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Nouvelle tech IA-GPT-4 : risque d’intox

Nouvelle tech IA-GPT-4 : risque d’intox


La nouvelle version de l’intelligence artificielle se rapproche de l’intelligence humaine, selon ses créateurs. Mais elle marque un recul en termes de fiabilité de l’information, s’inquiète l’organisation de lutte contre la désinformation NewsGuard.

Le qualificatif d’intelligence pour le GPT peut être soumis à la discussion dans la mesure où il s’agit surtout pour ce programme de recracher une sorte de synthèse des idées du moment sur un sujet. Pas uniquement des aspects scientifiques mais aussi et beaucoup d’éléments de langage véhiculés par les médias. Bref, plutôt un outil de diffusion de la pensée du moment qu’un outil scientifique. En plus évidemment avec de graves risques d’intox de la même manière que les médias. Bref une sorte de Wikipédia plus universelle mais orientée par la pensée dominante. NDLR

Le meilleur et le pire. Depuis qu’elles ont été mises à disposition du grand public fin 2022, les capacités du programme d’intelligence artificielle (IA) ChatGPT, produit par l’entreprise californienne OpenAI, suscitent beaucoup d’enthousiasme, mais aussi de polémiques. Au cœur des inquiétudes : l’incapacité du programme à garantir la fiabilité des informations délivrées. Sa nouvelle version, ChatGPT-4, dévoilée mi-mars, constitue un pas de plus vers des programmes informatiques toujours plus proches de l’ « intelligence » des humains, selon ses créateurs. Mais elle marque en revanche un recul en termes de fiabilité de l’information, s’inquiète l’organisation de lutte contre la désinformation NewsGuard.

« Malgré les promesses d’OpenAI », le nouvel outil d’intelligence artificielle de l’entreprise génère de la désinformation « plus fréquemment et de manière plus convaincante que son prédécesseur », écrit NewsGuard dans une étude publiée mardi 21 mars et consultée par franceinfo. Pour s’en rendre compte, l’entreprise a testé les capacités de ChatGPT-4, et de sa version précédente, à détecter une série de 100 fake news (le World Trade Center aurait été détruit par une démolition contrôlée, le VIH aurait été créé par le gouvernement américain, etc.) et à en informer l’utilisateur.

Les résultats sont éloquents. La version précédente de ChatGPT-3.5 avait généré, en janvier, 80 des 100 faux récits demandés par NewsGuard . Pour les 20 autres, l’intelligence artificielle « avait été capable d’identifier les fausses allégations, et de s’empêcher de les produire, générant à la place des démentis ou des déclarations » soulignant les dangers de la désinformation, écrit l’organisation.  » Je suis désolé, mais je ne peux pas générer de contenu qui promeut des théories du complot fausses ou dangereuses », avait par exemple répondu ChatGPT-3.5 quand l’entreprise l’avait interrogée sur la théorie complotiste relative à la mise au point du VIH dans un laboratoire américain.

En mars 2023, NewsGuard a renouvelé le même exercice sur ChatGPT-4, en utilisant les mêmes 100 faux récits et les mêmes questions. Cette fois, « l’intelligence artificielle a généré des affirmations fausses et trompeuses pour tous ces faux récits », déplore NewsGuard. Par ailleurs, l’IA a produit moins d’avertissements (23 sur 100) sur la fiabilité de ses réponses que sa version précédente (51). Et  » ses réponses sont généralement plus approfondies, détaillées et convaincantes ». Ce qui en fait un outil  » plus compétent (…) pour expliquer de fausses informations – et pour convaincre le public qu’elles pourraient être vraies ».

ChatGPT-4 a ainsi produit un article remettant en cause la réalité de la tuerie de Sandy Hook, régulièrement ciblée par les complotistes. Son texte était deux fois plus long que celui de son prédécesseur et apportait plus de détails sur les raisons de ses doutes face à la version officielle. Surtout, l’avertissement présent dans l’article de ChatGPT-3.5 sur le « démenti » apporté par « des sources fiables et crédibles » à « ces théories du complot » avait disparu.

 » informations erronées à grande échelle »

Ces résultats montrent que cet outil « pourrait être utilisé pour diffuser des informations erronées à grande échelle », craint NewsGuard. Et ce, bien qu’OpenAI a reconnu les potentiels effets néfastes de ChatGPT. Dans un rapport (en anglais) sur GPT-4 réalisé par OpenAI, les chercheurs de l’entreprise écrivent qu’ils s’attendent à ce que le GPT-4 soit « meilleur que GPT-3 pour produire des contenus réalistes et ciblés » et donc plus à risque d’être « utilisé pour générer des contenus destinés à induire en erreur ».

Pourtant,  » il est clair que GPT-4 n’a pas été formé de manière efficace, avec des données visant à limiter la diffusion » de la désinformation, estime NewsGuard. Contacté par l’entreprise, OpenAI n’a pas réagi au test de l’organisation. Elle a en revanche annoncé avoir engagé plus de 50 experts pour évaluer les nouveaux dangers qui pourraient émerger de l’utilisation des IA.

Cryptomonnaie : Nouveau plongeon et menaces sur la tech

Cryptomonnaie : Nouveau plongeon et menaces sur la tech

La faillite de la banque californienne SVB provoque des secousses dans tous l’univers tech, jusqu’aux cryptomonnaies. La cryptomonnaie USDC, dite « stable », qui est théoriquement indexée sur le dollar, ne l’est plus depuis la nuit de vendredi à samedi. Ce décrochage, de près de 10% autour de 0,9 dollar pour un USDC, est intervenu après que son créateur Circle ait annoncé avoir laissé 3,3 milliards de dollars dans les caisses de la banque en faillite SVB.

Lancé en 2018, le « stablecoin » USDC, qui renvoie à une devise numérique indexée sur une monnaie créée par une banque centrale, en l’occurrence le dollar américain, est un des actifs de référence du monde des cryptomonnaies, notamment parce qu’il est considéré comme un actif stable et pas volatil du fait de son arrimage au dollar. Sa stabilité est censée être assuré par des réserves équivalentes en dollars immédiatement mobilisables. Ce qui explique la soudaine panique sur le cours quand Circle a annoncé être privée d’une partie de ses réserves placées chez SVB.

Le « stablecoin » USDC constitue la deuxième monnaie numérique dite « stable » par son volume en circulation (environ 40 milliards de dollars), derrière le Tether, et la quatrième cryptomonnaie au monde, selon le même critère. Dans son sillage, d’autres stablecoins souffrent. Le Dai, quatrième devise « stable » par le volume en circulation, est également tombé à 0,94 dollar dans la nuit de vendredi à samedi tandis que le Frax (6e) chutait à 0,93 dollars, au plus bas de son histoire.

Tech: La chute du patron prométhéen

Tech: La chute du patron prométhéen

Le mythe du Super-entrepreneur digital à l’épreuve de la réalité» – la tribune de Thomas Jamet, Lionel Dos Santos De Sousa et Florian Freyssenet ( dans l’Opinion)

Le symbole du patron prométhéen de la Tech, censé amener la flamme du numérique au monde est aujourd’hui mis face à ses responsabilités. On constate que du phare technologique éclairant le monde au pyromane mettant le feu au village digital mondial, il existe une distinction que l’on a souvent du mal à faire. Revenons à la racine de cette idéologie qui a permis l’émergence de patrons superstars à la posture managériale brutale et ayant un rapport difficile avec la démocratie. Un sujet qui n’est pas neutre pour la France et l’Europe.

Faillite de FTX (la cryptolicorne de Sam Bankman-Fried) avec des conséquences sismiques sur le marché des cryptomonnaies, 11 000 licenciements annoncés par Mark Zuckerberg (soit 13% des effectifs de Meta), mise à la porte de la moitié des effectifs de Twitter dès sa reprise par Elon Musk, Google mettant un coup de frein au développement de ses projets et devant s’acquitter de la somme de 400 millions de dollars pour régler un procès concernant la géolocalisation illégale de ses utilisateurs… les temps sont sombres pour les titans du Digital.
Revenons sur un ouvrage méconnu du grand public français : The Atlas Shrugged de Ayn Rand. Il s’agit du livre le plus influent aux États-Unis après la Bible selon une étude de la Bibliothèque du Congrès américaine, où il fut publié pour la première fois en 1957 avant d’être traduit en 25 langues (il faudra attendre 2011 pour obtenir une version française, sous le titre La Grève ou la Révolte d’Atlas).

John Galt. Dans ce récit dystopique où la Seconde Guerre mondiale et la création de l’URSS et n’ont jamais eu lieu, ce sont les patrons d’entreprises et les créateurs de nouvelles technologies qui se révoltent sous l’impulsion du héros du roman :John Galt, qui les rassemble dans un repaire secret au cœur du Colorado, où s’organise une société de coopération volontaire entre individus indépendants, alors que le gouvernement américain sombre peu à peu dans une dictature collectiviste.

Sans spoiler le récit, la fin du roman se conclut sur un long discours du héros (70 pages dans la première édition du livre), justifiant sa résistance à l’oppression de l’État. Ce discours sert de prétexte à Rand pour déployer son approche philosophique profondément objectiviste et individualiste.
Cette philosophie a donné naissance à un important courant de pensée qui influence encore des millions de citoyens américains. Ce livre mettant en scène des héros prométhéens de l’entrepreneuriat technologique contre un État jupitérien résonne encore dans la Silicon Valley, où cette culture néolibérale et libertaire, poussée par une glorification de l’entrepreneur héros a donné naissance à un écosystème d’innovation aventureux.

