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Finance verte: un accord européen ?

Finance verte: un accord européen ?

Si les discours ne manquent pas en matière de responsabilité environnementale concernant l’économie par contre les orientations et moyens concrets sont encore loin d’être à la hauteur des enjeux. Pour tout dire on en reste au niveau des intentions. Pas étonnant dans la mesure jusque-là l’Union européenne  n’était pas encore  en harmonie avec la définition de ce qui est vert ou pas en matière d’énergie, secteur évidemment stratégique  pour l’évolution climatique. Un article de Romain Segond dans L’Opinion Évoque la problématique du financement vert après le possible accord sur la taxonomie européenne qui définit le label environnemental pour les énergies. La version définitive de « taxonomie européenne » sera arrêtée au cours du mois de janvier 

L’Union européenne s’apprête à montrer la voie en matière de lutte contre le dérèglement climatique. Du Green Deal à la réforme de la PAC, en passant par le reporting extra-financier ou la réglementation commerciale, de nombreux chantiers ont été ouverts pour permettre à l’Union de renforcer son arsenal climatique. Mais l’une de ces mesures divise le couple franco-allemand : la création d’une taxonomie européenne de la finance verte. Concrètement, il s’agit de classer les filières en fonction de leur niveau d’émissions de CO2 et de leurs conséquences sur l’environnement.

Mais si elle paraît simple dans son principe, cette idée peine à accoucher d’une version définitive. En particulier parce qu’elle touche à des sujets aussi sensibles que la souveraineté et la stratégie énergétique des Etats membres. Au centre de la discorde, la volonté française d’inscrire le nucléaire comme énergie durable, et celle, allemande, de labelliser le gaz comme énergie de transition. Ce compromis semble s’imposer ces dernières semaines, mais continue de diviser à Bruxelles.

Pour bien saisir l’enjeu de ce règlement, l’impact qu’il pourrait avoir sur la réorientation des flux financiers et des intérêts énergétiques nationaux, Les principales questions qui se posent :

Quelle est la philosophie générale qui sous-tend la mise en place de la taxonomie verte en Europe ? Comment est-elle censée fonctionner ? Et où en est-on dans le processus d’adoption ?

Depuis le début, la France pèse de tout son poids pour l’inscription du nucléaire dans cette directive. Au risque d’en venir au clash avec l’Allemagne, son principal partenaire. Pourquoi le gouvernement français se montre-t-il si inflexible au sujet de l’atome ? Qu’est-ce qui justifie ces réticences Outre-Rhin ? Y a-t-il des raisons objectives pour ne pas reconnaître la compatibilité de l’énergie nucléaire avec les objectifs climatiques de l’UE ?

Le gouvernement Allemand, de son côté, est resté longtemps ambigu sur le gaz, auquel il a notamment recours pour soutenir le développement des énergies renouvelables sur son territoire. Le gaz pourrait-il être compatible avec nos objectifs d’émissions ? Connaît-on la position de la nouvelle coalition au pouvoir sur ce dossier ? Serait-il tenable, politiquement, pour l’Allemagne, de troquer l’inclusion du gaz contre celle du nucléaire ?

L’UE rassemble presque autant de pays que de stratégies énergétiques différentes. Autour du couple franco-allemand, quelles sont les alliances qui pourraient faire pencher la décision finale d’un côté plus que de l’autre ? Le projet pourrait-il capoter ? N’est-il pas vain de défendre des intérêts nationaux alors même que le marché de l’énergie est européen ?

la Chine privée de sport international

la Chine privée de sport international

 

 

Deux raisons militent en faveur de la suppression de sport international d’abord l’affaire récente de la tenniswoman Oeng victime de la répression de l’appareil chinois. Ensuite évidemment les incertitudes relatives au développement Covid  via le variant omicron.

  »Nous répétons notre appel pour une enquête complète et transparente concernant l’affaire  Peng ». Indique la fédération de tennis international féminine

la deuxième incertitude concerne le développement potentiel du variant Omicron qui va compliquer l’organisation. Ce mardi 30 novembre, la Chine a affirmé que le variant Omicron allait rendre plus difficile l’organisation des Jeux olympiques d’hiver qui se déroule du 4 au 20 février 2022, à Pékin.

L’illusion de la croissance verte

 

S’inquiétant de l’illusion d’une « croissance verte », les quatre responsables du club de réflexion Bridge, dont l’ancien syndicaliste et député européen Edouard Martin, invitent, dans une tribune au « Monde », à repenser les liens entre consommation d’énergie et production de biens.

 

Tribune.

Un clou chasse l’autre. De la pandémie à la sécheresse, des inondations à l’augmentation des prix de l’essence à la pompe, du gaz et de l’électricité au compteur, la question des liens systémiques entre ces événements n’est que fugitivement abordée.

Ils ont pourtant tous à voir avec la consommation cumulative et croissante de ressources naturelles, minérales ou organiques, et les rejets massifs de gaz, de déchets et d’effluents qu’elle génère. Ils ont pourtant tous à voir avec la mondialisation et l’intensité des échanges de flux de matières, de flux financiers, de flux d’informations (vraies ou fausses), générateurs de spéculations chaotiques, de contagions économiques, politiques et biologiques.

Le dérèglement climatique planétaire est du domaine de l’urgence pour l’humanité. Ses effets, pour certains inexorables, sont l’affaire du siècle. Seule leur intensité peut encore être sinon contrôlée, du moins contenue, à condition d’opérer partout un vrai décollage de la transition écologique : la transition énergétique en est à la fois un prérequis et un prototype. « Reconstruction » serait préférable, tant « le vocabulaire de la transition véhicule un imaginaire lisse, tranquille, comme si cela allait se faire sans accroc et sans conflit social » (« La reconstruction écologique nous ouvre un monde de la surabondance », par Gaël Giraud, Mediapart, 1er juin 2020).

 

La « reconstruction », en paraphrasant Antonio Gramsci (1891-1937), impose la combinaison nécessaire du pessimisme de l’intelligence, de la complexité des interactions jointe à l’étendue des dégâts, et de l’optimisme de la volonté et d’opérer une révolution, théorique et pratique, de l’économie politique.

Les politiques économiques doivent insérer les programmes d’urgence de court et moyen termes dans des perspectives de long terme, pilotant les réorientations indispensables de notre système de production, de la régulation des échanges, de nos habitudes de consommation.

Après deux siècles d’expansion qui ont structuré les systèmes de production et les imaginaires de consommation, il s’agit de défaire avec patience, méthode et obstination, l’imbroglio constitué par ce couple. Comme l’affirme l’économiste Benjamin Coriat, « la difficulté ne réside pas tant dans le rejet du système actuel que dans le fait de rendre crédibles d’autres solutions »  L’âge de l’anthropocène, c’est celui du retour aux biens communs », Presse-toi à gauche !, 19 mai 2020).

Aucune extraction d’énergie, aucune transformation de la matière ne peut s’effectuer sans générer une part de pollutions défiant les capacités d’absorption des écosystèmes naturels et industriels

Environnement-Croissance verte ou décroissance ?

Environnement-Croissance verte ou décroissance ?

Un papier intéressant de France Info sur la problématique croissance verte-décroissance (extrait)

La décroissance plaide pour une frugalité choisie afin de limiter les effets du changement climatique. Popularisée dans les années 2000, elle est de nouveau mise en lumière à l’occasion de la primaire écologiste.

« Nous sommes tous ensemble dans un train qui va à toute vitesse vers un précipice. » Voici comment Delphine Batho, candidate à la primaire des écologistes pour la présidentielle 2022, décrit la crise climatique actuelle, sur franceinfo, début août, après la parution d’un rapport choc du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). Pour la députée des Deux-Sèvres, une seule solution : embrasser « la décroissance ». De Sandrine Rousseau à Jean-Luc Mélenchon, elle n’est pas la seule, à gauche, à vouloir s’inspirer de ce mouvement qui prône une frugalité choisie afin de limiter les effets du dérèglement climatique.

Vous n’êtes pas familier du concept ? Pas de panique, Franceinfo vous a prévu un cours accéléré pour tout comprendre à ce mot qui s’invite dans le débat politique.

Qu’est-ce que la décroissance ?

Il s’agit d’un courant de pensée philosophique, politique, social et économique popularisé en France au début des années 2000. Pour ses partisans, la croissance économique, mesurée par le produit intérieur brut (PIB), n’est pas soutenable du fait des ressources limitées de la Terre. Elle n’est pas non plus souhaitable au-delà d’un certain seuil car elle échoue depuis la fin des Trente Glorieuses à réaliser le plein emploi, la réduction des inégalités et la satisfaction de la population dans les pays développés, avancent-ils. 

Ses théoriciens proposent donc de lui substituer d’autres objectifs issus de la « réflexion sur ce que sont vraiment nos besoins fondamentaux et sur la façon dont on peut y répondre de manière soutenable écologiquement et plus juste socialement », explique à franceinfo Vincent Liegey, ingénieur et auteur notamment d’Exploring Degrowth : A Critical Guide (Pluto Press, 2020).

Concrètement, ça passe par quels types de mesures ?

Plus qu’un véritable mode d’emploi pour parvenir à un système décroissant, ses adeptes proposent des mesures dans différents domaines. Une réflexion récurrente est de distinguer les biens et les activités en fonction de leurs conséquences sur le climat, comme avec un taux de TVA différencié en fonction des produits, ou un quota d’unités de charge écologique détenu par chaque consommateur et dans lequel il puiserait chaque fois qu’il achète un bien. Logiquement, nombre des propositions des décroissants touchent aux secteurs des transports, de la construction et de l’alimentation, particulièrement polluants selon l’Insee.

Une autre réflexion qui traverse le courant décroissant est celle sur l’usage et le mésusage (l’usage abusif) des ressources. L’eau pourrait ainsi ne pas être payée au même prix selon qu’il s’agisse « de la boire ou bien de l’utiliser pour remplir sa piscine », explique Timothée Parrique, auteur d’une thèse (lien en anglais) en 2019 sur la décroissance, qui sera adaptée chez Flammarion en 2022.

