Russie « un système totalitaire » (Pougatchev)
Le régime russe est »totalitaire » d’après un ’ex-oligarque russe Sergueï Pougatchev, ancien conseiller de Boris Eltsine puis de Vladimir Poutine (interview JDD).
. Pour l’ex-oligarque, le régime de Moscou oeuvre pour la chute de l’Union européenne et transforme également ses citoyens en esclaves d’un système verrouillé à plusieurs tours.
Emmanuel Macron a-t-il raison de rencontrer Vladimir Poutine lundi?
C’est une erreur de le rencontrer maintenant et dans un format bilatéral plutôt qu’avec la chancelière allemande, Angela Merkel, et le président ukrainien, Petro Porochenko, dans le format Normandie [quatuor diplomatique composé de l’Allemagne, de la France, de l’Ukraine et de la Russie] mis en place sous la présidence de François Hollande pour le règlement de la crise en Ukraine. La tentation d’échanger avec des dictateurs a toujours existé : il suffit de se souvenir du colonel Kadhafi. Mais ce genre de procédé ne produit pas les résultats espérés, surtout si on envisage une négociation avec Vladimir Poutine, qui ne tient jamais ses engagements. Regardez les accords de Minsk sur l’Ukraine, qu’il sabote et utilise comme objet de chantage à l’encontre de l’Union européenne…
Comment qualifieriez-vous la Russie de Vladimir Poutine aujourd’hui?
Ce système de gouvernance est autoritaire, voire totalitaire. Avec la concentration dans ses mains d’un pouvoir sans limite, il a depuis longtemps transformé les citoyens russes en esclaves sans droit de vote. Actuellement, l’atmosphère en Russie est irrespirable, y compris dans la sphère culturelle, puisque Macron et Poutine parleront demain de culture.
La France doit-elle coopérer avec Moscou contre le terrorisme?
Les positions de Poutine ne sont pas dirigées contre le terrorisme : c’est lui-même qui a lancé la guerre avec l’Ukraine, où les troupes russes sont impliquées, alors que plus de 10.000 personnes sont déjà décédées dans ce conflit. C’est lui qui a annexé la Crimée de force. En Syrie, il se bat pour que le président Bachar el-Assad conserve le pouvoir à n’importe quel prix, alors même que sont ciblés des civils, des organisations humanitaires, des hôpitaux. L’arrivée de Poutine en 2000 et son maintien au pouvoir ont eu lieu sous les auspices d’un accroissement du terrorisme. C’est au cours de son premier mandat présidentiel que les actes terroristes majeurs ont eu lieu (explosions d’immeubles, la prise d’otages lors de la comédie musicale Nord-Ost, la prise d’otages et le massacre dans l’école de Beslan…) Encore aujourd’hui, les véritables motifs et les conditions de ces événements n’ont pas été rendus publics, alors qu’il y a des témoins de ces événements et des auteurs de ces attentats, qui n’ont pas été inquiétés.
La Maison-Blanche a exclu vendredi d’alléger les sanctions visant la Russie. Les Européens devraient les reconduire le 22 juin. Est-ce une bonne décision?
C’est une très bonne chose, car Poutine est clairement contre l’Union européenne. Pourquoi croyez-vous qu’il s’est immiscé dans l’élection présidentielle française et que le Kremlin a financé directement le Front national de Marine Le Pen – un fait sans précédent pour la France? Pour que l’UE s’effondre.
Dans quel état est l’économie russe aujourd’hui?
Il n’y a qu’un seul homme d’affaires aujourd’hui en Russie : c’est Poutine. En raison de sa politique agressive, l’économie russe se trouve dans un état terrible, au plus bas depuis la chute de l’URSS. En dix-sept ans à la tête du pays, il ne s’est pas contenté d’usurper le pouvoir : il a également placé sous sa coupe toute l’économie. Les entreprises dans les secteurs qui fonctionnent encore, essentiellement l’énergie, le pétrole et l’extraction gazière, Poutine les a partagées avec ses amis, principalement des anciens du KGB, tout en restant le bénéficiaire final. Les opposants comme Alexeï Navalny essaient bien de pousser la population à manifester pour ses droits. Mais les Russes ne sont pas près de s’opposer à Poutine.
Comment se portent les relations économiques et commerciales entre la France et la Russie?
Les échanges commerciaux s’élèvent à environ 11 milliards d’euros, ce qui est ridiculement peu pour un PIB français de plus de 2 200 milliards d’euros. J’aimerais néanmoins que le Président Macron prenne la peine de se pencher sur la sécurité des actifs des rares investisseurs français présents en Russie qui, si l’on suit mon propre exemple, encourent des risques énormes, comme les groupes Auchan, Danone, Renault, Total.
Imaginez-vous jouer un rôle dans le futur de la Russie?
Non, car je ne suis plus citoyen russe. Je suis maintenant citoyen français.