de mettre en place des réseaux adaptés et réactifs, au plus près du terrain, afin d’étudier efficacement les interactions entre les animaux, les humains et leurs divers environnements, selon une approche qualifiée de One Health («Une seule santé», humaine et environnementale).

Depuis la pandémie de Covid-19, les réseaux de surveillance des maladies virales nationaux et internationaux se sont développés. Leurs capacités restent malheureusement bien en deçà de ce qui est nécessaire pour effectuer un suivi efficace de la circulation des virus à risque, non seulement dans les pays endémiques, mais aussi dans les pays où ils émergent.

L’émergence, puis la propagation rapide en 2020, du coronavirus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19, a eu un impact majeur sur notre santé, nos comportements et nos vies quotidiennes. Cette situation nous a fait brutalement prendre conscience de l’importance de surveiller et d’étudier les «nouveaux» virus.

Au-delà de ces virus jusque-là «inédits», il est aussi essentiel de se pencher sur les virus «négligés» car responsables de maladies sévissant loin de nos territoires. La propagation hors du continent africain, et en particulier en Europe, du virus Mpox, anciennement appelé variole du singe, est venu nous rappeler les enjeux liés à une telle surveillance…

Climat-Progression des virus exotiques

Climat-Progression des virus exotiques

Virus Usutu, virus Zika, virus du chikungunya ou de la dengue… Au cours des dernières années, ces noms aux consonances exotiques se sont fait une place dans les médias français. Et pour cause : responsables de maladies qui ne sévissaient jusqu’à présent que dans des régions éloignées, ces virus sont en train de s’extraire des régions où ils ont longtemps été endémiques pour partir à la conquête de notre planète. La France n’est pas à l’abri de cette menace, ni dans les outre-mer ni dans les régions métropolitaines, comme en témoignent les implantations en cours de certains de ces virus autour de l’arc méditerranéen.

par Yannick Simonin
Virologiste spécialiste en surveillance et étude des maladies virales émergentes. Professeur des Universités, Université de Montpellier dans the conversation

Alors que l’année 2022 a vu exploser en France métropolitaine les cas de dengue « autochtones » (autrement dit contractée en métropole), et qu’une infection – elle aussi autochtone – par le virus du Nil occidental a été détectée pour la première fois en Nouvelle-Aquitaine, où en est la situation ? Quels sont les virus à surveiller en priorité ?

Bon nombre de maladies infectieuses émergentes sont transmises à l’être humain par l’intermédiaire d’un animal «vecteur», souvent un arthropode suceur de sang tels que les moustiques, les moucherons culicoides, les phlébotomes ou encore les tiques.

Dans un tel cas, si la maladie est causée par un virus, on parle d’«arbovirose», et le virus impliqué est décrit comme un «arbovirus» (de l’anglais «arthropod-borne virus», «virus transmis par les arthropodes»).

Dans la liste des maladies prioritaires que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) établit chaque année depuis 2015, ne figurent que des maladies virales, parmi lesquelles trois arboviroses (sur neuf maladies recensées) : maladie à virus Zika, fièvre hémorragique de Crimée-Congo et fièvre de la vallée du Rift.

Un point important à souligner concernant les arboviroses est qu’il s’agit pour la plupart de zoonoses. Autrement dit, elles proviennent initialement d’animaux domestiques ou sauvages porteurs de l’agent de la maladie. Celui-ci est transmis dans un second temps à l’être humain, lorsque ce dernier est piqué par un arthropode vecteur qui a auparavant prélevé le sang d’un animal infecté. Ce qui se passe ensuite dépend notamment de l’arbovirus transmis.

Certains peuvent passer d’un être humain à l’autre, toujours par l’intermédiaire d’un vecteur. D’autres pourront aussi se propager en parallèle grâce à d’autres modes de transmission (le virus Zika peut être transmis par les moustiques et par voie sexuelle, par exemple). Il arrive aussi que certains arbovirus ne se transmettent pas entre êtres humains : on dit alors que l’humain est une «impasse épidémiologique». C’est le cas par exemple du virus West Nile ou du virus de la vallée du Rift.

Parmi les principaux acteurs de la propagation des arboviroses figurent les moustiques, en particulier le moustique tigre (Aedes albopictus). Parti récemment à l’assaut de notre territoire, il s’y est rapidement installé. Or, à lui seul, il est en mesure de propager plusieurs virus «exotiques».

Catalysée par le commerce international, l’expansion du moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur de plusieurs virus «exotiques» s’est avérée très rapide.

Originaire d’Asie, ce petit moustique noir au corps et aux pattes rayés de blanc à été détecté pour la première fois dans le sud de la France en 2004, à Menton. Moins de vingt ans plus tard, il est présent dans 71 départements métropolitains sur 96 (contre 64 en 2021 et 58 en 2020). Dans les années à venir, l’extension de son territoire sera inexorable.

En moins de deux décennies, le moustique tigre a envahi la majeure partie du territoire français métropolitain. Ministère des Solidarités et de la Santé – Direction générale de la Santé

Une des particularités de ce moustique est sa capacité à transmettre divers virus responsables de maladies, dont les plus connus sont probablement le virus Zika, celui du chikungunya, ou encore celui de la dengue.

La dengue : une tendance à la hausse des cas autochtones
Le virus de la dengue semble avoir trouvé dans les régions du sud de notre pays un terrain de jeu propice. En effet, si le nombre de cas de dengue reste limité en France métropolitaine, estimé à moins d’une trentaine ces dernières années, la tendance à la hausse se confirme néanmoins.

En témoigne la multiplication des cas dits «autochtones», ce qui signifie que la maladie a été contractée sur notre territoire, contrairement aux infections importées, qui se déclarent en France mais ont été contractés à l’étranger, lors d’un voyage. Les départements du sud et du sud-est de la France tels que l’Hérault, le Gard, le Var ou les Alpes-Maritimes sont les plus exposés à la maladie notamment en raison de la conjonction d’une forte densité de moustiques tigres et de zones fortement urbanisées.

L’année 2022 a été exceptionnelle en termes de circulation de la dengue dans l’hexagone : 66 cas ont été identifiés au cours de neuf épisodes de transmission autochtone ayant touché 6 départements.

Le moustique tigre Aedes albopictus est reconnaissable aux bandes blanches qui strient ses pattes. Il est notamment le vecteur des virus de la dengue et du chikungunya ainsi que du virus Zika.

Mais ce nombre de cas est certainement largement sous-estimé, car la dengue est largement asymptomatique (dans 50 % à 90 % des cas selon les épidémies). Par ailleurs, chez les personnes symptomatiques, les symptômes de la maladie (fièvre, maux de tête, douleurs musculaires…) peuvent facilement être confondus avec ceux de la grippe ou plus récemment du Covid.

Si l’affection provoquée par le virus de la dengue est le plus souvent bénigne, celui-ci peut néanmoins entraîner une forme potentiellement mortelle, dans environ 1 % des cas. Cette forme de dengue est dite «hémorragique», car s’accompagnant de saignements au niveau de multiples organes. Par ailleurs, certaines atteintes neurologiques ont également été rapportées.

Identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé pendant plusieurs décennies en Afrique, en Inde et en Asie, ainsi que dans l’océan Indien. C’est d’ailleurs l’épidémie qui a frappé la Réunion, l’Île Maurice, Mayotte et les Seychelles en 2005 qui a participé à le faire connaître du public français.

La «maladie de l’homme courbé» (traduction possible de «chikungunya», un terme issu du Makondé, langue bantoue parlée en Tanzanie) se caractérise notamment par l’apparition de fièvre et de douleurs articulaires sévères. Très invalidantes, ces dernières touchent souvent les mains, les poignets, les chevilles ou les pieds. Des maux de tête et des douleurs musculaires, ainsi que des saignements des gencives ou du nez ont été fréquemment décrits. La convalescence peut durer plusieurs semaines, et les douleurs peuvent persister parfois pendant plusieurs années.

Les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été détectés en France en 2010, dans le Var. Depuis, une trentaine de cas autochtones ont été répertoriés dont deux foyers importants, un dans la ville de Montpellier en 2014 (11 cas confirmés et 1 cas probable) et le second dans le var en 2017 avec 17 cas répertoriés.

Le virus du chikungunya se fait discret en France ces dernières années, avec 3 cas importés en 2021 et 5 pour l’année en cours, selon le décompte de Santé publique France. Cependant, ce virus reste très surveillé, notamment parce que sa dissémination par le moustique tigre dans les régions européennes tempérées n’est pas à exclure.

Le virus Zika avait quant à lui a défrayé la chronique en 2015-2016. Il avait été à l’origine d’une épidémie de très grande ampleur, principalement en Amérique latine. Plus d’un million de personnes avaient été infectées. L’atteinte la plus grave associée à ce virus est le développement d’une microcéphalie (réduction du périmètre crânien du fœtus) chez les femmes enceintes infectées.

En France deux cas autochtones avaient été identifiés en 2019, dans le département du Var, sans que les chaînes de transmission, notamment vectorielles, n’aient pu être clairement établies.

Figurant toujours sur la liste des 10 maladies les plus à risque établie par l’Organisation mondiale de la santé, ce virus a cependant mystérieusement quasiment disparu des radars depuis quelques années. Son retour sur le devant de la scène virale est toutefois très loin d’être exclu : il a notamment fait à nouveau parler de lui très récemment en Thaïlande, et 5 voyageurs ont développé la maladie en Allemagne, Royaume-Uni et Israël, après avoir visité ce pays d’Asie du Sud-Est.

Même si les mécanismes favorisant l’émergence du virus Zika sont peu connus, des études de séroprévalence (présence d’anticorps dans le sang) montrent qu’il circule toujours activement dans certains territoires (notamment sur le continent africain).

Sa surveillance nécessite une vigilance particulière de la communauté scientifique, afin de se préparer à une réapparition potentielle.

Un de nos moustiques «traditionnels», Culex pipiens, présent sur l’ensemble du territoire français, est également capable de nous transmettre des virus «exotiques». C’est notamment le cas des virus West Nile (virus du Nil occidental) et Usutu, deux virus très proches pouvant occasionnellement engendrer des atteintes neurologiques sévères telles qu’encéphalites (inflammation du cerveau), méningites (inflammation des méninges) ou encore méningo-encéphalites (inflammation des méninges et du cerveau) chez l’humain.

Une étude menée par notre équipe et publiée en 2022, en collaboration avec l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), a montré que ces deux virus sont en train de s’installer durablement sur certaines zones de notre territoire, plus particulièrement dans la grande région camarguaise.

On les retrouve en effet de façon régulière non seulement dans des échantillons de sang humain, mais aussi chez des animaux tels que les oiseaux (leurs réservoirs naturels), les chiens, les chevaux et les moustiques.

De nombreux moustiques, y compris ceux du genre Culex classiquement présents en France, peuvent transmettre des virus « exotiques ». Shutterstock
Jusqu’à présent, leur impact sur la santé humaine demeure faible : deux infections par le virus Usutu ont été identifiées en France, à Montpellier en 2016 et dans les landes en 2022, tandis qu’une trentaine de cas de West Nile ont été dénombrés sur les cinq dernières années.

Il est néanmoins important de surveiller la dynamique de propagation de ces virus, car plusieurs lignées possédant des degrés de virulence plus ou moins importants circulent actuellement, ce qui incite à la prudence. D’autant plus qu’une épidémie importante a frappé l’Europe en 2018, avec plus de 2 000 cas identifiés et plus de 180 décès rapportés. En 2022 le sud de l’Europe a été à nouveau touché : l’Italie a notamment répertorié 723 cas et 51 décès associés.

En France, fin juillet 2023, un premier cas d’infection par le virus West Nile a été détecté en Nouvelle-Aquitaine, plus précisément dans la région de Bordeaux, ce qui témoigne d’une tendance à la propagation de ce virus plus au nord de l’Hexagone. En effet, les précédents cas d’infection de ce virus avaient été détectés uniquement sur le pourtour méditerranéen (en régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie).

Le passage d’une maladie de l’animal à l’être humain n’est pas forcément synonyme de flambée épidémique, ni d’épidémie à large échelle, de pandémie ou d’implantation dans de nouveaux territoires. Pour que cela se produise, de nombreux événements doivent entrer en conjonction.

Le problème est que les échanges commerciaux ou touristiques, qui progressent de façon exponentielle dans notre monde hyperconnecté, peuvent faciliter la dissémination de certains vecteurs et donc le risque de propagation des maladies.

Ce risque est encore augmenté par les changements environnementaux et climatiques. Les conditions météorologiques, en particulier la température, l’humidité de l’air et les précipitations, affectent la répartition géographique, l’activité, le taux de reproduction et la survie de ces vecteurs, notamment des moustiques.

Par ailleurs les modifications du climat et l’impact de l’être humain sur son environnement influencent parfois le comportement animal, en modifiant par exemple l’aire de répartition de certaines espèces, ce qui peut favoriser les interactions entre animaux et humains.

De tels changements environnementaux ont été à l’origine d’épidémies de fièvre hémorragique argentine, due au virus Junin. Dans les années 1950, pour intensifier la culture du maïs, des défrichages massifs ont été effectués grâce, notamment à l’emploi d’herbicides. Ce changement d’environnement a entraîné une prolifération de rongeurs dont certains étaient porteurs du virus, faisant passer la maladie au stade épidémique, notamment parmi les travailleurs agricoles. Des milliers de personnes ont alors été contaminées. Une situation similaire a aussi été observée en Asie de l’Est lors de la conversion de terres pour la culture du riz, avec le virus Hantaan responsable de la «fièvre hémorragique de Corée».

Parmi les autres facteurs favorisant les émergences de nouvelles maladies, citons notamment les facteurs socio-économiques, tels que l’augmentation des transports de bien et de personnes, notamment via le transport aérien intercontinental, ou encore l’essor toujours croissant des zones urbaines. Les fortes densités de population, qui favorisent la transmission rapide de maladies, ainsi que les difficultés d’adduction d’eau liées à l’urbanisation rapide, contribuent notamment à la prolifération de moustiques potentiellement porteurs de virus.

