Ukraine : poursuivre les criminels de guerre tant qu’ils seront vivants
Les crimes perpétrés durant l’invasion russe ne resteront pas impunis, prévient un collectif de personnalités internationales, parmi lesquelles le député européen Pierre Larrouturou, dans une tribune au « Monde ». Il appelle les justices nationales à se saisir des exactions commises, comme l’a déjà fait l’Allemagne.
Tribune.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, des vidéos nous rendent témoins des exactions gravissimes commises par les forces russes. L’ensemble de la chaîne de commandement, du soldat aux dirigeants russes, doit être conscient que les Ukrainiens comme la communauté internationale leur demanderont des comptes. L’agression subie par l’Ukraine est, en elle-même, une violation du droit international, qui proscrit le recours et la menace du recours à la force entre Etats souverains. Mais les actions commises par les forces russes régulières ou irrégulières (on pense aux mercenaires du Groupe Wagner) sont également soumises au droit des conflits armés.
Prohibés par la coutume internationale et par plusieurs instruments internationaux comme l’article 8 du statut de Rome créant la Cour pénale internationale (CPI), les crimes de guerre désignent la violation de plusieurs interdictions. Parmi elles, on peut mentionner les infractions graves aux conventions de Genève du 12 août 1949, l’homicide intentionnel, la torture ou les traitements inhumains, la destruction et l’appropriation de biens non justifiées par des nécessités militaires et exécutées de manière large et arbitraire, les violations des droits des prisonniers de guerre, le fait de lancer des attaques délibérées contre la population civile, d’attaquer ou de bombarder des villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus et qui ne sont pas des objectifs militaires, ou encore de détruire, de piller ou de saisir les biens de l’ennemi.
Si de tels crimes étaient commis, le président russe – qui ne pourrait pas se prévaloir de ses immunités devant les juridictions internationales – ne serait pas le seul visé. Bien sûr, les exécutants, comme les soldats, s’étant rendus coupables de ces crimes pourront être jugés. Mais il en va de même pour les membres du gouvernement russe impliqués dans les décisions militaires, pour les membres de la chaîne de commandement militaire, pour toutes les personnes exerçant un contrôle sur les forces militaires comme paramilitaires ainsi que pour les responsables civils.
Enfin, toute personne qui apporterait consciemment son concours ou une assistance substantielle à la commission d’un crime de guerre pourra être poursuivie. Tel est le cas des personnes qui aideraient à la réalisation de ces crimes et qui pourraient être jugées complices, mais aussi des entreprises et financeurs qui participeraient indirectement, par la fourniture de fonds ou la vente de matériels servant à la commission des crimes. En témoignent la mise en examen en France de Nexa Technologies pour des allégations de vente de matériel au régime du président Al-Sissi en Egypte, et la poursuite en Suède de Lundin Energy pour complicité de crimes de guerre en Soudan : aucun financeur de l’armée et du régime russes, aucune entreprise ne sera à l’abri de poursuites si leur responsabilité dans les crimes de guerre susceptibles d’être commis est établie.