Afin d’améliorer la justice sociale, certains décroissants imaginent une taxation plus importante des hauts revenus et la suppression des niches fiscales, dans la lignée des travaux de l’économiste de gauche et spécialiste des inégalités Thomas Piketty. Mais aussi l’instauration d’un revenu maximum ou d’un revenu universel. Enfin, sur le volet du bien-être, de nombreux décroissants prônent la réduction du temps de travail qui permettrait, selon eux, de partager l’emploi existant et d’investir davantage le temps libre pour l’art, la culture et les liens interpersonnels.

Mais au fait, ça vient d’où ?

« La décroissance n’a pas attendu ce mot pour exister », note le philosophe Dominique Bourg, directeur de la revue La Pensée écologique et soutien de la candidate à la primaire écologiste Delphine Batho. Historiquement, la décroissance est la résultante de deux courants : la critique du développement et la prise en compte des questions écologiques. Le premier est conçu dès le début du XXe siècle par des penseurs pour qui développement ou technique ne vont pas nécessairement de pair avec le bien-être et le progrès humain. Le second naît dans les années 1970 avec un rapport intitulé « Les limites de la croissance » (en anglais) et les travaux de l’économiste roumain Nicholas Georgescu-Roegen pour qui la croissance infinie dans un monde fini est impossible.

Pourtant,  »les débats sur la pensée écologiste ont disparu dans les années 1980 avec le rouleau compresseur du néolibéralisme » et l’effondrement du bloc soviétique, avance Dominique Bourg. Il faut attendre le début des années 2000 pour voir ressurgir une nouvelle prise de conscience, grâce notamment « aux rapports du Giec et à l’intérêt des médias dominants pour les conséquences du dérèglement climatique ».

En 2002, la revue écologiste Silence consacre un numéro à la décroissance. Le mot est notamment popularisé par l’économiste Serge Latouche et le militant anti-pub Vincent Cheynet, et il est bientôt traduit en anglais par « degrowth », qui connaît un succès mondial. Le mouvement français connaît son apogée dans les années 2000 (lancement d’une revue et d’un parti politique, organisation de colloques et publication d’une multitude de livres…). Surtout à gauche, mais pas seulement. La décroissance est également reprise par certains milieux catholiques ou d’extrême droite, attirés par l’idée d’un certain ascétisme ou le rejet de la mondialisation, comme l’explique Le Monde.

Le bouillonnement militant et intellectuel autour de la décroissance se tasse pourtant dans la décennie suivante, notamment marquée par les divergences de vue entre ses promoteurs puis par le succès de la collapsologie. Pour autant, la décroissance a infusé certains cercles militants, qui la mobilisent pour justifier le développement d’alternatives concrètes comme les ressourceries, les monnaies locales, les jardins partagés et les coopératives.

Pourquoi m’en parlez-vous maintenant ?

Parce que le concept est de nouveau placé sous le feu des projecteurs par la primaire écologiste, qui se tient entre les 16 et 28 septembre. L’une des quatre candidates, l’ancienne ministre de l’Ecologie Delphine Batho, revendique la décroissance comme étant au cœur de son engagement. Cette dernière « est la seule voie réaliste », expliquait-elle le 10 août sur franceinfo. Si son intérêt pour le sujet est longuement expliqué dans une note de campagne sur le site de son parti, Génération écologie, la candidate en dit néanmoins très peu sur la manière dont elle compte la mettre en pratique.

S’ils n’emploient pas ouvertement le terme, les autres candidats à la primaire écologiste (mais aussi des figures de la gauche comme Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon) proposent également certaines mesures proches de la décroissance. L’économiste Sandrine Rousseau, qui souligne dans son programme que « notre Terre n’a pas de ressources illimitées », plaide pour « une véritable fiscalité carbone, en stoppant les subventions aux industries polluantes » et expliquait le 25 juillet dans l’émission YouTube « Backseat » qu’il faudrait « évidemment diminuer le volume de nos consommations ». Le maire de Grenoble, Eric Piolle, qui expliquait sur France Inter le 6 juillet refuser de choisir une « religion » entre « croissantiste » et « décroissantiste », promet dans son programme la mise en place d’un  »ISF climatique » pour taxer les particuliers les plus pollueurs et souhaite  »une loi sur la sobriété numérique qui vise la réduction de l’empreinte carbone de 40% du numérique » d’ici 2022

L’ancien chef d’entreprise Jean-Marc Governatori assure lui aussi refuser le débat entre « croissance et décroissance », même s’il souhaite « mettre en place dès maintenant une activité humaine compatible avec la biosphère dans des objectifs de pleine santé et de plein emploi ». Egalement prudent lorsqu’il emploie le mot de décroissance, comme il l’expliquait sur France Inter début juillet, l’eurodéputé Yannick Jadot annonce néanmoins dans son programme qu’il veut « augmenter la TVA sur tous les produits et services polluants et à l’obsolescence programmée » et mobiliser « 20 milliards par an dès 2021 et sur 2022-2027 pour la transformation des secteurs les plus polluants ».

Est-ce que la décroissance a déjà été mise en pratique ?

La décroissance « n’a jamais été appliquée à grande échelle, reconnaît Vincent Liegey, mais il y a déjà un grand nombre d’espaces dans nos sociétés dans lesquels des mesures décroissantes sont expérimentées au quotidien ». Entre autres exemples, on peut citer un fourmillement d’initiatives locales autour de la low tech, de la permaculture, des circuits courts, mais aussi des espaces comme des ressourceries ou le site de seconde main Leboncoin. Plusieurs pays ont par ailleurs proposé des indicateurs de progrès autres que le PIB, tels que la Nouvelle-Zélande, la Finlande, le Bhoutan… et même la France, depuis 2015. Le développement de la démocratie participative est également salué, avec des expérimentations comme la Convention citoyenne pour le climat. Les mouvements sociaux ne sont pas en reste, avec l’apparition de groupes de défense du climat comme Extinction Rebellion ou Fridays for Future.

Qu’en disent ses détracteurs ?

La décroissance rencontre un grand nombre de critiques, à la fois extérieures et intérieures à ses cercles. Voici les principales :

La critique du « retour en arrière ». Pour certains, la décroissance est synonyme d’un refus de la modernité et des technologies. Comme Emmanuel Macron, qui ironisait en septembre 2020 sur ceux qui, critiquant le déploiement de la 5G, préféreraient  »le modèle amish » et le  »retour à la lampe à huile »Dans un monde décroissant, bye bye les SUV et les iPhone 12. Néanmoins, « la décroissance n’est pas anti-technique, mais pour une réappropriation de la technique au service de l’amélioration du bien-être humain », assure l’essayiste Vincent Liegey.

La critique du catastrophisme. Cette première critique va de pair avec une seconde, selon laquelle les décroissants font l’impasse sur l’innovation, qui aurait toujours permis à l’humanité de relever les défis présentés par la nature. « C’est par la technique qu’on résoudra les problèmes posés. Quand on voit les progrès dans le solaire, l’éolien (…), la mise au point de bactéries pour dévorer des sacs plastiques… Cela peut aller tout aussi vite que le progrès des technologies fondées sur le carbone au XIXe siècle », estimait ainsi l’essayiste libéral Gaspard Koenig en septembre 2019 auprès de l’AFP. Il ne faut pas avoir une « foi aveugle » dans le progrès, répondent les partisans de la décroissance. Contrairement à ceux qui soutiennent la « croissance verte » ou le « développement durable », ils mettent en avant que l’alliance entre croissance économique et progrès technique n’a jamais prouvé qu’elle permettait de réduire suffisamment (lien en anglais) les pollutions pour répondre à l’urgence climatique actuelle.

La critique sur le maintien de la pauvreté. Pour les économistes libéraux, la croissance est un préalable à la redistribution des richesses. Moins de 10% de la population mondiale vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, contre plus de 35% trente ans plus tôt, rapporte en effet la Banque mondiale. Pour ces critiques, les décroissants seraient donc partisans de la récession, et à terme du maintien de la pauvreté dans les pays en voie de développement. Mais la théorie de la décroissance est sélective et ne concerne  »que les pays riches ayant déjà atteint des seuils de production suffisants pour satisfaire les besoins de leur population », répond l’économiste Timothée Parrique. « Les pays du Sud qui vivent dans la pauvreté doivent bien entendu produire ce dont ils ont besoin, mais pour ce faire, encore faut-il que les ressources soient disponibles – d’où la logique d’une décroissance dans les pays du Nord », ajoute-t-il. Pour éviter la confusion entre décroissance et récession, « il faudrait sans doute utiliser un terme comme celui d »acroissance’, avec [un] ’a-’ privatif », plaide Serge Latouche dans La Décroissance (Que sais-je ?, 2019).

La critique de la mise en œuvre. Les solutions avancées par les décroissants sont variées mais rarement présentées sous la forme d’un système cohérent qui permet d’envisager sa mise en œuvre concrète, notent plusieurs analystes, y compris parmi les adeptes de la décroissance. Quel système politique adopter pour la prise de décision en commun ? Jusqu’à quel point la production mondiale doit-elle décroître, et avec quelle population ? Comment concilier réduction du temps de travail et besoin accru de main-d’œuvre lié à une plus faible utilisation de la technologie ?  »Tout le monde tâtonne là-dessus depuis dix ans et on n’a pas encore la réponse. Le design d’une société compatible avec la durabilité de la Terre est quelque chose qu’on doit encore créer et qu’on n’a pas devant nous », reconnaît Dominique Bourg.

Société-Croissance verte ou décroissance ?

Société-Croissance verte ou décroissance ?