Preuve de l’importance de ces facteurs, durant la pandémie de Covid-19, le nombre de cas d’infections «exotiques» importés (autrement dit, rapportées de voyage) a considérablement diminué, essentiellement en raison de la baisse drastique du transport aérien international. Avec la nette reprise dudit trafic, une hausse de ces cas est en revanche attendue en 2023.

Cette situation pourrait avoir un impact sur l’apparition de foyers de cas en France, car une personne infectée arrivant sur notre territoire peut en effet transmettre à son tour la maladie à d’autres personnes, notamment si les vecteurs transmetteurs de la maladie sont présents.

En l’absence d’antiviral efficace ou de vaccin, comme dans le cas du chikungunya ou du Zika, ou lorsque le vaccin présente certaines limites (comme dans le cas de la dengue, contre laquelle le seul vaccin actuellement homologué présente l’inconvénient d’augmenter le risque d’hospitalisation et de dengue grave chez les personnes non antérieurement infectées par le virus de la dengue), la seule solution est d’anticiper l’émergence de ces pathogènes.

Le meilleur moyen d’y parvenir est de mettre en place des réseaux adaptés et réactifs, au plus près du terrain, afin d’étudier efficacement les interactions entre les animaux, les humains et leurs divers environnements, selon une approche qualifiée de One Health («Une seule santé», humaine et environnementale).

Depuis la pandémie de Covid-19, les réseaux de surveillance des maladies virales nationaux et internationaux se sont développés. Leurs capacités restent malheureusement bien en deçà de ce qui est nécessaire pour effectuer un suivi efficace de la circulation des virus à risque, non seulement dans les pays endémiques, mais aussi dans les pays où ils émergent.

L’émergence, puis la propagation rapide en 2020, du coronavirus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19, a eu un impact majeur sur notre santé, nos comportements et nos vies quotidiennes. Cette situation nous a fait brutalement prendre conscience de l’importance de surveiller et d’étudier les «nouveaux» virus.

Au-delà de ces virus jusque-là «inédits», il est aussi essentiel de se pencher sur les virus «négligés» car responsables de maladies sévissant loin de nos territoires. La propagation hors du continent africain, et en particulier en Europe, du virus Mpox, anciennement appelé variole du singe, est venu nous rappeler les enjeux liés à une telle surveillance…

Progression des virus exotiques

Progression des virus exotiques

Virus Usutu, virus Zika, virus du chikungunya ou de la dengue… Au cours des dernières années, ces noms aux consonances exotiques se sont fait une place dans les médias français. Et pour cause : responsables de maladies qui ne sévissaient jusqu’à présent que dans des régions éloignées, ces virus sont en train de s’extraire des régions où ils ont longtemps été endémiques pour partir à la conquête de notre planète. La France n’est pas à l’abri de cette menace, ni dans les outre-mer ni dans les régions métropolitaines, comme en témoignent les implantations en cours de certains de ces virus autour de l’arc méditerranéen.

par Yannick Simonin
Virologiste spécialiste en surveillance et étude des maladies virales émergentes. Professeur des Universités, Université de Montpellier dans the conversation

Alors que l’année 2022 a vu exploser en France métropolitaine les cas de dengue « autochtones » (autrement dit contractée en métropole), et qu’une infection – elle aussi autochtone – par le virus du Nil occidental a été détectée pour la première fois en Nouvelle-Aquitaine, où en est la situation ? Quels sont les virus à surveiller en priorité ?

Bon nombre de maladies infectieuses émergentes sont transmises à l’être humain par l’intermédiaire d’un animal «vecteur», souvent un arthropode suceur de sang tels que les moustiques, les moucherons culicoides, les phlébotomes ou encore les tiques.

Dans un tel cas, si la maladie est causée par un virus, on parle d’«arbovirose», et le virus impliqué est décrit comme un «arbovirus» (de l’anglais «arthropod-borne virus», «virus transmis par les arthropodes»).

Dans la liste des maladies prioritaires que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) établit chaque année depuis 2015, ne figurent que des maladies virales, parmi lesquelles trois arboviroses (sur neuf maladies recensées) : maladie à virus Zika, fièvre hémorragique de Crimée-Congo et fièvre de la vallée du Rift.

Un point important à souligner concernant les arboviroses est qu’il s’agit pour la plupart de zoonoses. Autrement dit, elles proviennent initialement d’animaux domestiques ou sauvages porteurs de l’agent de la maladie. Celui-ci est transmis dans un second temps à l’être humain, lorsque ce dernier est piqué par un arthropode vecteur qui a auparavant prélevé le sang d’un animal infecté. Ce qui se passe ensuite dépend notamment de l’arbovirus transmis.

Certains peuvent passer d’un être humain à l’autre, toujours par l’intermédiaire d’un vecteur. D’autres pourront aussi se propager en parallèle grâce à d’autres modes de transmission (le virus Zika peut être transmis par les moustiques et par voie sexuelle, par exemple). Il arrive aussi que certains arbovirus ne se transmettent pas entre êtres humains : on dit alors que l’humain est une «impasse épidémiologique». C’est le cas par exemple du virus West Nile ou du virus de la vallée du Rift.

Parmi les principaux acteurs de la propagation des arboviroses figurent les moustiques, en particulier le moustique tigre (Aedes albopictus). Parti récemment à l’assaut de notre territoire, il s’y est rapidement installé. Or, à lui seul, il est en mesure de propager plusieurs virus «exotiques».

Catalysée par le commerce international, l’expansion du moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur de plusieurs virus «exotiques» s’est avérée très rapide.

Originaire d’Asie, ce petit moustique noir au corps et aux pattes rayés de blanc à été détecté pour la première fois dans le sud de la France en 2004, à Menton. Moins de vingt ans plus tard, il est présent dans 71 départements métropolitains sur 96 (contre 64 en 2021 et 58 en 2020). Dans les années à venir, l’extension de son territoire sera inexorable.

En moins de deux décennies, le moustique tigre a envahi la majeure partie du territoire français métropolitain. Ministère des Solidarités et de la Santé – Direction générale de la Santé

Une des particularités de ce moustique est sa capacité à transmettre divers virus responsables de maladies, dont les plus connus sont probablement le virus Zika, celui du chikungunya, ou encore celui de la dengue.

La dengue : une tendance à la hausse des cas autochtones
Le virus de la dengue semble avoir trouvé dans les régions du sud de notre pays un terrain de jeu propice. En effet, si le nombre de cas de dengue reste limité en France métropolitaine, estimé à moins d’une trentaine ces dernières années, la tendance à la hausse se confirme néanmoins.

En témoigne la multiplication des cas dits «autochtones», ce qui signifie que la maladie a été contractée sur notre territoire, contrairement aux infections importées, qui se déclarent en France mais ont été contractés à l’étranger, lors d’un voyage. Les départements du sud et du sud-est de la France tels que l’Hérault, le Gard, le Var ou les Alpes-Maritimes sont les plus exposés à la maladie notamment en raison de la conjonction d’une forte densité de moustiques tigres et de zones fortement urbanisées.

L’année 2022 a été exceptionnelle en termes de circulation de la dengue dans l’hexagone : 66 cas ont été identifiés au cours de neuf épisodes de transmission autochtone ayant touché 6 départements.

