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Politique-Contre la radicalité stérile, le retour de la social-démocratie ?

Politique-Contre la radicalité stérile, le retour de la social-démocratie ?

Par
Pierre-Nicolas Baudot
Doctorant en science politique à l’Université Paris-Panthéon-Assas, ATER à l’Université Clermont-Auvergne, spécialisé en histoire sociale des idées partisanes, Université Paris 2 Panthéon-Assas

Le printemps 2023 a vu le retour inattendu des références à la social-démocratie. Le 10 juin, l’ancien premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve lançait son mouvement, La Convention. Se revendiquant d’une « gauche sociale-démocrate », il fustigeait l’impasse de la Nupes et la stratégie jugée brutale de la France Insoumise (LFI). Quelques mois plus tôt, le député LFI François Ruffin adoptait une stratégie prônant le « rassemblement » après s’être déclaré « social-démocrate » à la une du Nouvel Observateur. À son tour, le secrétaire national du parti communiste Fabien Roussel tendait la main au « centre gauche », estimant la Nupes dépassée.

Au sein du PS, la stratégie d’alliance a également suscité de profondes divisions, exprimées lors du dernier congrès. Faut-il voir dans ces initiatives éparses un « retour de la social-démocratie » ? Pour cela, il importe d’observer le sens acquis par cette étiquette, ainsi que le degré d’homogénéité des acteurs qui s’en réclament.

Dès son apparition au XIXe siècle, la social-démocratie a été parcourue par d’importants débats quant au rapport à l’égalité sociale, à la participation démocratique ou aux institutions. Aujourd’hui, la revendication de cette identité ne recouvre qu’imparfaitement les positions politiques adoptées en réalité. Le politiste Fabien Escalona et l’économiste Romaric Godin ont ainsi montré que l’héritage de la social-démocratie se retrouve plutôt dans le programme de la Nupes qu’auprès de ses critiques.

En plaçant l’égalité sociale, la redistribution, les procédés démocratiques et la refonte institutionnelle au cœur de son action, le programme de la Nupes interroge bien, sans toujours le revendiquer, les fondements du néo-libéralisme.

À l’inverse, par leur contribution au délitement de l’État social et leur inclinaison pour une « politique de l’offre », l’« aile gauche du macronisme » comme les héritiers du hollandisme semblent s’être écartés des fondements doctrinaux de la social-démocratie. Ce constat invite à interroger le rôle politique dévolu à cette étiquette.

Le lancement de La Convention illustre la fonction politique de la référence à l’identité sociale-démocrate. Entouré de François Hollande et de plusieurs des figures de la social-démocratie européenne, Bernard Cazeneuve a construit son discours autour de la revendication d’une culture de gouvernement. Il a rejoué l’opposition traditionnelle entre les courants radicaux de la gauche, jugés irréalistes, et sa branche réformiste, raisonnable, capable d’assumer sa vocation à gouverner.

Ce schéma s’observe dans la trajectoire de nombre des partis socialistes européens. Leur identité s’est progressivement ancrée dans les capacités à intégrer les contraintes économiques et budgétaires de l’État et à exercer durablement le pouvoir, plutôt que dans une revendication idéologique ou une alternative politique marquée.

En France, c’est ce qu’illustre le premier septennat de François Mitterrand. La rupture avec le projet de 1981 et l’adoption des outils de la gouvernementalité libérale sont alors justifiées en tant que gages de la capacité du parti à gérer les affaires courantes du pays.

En prolongeant ce schéma, le discours de Bernard Cazeneuve passe sous silence les positions social-libérales du hollandisme (concernant, par exemple, les crédits d’impôts aux entreprises ou la loi travail). Il renvoie également la Nupes à une irresponsabilité de radicaux, voire à une extrême gauche pendant de l’extrême droite.

En arguant que le pouvoir ne se conquiert pas par les marges, il s’agit de revendiquer une position centrale susceptible d’agréger des intérêts divers et de profiter des logiques d’alternance. C’est une position que reprennent les courants qui, au sein du PS, se sont exprimés contre la Nupes. Cependant, en dépit de leur revendication de centralité, la ligne Cazeneuve comme les anti-Nupes du PS demeurent largement minoritaires au plan électoral.

