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Thales et Airbus : 70 % du marché des satellites

Thales et Airbus : 70 % du marché des satellites

Sur un marché très concurrencé et très pointu ,71% de parts de marché ont été emportés par les sociétés Airbus et Thales. Cette performance commerciale souligne une nouvelle fois l’excellence de la technologie des deux constructeurs français soutenus par la France (CNES) et l’Europe (ESA). Notamment la technologie des satellites de télécoms entièrement électriques et aussi reconfigurables en orbite.

Au total, les commandes de satellites télécoms (marché ouvert et fermé) se sont élevées en 2021 à seulement 13 satellites de télécoms. Un marché estimé à un peu plus de 1,3 milliard d’euros. Loin des commandes des années 2014 et 2015 (plus de 20 satellites commandés) ou encore 2016 (plus de 15).

Par ailleurs, la  Commission européenne a annoncé mercredi avoir attribué deux contrats portant sur la conception des satellites Galileo de seconde génération à Airbus Defense and Space, une division du groupe aéronautique Airbus, et à Thales Alenia Space, coentreprise du groupe français d’électronique Thales et de l’industriel italien Leonardo.

Le montant total de ces deux contrats, de six satellites chacun, s’élève à 1,47 milliard d’euros, a indiqué la Commission européenne dans un communiqué.

« La Commission lance ainsi la deuxième génération de Galileo, le système européen de positionnement par satellite », a indiqué l’exécutif européen. La Commission européenne a précisé que la mise en orbite de ces premiers satellites de seconde génération était prévue pour la fin 2024.

Emissions CO2 : « Le numérique comme l’ aérien » (Patrice Caine, Thales)

Emissions CO2 : « Le numérique comme l’ aérien » (Patrice Caine, Thales)

PDG de Thales Patrice interview accordée à La Tribune explique que le numérique par rapport aux émissions de CO2 va connaître une situation proche de celle de l’aérien.

 

 

Thales  a présenté la stratégie renforcée du groupe en matière ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance). Quelles sont les grandes lignes de cette ambition ?

PATRICE CAINE - Nous avons dévoilé mardi dernier à nos investisseurs notre nouvelle stratégie en matière de critères ESG. Nous nous sommes fixé des objectifs chiffrés, notamment sur des critères importants comme les émissions de CO2 générées par Thales. Comment le groupe veut aller plus loin et plus vite sur la réduction de ses émissions de CO2 issues directement de son activité et de celle de ses sous-traitants ? Aujourd’hui, nous sommes capables d’atteindre un objectif de réduction de 35 % de nos émissions dès 2023, et non plus 20 %. Nous avons déjà dépassé l’objectif que nous nous étions fixés pour 2023 et avons décidé d’accélérer. Nous sommes aussi mobilisés pour réduire nos émissions de CO2 de 50 % en 2030 (plutôt que de 40%). Enfin, nous nous sommes donné un objectif de neutralité carbone « net zéro » en 2040. Cet objectif est tout à fait nouveau. Thales accélère donc pour réduire plus vite que prévu son empreinte carbone. Nous avons également présenté des indicateurs ESG très importants relatifs à l’environnement, l’inclusion, avec notamment la féminisation des instances dirigeantes, la sécurité au travail et les questions d’éthique, notamment dans le numérique.

C’est-à-dire ?

Nous avons rendu publique une charte éthique du numérique mûrement réfléchie. D’autres groupes ont commencé à s’en doter, comme IBM et Capgemini par exemple. Il nous est apparu important de réfléchir collectivement et avec humilité à ce sujet afin de donner un cadre de référence, un guide pour nos équipes travaillant sur ces technologies numériques. Pourquoi maintenant ? Parce que ces technologies, comme l’Intelligence artificielle, le big data ou les objets connectés, changent en profondeur les organisations et les modes de collaboration. Elles ont aussi soulevé un certain nombre de questions, comme la place de l’humain ou encore les biais inconscients générés par certains algorithmes. Nous avons fait le choix d’aborder ces sujets de manière proactive pour affirmer que les systèmes et produits que nous concevons doivent à tout moment permettre un dialogue avec l’humain, être résilients et sécurisés et prendre en compte l’impérieuse nécessité de préserver notre environnement.

Pourquoi avez-vous présenté Thales sous cet angle ?

Cela nous paraissait plus original ou, en tout cas, plus nouveau dans notre dialogue avec les investisseurs : présenter nos activités à travers les grands défis sociétaux que nos métiers abordent. Pour un groupe d’ingénierie et de tech, il est important de montrer comment, au-delà de ses réductions d’émissions de CO2, Thales peut contribuer positivement à trois grands enjeux sociétaux : rendre le monde plus sûr (questions de sécurité et de défense), plus respectueux de l’environnement et plus inclusif, plus équitable. Nous avons donc donné à nos investisseurs une autre clé de lecture des activités de Thales. C’était un moment important qui leur a montré notre action globale en termes de critères ESG, depuis les enjeux environnementaux jusqu’à notre mode de gouvernance.