Le moustique tigre Aedes albopictus est reconnaissable aux bandes blanches qui strient ses pattes. Il est notamment le vecteur des virus de la dengue et du chikungunya ainsi que du virus Zika.

Mais ce nombre de cas est certainement largement sous-estimé, car la dengue est largement asymptomatique (dans 50 % à 90 % des cas selon les épidémies). Par ailleurs, chez les personnes symptomatiques, les symptômes de la maladie (fièvre, maux de tête, douleurs musculaires…) peuvent facilement être confondus avec ceux de la grippe ou plus récemment du Covid.

Si l’affection provoquée par le virus de la dengue est le plus souvent bénigne, celui-ci peut néanmoins entraîner une forme potentiellement mortelle, dans environ 1 % des cas. Cette forme de dengue est dite «hémorragique», car s’accompagnant de saignements au niveau de multiples organes. Par ailleurs, certaines atteintes neurologiques ont également été rapportées.

Identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé pendant plusieurs décennies en Afrique, en Inde et en Asie, ainsi que dans l’océan Indien. C’est d’ailleurs l’épidémie qui a frappé la Réunion, l’Île Maurice, Mayotte et les Seychelles en 2005 qui a participé à le faire connaître du public français.

La «maladie de l’homme courbé» (traduction possible de «chikungunya», un terme issu du Makondé, langue bantoue parlée en Tanzanie) se caractérise notamment par l’apparition de fièvre et de douleurs articulaires sévères. Très invalidantes, ces dernières touchent souvent les mains, les poignets, les chevilles ou les pieds. Des maux de tête et des douleurs musculaires, ainsi que des saignements des gencives ou du nez ont été fréquemment décrits. La convalescence peut durer plusieurs semaines, et les douleurs peuvent persister parfois pendant plusieurs années.

Les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été détectés en France en 2010, dans le Var. Depuis, une trentaine de cas autochtones ont été répertoriés dont deux foyers importants, un dans la ville de Montpellier en 2014 (11 cas confirmés et 1 cas probable) et le second dans le var en 2017 avec 17 cas répertoriés.

Le virus du chikungunya se fait discret en France ces dernières années, avec 3 cas importés en 2021 et 5 pour l’année en cours, selon le décompte de Santé publique France. Cependant, ce virus reste très surveillé, notamment parce que sa dissémination par le moustique tigre dans les régions européennes tempérées n’est pas à exclure.

Le virus Zika avait quant à lui a défrayé la chronique en 2015-2016. Il avait été à l’origine d’une épidémie de très grande ampleur, principalement en Amérique latine. Plus d’un million de personnes avaient été infectées. L’atteinte la plus grave associée à ce virus est le développement d’une microcéphalie (réduction du périmètre crânien du fœtus) chez les femmes enceintes infectées.

En France deux cas autochtones avaient été identifiés en 2019, dans le département du Var, sans que les chaînes de transmission, notamment vectorielles, n’aient pu être clairement établies.

Figurant toujours sur la liste des 10 maladies les plus à risque établie par l’Organisation mondiale de la santé, ce virus a cependant mystérieusement quasiment disparu des radars depuis quelques années. Son retour sur le devant de la scène virale est toutefois très loin d’être exclu : il a notamment fait à nouveau parler de lui très récemment en Thaïlande, et 5 voyageurs ont développé la maladie en Allemagne, Royaume-Uni et Israël, après avoir visité ce pays d’Asie du Sud-Est.

Même si les mécanismes favorisant l’émergence du virus Zika sont peu connus, des études de séroprévalence (présence d’anticorps dans le sang) montrent qu’il circule toujours activement dans certains territoires (notamment sur le continent africain).

Sa surveillance nécessite une vigilance particulière de la communauté scientifique, afin de se préparer à une réapparition potentielle.

Un de nos moustiques «traditionnels», Culex pipiens, présent sur l’ensemble du territoire français, est également capable de nous transmettre des virus «exotiques». C’est notamment le cas des virus West Nile (virus du Nil occidental) et Usutu, deux virus très proches pouvant occasionnellement engendrer des atteintes neurologiques sévères telles qu’encéphalites (inflammation du cerveau), méningites (inflammation des méninges) ou encore méningo-encéphalites (inflammation des méninges et du cerveau) chez l’humain.

Une étude menée par notre équipe et publiée en 2022, en collaboration avec l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), a montré que ces deux virus sont en train de s’installer durablement sur certaines zones de notre territoire, plus particulièrement dans la grande région camarguaise.

On les retrouve en effet de façon régulière non seulement dans des échantillons de sang humain, mais aussi chez des animaux tels que les oiseaux (leurs réservoirs naturels), les chiens, les chevaux et les moustiques.

De nombreux moustiques, y compris ceux du genre Culex classiquement présents en France, peuvent transmettre des virus « exotiques ». Shutterstock
Jusqu’à présent, leur impact sur la santé humaine demeure faible : deux infections par le virus Usutu ont été identifiées en France, à Montpellier en 2016 et dans les landes en 2022, tandis qu’une trentaine de cas de West Nile ont été dénombrés sur les cinq dernières années.

Il est néanmoins important de surveiller la dynamique de propagation de ces virus, car plusieurs lignées possédant des degrés de virulence plus ou moins importants circulent actuellement, ce qui incite à la prudence. D’autant plus qu’une épidémie importante a frappé l’Europe en 2018, avec plus de 2 000 cas identifiés et plus de 180 décès rapportés. En 2022 le sud de l’Europe a été à nouveau touché : l’Italie a notamment répertorié 723 cas et 51 décès associés.

En France, fin juillet 2023, un premier cas d’infection par le virus West Nile a été détecté en Nouvelle-Aquitaine, plus précisément dans la région de Bordeaux, ce qui témoigne d’une tendance à la propagation de ce virus plus au nord de l’Hexagone. En effet, les précédents cas d’infection de ce virus avaient été détectés uniquement sur le pourtour méditerranéen (en régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie).

Le passage d’une maladie de l’animal à l’être humain n’est pas forcément synonyme de flambée épidémique, ni d’épidémie à large échelle, de pandémie ou d’implantation dans de nouveaux territoires. Pour que cela se produise, de nombreux événements doivent entrer en conjonction.

Le problème est que les échanges commerciaux ou touristiques, qui progressent de façon exponentielle dans notre monde hyperconnecté, peuvent faciliter la dissémination de certains vecteurs et donc le risque de propagation des maladies.

Ce risque est encore augmenté par les changements environnementaux et climatiques. Les conditions météorologiques, en particulier la température, l’humidité de l’air et les précipitations, affectent la répartition géographique, l’activité, le taux de reproduction et la survie de ces vecteurs, notamment des moustiques.

Par ailleurs les modifications du climat et l’impact de l’être humain sur son environnement influencent parfois le comportement animal, en modifiant par exemple l’aire de répartition de certaines espèces, ce qui peut favoriser les interactions entre animaux et humains.