Un papier intéressant de France Info sur la problématique croissance verte décroissance (extrait)

La décroissance plaide pour une frugalité choisie afin de limiter les effets du changement climatique. Popularisée dans les années 2000, elle est de nouveau mise en lumière à l’occasion de la primaire écologiste.

« Nous sommes tous ensemble dans un train qui va à toute vitesse vers un précipice. » Voici comment Delphine Batho, candidate à la primaire des écologistes pour la présidentielle 2022, décrit la crise climatique actuelle, sur franceinfo, début août, après la parution d’un rapport choc du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). Pour la députée des Deux-Sèvres, une seule solution : embrasser « la décroissance ». De Sandrine Rousseau à Jean-Luc Mélenchon, elle n’est pas la seule, à gauche, à vouloir s’inspirer de ce mouvement qui prône une frugalité choisie afin de limiter les effets du dérèglement climatique.

Vous n’êtes pas familier du concept ? Pas de panique, Franceinfo vous a prévu un cours accéléré pour tout comprendre à ce mot qui s’invite dans le débat politique.

Qu’est-ce que la décroissance ?

Il s’agit d’un courant de pensée philosophique, politique, social et économique popularisé en France au début des années 2000. Pour ses partisans, la croissance économique, mesurée par le produit intérieur brut (PIB), n’est pas soutenable du fait des ressources limitées de la Terre. Elle n’est pas non plus souhaitable au-delà d’un certain seuil car elle échoue depuis la fin des Trente Glorieuses à réaliser le plein emploi, la réduction des inégalités et la satisfaction de la population dans les pays développés, avancent-ils. 

Ses théoriciens proposent donc de lui substituer d’autres objectifs issus de la « réflexion sur ce que sont vraiment nos besoins fondamentaux et sur la façon dont on peut y répondre de manière soutenable écologiquement et plus juste socialement », explique à franceinfo Vincent Liegey, ingénieur et auteur notamment d’Exploring Degrowth : A Critical Guide (Pluto Press, 2020).

Concrètement, ça passe par quels types de mesures ?

Plus qu’un véritable mode d’emploi pour parvenir à un système décroissant, ses adeptes proposent des mesures dans différents domaines. Une réflexion récurrente est de distinguer les biens et les activités en fonction de leurs conséquences sur le climat, comme avec un taux de TVA différencié en fonction des produits, ou un quota d’unités de charge écologique détenu par chaque consommateur et dans lequel il puiserait chaque fois qu’il achète un bien. Logiquement, nombre des propositions des décroissants touchent aux secteurs des transports, de la construction et de l’alimentation, particulièrement polluants selon l’Insee.

Une autre réflexion qui traverse le courant décroissant est celle sur l’usage et le mésusage (l’usage abusif) des ressources. L’eau pourrait ainsi ne pas être payée au même prix selon qu’il s’agisse « de la boire ou bien de l’utiliser pour remplir sa piscine », explique Timothée Parrique, auteur d’une thèse (lien en anglais) en 2019 sur la décroissance, qui sera adaptée chez Flammarion en 2022.

Afin d’améliorer la justice sociale, certains décroissants imaginent une taxation plus importante des hauts revenus et la suppression des niches fiscales, dans la lignée des travaux de l’économiste de gauche et spécialiste des inégalités Thomas Piketty. Mais aussi l’instauration d’un revenu maximum ou d’un revenu universel. Enfin, sur le volet du bien-être, de nombreux décroissants prônent la réduction du temps de travail qui permettrait, selon eux, de partager l’emploi existant et d’investir davantage le temps libre pour l’art, la culture et les liens interpersonnels.

Mais au fait, ça vient d’où ?

« La décroissance n’a pas attendu ce mot pour exister », note le philosophe Dominique Bourg, directeur de la revue La Pensée écologique et soutien de la candidate à la primaire écologiste Delphine Batho. Historiquement, la décroissance est la résultante de deux courants : la critique du développement et la prise en compte des questions écologiques. Le premier est conçu dès le début du XXe siècle par des penseurs pour qui développement ou technique ne vont pas nécessairement de pair avec le bien-être et le progrès humain. Le second naît dans les années 1970 avec un rapport intitulé « Les limites de la croissance » (en anglais) et les travaux de l’économiste roumain Nicholas Georgescu-Roegen pour qui la croissance infinie dans un monde fini est impossible.

Pourtant,  »les débats sur la pensée écologiste ont disparu dans les années 1980 avec le rouleau compresseur du néolibéralisme » et l’effondrement du bloc soviétique, avance Dominique Bourg. Il faut attendre le début des années 2000 pour voir ressurgir une nouvelle prise de conscience, grâce notamment « aux rapports du Giec et à l’intérêt des médias dominants pour les conséquences du dérèglement climatique ».

En 2002, la revue écologiste Silence consacre un numéro à la décroissance. Le mot est notamment popularisé par l’économiste Serge Latouche et le militant anti-pub Vincent Cheynet, et il est bientôt traduit en anglais par « degrowth », qui connaît un succès mondial. Le mouvement français connaît son apogée dans les années 2000 (lancement d’une revue et d’un parti politique, organisation de colloques et publication d’une multitude de livres…). Surtout à gauche, mais pas seulement. La décroissance est également reprise par certains milieux catholiques ou d’extrême droite, attirés par l’idée d’un certain ascétisme ou le rejet de la mondialisation, comme l’explique Le Monde.

Le bouillonnement militant et intellectuel autour de la décroissance se tasse pourtant dans la décennie suivante, notamment marquée par les divergences de vue entre ses promoteurs puis par le succès de la collapsologie. Pour autant, la décroissance a infusé certains cercles militants, qui la mobilisent pour justifier le développement d’alternatives concrètes comme les ressourceries, les monnaies locales, les jardins partagés et les coopératives.

Pourquoi m’en parlez-vous maintenant ?

Parce que le concept est de nouveau placé sous le feu des projecteurs par la primaire écologiste, qui se tient entre les 16 et 28 septembre. L’une des quatre candidates, l’ancienne ministre de l’Ecologie Delphine Batho, revendique la décroissance comme étant au cœur de son engagement. Cette dernière « est la seule voie réaliste », expliquait-elle le 10 août sur franceinfo. Si son intérêt pour le sujet est longuement expliqué dans une note de campagne sur le site de son parti, Génération écologie, la candidate en dit néanmoins très peu sur la manière dont elle compte la mettre en pratique.

S’ils n’emploient pas ouvertement le terme, les autres candidats à la primaire écologiste (mais aussi des figures de la gauche comme Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon) proposent également certaines mesures proches de la décroissance. L’économiste Sandrine Rousseau, qui souligne dans son programme que « notre Terre n’a pas de ressources illimitées », plaide pour « une véritable fiscalité carbone, en stoppant les subventions aux industries polluantes » et expliquait le 25 juillet dans l’émission YouTube « Backseat » qu’il faudrait « évidemment diminuer le volume de nos consommations ». Le maire de Grenoble, Eric Piolle, qui expliquait sur France Inter le 6 juillet refuser de choisir une « religion » entre « croissantiste » et « décroissantiste », promet dans son programme la mise en place d’un  »ISF climatique » pour taxer les particuliers les plus pollueurs et souhaite  »une loi sur la sobriété numérique qui vise la réduction de l’empreinte carbone de 40% du numérique » d’ici 2022

L’ancien chef d’entreprise Jean-Marc Governatori assure lui aussi refuser le débat entre « croissance et décroissance », même s’il souhaite « mettre en place dès maintenant une activité humaine compatible avec la biosphère dans des objectifs de pleine santé et de plein emploi ». Egalement prudent lorsqu’il emploie le mot de décroissance, comme il l’expliquait sur France Inter début juillet, l’eurodéputé Yannick Jadot annonce néanmoins dans son programme qu’il veut « augmenter la TVA sur tous les produits et services polluants et à l’obsolescence programmée » et mobiliser « 20 milliards par an dès 2021 et sur 2022-2027 pour la transformation des secteurs les plus polluants ».

Est-ce que la décroissance a déjà été mise en pratique ?

La décroissance « n’a jamais été appliquée à grande échelle, reconnaît Vincent Liegey, mais il y a déjà un grand nombre d’espaces dans nos sociétés dans lesquels des mesures décroissantes sont expérimentées au quotidien ». Entre autres exemples, on peut citer un fourmillement d’initiatives locales autour de la low tech, de la permaculture, des circuits courts, mais aussi des espaces comme des ressourceries ou le site de seconde main Leboncoin. Plusieurs pays ont par ailleurs proposé des indicateurs de progrès autres que le PIB, tels que la Nouvelle-Zélande, la Finlande, le Bhoutan… et même la France, depuis 2015. Le développement de la démocratie participative est également salué, avec des expérimentations comme la Convention citoyenne pour le climat. Les mouvements sociaux ne sont pas en reste, avec l’apparition de groupes de défense du climat comme Extinction Rebellion ou Fridays for Future.

Qu’en disent ses détracteurs ?

La décroissance rencontre un grand nombre de critiques, à la fois extérieures et intérieures à ses cercles. Voici les principales :

La critique du « retour en arrière ». Pour certains, la décroissance est synonyme d’un refus de la modernité et des technologies. Comme Emmanuel Macron, qui ironisait en septembre 2020 sur ceux qui, critiquant le déploiement de la 5G, préféreraient  »le modèle amish » et le  »retour à la lampe à huile »Dans un monde décroissant, bye bye les SUV et les iPhone 12. Néanmoins, « la décroissance n’est pas anti-technique, mais pour une réappropriation de la technique au service de l’amélioration du bien-être humain », assure l’essayiste Vincent Liegey.