Estimez-vous que cette réunion correspondait bien à ce qu’attendaient les investisseurs de Thales ?

Il y avait une demande très importante, et donc de très grosses attentes des investisseurs, également partagées en interne. Un de nos grands challenges dans les 10 ans à venir est d’être toujours plus attractif dans la « guerre des talents ». C’est devenue une réalité en France et à l’international. Pour les jeunes générations, les attentes sur ces questions ESG sont encore plus grandes et il était important pour Thales de s’exprimer, de partager ses objectifs et de montrer que notre entreprise avance. Nous allons continuer à développer ces sujets en interne mais aussi sur les campus, dans les universités, dans les grandes écoles, les écoles d’ingénieurs.

Comment Thales contribue-t-il à améliorer un monde qui doit être plus inclusif ?

Thales contribue à apporter une identité à chaque être humain sur la planète. C’est l’un des défis sociétaux majeurs : plus d’un milliard d’êtres humains vit sans identité et par conséquent sans accès aux services administratifs, à la scolarité, aux droits sociaux les plus élémentaires, aux bureaux de vote, aux voyages, etc… Lutter contre la fracture numérique relève également du champ de l’inclusion. Pendant le confinement, chacun a pu constater que la connectivité était primordiale pour toutes les familles afin de communiquer mais aussi pour suivre les cours à distance pour les enfants ou même se soigner. Mi-2022, Eutelsat mettra en service son satellite de communication Konnect VHTS produit par Thales Alenia Space et doté d’une extraordinaire puissance. Il permettra d’offrir de la connectivité partout en Europe (en France avec Orange) et de réduire la fracture numérique pour les familles qui habitent, par exemple, dans des endroits peu connectés à la campagne ou à la montagne. Nos investisseurs ne disposaient pas nécessairement de cette grille de lecture, ainsi que celle de notre contribution en matière d’environnement ou de sécurité.

Justement, comment convaincre les investisseurs dans un groupe qui est présent dans le domaine de la défense au moment où il y a un débat pour exclure l’industrie de défense des financements dits vertueux ?

Nous avons d’abord de la pédagogie à faire. Nous devons rappeler que cette industrie est probablement la plus réglementée au monde – contrairement à ce que certains propagent. Thales exporte par exemple depuis de grandes démocraties comme la France, l’Angleterre, les Etats-Unis, le Canada, l’Australie ou l’Inde. Et si nous pouvons exporter, c’est uniquement via une décision explicite d’un gouvernement, lui-même élu démocratiquement et qui décide, en responsabilité, que tel industriel exportera tel produit vers tel pays. Je ne connais pas d’industries qui soient aussi réglementées, aussi encadrées et aussi transparentes.

Mais les opposants disent que vos activités ne sont pas vertueuses ?

Il me semble majeur d’insister sur le fait qu’il n’y aura pas d’activités soutenables sur le long terme s’il n’y a pas, au préalable, des pays stables et des économies stables elles-aussi. Il faut bien considérer que la stabilité et la sécurité sont des pré-requis à la durabilité, une réalité qui est parfaitement comprise et admise par les Américains : « No Sustainability without Stability ». Les investisseurs américains estiment qu’investir dans la défense est légitimement un investissement socialement responsable.

Ce qui n’est pas du tout le cas en Europe pour l’instant…

C’est là où il faut que nous prenions part au débat en expliquant pourquoi, de notre point de vue, nous considérons que la stabilité est un des éléments fondamentaux du développement durable. L’industrie de défense est tout à fait ESG compatible, voire même au cœur de l’ESG. Les gouvernements commencent également à le dire. C’est pour cela que je reste très optimiste parce que dans la pratique, les fonds qui s’interdisent aujourd’hui d’investir dans la défense sont minoritaires. La grande majorité sont soit positifs, soit neutres, sous-entendu ils ne demandent qu’à être convaincus – « donnez-moi des arguments, expliquez-moi pourquoi cette activité de défense relève globalement de l’ESG ». Ce travail d’explication et de pédagogie doit être effectué et, dès lors qu’il le sera, la très petite minorité de fonds s’interdisant d’investir dans la défense restera minoritaire.

Pour autant, il y a un débat au sein de la Commission européenne qui n’est pas encore tranché…

L’Europe, contrairement aux Etats-Unis, a un regard plus ambivalent sur ces questions. Nous devons sortir de cette ambivalence qui est illustrée par le fait que cette même Commission considère aujourd’hui que les questions de souveraineté et, donc, de défense, sont importantes au point même d’y consacrer 8 milliards d’euros avec la mise en place du Fond européen de Défense. Sortir de cette ambivalence est tout à fait possible. Maintenant, il faut que chacun s’exprime. D’ailleurs, le gouvernement français le fait pour ramener de la rationalité dans ce débat et faire en sorte, qu’au bout du compte, les activités de défense et de sécurité soient bien considérées pour ce qu’elles sont : un contributeur important aux questions d’ESG sous l’angle de la stabilité. Stabilité des pays, stabilité des économies, stabilité de la planète.