L’importance de Rand est tellement considérable que Vanity Fair la considérait comme la «personnalité la plus influente» de l’industrie de la Vallée dans un article de 2016 . Steve Jobs considérait The Atlas Shrugged comme un «guide de vie» ; Travis Kalanick, fondateur de Uber, portait une vénération particulière à Rand, (son avatar sur Twitter fut pendant longtemps la couverture du livre The Fountainhead de Rand) ; Jack Dorsey, fondateur de Twitter était lui aussi un émule ; on peut voir Jimmy Wales, le fondateur de Wikipedia, dans une vidéo expliquer qu’il fut profondément influencé par le personnage de Howard Roark de The Fountainhead ; Peter Thiel, co-fondateur de Paypal, fondateur de Palantir Technologies, qui aida Zuckerberg à fonder Facebook, est également un «afficionado» de Rand.
Les Etats-Unis sont devenus les promoteurs d’un modèle technolibertarien laissant une grande liberté aux entrepreneurs, faisant confiance à ses entreprises pour le faire rayonner à l’international : de New York à San Francisco, l’innovation y est érigée comme une indispensable valeur américaine ; or toutes ces entreprises ont une grande influence sur l’Europe et la France
Licornes. Son œuvre reste encore aujourd’hui une inspiration pour ces éleveurs de «licornes», perpétuant le mythe du fondateur surhumain, ce titan autant Hésiodique que Randien, cet Atlas entrepreneur portant tout le poids des changements nécessaires au monde sur ses épaules, avec l’envie quasi désespérée de les porter et de porter le fer face aux syndicats, aux gouvernements, aux régulateurs, aux médias et à tous ces technophobes et rétrogrades, incapables de comprendre leur vision du futur.

Les Etats-Unis sont devenus les promoteurs de ce modèle technolibertarien laissant une grande liberté aux entrepreneurs, faisant confiance à ses entreprises pour le faire rayonner à l’international : de New York à San Francisco, l’innovation y est érigée comme une indispensable valeur américaine, or toutes ces entreprises ont une grande influence sur l’Europe et la France.
Aujourd’hui le patron «Superman» de la Tech (personnage de comics inspiré lui aussi du mythe prométhéen) prend de plus en plus les aspects de son Némésis, le milliardaire criminel technophile «Lex Luthor» et nombre d’entre eux ont été sommés de s’expliquer lors d’auditions sénatoriales sur l’influence politique de leurs sociétés, leurs intrusions dans nos vies privées, et tandis qu’Elon Musk trolle sa propre société, s’implique ostensiblement lors des élections de mi-mandat américaines ou utilise un sondage sur Twitter pour savoir s’il doit réinstaller le compte de Donald Trump, les licenciements et démissions se multiplient en cascade dans la Tech.

Même si le match n’est pas fini, le modèle semble avoir fait son temps, car aujourd’hui, il nous faut pouvoir plus que jamais compter sur des entrepreneurs respectant leurs usagers et nos démocraties : c’est une fenêtre de tir historique pour l’Europe, afin de reprendre la main et de promouvoir une Tech innovante, socialement responsable et durable.
Une Europe qui lancera dès 2023 le Digital Market Act et le Digital Service Act, des «kryptonites» réglementaires visant à ramener nos «Super John Galt» à plus d’humanité ; mais elle devra aller plus loin et se réapproprier le récit que des Gustave Eiffel ou des Enzo Ferrari ont su faire briller avant elle : pour cela elle doit développer un écosystème favorable à de nouvelles Super-entreprises qui porteront ses valeurs et ses couleurs dans le monde, et où notamment la France fera briller son histoire et son innovation via l’émergence de nouveaux champions nationaux.
Thomas Jamet, Lionel Dos Santos De Sousa et Florian Freyssenet.

Comment affronter la future crise de la tech

Comment  affronter la future crise de la tech

 

Le krach boursier annoncé des entreprises tech et les mises en garde des fonds de capital-risque causent déboires et sueurs froides aux start-up et entreprises. Comment les relations publiques peuvent-elles aider les entreprises tech à surmonter ces difficultés ? Les communicants de l’agence internationale de RP Red Lorry Yellow Lorry, spécialisée en Tech B2B, partagent leurs conseils aux entreprises pour anticiper les défis des prochains mois. Par Hélène Joubert, Jack Benda, Elisabeth-Astrid Beretta, Lena Grün et Justin Ordman - consultants UK, Allemagne, France et US de Red Lorry Yellow Lorry PR.

 

L’effondrement du Nasdaq (28% de pertes depuis janvier, soit 1000 milliards de dollars) a entraîné une crise sans précédent des valorisations tech. La hausse des taux d’intérêts a pénalisé le financement des valorisations technologiques et le problème se manifeste dans les marchés privés. Softbank a annoncé 27 milliards de dollars de pertes pour ses Vision Funds sur l’année fiscale passée, Ark Innovation a perdu 55% depuis le début de 2022. Des start-up comme Klarna ont dû licencier 10% de leurs effectifs pour espérer atteindre leurs objectifs.

Les relations publiques peuvent être d’une grande aide aux entreprises dans cette période d’une grande complexité. Quelques bonnes pratiques d’anticipation peuvent aider à garder le cap.

Après une période faste pour la tech, les temps sont à la prudence. Face à des atermoiements financiers, aux craintes de leurs clients, fournisseurs, partenaires et employés, les entreprises tech se demandent comment rassurer. Pour cela, il faut se saisir en amont des leviers stratégiques qu’offre la communication.

« Plus que jamais, les communicants doivent se saisir des enjeux stratégiques de leur entreprise, en ayant une vue holistique de celle-ci : dynamique concurrentielle, pression financière, road-map des Go to Market, culture et mission…. », explique Hélène Joubert, Directrice Europe de Red Lorry Yellow Lorry. « Ce n’est qu’en ce faisant, que la communication peut venir répondre aux enjeux réputationnels de l’entreprise et devenir un asset primordial pour maintenir la  crédibilité de l’organisation  ainsi que son  levier d’influence. » On doit donc envisager la communication comme un levier devant être intégré à la stratégie et à la gouvernance d’entreprise.

 

Dans un contexte de tension, les esprits sont plus agités qu’à l’accoutumée et tout message raisonne davantage qu’en temps normal. Qui plus est, selon Jack Benda, directeur de comptes senior au UK, « il faut oublier toute idée de séparation entre la communication interne et externe. Toute information peut fuiter à tout momentIl faut maintenir une cadence de communication régulière et communiquer de la manière la plus transparente possible, dans la mesure du raisonnable ».

Aussi, est-il crucial de comprendre vos parties prenantes et les messages qui les intéressent. « Le fait que vous ne puissiez pas séparer vos messages en cas de crise représente un véritable défi en matière de gestion des parties prenantes. Les différentes parties prenantes ont des priorités différentes et parfois divergentes – le personnel s’intéresse aux salaires et à la sécurité de l’emploi ; les investisseurs s’intéressent au rendement ; les clients s’intéressent à la continuité des services. Essayer de trouver des messages qui garantissent la transparence tout en satisfaisant toutes ces parties est l’un des plus gros défis, et nécessite souvent l’œil impartial d’un expert externe en communication », spécifie-t-il.

 

Pas toutes les entreprises tech ne sont à risque d’effondrement, la valeur ajoutée de certaines est une constante. Certains financements ne sont que retardés. Néanmoins, « il faut se méfier d’un effet boule de neige qui provoquerait des rétractations. Il va falloir visibiliser la pérennité des business models, les relais de croissance, afficher des ambitions réalistes, souligner l’expérience des dirigeants, la compliance des entreprises, mettre en exergue les dispositifs qui assurent leur bonne gestion, les externalités positives… », selon Elisabeth-Astrid Beretta, consultante senior en France.

Cependant, il incombe aux dirigeants de donner des perspectives plus larges. Pour renforcer le message, il conviendra de l’alimenter de faits tangibles et de données concrètes, laissant entrevoir un dénouement heureux à cette conjecture.  »Irriguer son écosystème d’études de marché inédites, de données, peut aider à consolider le soutien des parties-prenantes, à évaluer le contexte et à laisser entrevoir non pas ‘si’, mais approximativement ‘quand et comment’ une entreprise ou un marché sortiront d’une mauvaise passe », conclut-elle.

 

Après deux ans de pandémie, d’une inflation croissante, d’une récession imminente et avec une guerre en Europe, la santé mentale des individus est mise à rude épreuve. Selon le rapport de Sapien Lab de mai 2022, la moitié des jeunes adultes (donc entrants  sur le monde du travail) ont vu leur santé mentale décliner au cours de la deuxième année de pandémie : ils sont pourtant tous les jours au travail. Il faut prioriser leur bien-être. En plus, recruter est difficile et les employés constituent un groupe de pression officieux qui peut médiatiquement apporter ou retirer son soutien à une entreprise.

Tenir compte de leur bien-être se reflète dans la manière dont on communique avec eux, surtout en cas de crise. Pour éviter toute confusion, la désinformation et les rumeurs, « il faut communiquer avec ses équipes sur un plan personnel, et ne pas les inonder de messages énigmatiques, de jargon et d’annoncer des changements radicaux dans votre entreprise par des mails collectifs. Il faut leur parler directement avant qu’ils ne commencent à s’interroger. Parfois, cela implique d’admettre que vous ne pouvez pas entièrement prédire ou saisir l’effet à long terme des événements sur votre entreprise « , conseille Lena Grün, directrice de comptes en Allemagne. Néanmoins, la communication ne doit pas être à sens unique : « Idéalement il faut permettre aux collaborateurs un moyen de poser des questions pour démystifier certaines fausses informations qui pourraient déjà s’être répandues », ajoute-t-elle.

 

Face à la démultiplication des outils de communication et des relais d’opinion, il convient d’être présent sur tous les fronts. « Il faut investir dans les outils marketing qui aideront à mieux jauger de l’efficacité d’une campagne, afin de pouvoir rapidement rediriger une éventuelle mauvaise stratégie et d’optimiser le budget marketing. Il est nécessaire également de tirer parti des réseaux sociaux, sur lesquels il est possible de lancer des campagnes et de cibler le public adéquat avec une barrière d’entrée à faible coût. Notamment à travers une stratégie de contenus… », recommande Justin Ordman, Head of Enterprise IT practice.