La critique du catastrophisme. Cette première critique va de pair avec une seconde, selon laquelle les décroissants font l’impasse sur l’innovation, qui aurait toujours permis à l’humanité de relever les défis présentés par la nature. « C’est par la technique qu’on résoudra les problèmes posés. Quand on voit les progrès dans le solaire, l’éolien (…), la mise au point de bactéries pour dévorer des sacs plastiques… Cela peut aller tout aussi vite que le progrès des technologies fondées sur le carbone au XIXe siècle », estimait ainsi l’essayiste libéral Gaspard Koenig en septembre 2019 auprès de l’AFP. Il ne faut pas avoir une « foi aveugle » dans le progrès, répondent les partisans de la décroissance. Contrairement à ceux qui soutiennent la « croissance verte » ou le « développement durable », ils mettent en avant que l’alliance entre croissance économique et progrès technique n’a jamais prouvé qu’elle permettait de réduire suffisamment (lien en anglais) les pollutions pour répondre à l’urgence climatique actuelle.

La critique sur le maintien de la pauvreté. Pour les économistes libéraux, la croissance est un préalable à la redistribution des richesses. Moins de 10% de la population mondiale vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, contre plus de 35% trente ans plus tôt, rapporte en effet la Banque mondiale. Pour ces critiques, les décroissants seraient donc partisans de la récession, et à terme du maintien de la pauvreté dans les pays en voie de développement. Mais la théorie de la décroissance est sélective et ne concerne  »que les pays riches ayant déjà atteint des seuils de production suffisants pour satisfaire les besoins de leur population », répond l’économiste Timothée Parrique. « Les pays du Sud qui vivent dans la pauvreté doivent bien entendu produire ce dont ils ont besoin, mais pour ce faire, encore faut-il que les ressources soient disponibles – d’où la logique d’une décroissance dans les pays du Nord », ajoute-t-il. Pour éviter la confusion entre décroissance et récession, « il faudrait sans doute utiliser un terme comme celui d »acroissance’, avec [un] ’a-’ privatif », plaide Serge Latouche dans La Décroissance (Que sais-je ?, 2019).

La critique de la mise en œuvre. Les solutions avancées par les décroissants sont variées mais rarement présentées sous la forme d’un système cohérent qui permet d’envisager sa mise en œuvre concrète, notent plusieurs analystes, y compris parmi les adeptes de la décroissance. Quel système politique adopter pour la prise de décision en commun ? Jusqu’à quel point la production mondiale doit-elle décroître, et avec quelle population ? Comment concilier réduction du temps de travail et besoin accru de main-d’œuvre lié à une plus faible utilisation de la technologie ?  »Tout le monde tâtonne là-dessus depuis dix ans et on n’a pas encore la réponse. Le design d’une société compatible avec la durabilité de la Terre est quelque chose qu’on doit encore créer et qu’on n’a pas devant nous », reconnaît Dominique Bourg.

Croissance verte ou décroissance ?

Croissance verte ou décroissance ?

Un papier intéressant de France Info sur la problématique croissance verte décroissance (extrait)

La décroissance plaide pour une frugalité choisie afin de limiter les effets du changement climatique. Popularisée dans les années 2000, elle est de nouveau mise en lumière à l’occasion de la primaire écologiste.

« Nous sommes tous ensemble dans un train qui va à toute vitesse vers un précipice. » Voici comment Delphine Batho, candidate à la primaire des écologistes pour la présidentielle 2022, décrit la crise climatique actuelle, sur franceinfo, début août, après la parution d’un rapport choc du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). Pour la députée des Deux-Sèvres, une seule solution : embrasser « la décroissance ». De Sandrine Rousseau à Jean-Luc Mélenchon, elle n’est pas la seule, à gauche, à vouloir s’inspirer de ce mouvement qui prône une frugalité choisie afin de limiter les effets du dérèglement climatique.

Vous n’êtes pas familier du concept ? Pas de panique, Franceinfo vous a prévu un cours accéléré pour tout comprendre à ce mot qui s’invite dans le débat politique.

Qu’est-ce que la décroissance ?

Il s’agit d’un courant de pensée philosophique, politique, social et économique popularisé en France au début des années 2000. Pour ses partisans, la croissance économique, mesurée par le produit intérieur brut (PIB), n’est pas soutenable du fait des ressources limitées de la Terre. Elle n’est pas non plus souhaitable au-delà d’un certain seuil car elle échoue depuis la fin des Trente Glorieuses à réaliser le plein emploi, la réduction des inégalités et la satisfaction de la population dans les pays développés, avancent-ils. 

Ses théoriciens proposent donc de lui substituer d’autres objectifs issus de la « réflexion sur ce que sont vraiment nos besoins fondamentaux et sur la façon dont on peut y répondre de manière soutenable écologiquement et plus juste socialement », explique à franceinfo Vincent Liegey, ingénieur et auteur notamment d’Exploring Degrowth : A Critical Guide (Pluto Press, 2020).

Concrètement, ça passe par quels types de mesures ?

Plus qu’un véritable mode d’emploi pour parvenir à un système décroissant, ses adeptes proposent des mesures dans différents domaines. Une réflexion récurrente est de distinguer les biens et les activités en fonction de leurs conséquences sur le climat, comme avec un taux de TVA différencié en fonction des produits, ou un quota d’unités de charge écologique détenu par chaque consommateur et dans lequel il puiserait chaque fois qu’il achète un bien. Logiquement, nombre des propositions des décroissants touchent aux secteurs des transports, de la construction et de l’alimentation, particulièrement polluants selon l’Insee.

Une autre réflexion qui traverse le courant décroissant est celle sur l’usage et le mésusage (l’usage abusif) des ressources. L’eau pourrait ainsi ne pas être payée au même prix selon qu’il s’agisse « de la boire ou bien de l’utiliser pour remplir sa piscine », explique Timothée Parrique, auteur d’une thèse (lien en anglais) en 2019 sur la décroissance, qui sera adaptée chez Flammarion en 2022.

Afin d’améliorer la justice sociale, certains décroissants imaginent une taxation plus importante des hauts revenus et la suppression des niches fiscales, dans la lignée des travaux de l’économiste de gauche et spécialiste des inégalités Thomas Piketty. Mais aussi l’instauration d’un revenu maximum ou d’un revenu universel. Enfin, sur le volet du bien-être, de nombreux décroissants prônent la réduction du temps de travail qui permettrait, selon eux, de partager l’emploi existant et d’investir davantage le temps libre pour l’art, la culture et les liens interpersonnels.

Mais au fait, ça vient d’où ?

« La décroissance n’a pas attendu ce mot pour exister », note le philosophe Dominique Bourg, directeur de la revue La Pensée écologique et soutien de la candidate à la primaire écologiste Delphine Batho. Historiquement, la décroissance est la résultante de deux courants : la critique du développement et la prise en compte des questions écologiques. Le premier est conçu dès le début du XXe siècle par des penseurs pour qui développement ou technique ne vont pas nécessairement de pair avec le bien-être et le progrès humain. Le second naît dans les années 1970 avec un rapport intitulé « Les limites de la croissance » (en anglais) et les travaux de l’économiste roumain Nicholas Georgescu-Roegen pour qui la croissance infinie dans un monde fini est impossible.

Pourtant,  »les débats sur la pensée écologiste ont disparu dans les années 1980 avec le rouleau compresseur du néolibéralisme » et l’effondrement du bloc soviétique, avance Dominique Bourg. Il faut attendre le début des années 2000 pour voir ressurgir une nouvelle prise de conscience, grâce notamment « aux rapports du Giec et à l’intérêt des médias dominants pour les conséquences du dérèglement climatique ».

En 2002, la revue écologiste Silence consacre un numéro à la décroissance. Le mot est notamment popularisé par l’économiste Serge Latouche et le militant anti-pub Vincent Cheynet, et il est bientôt traduit en anglais par « degrowth », qui connaît un succès mondial. Le mouvement français connaît son apogée dans les années 2000 (lancement d’une revue et d’un parti politique, organisation de colloques et publication d’une multitude de livres…). Surtout à gauche, mais pas seulement. La décroissance est également reprise par certains milieux catholiques ou d’extrême droite, attirés par l’idée d’un certain ascétisme ou le rejet de la mondialisation, comme l’explique Le Monde.

Le bouillonnement militant et intellectuel autour de la décroissance se tasse pourtant dans la décennie suivante, notamment marquée par les divergences de vue entre ses promoteurs puis par le succès de la collapsologie. Pour autant, la décroissance a infusé certains cercles militants, qui la mobilisent pour justifier le développement d’alternatives concrètes comme les ressourceries, les monnaies locales, les jardins partagés et les coopératives.

Pourquoi m’en parlez-vous maintenant ?

Parce que le concept est de nouveau placé sous le feu des projecteurs par la primaire écologiste, qui se tient entre les 16 et 28 septembre. L’une des quatre candidates, l’ancienne ministre de l’Ecologie Delphine Batho, revendique la décroissance comme étant au cœur de son engagement. Cette dernière « est la seule voie réaliste », expliquait-elle le 10 août sur franceinfo. Si son intérêt pour le sujet est longuement expliqué dans une note de campagne sur le site de son parti, Génération écologie, la candidate en dit néanmoins très peu sur la manière dont elle compte la mettre en pratique.

S’ils n’emploient pas ouvertement le terme, les autres candidats à la primaire écologiste (mais aussi des figures de la gauche comme Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon) proposent également certaines mesures proches de la décroissance. L’économiste Sandrine Rousseau, qui souligne dans son programme que « notre Terre n’a pas de ressources illimitées », plaide pour « une véritable fiscalité carbone, en stoppant les subventions aux industries polluantes » et expliquait le 25 juillet dans l’émission YouTube « Backseat » qu’il faudrait « évidemment diminuer le volume de nos consommations ». Le maire de Grenoble, Eric Piolle, qui expliquait sur France Inter le 6 juillet refuser de choisir une « religion » entre « croissantiste » et « décroissantiste », promet dans son programme la mise en place d’un  »ISF climatique » pour taxer les particuliers les plus pollueurs et souhaite  »une loi sur la sobriété numérique qui vise la réduction de l’empreinte carbone de 40% du numérique » d’ici 2022

L’ancien chef d’entreprise Jean-Marc Governatori assure lui aussi refuser le débat entre « croissance et décroissance », même s’il souhaite « mettre en place dès maintenant une activité humaine compatible avec la biosphère dans des objectifs de pleine santé et de plein emploi ». Egalement prudent lorsqu’il emploie le mot de décroissance, comme il l’expliquait sur France Inter début juillet, l’eurodéputé Yannick Jadot annonce néanmoins dans son programme qu’il veut « augmenter la TVA sur tous les produits et services polluants et à l’obsolescence programmée » et mobiliser « 20 milliards par an dès 2021 et sur 2022-2027 pour la transformation des secteurs les plus polluants ».