Vos objectifs de décarbonation sont très ambitieux. Comment les investisseurs peuvent-ils vous faire confiance ?

Nous avons atteint plus vite que prévu nos objectifs de 2023. Nous devons continuer à nous challenger pour aller plus loin. Nous allons nous engager dans une démarche de certification auprès de SBTi (Science-Based Target Initiative) de manière à confronter nos résultats à une vision extérieure. Nous sommes sereins. Car nous utilisons d’ores et déjà toutes les méthodologies SBTi lorsque nous nous auto-évaluons. Bref, pour boucler la boucle, nous nous engageons dans un processus de certification unanimement reconnu pour achever de convaincre les sceptiques que notre démarche est sérieuse.

Comment pouvez-vous réduire significativement les émissions de carbone dans la filière aéronautique ?

Au-delà de l’accélération de la réduction de nos propres émissions opérationnelles, Thales peut avoir un impact majeur dans les émissions évitées, à travers ce que certains appellent le « Scope 4 », une catégorisation toujours en discussion. Nous travaillons par exemple sur l’optimisation des trajectoires des avions, en connectant le « cerveau » de l’avion (Flight Management System) au système de gestion du trafic aérien, deux domaines dans lesquels Thales dispose d’un leadership mondial.

L’impact est potentiellement considérable avec des réductions de l’ordre de 10% des émissions de CO2 réalisables à court terme. Travailler sur les émissions évitées a beaucoup plus de sens pour Thales qui peut contribuer, grâce à ses technologies embarquées, à réduire les émissions de ses clients. C’est également le cas quand le groupe travaille sur des algorithmes dits frugaux. Nous estimons qu’il existe un gisement inexploité qui est considérable. Le numérique va probablement connaître la même tempête que le transport aérien. Chacun réalise aujourd’hui qu’utiliser ordinateurs et smartphones et consommer tous azimuts Netflix ou GeForce Now contribuent au réchauffement climatique.

Dans le domaine du numérique, quelles sont les pistes pour réduire les émissions de carbone ?

Je peux vous donner plusieurs leviers. Le premier passe par l’utilisation la plus généralisée possible des algorithmes dits frugaux. Un algorithme similaire produit le même résultat avec la même efficacité, mais en utilisant moins de capacités de calculs. Cette piste fait l’objet de sujets de recherche et de développement tout à fait concrets.

Deuxième levier : le smart data plutôt que le big data. Qu’est-ce que cela veut dire ? Aujourd’hui, les algorithmes big data ingurgitent des quantités de données de manière massive. A-t-on finalement besoin de faire ingérer toutes ces données à un algorithme plutôt que de sélectionner le juste besoin afin de consommer le moins possible de capacités de calculs. Troisième levier, qui me semble très prometteur, le Far Edge Computing : faire en sorte que les algorithmes traitent la donnée au plus près de là où elle est créée. Par exemple, un pod optronique installé sous le Rafale va récupérer énormément d’images. Ne faut-il pas déjà les traiter ou les prétraiter à bord du pod plutôt que d’envoyer toutes les données brutes à Balard [au ministère des Armées] pour qu’elles y soient traitées ? Cela éviterait de mobiliser tout un tas de capacités de calcul et de communication qui sont consommatrices d’énergie et donc émettrices de CO2. C’est ce qu’on appelle le « Far Edge computing » qui permet de traiter la donnée au plus près des capteurs. Il y a, là encore, des gains qui ne sont pas négligeables.

Et le quatrième levier ?

Il est autant numérique que hardware. Thales travaille sur des processeurs dits neuromorphiques, qui miment le comportement du cerveau. Une de leurs caractéristiques est qu’ils sont potentiellement dix, cent, mille fois plus efficaces en termes de consommation énergétique que les processeurs standards. Ils seront opérationnels à un horizon de 5 à 10 ans. Dans 10 ans, ces processeurs permettront de réduire les émissions de CO2 à capacité de calcul équivalente.

 

 

Les perspectives de l’intelligence artificielle dans les transports (Patrice Caine, PDG de Thales)

Les perspectives de l’intelligence artificielle dans les transports (Patrice Caine, PDG de Thales)

 

Une interview de Patrice Caine, PDG de Thales dans la Tribune sur les perspectives de l’intelligence artificielle dans les transports et qui ne cache pas cependant la vulnérabilité de certains systèmes

 

