Archive pour le Tag 'Substituer'

Justice: Ne pas lui substituer les chaînes d’info, les réseaux sociaux et les pétitions

 Justice: Ne pas lui substituer les chaînes d’info, les réseaux sociaux et les pétitions

simple mise en accusation emporte malheureusement avec elle le droit de s’exprimer, de travailler ou de se défendre, regrettent les avocats Mathias Chichportich et Pierre-Olivier Sur dans une tribune au « Monde ».

 

La justice et la presse poursuivent la même aspiration : la manifestation de la vérité. Leurs deux légitimités s’entrechoquent autour de deux temporalités : le temps judiciaire, ponctué par les différentes étapes d’une procédure contradictoire et l’annonce d’un jugement qui prend parfois des années, et le temps médiatique, cristallisé en une fraction de seconde par l’image d’un célèbre acteur dont le comportement est manifestement outrageant ou l’annonce d’une garde à vue sur un bandeau « Urgent » diffusé sur une chaîne d’information en continu.

Le « vu à la télé », c’est un jugement moral sans appel qui se propage par cercles concentriques et par la viralité des réseaux sociaux. Au sein de ce prétoire virtuel, il n’y a pas de juge indépendant pour dire le droit, ni d’avocat pour assurer les droits de la défense. La foule numérique fixe ses propres normes dans un tribunal où l’opinion majoritaire impose la vérité de l’instant.La peine doit alors être immédiate : les appels à la déprogrammation des films et au retrait de la légion de l’honneur pour consacrer « la chute de l’ogre » du cinéma français. A Sciences Po, un mur d’affiches aux couleurs du soleil couchant réclame une démission. Des procédures de retrait pour les uns, des promesses d’avenir pour les autres et une sanction immédiate pour tous, y compris pour la plupart des plaignantes qui ne recherchent pas la lumière et dont la finalité de la démarche est dévoyée.

Ces affaires sont très différentes tant du point de vue des comportements incriminés que du stade de la procédure judiciaire auquel elles se situent, mais à l’heure où chacun est sommé de choisir son camp par pétition interposée, il nous paraît essentiel d’affirmer qu’il est absurde d’opposer la lutte légitime contre les violences faites aux femmes et les principes essentiels de la justice pénale.

Justice: Ne pas lui substituer les chaînes d’info, les réseaux sociaux et les pétitions

 Justice: Ne pas lui substituer les chaînes d’info, les réseaux sociaux et les pétitions

simple mise en accusation emporte malheureusement avec elle le droit de s’exprimer, de travailler ou de se défendre, regrettent les avocats Mathias Chichportich et Pierre-Olivier Sur dans une tribune au « Monde ».

 

La justice et la presse poursuivent la même aspiration : la manifestation de la vérité. Leurs deux légitimités s’entrechoquent autour de deux temporalités : le temps judiciaire, ponctué par les différentes étapes d’une procédure contradictoire et l’annonce d’un jugement qui prend parfois des années, et le temps médiatique, cristallisé en une fraction de seconde par l’image d’un célèbre acteur dont le comportement est manifestement outrageant ou l’annonce d’une garde à vue sur un bandeau « Urgent » diffusé sur une chaîne d’information en continu.

Le « vu à la télé », c’est un jugement moral sans appel qui se propage par cercles concentriques et par la viralité des réseaux sociaux. Au sein de ce prétoire virtuel, il n’y a pas de juge indépendant pour dire le droit, ni d’avocat pour assurer les droits de la défense. La foule numérique fixe ses propres normes dans un tribunal où l’opinion majoritaire impose la vérité de l’instant.La peine doit alors être immédiate : les appels à la déprogrammation des films et au retrait de la légion de l’honneur pour consacrer « la chute de l’ogre » du cinéma français. A Sciences Po, un mur d’affiches aux couleurs du soleil couchant réclame une démission. Des procédures de retrait pour les uns, des promesses d’avenir pour les autres et une sanction immédiate pour tous, y compris pour la plupart des plaignantes qui ne recherchent pas la lumière et dont la finalité de la démarche est dévoyée.

Ces affaires sont très différentes tant du point de vue des comportements incriminés que du stade de la procédure judiciaire auquel elles se situent, mais à l’heure où chacun est sommé de choisir son camp par pétition interposée, il nous paraît essentiel d’affirmer qu’il est absurde d’opposer la lutte légitime contre les violences faites aux femmes et les principes essentiels de la justice pénale.

Métavers: Substituer le fantasme au réel !

Métavers: Substituer le fantasme au réel !

 

Auteur d’une thèse sur les jeux vidéo, l’universitaire Douglas Hoare esquisse, dans une tribune au « Monde », une critique du métavers et son « fétichisme de la marchandise », dénonçant l’avènement d’un « monde à l’envers », qui reste pour l’instant à l’état de prototype.

 

Le métavers n’existe encore qu’à l’état de projet, et pourtant, il occupe déjà une place considérable dans la sphère médiatique. On en fait l’éloge dans les discours officiels, les reportages télévisés, les colonnes des journaux. D’autres voix mettent en garde contre ses périls, quitte à citer des ouvrages critiques pour se donner un vernis subversif. Mais on débat du dispositif comme s’il était déjà là, sans jamais poser le problème de son existence.

Pour justifier leur enthousiasme, les partisans du métavers nous promettent des communications plus intenses, un lien social renforcé, des simulations permettant un apprentissage ludique, une créativité sans limite, etc. Internet permet déjà le télétravail et les visioconférences ; les jeux vidéo, un dépaysement virtuel. Le métavers se propose de combiner les deux. Au sein du simulacre, la plus ennuyeuse des réunions se donnera des airs de jeu.

Grâce à la réalité virtuelle, le participant sera en immersion dans un jeu vidéo total. Grâce à la réalité augmentée, ce jeu vidéo débordera l’écran, contaminera notre perception du réel au point de faire corps avec lui. Leur association paraîtra réaliser les promesses de l’imaginaire.

Le fantasme régnera en maître, de même que le miracle, puisque, dans la réalité virtuelle, toute contradiction avec le réel peut être suspendue ; et dans la réalité augmentée, le moindre geste pourra acquérir une portée magique, être embelli et agrandi par le simulacre.

Mais cet imaginaire n’est pas aussi libre qu’il en a l’air, dans la mesure où il est objectivé. Ce n’est plus le produit d’une conscience rêveuse, c’est une fantaisie informatique qui implique une procédure à suivre pour que l’on puisse en jouir. C’est ici que l’échange, propre au jeu vidéo, d’une liberté simulée contre un asservissement réel est retrouvé à une tout autre échelle.

La fusion de l’interface et de la réalité permettra d’étendre la quantification de nos actes, et avec elle la rationalisation des conduites. Greffé à notre vue, le programme restituera les données de nos moindres faits et gestes. Le participant sera en autoévaluation constante, enfermé dans des boucles de rétroaction. Il ajustera sa conduite pour faire grimper ou baisser la statistique qu’est devenue sa vie. L’accès au merveilleux informatique se monnaiera donc : il impliquera d’aligner l’ensemble des activités humaines sur un processus de valorisation économique.

Ce processus, déjà bien entamé par les smartphones et leurs applications, a de beaux jours devant lui. C’est finalement une certaine interprétation du monde – celle du fétichisme de la marchandise – paraissant d’autant plus objective qu’elle semblera émaner de la réalité elle-même, qui se substituera au monde.




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