Est-ce que la décroissance a déjà été mise en pratique ?

La décroissance « n’a jamais été appliquée à grande échelle, reconnaît Vincent Liegey, mais il y a déjà un grand nombre d’espaces dans nos sociétés dans lesquels des mesures décroissantes sont expérimentées au quotidien ». Entre autres exemples, on peut citer un fourmillement d’initiatives locales autour de la low tech, de la permaculture, des circuits courts, mais aussi des espaces comme des ressourceries ou le site de seconde main Leboncoin. Plusieurs pays ont par ailleurs proposé des indicateurs de progrès autres que le PIB, tels que la Nouvelle-Zélande, la Finlande, le Bhoutan… et même la France, depuis 2015. Le développement de la démocratie participative est également salué, avec des expérimentations comme la Convention citoyenne pour le climat. Les mouvements sociaux ne sont pas en reste, avec l’apparition de groupes de défense du climat comme Extinction Rebellion ou Fridays for Future.

Qu’en disent ses détracteurs ?

La décroissance rencontre un grand nombre de critiques, à la fois extérieures et intérieures à ses cercles. Voici les principales :

La critique du « retour en arrière ». Pour certains, la décroissance est synonyme d’un refus de la modernité et des technologies. Comme Emmanuel Macron, qui ironisait en septembre 2020 sur ceux qui, critiquant le déploiement de la 5G, préféreraient  »le modèle amish » et le  »retour à la lampe à huile »Dans un monde décroissant, bye bye les SUV et les iPhone 12. Néanmoins, « la décroissance n’est pas anti-technique, mais pour une réappropriation de la technique au service de l’amélioration du bien-être humain », assure l’essayiste Vincent Liegey.

La critique du catastrophisme. Cette première critique va de pair avec une seconde, selon laquelle les décroissants font l’impasse sur l’innovation, qui aurait toujours permis à l’humanité de relever les défis présentés par la nature. « C’est par la technique qu’on résoudra les problèmes posés. Quand on voit les progrès dans le solaire, l’éolien (…), la mise au point de bactéries pour dévorer des sacs plastiques… Cela peut aller tout aussi vite que le progrès des technologies fondées sur le carbone au XIXe siècle », estimait ainsi l’essayiste libéral Gaspard Koenig en septembre 2019 auprès de l’AFP. Il ne faut pas avoir une « foi aveugle » dans le progrès, répondent les partisans de la décroissance. Contrairement à ceux qui soutiennent la « croissance verte » ou le « développement durable », ils mettent en avant que l’alliance entre croissance économique et progrès technique n’a jamais prouvé qu’elle permettait de réduire suffisamment (lien en anglais) les pollutions pour répondre à l’urgence climatique actuelle.

La critique sur le maintien de la pauvreté. Pour les économistes libéraux, la croissance est un préalable à la redistribution des richesses. Moins de 10% de la population mondiale vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, contre plus de 35% trente ans plus tôt, rapporte en effet la Banque mondiale. Pour ces critiques, les décroissants seraient donc partisans de la récession, et à terme du maintien de la pauvreté dans les pays en voie de développement. Mais la théorie de la décroissance est sélective et ne concerne  »que les pays riches ayant déjà atteint des seuils de production suffisants pour satisfaire les besoins de leur population », répond l’économiste Timothée Parrique. « Les pays du Sud qui vivent dans la pauvreté doivent bien entendu produire ce dont ils ont besoin, mais pour ce faire, encore faut-il que les ressources soient disponibles – d’où la logique d’une décroissance dans les pays du Nord », ajoute-t-il. Pour éviter la confusion entre décroissance et récession, « il faudrait sans doute utiliser un terme comme celui d »acroissance’, avec [un] ’a-’ privatif », plaide Serge Latouche dans La Décroissance (Que sais-je ?, 2019).

La critique de la mise en œuvre. Les solutions avancées par les décroissants sont variées mais rarement présentées sous la forme d’un système cohérent qui permet d’envisager sa mise en œuvre concrète, notent plusieurs analystes, y compris parmi les adeptes de la décroissance. Quel système politique adopter pour la prise de décision en commun ? Jusqu’à quel point la production mondiale doit-elle décroître, et avec quelle population ? Comment concilier réduction du temps de travail et besoin accru de main-d’œuvre lié à une plus faible utilisation de la technologie ?  »Tout le monde tâtonne là-dessus depuis dix ans et on n’a pas encore la réponse. Le design d’une société compatible avec la durabilité de la Terre est quelque chose qu’on doit encore créer et qu’on n’a pas devant nous », reconnaît Dominique Bourg.

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“Croissance verte” : un mythe ?

 “Croissance verte” : un mythe ?

 

La plupart des candidats à l’élection présidentielle prétendent concilier la poursuite de la croissance et la préservation de l’environnement. Une récente note de l’Agence européenne pour l’environnement souligne l’incompatibilité de ces deux projets, relève dans sa chronique Stéphane Foucart, journaliste au « Monde ».(extrait)

 

Une fois n’est pas coutume, la décroissance s’est brièvement installée dans le débat public, en particulier à la faveur de la primaire écologiste, remportée le 28 septembre par Yannick Jadot. Le mot même a un tel pouvoir excommunicateur, et agit comme un si puissant repoussoir pour une majorité de l’opinion et des dirigeants qu’il est très rare de voir des responsables politiques, fussent-ils écologistes, le reprendre à leur compte dans leurs discours ou leur programme. 

On les comprend : les dernières semaines ont montré qu’il était politiquement et médiatiquement moins coûteux de se livrer à un révisionnisme de bas étage que d’interroger le dogme de la croissance ad vitam aeternam du produit intérieur brut (PIB). Eric Piolle, également candidat à la primaire écologiste, ne s’y est pas trompé et a affiché une posture prudemment agnostique, tandis que Yannick Jadot a préféré s’inscrire dans le cadre de la « croissance verte » – dont nul ne sait à ce jour si elle existe réellement.

A l’inverse, les candidates Delphine Batho et, dans une certaine mesure, Sandrine Rousseau ont affirmé leur volonté de rompre avec ce qui demeure, pour l’écrasante majorité d’entre nous, le principal indicateur du succès des politiques publiques. La probabilité que ce positionnement fasse florès hors de l’écologie politique est très faible : historiquement, toutes les remises en cause de l’exigence de croissance et tous les travaux académiques montrant l’inanité de cet indicateur (il en existe un très grand nombre) ont suscité un intérêt bref et souvent confidentiel, avant de disparaître de l’horizon.

« La croissance est ancrée dans la culture, la politique et les institutions, résume dans une note récente l’Agence européenne pour l’environnement (EEA), une instance officielle de l’Union dont les productions demeurent consultatives. Dans le monde entier, la légitimité des gouvernements est indissociable de leur capacité à assurer la croissance économique et à créer des emplois. » L’idée d’un monde économiquement stationnaire nous est impensable.

Dans sa note, l’EEA propose un état des lieux du débat sur les liens entre environnement et croissance du PIB. Première information : depuis 1970, à l’échelle mondiale, la croissance économique est, sans grande surprise, très étroitement corrélée à l’empreinte des sociétés sur leur environnement et à leurs émissions de gaz à effet de serre. Les rares périodes de diminution de l’impact de nos activités coïncident avec les crises économiques – autrement dit de la récession pour les uns, ou de la décroissance pour les autres.

Croissance verte : un mythe ?

 

Stéphane Foucart, dans un papier du Monde constate que  la plupart des candidats à l’élection présidentielle prétendent concilier la poursuite de la croissance et la préservation de l’environnement. Une récente note de l’Agence européenne pour l’environnement souligne l’incompatibilité de ces deux projets.

 

Chronique.

 

 Une fois n’est pas coutume, la décroissance s’est brièvement installée dans le débat public, en particulier à la faveur de la primaire écologiste, remportée le 28 septembre par Yannick Jadot. Le mot même a un tel pouvoir excommunicateur, et agit comme un si puissant repoussoir pour une majorité de l’opinion et des dirigeants qu’il est très rare de voir des responsables politiques, fussent-ils écologistes, le reprendre à leur compte dans leurs discours ou leur programme.

On les comprend : les dernières semaines ont montré qu’il était politiquement et médiatiquement moins coûteux de se livrer à un révisionnisme de bas étage que d’interroger le dogme de la croissance ad vitam aeternam du produit intérieur brut (PIB). Eric Piolle, également candidat à la primaire écologiste, ne s’y est pas trompé et a affiché une posture prudemment agnostique, tandis que Yannick Jadot a préféré s’inscrire dans le cadre de la « croissance verte » – dont nul ne sait à ce jour si elle existe réellement.

A l’inverse, les candidates Delphine Batho et, dans une certaine mesure, Sandrine Rousseau ont affirmé leur volonté de rompre avec ce qui demeure, pour l’écrasante majorité d’entre nous, le principal indicateur du succès des politiques publiques. La probabilité que ce positionnement fasse florès hors de l’écologie politique est très faible : historiquement, toutes les remises en cause de l’exigence de croissance et tous les travaux académiques montrant l’inanité de cet indicateur (il en existe un très grand nombre) ont suscité un intérêt bref et souvent confidentiel, avant de disparaître de l’horizon.