Quelles pourraient être les nouvelles frontières dans l’aérospatiale et le transport terrestre grâce à l’arrivée de l’intelligence artificielle (IA) ?
PATRICE CAINE -
 Des cas d’usage faisant appel à ces technologies peut être déployés dès à présent par les compagnies aériennes. Celles-ci sont de grandes entreprises, qui disposent d’une supply chain, de nombreux salariés, des ERP [progiciel de gestion intégrée, ndlr] et qui intensifient la numérisation de leur exploitation. Un des éléments clés de cette digitalisation est l’utilisation de l’IA. Par exemple, Thales propose d’ores et déjà de tels cas d’usage aux compagnies aériennes et aux opérateurs de transport, comme dans le cas du métro de Londres ou de Singapour, ou encore pour la SNCF ou la Deutsche Bahn. La prochaine étape sera l’utilisation de l’IA dans les avions, les trains, les métros, ou encore les voitures. La question de savoir jusqu’où on utilise l’IA est en discussion. En d’autres termes, quel degré d’autonomie vise-t-on ? Le monde du transport terrestre est un peu moins complexe que l’aérien. Pour le transport terrestre, il s’agit d’un monde à deux dimensions, voire une seule dans le cas des trains ou des métros. Donner de l’autonomie à ces objets évoluant dans un monde à une ou deux dimensions est moins complexe que dans un monde à trois dimensions comme pour un avion.

Est-ce possible aujourd’hui dans les transports terrestres ?
La technologie a bien progressé. Thales est passé du stade de laboratoire il y a deux à trois ans, à la preuve de concept, par exemple avec le métro de New York. L’automne dernier, pour la première fois, Thales a équipé une rame de métro de multiples capteurs pour lui permettre de se repérer dans l’espace sans avoir besoin de balises sur la voie ferrée. Et nous avons mis des ordinateurs dans le poste de pilotage, avec des algorithmes utilisant de l’IA, pour permettre à la rame de métro de se repérer et de prendre des décisions par elle-même face à des cas de figure imprévus. Cela a permis de voir comment la machine réagissait à un événement qui n’était pas programmé. Et cela a bien fonctionné. Il y a un vrai bénéfice économique lié à l’utilisation de ces technologies, l’économie n’est pas vraiment liée à la présence humaine ou non dans les rames de métro. D’ailleurs, dans les métros automatiques, les opérateurs de transport qui ont gardé la présence humaine, l’ont fait principalement à des fins psychologiques, car en réalité l’homme ne pilote plus ces métros. Le vrai bénéfice des trains ou des métros autonomes sera d’être encore plus efficaces, mais aussi plus économes en pouvant, par exemple, se passer de tous les équipements de positionnement à la voie, les fameuses balises ou même de la signalisation à la voie.

N’aurons-nous pas besoin de redondance pour des systèmes autonomes ?
Pour passer à l’échelle industrielle, il faut faire la démonstration que cette technologie est « safety critical ». Pour cela, on a besoin notamment de redondance, comme dans le secteur aéronautique, en utilisant par exemple deux chaînes de calcul en parallèle comme avec les radioaltimètres qui peuvent être jusqu’à trois exemplaires dans un même appareil afin d’assurer la concordance des informations. Néanmoins, dans l’aérien, c’est encore plus compliqué. Je n’irais pas jusqu’à dire que les normes « safety » [de sécurité] sont plus drastiques, mais l’environnement est différent. Les avionneurs, qui ont une vue d’ensemble du sujet, travaillent notamment sur la notion de SPO (Single Pilot Operation). La question qui se pose n’est pas d’avoir un avion sans pilote et totalement autonome, mais plutôt de passer un jour de deux pilotes humains à un seul pilote humain assisté d’un pilote à base d’intelligence artificielle.

À quel horizon les compagnies aériennes pourront-elles proposer des avions avec un seul pilote assisté par la machine et l’IA ?
C’est une question pour les constructeurs et les compagnies aériennes. Thales ne maîtrise qu’une partie de ce grand défi technologique qui concerne toute la chaîne de pilotage. De plus, ce sont des questions réglementées. C’est bien le constructeur qui dira « je sais faire ou pas », la compagnie aérienne « j’en ai besoin ou pas », et le régulateur « je certifie ou pas ».

Aujourd’hui, est-il possible de faire voler des drones autonomes ?
Est-on capable de rendre les drones autonomes ? Pas encore. Mais cela est imaginable à l’avenir. Là encore, il faudra que tout cela soit conforme aux règles de sécurité. Aujourd’hui, un drone non piloté est automatique et non pas autonome : il fait juste ce qu’on lui a demandé de faire avant qu’il décolle, typiquement en lui indiquant les coordonnées GPS pour définir un parcours à suivre. Ceci rend son pilotage automatique, mais pas autonome.

Du point de vue de Thales, l’IA est-elle déjà mature pour des applications dans le monde réel ?
La technologie est mature pour tout un tas d’application et de cas d’usage. La question est de savoir à quel rythme les clients seront prêts à l’utiliser dans les systèmes, et à quelle vitesse les clients et les utilisateurs seront prêts à l’accepter. Par exemple, pour les compagnies aériennes, le passager peut se poser légitimement la question de la sécurité. Autre exemple, en matière de défense se posent des questions de responsabilité, d’éthique voire de morale. Pour autant, il y a des sujets qui ne posent pas vraiment de problème éthique : c’est le cas de l’auto-apprentissage, une forme d’autonomie-amont, qui permet aux objets d’apprendre par eux-mêmes. C’est le cas des capteurs en général, par exemple les radars, les sonars, ou tout autre capteur électronique, qui peuvent acquérir une autonomie en matière d’apprentissage. La technologie est mature, et Thales est capable d’en faire bénéficier les systèmes qu’il développe dès lors que les questions de responsabilité et d’acceptabilité sociétale, éthique ou morale sont réunies.