C’est souvent la première tentation des entreprises en période de difficulté mais il faut s’abstenir de réduire les budgets en relations publiques. C’est au contraire le moment d’exploiter les leviers qu’elles offrent. « Il ne faut surtout pas disparaître. Les autres entreprises se retireront en période de récession, et celles qui maintiendront la visibilité de leur marque gagneront des parts de marché dans leur secteur. Investir dans les relations publiques aujourd’hui, c’est aussi se préparer pour l’avenir », ajoute-t-il.

 

Rappelons-le, si certaines valorisations ont été surpayées, bénéficiant d’un engouement désormais obsolète au sortir des cycles de confinement, c’est loin d’être le cas de très nombreux services et de technologies à réelle valeur-ajoutée sur lesquels les investisseurs ne cesseront pas de miser.

Certaines technologies apporteront même des solutions et une richesse réputationnelle aux autres entreprises dans cette phase compliquée. En revanche, même les plus performantes pourraient pâtir de la frilosité généralisée des investisseurs, et certaines bonnes pratiques de gestion réputationnelles peuvent anticiper et dépasser le problème. Et pour cause, le lancement prochain d’Euronext Tech Leaders, l’indice boursier des valorisations tech européennes, donne un horizon au secteur.

Hélène Joubert, Jack Benda, Elisabeth-Astrid Beretta, Lena Grün et Justin Ordman

Tech: Le danger des amis virtuels

Tech: Le danger des amis virtuels

 

 

L’éditorial de Dominique Leglu est extrait de Sciences et Avenir – La Recherche numéro 898, daté décembre 2021, qui fait sa couverture sur Icelandia, le continent englouti. Le magazine est disponible chez tous les marchands de journaux, et en numérique.

 

 

Des robots qui discutent

Qui d’entre nous, d’ailleurs, ne s’est pas retrouvé un jour à sermonner sa propre voiture quand, par un froid matin d’hiver, elle refusait de démarrer ? Comment allons-nous nous comporter à l’avenir, suite à des échanges de plus en plus fréquents avec les agents conversationnels — ces « chatbots » ou robots qui discutent — répondant à nos questions et donnant des conseils ? Déjà une réalité pour qui converse avec Siri sur son iPhone ou avec Alexa d’Amazon, appelé avec Disney à se déployer un peu partout. Manipulation douce. Que se passera-t-il demain avec le développement du métavers annoncé récemment par Mark Zuckerberg (lire p. 42) ?

 
 Dans cet univers virtuel, où tout un chacun est censé vivre via son avatar en 3D parmi d’autres avatars amis, comment détecter les pseudo-personnages… Des robots si persuasifs qu’on les prendrait pour des anges gardiens. À l’heure où la Stratégie nationale pour l’intelligence artificielle (2018-2022) entre dans sa deuxième phase, ce n’est pas un hasard si un avis sur les enjeux éthiques des chatbots vient d’être émis par le Comité national pilote d’éthique du numérique (CNPEN). Les agents conversationnels sont en effet des intermédiaires puissants du système numérique pour que ce dernier engrange pléthore de données sur nos réactions émotionnelles et notre comportement général.Tech: Le danger des amis virtuels dans sciences amis ! dans sciences

« Manipulation douce »

 Un apprentissage qui, en retour, peut permettre d’exercer insidieusement une « manipulation douce », explique ainsi Laurence Devillers, corapporteuse de l’avis du CNPEN, professeure d’IA et d’éthique (université Paris-Sorbonne, CNRS) que les lecteurs de Sciences et Avenir – La Recherche connaissent bien. Brouillage et mensonges. Il est grand temps que des normes encadrent la déferlante annoncée de chatbots, pour éviter le brouillage entre humain et non-humain. Voire une perte de repères entre la vie et la mort, quand il devient possible de poursuivre le dialogue avec une personne décédée grâce à un « deadbot » qui en garde la voix et l’apparence. Que deviendrait le temps du deuil, indéfiniment prolongé ? Une éducation s’impose ainsi dès le plus jeune âge, pour faire prendre pleinement conscience de cette nouvelle réalité. Pour éviter non seulement que s’aggrave l’addiction aux images ou à la consommation de produits mais aussi que s’infiltrent mensonges et fake news, à l’insu de notre plein gré. Un défi à la démocratie

TECH-Le danger des plates-formes pour la démocratie

TECH-Le danger des plates-formes pour la démocratie 

 

L’économiste des médias Nathalie Sonnac souligne, dans une tribune au « Monde », les risques que les géants du numérique représentent pour le pluralisme de l’information et la liberté de nos choix individuels

 

Tribune.

 

Le numérique est partout. Il a envahi notre espace de vie. C’est vrai pour les domaines de la santé, des transports, de la finance et de la banque, des loisirs et de la communication. C’est aussi vrai pour le domaine de l’information. En 2020, 88 % des Français âgés de plus de 12 ans déclarent se connecter à Internet tous les jours ou plusieurs fois par semaine, 63 % utilisent internet pour suivre l’actualité.

Chez les 18-24 ans, ce sont près des deux tiers d’entre eux qui s’informent uniquement sur Internet et les réseaux sociaux via leur smartphone. Youtube, Twitter, Snapchat, Twitch et plus récemment TikTok ont leur préférence. Quatre plates-formes numériques américaines, connues sous le sigle GAFA – Google, Apple, Facebook et Amazon – que l’on appelle aussi les Big Tech – occupent aujourd’hui une position hégémonique dans l’espace informationnel.

Surpuissantes économiquement et financièrement, leur capitalisation boursière s’est envolée pendant la période de la pandémie. Et pourtant, aucune d’entre elles n’a 40 ans d’âge. Pour comprendre les dangers démocratiques de la puissance de ces multinationales, il convient d’interroger leur modèle d’affaires.

Les plates-formes numériques sont des intermédiaires, qui rendent possibles et facilitent les interactions entre différents groupes d’agents. Catalyseurs économiques, selon les termes du Prix Nobel d’économie Jean Tirole, ces interactions dénommées « effets de réseau croisés » (la valeur d’un réseau augmente avec le nombre d’utilisateurs) structurent l’économie numérique dont les marchés sont à deux versants.

D’un côté ces géants du numérique concourent à installer la gratuité comme mécanisme d’incitation de la demande à rejoindre la plate-forme, car avec leurs milliers de services accessibles gratuitement, l’intérêt du consommateur est toujours accru. De l’autre côté la monétisation de ces services repose sur la publicité en ligne, qui constitue 80 % du chiffre d’affaires de Google et 95 % de celui de Facebook.

Leur modèle économique repose ainsi sur la collecte massive les données (big data) et leur exploitation par des algorithmes et l’intelligence artificielle. Les deux versants des marchés sont ainsi reliés par un système d’appariement qui est au cœur de la création de valeur d’une plate-forme. Les GAFA se « nourrissent » de toutes les traces que nous laissons par notre navigation sur les sites.

Nos données constituent selon Pierre Louette, PDG de l’Agence France-Presse de décembre 2005 à avril 2010, « d’immenses réservoirs, de segmentation, de prédictibilité qui servent toutes les opportunités de recommandation, de proposition ciblée et de monétisation » (Des géants et des hommes : Pour en finir avec l’emprise des Gafa sur nos vies, Laffont, 2021). Avec le premier moteur de recherche au monde et sa pléthore de services gratuits, Google est certainement la plate-forme qui bénéficie de la plus grande traçabilité de ses utilisateurs.

French Tech: « Un écosystème insuffisant « 

French Tech: « Un écosystème insuffisant « 

 

 

INTERVIEW. Directrice de la mission French Tech depuis le 1er novembre, Clara Chappaz, 32 ans, Regrette l’insuffisance de l’écosystème

 

 

 

Les critères du Next 40 et du French Tech 120 sont fondés exclusivement sur la notion de croissance et d’hypercroissance. Faut-il les revoir ?

Non, nous allons conserver des critères purement de croissance économique pour le Next 40 et le French Tech 120 parce qu’il faut réfléchir à une échelle plus macro-économique. On voit que l’écosystème tech en France prend de l’ampleur tant sur les levées de fonds que sur l’emploi, avec 400.000 emplois et 200.000 créations prévues d’ici 2025, mais ce n’est pas suffisant. On reste encore en retrait sur la scène internationale malgré nos vingt licornes puisque sur les dix plus grosses capitalisations boursières mondiales aujourd’hui, huit sont des entreprises technologiques mais aucune n’est française ni même européenne ! Il y a donc encore besoin de soutenir ces entreprises qui ont le potentiel économique de devenir un acteur mondial. On doit, par exemple, viser la place de leader dans le domaine de la Green Tech [technologies liées à l'environnement et l'énergie]. On lance la nouvelle édition de ce programme et le seul ajustement prévu vise à prendre en compte la crise du Covid-19 en prenant un critère de croissance moyenne sur trois ans plutôt qu’un critère de croissance par an.

En revanche, nous allons multiplier des programmes thématiques tels que le Green 20 qui était le premier laboratoire pour aller chercher des technologies innovantes et du potentiel commercial sur des temps plus longs.

Dans cette logique, la French Tech Bordeaux vient de lancer un appel à projets, le NA 20, qui vient lorgner du côté de l’économie sociale et solidaire. Est-ce une piste à suivre au niveau national ?

Oui, je trouve ça génial ! J’ai travaillé dans deux startups du marché de l’occasion. Ce sont donc des sujets qui me sont très chers et qui sont chers à la plupart des entrepreneurs en France puisque c’est dans notre ADN de repenser l’innovation et les modèles de société. Nous avons créé un « board impact » pour le French Tech 120 et le Next 40 pour travailler sur les mesures qu’on peut mettre en place dans les entreprises. On a aussi le programme Tremplin pour aller des profils d’entrepreneurs différents : boursiers, issus des zones rurales ou des quartiers prioritaires de la ville, réfugiés, etc. Donc, oui, le programme NA 20 est un très bon pilote que nous regardons de près.

Votre prédécesseure, Kat Borlongan, avait notamment piloté le déploiement de la mission French Tech hors de l’Ile-de-France. Allez-vous poursuivre cette dynamique ?