« La croissance est ancrée dans la culture, la politique et les institutions, résume dans une note récente l’Agence européenne pour l’environnement (EEA), une instance officielle de l’Union dont les productions demeurent consultatives. Dans le monde entier, la légitimité des gouvernements est indissociable de leur capacité à assurer la croissance économique et à créer des emplois. » L’idée d’un monde économiquement stationnaire nous est impensable.

Dans sa note, l’EEA propose un état des lieux du débat sur les liens entre environnement et croissance du PIB. Première information : depuis 1970, à l’échelle mondiale, la croissance économique est, sans grande surprise, très étroitement corrélée à l’empreinte des sociétés sur leur environnement et à leurs émissions de gaz à effet de serre. Les rares périodes de diminution de l’impact de nos activités coïncident avec les crises économiques – autrement dit de la récession pour les uns, ou de la décroissance pour les autres.

Économie :«L’angélisme de la croissance verte » ?

Économie :«L’angélisme de la croissance verte » ?

 

Sous-estimant les coûts des changements à venir, nos gouvernements peinent encore à mesurer à quel point la transition écologique va bouleverser nos politiques économiques, observe Marie Charrel, journaliste au « Monde », dans sa chronique.(Extrait)

 

Inondations, sécheresses, incendies : cet été encore, les conséquences du dérèglement climatique ont été douloureuses. Et elles ne sont qu’un avant-goût des tragédies à venir, comme l’a rappelé le rapport du GIEC publié le 9 août. Pour stabiliser le réchauffement climatique sous les 2 °C, il nous faudra atteindre zéro émission nette de CO2 autour de 2050, préviennent les experts.

 

L’Union européenne, elle, s’est engagée à réduire d’au moins 55 % ses émissions d’ici à 2030 pour atteindre la neutralité climatique en 2050. Un objectif susceptible de transformer notre économie en profondeur. Seulement, voilà : « Jusqu’à présent, ces implications n’ont pas été abordées de manière systématique, relève Jean Pisani-Ferry dans une récente note pour le Peterson Institute, un centre de réflexion de Washington. Trop souvent, la transition écologique a été décrite, sinon comme un chemin semé de roses, du moins comme une entreprise plutôt bénigne. » Or, celle-ci sera brutale. Parce que nous avons trop tardé à agir. Parce que nous sous-estimons encore l’ampleur des changements individuels et collectifs à venir, tout comme leur coût.

Les réflexions sur le sujet sont trop souvent polluées par la confrontation entre deux grands camps : celui des optimistes de la croissance verte, certains que les avancées technologiques conjuguées à des investissements massifs permettront de limiter le réchauffement tout en préservant notre niveau de vie, et celui des décroissants, convaincus que la seule voie possible est de rompre avec le modèle capitaliste basé sur l’exploitation des ressources.

 

La plupart peinent à penser concrètement toutes les dimensions de la transition et leur articulation. « Certains équipements perdront leur valeur économique, détaille Jean Pisani-Ferry. Des usines devront fermer. Des salariés devront être réorientés vers d’autres secteurs. Les investissements devront augmenter pour réparer et reconstruire le stock de capital. » Ce qui implique de revoir l’ensemble de nos politiques macroéconomiques et de nos cadres de pensée. Parce qu’ils construisent en partie leurs projections sur l’étude des faits passés, les économistes mainstream sont un peu perdus.

Le risque de la colère sociale

Et pour cause : « La transition vers l’économie verte diffère fondamentalement des transitions socio-économiques passées, comme la révolution industrielle ou la mondialisation », souligne la Banque nationale du Danemark dans une récente étude sur le sujet. Ces dernières se sont, en effet, déroulées sur une période longue. Leur moteur était le progrès technologique, rendant obsolètes certains modes de production et entreprises – la destruction créatrice, en somme.

«L’angélisme de la croissance verte » ?

 «L’angélisme de la croissance verte » ?

 

Sous-estimant les coûts des changements à venir, nos gouvernements peinent encore à mesurer à quel point la transition écologique va bouleverser nos politiques économiques, observe Marie Charrel, journaliste au « Monde », dans sa chronique.(Extrait)

 

Inondations, sécheresses, incendies : cet été encore, les conséquences du dérèglement climatique ont été douloureuses. Et elles ne sont qu’un avant-goût des tragédies à venir, comme l’a rappelé le rapport du GIEC publié le 9 août. Pour stabiliser le réchauffement climatique sous les 2 °C, il nous faudra atteindre zéro émission nette de CO2 autour de 2050, préviennent les experts.

 

L’Union européenne, elle, s’est engagée à réduire d’au moins 55 % ses émissions d’ici à 2030 pour atteindre la neutralité climatique en 2050. Un objectif susceptible de transformer notre économie en profondeur. Seulement, voilà : « Jusqu’à présent, ces implications n’ont pas été abordées de manière systématique, relève Jean Pisani-Ferry dans une récente note pour le Peterson Institute, un centre de réflexion de Washington. Trop souvent, la transition écologique a été décrite, sinon comme un chemin semé de roses, du moins comme une entreprise plutôt bénigne. » Or, celle-ci sera brutale. Parce que nous avons trop tardé à agir. Parce que nous sous-estimons encore l’ampleur des changements individuels et collectifs à venir, tout comme leur coût.

Les réflexions sur le sujet sont trop souvent polluées par la confrontation entre deux grands camps : celui des optimistes de la croissance verte, certains que les avancées technologiques conjuguées à des investissements massifs permettront de limiter le réchauffement tout en préservant notre niveau de vie, et celui des décroissants, convaincus que la seule voie possible est de rompre avec le modèle capitaliste basé sur l’exploitation des ressources.

 

La plupart peinent à penser concrètement toutes les dimensions de la transition et leur articulation. « Certains équipements perdront leur valeur économique, détaille Jean Pisani-Ferry. Des usines devront fermer. Des salariés devront être réorientés vers d’autres secteurs. Les investissements devront augmenter pour réparer et reconstruire le stock de capital. » Ce qui implique de revoir l’ensemble de nos politiques macroéconomiques et de nos cadres de pensée. Parce qu’ils construisent en partie leurs projections sur l’étude des faits passés, les économistes mainstream sont un peu perdus.

Le risque de la colère sociale

Et pour cause : « La transition vers l’économie verte diffère fondamentalement des transitions socio-économiques passées, comme la révolution industrielle ou la mondialisation », souligne la Banque nationale du Danemark dans une récente étude sur le sujet. Ces dernières se sont, en effet, déroulées sur une période longue. Leur moteur était le progrès technologique, rendant obsolètes certains modes de production et entreprises – la destruction créatrice, en somme.

Croissance verte ou décroissance ?

Croissance verte ou décroissance ?

Un papier intéressant de France Info sur la problématique croissance verte décroissance (extrait)

La décroissance plaide pour une frugalité choisie afin de limiter les effets du changement climatique. Popularisée dans les années 2000, elle est de nouveau mise en lumière à l’occasion de la primaire écologiste.

« Nous sommes tous ensemble dans un train qui va à toute vitesse vers un précipice. » Voici comment Delphine Batho, candidate à la primaire des écologistes pour la présidentielle 2022, décrit la crise climatique actuelle, sur franceinfo, début août, après la parution d’un rapport choc du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). Pour la députée des Deux-Sèvres, une seule solution : embrasser « la décroissance ». De Sandrine Rousseau à Jean-Luc Mélenchon, elle n’est pas la seule, à gauche, à vouloir s’inspirer de ce mouvement qui prône une frugalité choisie afin de limiter les effets du dérèglement climatique.

Vous n’êtes pas familier du concept ? Pas de panique, Franceinfo vous a prévu un cours accéléré pour tout comprendre à ce mot qui s’invite dans le débat politique.

Qu’est-ce que la décroissance ?

Il s’agit d’un courant de pensée philosophique, politique, social et économique popularisé en France au début des années 2000. Pour ses partisans, la croissance économique, mesurée par le produit intérieur brut (PIB), n’est pas soutenable du fait des ressources limitées de la Terre. Elle n’est pas non plus souhaitable au-delà d’un certain seuil car elle échoue depuis la fin des Trente Glorieuses à réaliser le plein emploi, la réduction des inégalités et la satisfaction de la population dans les pays développés, avancent-ils. 

Ses théoriciens proposent donc de lui substituer d’autres objectifs issus de la « réflexion sur ce que sont vraiment nos besoins fondamentaux et sur la façon dont on peut y répondre de manière soutenable écologiquement et plus juste socialement », explique à franceinfo Vincent Liegey, ingénieur et auteur notamment d’Exploring Degrowth : A Critical Guide (Pluto Press, 2020).

Concrètement, ça passe par quels types de mesures ?

Plus qu’un véritable mode d’emploi pour parvenir à un système décroissant, ses adeptes proposent des mesures dans différents domaines. Une réflexion récurrente est de distinguer les biens et les activités en fonction de leurs conséquences sur le climat, comme avec un taux de TVA différencié en fonction des produits, ou un quota d’unités de charge écologique détenu par chaque consommateur et dans lequel il puiserait chaque fois qu’il achète un bien. Logiquement, nombre des propositions des décroissants touchent aux secteurs des transports, de la construction et de l’alimentation, particulièrement polluants selon l’Insee.

Une autre réflexion qui traverse le courant décroissant est celle sur l’usage et le mésusage (l’usage abusif) des ressources. L’eau pourrait ainsi ne pas être payée au même prix selon qu’il s’agisse « de la boire ou bien de l’utiliser pour remplir sa piscine », explique Timothée Parrique, auteur d’une thèse (lien en anglais) en 2019 sur la décroissance, qui sera adaptée chez Flammarion en 2022.