Quel est le marché de l’IA dans l’aérospatial ?
L’IA n’est pas un produit ou un marché, c’est une technologie qui permet de créer de la différentiation. Cela permet de faire de l’avionique, des systèmes de contrôle aérien, avec des services supplémentaires plus efficaces et plus intelligents. On ne vend pas de l’IA à proprement parler, on l’embarque dans nos produits ou solutions pour en décupler les capacités. En matière de services de cybersécurité, quand on injecte des algorithmes IA dans les sondes de supervision des réseaux informatiques, on vend toujours des sondes, mais elles sont encore plus performantes grâce à l’IA.

Peut-on ou pourra-t-on certifier l’IA ? Et donc contrôler l’IA ?
C’est une question très sérieuse sur laquelle nous travaillons. Nous sommes pour le moment à une étape intermédiaire, à savoir la mise au point de l’IA explicable. Aujourd’hui, la branche de l’IA qui repose sur l’apprentissage par les données [data based AI] fait appel essentiellement au machine learning ; c’est une IA dite « boîte noire ». On ne saura jamais expliquer pourquoi elle arrive au résultat, mais on constate que ce résultat est exact dans 99,99 % des cas. C’est le cas de la reconnaissance faciale. Mais lorsqu’il lui arrive de se tromper, on ne sait pas l’expliquer. La première étape pour arriver à une IA explicable fera très vraisemblablement appel à de l’IA à base d’apprentissage par les données et à de l’IA à base d’apprentissage par les modèles. Cette hybridation de ces deux types d’IA devrait permettre de produire des algorithmes permettant d’expliquer les résultats de l’IA. On y travaille et on a bon espoir d’y arriver. La deuxième étape, c’est l’IA certifiable. Les grands experts disent que cela prendra sans doute des années et qu’on n’est pas sûr d’y arriver, mais on cherche. Si on y arrive, on pourra l’utiliser de manière plus extensive. Et la plupart des réticences seront levées. On sera dans un autre univers. Enfin, contrôler l’IA, c’est encore autre chose. L’IA produit un résultat. Ce qu’on en fait derrière peut se faire de manière automatique ou en gardant le contrôle.

Est-il possible de développer un cloud souverain à l’échelle de la France ou de l’Europe ?
Dans le champ des technologies numériques, Thales est utilisateur du cloud et pas un fournisseur de cloud en tant que tel. On constate qu’il y a des solutions particulièrement efficaces comme Azure de Microsoft ou AWS d’Amazon. Ces produits mettent à disposition des micro-services, des composants logiciels, qui permettent aux développeurs qui les utilisent d’aller plus vite pour créer leurs propres applications. Le cloud est devenu un élément important de compétitivité et d’efficacité pour les équipes d’ingénierie afin de gagner en temps dans leurs développements. Il sera sans doute très difficile pour des acteurs différents de ceux cités de fournir autant de micro-services. Toutes les semaines Azure et AWS mettent à jour leurs micro-services en en proposant de meilleurs et en y ajoutant de nouveaux.

Mais comment peut-on se protéger de lois extraterritoriales américaines comme le Cloud Act ?
Pour nos activités, on utilise soit du cloud public, soit du cloud privé ou encore nos propres data centers selon la sensibilité des applications et des données. Mais Thales est surtout fournisseur de solutions pour tous ceux qui veulent utiliser le cloud tout en protégeant leurs données. Par exemple, on va systématiquement chiffrer les données avant qu’elles soient stockées dans le Cloud et offrir un service de type « Bring your own key », permettant de créer des clés d’accès personnalisées. La plupart des industriels, qui offrent des services de cloud, proposent des « packages » pour s’occuper de tout : hébergement des données et chiffrage de celles-ci. Cela marche bien pour les industriels qui n’ont pas de sujets de confidentialité. Mais pour les acteurs qui veulent dissocier fournisseur d’hébergement et fournisseur de chiffrement pour des raisons de sécurité et de confidentialité ou d’autres raisons, il est possible de le faire. Thales propose des offres de protection des données en complément des services des hébergeurs de données dans le cloud. Est-ce possible d’avoir un cloud souverain ? Oui, c’est possible pour l’hébergement, mais il sera difficile de rattraper le niveau des acteurs américains quant aux micro-services associés, leur avance dans ce domaine est considérable.