L’avenir et les mouvements du balancier

Il est possible de distinguer plus précisément plusieurs types de stratégies.

Autour de Bernard Cazeneuve, un premier camp anticipe la fin du macronisme (et, dans une moindre mesure, la fin du mélenchonisme) et attend que le mouvement de balancier profite à la gauche. Pour que cela se produise, cette gauche veut se défaire de tout soupçon de radicalité susceptible d’effrayer les électeurs du bloc central. Elle cherche aussi à incarner un versant plus social et plus écologiste du macronisme, pour ne pas être simplement confondue avec celui-ci.

Chez les anti-Nupes du PS, où les élus locaux occupent une place centrale, la logique est autre. Ceux-ci voient dans l’alliance Nupes un accord électoral forgé sur les bases d’un rapport de force national qui diffère de leur situation locale. Le socialisme local s’est progressivement construit dans une forme de dépolitisation et dans la constitution d’alliances autour du PS. La conclusion d’un accord national marqué à gauche et où le PS est nettement minoritaire entre en contradiction avec cette dynamique.

Enfin, les positions adoptées par François Ruffin visent à dépasser l’hétérogénéité de l’électorat de gauche et l’hostilité d’une partie de celui-ci à l’égard de la France Insoumise. Pour cela, il rompt avec les stratégies conflictuelles et centre son propos autour de l’emblème fédérateur du social.

La question qui se pose est de savoir si ces divers acteurs sont réellement disposés à faire évoluer leur projet. Sont-ils susceptibles d’y intégrer des innovations permettant de proposer une alternative lisible au paradigme néolibéral et une issue à la crise sociale-démocrate ?

Dans les années 1970, la social-démocratie est parvenue à renforcer puis à conserver ses positions de pouvoir en renouvelant son projet et son assise électorale. En France, le PS a proposé une perspective de refonte du mode de gestion de l’économie et un débouché politique au libéralisme culturel. Cette offre lui a permis d’agréger les intérêts de certains segments des classes populaires et des classes moyennes salariées.

Par la suite, l’offre sociale-démocrate s’est progressivement trouvée assimilée à l’économie néolibérale, sans parvenir à incarner une réelle alternative.

Par ailleurs, une autre partie de la gauche est restée campée sur l’opposition chimérique entre les enjeux socio-économiques (redistribution, emploi, imposition…) et les enjeux culturels (oppression des femmes, des minorités…). Elle a ainsi freiné les innovations programmatiques. Par le passé, intégrer la diversification des combats pour l’émancipation a pourtant permis à la social-démocratie de mieux résister au déclin électoral que les partis communistes notamment, en faisant évoluer sa base électorale. En France, ce fut, par exemple, le cas avec la politique culturelle sous François Mitterrand, avec le PACS sous Lionel Jospin ou le mariage pour tous sous François Hollande.

En se revendiquant d’une gauche « universaliste et républicaine », Bernard Cazeneuve multiplie les critiques sur les compromissions de LFI (évoquant un « parti de l’outrance » ou l’accusant de « fabriquer des votes d’extrême droite en quantité industrielle ».

Fabien Roussel puis François Ruffin placent en opposition le « social » et le « sociétal » (questions de genre, de sexe, de religion, de multiculturalisme, etc.). Ils tentent de neutraliser le second au titre du potentiel clivant qu’ils lui attribuent.

En reposant sur l’implicite d’une défiance des classes populaires à l’égard des enjeux dits « culturels », cette analyse repose sur une distinction artificielle entre deux dimensions étroitement articulées. Les classes populaires sont elles aussi concernées par les enjeux de lutte contre les diverses formes de stigmatisation. De plus, d’une part, la lutte pour l’émancipation interroge directement les fondements du régime économique (concernant par exemple, la division sexuelle du travail). D’autre part, la mise en cause du néo-libéralisme contient des implications quant à la dignité individuelle et collective (comme les questions liées au système de retraite).

Rejeter cette position revient à espérer qu’une partie de l’électorat de gauche délaisse ses revendications d’émancipation, au nom du « rassemblement ». À travers cela apparaît une série de résistances à un renouvellement doctrinal qui, pourtant, caractérise l’histoire longue de la social-démocratie et lui a permis, par le passé, d’incarner une alternative électorale et de se maintenir au rang des partis de gouvernement.