Afin d’améliorer la justice sociale, certains décroissants imaginent une taxation plus importante des hauts revenus et la suppression des niches fiscales, dans la lignée des travaux de l’économiste de gauche et spécialiste des inégalités Thomas Piketty. Mais aussi l’instauration d’un revenu maximum ou d’un revenu universel. Enfin, sur le volet du bien-être, de nombreux décroissants prônent la réduction du temps de travail qui permettrait, selon eux, de partager l’emploi existant et d’investir davantage le temps libre pour l’art, la culture et les liens interpersonnels.

Mais au fait, ça vient d’où ?

« La décroissance n’a pas attendu ce mot pour exister », note le philosophe Dominique Bourg, directeur de la revue La Pensée écologique et soutien de la candidate à la primaire écologiste Delphine Batho. Historiquement, la décroissance est la résultante de deux courants : la critique du développement et la prise en compte des questions écologiques. Le premier est conçu dès le début du XXe siècle par des penseurs pour qui développement ou technique ne vont pas nécessairement de pair avec le bien-être et le progrès humain. Le second naît dans les années 1970 avec un rapport intitulé « Les limites de la croissance » (en anglais) et les travaux de l’économiste roumain Nicholas Georgescu-Roegen pour qui la croissance infinie dans un monde fini est impossible.

Pourtant,  »les débats sur la pensée écologiste ont disparu dans les années 1980 avec le rouleau compresseur du néolibéralisme » et l’effondrement du bloc soviétique, avance Dominique Bourg. Il faut attendre le début des années 2000 pour voir ressurgir une nouvelle prise de conscience, grâce notamment « aux rapports du Giec et à l’intérêt des médias dominants pour les conséquences du dérèglement climatique ».

En 2002, la revue écologiste Silence consacre un numéro à la décroissance. Le mot est notamment popularisé par l’économiste Serge Latouche et le militant anti-pub Vincent Cheynet, et il est bientôt traduit en anglais par « degrowth », qui connaît un succès mondial. Le mouvement français connaît son apogée dans les années 2000 (lancement d’une revue et d’un parti politique, organisation de colloques et publication d’une multitude de livres…). Surtout à gauche, mais pas seulement. La décroissance est également reprise par certains milieux catholiques ou d’extrême droite, attirés par l’idée d’un certain ascétisme ou le rejet de la mondialisation, comme l’explique Le Monde.

Le bouillonnement militant et intellectuel autour de la décroissance se tasse pourtant dans la décennie suivante, notamment marquée par les divergences de vue entre ses promoteurs puis par le succès de la collapsologie. Pour autant, la décroissance a infusé certains cercles militants, qui la mobilisent pour justifier le développement d’alternatives concrètes comme les ressourceries, les monnaies locales, les jardins partagés et les coopératives.

Pourquoi m’en parlez-vous maintenant ?

Parce que le concept est de nouveau placé sous le feu des projecteurs par la primaire écologiste, qui se tient entre les 16 et 28 septembre. L’une des quatre candidates, l’ancienne ministre de l’Ecologie Delphine Batho, revendique la décroissance comme étant au cœur de son engagement. Cette dernière « est la seule voie réaliste », expliquait-elle le 10 août sur franceinfo. Si son intérêt pour le sujet est longuement expliqué dans une note de campagne sur le site de son parti, Génération écologie, la candidate en dit néanmoins très peu sur la manière dont elle compte la mettre en pratique.

S’ils n’emploient pas ouvertement le terme, les autres candidats à la primaire écologiste (mais aussi des figures de la gauche comme Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon) proposent également certaines mesures proches de la décroissance. L’économiste Sandrine Rousseau, qui souligne dans son programme que « notre Terre n’a pas de ressources illimitées », plaide pour « une véritable fiscalité carbone, en stoppant les subventions aux industries polluantes » et expliquait le 25 juillet dans l’émission YouTube « Backseat » qu’il faudrait « évidemment diminuer le volume de nos consommations ». Le maire de Grenoble, Eric Piolle, qui expliquait sur France Inter le 6 juillet refuser de choisir une « religion » entre « croissantiste » et « décroissantiste », promet dans son programme la mise en place d’un  »ISF climatique » pour taxer les particuliers les plus pollueurs et souhaite  »une loi sur la sobriété numérique qui vise la réduction de l’empreinte carbone de 40% du numérique » d’ici 2022

L’ancien chef d’entreprise Jean-Marc Governatori assure lui aussi refuser le débat entre « croissance et décroissance », même s’il souhaite « mettre en place dès maintenant une activité humaine compatible avec la biosphère dans des objectifs de pleine santé et de plein emploi ». Egalement prudent lorsqu’il emploie le mot de décroissance, comme il l’expliquait sur France Inter début juillet, l’eurodéputé Yannick Jadot annonce néanmoins dans son programme qu’il veut « augmenter la TVA sur tous les produits et services polluants et à l’obsolescence programmée » et mobiliser « 20 milliards par an dès 2021 et sur 2022-2027 pour la transformation des secteurs les plus polluants ».

Est-ce que la décroissance a déjà été mise en pratique ?

La décroissance « n’a jamais été appliquée à grande échelle, reconnaît Vincent Liegey, mais il y a déjà un grand nombre d’espaces dans nos sociétés dans lesquels des mesures décroissantes sont expérimentées au quotidien ». Entre autres exemples, on peut citer un fourmillement d’initiatives locales autour de la low tech, de la permaculture, des circuits courts, mais aussi des espaces comme des ressourceries ou le site de seconde main Leboncoin. Plusieurs pays ont par ailleurs proposé des indicateurs de progrès autres que le PIB, tels que la Nouvelle-Zélande, la Finlande, le Bhoutan… et même la France, depuis 2015. Le développement de la démocratie participative est également salué, avec des expérimentations comme la Convention citoyenne pour le climat. Les mouvements sociaux ne sont pas en reste, avec l’apparition de groupes de défense du climat comme Extinction Rebellion ou Fridays for Future.

Qu’en disent ses détracteurs ?

La décroissance rencontre un grand nombre de critiques, à la fois extérieures et intérieures à ses cercles. Voici les principales :

La critique du « retour en arrière ». Pour certains, la décroissance est synonyme d’un refus de la modernité et des technologies. Comme Emmanuel Macron, qui ironisait en septembre 2020 sur ceux qui, critiquant le déploiement de la 5G, préféreraient  »le modèle amish » et le  »retour à la lampe à huile »Dans un monde décroissant, bye bye les SUV et les iPhone 12. Néanmoins, « la décroissance n’est pas anti-technique, mais pour une réappropriation de la technique au service de l’amélioration du bien-être humain », assure l’essayiste Vincent Liegey.

La critique du catastrophisme. Cette première critique va de pair avec une seconde, selon laquelle les décroissants font l’impasse sur l’innovation, qui aurait toujours permis à l’humanité de relever les défis présentés par la nature. « C’est par la technique qu’on résoudra les problèmes posés. Quand on voit les progrès dans le solaire, l’éolien (…), la mise au point de bactéries pour dévorer des sacs plastiques… Cela peut aller tout aussi vite que le progrès des technologies fondées sur le carbone au XIXe siècle », estimait ainsi l’essayiste libéral Gaspard Koenig en septembre 2019 auprès de l’AFP. Il ne faut pas avoir une « foi aveugle » dans le progrès, répondent les partisans de la décroissance. Contrairement à ceux qui soutiennent la « croissance verte » ou le « développement durable », ils mettent en avant que l’alliance entre croissance économique et progrès technique n’a jamais prouvé qu’elle permettait de réduire suffisamment (lien en anglais) les pollutions pour répondre à l’urgence climatique actuelle.

La critique sur le maintien de la pauvreté. Pour les économistes libéraux, la croissance est un préalable à la redistribution des richesses. Moins de 10% de la population mondiale vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, contre plus de 35% trente ans plus tôt, rapporte en effet la Banque mondiale. Pour ces critiques, les décroissants seraient donc partisans de la récession, et à terme du maintien de la pauvreté dans les pays en voie de développement. Mais la théorie de la décroissance est sélective et ne concerne  »que les pays riches ayant déjà atteint des seuils de production suffisants pour satisfaire les besoins de leur population », répond l’économiste Timothée Parrique. « Les pays du Sud qui vivent dans la pauvreté doivent bien entendu produire ce dont ils ont besoin, mais pour ce faire, encore faut-il que les ressources soient disponibles – d’où la logique d’une décroissance dans les pays du Nord », ajoute-t-il. Pour éviter la confusion entre décroissance et récession, « il faudrait sans doute utiliser un terme comme celui d »acroissance’, avec [un] ’a-’ privatif », plaide Serge Latouche dans La Décroissance (Que sais-je ?, 2019).

La critique de la mise en œuvre. Les solutions avancées par les décroissants sont variées mais rarement présentées sous la forme d’un système cohérent qui permet d’envisager sa mise en œuvre concrète, notent plusieurs analystes, y compris parmi les adeptes de la décroissance. Quel système politique adopter pour la prise de décision en commun ? Jusqu’à quel point la production mondiale doit-elle décroître, et avec quelle population ? Comment concilier réduction du temps de travail et besoin accru de main-d’œuvre lié à une plus faible utilisation de la technologie ?  »Tout le monde tâtonne là-dessus depuis dix ans et on n’a pas encore la réponse. Le design d’une société compatible avec la durabilité de la Terre est quelque chose qu’on doit encore créer et qu’on n’a pas devant nous », reconnaît Dominique Bourg.

Environnement : «L’angélisme de la croissance verte »

Environnement : «L’angélisme de la croissance verte »

 

Sous-estimant les coûts des changements à venir, nos gouvernements peinent encore à mesurer à quel point la transition écologique va bouleverser nos politiques économiques, observe Marie Charrel, journaliste au « Monde », dans sa chronique.(Extrait)

 

Inondations, sécheresses, incendies : cet été encore, les conséquences du dérèglement climatique ont été douloureuses. Et elles ne sont qu’un avant-goût des tragédies à venir, comme l’a rappelé le rapport du GIEC publié le 9 août. Pour stabiliser le réchauffement climatique sous les 2 °C, il nous faudra atteindre zéro émission nette de CO2 autour de 2050, préviennent les experts.

