Archive pour le Tag 'Védrine)'

L’urgence , c’est l’écologie (Védrine)

L’urgence, c’est l’écologie (Védrine)

« La vraie urgence pour l’humanité, c’est l’écologie » (Hubert Védrine, ancien ministre des Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères. Selon lui, la nouveauté par rapport aux siècles passés est l’urgence de « l’écologisation » du monde, autrement dit la transformation de tous nos modes de vie et de production à travers la planète, ce qui pourrait faire des COP les événements les plus importants en matière de relations internationales dans un futur proche. interview dans la Tribune.

LA TRIBUNE DIMANCHE - Vous avez dirigé un livre, qui vient de paraître, racontant l’histoire de diplomates illustres. Selon vous, le temps de ces grands négociateurs est révolu. C’est de mauvais augure quand la guerre continue en Ukraine ou à Gaza, que les tensions montent à Taïwan et ailleurs…

HUBERT VÉDRINE – Je n’ai pas dit qu’il n’y aurait plus de négociateurs. Dans notre monde globalisé, il y a sans cesse des négociations dans tous les domaines - économie, technologie, défense, sécurité, santé, IA, etc. Il n’y a donc jamais eu autant de négociateurs. Mais pourront-ils développer des carrières ou des destins de grands négociateurs, comparables aux personnalités dont cet ouvrage rassemble les portraits ? Je ne le pense pas. Ils n’en auront pas l’occasion, ni le temps, ni l’espace. L’opinion ne s’attachera pas à des négociateurs extrêmement importants pour un an ou deux. Le rôle des ministres des Affaires étrangères eux-mêmes restera important mais sera de plus en plus relativisé au milieu d’un plus grand nombre d’acteurs. Mais quand Benoît Yvert, qui a eu l’idée du livre, m’a demandé d’en assurer la direction et d’en rédiger la préface et la postface, j’ai accepté parce que précisément c’est un vrai enjeu. Nous commençons avec Mazarin - nous aurions pu commencer avec Richelieu, mais il est vraiment très connu - et allons jusqu’à l’époque contemporaine avec Boutros Boutros-Ghali, Kofi Annan, Henry ­Kissinger, et même Sergueï Lavrov. Étant donné que le monde ne constitue pas une « communauté » internationale, et qu’il est plus compliqué que pendant la guerre froide, il est très utile de réétudier comment ceux qui ont géré, bien ou mal, les politiques françaises, anglaises, prussiennes, autrichiennes, russes, etc. ont réussi ou non à maîtriser les rapports de force. Car cela n’est pas sans rapport avec le monde actuel : États-Unis, Chine, Russie, Inde, Moyen-Orient, Europe, etc.


Vous expliquez que les maux de notre époque, l’individualisme, le wokisme, les écrans, etc. ont un impact sur la diplomatie. On croyait le monde des diplomates à l’abri et empreint de sagesse…

Précisément, les relations diplomatiques ne sont plus à l’abri de rien. Les diplomates sont censés réintroduire de la sagesse dans la gestion des conflits, mais c’est de plus en plus dur dans un monde hystérisé par l’information en continu, et dans lequel les réseaux sociaux excitent les passions. Il faut revenir à l’histoire récente, après la fin de l’URSS. L’Occident a cru que l’Histoire était finie (cf. Francis Fukuyama) et que la démocratie et le marché étaient définitivement installés. Pour les États-Unis, cela voulait dire qu’ils étaient maîtres du monde et que, par arrogance olympienne, ils n’avaient plus à se soucier de toutes sortes de conflits agitant des peuples retardataires. Se considérant comme totalement dominants, ils ont pu reprendre le vieux discours sur le commerce qui favorise la paix. Ils ont donc mondialisé l’économie globale. Cela a en effet enrichi le monde, notamment la Chine, mais a eu dans le même temps des conséquences dévastatrices sur les classes moyennes des pays occidentaux. D’où le trumpisme, le Brexit, et la montée des extrémismes en Europe, où cela s’ajoute au sentiment que les flux migratoires ne sont pas assez gérés.

Des relations Europe-États-Unis de plus en plus difficiles.( Hubert Védrine)

Des relationsEurope États-Unis de plus en plus difficiles.( Hubert Védrine)

Hubert Védrine l’ancien chef de la diplomatie française prévoit que les relations entre l’Europe et les États-Unis seront de plus en plus difficile avec ou sans Trump.

 

 

Quels sont les enjeux de l’élection américaine pour l’Europe ?

Au-delà des péripéties trumpiennes ou post-trumpiennes, le moment est venu de considérer la relation avec les Etats-Unis dans la longue durée. Ce qui a créé la relation transatlantique des dernières décennies, c’est, après 1945, la menace stalinienne crédible sur l’Europe occidentale, l’appel à l’aide des Européens et la création de l’Alliance atlantique (et de l’Otan pour la gérer militairement) grâce à l’engagement déterminé du président Truman. Il y a eu depuis des controverses sérieuses – ce que Kissinger appelait les « malentendus » transatlantiques – sur la contribution budgétaire des alliés européens, sur la stratégie générale de l’Alliance (le grand débat autour de la riposte graduée à laquelle de Gaulle s’opposait à juste titre), la sortie de De Gaulle des organes intégrés ; des angoisses de certains au moment d’accords de désarmement ; des tentatives françaises pour créer un pôle européen de défense, en dehors puis à l’intérieur de l’Alliance… Mais les fondamentaux sont toujours là : les Européens sont incapables de défendre l’Europe par eux-mêmes, ils auront besoin des États-Unis jusqu’à ce qu’ils se réveillent et créent vraiment un pôle européen de défense, une industrie de défense, une stratégie commune, une capacité d’engagement à l’extérieur et un mécanisme de décision clair et crédible.

En dépit des efforts répétés de la France, ce n’est pas encore le cas…

Depuis l’élection du président Macron, on sent un frémissement en Europe. Mais, avec le temps, les relations vont inévitablement se distendre, comme entre des cousins issus de germain, à moins de l’apparition d’une grande menace, focalisée uniquement sur l’espace transatlantique. La dépendance militaire encore évidente à l’égard de Washington ne devrait pas décourager l’Europe de développer ses propres capacités et surtout pas conduire à un alignement systématique de trop d’Européens en politique étrangère, sur les plans culturel et écologique, au contraire. La politique américaine de sanctions unilatérales (y compris contre des personnes), développée impunément depuis une trentaine d’années, ne devrait plus être tolérée au nom de la souveraineté européenne. L’acharnement des Etats-Unis contre le projet Nordstream 2 de gazoduc entre la Russie et l’Allemagne vise, par exemple, à écouler leur pétrole de schiste en Europe. La Commission européenne devrait enregistrer toutes les propositions de sanctions concernant nos Etats ou nos entreprises, étudier de quels sénateurs elles proviennent, et à quels groupes d’intérêt ou lobbies elles sont associées. Ce serait un premier pas pour rétablir avec les Etats-Unis une relation de confiance et de réciprocité, ce qui reste notre intérêt.

Hors du domaine militaire, les Européens doivent aussi donner un sens à la formule : « amis, alliés, mais pas alignés ». Il ne faut pas se faire d’illusions, même dans l’hypothèse d’une administration Biden-Harris. Les Etats-Unis ne reviendront pas à un multilatéralisme idéal, celui auquel rêvent les Européens et qu’ils n’ont en réalité jamais complètement pratiqué. Mais ce serait l’occasion, à ne pas manquer, d’un vrai redémarrage. Cela suppose que les Européens se présentent unis et harmonisent leurs positions lors des rencontres avec la future administration américaine.

Et si Trump est réélu ?

On verra ! Cela peut être le déclic mental. La vraie difficulté à surmonter d’ici là, c’est que les Européens sont souvent en désaccord sur la plupart des sujets où les divergences UE-Etats-Unis sont évidentes aux yeux des Français, même des moins antiaméricains. Les Européens doivent donc préparer une politique étrangère plus cohérente, y compris si cela nous doit nous différencier des États-Unis, voire nous opposer. Cela ne servira à rien de se précipiter pour être les premiers à parler à l’administration Biden si une base arrière européenne suffisamment solide n’a pas pu être bâtie. Cela concerne l’écologisation (climat, biodiversité, économie circulaire…), la détermination d’une politique russe aussi vigilante que nécessaire mais entreprenante, la relance d’une dynamique de maîtrise des armements, l’élaboration d’une stratégie vis-à-vis de la Chine abandonnant toute naïveté et suivisme américain, la réactivation de l’accord avec l’Iran, le retour à une politique plus équilibrée au Proche-Orient, l’affirmation d’une position plus claire sur les questions numériques – même si la nouvelle Commission a une attitude encourageante sur ce point.

 

Une remise en cause de la dérégulation internationale (Hubert Védrine)

Une remise en cause de la dérégulation internationale (Hubert Védrine)

 

Dans une  interview au Figaro , Hubert Védrine critique la  mondialisation qui a été essentiellement, jusqu’ici «une déréglementation financière et une localisation des productions industrielles là où les coûts salariaux étaient les plus faibles». Le virus confirme cruellement que nombre de pays dont la France se sont débarrassés de leur industrie en délocalisant dans les pays en développement et au passage en vidant de leur substance économique une grande partie du territoire. L’idée générale était que les pays développés se contenteraient de commercialiser à bon compte des produits fabriqués à bas prix dans les pays pauvres. Le problème c’est qu’arrivés un certain stade, ces pays parvenus  à un certain niveau de développement  se sont mis à concurrencer sérieusement les anciens pays développés. Ainsi la Chine mais aussi d’autres qui inondent les pays occidentaux de leurs produits manufacturés et autres comme par exemple les produits pharmaceutiques dans 50 à 70 % viennent  de Chine et plus généralement d’Asie.

Coup de pays occidentaux, les États-Unis compris, se sent délestés de leurs productions stratégiques de façon très naïve. Sans doute ne sera-t-il pas possible de revenir à l’époque où chacun faisait son pain et dont  les territoires vivaient  en quasi autonomie. Pour autant,  la dimension internationale des processus de production a pris des dimensions particulièrement dangereuses par ailleurs coûteuses sur le plan environnemental avec un gâchis considérable du transport et de la logistique. Le deuxième enseignement de la crise sanitaire c’est que le monde ne dispose pas des outils de gestion mondiale faire face aux grandes questions y compris aux catastrophes. Chaque zone, chaque pays bricole dans son coin des plans d’urgence plus ou moins contradictoire avec ceux du voisin.

  • Cette crise globale, sans précédent depuis les guerres, révèle ou confirme qu’il n’existe pas encore de réelle communauté internationale ou qu’elle n’est pas préparée à faire face à une pandémie mondiale déclare encore Hubert Védrine. L’ONU par exemple reste encore relativement un machin qui  intervient parfois plus ou moins mollement dans les conflits ou dans les famines et qui se paralyse le plus souvent. Le G20 discute mais l’impose jamais rien. Quant à l’Europe, elle n’a guère encore donné la preuve de son efficacité hormis sur la question des échanges de biens et encore. L’Europe demeure un espace limité au marché comme le souhaitaient les anglo-saxons. Sans doute le Coronavirus ne modifiera pas totalement ces problématiques mais il  entraînera vraisemblablement des changements sur le plan économique  avec des transformations des modes de production et de consommation mais aussi sur le plan politique.

Ukraine : Poutine devra lâcher les séparatistes (Védrine)

Ukraine : Poutine devra  lâcher les séparatistes (Védrine)

L’ancien ministre des Affaires étrangères français, Hubert Védrine, estime que Vladimir Poutine va « devoir sortir de l’ambiguïté » et cesser de soutenir les séparatistes russes. (interview JDD)

Quelles conséquences tirez-vous de la tragédie du vol MH 17, abattu au-dessus de l’Ukraine?
Une escalade sous la pire des formes me paraît désormais improbable. Je pense que cette épouvantable « bavure » des séparatistes, si c’est le cas, condamne leur combat et que Poutine, en dépit des dénégations, va devoir sortir de l’ambiguïté et cesser de les soutenir, ou même les désavouer. Ce qui vient de se passer donne une légitimité encore plus grande aux autorités de Kiev pour rétablir leur souveraineté avec un soutien accru des Occidentaux, sans que la Russie puisse s’y opposer. C’est ce qu’indique la fermeté d’Obama dans sa mise en cause des responsabilités russes.

Barack Obama n’a pas rendu Poutine directement responsable de ce qui s’est passé, mais il a clairement pointé du doigt l’implication du Kremlin dans le soutien russe aux séparatistes…
Depuis le début de l’affaire ukrainienne, Obama a saisi l’occasion de se refaire une image de fermeté alors qu’il était jugé de plus en plus faible et inconstant, par exemple sur la Syrie. Cela s’explique par l’importance prioritaire pour lui d’un éventuel accord sur le nucléaire avec l’Iran qui aura, s’il est signé, des conséquences considérables. Mais pour cela il aura besoin de convaincre le Congrès, largement aligné sur Netanyahou. Pour y arriver donc, il faudra qu’il ait démontré sa fermeté dans une grande crise. Pour lui les provocations de Poutine tombent à pic, d’autant plus que l’escalade dans les sanctions contre la Russie ne présente aucun inconvénient économique pour les États-Unis.




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