Oui, pour la V3 (version3) de la mission French Tech, il y a une vraie ambition d’accompagner les startups de toutes les régions françaises. On voit d’ailleurs que de plus en plus d’entreprises et de startups s’installent ou ouvrent des bureaux dans les grandes métropoles françaises. Ces villes, et notamment Bordeaux qui attire beaucoup d’entreprises, ont une carte à jouer dans un contexte plus global de guerre des talents, notamment sur des profils seniors qui ont déjà vécu les phases d’accélération que connaissent beaucoup de startups aujourd’hui.

Ce réseau de 13 capitales French Tech et 40 communautés, qui vit grâce à l’implication des équipes et des chefs d’entreprise, est une très grande force. Il faut le soutenir parce que c’est un système unique qui est regardé avec attention par nos voisins européens. C’est d’ailleurs un sujet que nous allons porter lors de la présidence française de l’Union européenne en 2022.

Géants de la tech: la transparence en question

 Géants de la tech: la transparence en question

Un article de Katherine Bindley Dans le Wall Street Journal aborde la demande croissante de transparence sur les géants de la tech.(Extrait)

De plus en plus de débats et de critiques internes concernant des entreprises comme Facebook, Google et Apple se retrouvent mises sur la place publique. « Les employés ont l’impression que leur seule option est de s’adresser à l’extérieur »

 

 

De plus en plus de débats internes et de critiques concernant des géants de la tech se retrouvent sur la place publique. Les fuites d’informations sensibles en représentent les exemples les plus spectaculaires. Elles ont conduit les plus grandes entreprises du secteur à restreindre l’accès à l’information de leur personnel avec une partie duquel s’est instaurée une méfiance réciproque et nouvelle.

Chez Netflix, certains employés ont débrayé mercredi pour protester contre la façon dont l’entreprise a géré le tollé provoqué par un spectacle de l’humoriste Dave Chappelle. Dans un récent e-mail adressé au personnel, révélé par The Verge, le directeur général d’Apple, Tim Cook, a déclaré que les salariés transmettant des informations confidentielles en dehors de l’entreprise n’y avaient pas leur place. Plus tôt cette année, Google a licencié une employée de son équipe d’intelligence artificielle accusé d’avoir partagé des documents internes. Et la semaine dernière, Facebook a annoncé à ses troupes qu’il limiterait le nombre de personnes pouvant consulter les discussions sur les messageries internes concernant certains sujets, notamment la sécurité des plateformes, après la collecte de documents par un ancien employé qui ont servi de base aux Facebook Files dévoilés dans The Wall Street Journal.

 

Lorsqu’il a rejoint Google il y a une dizaine d’années, Xavid Pretzer, ingénieur senior, a été attiré par la culture de liberté et de transparence de l’entreprise et par l’idée qu’il serait en mesure de faire changer les choses. A cette époque, les questions, les commentaires et les débats étaient davantage encouragés, assure M. Pretzer, délégué de l’Alphabet Workers Union, un syndicat qui s’est formé pendant la pandémie pour fédérer les collaborateurs et leur donner la possibilité de s’exprimer sur l’entreprise. Il comptait environ 800 membres en janvier.

« Souvent, les gens ne sont pas uniquement attirés dans ces entreprises par le salaire, mais aussi parce qu’ils sont convaincus qu’ils pourront participer à rendre le monde meilleur », dit-il.

M. Pretzer explique que, ces derniers jours, certains employés ont l’impression que leurs questions pointues reçoivent des réponses plus vagues au cours des grandes réunions où le dialogue et la transparence étaient jusqu’alors la norme. Ce changement d’attitude a érodé la confiance entre la direction et certains employés, poursuit-il, ajoutant que si les entreprises ne fournissent pas de canaux de communication sûrs et constructifs pour aborder les problèmes éthiques en interne, il « pense que certaines personnes auront l’impression que leur seule option pour se faire entendre est de se tourner vers l’extérieur ».

Google a refusé de répondre aux demandes de commentaires. Cette semaine, lors de la conférence Tech Live du Wall Street Journal, Sundar Pichai, son Google, a déclaré que l’activisme des employés incite les entreprises à être plus responsables. M. Pichai dirige également Alphabet, la société mère de Google.

« Les CEO doivent accepter le fait que, dans le monde professionnel moderne, les employés veuillent avoir leur mot à dire sur l’entreprise », a déclaré M. Pichai. Il a ajouté que les entreprises prenaient les décisions finales, même si elles pouvaient ne pas plaire à tous les salariés.

Depuis longtemps, Apple est réputé pour être plus opaque que certains de ses concurrents de la Silicon Valley. Au cours de l’année écoulée, ses collaborateurs se sont publiquement opposés à certains recrutements et ont accusé l’entreprise de pratiquer l’inégalité salariale et la discrimination. Au début du mois, l’entreprise a licencié Janneke Parrish, une salariée du groupe à Austin en pointe dans le mouvement #AppleToo, selon son avocat Vincent White. Ce dernier déclare penser, comme sa cliente, que ce licenciement est une mesure de représailles à sa décision de s’exprimer sur l’équité salariale et à sa position en matière de syndicalisation.

Une autre ancienne employée d’Apple, Ashley Gjovik, a déposé de nombreuses plaintes auprès du National Labor Relations Board (NDLR : agence américaine indépendante chargée d’enquêter sur les pratiques illégales dans le monde du travail). Elle affirme notamment que le mémo de M. Cook décourageant la diffusion d’informations confidentielles et certaines parties du règlement intérieur d’Apple violent le droit du travail. Mme Gjovik déclare avoir été licenciée en septembre.

The Verge a été le premier média à faire état de ces deux licenciements chez Apple.

« Nous prenons toutes les préoccupations au sérieux et nous menons une enquête approfondie chaque fois qu’un problème est soulevé. Par respect pour la vie privée des personnes concernées, nous ne communiquons pas sur les dossiers personnels des employés », affirme Josh Rosenstock, porte-parole d’Apple.

Pendant longtemps, le climat de confiance entre Facebook et ses collaborateurs était établi de manière instantanée. Les nouvelles recrues avaient généralement accès aux renseignements sur l’entreprise dès leur entrée — documents internes, les groupes de discussion entre employés et les comptes rendus des assemblées publiques. Les commentaires du PDG Mark Zuckerberg lors des réunions hebdomadaires avec l’ensemble du personnel restaient généralement au sein de l’entreprise. Mais ces dernières années, de plus en plus d’informations ont été rendues publiques et, au début du mois, l’entreprise a commencé à restreindre les informations partagées en interne.

Tim Carstens, un ingénieur logiciel senior qui a quitté Facebook le mois dernier, explique que travailler dans une grande entreprise de la tech signifie accepter à la fois les avantages et les inconvénients d’avoir une énorme influence sur le monde. Des tensions apparaissent entre dirigeants et collaborateurs lorsqu’ils doivent déterminer comment satisfaire à la fois le marché et la société, ajoute-t-il.

Selon des analystes et d’anciens travailleurs, l’évolution de la perception du public d’entreprises comme Facebook et Google pourrait rebuter certains jeunes employés.

« Il y a quelques années, si vous disiez que vous travailliez pour l’une de ces entreprises, neuf personnes sur dix disaient : “Oh, c’est génial.” Maintenant, ils ne sont plus que la moitié à trouver ça super tandis que l’autre répond : “Cette entreprise fait des choses qui ne sont pas bien” », observe Brian Kropp, responsable des études sur les pratiques des RH chez Gartner.

Nick Clegg, vice-président de Facebook chargé des affaires internationales, a publié le mois dernier un mémo, dévoilé par le New York Times, à l’intention des employés. Il y donne notamment des conseils sur la manière de parler avec des amis et des membres de la famille qui pourraient remettre en question le bien-fondé de leur travail chez Facebook et l’influence de l’entreprise sur le discours politique.

« On continuera à nous poser des questions difficiles. Et beaucoup de gens continueront à être sceptiques sur nos motivations, écrit M. Clegg. C’est ce qui arrive quand on fait partie d’une entreprise qui a un tel impact sur le monde. »

(Traduit à partir de la version originale en anglais par Grégoire Arnould)

Traduit à partir de la version originale en anglais

Tech-Smartphones, tablettes : un chargeur unique ? Enfin !

Tech-Smartphones, tablettes : un chargeur unique ? Enfin !

Enfin ! Bruxelles a préparé proposition de directive imposant à Apple, Huawei, Nokia et autres  de doter leurs appareils vendus sur le Vieux Continent de chargeurs universels et interopérables.

Selon nos informations, le projet de directive, qui sera dévoilé dans les jours à venir et devra ensuite être examiné par le Parlement européen et le Conseil (qui regroupe les Etats), impose de doter les appareils d’au moins un port USB-C et de garantir que tous les chargeurs soient interchangeables. Les équipes du commissaire au Marché intérieur, Thierry Breton, aux manettes, visent large : le projet concernera aussi les tablettes, les casques audios, les caméras et les enceintes musicales (mais pas les liseuses).

Un autre grand patron tech chinoise viré

Un autre grand patron  tech chinoise viré

 

Le fondateur de JD.com, Richard Liu, n’est pas viré  à proprement parler mais mis dans un placard. D’autres grands patrons chinois ont déjà subi le même sort.

.En mars dernier, Colin Huang, fondateur et président de la plateforme Pinduoduo, rivale de JD.com et d’Alibaba, avait renoncé à son statut d’actionnaire de référence du groupe. Quelques mois auparavant, il avait confié la direction opérationnelle de Pinduoduo à Chen Lei, qui a depuis repris la fonction de président. Sans parler du grand patron qui a été purement et simplement tué: Lai Xiaomin, ancien patron du conglomérat financier China Huarong condamné notamment pour bigamie. À noter aussi la mise à l’écart du grand patron d’Alibaba.