De tels changements environnementaux ont été à l’origine d’épidémies de fièvre hémorragique argentine, due au virus Junin. Dans les années 1950, pour intensifier la culture du maïs, des défrichages massifs ont été effectués grâce, notamment à l’emploi d’herbicides. Ce changement d’environnement a entraîné une prolifération de rongeurs dont certains étaient porteurs du virus, faisant passer la maladie au stade épidémique, notamment parmi les travailleurs agricoles. Des milliers de personnes ont alors été contaminées. Une situation similaire a aussi été observée en Asie de l’Est lors de la conversion de terres pour la culture du riz, avec le virus Hantaan responsable de la «fièvre hémorragique de Corée».

Parmi les autres facteurs favorisant les émergences de nouvelles maladies, citons notamment les facteurs socio-économiques, tels que l’augmentation des transports de bien et de personnes, notamment via le transport aérien intercontinental, ou encore l’essor toujours croissant des zones urbaines. Les fortes densités de population, qui favorisent la transmission rapide de maladies, ainsi que les difficultés d’adduction d’eau liées à l’urbanisation rapide, contribuent notamment à la prolifération de moustiques potentiellement porteurs de virus.

Preuve de l’importance de ces facteurs, durant la pandémie de Covid-19, le nombre de cas d’infections «exotiques» importés (autrement dit, rapportées de voyage) a considérablement diminué, essentiellement en raison de la baisse drastique du transport aérien international. Avec la nette reprise dudit trafic, une hausse de ces cas est en revanche attendue en 2023.

Cette situation pourrait avoir un impact sur l’apparition de foyers de cas en France, car une personne infectée arrivant sur notre territoire peut en effet transmettre à son tour la maladie à d’autres personnes, notamment si les vecteurs transmetteurs de la maladie sont présents.

En l’absence d’antiviral efficace ou de vaccin, comme dans le cas du chikungunya ou du Zika, ou lorsque le vaccin présente certaines limites (comme dans le cas de la dengue, contre laquelle le seul vaccin actuellement homologué présente l’inconvénient d’augmenter le risque d’hospitalisation et de dengue grave chez les personnes non antérieurement infectées par le virus de la dengue), la seule solution est d’anticiper l’émergence de ces pathogènes.

Le meilleur moyen d’y parvenir est de mettre en place des réseaux adaptés et réactifs, au plus près du terrain, afin d’étudier efficacement les interactions entre les animaux, les humains et leurs divers environnements, selon une approche qualifiée de One Health («Une seule santé», humaine et environnementale).

Depuis la pandémie de Covid-19, les réseaux de surveillance des maladies virales nationaux et internationaux se sont développés. Leurs capacités restent malheureusement bien en deçà de ce qui est nécessaire pour effectuer un suivi efficace de la circulation des virus à risque, non seulement dans les pays endémiques, mais aussi dans les pays où ils émergent.

L’émergence, puis la propagation rapide en 2020, du coronavirus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19, a eu un impact majeur sur notre santé, nos comportements et nos vies quotidiennes. Cette situation nous a fait brutalement prendre conscience de l’importance de surveiller et d’étudier les «nouveaux» virus.

Au-delà de ces virus jusque-là «inédits», il est aussi essentiel de se pencher sur les virus «négligés» car responsables de maladies sévissant loin de nos territoires. La propagation hors du continent africain, et en particulier en Europe, du virus Mpox, anciennement appelé variole du singe, est venu nous rappeler les enjeux liés à une telle surveillance…

Environnement et santé: Fonte des pôles et réveil d’anciens virus et bactéries

Environnement et santé: Fonte des pôles et réveil d’anciens virus et bactéries !

Une équipe de scientifiques français, allemands et russes a récemment réussi à faire revivre des virus géants jusque-là enfouis dans le sol gelé de la Sibérie, et ce depuis des dizaines de milliers d’années.

Par Paul Hunter
Professor of Medicine, University of East Anglia ( dans the conversation)

Treize de ces virus (des genres Pandoravirus, Megavirus, Pacmanvirus, etc.) prélevés dans des échantillons de permafrost sibérien (pergélisol en français), ont pu être « réanimés ». Le plus « jeune » de ces Lazare avait 27 000 ans. Et le plus ancien – un Pandoravirus – s’approchait des 48 500 ans. Il s’agit, pour l’heure, du plus ancien virus à avoir été ressuscité.

Des résultats qui interrogent, à mesure que la planète – et le Grand Nord – se réchauffe… C’est ce qui a motivé cette étude, venue compléter de précédents travaux et combler un trou dans les données disponibles.

Le dégel du pergélisol libère en effet des matières organiques figées depuis des millénaires, notamment des bactéries et des virus, dont certains peuvent encore se reproduire. Or, alors que les rapports décrivant les bactéries trouvées dans ces zones gelées abondent, ils sont beaucoup plus limités sur les virus. Ce qui suggère à tort que de tels virus dits « zombies » sont rares et ne constituent pas une menace pour la santé publique.

L’étude sur ces treize revenants est un « Préprint », ses résultats doivent donc encore être examinés par d’autres scientifiques. Mais comme le soulignent les auteurs, il est d’ores et déjà « légitime de s’interroger sur le risque que d’anciennes particules virales restent infectieuses et soient remises en circulation par le dégel d’anciennes couches de permafrost ».

En effet, que savons-nous réellement à ce jour des risques que représentent ces virus zombies ?

En supposant que les échantillons récoltés n’aient pas été contaminés lors de leur extraction, les virus géants récupérés viennent littéralement du passé : plus précisément d’il y a plusieurs dizaines de milliers d’années. Et l’on parle de plusieurs genres différents de ces organismes particuliers.

De plus, ce n’est pas la première fois qu’un virus viable est détecté dans des échantillons de permafrost. Les études qui ont ouvert la voie à ces travaux remontent à 2014, quand était détecté pour la première fois un Pithovirus, puis un Mollivirus un an plus tard. La possibilité de telles résurrections est donc réelle… Avec quelles conséquences pour la faune et la flore – et nous ?

Tous les virus retrouvés jusqu’à présent dans de tels échantillons sont des virus géants, à ADN, qui n’affectent (en l’état actuel des connaissances) que les amibes (organismes unicellulaires). Ils sont donc très différents des virus « classiques » (au génome beaucoup plus petit), qui touchent les mammifères par exemple, et il est très peu probable qu’ils représentent un danger pour l’être humain.

Si l’un de ces virus géants infectant les amibes, appelé Acanthamoeba polyphaga mimivirus, a été associé à une pneumonie chez l’Homme, la relation de cause à effet entre les deux n’est pas établie. Il ne semble donc pas que les virus cultivés à partir d’échantillons de pergélisol constituent eux-mêmes une menace pour la santé publique. Mais ils ne sont pas les seuls à peupler ces sols congelés depuis des temps préhistoriques : sont également présentes des entités que l’on sait dangereuses pour notre espèce.

Un point préoccupant est que le dégel du pergélisol pourrait libérer les corps de personnes décédées depuis des décennies sinon des siècles des suites d’une maladie infectieuse. Ce qui pourrait donner aux pathogènes responsables l’occasion de revenir. Et les épidémies ne manquent pas dans l’histoire…

Celles qui inquiètent le plus les scientifiques sont, paradoxalement, liées à la seule maladie humaine à avoir été éradiquée au niveau mondial, grâce à la vaccination : la variole. Sa réintroduction, en particulier dans des zones difficiles à atteindre, pourrait déboucher sur une catastrophe sanitaire mondiale. Or, des preuves d’infection par la variole vieilles de 300 ans ont été détectées dans des corps inhumés en Sibérie…

Heureusement, il ne s’agit que de « séquences génétiques partielles », c’est-à-dire de fragments de l’ADN du virus trop abimés pour pouvoir encore infecter quelqu’un. Le virus de la variole survit cependant bien lorsqu’il est congelé dans de bonnes conditions, à -20 °C, mais seulement pendant quelques décennies – et non des siècles.