En définitive, il apparaît donc qu’en France, en 2023, évoquer un retour de la social-démocratie revient avant tout à opposer arbitrairement radicalité et responsabilité politique. Cela conduit à prêter une cohérence interne à des stratégies politiques divergentes.

Contre la radicalité stérile, le retour de la social-démocratie ?

Contre la radicalité stérile, Le retour de la social-démocratie ?

Par
Pierre-Nicolas Baudot
Doctorant en science politique à l’Université Paris-Panthéon-Assas, ATER à l’Université Clermont-Auvergne, spécialisé en histoire sociale des idées partisanes, Université Paris 2 Panthéon-Assas

Le printemps 2023 a vu le retour inattendu des références à la social-démocratie. Le 10 juin, l’ancien premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve lançait son mouvement, La Convention. Se revendiquant d’une « gauche sociale-démocrate », il fustigeait l’impasse de la Nupes et la stratégie jugée brutale de la France Insoumise (LFI). Quelques mois plus tôt, le député LFI François Ruffin adoptait une stratégie prônant le « rassemblement » après s’être déclaré « social-démocrate » à la une du Nouvel Observateur. À son tour, le secrétaire national du parti communiste Fabien Roussel tendait la main au « centre gauche », estimant la Nupes dépassée.

Au sein du PS, la stratégie d’alliance a également suscité de profondes divisions, exprimées lors du dernier congrès. Faut-il voir dans ces initiatives éparses un « retour de la social-démocratie » ? Pour cela, il importe d’observer le sens acquis par cette étiquette, ainsi que le degré d’homogénéité des acteurs qui s’en réclament.

Dès son apparition au XIXe siècle, la social-démocratie a été parcourue par d’importants débats quant au rapport à l’égalité sociale, à la participation démocratique ou aux institutions. Aujourd’hui, la revendication de cette identité ne recouvre qu’imparfaitement les positions politiques adoptées en réalité. Le politiste Fabien Escalona et l’économiste Romaric Godin ont ainsi montré que l’héritage de la social-démocratie se retrouve plutôt dans le programme de la Nupes qu’auprès de ses critiques.

En plaçant l’égalité sociale, la redistribution, les procédés démocratiques et la refonte institutionnelle au cœur de son action, le programme de la Nupes interroge bien, sans toujours le revendiquer, les fondements du néo-libéralisme.

À l’inverse, par leur contribution au délitement de l’État social et leur inclinaison pour une « politique de l’offre », l’« aile gauche du macronisme » comme les héritiers du hollandisme semblent s’être écartés des fondements doctrinaux de la social-démocratie. Ce constat invite à interroger le rôle politique dévolu à cette étiquette.

Le lancement de La Convention illustre la fonction politique de la référence à l’identité sociale-démocrate. Entouré de François Hollande et de plusieurs des figures de la social-démocratie européenne, Bernard Cazeneuve a construit son discours autour de la revendication d’une culture de gouvernement. Il a rejoué l’opposition traditionnelle entre les courants radicaux de la gauche, jugés irréalistes, et sa branche réformiste, raisonnable, capable d’assumer sa vocation à gouverner.

Ce schéma s’observe dans la trajectoire de nombre des partis socialistes européens. Leur identité s’est progressivement ancrée dans les capacités à intégrer les contraintes économiques et budgétaires de l’État et à exercer durablement le pouvoir, plutôt que dans une revendication idéologique ou une alternative politique marquée.

En France, c’est ce qu’illustre le premier septennat de François Mitterrand. La rupture avec le projet de 1981 et l’adoption des outils de la gouvernementalité libérale sont alors justifiées en tant que gages de la capacité du parti à gérer les affaires courantes du pays.

En prolongeant ce schéma, le discours de Bernard Cazeneuve passe sous silence les positions social-libérales du hollandisme (concernant, par exemple, les crédits d’impôts aux entreprises ou la loi travail). Il renvoie également la Nupes à une irresponsabilité de radicaux, voire à une extrême gauche pendant de l’extrême droite.

