Pourquoi la Chine s’oppose au bitcoin et aux cryptomonnaies
On ne peut pas ne pas souligner l’appréhension de la Chine à accepter et à adopter les crypto-monnaies. Cela se traduit notamment par l’avertissement lancé sur les médias par l’Association nationale des Finances d’Internet de Chine, l’Association Bancaire de Chine et l’Association de Paiement et de Compensation de Chine concernant leur absence de soutien en cas d’effondrement du marché ou de dysfonctionnement des échanges. Ils considèrent que les échanges sur un marché aussi volatil que celui de la crypto-monnaie perturbent le statu quo financier.
Giulia Mazzolini directrice, de Bitpanda France dans les Echos
Bien que la Chine ait interdit tous les échanges de crypto-monnaies, les traders avides peuvent toujours détenir leurs crypto-monnaies existantes, la règle étant que les institutions ne peuvent pas fournir de services pour celles-ci. Cela engendre sans aucun doute une pression bien visible sur la cryptosphère et aussi plus généralement sur la population détenant ces cryptos, car cela est perçu comme une incitation contraire. J’imagine qu’ils peuvent penser que « s’ils ne peuvent pas échanger, à quoi bon, l’engouement ne perdurera pas ». Il est donc plus facile de suivre la situation et de prendre du recul : une approche que beaucoup de gouvernements n’apprécient pas, car la crypto est majoritairement autorégulée.
Personnellement, je peux imaginer que cela a également beaucoup à voir avec la pression du public pour un minage « plus vert » du crypto, car cela reste un sujet plutôt central. Mais il y a aussi des changements positifs, comme le récent « Crypto Climate Accord » qui est une étape dans la bonne direction. Inspiré de l’Accord de Paris, il s’agit d’un accord sur le climat signé par des organisations du secteur des crypto-monnaies. Les initiatives de ce type favorisent le développement durable de notre secteur et doivent être plus nombreuses pour permettre aux gouvernements de se sentir plus à l’aise.
Une monnaie numérique propre à la Chine ?
Bien sûr, la question s’est posée de savoir si le durcissement des règles chinoises n’avait pas quelque chose à voir avec leur intention de créer leur propre monnaie numérique. Cela aurait du sens dans une nation tournée vers le mobile ; selon une enquête, en 2018, 92 % des habitants des plus grandes villes chinoises utilisent Wechat Pay ou Alipay comme principal moyen de paiement. La future monnaie numérique chinoise sera donc le moyen de paiement électronique sur smartphone amené à remplacer les pièces et les billets, et pourrait faire ses débuts en 2022 lors des Jeux olympiques d’hiver de Pékin.
D’une manière générale, la méfiance de la Chine à l’égard des crypto-monnaies peut sembler plus prononcée si on la compare aux attitudes occidentales, mais ce n’est pas nécessairement le cas : même dans les environnements crypto-positifs le bitcoin continue d’être un sujet de controverse. Il est par ailleurs important de noter que le statu quo ne durera pas éternellement. Si l’on considère le bitcoin et la technologie dont il émane, de nombreux changements ont été apportés depuis sa création. Au cours des dernières années, de nombreuses améliorations ont été apportées au réseau Bitcoin. Ces innovations améliorent considérablement le système. La même chose se produit avec Ethereum.
Plus le secteur se développe, plus il compte de participants, d’une telle manière que d’autres innovations et améliorations ne manqueront pas d’apparaître, ce qui aura un effet sur la culture et la façon dont les gouvernements le considèrent.
La Chine n’est pas le seul pays à montrer sa méfiance envers la crypto avec une interdiction de commercer et de faciliter son utilisation. D’autres pays se sont exprimés sur leurs préoccupations en matière de sécurité et de perturbation du système financier actuel. Mais je sais que ces choses bougent par vagues et qu’un statu quo, contrairement à ce que son nom suggère, évolue au même rythme que la culture qui l’entoure.
Giulia Mazzolini est directrice de Bitpanda France.