La grippe espagnole a aussi soulevé son lot de questions. Au cours des deux dernières décennies, les scientifiques ont en effet exhumé les corps de personnes emportées par cette pandémie il y a un siècle et enterrées dans le pergélisol d’Alaska et au Svalbard, en Norvège. Son génome a pu être lu (séquencé), mais le virus de la grippe lui-même n’a pas pu être « cultivé » (ressuscité) en laboratoire à partir des tissus des défunts. Les virus de la grippe peuvent survivre au congélateur pendant au moins un an, mais probablement pas plusieurs décennies.

Si les virus ne semblent pas être une menace de premier plan à l’heure actuelle, d’autres types d’agents pathogènes, comme les bactéries, pourraient toutefois poser davantage de problèmes.

Au fil des ans, plusieurs épidémies inattendues de fièvre charbonneuse (ou maladie du charbon), causée par Bacillus anthracis, ont en effet eu lieu en Sibérie notamment. Capable d’infecter notre espèce, cette bactérie est surtout dangereuse pour les herbivores et le bétail.

Une épidémie particulièrement importante a ainsi eu lieu à l’été 2016 dans le district autonome de Iamalo-Nénétsie et a entraîné la mort de 2 350 rennes. Cette épidémie a coïncidé avec un épisode particulièrement chaud dans le Grand Nord russe… L’explication privilégiée est que le pathogène a été libéré suite au dégel de la carcasse d’un animal mort du charbon jusque-là prise dans le permafrost. En plus des rennes, plusieurs dizaines d’habitants ont dû être hospitalisés et un enfant est décédé.

Les anciens foyers de charbon identifiés affectant les rennes en Sibérie remontent à 1848. Au cours de ces épidémies, c’est souvent la consommation des animaux morts qui a causé la maladie chez les humains.

La bactérie Bacillus anthracis est capable de former des spores très résistantes, capables de survivre des décennies dans le sol. Cultura Creative Ltd/Alamy Stock Photo
D’autres hypothèses existent pour expliquer ces épidémies, comme l’arrêt de la vaccination contre la maladie du charbon et la surpopulation de rennes.

Dangereuses pour les populations au niveau local, des épidémies de charbon déclenchées par le dégel du pergélisol ne devraient néanmoins pas avoir de conséquences lourdes au niveau mondial : l’infection des herbivores par la fièvre charbonneuse reste commune sur la planète. Il est donc peu probable qu’elles entraînent une pandémie.

Réémergence de résistances anciennes ?

Une autre préoccupation est de savoir si des organismes résistants aux antimicrobiens pourraient être libérés dans l’environnement par le dégel des sols anciens.

De nombreuses études ont démontré que des gènes de résistance (aux antibiotiques, etc.) peuvent être détectés dans des échantillons de pergélisol. Ces gènes, que les bactéries se transmettent entre elles, leur permettent de devenir résistantes aux antibiotiques. Cela n’a rien d’étonnant, car de nombreux gènes de ce type ont évolué à partir d’organismes vivant justement dans le sol.

L’environnement, notamment au niveau des rivières, est déjà fortement contaminé par des organismes et des gènes de résistance divers. Il est donc douteux que les bactéries rescapées du permafrost changent la donne à ce niveau, d’autant que les résistances utiles hier ne le sont pas forcément aujourd’hui…

Des données encourageantes, mais qui n’empêchent pas d’être prudents. Chaque nouvelle étude met en effet en lumière de nouveaux genres de virus capables de résister au temps, pris dans les sols gelés – ce qui incite à rester vigilant, sans tomber dans des scénarios catastrophes qu’aucun fait scientifique ne vient pour l’heure alimenter.

Fonte des pôles et réveil d’anciens virus et bactéries

Fonte des pôles et réveil d’anciens virus et bactéries !

Une équipe de scientifiques français, allemands et russes a récemment réussi à faire revivre des virus géants jusque-là enfouis dans le sol gelé de la Sibérie, et ce depuis des dizaines de milliers d’années.

Par Paul Hunter
Professor of Medicine, University of East Anglia ( dans the conversation)

Treize de ces virus (des genres Pandoravirus, Megavirus, Pacmanvirus, etc.) prélevés dans des échantillons de permafrost sibérien (pergélisol en français), ont pu être « réanimés ». Le plus « jeune » de ces Lazare avait 27 000 ans. Et le plus ancien – un Pandoravirus – s’approchait des 48 500 ans. Il s’agit, pour l’heure, du plus ancien virus à avoir été ressuscité.

Des résultats qui interrogent, à mesure que la planète – et le Grand Nord – se réchauffe… C’est ce qui a motivé cette étude, venue compléter de précédents travaux et combler un trou dans les données disponibles.

Le dégel du pergélisol libère en effet des matières organiques figées depuis des millénaires, notamment des bactéries et des virus, dont certains peuvent encore se reproduire. Or, alors que les rapports décrivant les bactéries trouvées dans ces zones gelées abondent, ils sont beaucoup plus limités sur les virus. Ce qui suggère à tort que de tels virus dits « zombies » sont rares et ne constituent pas une menace pour la santé publique.

L’étude sur ces treize revenants est un « Préprint », ses résultats doivent donc encore être examinés par d’autres scientifiques. Mais comme le soulignent les auteurs, il est d’ores et déjà « légitime de s’interroger sur le risque que d’anciennes particules virales restent infectieuses et soient remises en circulation par le dégel d’anciennes couches de permafrost ».

En effet, que savons-nous réellement à ce jour des risques que représentent ces virus zombies ?

En supposant que les échantillons récoltés n’aient pas été contaminés lors de leur extraction, les virus géants récupérés viennent littéralement du passé : plus précisément d’il y a plusieurs dizaines de milliers d’années. Et l’on parle de plusieurs genres différents de ces organismes particuliers.

De plus, ce n’est pas la première fois qu’un virus viable est détecté dans des échantillons de permafrost. Les études qui ont ouvert la voie à ces travaux remontent à 2014, quand était détecté pour la première fois un Pithovirus, puis un Mollivirus un an plus tard. La possibilité de telles résurrections est donc réelle… Avec quelles conséquences pour la faune et la flore – et nous ?

Tous les virus retrouvés jusqu’à présent dans de tels échantillons sont des virus géants, à ADN, qui n’affectent (en l’état actuel des connaissances) que les amibes (organismes unicellulaires). Ils sont donc très différents des virus « classiques » (au génome beaucoup plus petit), qui touchent les mammifères par exemple, et il est très peu probable qu’ils représentent un danger pour l’être humain.