En arguant que le pouvoir ne se conquiert pas par les marges, il s’agit de revendiquer une position centrale susceptible d’agréger des intérêts divers et de profiter des logiques d’alternance. C’est une position que reprennent les courants qui, au sein du PS, se sont exprimés contre la Nupes. Cependant, en dépit de leur revendication de centralité, la ligne Cazeneuve comme les anti-Nupes du PS demeurent largement minoritaires au plan électoral.

L’avenir et les mouvements du balancier

Il est possible de distinguer plus précisément plusieurs types de stratégies.

Autour de Bernard Cazeneuve, un premier camp anticipe la fin du macronisme (et, dans une moindre mesure, la fin du mélenchonisme) et attend que le mouvement de balancier profite à la gauche. Pour que cela se produise, cette gauche veut se défaire de tout soupçon de radicalité susceptible d’effrayer les électeurs du bloc central. Elle cherche aussi à incarner un versant plus social et plus écologiste du macronisme, pour ne pas être simplement confondue avec celui-ci.

Chez les anti-Nupes du PS, où les élus locaux occupent une place centrale, la logique est autre. Ceux-ci voient dans l’alliance Nupes un accord électoral forgé sur les bases d’un rapport de force national qui diffère de leur situation locale. Le socialisme local s’est progressivement construit dans une forme de dépolitisation et dans la constitution d’alliances autour du PS. La conclusion d’un accord national marqué à gauche et où le PS est nettement minoritaire entre en contradiction avec cette dynamique.

Enfin, les positions adoptées par François Ruffin visent à dépasser l’hétérogénéité de l’électorat de gauche et l’hostilité d’une partie de celui-ci à l’égard de la France Insoumise. Pour cela, il rompt avec les stratégies conflictuelles et centre son propos autour de l’emblème fédérateur du social.

La question qui se pose est de savoir si ces divers acteurs sont réellement disposés à faire évoluer leur projet. Sont-ils susceptibles d’y intégrer des innovations permettant de proposer une alternative lisible au paradigme néolibéral et une issue à la crise sociale-démocrate ?

Dans les années 1970, la social-démocratie est parvenue à renforcer puis à conserver ses positions de pouvoir en renouvelant son projet et son assise électorale. En France, le PS a proposé une perspective de refonte du mode de gestion de l’économie et un débouché politique au libéralisme culturel. Cette offre lui a permis d’agréger les intérêts de certains segments des classes populaires et des classes moyennes salariées.

Par la suite, l’offre sociale-démocrate s’est progressivement trouvée assimilée à l’économie néolibérale, sans parvenir à incarner une réelle alternative.

Par ailleurs, une autre partie de la gauche est restée campée sur l’opposition chimérique entre les enjeux socio-économiques (redistribution, emploi, imposition…) et les enjeux culturels (oppression des femmes, des minorités…). Elle a ainsi freiné les innovations programmatiques. Par le passé, intégrer la diversification des combats pour l’émancipation a pourtant permis à la social-démocratie de mieux résister au déclin électoral que les partis communistes notamment, en faisant évoluer sa base électorale. En France, ce fut, par exemple, le cas avec la politique culturelle sous François Mitterrand, avec le PACS sous Lionel Jospin ou le mariage pour tous sous François Hollande.

En se revendiquant d’une gauche « universaliste et républicaine », Bernard Cazeneuve multiplie les critiques sur les compromissions de LFI (évoquant un « parti de l’outrance » ou l’accusant de « fabriquer des votes d’extrême droite en quantité industrielle ».

Fabien Roussel puis François Ruffin placent en opposition le « social » et le « sociétal » (questions de genre, de sexe, de religion, de multiculturalisme, etc.). Ils tentent de neutraliser le second au titre du potentiel clivant qu’ils lui attribuent.

En reposant sur l’implicite d’une défiance des classes populaires à l’égard des enjeux dits « culturels », cette analyse repose sur une distinction artificielle entre deux dimensions étroitement articulées. Les classes populaires sont elles aussi concernées par les enjeux de lutte contre les diverses formes de stigmatisation. De plus, d’une part, la lutte pour l’émancipation interroge directement les fondements du régime économique (concernant par exemple, la division sexuelle du travail). D’autre part, la mise en cause du néo-libéralisme contient des implications quant à la dignité individuelle et collective (comme les questions liées au système de retraite).