 

L’Union européenne, elle, s’est engagée à réduire d’au moins 55 % ses émissions d’ici à 2030 pour atteindre la neutralité climatique en 2050. Un objectif susceptible de transformer notre économie en profondeur. Seulement, voilà : « Jusqu’à présent, ces implications n’ont pas été abordées de manière systématique, relève Jean Pisani-Ferry dans une récente note pour le Peterson Institute, un centre de réflexion de Washington. Trop souvent, la transition écologique a été décrite, sinon comme un chemin semé de roses, du moins comme une entreprise plutôt bénigne. » Or, celle-ci sera brutale. Parce que nous avons trop tardé à agir. Parce que nous sous-estimons encore l’ampleur des changements individuels et collectifs à venir, tout comme leur coût.

Les réflexions sur le sujet sont trop souvent polluées par la confrontation entre deux grands camps : celui des optimistes de la croissance verte, certains que les avancées technologiques conjuguées à des investissements massifs permettront de limiter le réchauffement tout en préservant notre niveau de vie, et celui des décroissants, convaincus que la seule voie possible est de rompre avec le modèle capitaliste basé sur l’exploitation des ressources.

 

La plupart peinent à penser concrètement toutes les dimensions de la transition et leur articulation. « Certains équipements perdront leur valeur économique, détaille Jean Pisani-Ferry. Des usines devront fermer. Des salariés devront être réorientés vers d’autres secteurs. Les investissements devront augmenter pour réparer et reconstruire le stock de capital. » Ce qui implique de revoir l’ensemble de nos politiques macroéconomiques et de nos cadres de pensée. Parce qu’ils construisent en partie leurs projections sur l’étude des faits passés, les économistes mainstream sont un peu perdus.

Le risque de la colère sociale

Et pour cause : « La transition vers l’économie verte diffère fondamentalement des transitions socio-économiques passées, comme la révolution industrielle ou la mondialisation », souligne la Banque nationale du Danemark dans une récente étude sur le sujet. Ces dernières se sont, en effet, déroulées sur une période longue. Leur moteur était le progrès technologique, rendant obsolètes certains modes de production et entreprises – la destruction créatrice, en somme.

Engie : Électricité  » 100 % » verte mais des profits grâce au nucléaire !

Engie : Électricité  » 100 % »  verte mais des profits grâce au nucléaire !

 

Engie a relevé ses objectifs pour l’année, et vise désormais un résultat net récurrent (hors exceptionnel) entre 2,5 et 2,7 milliards d’euros, contre 2,3 à 2,5 milliards attendus auparavant, précise-t-il dans un communiqué.Mais un résultat surtout dû au profit réalisé dans le nucléaire. Par ailleurs, il poursuivra son programme de cession de certains actifs – de 9 milliards d’euros sur la période 2021-2023 -, annoncé en juillet 2020, dont le but est de simplifier le groupe et donner un coup d’accélérateur sur les énergies renouvelables.

« Les résultats du groupe se sont améliorés, grâce à un solide deuxième trimestre tiré principalement par les activités de gestion d’énergie, le nucléaire, des températures inférieures à la moyenne et l’amélioration de la performance des Solutions Clients au cours du deuxième trimestre par rapport au premier », a commenté Isabelle Kocher, Directrice Générale d’Engie.

La conversion verte du lobby pétrolier : du bidon ?

La conversion verte  du  lobby pétrolier : du bidon ?

Un article du Wall Street Journal s’interroge sur la réalité de la conversion verte du lobby de l’industrie pétrolière.

 

Plus grand lobby de l’industrie pétrolière et gazière de Washington, l’American Petroleum Institute (API) a passé des décennies à mettre sa force de frappe financière au service du dézingage de la moindre initiative écologique se mettant en travers de sa route.

Puis, en mars dernier, tout a changé. L’API a publié son « Cadre pour l’action climatique », un ensemble de recommandations pour faire baisser les émissions et favoriser les énergies propres.

Au centre de la démarche, deux mesures auxquelles le groupe s’est opposé pendant des années : le durcissement de la réglementation du méthane (un gaz à effet de serre qui se dégage lors de l’exploitation et du transport du pétrole et du gaz) et la fixation d’un prix pour le carbone (une taxe sur les émissions de dioxyde de carbone).

Le défi du changement climatique, affirme le lobby, exige « de nouvelles approches, de nouveaux partenaires, de nouvelles politiques et une innovation constante ».

Les observateurs sont unanimes : le revirement est spectaculaire. Sauf qu’il ne fait plaisir à personne.

Les démocrates restent favorables aux énergies alternatives et sceptiques vis-à-vis de l’industrie pétrolière. Alliés historiques d’un secteur qu’ils ont toujours défendu, les républicains se sentent trahis. Le Congrès, lui, envisage de dépenser des centaines de milliards de dollars pour aider les sociétés de services aux collectivités et les spécialistes de l’éolien et du solaire, en partie en imposant de nouvelles taxes aux compagnies pétrolières et gazières.

Au sein même de l’API, la situation a accentué des dissensions presque aussi vieilles que le secteur : les géants, dont Royal Dutch Shell, BP et Exxon Mobil, ont demandé au lobby d’en faire davantage pour la transition vers des carburants moins polluants et le respect de la réglementation, alors que les autres (les indépendants et les raffineurs) considèrent la démarche comme une menace pour leur activité et estiment que les géants veulent, grâce à elle, consolider leur pouvoir.

Organisation centenaire, l’API essaie tant bien que mal de trouver un consensus acceptable par ses quelque 600 membres, ce qui semble de plus en plus délicat puisqu’aucun n’est d’accord sur la réponse à apporter aux inquiétudes climatiques et aux réactions politiques.

« L’API se trouve en position de faiblesse en ce moment, estime Trent Lott, ancien responsable de la majorité républicaine au Sénat désormais salarié du lobby Crossroads Strategies à Washington qui a travaillé sur les questions de politique énergétique et de taxe carbone. Ils sont tiraillés de tous les côtés. »

Avec un chiffre d’affaires annuel de 200 millions de dollars, essentiellement tiré des cotisations des membres et de son activité de normalisation et de certification, l’API est un géant du lobbying washingtonien. Grâce à ses bureaux en Chine, au Brésil, aux Emirats arabes unis et à Singapour, selon des documents fiscaux, il a une envergure mondiale, ce qui le rend intéressant aux yeux de multinationales très présentes aux Etats-Unis, comme BP ou Shell

De fait, l’API est bousculée par l’évolution des mentalités qui a suivi la conclusion, en 2016, de l’Accord de Paris sur le climat. Outre les majors pétrolières, d’anciens alliés historiques du secteur à Detroit et à Wall Street plaident désormais pour un avenir moins dépendant des énergies fossiles. Autre mauvaise nouvelle : le Parti démocrate a désormais les clés du Congrès et de la Maison Blanche.

L’évolution de la situation influencera la manière dont le secteur pétrolier répondra aux initiatives climatiques, mais aussi la capacité future de l’API à peser sur les lois et les réglementations. En désaccord sur la stratégie climatique, plusieurs membres ont menacé de claquer la porte et TotalEnergies a résilié son adhésion en janvier de cette année.

Pour l’heure, le lobby a réussi à endiguer l’hémorragie, et même accueilli de nouveaux membres.

Avec un chiffre d’affaires annuel de 200 millions de dollars, essentiellement tiré des cotisations des membres et de son activité de normalisation et de certification, l’API est un géant du lobbying washingtonien. Grâce à ses bureaux en Chine, au Brésil, aux Emirats arabes unis et à Singapour, selon des documents fiscaux, il a une envergure mondiale, ce qui le rend intéressant aux yeux de multinationales très présentes aux Etats-Unis, comme BP ou Shell.

Outre son activité de lobbying, l’API est aussi l’arbitre des normes techniques du secteur (exigences pour les équipements de pompage ou le forage en eaux profondes), des normes intégrées aux règles locales et fédérales qui servent de référence aux régulateurs du monde entier. De son côté, sa division services certifie le matériel de forage, les stations-service et les différents types de carburant.

Pendant des années, l’API a usé de son influence pour entraver la montée en puissance du lobby écologiste, minant les tentatives de durcissement des normes de pollution à l’ozone, contribuant à la levée de l’interdiction des exportations de pétrole et anticipant l’adoption de mesures de limitation des émissions de méthane.

Son coup de maître ? Participer, en 2009, au sabordage du projet de loi dit Waxman-Markey, dernière tentative législative ambitieuse pour limiter les émissions de gaz à effet de serre par des sanctions pécuniaires.

 

Engie : Électricité 100 % verte mais des profits grâce au nucléaire !

Engie : Électricité 100 % verte mais des profits grâce au nucléaire !

 

Engie a relevé ses objectifs pour l’année, et vise désormais un résultat net récurrent (hors exceptionnel) entre 2,5 et 2,7 milliards d’euros, contre 2,3 à 2,5 milliards attendus auparavant, précise-t-il dans un communiqué.Mais un résultat surtout du au profit réalisé dans le nucléaire. Par ailleurs, il poursuivra son programme de cession de certains actifs – de 9 milliards d’euros sur la période 2021-2023 -, annoncé en juillet 2020, dont le but est de simplifier le groupe et donner un coup d’accélérateur sur les énergies renouvelables.

« Les résultats du groupe se sont améliorés, grâce à un solide deuxième trimestre tiré principalement par les activités de gestion d’énergie, le nucléaire, des températures inférieures à la moyenne et l’amélioration de la performance des Solutions Clients au cours du deuxième trimestre par rapport au premier », a commenté Isabelle Kocher, Directrice Générale d’Engie.

 

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