Si l’un de ces virus géants infectant les amibes, appelé Acanthamoeba polyphaga mimivirus, a été associé à une pneumonie chez l’Homme, la relation de cause à effet entre les deux n’est pas établie. Il ne semble donc pas que les virus cultivés à partir d’échantillons de pergélisol constituent eux-mêmes une menace pour la santé publique. Mais ils ne sont pas les seuls à peupler ces sols congelés depuis des temps préhistoriques : sont également présentes des entités que l’on sait dangereuses pour notre espèce.

Un point préoccupant est que le dégel du pergélisol pourrait libérer les corps de personnes décédées depuis des décennies sinon des siècles des suites d’une maladie infectieuse. Ce qui pourrait donner aux pathogènes responsables l’occasion de revenir. Et les épidémies ne manquent pas dans l’histoire…

Celles qui inquiètent le plus les scientifiques sont, paradoxalement, liées à la seule maladie humaine à avoir été éradiquée au niveau mondial, grâce à la vaccination : la variole. Sa réintroduction, en particulier dans des zones difficiles à atteindre, pourrait déboucher sur une catastrophe sanitaire mondiale. Or, des preuves d’infection par la variole vieilles de 300 ans ont été détectées dans des corps inhumés en Sibérie…

Heureusement, il ne s’agit que de « séquences génétiques partielles », c’est-à-dire de fragments de l’ADN du virus trop abimés pour pouvoir encore infecter quelqu’un. Le virus de la variole survit cependant bien lorsqu’il est congelé dans de bonnes conditions, à -20 °C, mais seulement pendant quelques décennies – et non des siècles.

La grippe espagnole a aussi soulevé son lot de questions. Au cours des deux dernières décennies, les scientifiques ont en effet exhumé les corps de personnes emportées par cette pandémie il y a un siècle et enterrées dans le pergélisol d’Alaska et au Svalbard, en Norvège. Son génome a pu être lu (séquencé), mais le virus de la grippe lui-même n’a pas pu être « cultivé » (ressuscité) en laboratoire à partir des tissus des défunts. Les virus de la grippe peuvent survivre au congélateur pendant au moins un an, mais probablement pas plusieurs décennies.

Si les virus ne semblent pas être une menace de premier plan à l’heure actuelle, d’autres types d’agents pathogènes, comme les bactéries, pourraient toutefois poser davantage de problèmes.

Au fil des ans, plusieurs épidémies inattendues de fièvre charbonneuse (ou maladie du charbon), causée par Bacillus anthracis, ont en effet eu lieu en Sibérie notamment. Capable d’infecter notre espèce, cette bactérie est surtout dangereuse pour les herbivores et le bétail.

Une épidémie particulièrement importante a ainsi eu lieu à l’été 2016 dans le district autonome de Iamalo-Nénétsie et a entraîné la mort de 2 350 rennes. Cette épidémie a coïncidé avec un épisode particulièrement chaud dans le Grand Nord russe… L’explication privilégiée est que le pathogène a été libéré suite au dégel de la carcasse d’un animal mort du charbon jusque-là prise dans le permafrost. En plus des rennes, plusieurs dizaines d’habitants ont dû être hospitalisés et un enfant est décédé.

Les anciens foyers de charbon identifiés affectant les rennes en Sibérie remontent à 1848. Au cours de ces épidémies, c’est souvent la consommation des animaux morts qui a causé la maladie chez les humains.

La bactérie Bacillus anthracis est capable de former des spores très résistantes, capables de survivre des décennies dans le sol. Cultura Creative Ltd/Alamy Stock Photo
D’autres hypothèses existent pour expliquer ces épidémies, comme l’arrêt de la vaccination contre la maladie du charbon et la surpopulation de rennes.

Dangereuses pour les populations au niveau local, des épidémies de charbon déclenchées par le dégel du pergélisol ne devraient néanmoins pas avoir de conséquences lourdes au niveau mondial : l’infection des herbivores par la fièvre charbonneuse reste commune sur la planète. Il est donc peu probable qu’elles entraînent une pandémie.

Réémergence de résistances anciennes ?

Une autre préoccupation est de savoir si des organismes résistants aux antimicrobiens pourraient être libérés dans l’environnement par le dégel des sols anciens.

De nombreuses études ont démontré que des gènes de résistance (aux antibiotiques, etc.) peuvent être détectés dans des échantillons de pergélisol. Ces gènes, que les bactéries se transmettent entre elles, leur permettent de devenir résistantes aux antibiotiques. Cela n’a rien d’étonnant, car de nombreux gènes de ce type ont évolué à partir d’organismes vivant justement dans le sol.

L’environnement, notamment au niveau des rivières, est déjà fortement contaminé par des organismes et des gènes de résistance divers. Il est donc douteux que les bactéries rescapées du permafrost changent la donne à ce niveau, d’autant que les résistances utiles hier ne le sont pas forcément aujourd’hui…

Des données encourageantes, mais qui n’empêchent pas d’être prudents. Chaque nouvelle étude met en effet en lumière de nouveaux genres de virus capables de résister au temps, pris dans les sols gelés – ce qui incite à rester vigilant, sans tomber dans des scénarios catastrophes qu’aucun fait scientifique ne vient pour l’heure alimenter.

Vaccin ARN : essai contre le virus du sida

Vaccin ARN : essai contre le virus du sida

 

Le but du vaccin ARN  testé est de stimuler la production d’un certain type d’anticorps (bnAb), capables d’agir contre les très nombreux variants en circulation du VIH, le virus provoquant la maladie du sida. Des recherches sont aussi en cours vis-à-vis des cancers.

Les premières doses d’un vaccin contre le virus du sida utilisant la technologie de l’ARN messager ont été administrées chez des humains, ont annoncé jeudi 27 janvier l’entreprise américaine de biotechnologie Moderna et l’organisation International AIDS Vaccine Initiative . Cet essai, dit de phase 1, sera réalisé aux Etats-Unis sur 56 adultes en bonne santé et séronégatifs.

Malgré quatre décennies de recherche, les scientifiques n’ont toujours pas réussi à mettre au point un vaccin contre cette maladie qui tue chaque année des centaines de milliers de personnes. Mais les récents succès de la technologie de l’ARN messager, ayant permis le développement en un temps record de vaccins contre le Covid-19, dont celui de Moderna, a suscité des espoirs.

Pour Palma Rocchi,Directrice de recherche à l’Inserm, c’est dans le domaine de la lutte contre le cancer que l’on dispose du plus grand recul sur les vaccins ARNm. Cela fait déjà une vingtaine d’années que les gens travaillent sur la vaccination avec l’ARN messager dans le cancer mais la technologie a été mise en lumière avec le Covid, ce qui va inciter les pouvoirs publics et les Big Pharma à investir dans la technologie. C’est actuellement administré à des gens dans le cadre d’essai clinique mais il n’y a pas encore d’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM). Cela représente un espoir important pour les traitements anti cancer car c’est une technologie particulièrement intéressante pour faire avancer la prise en charge de cette maladie.

Covid: Le choix délibéré de la circulation du virus (Gilles Pialoux)

Covid: Le  choix délibéré de la circulation du virus (Gilles Pialoux)

 

« C’est plus une régulation sociale et politique par rapport à une incidence tout à fait faramineuse du variant Omicron, que quelque chose qui colle au mode de transmission », a expliqué dimanche 3 janvier sur franceinfo Gilles Pialoux, infectiologue, chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Tenon à Paris, après les annonces par le gouvernement d’un assouplissement des règles d’isolement pour les personnes positives au Covid-19 et cas contacts. Sans ces mesures, il y avait le « risque d’une paralysie totale, notamment de l’hôpital ». 