Rejeter cette position revient à espérer qu’une partie de l’électorat de gauche délaisse ses revendications d’émancipation, au nom du « rassemblement ». À travers cela apparaît une série de résistances à un renouvellement doctrinal qui, pourtant, caractérise l’histoire longue de la social-démocratie et lui a permis, par le passé, d’incarner une alternative électorale et de se maintenir au rang des partis de gouvernement.

En définitive, il apparaît donc qu’en France, en 2023, évoquer un retour de la social-démocratie revient avant tout à opposer arbitrairement radicalité et responsabilité politique. Cela conduit à prêter une cohérence interne à des stratégies politiques divergentes.

Sortir de la stérile lutte des classes (Lemaire)

Sortir de la stérile lutte des classes (Lemaire) –

 

Bruno le maire, ministre de l’économie, révèle ses principales préoccupations  dans une interview à la tribune (extrait)

 

BRUNO LE MAIRE - Mon rôle ici à Bercy est  d’accomplir la transformation économique de la France, pour pouvoir annoncer de bonnes nouvelles. Les meilleures, ce serait qu’il y ait enfin du travail pour tous dans notre pays ; ce serait que ceux qui payent le tribut le plus élevé au chômage, les jeunes les moins qualifiés, puissent trouver leur place dans la société ; ce serait enfin que l’économie française réalise pleinement son potentiel.

 

Avec les difficultés, les références de gauche et de droite pourraient bien faire leur retour. Comment vous situerez-vous alors ?

Nous sommes dans une période de recomposition complète de notre vie politique. Elle est encore inachevée et va se poursuivre. Jamais je n’aurais envisagé d’entrer au gouvernement sans avoir la légitimité que donne l’élection. Les Français, au fond, se moquent de savoir si l’on vient de la droite ou de la gauche : ils demandent des résultats et c’est cela qui compte pour moi. Dans ma circonscription, je ne me suis pas retrouvé opposé à la droite ou à la gauche mais aux extrêmes. Cela a été le cas dans beaucoup de circonscriptions en France. Face à ce risque, nous n’avons pas le droit d’échouer.

L’audit de la Cour des comptes a mis en évidence un grave dérapage des comptes publics en critiquant sévèrement la gestion Hollande. Quelles mesures allez-vous prendre pour tenir l’objectif d’un déficit inférieur à 3% dès 2017 ?

Notre niveau de dépenses publiques est un des plus élevés d’Europe (56,2 % du PIB), et nous avons pourtant un niveau de chômage parmi les plus hauts et un taux de croissance parmi les plus bas. Vous le voyez donc : la voie du « toujours plus de dépenses publiques » est une impasse. À nous de le faire comprendre et d’opérer une vraie transformation culturelle. La deuxième erreur à ne pas renouveler, c’est de penser que l’on peut corriger nos déficits en augmentant les impôts et les taxes. Non ! Augmenter les impôts est une solution de facilité. Le seul choix courageux, c’est de réduire la dépense publique. J’insiste sur ce point : pas de nouveaux impôts ! C’est une promesse du président de la République. C’est pourquoi il n’y aura pas de projet de loi de finance rectificative cet été.

Quelles seront vos priorités entre mesures de compétitivité pour les entreprises et mesures de pouvoir d’achat ?

La transformation de notre culture économique, c’est aussi arrêter d’opposer l’intérêt des salariés à l’intérêt des entreprises. Les deux vont de pair et se rejoignent. Sortons une fois pour toutes de la lutte des classes ! Une entreprise qui se porte bien peut redistribuer la richesse produite à ses salariés. Je souhaite donc que l’on avance sur deux jambes. Dès le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, il faudra supprimer toutes les charges sociales salariales sur la maladie et le chômage, pour que les salariés puissent avoir en 2018 une amélioration visible de leurs revenus. Pour les salariés du secteur privé, le gain de salaire net sera de 526 euros pour un couple de personnes rémunérées au Smic. Autre exemple, une personne rémunérée 2 000 euros brut par mois bénéficiera d’un gain de salaire net de 355 euros par an. Il faut que chacun constate que le principal changement, dans ce quinquennat, c’est que le travail paye ! C’est la priorité. Mais cela n’interdit absolument pas d’engager les mesures pour permettre à nos entreprises d’être compétitives, notamment la baisse de l’impôt sur les sociétés. Nous souhaitons parvenir en 2022 à un taux de 25 %, ce qui doit être programmé sans attendre.