L’affaire Huawei est-elle le début d’une guerre froide technologique ?
D’une façon générale, il s’est ouvert dans le monde de nouveaux champs de confrontation : après les champs de confrontation classiques, militaires ou diplomatiques, on observe de plus en plus une confrontation technologique. Les puissances cherchent à asseoir une domination, qui n’est plus aujourd’hui que militaire et diplomatique. Il y a aussi une course à l’armement sur le terrain technologique qui répond à une logique de puissance. Mais cela n’a-t-il pas toujours été le cas dans l’histoire ? L’invention de la roue n’a-t-elle pas permis de récolter davantage et donc de nourrir plus de personnes et d’avoir des nations plus nombreuses ? Aujourd’hui, le champ des confrontations englobe sans complexe les aspects industriels et technologiques.

De façon plus générale, faut-il craindre un cyber-Pearl Harbor ?
Personne ne le sait avec certitude mais autant s’y préparer. À notre niveau, nous faisons tout pour protéger nos clients et notre entreprise, mais il faut rester modeste. Tous les grands groupes sont attaqués quotidiennement. Il y a derrière les attaques informatiques des intérêts, qui ne sont pas uniquement économiques. On se prépare à toutes les éventualités. Mais la créativité étant sans limite, c’est un combat de tous les instants. Ceci dit, ce type de menace représente également une opportunité et un marché pour Thales. Nous aidons nos clients, les États ou les OIV [Opérateurs d'importance vitale] sur ces questions de cyberprotection. Thales se spécialise plutôt sur les solutions et les produits sachant que les clients font appel aujourd’hui à deux types d’acteurs : ceux axés sur le pur conseil et ceux axés sur les solutions.

Est-on arrivé à une vraie prise de conscience de la menace cyber ?
Le monde économique en parle de plus en plus, mais tous les acteurs n’ont pas encore mené des actions concrètes. Il y a encore un écart entre intention et action, car cela requiert des moyens, mais le sujet n’est plus ignoré. Un cap sera franchi lorsque tous les acteurs investiront suffisamment pour se protéger.

La généralisation de l’Internet des objets (IoT) augmente-t-elle les risques ?
L’IoT est un démultiplicateur du champ des possibles, mais aussi une source additionnelle de vulnérabilité. Pour Thales, c’est un champ de questionnements en interne, et d’opportunités de marché en externe. Dans notre analyse des marchés, le fait de connecter des objets à haute valeur ajoutée, comme des trains, des avions, des voitures, implique une exigence de sécurisation élevée. C’est dans ce domaine que Gemalto va nous apporter des technologies que nous n’avions pas. Cela aurait été un non-sens de vouloir les développer par nous-mêmes. Gemalto sait identifier les objets de manière très sécurisée et sait les gérer, c’est-à-dire les activer et les configurer de manière hautement sécurisée. Il propose des plateformes capables de gérer des millions d’objets de manière hautement sécurisée quant à leur identité numérique. Thales fait le reste, notamment l’exploitation et la gestion des données de mission.

L’acquisition de Gemalto par Thales amène certains observateurs à se demander si Thales va rester dans la défense. Que leur répondez-vous ?
Thales réalise 8 milliards d’euros dans la défense, sur un chiffre d’affaires total de 19 milliards en incluant l’acquisition de Gemalto – 16 milliards avant. Déduire de l’acquisition de Gemalto qu’on se désintéresse du militaire est un non-sens total. Si demain nous avions des opportunités de croissance externe dans la défense, nous les regarderions. Il y a des cycles, et en ce moment on avance plus vite en matière d’acquisition dans nos métiers civils. Mais je tiens à cette dualité défense-­civil. Il faut reconnaître que les acquisitions en matière de défense se font dans un domaine contraint, où on a besoin d’accords qui vont au-delà de celui du conseil d’administration de Thales. De mon point de vue, l’Europe de la défense ne pourra se faire que s’il y a, à un moment donné, une consolidation industrielle. Imaginer qu’on puisse le faire uniquement par de la coopération n’est pas suffisant sur le long terme. Cela renvoie à l’envie des États de pousser ou d’accompagner ce type de consolidation industrielle. Force est de constater que depuis la création d’EADS, il n’y a pas eu de très grande consolidation dans la défense.

Thales est concurrent de Naval Group, dont il est actionnaire, de MBDA dans les missiles et de Safran dans l’optronique. N’y a-t-il pas des rectifications de frontière qui s’imposent ?
Il y a tellement à faire dans le naval, un secteur où on est à la fois concepteur de senseurs/capteurs, de radars, de sonars ainsi que de CMS [Combat Management Systems] avec nos activités aux Pays-Bas. Mais nous ne sommes pas maître d’œuvre, ni plateformiste. Sur les 8 milliards d’euros d’activité que nous réalisons dans le secteur de la défense, il y a déjà énormément de projets à lancer pour améliorer ce que nous faisons déjà avant d’entamer autre chose. Thales a des activités historiques qui sont le fruit de l’héritage du groupe, comme son activité missilière à Belfast. Elle découle d’une volonté politique du Royaume-Uni. Le fait de produire des véhicules blindés en Australie est également le résultat de la volonté du gouvernement australien d’avoir ses activités hébergées par un acteur de confiance comme Thales. Notre groupe est un jardin mixte, à la française et à l’anglaise.