 Le gouvernement a choisi d’alléger les règles d’isolement. Quel regard portez-vous sur ces nouvelles mesures ?

Gilles Pialoux : Ce qui me paraît pertinent, c’est le projet global qui veut que l’on évite que la vague Omicron, qui vient s’ajouter à la vague Delta, paralyse le service public, l’hôpital, les écoles. Je pense que c’est plus une régulation sociale et politique par rapport à une incidence tout à fait faramineuse du variant Omicron, que quelque chose qui colle au mode de transmission. Mais l’exécutif a, depuis le début de cette pandémie, souvent fait des choix entre deux risques. Donc là, il y a le choix de continuer une transmission de la circulation virale par le fait que les gens puissent reprendre des activités. Mais en face, dans l’autre risque, il y avait celui d’une paralysie totale, notamment de certains services publics, dont l’hôpital. Et je pense que c’est cela qui a été privilégié dans les décisions.

Olivier Véran a estimé dans le JDD que la cinquième vague est peut-être la dernière. Etes-vous d’accord avec son analyse ?

J’espère qu’Olivier Véran a raison et qu’après cette vague, on pourrait imaginer une décrue qui serait à la fois liée au fait qu’Omicron serait moins pathogène, moins agressif, moins la cause d’hospitalisations et de passages en réanimation. Mais cela nécessite vraiment d’être démontré plus clairement. Et il y a le fait qu’il y a quand même une réussite française qui est d’arriver à tracter les gens vers la troisième dose ou le rappel. Très clairement, la ligne Maginot, ce sont les gens qui ont eu cette troisième dose de rappel versus les autres. On voit très bien qu’avec Omicron, cela influence énormément le non-passage aux formes graves d’avoir eu cette troisième dose. Donc on est avec des chiffres qui sont assez satisfaisants. Mais il y a quand même deux angles morts. C’est l’école, avec pour l’instant une absence totale de plan adapté à la transmissibilité d’Omicron. Et puis, les personnes immunodéprimées et très fragiles, qui échappent aux anticorps monoclonaux, qui échappent à la vaccination… Et ces gens-là vont continuer à entrer dans l’hôpital.

Pour l’école, quelles seraient selon vous les mesures les plus efficaces ?

Il y a quelque chose que l’on a réclamé beaucoup et qui n’a pas été entendu, parce que l’obsession du ministre de l’Education nationale, c’est de ne pas fermer les classes : il y a un certain nombre de modélisations qui montrent que quand vous dépistez régulièrement les gens, a fortiori avec une incidence très importante dans la circulation du virus dans les écoles – et cela ne va aller que croissant avec Omicron – vous mettez moins d’enfants en dehors du système scolaire que si vous attendez trois contaminations dans une classe. On sait qu’Omicron diffuse énormément dans l’espace. Et s’il n’y a pas un contrôle de l’aération, des capteurs de CO2 et éventuellement des filtres, on n’y arrivera pas. Donc, avec ces deux systèmes, un dépistage répété plus un système de ventilation, en ajoutant une reprise de pédagogie sur le lavage des mains et le masque à partir de 6 ans, cela va participer à un une part de contrôle du virus

Le choix délibéré de la circulation du virus (Gilles Pialoux)

Le  choix délibéré de la circulation du virus (Gilles Pialoux)

 

« C’est plus une régulation sociale et politique par rapport à une incidence tout à fait faramineuse du variant Omicron, que quelque chose qui colle au mode de transmission », a expliqué dimanche 3 janvier sur franceinfo Gilles Pialoux, infectiologue, chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Tenon à Paris, après les annonces par le gouvernement d’un assouplissement des règles d’isolement pour les personnes positives au Covid-19 et cas contacts. Sans ces mesures, il y avait le « risque d’une paralysie totale, notamment de l’hôpital ». 

 Le gouvernement a choisi d’alléger les règles d’isolement. Quel regard portez-vous sur ces nouvelles mesures ?

Gilles Pialoux : Ce qui me paraît pertinent, c’est le projet global qui veut que l’on évite que la vague Omicron, qui vient s’ajouter à la vague Delta, paralyse le service public, l’hôpital, les écoles. Je pense que c’est plus une régulation sociale et politique par rapport à une incidence tout à fait faramineuse du variant Omicron, que quelque chose qui colle au mode de transmission. Mais l’exécutif a, depuis le début de cette pandémie, souvent fait des choix entre deux risques. Donc là, il y a le choix de continuer une transmission de la circulation virale par le fait que les gens puissent reprendre des activités. Mais en face, dans l’autre risque, il y avait celui d’une paralysie totale, notamment de certains services publics, dont l’hôpital. Et je pense que c’est cela qui a été privilégié dans les décisions.

Olivier Véran a estimé dans le JDD que la cinquième vague est peut-être la dernière. Etes-vous d’accord avec son analyse ?

J’espère qu’Olivier Véran a raison et qu’après cette vague, on pourrait imaginer une décrue qui serait à la fois liée au fait qu’Omicron serait moins pathogène, moins agressif, moins la cause d’hospitalisations et de passages en réanimation. Mais cela nécessite vraiment d’être démontré plus clairement. Et il y a le fait qu’il y a quand même une réussite française qui est d’arriver à tracter les gens vers la troisième dose ou le rappel. Très clairement, la ligne Maginot, ce sont les gens qui ont eu cette troisième dose de rappel versus les autres. On voit très bien qu’avec Omicron, cela influence énormément le non-passage aux formes graves d’avoir eu cette troisième dose. Donc on est avec des chiffres qui sont assez satisfaisants. Mais il y a quand même deux angles morts. C’est l’école, avec pour l’instant une absence totale de plan adapté à la transmissibilité d’Omicron. Et puis, les personnes immunodéprimées et très fragiles, qui échappent aux anticorps monoclonaux, qui échappent à la vaccination… Et ces gens-là vont continuer à entrer dans l’hôpital.

Pour l’école, quelles seraient selon vous les mesures les plus efficaces ?

Il y a quelque chose que l’on a réclamé beaucoup et qui n’a pas été entendu, parce que l’obsession du ministre de l’Education nationale, c’est de ne pas fermer les classes : il y a un certain nombre de modélisations qui montrent que quand vous dépistez régulièrement les gens, a fortiori avec une incidence très importante dans la circulation du virus dans les écoles – et cela ne va aller que croissant avec Omicron – vous mettez moins d’enfants en dehors du système scolaire que si vous attendez trois contaminations dans une classe. On sait qu’Omicron diffuse énormément dans l’espace. Et s’il n’y a pas un contrôle de l’aération, des capteurs de CO2 et éventuellement des filtres, on n’y arrivera pas. Donc, avec ces deux systèmes, un dépistage répété plus un système de ventilation, en ajoutant une reprise de pédagogie sur le lavage des mains et le masque à partir de 6 ans, cela va participer à un une part de contrôle du virus

123456



L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol