Archive pour le Tag 'Turquie'

Élections Turquie : il faudra un second tour

Élections Turquie : il faudra un second tour

A 4h48 en Turquie (3h48 à Paris): l’agence officielle Anadolu publie des résultats partiels après le dépouillement de 98,02% des bulletins. Recep Tayyip Erdogan est toujours en tête avec 49;34% des voix, suivi par Kemal Kiliçdaroglu (44,99%).

Un second tour inédit semble se profiler dimanche soir en Turquie, suspendue aux résultats du dépouillement de l’élection présidentielle, qui donnent le président Recep Tayyip Erdogan au coude à coude avec son adversaire Kemal Kiliçdaroglu.

Un siècle après la fondation de sa République, une Turquie profondément divisée choisit ce dimanche son futur président. Lire l’article
Deux principaux candidats s’opposent: le président islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan, 69 ans, au pouvoir depuis vingt ans, et son adversaire Kemal Kiliçdaroglu, 74 ans, à la tête d’un parti social-démocrate et laïque.

4,35% et 2.330.308 voix séparent les deux hommes. Si un second tour semble se profiler et parait désormais avéré, une victoire d’Erdogan reste toujours possible, de nombreux votes à l’étranger n’ayant toujours pas été comptabilisés.

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Turquie–Erdogan: le sultan autocrate surtout menacé par le marasme économique

Turquie–Erdogan: le sultan autocrate surtout menacé par le marasme économique

Difficile de faire un pronostic en Turquie mais Erdogan pourrait bien être menacé non seulement par le durcissement du régime mais surtout par le désastre économique connaît le pays.

Le dimanche 14 mai, les électeurs turcs sont appelés aux urnes pour élire leur nouveau président et leurs députés. Pour l’élection présidentielle, trois candidats sont dans la course et deux sont favoris : le conservateur nationaliste Recep Tayyip Erdogan, à la tête de la Turquie depuis vingt ans , devenu une sorte de sultan autocrate et le social-démocrate Kemal Kiliçdaroglu, chef d’une coalition hétéroclite et unifiée, nommée la « Table des six ». La crise économique qui frappe la Turquie et les séismes meurtriers du 6 février sont au cœur de la campagne, chaque candidat se positionnant comme celui qui pourra réparer le pays.

Pour la première fois, « la victoire personnelle d’Erdogan n’est pas assurée », soutient le politologue turc Ahmet Insel. Si Kemal Kiliçdaroglu est élu, il promet un virage démocratique, en rupture avec la dérive autoritaire d’Erdogan. Il souhaite entre autres revenir à un système parlementaire et apaiser les relations avec les Kurdes, persécutés par le gouvernement d’Erdogan, et avec l’Union européenne.

Turquie–Erdogan surtout menacé par le marasme économique

Turquie–Erdogan surtout menacé par le marasme économique

Difficile de faire un pronostic en Turquie mais Erdogan pourrait bien être menacé non seulement par le durcissement du régime mais surtout par le désastre économique connaît le pays.

Le dimanche 14 mai, les électeurs turcs sont appelés aux urnes pour élire leur nouveau président et leurs députés. Pour l’élection présidentielle, trois candidats sont dans la course et deux sont favoris : le conservateur nationaliste Recep Tayyip Erdogan, à la tête de la Turquie depuis vingt ans, et le social-démocrate Kemal Kiliçdaroglu, chef d’une coalition hétéroclite et unifiée, nommée la « Table des six ». La crise économique qui frappe la Turquie et les séismes meurtriers du 6 février sont au cœur de la campagne, chaque candidat se positionnant comme celui qui pourra réparer le pays.

Pour la première fois, « la victoire personnelle d’Erdogan n’est pas assurée », soutient le politologue turc Ahmet Insel. Si Kemal Kiliçdaroglu est élu, il promet un virage démocratique, en rupture avec la dérive autoritaire d’Erdogan. Il souhaite entre autres revenir à un système parlementaire et apaiser les relations avec les Kurdes, persécutés par le gouvernement d’Erdogan, et avec l’Union européenne.

Vers la fin d’Erdogan (Turquie)

Vers la fin d’Erdogan (Turquie)

par
Ahmet Insel
Économiste, politologue, professeur émérite à l’Université Galatasaray, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne dans the Conversation


En Turquie, les élections présidentielle et législatives de mai 2023 (premier tour le 14 mai pour les deux, second tour le 28 pour la présidentielle) auront un caractère de référendum. Les électeurs sont, en effet, appelés à choisir entre deux voies politiques opposées.

En votant à la présidentielle pour Recep Tayyip Erdogan et aux législatives pour les partis de l’Alliance populaire constituée autour de lui et de sa formation l’AKP (Parti de la justice et du développement), ils soutiendront la consolidation d’un régime autocratique mettant en œuvre une politique répressive nationale-islamiste.

L’autre option est de voter pour le retour à la démocratie, à l’État de droit et au régime parlementaire. Le chef du Parti républicain du peuple (CHP, républicain, social-démocrate et laïc) Kemal Kiliçdaroglu incarne cette seconde option, qui signifierait la fin de l’erdoganisme, régime taillé sur mesure pour le pouvoir d’un seul homme. Pour la première fois, une très large coalition – la Table des Six, réunie autour du CHP, se présente unie face à Erdogan et son régime. Sera-ce suffisant pour mettre fin à un système dont l’édification a démarré il y a vingt ans ?

Le glissement progressif vers l’autocratie a commencé après les élections législatives de 2011. Sorti victorieux pour la troisième fois des élections générales, Recep Tayyip Erdogan, premier ministre depuis 2003, commença alors à faire l’éloge d’un système présidentiel qui lui permettrait de « diriger le pays comme une société anonyme » et de « prendre des décisions le plus vite possible ». En 2014, pour la première fois, le président de la République doit être élu au suffrage universel. Erdogan se fait élire et déclare que désormais « le régime est devenu, de fait, présidentiel ».

La tentative de coup d’État du 15 juillet 2016 et le régime d’état d’exception qui a suivi lui donnèrent l’occasion de transformer cet état de fait en état de droit.

Grâce au soutien du parti d’extrême droite MHP, nouvel et indispensable allié de l’AKP pour conserver la majorité au Parlement, le régime présidentiel a été entériné de justesse (51,4 %) en avril 2017, à l’issue d’un référendum entaché d’irrégularités.

Une autocratie élective et répressive, sans séparation des pouvoirs, fondée sur une idéologie nationaliste-religieuse, une politique économique chaotique et une politique étrangère agressive et opportuniste s’est ainsi mise en place. Les réussites économiques d’antan ont laissé place à une grave crise marqu&ée par une très forte inflation, une croissance chaotique et la dépréciation vertigineuse de la livre turque.

Les tremblements de terre du 6 février 2023, qui ont causé des dizaines de milliers de morts, ont révélé toutes les faiblesses du système mis en place : l’incurie des institutions, les conséquences de l’hypercentralisation et du népotisme dans l’administration, les résultats des autorisations accordées à des fins électorales à des constructions non conformes aux normes antisismiques… C’est dans ce contexte que la Turquie est entrée dans la campagne électorale.

Erdogan, en perte de popularité et pour la première fois en position défensive, a dû élargir la coalition formée avec l’extrême droite – l’Alliance populaire – vers des partis très minoritaires se réclamant d’un fondamentalisme islamiste radical. Face à lui, une coalition formée à la veille des élections de juin 2018, l’Alliance de la Nation, s’est élargie à d’autres partis et est devenue, en février 2022, la « Table des Six ».

La première expérience de formation d’un front uni anti-Erdogan avait donné des résultats probants lors des élections municipales de 2019. Prenant appui sur cette réussite, le chef du CHP, Kemal Kiliçdaroglu, a imposé à son parti un aggiornamento pour former des alliances avec les partis conservateurs.

La Table des Six, ou l’Alliance de la Nation, regroupe donc le CHP, le Bon parti (droite nationaliste formée en partie des dissidents de MHP), deux partis libéraux et conservateurs créés par des dissidents de l’AKP, et un parti qui représente l’islamisme historique et très critique à l’égard de la corruption et du népotisme de l’AKP. Ces six partis ont désigné Kiliçdaroglu comme leur candidat pour l’élection présidentielle. Le parti pro-kurde de gauche HDP (Parti démocratique des peuples) qui représente au Parlement la majorité des électeurs kurdes (la population kurde est estimée autour de 18 %), ainsi que les différents courants de la gauche, ont aussi appelé à voter pour lui.

Voyant venir ce danger de front uni, Erdogan avait pourtant pris le soin auparavant de faire écarter de la course présidentielle le très populaire maire d’Istanbul, Ekrem Imamoglu (CHP), élu en 2019, en le faisant condamner en décembre 2022 à deux ans et sept mois de prison pour « insultes » à l’encontre de certains hauts fonctionnaires du régime. Le chef de l’État espérait voir la Table des Six se déchirer dans la recherche de son candidat à la présidentielle et finalement éclater. Sa stratégie a échoué et le large consensus réalisé autour d’un candidat anti-Erdogan unique a changé le contexte politique traditionnel dans lequel ce dernier avait l’habitude de manœuvrer facilement.

Depuis le virage vers un nationalisme religieux et autoritaire opéré par Erdogan au début de la décennie 2010, un des axes majeurs de sa stratégie politique a été d’attiser les fractures ethniques (Turcs-Kurdes), confessionnelles (sunnites-alévis) et culturelles (modernistes-conservateurs) qui travaillent la société.

Il se plaçait comme le leader naturel de la majorité sociologique turque, sunnite et conservatrice, accusant les représentants de l’opposition d’être des « diviseurs de l’unité nationale et confessionnelle », « le prolongement d’organisations terroristes » ou des agents de puissances étrangères ayant des visées sur la Turquie.

L’expression « authentique et nationale » devint son leitmotiv pour qualifier les actions de son gouvernement. Mais la composition des partis qui forment la Table des Six autour de Kiliçdaroglu, le soutien du mouvement kurde et des mouvements de gauche et la grave crise économique ont brouillé sa stratégie. La fracture entre les partisans et les adversaires d’Erdogan semble devoir surdéterminer l’issue des élections de mai 2023.

Avec une personnalité diamétralement opposée à celle d’Erdogan, Kilicdaroglu se positionne comme une « force tranquille » dans cette campagne électorale et a réussi à créer, ces dernières semaines, une vraie dynamique électorale. Il répond à l’aspiration d’une large partie de la population d’un retour à la quiétude, à une certaine normalité démocratique et à des politiques économiques plus rationnelles, moins chaotiques et imprévisibles par exemple au sujet des taux d’intérêt qu’Erdogan a fait passer en dessous de 10 % alors que le taux d’inflation s’approche de 100 %.

De son côté, le HDP, malgré la répression et les discriminations quasi quotidiennes qu’il subit, a réussi à former une alliance avec des petits partis de gauche pour les élections législatives. Et pour court-circuiter l’épée de Damoclès d’une dissolution par la Cour constitutionnelle à la veille du scrutin qui pèse sur lui depuis deux ans, il a pris la décision de se présenter aux élections sous les couleurs d’un autre parti, le Parti de la gauche verte. Cette alliance qui ne présente pas de candidat pour la présidentielle et appelle à voter Kilicdaroglu dès le premier tour aura aussi un rôle décisif à jouer dans la future assemblée. Le soutien de ses élus sera probablement nécessaire pour former une majorité parlementaire avec l’Alliance de la nation.

Le dénominateur commun de tous ces nouveaux mouvements de rapprochement est leur volonté de mettre fin au règne de vingt ans d’Erdogan, de revenir au régime parlementaire à travers un changement constitutionnel, de rétablir l’État de droit et les droits et libertés fondamentaux, de mettre fin à l’arbitraire, au népotisme, à la corruption et au recours à la religion comme instrument politique actif, et enfin de rétablir la confiance des acteurs économiques internationaux et de relancer les négociations avec l’UE, au point mort depuis plusieurs années.

Si l’opposition gagne ces élections, la tâche pour sortir du système légué par l’erdoganisme sera immense, et en tout état de cause la Turquie ne deviendra pas rapidement une démocratie apaisée. On ne peut qu’espérer que ce grand moment d’effervescence démocratique ne soit pas passager, comme ce fut le cas plusieurs fois dans le passé.

En revanche, en cas de nouvelle victoire d’Erdogan et de l’AKP, la Turquie s’engouffrera pour longtemps dans le camp des autocraties populistes et du national-capitalisme autoritaire. Les espoirs d’une sortie possible de l’autocratie par les élections seront affaiblis.

Et si l’opposition gagne mais Erdogan ne reconnaît pas les résultats des élections ou si le système juridique qu’il a mis en place annonce des résultats contraires ?

Cette question est bien sûr dans la tête de tous les électeurs de l’opposition en Turquie. Mais à part organiser une grande mobilisation civile pour assurer la sécurité du scrutin et réaliser un travail acharné pour convaincre les électeurs hésitants à voter pour le changement, tous les partis d’opposition sont unanimes pour ne pas parler de cette hypothèse sombre avant les élections.

D’abord pour ne pas effrayer les électeurs par un tel scénario du chaos, pour le moment hypothétique, et les dissuader ainsi d’aller voter ; ensuite, parce qu’il est impossible et surtout contreproductif de parler aujourd’hui des moyens et des modalités de lutte contre un tel coup de force qui signifierait qu’Erdogan aura franchi le Rubicon et se sera engagé dans la voie d’une dictature assumée comme telle. L’opposition aspire d’abord à gagner les élections dans les urnes ; il sera temps, alors, de prendre les mesures nécessaires pour que la volonté populaire soit respectée.

35 000 morts en TURQUIE ET SYRIE: LA FAUTE AUSSI AU NON-RESPECT DES NORMES DE CONSTRUCTION

35 000 morts en TURQUIE ET SYRIE: LA FAUTE AUSSI AU NON-RESPECT DES NORMES DE CONSTRUCTION

Un drame épouvantable qui a déjà fait plus de 35 000 morts imputables au risque sismique de la région mais aussi au non-respect des normes de construction.

Dans ces pays pauvres, la corruption permet de se satisfaire de normes internationales et même locales de façon très aléatoire. Pour preuve, certains propriétaires fabriquent eux-mêmes les parpaings voire les poutrelles avec la dose nécessaire de ciment. Trop de parpaings ne contiennent en effet que des doses infinitésimales de ciment de sorte que maisons et immeubles sont construits en quelque sorte sur du sable. Un phénomène assez général dans les pays pauvres.

Vingt-trois millions de personnes sont « potentiellement exposées, dont environ cinq millions de personnes vulnérables », a mis en garde l’Organisation mondiale de la santé. L’OMS avait auparavant dit redouter « des bilans huit fois plus élevés que les nombres initiaux ».

Le mauvais temps complique la tâche des secours et rend le sort des rescapés plus amer encore, grelottant sous des tentes ou autour de braseros improvisés. Profondément meurtrie, la région turque de Kahramanmaras (Sud-Est), difficile d’accès, est ensevelie sous la neige.

En Syrie, le bilan devrait « grimper considérablement car des centaines de personnes restent piégées sous les décombres », selon les Casques blancs (volontaires de la protection civile) dans les zones rebelles.

DRAME EN TURQUIE ET SYRIE: LA FAUTE AUSSI AU NON-RESPECT DES NORMES DE CONSTRUCTION

DRAME EN TURQUIE ET SYRIE: LA FAUTE AUSSI AU NON-RESPECT DES NORMES DE CONSTRUCTION

Un drame épouvantable qui a déjà fait plus de 8000 morts imputables au risque sismique de la région mais aussi au non-respect des normes de construction.

Dans ces pays pauvres, la corruption permet de se satisfaire de normes internationales et même locales de façon très aléatoire. Pour preuve, certains propriétaires fabriquent eux-mêmes les parpaings voire les poutrelles avec la dose nécessaire de ciment. Trop de parpaings ne contiennent en effet que des doses infinitésimales de ciment de sorte que maisons et immeubles sont construits en quelque sorte sur du sable. Un phénomène assez général dans les pays pauvres.

Vingt-trois millions de personnes sont « potentiellement exposées, dont environ cinq millions de personnes vulnérables », a mis en garde l’Organisation mondiale de la santé. L’OMS avait auparavant dit redouter « des bilans huit fois plus élevés que les nombres initiaux ».

L’aide internationale commence à arriver mardi en Turquie où un deuil national a été décrété pour sept jours. Le décompte des morts s’y établit pour le moment à 5894. En Syrie, 1932 morts ont pour l’instant été recensés, soit un total provisoire de 7826.
Le mauvais temps complique la tâche des secours et rend le sort des rescapés plus amer encore, grelottant sous des tentes ou autour de braseros improvisés. Profondément meurtrie, la région turque de Kahramanmaras (Sud-Est), difficile d’accès, est ensevelie sous la neige.
En Syrie, le bilan devrait « grimper considérablement car des centaines de personnes restent piégées sous les décombres », selon les Casques blancs (volontaires de la protection civile) dans les zones rebelles.

Turquie : 80 % d’inflation mais baisse des taux !

 Turquie : 80 % d’inflation mais baisse des taux !

 

Une curieuse stratégie monétaire en Turquie qui connaît 80 % d’inflation mais vient de décider une baisse des taux. Une  baisse de son taux directeur de 14% à 13%. Le contraire de la stratégie des autres banques centrales.

 

En juillet par exemple , la Réserve fédérale américaine (Fed) avait ainsi décidé de relever ses taux directeurs de trois-quarts de point de pourcentage, comme en juin, soit la plus forte hausse des taux aux Etats-Unis depuis 1994. De son côté, la Banque centrale européenne (BCE) a relevé ses taux d’intérêt, pour la première fois depuis 11 ans, de 50 points de base en juillet dernier et devrait poursuivre cette hausse en septembre.

De son côté, la banque centrale turque a opté pour une politique inverse, dictée par le président Recep Tayyip Erdogan. « Le processus de désinflation débutera avec le rétablissement d’un environnement de paix dans le monde et la disparition des effets de base de l’inflation », justifiait ainsi l’institution monétaire en juin dernier. Erdogan a bâti, ces dernières années, un modèle économique qui repose largement sur la consommation et l’investissement encourageant de vastes projets immobiliers et qui serait donc mise à mal par une hausse des taux d’intérêts.

A 79,6% sur un an en juillet, selon les chiffres officiels, elle atteint son plus haut niveau depuis vingt-quatre ans. D’autant que selon le Groupe de recherche sur l’inflation (Enag), composé d’économistes turcs indépendants, elle atteignait en réalité 175,5% sur un an en juin, soit plus de deux fois le taux communiqué par l’Office national des statistiques (Tüik).

 

Chaque mois, c’est un nouveau record. L’inflation atteint désormais 73,5% en Turquie, son plus haut depuis décembre 1998, selon les dernières données officielles communiquées ce vendredi. Un fléau qui touche tous les secteurs, du transport (+ 107,62% en un an en mai), à l’alimentaire (+91,63%). Seule éclaircie, la hausse des prix à la consommation a, elle, ralenti en mai par rapport à sa progression en avril. Ce même jour, des économistes turcs indépendants du Groupe de recherche sur l’inflation (Enag) ont, eux, affirmé que l’inflation atteint en réalité 160,76 % sur un an.

Dans ce pays régulièrement en proie à une inflation galopante, la guerre en Ukraine, qui a provoqué une flambée des prix de l’énergie, est venue aggraver une économie déjà fragile. Face à cette situation, la Turquie a pourtant adopté une stratégie à rebours de celles mises en place dans plusieurs pays où l’inflation sévit aussi. Les Etats-Unis et l’Europe notamment, ont en effet entrepris de remonter leurs taux d’intérêt dans le but de freiner la hausse des prix. Recep Tayyip Erdogan persiste quant à lui à les maintenir bas, estimant que les remonter favoriserait l’inflation. La banque centrale turque, qui avait été contrainte par le chef de l’Etat à abaisser son taux directeur de 19% à 14% fin 2021, l’a donc maintenu à ce seuil. Pourquoi une telle stratégie ? Le problème c’est que maintenant la situation monétaire en Turquie pourrait provoquer une crise plus large  y comprise au plan mondial.

 

Turquie : une inflation de 61 % !

Turquie : une inflation de 61 % ! 

 

 

 

Si la posture d’Erdogan s’améliore au plan diplomatique grâce à son intervention dans le conflit ukrainien par contre la situation économique de son pays ne cesse de se dégrader notamment en matière d’inflation avec un record à 61 % sur un an

Pour nombre d’experts la responsabilité incombe à une politique monétaire incohérente.  Ces derniers mois, la Banque centrale a, en effet, abaissé plusieurs fois son taux directeur. Pour Timothy Ash, analyste au cabinet BlueAsset Management à Londres et spécialiste reconnu de la Turquie, c’est même la « cause majeure de l’inflation ». Les taux d’intérêt ont été abaissés de 19% à 14% entre septembre et décembre et sont stables depuis janvier.

Cette « politique non orthodoxe » a stimulé l’inflation, explique-t-il, et « la guerre en Ukraine a juste aggravé les choses ». « N’oublions pas que l’objectif visé est une inflation à 5%, ce que la Banque centrale n’a pas su atteindre depuis 2011″, relève-t-il encore.

Or, prévient Jason Tuvey du cabinet londonien Capital economics, le taux d’inflation « risque de grimper encore un peu dans les mois qui viennent. « Lui aussi déplore qu’il n’y ait « toujours aucun signe de la banque centrale et, surtout, du président Erdogan indiquant qu’ils sont prêts à changer de cap et à relever les taux d’intérêt ».

Erdogan  a demandé samedi de la « patience » aux Turcs: reconnaissant que la guerre en Ukraine affectait déjà les prix à la consommation, il a expliqué « mener une bataille contre ceux qui imposent des prix exorbitants » et prévenu qu’il sera « sans pitié » avec les spéculateurs.

« Nous devons surmonter les problèmes. Je demande à la nation d’être patiente et de nous faire confiance », a-t-il indiqué.

En attendant, l’agence de notation financière S&P Global Ratings a abaissé sa note sur la dette souveraine de la Turquie et la considère désormais entièrement comme un investissement très spéculatif.

 

UE: L’instrumentalisation des migrants par la Russie et la Turquie

UE: L’instrumentalisation des migrants par la Russie et la Turquie

 

Pour Jean-Thomas Lesueur, des puissances hostiles à l’Europe utilisent ces populations comme une arme géopolitique d’intimidation et de déstabilisation.

Jean-Thomas Lesueur est délégué général de l’Institut Thomas More (think-tank libéral-conservateur).

Interview le Figaro -

La police aux frontières polonaise a diffusé des vidéos montrant des migrants, principalement originaires du Moyen-Orient, munis d’armes blanches pour essayer de forcer le passage de la frontière. Que vous inspirent ces images ?

Jean-Thomas LESUEUR. - Après l’immense vague migratoire de 2015, après la concentration de plus de 130.000 migrants à la frontière grecque par la Turquie en mars 2020, après la prise de contrôle par cette même Turquie de la route libyenne au printemps de la même année, l’Europe et les Européens vivent, depuis cet été mais avec une accélération forte depuis le 8 novembre, à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne un nouvel épisode de tensions géopolitiques de nature migratoire.

J’emploie cette formule pour faire comprendre qu’une part des migrations internationales ne doit être regardée ni avec des lunettes humanitaires (celles des ONG, tout particulièrement allemandes, qui jouent un rôle délétère sur le terrain) ni avec des lunettes technocratiques (celles du «migration management» des agences internationales) mais bien avec des lunettes géopolitiques. Des puissances hostiles et perturbatrices utilisent l’immigration comme une arme de déstabilisation et d’intimidation contre les Européens.

On voit que ces foules sont encadrées, dirigées, parfois molestées, par des hommes cagoulés et en tenue militaire indéterminée.

 

Ce que nous voyons sur les images dont vous parlez, ce sont des foules dont il faut d’abord se demander comment elles sont arrivées là. Comment des personnes en majorité syriennes et irakiennes se retrouvent-elles au beau milieu des forêts de Podlachie, cette région lointaine aux confins de la Pologne et de la Biélorussie ? Seules deux réponses sont possibles : par la volonté d’États ou par l’entremise de réseaux de passeurs (il faut sans doute écrire «et» plutôt que «ou»). On voit aussi que ces foules sont encadrées, dirigées, parfois molestées, par des hommes cagoulés et en tenue militaire indéterminée (ce qui fait furieusement penser aux «petits hommes verts» vus en Crimée il y a quelques années). On les voit enfin équipées d’outils et de tenailles (pour ouvrir des brèches dans les barbelés tendus par les Polonais), parfois armées, vous l’avez dit.

J’ajoute que les services lituaniens ont alerté leurs partenaires qu’ils avaient détecté parmi les migrants qui sont parvenus à passer depuis cet été des personnes pouvant avoir un profil terroriste. Si on ne comprend pas avec tout cela que nous sommes face à une action intentionnelle et planifiée à des fins hostiles, on ne comprend rien.

 

Est-ce une attaque indirecte de la part de Vladimir Poutine ?

De Poutine… et d’Erdogan, ajouterais-je. Des responsables des services allemands ont affirmé hier qu’Aeroflot (qui appartient pour 51% à l’État russe) et Turkish Airlines (qui appartient pour 49% à l’État turc) «apportent une contribution décisive au trafic aérien de migrants vers la Biélorussie». La dimension hybride ou asymétrique de la méthode n’est, à l’évidence, pas sans rappeler la manière russe de ces dernières années, de la Géorgie à l’Arménie, en passant par l’Ukraine.

 

Plus fondamentalement, c’est bien de la Russie et de la Turquie que je parlais quand j’évoquais des puissances hostiles et perturbatrices qui savent fort bien jouer des faiblesses des Européens, de notre tétanie devant la figure du migrant, qui a vécu une sorte d’assomption dans le discours politique et médiatique de ces dernières décennies. Systématiquement présenté comme fuyant la guerre et la misère, le migrant est le nouveau visage du «damné de la terre». Comme l’a montré Mathieu Bock-Côté, l’immigré a remplacé l’ouvrier dans le Panthéon de la gauche et du gauchisme depuis une trentaine d’années. Cette assomption nous paralyse et fonde notre impolitique. Nous sommes incapables de parer, et moins encore de rendre, les coups que ces puissances nous portent, puissances qui, elles, ont une vision éminemment politique des rapports de force qui déterminent de nouveau les relations internationales.

De quelles façons l’Union européenne doit réagir à cette attaque ?

Compte tenu de ce que je viens de dire, je doute assez que l’Union européenne soit capable de réagir au niveau où la Biélorussie, soutenue par ses puissants amis, est en train de porter la question. La «Commission géopolitique» promise par Ursula von der Leyen est une plaisanterie… et une plaisanterie coupable.

Je crois donc que, si la Pologne doit demander de l’aide, ce sera à l’OTAN plutôt qu’à l’Union européenne et à Frontex.

Turquie : L’erreur d’Erdogan

Turquie : L’erreur d’Erdogan

 

Un papier du monde analyse le jeu très dangereux d’Erdogan.

 

Samedi 23 octobre, M. Erdogan a déclaré qu’il avait « ordonné » à son ministre des affaires étrangères de déclarer persona non grata les ambassadeurs de dix pays – Etats-Unis, Allemagne, France, Pays-Bas, Danemark, Finlande, Suède, Canada, Norvège, Nouvelle-Zélande. Il reproche à ces pays d’avoir signé, le 18 octobre, un appel conjoint en faveur de la libération de l’homme d’affaires et philanthrope Osman Kavala, accusé d’avoir cherché à renverser le gouvernement et maintenu en détention provisoire depuis quatre ans.


M. Erdogan voit dans cet appel une ingérence dans les affaires intérieures de la Turquie. Les signataires ne se sont pourtant fait que l’écho d’une décision de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) qui, en décembre 2019, a ordonné la « libération immédiate » de M. Kavala, abusivement détenu selon elle. La Turquie est membre fondateur du Conseil de l’Europe, dont la CEDH est issue.

Si Recep Tayyip Erdogan va jusqu’au bout de cette menace, formulée dimanche pour la deuxième fois, les ambassadeurs seront contraints de quitter la Turquie. Le président turc se tirerait-il une balle dans le pied ? Décider de renvoyer d’un coup dix ambassadeurs, dont sept représentent des pays alliés du sien au sein de l’OTAN, c’est risquer d’ouvrir une crise diplomatique à l’approche du sommet du G20 à Rome, où il espérait s’entretenir avec le président américain, Joe Biden.


Soucieux de promouvoir le rôle géopolitique de la Turquie, M. Erdogan n’a pourtant jamais été aussi isolé. M. Biden, qui divise le monde en démocraties contre autocraties, n’a pas pour lui l’enthousiasme de son prédécesseur, Donald Trump, et l’a plutôt évité jusqu’ici. Ses relations avec l’UE, et en particulier avec la France, qui vient de conclure un pacte de défense avec la Grèce, sont compliquées ; les tensions provoquées par Ankara en Méditerranée orientale en 2020 et son rôle en Libye, où la Turquie a fait venir des mercenaires de Syrie, n’ont pas amélioré l’image du président. Et son rapprochement avec Vladimir Poutine, qui lui a procuré des systèmes de défense antiaérienne S-400, au grand dam de l’OTAN, semble tourner court : leur dernier entretien, à Sotchi, en septembre, a été bref et s’est terminé sans conférence de presse commune.


Une telle crise diplomatique, notamment avec ses partenaires commerciaux européens, risquerait aussi de précipiter la Turquie plus avant dans la crise monétaire. La monnaie nationale, qui a perdu près de 25 % de sa valeur par rapport au dollar depuis le début de l’année, se déprécie chaque jour un peu plus. Trois gouverneurs de sa banque centrale ont été limogés entre 2019 et 2021. L’inflation est en hausse, le pouvoir d’achat des ménages s’effondre.

C’est peut-être là qu’il faut chercher le ressort de cette dernière foucade du président Erdogan : l’opposition le soupçonne de chercher, en jouant sur l’antagonisme avec les Etats-Unis et l’UE, à faire diversion sur la crise économique interne et son impopularité croissante, que confirment les sondages. Ce serait là un calcul à très courte vue. M. Erdogan ne peut plus se permettre le luxe de multiplier les crises.

Turquie -renvoi des 10 ambassadeurs occidentaux : Erdogan se dégonfle!

Turquie -renvoi des 10  ambassadeurs occidentaux : Erdogan se dégonfle!

 

 

Erdogan a dû se dégonfler pour ne pas accentuer une crise avec les pays occidentaux dont il voulait envoyer les ambassadeurs. La Turquie connaît en effet une crise économique sans précédent qui s’ajoute évidemment à la crise sociale et démocratique. Rarement en effet la monnaie par exemple n’a atteint un niveau aussi bas rendant compte de la dégradation économique et financière du pays.

 

La Turquie est en proie à une crise économique, avec un taux officiel d’inflation frôlant les 20% et une monnaie en chute libre d’environ 25% depuis le début de l’année face au dollar.

 

Les 10 ambassadeurs – États-Unis, Canada, France, Finlande, Danemark, Allemagne, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Norvège et Suède – avaient appelé dans un communiqué commun, le 18 octobre, à un «règlement juste et rapide de l’affaire» Osman Kavala, privé de liberté depuis octobre 2017.

 

Erdogan transforment son renoncement en argument. Les diplomates ont «reculé» et «seront plus prudents à l’avenir», a déclaré le chef de l’Etat au terme d’une longue réunion de son gouvernement, dont le contenu n’a pas été dévoilé mais durant laquelle, selon les observateurs, il a sans doute été mis en garde contre les conséquences désastreuses d’une nouvelle crise internationale. «Notre intention n’était pas de susciter une crise mais de protéger nos droits, notre honneur, notre fierté et nos intérêts souverains», a-t-il martelé.

 

Expulsion de dix ambassadeurs en Turquie : ‘Erdogan agite la rente nationaliste

Expulsion de dix ambassadeurs en Turquie : ‘Erdogan agite la  rente nationaliste 

 

 »Encore une fois, Erdogan agite la fibre nationaliste pour tenter de ressouder son électorat », a analysé dimanche 24 octobre sur franceinfo Didier Billon, directeur adjoint de l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris). Samedi 23 octobre, le président turc Recep Tayyip Erdogan a ordonné l’expulsion des dix ambassadeurs de pays occidentaux (France, Etats-Unis, Allemagne, Canada, Finlande, Danemark, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Norvège et Suède). Des pays qui ont appelé à libérer l’opposant Osman Kavala, emprisonné depuis quatre ans sans jugement, et accusé depuis 2013 de chercher à déstabiliser le régime turc.

Sept des dix pays visés par Erdogan font partie de l’Otan et sont donc des alliés de la Turquie. Pourquoi s’en prend-il aussi frontalement à eux ?

Didier Billon : Les dix font partie de l’OCDE, six sont dans l’UE, et cinq sont des partenaires clés au niveau économique pour la Turquie. Erdogan veut frapper très fort. Aujourd’hui, il est dans situation de politique intérieure assez compliquée, les sondages indiquent tous des intentions de votes autour de 30%, or la présidentielle a eu lieu il y a deux ans en Turquie. Cette défection de son électorat traditionnel s’explique par une situation économique très dégradée aujourd’hui. Donc tous les moyens sont bons, et encore une fois, Erdogan agite la fibre nationaliste pour tenter de ressouder son électorat. Et là, il avait un prétexte : le 18 octobre était le quatrième anniversaire de l’arrestation d’Osman Kavala. On comprend bien qu’Erdogan, prétextant qu’il y a une ingérence dans les affaires intérieures et notamment dans le cours de la justice turque, essaye de faire feu de tout bois pour ressouder son électorat, mais cela n’a aucun rapport avec la réalité de la justice turque.

Quelles seraient les conséquences de ce renvoi de dix ambassadeurs avec qui la Turquie collabore au quotidien ?

En termes diplomatiques, en général, la réponse est la symétrie. Les ambassadeurs turcs des dix pays concernés pourraient être rappelés à Ankara. Cette crise est instrumentalisée pour des raisons de politique intérieure. Erdogan joue un jeu infiniment dangereux, parce qu’il méprise les procédures diplomatiques habituelles. Les pays concernés sont d’une importance capitale pour l’économie turque, pour ses relations politiques. C’est un jeu très risqué qu’il n’hésite pas à utiliser parce qu’il a un besoin impératif de ressouder son électorat.

Les relations sont plutôt tendues avec la France depuis plusieurs années, avec des prises de position contre Emmanuel Macron. La France est-elle un cas particulier pour Erdogan ?

C’est surtout l’année dernière, en 2020, que les relations bilatérales entre la France et la Turquie ont été considérablement dégradées, avec des invectives, quasiment des injures de part et d’autre, ce qui n’est pas digne d’une relation d’État à État. Les choses s’étaient un peu tassées, les tensions étaient moins vives, sans avoir disparues. Dans la presse turque, qui est proche du pouvoir, il y a quasi quotidiennement des attaques contre la France, donc les tensions sont encore vives, même s’il faut admette qu’elles avaient décrues depuis l’année dernière. On sent bien que le moindre prétexte peut être saisi par Erdogan pour relancer un climat de tension entre les deux pays, et plus largement, avec les autres pays concernés

Turquie : de plus en plus loin de l’OTAN

Turquie : de plus en plus loin de l’OTAN

Les relations compliquées avec Moscou, qui maintient une attitude provocatrice, et Ankara, qui reste dans une politique stratégique ambivalente, sont un sujet délicat, avant le sommet de l’OTAN le 14 juin, explique, dans une tribune au « Monde », Marc Pierini, ancien ambassadeur de l’Union européenne en Turquie.

Tribune. 

 

Le prochain sommet de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord [OTAN], le 14 juin à Bruxelles, est crucial pour l’Alliance atlantique : si Joe Biden apporte un ton plus constructif dans les discussions, il n’en reste pas moins que l’organisation est confrontée à une posture provocatrice de la Russie et à une politique plus qu’ambivalente de la Turquie qui, elle, souhaite se situer à égale distance de l’Alliance et de Moscou.

La cohésion de l’OTAN est mise à rude épreuve. Le sommet du 14 juin, doublé d’un sommet Union européenne – Etats-Unis le lendemain, sera, au moins sur la forme, un immense soulagement pour les dirigeants européens par rapport aux quatre années écoulées : les Etats-Unis, tout en restant fermes quant à leurs intérêts économiques et au partage du fardeau au sein de l’OTAN, ne vont plus agir sur le mode impulsif cher à Donald Trump.

Par-delà la réaffirmation de la force de la relation transatlantique, le plat de résistance du sommet de Bruxelles sera assurément la relation avec la Russie, dont la politique étrangère est articulée sur la perception aiguë d’un « encerclement » de la part de l’OTAN. Dans ce contexte délicat, l’Alliance devra aussi tenter de rationaliser le comportement de la Turquie au cours des deux dernières années. Dans un style agressif, la Turquie a agi en Syrie, en Libye et en Méditerranée orientale, de manière unilatérale, sans concertation avec ses partenaires transatlantiques. Bien plus fondamentalement, au prétexte du refus de Washington de partager la technologie de ses missiles Patriot, la Turquie a acquis et déployé des systèmes russes antimissiles S-400, créant ainsi une situation hors norme au sein de l’Alliance.

Certes, le discours politique turc autour de ce déploiement est bien rodé : le monde a changé avec la chute de l’Union soviétique, la Turquie est montée en puissance économiquement et militairement, elle ne peut donc plus se satisfaire d’être liée uniquement à la communauté transatlantique. En d’autres termes, l’objectif d’Ankara serait de parvenir à une position équidistante des Etats-Unis, de l’Union européenne, de la Russie et de la Chine, tout en exploitant au mieux les images attendues de la rencontre Erdogan-Biden, en marge du sommet de l’OTAN.

Vue depuis l’OTAN, la réalité est plus complexe. Tout d’abord, l’armée de l’air turque se trouvera scindée en deux. Ses forces conventionnelles (notamment ses 245 chasseurs-bombardiers F-16) sont reliées opérationnellement à l’OTAN, mais sa défense antimissile (les S-400, par définition déconnectés des mécanismes de l’OTAN) restera dépendante de Moscou pour son entretien, et posera donc un inextricable problème d’accès de la Russie à des données concernant les forces alliées.

Mieux faire face à la Turquie

Mieux faire face à la Turquie

«Face à la Turquie, la solidarité européenne ne doit pas manquer à la Grèce et à Chypre». Par  Arnaud Danjean, Jean-Dominique Giuliani, Esteban Gonzalez-Pons et Zeljana Zovko

Arnaud Danjean est député européen (LR- PPE), Jean-Dominique Giuliani président de la Fondation Robert-Schuman, Esteban Gonzalez-Pons député européen espagnol (PP- PPE) et Zeljana Zovko députée européenne croate (HDZ – PPE).

 

Nous sommes entrés dans une ère nouvelle des relations internationales, dans laquelle les rapports de force entre les nations s’expriment de plus en plus brutalement et de façon décomplexée. Dans ce contexte de durcissement, perceptible dans son voisinage immédiat, l’Europe doit changer de posture. De puissants voisins tentent d’asseoir des zones d’influence exclusive, en pratiquant la politique du fait accompli au mépris du droit international et des accords multilatéraux passés.

Pacifique par essence, l’Union européenne, qui s’éveille lentement au réalisme machiavélien, apprend difficilement à défendre ses frontières. Ceux des Etats membres, les plus exposées aux provocations, qui gardent ses limites extérieures, devraient pouvoir compter sur la solidarité de tous. Les traités l’affirment et l’exigent ; le bon sens le commande.

Au nord-est de l’Europe, la dissuasion est assumée collectivement, en large partie par des Etats européens, sous l’égide de l’Otan. Mais ce qui est valable d’un côté du continent ne semble plus aussi évident au sud-est de l’Europe, en Méditerranée orientale, où la Grèce et Chypre, pourtant membres à part entière de l’Union européenne, n’ont pas pu compter sur une pleine solidarité européenne lorsque la Turquie s’est livrée, de façons répétées, à de très dangereuses provocations. Incursion dans des espaces maritimes et aériens grecs, forages illégaux en zones contestées, violation d’embargo sur les armes à destination de la Libye, instrumentalisation des flux migratoires aux frontières grecques terrestres et maritimes… Le régime turc, avec une rhétorique révisionniste assumée, a déployé toute la panoplie des actions décomplexées par lesquelles une puissance régionale s’affirme contre les équilibres politiques et juridiques patiemment bâtis depuis des décennies pour préserver la stabilité dans ces confins stratégiques de l’Europe.

La France a été la seule à manifester concrètement son soutien à la Grèce, mobilisant des moyens militaires à ses côtés, prenant ainsi des risques diplomatiques. Ses autres partenaires n’ont pas eu le réflexe de solidarité qu’on aurait pu attendre de membres de l’Union. Solidarité au nord, démission au sud !

«La faiblesse de certaines capitales européennes prépare la soumission aux faits accomplis des nouveaux autocrates, pour lesquels les médiations ne sont que des processus sans fin leur permettant de figer les avantages acquis»

Bien plus, certaines capitales européennes, et pas des moindres, ont proposé de se poser en « médiateurs ». Une chose – parfaitement légitime et cela a d’ailleurs toujours été l’approche du gouvernement grec de Mitsotakis – est de privilégier dialogue et négociations, une autre est de se placer à équidistance entre un partenaire auquel nous devons solidarité et un Etat tiers violant délibérément des règles auxquelles nous souscrivons pourtant sans réserves.

Maigre secours. Quelles que soient les raisons de cette faiblesse (crainte des réactions de la communauté turque implantée dans le pays, « neutralité » à l’intérieur de l’Otan plus forte que solidarité européenne, aversion à l’usage de la force ou, plus grave, reconnaissance du bien-fondé de certaines revendications), elle traduit une démission inacceptable et même une violation de l’esprit des traités. Elle prépare la soumission aux faits accomplis des nouveaux autocrates, pour lesquels les médiations ne sont que des processus sans fin leur permettant de figer les avantages acquis.

Alors que l’Union européenne et ses Etats membres entendent renforcer leur capacité d’action commune notamment dans l’Indo-Pacifique ou en Afrique, il est pour le moins incongru, choquant et irresponsable que la solidarité européenne soit mise à mal aux frontières même d’Etats européens, en Méditerranée orientale, à nos portes ! Que l’on soit souverainiste ou fédéraliste, préoccupé par les menaces à l’est ou plus enclin à regarder vers le sud, la solidarité européenne, s’appuyant sur la détermination diplomatique et, le cas échéant, sur la démonstration de force plus robuste, est une condition essentielle de la survie même de l’Europe dans le monde tel qu’il se façonne sous nos yeux. L’invocation seule des vertus du multilatéralisme et la nostalgie du monde (soi-disant) « ordonné » d’avant ne sont que d’un maigre secours face aux enjeux de puissances auxquels les Etats européens, individuellement, et l’Europe, collectivement, sont confrontés.

Arnaud Danjean est député européen (LR- PPE), Jean-Dominique Giuliani président de la Fondation Robert-Schuman, Esteban Gonzalez-Pons député européen espagnol (PP- PPE) et Zeljana Zovko députée européenne croate (HDZ – PPE).

Purges chez les militaires en Turquie

Purges chez les militaires en Turquie

500 personnes vient d’être arrêtées en Turquie essentiellement des militaires. Cette purge est lancée au moment où le régime turc essuie revers sur revers. Economiques, avec une flambée de l’inflation et la dépréciation de la devise en raison d’une politique monétaire jugée aberrante par les investisseurs . Et diplomatique, au vu d’un isolement croissant, Ankara n’ayant plus guère que Pékin comme allié en ce moment. Washington, allié de longue date, vient d’infliger un camouflet à Recep Tayyip Erdogan, avec la reconnaissance par Joe Biden du génocide arménien de 1915-1917, une première.

La justice turque a lancé ce lundi matin une énième purge de personnes accusées de complicité avec les auteurs de la tentative de coup d’Etat de juillet 2016. Ont été arrêtées, selon l’agence Anadolu, 532 personnes, dont 459 issues des rangs de l’armée, soupçonnées d’avoir des liens avec la confrérie Gülen. Cette dernière est accusée par le président turc, Recep Tayyip Erdogan, d’avoir fomenté ce putsch qui avait avorté grâce à la loyauté d’une partie de l’armée.

Depuis juillet 2016, selon un décompte dressé par l’ONG Turkish Purge, environ 80.000 personnes ont été arrêtées et sont en attente de jugement, 150.000 fonctionnaires, dont 4.000 juges et 3.000 universitaires ont été limogés ou suspendus, 20.000 militaires révoqués de l’armée, 3.000 écoles et une centaine des médias fermés. Avec 320 journalistes emprisonnés, la Turquie est numéro deux mondial en matière de répression de la presse, derrière la Chine.

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