Thales va-t-il rester actionnaire de Naval Group ?
Oui, absolument. Nous avons apporté, à l’époque, notre activité
de CMS à Naval Group afin de consolider et renforcer l’équipe de France du naval. Devenir actionnaire de Naval Group a été, pour nous, à la fois une opération industrielle et un mouvement stratégique longuement réfléchis. Nous avons donc une stratégie de long terme avec Naval Group dans le cadre d’un partenariat industriel, technologique et capitalistique.

Quelle sera la feuille de route du nouveau président de Naval Group ?
Elle sera bien évidemment à définir avec l’État. Il faut trouver un PDG qui écrive la suite de l’histoire de Naval Group pour les dix prochaines années et qui puisse donc s’inscrire dans la durée.

Concernant les exportations, trop de compliances [règles de conformité anti-corruption] ne tuent-elles pas le business ?
Il y a des règles, il faut les appliquer, un point c’est tout. Si on les respecte, on fait du business dans certains pays ou pas. Quand on ne parvient pas à faire du business dans certains pays en respectant les règles, tant pis pour nous…

Pour Thales, le spatial reste-t-il une activité cœur de métier ?
Le spatial est au cœur de nos métiers et représente une activité importante chez Thales : Thales Alenia Space réalise environ 2,5 milliards de chiffre d’affaires. Avec Telespazio, le groupe affiche un chiffre d’affaires d’environ 3 milliards d’euros dans le spatial. Ce n’est donc pas une activité accessoire et dans ce domaine d’activité, nous avons de nombreux projets passionnants à réaliser, des projets créateurs de valeur, bien sûr. Le fait que cette activité soit au cœur de Thales n’empêche pas de travailler ou de coopérer avec d’autres acteurs. La meilleure façon de répondre à un marché exigeant comme celui du spatial, a fortiori lorsqu’un tel marché est difficile et où certains acteurs renoncent, c’est de chercher à travailler de manière pragmatique avec son écosystème. D’une façon générale, nous avons une analyse lucide quelle que soit l’activité concernée. Si nous avons la conviction que nous sommes les mieux placés pour développer telle ou telle activité, nous la développons et nous y investissons de façon significative.

Quelle serait votre position si l’État proposait une consolidation dans le spatial entre Thales et Airbus ?
Comme vous le savez, je ne commente jamais de tels sujets. Ce n’est pas parce que le marché est difficile pour tout le monde en ce moment qu’il faut immédiatement se poser une telle question.

Les géants américains ont des projets pour aller sur Mars, contrairement aux groupes européens. Ne manque-t-il pas des projets emblématiques en Europe pour entraîner le grand public ?
On est déjà allé sur Mars avec ExoMars en 2015. L’ESA l’a fait. L’Europe, qui a été capable de créer l’Agence spatiale européenne (ESA), consacre des sommes importantes à l’espace. La question que l’Europe doit se poser est : comment maintenir une industrie aérospatiale au plus haut niveau capable de rivaliser avec la Chine et les États-Unis ? Aujourd’hui, c’est encore le cas. Par exemple, les Chinois sont encore demandeurs de coopérer avec les Européens : c’est le signe qu’ils ne maîtrisent pas encore tout par eux-mêmes. Quant à la question de l’incarnation en Europe du rêve de la conquête spatiale, peut-être manque-t-on effectivement de fortes personnalités emblématiques, comme Elon Musk ou Jeff Bezos aux États-Unis ?

Pourquoi l’Europe ne veut pas dire qu’elle veut aller coloniser Mars ?
Le spatial est un secteur qui concerne aussi bien la science que le commercial. Aller sur Mars relève difficilement d’une logique de business plan, et les clients, ou candidats au voyage, ne semblent pas très nombreux. C’est peut-être important d’aller explorer ou coloniser Mars, mais ceci relève de la mission scientifique ; ce n’est pas un business pour un acteur industriel comme Thales. Peut-être a-t-on un discours trop réaliste ? Les entrepreneurs qui annoncent vouloir le faire, le font avec leur argent et ils assument leurs rêves. Force est de constater qu’en Europe, nous n’avons pas bénéficié de l’émergence d’entrepreneurs milliardaires emblématiques du numérique.

La France est sur le point de changer de doctrine dans l’espace. Quelle est votre analyse sur ce champ de confrontations ?
Nous avons soumis des idées au ministère des Armées, par exemple dans le domaine de la surveillance de l’espace depuis l’espace [SSA, Space Situational Awarness]. Nous pouvons aider notre pays et l’Europe, à se doter de capacités nouvelles au service de notre défense autonome des capacités tierces. Maintenant, c’est une décision qui appartient au pouvoir politique. Ce qui est relativement nouveau, c’est que l’espace est en train de devenir, voire est devenu, un champ de confrontations assumé, là où il ne l’était pas, ou l’était mais de manière non assumée. Un peu à l’instar de ce qui s’est passé dans le cyberespace où, avant la loi de programmation militaire du précédant quinquennat, la France ne reconnaissait pas l’attaque dans ce domaine. Depuis celle-ci, la France s’est donné la possibilité de se défendre, mais aussi d’attaquer dans le cyber­espace. Les responsables politiques assument qu’il y ait une menace et une stratégie aussi bien défensive qu’offensive.