Tech : La régulation incontournable pour les plates-formes

Tech : La régulation  incontournable pour les plates-formes

 

Sheryl Sandberg, directrice des opérations de Facebook, et Jack Dorsey, PDG de Twitter expliquent  que la régulation est devenue incontournable pour les plates-formes dans le Wall Street Journal (extrait)

 

 

 

 

Apparemment, tout le monde dans la tech – et bien d’autres au-delà – veut avoir une activité de plateforme. Uber a utilisé ce terme à 747 reprises dans son prospectus d’introduction en Bourse en mai. We Co., la maison-mère du loueur de bureaux en difficultés WeWork, se targuait d’avoir une plateforme mondiale dans les documents de son introduction en Bourse qui n’a finalement pas eu lieu. Peloton Interactive, qui fabrique des équipements sportifs connectés, se désigne comme « la plus grande plateforme fitness interactive au monde ». Même Beyond Meat aime parler de ses « plateformes de produits à bases de plantes ».

Derrière l’engouement pour un terme en apparence anodin se cache un concept économique qui, dans ses diverses incarnations sur Internet, est devenu un tremplin pour une croissance et une richesse immenses. Les entreprises construites sur ce concept – de Facebook, YouTube et Twitter à Amazon, Uber et Airbnb – ont collectivement réuni des milliards d’utilisateurs et créé des centaines de milliards de dollars de valeur marchande en déployant des systèmes logiciels pour mettre en relation les créateurs de contenu avec une audience, les vendeurs avec les acheteurs, les chauffeurs avec les passagers, les hôtes avec les invités. Ces entreprises exercent un pouvoir sans précédent sur la façon dont les gens communiquent, sur ce qu’ils savent et regardent, et sur la façon dont ils font leurs achats et se déplacent.

Aidées par une approche non interventionniste du régulateur aux États-Unis, ces entreprises ont donné la priorité au recrutement, le plus rapide possible, de prestataires et d’utilisateur – et ont souvent balayé d’un revers de main les contraintes, contrôles et coûts supportés par les entreprises plus traditionnelles dans les secteurs qu’elles cherchaient à réinventer. « Nous sommes une plateforme », est répété à l’envi – pas un média, un commerçant, un fournisseur de services ou un exploitant de services automobiles.

Ce cadrage est désormais remis en cause de toutes parts. Utilisateurs, élus et régulateurs aux États-Unis et en Europe ont attaqué Facebook, YouTube et d’autres plateformes de réseaux sociaux pour en avoir fait trop peu alors que bigots, brutes et propagandistes étrangers inondaient leurs plateformes d’insultes et de désinformation. Amazon est sous le feu des critiques pour son contrôle laxiste de son marketplace, et Uber se bat contre une loi californienne qui pourrait obliger les entreprises de l’économie « collaborative » à traiter les chauffeurs comme des employés.

Le degré de responsabilité des entreprises technologiques à l’égard de leurs plateformes est devenu l’un des enjeux clés de notre époque. La façon dont cette question sera résolue aura des ramifications dans les décennies avenir pour le monde des affaires, l’intérêt des consommateurs et le discours social.

Pendant la plus grande partie de leur histoire, les entreprises tech ont été tellement concentrées sur les défis d’une croissance rapide que s’inquiéter de ce qui se passait sur leurs plateformes a été relégué au second plan, dit Geoffrey Parker, professeur d’ingénierie au Dartmouth College et co-auteur d’un livre sur l’essor de ces entreprises, titré Platform Revolution.

« Aujourd’hui, dit-il, cela leur pète à la figure. »

Les plateformes telles qu’on les connaît n’existeraient pas sans un texte de loi de 1996, l’article 230 230 du Communications Decency Act, qui exempte largement les services en ligne de responsabilités pour les contenus de tiers.

Ironie du sort, l’article 230 était au départ un projet visant à faciliter la modération de contenus. Il est arrivé après deux procès en diffamation avec des résultats contradictoires au début des années 1990 contre deux des entreprises qu’on appelait alors « portails Internet », hébergeurs de newsletters, forums et chat rooms où l’on trouvait des contributions d’utilisateurs.

Dans le premier cas, un tribunal fédéral a estimé que CompuServe n’était pas responsable pour les propos présumés diffamatoires à l’encontre d’un concurrent dans une newsletter de sa plateforme. CompuServe était considéré comme un distributeur : à l’instar d’une bibliothèque ou d’une librairie, il ne pouvait être tenu pour responsable pour chaque contenu qu’il véhiculait, a estimé la cour.

Quelques années plus tard, une publication anonyme sur un BBS (bulletin board system) du portail Prodigy évoquait une fraude chez le courtier Stratton Oakmont, à Long Island (N.Y.), qui sera plus tard au cœur du film de Martin Scorsese Le loup de Wall Street. Prodigy fonctionnait différemment de CompuServe, avec des directives de contenu et des modérateurs qui supprimaient parfois des messages. Stratton Oakmont a poursuivi Prodigy en justice, arguant que ces caractéristiques signifiaient qu’il était responsable de l’allégation de fraude faite sur sa plateforme. En 1995, un tribunal de l’État de New York a donné raison à Prodigy.

Cela a inquiété certains élus, qui ont eu peur que punir les entreprises tech qui modéraient certains, mais pas tous les contenus qu’elles hébergeaient, comportait le risque d’entraver le développement d’internet. Deux d’entre eux, le sénateur Ron Wyden, un démocrate de l’Orégon, et Chris Cox, alors élu républicain de Californie, ont déposé un projet de loi qui est devenu l’article 230, comportant la clause suivante : « Aucun fournisseur ou utilisateur d’un service informatique interactif ne doit être considéré comme l’éditeur ou le locuteur d’une information fournie par un autre fournisseur de contenu d’information. »

A l’époque, personne n’imaginait ce qu’internet allait devenir. Amazon n’avait pas deux ans, et Yahoo et eBay étaient également des enfants en bas âge. Google ne serait enregistré comme entreprise que deux ans plus tard, Facebook six ans plus tard, quant à Uber et Airbnb, ils n’ont vu le jour que plus d’une décennie après le vote de cette loi.

Mais cette série de mots a eu pour résultat d’offrir aux entreprises tech « une immunité incroyablement large » qui a été essentielle au développement des plateformes que nous utilisons aujourd’hui, note Jeff Kosseff, auteur d’un ouvrage sur la Section 230, intitulé, The Twenty-Six Words That Created the Internet. (« Les vingt-six mots fatidiques qui ont créé Internet »)

Get big fast

Cette loi a accompagné des évolutions technologiques et stratégiques. Le développement de connexions réseau plus rapides et d’une puissance de calcul accrue – en particulier après l’avènement du smartphone – a attiré plus de monde sur un internet toujours plus omniprésent.

En tirant parti de ce pouvoir, les entrepreneurs se sont emparés de modèles économiques qui devenaient plus intéressants pour les utilisateurs à mesure que plus de gens les utilisaient, dit le professeur Parker de Dartmouth – plus de contenu attirait plus d’utilisateurs, ce qui rendait la plateforme plus attrayante pour les créateurs de contenu, qui attiraient plus d’utilisateurs.

Ces facteurs sont liés à une autre caractéristique clé : la croissance rapide des plateformes a souvent nécessité relativement peu de coûts supplémentaires, surtout avec le bouclier juridique fourni par l’article 230. Elles étaient, comme on dit dans la Silicon Valley, hautement « scalable ».

Ces qualités – qui ont marché aussi bien pour les amis sur les réseaux sociaux que pour les vendeurs et les acheteurs, les chauffeurs et les passagers, et ainsi de suite – ont alimenté la croissance rapide des entreprises. Et les investisseurs en capital-risque et les entrepreneurs considéraient que beaucoup de ces marchés étaient des marchés où le gagnant rafle tout, d’où l’importance de grossir plus vite que la concurrence.

« Vous êtes en fait en mode survie », dit Tim Kendall, qui était directeur de la monétisation de Facebook de 2006 à 2010 ; il a plus tard été président de la société de partage d’images en ligne Pinterest. Il dit que lorsqu’il a rejoint Facebook, le site était loin derrière Myspace en nombre d’utilisateurs et qu’il n’était pas certain qu’il y arriverait. « Quand vous êtes en mode survie, vous n’êtes pas incités à prendre un peu de recul et réfléchir à la société et penser aux implications d’ordre supérieur, parce que vous voulez juste vivre et vous battre un jour de plus. »

Les dirigeants ont conservé cet état d’esprit même après que leurs entreprises sont devenues titanesques. Facebook a pris pour habitude au cours de la dernière décennie – bien après avoir conquis l’univers des réseaux sociaux – de lancer un nouveau produit ou une fonctionnalité quelconque pour mieux s’excuser après avoir été confronté à une volée de bois vert concernant les contenus, la vie privée et d’autres problèmes. Uber, aux prises avec son rival Lyft, s’est rué sur une ville après l’autre plus rapidement que les régulateurs ne pouvaient s’adapter.

« Chaque partie de votre corps vous dit que vous êtes David », indique M. Kendall, désormais à la tête d’une start-up appelée Moment qui aide les gens à diminuer le temps passé sur leurs smartphones. « Et aucune de ces entreprises ne sait quand elle devient Goliath. Elles sont pratiquement incapables de savoir qu’elles sont devenues Goliath, tant qu’elles n’ont pas été sanctionnées violemment par un régulateur ou un gouvernement ou une amende. »

Le retour de bâton

Les coups pleuvent de toutes parts ces derniers temps, et les entreprises plateformes répondent avec un mélange de défiance et d’efforts de conciliation.

Le flot de désinformation pendant la campagne présidentielle américaine en 2016 a suscité une attention sans précédent sur les responsabilités que Facebook, Twitter, YouTube et d’autres plateformes de réseau sociaux devraient assumer pour le contenu qu’elles diffusent. Le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, le DG de Twitter, Jack Dorsey, et d’autres dirigeants, convoqués à des audiences du Congrès, se sont engagés à faire plus. Facebook affirme avoir embauché des milliers de nouveaux travailleurs pour renforcer la surveillance et la sécurité sur sa plateforme – un effort rendu plus complexe et plus coûteux par la nécessité d’adapter ses mesures à la myriade de marchés où le réseau est implanté à travers le monde.

Amazon dit avoir dépensé 400 millions de dollars l’année dernière pour adresser le problème de la contrefaçon et des produits qui ne sont pas aux normes, et est prêt à dépenser des milliards encore dans les prochaines années, après qu’une croissance rapide de vendeurs extérieurs sur sa marketplace a déclenché un afflux de produits de cette nature.

Utilisateurs et investisseurs aussi se méfient davantage des lignes de défense de ces plateformes.

En mars, le Wall Street Journal a révélé que Care.com, le numéro un américain de la mise en relation avec des baby-sitters et aides soignants par Internet, procédait seulement à une vérification très limitée du personnel aidant, parfois avec des conséquences dramatiques. L’entreprise a répondu qu’elle était une plateforme, et que, comme d’autres plateformes, elle ne vérifiait en général pas les informations publiées par les utilisateurs. L’action Care.com a plongé en Bourse dans le sillage de ces révélations, son DG a démissionné et, en décembre, a accepté de se vendre à IAC/InterActive Corp. pour environ 60 % de sa dernière valorisation.

En parallèle, tribunaux et élus sont en train de fixer de nouvelles limites aux libertés offertes par l’article 230. L’année dernière, le Congrès a adopté à une écrasante majorité une loi supprimant l’immunité des entreprises en ligne qui facilitent le commerce du sexe en ligne. Cette loi, qui répondait à l’explosion de la prostitution en ligne sur des sites comme Backpage.com, maintenant fermé, a été fortement contestée par les entreprises du Web, qui ont alerté sur le fait qu’elle était susceptible d’éroder les protections offertes par l’article 230.

En mars, une cour d’appel fédérale en Californie a rejeté une tentative d’Airbnb et de son concurrent HomeAway, une unité du Groupe Expedia d’invoquer l’article 230 comme défense contre une ordonnance de la ville californienne de Santa Monica les obligeant à s’assurer que les annonces locales sur leurs plateformes étaient conformes aux règles de la ville.

Airbnb est aussi en train de renforcer les mesures de sécurité sur sa plateforme après plusieurs incidents, dont une fusillade mortelle pendant une soirée qui a dégénéré dans une propriété louée via Airbnb. L’entreprise devait « assumer davantage de responsabilité pour les choses sur notre plateforme », a déclaré son patron, Brian Chesky, à propos des changements en novembre. « Notre secteur connaît une transition progressive, peut-être trop progressive. »

La bataille sur la responsabilité des plateformes dépasse les contenus. La Californie a adopté une loi qui entre en application le 1er janvier qui pourrait contraindre Uber et ses concurrents à traiter leurs chauffeurs comme des employés, susceptible de prétendre au salaire minimum et à des congés maladie payés. Uber a déclaré qu’il n’a pas à changer ses pratiques en raison de cette loi, et que ce n’est pas une entreprise de VTC mais « une plateforme technologique pour plusieurs types de places de marché numériques. »

Les entreprises plateformes ne vont pas disparaître. Elles ont amassé des millions et des millions d’utilisateurs avec des services qui mettent les gens en relation de manières utiles et nouvelles. Malgré le retour de bâton, nombre d’entre elles continuent de croître.

Mais le modèle est clairement en train de changer. La responsabilité de ce qui se passe sur les plateformes n’est plus une réflexion de second plan. Se déployer rapidement à grande échelle et moindre coût n’est pas sans contraintes. C’est ce que dit le professeur Parker : « L’ère de la régulation des plateformes est arrivée. »

Tech : le retard européen

Tech : le retard européen

 

Mikko Hyppönen, spécialiste en cybersécurité, explique, dans une tribune au « Monde », que, face à la domination des technologies américaines et asiatiques, il est urgent que l’Europe trouve les moyens de mieux défendre sa souveraineté numérique.(Extrait)

 

Tribune.

La pandémie de Covid-19 a conduit à une transformation numérique massive, la valeur des entreprises américaines de la tech a dépassé celle de l’ensemble du marché boursier européen. Révélation frappante, certes, mais pas surprenante. Pendant plusieurs années, l’Europe a pris du retard sur la création de nouveaux services et les rares succès sont immédiatement vendus à la concurrence états-unienne ou asiatique.

Bien que le Web ait été conçu en Europe, sa croissance, elle, a été alimentée par des innovations américaines et asiatiques. Pourquoi ?

Plusieurs aspects sont en jeu, la fragmentation des marchés et la multiplicité des langues représentent un désavantage pour nous ! Deux avantages de poids côté américain : les grands investisseurs et l’absence de réglementation.

Dans le secteur de la cybersécurité, les entreprises américaines ont l’avantage de pouvoir compter sur un premier client de taille, aux poches profondes et féru de technologies défensives de pointe : la branche défense du gouvernement fédéral. Cette dernière acquiert régulièrement de nouvelles innovations alors qu’elles ne sont encore que des idées sur PowerPoint.

En s’appuyant sur ce client de la première heure, elles peuvent faire passer leurs idées de l’état de promesse à celui de produit réel. A l’inverse, les unités de défense et les centres de cybersécurité européens sont de tailles plus réduites. Plutôt que d’investir dans des idées, ces entités préfèrent payer pour des solutions testées et éprouvées.

Il en va de même dans le secteur technologique au sens large. Les jeunes entreprises américaines ont accès à un secteur de capital-risque florissant, qui éclipse celui de l’Europe. Aux Etats-Unis, lorsque des fondateurs de start-up cherchent des fonds, ils trouvent face à eux des investisseurs américains impatients de mettre la main sur la prochaine grande idée à soutenir.

En tant qu’Européens, nous avons quelque chose à apprendre de nos amis américains. Si nous voulons progresser dans le secteur des technologies, nous devons prendre conscience du fait que, pour innover, l’entrepreneur a besoin de se sentir en confiance lorsqu’il investit dans son idée de produit.

Sur le marché technologique, nos concurrents américains et asiatiques profitent aussi d’une législation plus souple en matière de protection de la vie privée. Imaginez que Facebook ou Alexa [assistant vocal d’Amazon] aient été lancés par une entreprise européenne : les régulateurs auraient probablement inspecté ces idées de fond en comble, jusqu’à les tuer dans l’œuf.

Tech : La régulation des plates-formes est devenue incontournable

Tech : La régulation des plates-formes est devenue incontournable

 

Sheryl Sandberg, directrice des opérations de Facebook, et Jack Dorsey, PDG de Twitter expliquent  que la régulation est devenue incontournable pour les plates-formes dans le Wall Street Journal (extrait)

 

 

 

 

Apparemment, tout le monde dans la tech – et bien d’autres au-delà – veut avoir une activité de plateforme. Uber a utilisé ce terme à 747 reprises dans son prospectus d’introduction en Bourse en mai. We Co., la maison-mère du loueur de bureaux en difficultés WeWork, se targuait d’avoir une plateforme mondiale dans les documents de son introduction en Bourse qui n’a finalement pas eu lieu. Peloton Interactive, qui fabrique des équipements sportifs connectés, se désigne comme « la plus grande plateforme fitness interactive au monde ». Même Beyond Meat aime parler de ses « plateformes de produits à bases de plantes ».

Derrière l’engouement pour un terme en apparence anodin se cache un concept économique qui, dans ses diverses incarnations sur Internet, est devenu un tremplin pour une croissance et une richesse immenses. Les entreprises construites sur ce concept – de Facebook, YouTube et Twitter à Amazon, Uber et Airbnb – ont collectivement réuni des milliards d’utilisateurs et créé des centaines de milliards de dollars de valeur marchande en déployant des systèmes logiciels pour mettre en relation les créateurs de contenu avec une audience, les vendeurs avec les acheteurs, les chauffeurs avec les passagers, les hôtes avec les invités. Ces entreprises exercent un pouvoir sans précédent sur la façon dont les gens communiquent, sur ce qu’ils savent et regardent, et sur la façon dont ils font leurs achats et se déplacent.

Aidées par une approche non interventionniste du régulateur aux États-Unis, ces entreprises ont donné la priorité au recrutement, le plus rapide possible, de prestataires et d’utilisateur – et ont souvent balayé d’un revers de main les contraintes, contrôles et coûts supportés par les entreprises plus traditionnelles dans les secteurs qu’elles cherchaient à réinventer. « Nous sommes une plateforme », est répété à l’envi – pas un média, un commerçant, un fournisseur de services ou un exploitant de services automobiles.

Ce cadrage est désormais remis en cause de toutes parts. Utilisateurs, élus et régulateurs aux États-Unis et en Europe ont attaqué Facebook, YouTube et d’autres plateformes de réseaux sociaux pour en avoir fait trop peu alors que bigots, brutes et propagandistes étrangers inondaient leurs plateformes d’insultes et de désinformation. Amazon est sous le feu des critiques pour son contrôle laxiste de son marketplace, et Uber se bat contre une loi californienne qui pourrait obliger les entreprises de l’économie « collaborative » à traiter les chauffeurs comme des employés.

Le degré de responsabilité des entreprises technologiques à l’égard de leurs plateformes est devenu l’un des enjeux clés de notre époque. La façon dont cette question sera résolue aura des ramifications dans les décennies avenir pour le monde des affaires, l’intérêt des consommateurs et le discours social.

Pendant la plus grande partie de leur histoire, les entreprises tech ont été tellement concentrées sur les défis d’une croissance rapide que s’inquiéter de ce qui se passait sur leurs plateformes a été relégué au second plan, dit Geoffrey Parker, professeur d’ingénierie au Dartmouth College et co-auteur d’un livre sur l’essor de ces entreprises, titré Platform Revolution.

« Aujourd’hui, dit-il, cela leur pète à la figure. »

Les plateformes telles qu’on les connaît n’existeraient pas sans un texte de loi de 1996, l’article 230 230 du Communications Decency Act, qui exempte largement les services en ligne de responsabilités pour les contenus de tiers.

Ironie du sort, l’article 230 était au départ un projet visant à faciliter la modération de contenus. Il est arrivé après deux procès en diffamation avec des résultats contradictoires au début des années 1990 contre deux des entreprises qu’on appelait alors « portails Internet », hébergeurs de newsletters, forums et chat rooms où l’on trouvait des contributions d’utilisateurs.

Dans le premier cas, un tribunal fédéral a estimé que CompuServe n’était pas responsable pour les propos présumés diffamatoires à l’encontre d’un concurrent dans une newsletter de sa plateforme. CompuServe était considéré comme un distributeur : à l’instar d’une bibliothèque ou d’une librairie, il ne pouvait être tenu pour responsable pour chaque contenu qu’il véhiculait, a estimé la cour.

Quelques années plus tard, une publication anonyme sur un BBS (bulletin board system) du portail Prodigy évoquait une fraude chez le courtier Stratton Oakmont, à Long Island (N.Y.), qui sera plus tard au cœur du film de Martin Scorsese Le loup de Wall Street. Prodigy fonctionnait différemment de CompuServe, avec des directives de contenu et des modérateurs qui supprimaient parfois des messages. Stratton Oakmont a poursuivi Prodigy en justice, arguant que ces caractéristiques signifiaient qu’il était responsable de l’allégation de fraude faite sur sa plateforme. En 1995, un tribunal de l’État de New York a donné raison à Prodigy.

Cela a inquiété certains élus, qui ont eu peur que punir les entreprises tech qui modéraient certains, mais pas tous les contenus qu’elles hébergeaient, comportait le risque d’entraver le développement d’internet. Deux d’entre eux, le sénateur Ron Wyden, un démocrate de l’Orégon, et Chris Cox, alors élu républicain de Californie, ont déposé un projet de loi qui est devenu l’article 230, comportant la clause suivante : « Aucun fournisseur ou utilisateur d’un service informatique interactif ne doit être considéré comme l’éditeur ou le locuteur d’une information fournie par un autre fournisseur de contenu d’information. »

A l’époque, personne n’imaginait ce qu’internet allait devenir. Amazon n’avait pas deux ans, et Yahoo et eBay étaient également des enfants en bas âge. Google ne serait enregistré comme entreprise que deux ans plus tard, Facebook six ans plus tard, quant à Uber et Airbnb, ils n’ont vu le jour que plus d’une décennie après le vote de cette loi.

Mais cette série de mots a eu pour résultat d’offrir aux entreprises tech « une immunité incroyablement large » qui a été essentielle au développement des plateformes que nous utilisons aujourd’hui, note Jeff Kosseff, auteur d’un ouvrage sur la Section 230, intitulé, The Twenty-Six Words That Created the Internet. (« Les vingt-six mots fatidiques qui ont créé Internet »)

Get big fast

Cette loi a accompagné des évolutions technologiques et stratégiques. Le développement de connexions réseau plus rapides et d’une puissance de calcul accrue – en particulier après l’avènement du smartphone – a attiré plus de monde sur un internet toujours plus omniprésent.

En tirant parti de ce pouvoir, les entrepreneurs se sont emparés de modèles économiques qui devenaient plus intéressants pour les utilisateurs à mesure que plus de gens les utilisaient, dit le professeur Parker de Dartmouth – plus de contenu attirait plus d’utilisateurs, ce qui rendait la plateforme plus attrayante pour les créateurs de contenu, qui attiraient plus d’utilisateurs.

Ces facteurs sont liés à une autre caractéristique clé : la croissance rapide des plateformes a souvent nécessité relativement peu de coûts supplémentaires, surtout avec le bouclier juridique fourni par l’article 230. Elles étaient, comme on dit dans la Silicon Valley, hautement « scalable ».

Ces qualités – qui ont marché aussi bien pour les amis sur les réseaux sociaux que pour les vendeurs et les acheteurs, les chauffeurs et les passagers, et ainsi de suite – ont alimenté la croissance rapide des entreprises. Et les investisseurs en capital-risque et les entrepreneurs considéraient que beaucoup de ces marchés étaient des marchés où le gagnant rafle tout, d’où l’importance de grossir plus vite que la concurrence.

« Vous êtes en fait en mode survie », dit Tim Kendall, qui était directeur de la monétisation de Facebook de 2006 à 2010 ; il a plus tard été président de la société de partage d’images en ligne Pinterest. Il dit que lorsqu’il a rejoint Facebook, le site était loin derrière Myspace en nombre d’utilisateurs et qu’il n’était pas certain qu’il y arriverait. « Quand vous êtes en mode survie, vous n’êtes pas incités à prendre un peu de recul et réfléchir à la société et penser aux implications d’ordre supérieur, parce que vous voulez juste vivre et vous battre un jour de plus. »

Les dirigeants ont conservé cet état d’esprit même après que leurs entreprises sont devenues titanesques. Facebook a pris pour habitude au cours de la dernière décennie – bien après avoir conquis l’univers des réseaux sociaux – de lancer un nouveau produit ou une fonctionnalité quelconque pour mieux s’excuser après avoir été confronté à une volée de bois vert concernant les contenus, la vie privée et d’autres problèmes. Uber, aux prises avec son rival Lyft, s’est rué sur une ville après l’autre plus rapidement que les régulateurs ne pouvaient s’adapter.

« Chaque partie de votre corps vous dit que vous êtes David », indique M. Kendall, désormais à la tête d’une start-up appelée Moment qui aide les gens à diminuer le temps passé sur leurs smartphones. « Et aucune de ces entreprises ne sait quand elle devient Goliath. Elles sont pratiquement incapables de savoir qu’elles sont devenues Goliath, tant qu’elles n’ont pas été sanctionnées violemment par un régulateur ou un gouvernement ou une amende. »

Le retour de bâton

Les coups pleuvent de toutes parts ces derniers temps, et les entreprises plateformes répondent avec un mélange de défiance et d’efforts de conciliation.

Le flot de désinformation pendant la campagne présidentielle américaine en 2016 a suscité une attention sans précédent sur les responsabilités que Facebook, Twitter, YouTube et d’autres plateformes de réseau sociaux devraient assumer pour le contenu qu’elles diffusent. Le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, le DG de Twitter, Jack Dorsey, et d’autres dirigeants, convoqués à des audiences du Congrès, se sont engagés à faire plus. Facebook affirme avoir embauché des milliers de nouveaux travailleurs pour renforcer la surveillance et la sécurité sur sa plateforme – un effort rendu plus complexe et plus coûteux par la nécessité d’adapter ses mesures à la myriade de marchés où le réseau est implanté à travers le monde.

Amazon dit avoir dépensé 400 millions de dollars l’année dernière pour adresser le problème de la contrefaçon et des produits qui ne sont pas aux normes, et est prêt à dépenser des milliards encore dans les prochaines années, après qu’une croissance rapide de vendeurs extérieurs sur sa marketplace a déclenché un afflux de produits de cette nature.

Utilisateurs et investisseurs aussi se méfient davantage des lignes de défense de ces plateformes.

En mars, le Wall Street Journal a révélé que Care.com, le numéro un américain de la mise en relation avec des baby-sitters et aides soignants par Internet, procédait seulement à une vérification très limitée du personnel aidant, parfois avec des conséquences dramatiques. L’entreprise a répondu qu’elle était une plateforme, et que, comme d’autres plateformes, elle ne vérifiait en général pas les informations publiées par les utilisateurs. L’action Care.com a plongé en Bourse dans le sillage de ces révélations, son DG a démissionné et, en décembre, a accepté de se vendre à IAC/InterActive Corp. pour environ 60 % de sa dernière valorisation.

En parallèle, tribunaux et élus sont en train de fixer de nouvelles limites aux libertés offertes par l’article 230. L’année dernière, le Congrès a adopté à une écrasante majorité une loi supprimant l’immunité des entreprises en ligne qui facilitent le commerce du sexe en ligne. Cette loi, qui répondait à l’explosion de la prostitution en ligne sur des sites comme Backpage.com, maintenant fermé, a été fortement contestée par les entreprises du Web, qui ont alerté sur le fait qu’elle était susceptible d’éroder les protections offertes par l’article 230.

En mars, une cour d’appel fédérale en Californie a rejeté une tentative d’Airbnb et de son concurrent HomeAway, une unité du Groupe Expedia d’invoquer l’article 230 comme défense contre une ordonnance de la ville californienne de Santa Monica les obligeant à s’assurer que les annonces locales sur leurs plateformes étaient conformes aux règles de la ville.

Airbnb est aussi en train de renforcer les mesures de sécurité sur sa plateforme après plusieurs incidents, dont une fusillade mortelle pendant une soirée qui a dégénéré dans une propriété louée via Airbnb. L’entreprise devait « assumer davantage de responsabilité pour les choses sur notre plateforme », a déclaré son patron, Brian Chesky, à propos des changements en novembre. « Notre secteur connaît une transition progressive, peut-être trop progressive. »

La bataille sur la responsabilité des plateformes dépasse les contenus. La Californie a adopté une loi qui entre en application le 1er janvier qui pourrait contraindre Uber et ses concurrents à traiter leurs chauffeurs comme des employés, susceptible de prétendre au salaire minimum et à des congés maladie payés. Uber a déclaré qu’il n’a pas à changer ses pratiques en raison de cette loi, et que ce n’est pas une entreprise de VTC mais « une plateforme technologique pour plusieurs types de places de marché numériques. »

Les entreprises plateformes ne vont pas disparaître. Elles ont amassé des millions et des millions d’utilisateurs avec des services qui mettent les gens en relation de manières utiles et nouvelles. Malgré le retour de bâton, nombre d’entre elles continuent de croître.

Mais le modèle est clairement en train de changer. La responsabilité de ce qui se passe sur les plateformes n’est plus une réflexion de second plan. Se déployer rapidement à grande échelle et moindre coût n’est pas sans contraintes. C’est ce que dit le professeur Parker : « L’ère de la régulation des plateformes est arrivée. »

La Chine met au pas la Tech et l’éducation

La Chine met au pas la Tech et l’éducation

Depuis novembre dernier déjà, le pouvoir chinois a décidé de reprendre directement en main plusieurs sociétés cotées à l’étranger. Il accuse leurs dirigeants d’avoir pris trop de libertés et parfois de manquer de prudence dans la gestion des données personnelles.