Cela sera-t-il repris dans les ordonnances sur le travail ?

Dans la réforme du marché du travail, il y a la volonté de valoriser les accords d’entreprise. C’est une façon de reconnaître le dialogue social et une occasion d’améliorer les relations syndicats-patronat dans notre pays. Derrière ces mesures, il y a une vision de la société. Qu’il y ait des désaccords entre des chefs d’entreprise et leurs salariés, c’est normal et naturel. Mais pourquoi ces désaccords se régleraient-ils systématiquement dans le conflit ? Nous quittons cette culture du conflit pour aller vers une culture du dialogue, qui existe dans des pays voisins et donne de bien meilleurs résultats. C’est la méthode voulue par le président de la République et conduite par le Premier ministre. Parce que conflit veut dire perte de temps, épuisement des personnes, angoisses sur l’avenir, tout ce qui, à mon sens, affecte la société française et que nous devons transformer. Nous y parviendrons en rétablissant la confiance entre les Français.

Quels atouts ? Notre image à l’étranger souffre de notre fiscalité et de notre droit du travail trop lourds…

Nous allons agir, en baissant la fiscalité des entreprises, en allégeant les charges sur les salaires, en réformant le marché du travail, mais aussi par des mesures spécifiques, comme le développement des classes bilingues dans notre système éducatif et l’ouverture de nouveaux lycées internationaux. L’ISF sera remplacé par un impôt sur l’immobilier, qui ne concernera plus les valeurs mobilières. À New York, ces mesures sur l’amélioration de l’attractivité ont été bien reçues. Les investisseurs ont compris qu’avec l’élection d’Emmanuel Macron, les choses changent en France. Ils attendent des actes concrets : signe de l’importance que le gouvernement accorde à ce sujet, le Premier ministre en personne dévoilera prochainement d’autres mesures concernant spécifiquement la place de Paris.

L’ISF sera bien réformé dès 2018 ?

La réforme de l’ISF sera votée cette année et entrera en vigueur en 2019.

L’Union européenne ne fait plus rêver. Pour autant, ceux qui prônent un repli national ne parviennent pas à séduire une majorité des électeurs. Que peut faire la France pour relancer le projet européen ?

Durant la campagne, Emmanuel Macron a placé l’Union européenne au cœur de son projet. Il a été élu. C’est un fait politique majeur qui permet à la France de jouer à nouveau un rôle de leadership en Europe. L’Union européenne doit se remettre en cause et se transformer pour mieux défendre les intérêts des Européens. C’est en ce sens que nous avons engagé la révision du statut des travailleurs détachés, qui crée des situations de concurrence déloyale dans de nombreux secteurs, comme le transport routier et le BTP. Il est nécessaire de trouver le bon équilibre. Troisième exemple, la Chine, qui veut avoir accès à nos marchés publics mais refuse aux entreprises européennes l’accès aux marchés publics chinois. La réciprocité est nécessaire.

Comment mener une telle intégration politique ?

Il nous faut déjà mieux coordonner nos politiques économiques et budgétaires. Cela veut dire respecter les règles communes, mais aussi que les pays en situation d’excédent utilisent une partie de leur marge de manœuvre pour soutenir la croissance de l’ensemble de la zone. L’Union bancaire est déjà bien engagée, mais il faut aller jusqu’au bout pour permettre un financement efficace des entreprises de la zone euro. Il faut également parvenir à une harmonisation fiscale. Avec Wolfgang Schäuble [ministre des Finances allemand, Ndlr], nous sommes décidés à œuvrer rapidement en ce sens. Au-delà, il faut créer un budget de la zone euro qui permettrait par exemple de financer des infrastructures et d’investir dans un système éducatif harmonisé et dans le numérique. Cet objectif atteint, il faudra logiquement nommer un ministre des Finances de la zone euro. Enfin, il y a la proposition de Wolfgang Schäuble, qui a avancé l’idée d’un Fonds monétaire européen qui s’inspire du FMI. C’est une mesure dont il faut discuter.




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