Comment voyez-vous Thales dans dix ans ?
D’ici à trois ans, j’ai envie de poursuivre tout ce qui a été lancé : consolider Gemalto, intégrer de plus en plus de technologies pour créer de nouveaux différenciateurs et de nouvelles innovations pour nos clients. Au-delà de cette période, il s’agira de continuer de trouver des technologies de rupture pour offrir à nos clients, à nos équipes et à nos actionnaires des perspectives passionnantes au-delà de la décennie pour faire de Thales un laboratoire du monde de demain, axé sur la recherche du progrès pour tous.

Avez-vous des projets qui vous font rêver ?
Oui, et ils sont nombreux. Par exemple, le laser de haute puissance ouvre des champs fantastiques. La question, au-delà de la technologie mise au point pour ce projet ELI-NP [Extreme Light Infrastructure for Nuclear Physics] qui nous a permis de battre un record mondial avec l’émission d’une puissance incroyable de 10 pétawatt [10 millions de milliards de watts], est de savoir s’il va créer du business ou si cet outil restera un outil scientifique. Potentiellement, les applications font rêver : l’une d’elles permettrait de réduire la période de vie des éléments radioactifs. Mais ce champ d’application et de business s’adresse aux acteurs comme EDF, pas à Thales.

Autre projet à dix ans : comment va-t-on utiliser les propriétés quantiques de la matière pour ouvrir de nouveaux champs d’application ?
Le champ d’application de ces propriétés est quasiment sans limite. Nous avons communiqué sur l’utilisation de la « spintronique » [technique qui exploite la propriété quantique du spin des électrons] pour mettre au point des nano­synapses, des nano-neurones avec pour objectif final de faire baisser d’un facteur 10 ou 100 la consommation électrique des supercalculateurs. Si nous y arrivons, nous pourrons transformer l’industrie informatique et des supercalculateurs ainsi que l’utilisation de l’IA, qui est fortement consommatrice en puissance de calcul et donc très énergivore. Mais on se doit encore de rester modeste. Autre champ à l’étude sur lequel Thales a commencé à travailler : les senseurs quantiques, secteur où on peut être capable d’améliorer d’un facteur 10 à 100 - ce qui est colossal pour l’industrie - les précisions de mesure du champ magnétique, de la gravité, du champ électrique, etc. Cela ouvre des champs d’application qui sont totalement disruptifs.

Quelles peuvent être les applications de cette technologie ?
Imaginez un avion qui décollerait de Paris pour atterrir à l’aéroport de New York- JFK et perdrait ses repères extérieurs. Avec les technologies actuelles, il arriverait à destination avec une précision de 2 kilomètres. Grâce à ces technologies utilisant les propriétés quantiques de la matière, il y parviendrait avec une précision de 20 mètres, ce qui lui permettrait de se poser sur la piste. On raisonne beaucoup défense, aéronautique, mais pour autant, l’utilisation de ces capteurs quantiques ouvre des possibilités fantastiques, notamment dans la connaissance et l’exploitation du sol et du sous-sol. On va pouvoir mesurer et détecter ce qui ne peut pas l’être par la sismique classique ou l’observation depuis le ciel ou l’espace. Par exemple, dans la défense, cela permettrait de détecter des mines sous l’eau et, in fine, de mettre l’homme en sécurité.

Ces capteurs quantiques pourraient augmenter la résilience des avions, qui auraient fait l’objet d’un brouillage du GPS ou de Galileo ?
Bien sûr, c’est un gain en précision mais aussi en résilience. Un avion pourrait devenir autonome, sans s’appuyer sur des moyens extérieurs de navigation, potentiellement vulnérables. Brouiller un signal GPS, c’est presque à la portée de tout le monde. On peut imaginer des avions dotés des capteurs quantiques pour disposer de capacités autonomes, leur permettant de se guider indépendamment du GPS. Nous travaillons aussi sur le champ des communications quantiques. C’est de la recherche-amont mais qui nous projette dans le futur au-delà de la décennie.

À quel horizon ce champ de recherches peut-il devenir un champ applicatif ?
Année après année, nous franchissons des étapes qui nous confortent dans nos choix. On a déjà fait des mesures dans nos laboratoires. Cela fonctionne dans le cadre de manipulations de labo, car on est sur des TRL [Technology Readiness Level] très bas en termes de maturité. C’est au moins à cinq ans, voire dix ans, mais aujourd’hui nous avons des pans entiers de la science qui permettent d’entrevoir des applications dans le champ industriel et économique.




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