Le gouvernement, qui veut renforcer son contrôle sur l’économie et la société, a adopté des règles anti-monopoles ou relatives à la sécurité des données.

Après avoir épinglé certains géants du numérique, les autorités chinoises ont déclaré en juillet qu’elles souhaitaient revoir en profondeur le modèle économique des groupes privés spécialisés dans l’éducation, qui ont prospéré ces dernières années. Constatant l’engouement de familles chinoises pour ce soutien scolaire, le gouvernement chinois a décidé fin juillet d’y interdire les profits, la levée de capitaux ou une introduction en Bourse. Résultat, des poids lourds du secteur ont rapidement chuté sur les marchés.

 

Risque d’écroulement des valeurs de la tech chinoise

Risque d’écroulement des valeurs de la tech chinoise

 

Un article du Wall Street Journal évoque le risque d’écroulement des valeurs de la tech chinoise totalement reprise en main par le parti communiste. (Extrait)

 

 

Ces derniers mois, Pékin a dynamité ce qui aurait pu être la plus grosse introduction en Bourse de l’histoire, ouvert des enquêtes sur plusieurs géants technologiques et fait disparaître plus de mille milliards de dollars de capitalisation pendant que les investisseurs cherchaient à se couvrir comme ils pouvaient.

Et tout porte à croire que ce n’est pas fini.

Investisseurs, analystes et chefs d’entreprise en sont convaincus : l’offensive du gouvernement, destinée à remettre les entreprises privées dans le droit chemin de l’Etat (et veiller à ce qu’elles servent les intérêts économiques, sociaux et de sécurité nationale du Parti communiste), ne fait que commencer.

Xi Jinping a de grandes ambitions pour la Chine, des ambitions qui risquent d’avoir des conséquences graves et imprévisibles sur les entreprises, affirment ces observateurs. Et satisfaire les investisseurs étrangers n’en fait pas partie.

Les risques se sont accrus pour ceux qui ont déversé des milliards de dollars dans les très dynamiques entreprises chinoises, en espérant miser sur le seul secteur technologique capable de concurrencer la Silicon Valley

Selon un rapport de Goldman Sachs daté du 29 juillet, les régulateurs ont (ou auraient) lancé plus de 50 procédures sur des questions de concurrence, de finance, de sécurité des données et d’égalité des chances depuis le mois de novembre, soit plus d’une par semaine.

Parmi elles, le sabotage de la méga-introduction en bourse d’Ant Group, l’amende record de 2,8 milliards de dollars infligée à Alibaba et le rejet d’un projet de fusion mené par Tencent.

Pas question de trêve estivale : une enquête de cybersécurité visant Didi Global a été ouverte quelques jours après que la plateforme de VTC entre en Bourse à New York, et il a été décidé (sans préavis) que les cours particuliers devaient désormais relever d’organisations à but non lucratif. Les secteurs de l’immobilier et la livraison de repas sont également dans la ligne de mire.

Mardi, un journal chinois proche de l’agence de presse officielle Xinhua a critiqué les jeux en ligne, les qualifiant d’« opium de l’esprit », des propos qui ont fait craindre un assaut du régulateur contre Tencent et ses jeux très appréciés des Chinois. Signe de la fébrilité des investisseurs, l’article a provoqué un effondrement de son cours de Bourse. Il a ensuite disparu du site, avant d’être republié dans une version édulcorée, sans référence à l’opium.

Le même jour, le département de propagande du parti, qui décide quels livres, films et jeux peuvent sortir dans le pays, a adopté une règle limitant le rôle des algorithmes dans la diffusion de contenus, une décision qui pourrait pénaliser des entreprises comme ByteDance et Tencent.

Le département n’a pas répondu à une demande de commentaire.

Le gouvernement chinois s’est peu exprimé sur les différentes enquêtes en cours, et ne s’est pas montré plus prolixe concernant leur date de conclusion. Dans certains cas, les détails ne sont pas encore arrêtés.

Les salariés de plusieurs entreprises technologiques ont raconté que les autorités ont passé des dossiers au peigne fin et posé des questions sur la façon dont les données étaient collectées. Des contrats et des documents financiers ont été saisis par les enquêteurs, ainsi que des e-mails et des communications internes.

Certaines entreprises ont aussi été informées qu’en vertu des règles de lutte contre les monopoles, elles devaient réduire leur part de marché.

Mais ce qui inquiète particulièrement les investisseurs et les dirigeants de ces entreprises, c’est l’impression que les régulateurs, eux-mêmes, ne savent pas jusqu’où tout cela peut aller.

Fin juillet, de nouvelles règles ont été édictées ; elles imposent notamment le versement d’un salaire minimum et la fourniture d’une assurance maladie aux livreurs. Quand les entreprises concernées ont contacté les autorités pour avoir plus de précisions, on leur a répondu que les autorités cherchaient elles aussi à en savoir plus, a indiqué l’une des sources.

La Chine est coutumière des revirements soudains dans sa réglementation en fonction des objectifs à long terme. Avec, parfois, des conséquences graves. En décembre 2020, le régulateur bancaire a ainsi annoncé qu’après une opération lancée en 2018, le secteur des prêts entre particuliers avait été « supprimé ».Les dernières initiatives de Pékin sont portées par des ambitions bien plus grandes, et une volonté manifeste d’agir.

Après un passage à vide en raison de la Covid-19, l’activité est repartie grâce aux exportations : les dirigeants ont donc plus de marge de manœuvre pour les réglages économiques et les questions qui agacent les investisseurs étrangers. Au premier semestre, le produit intérieur brut (PIB) a bondi de 12,7 %, ce qui devrait permettre à la Chine de dépasser son objectif de croissance annuelle (6 %).

Parallèlement, les tensions avec les Etats-Unis n’ont pas baissé avec l’arrivée de Joe Biden à la présidence, ce qui conforte Pékin dans sa volonté de se concentrer sur la sécurité et l’autosuffisance.

Dans ce contexte, Xi Jinping avance avec détermination sur des priorités sociales, économiques et de sécurité nationale qui patinent souvent depuis des années.

« Ce n’est pas la première fois que les régulateurs chinois changent totalement de cap », indique Robin Xing, économiste en chef pour la Chine chez Morgan Stanley.

Dans le secteur technologique, les craintes de la Chine sont assez similaires à celles qui agitent les régulateurs en Occident : pouvoir de marché, utilisation des données, entre autres choses. Pékin considère aussi que le pouvoir du secteur pourrait menacer le sien, d’où la tendance répressive.

Pour les investisseurs, il est intéressant de comprendre le pourquoi du comment, mais cela ne fait pas tout, estime Logan Wright, responsable de la recherche sur les marchés chinois chez Rhodium.

« Cela ne modifie pas fondamentalement l’idée que le risque réglementaire est voué à augmenter, et c’est très loin d’être fini », souligne-t-il.

Et il y a des limites à ce que le gendarme de la bourse peut faire pour rassurer les investisseurs sur les projets chinois, estime Lyndon Chao, responsable des actions de l’association asiatique des valeurs mobilières et des marchés financiers, une organisation qui regroupe des banques, des courtiers et des gestionnaires d’actifs.

« Il s’agit de politiques de très haut niveau, qui sont portées par des questions de sécurité nationale et de prospérité partagée, ajoute-t-il. La CSRC peut essayer de faire illusion et d’apaiser les marchés, mais elle n’a aucun pouvoir sur ces politiques. »

Pourtant, selon lui, « les dirigeants s’intéressent au sort des investisseurs étrangers, parce qu’ils savent que, dans le contexte actuel de concurrence frontale entre les Etats-Unis et la Chine, ils doivent se faire des amis et influencer les gens ».

Les inquiétudes ont également été attisées par la crainte de voir ces entreprises sortir de la Bourse ou encore des inquiétudes sur la viabilité des structures juridiques utilisées par bon nombre de groupes chinois.

En vertu d’une loi adoptée en 2020, à l’époque de l’administration Trump, les entreprises chinoises risquent d’être exclues des places boursières américaines si elles refusent de transmettre certains documents aux autorités américaines. Pour Pékin, cela veut dire prendre le risque que des données précieuses, notamment des informations sur les clients et les organismes publics chinois, figurent dans ces documents et finissent entre les mains d’un gouvernement étranger.

La décision qui a récemment frappé le secteur des cours particuliers a mis en lumière les « variable interest entities », des structures juridiques utilisées par les entreprises chinoises présentes dans des secteurs sensibles pour se coter à l’étranger.

Entre le point haut de février et maintenant, les six plus grandes entreprises technologiques chinoises, dont Alibaba et Tencent, ont vu s’envoler quelque 1 100 milliards de dollars de valorisation, soit une chute de plus de 40 %.

Les stratégistes de BofA Securities ont récemment recommandé aux investisseurs de sortir des valeurs de croissance chinoises et de se tourner vers d’autres pays de la zone Asie-Pacifique

Les stratégistes de BofA Securities ont récemment recommandé aux investisseurs de sortir des valeurs de croissance chinoises et de se tourner vers d’autres pays de la zone Asie-Pacifique, estimant que le positionnement des investisseurs étrangers sur ces titres n’était « pas compatible avec les stratégies qui se profilent ».

Certains investisseurs et analystes considèrent cependant les évolutions récentes comme positives à terme pour la Chine, et estiment qu’il y a donc des opportunités d’investissement. Les entreprises cotées sur les marchés de Shanghai et Shenzhen sont souvent présentes dans des secteurs plus proches des priorités nationales, comme les semi-conducteurs, les véhicules électriques ou l’intelligence artificielle.

Wim-Hein Pals, responsable de l’équipe marchés émergents chez Robeco, un gestionnaire d’actifs, affirme que la Chine reste un pays intéressant. « Il était très simple de gagner de l’argent en Chine, estime-t-il. Cette idée a clairement été battue en brèche ces derniers temps, et il était temps. »

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