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La fin du socialisme ?

La fin du socialisme ?

 Les partis issus de la gauche historique se sont effondrés au premier tour de la présidentielle. Mais le socialisme est-il mort pour autant ? Par Jean-Numa Ducange, Université de Rouen Normandie.

Le socialisme semble à l’agonie. Après le premier tour de l’élection présidentielle française du 10 avril, si l’on s’en tient au score du parti qui porte encore son nom, on peut même le considérer en voie de disparition. Et le faible score du Parti communiste français semble conforter la marginalisation des courants issus du « socialisme historique ».

Ce « socialisme historique », Jean-Luc Mélenchon s’en réclamait lorsqu’il a quitté le Parti socialiste en 2008 pour fonder le Parti de gauche.

Il a ensuite pris radicalement ses distances avec le clivage gauche/droite et l’adjectif socialiste en fondant la « France insoumise » en 2016. Jean-Luc Mélenchon et ses proches théorisent alors sa disparition : seul importe désormais le clivage populiste entre « élites » et « peuple ».

Pourtant, alors que le candidat de la « France insoumise » répétait en 2017 qu’il ne fallait plus se réclamer de la gauche pour parler au « peuple » et élargir son assise, les raisons de son succès en 2022 semblent résulter de son appel au « vote efficace » avec une référence appuyée à la « gauche » dans la dernière ligne droite.

Le référent de gauche a refait ainsi spectaculairement surface chez ceux qui le conspuaient encore quelques mois plus tôt. La gauche existerait-elle finalement, même affaiblie ? Nous faisons le pari que le « socialisme » et ses héritages, même lorsqu’il est nommé autrement, constitue l’envers du capitalisme.

L’exploitation capitaliste et les différents modes de domination qu’elle implique provoquent nécessairement des conflits, des luttes, et donc l’émergence de projets alternatifs, qu’ils soient modérés ou radicaux.

En ce sens continuera à exister un socialisme, plus ou moins nourri des expériences passées, porté par des courants politiques divers, tant que le capitalisme existera. C’est une des thèses centrales qui traverse notre ouvrage collectif, co-dirigé avec Stéphanie Roza et Razmig Keucheyan, Histoire globale des socialismes.

Mais comment expliquer un tel effondrement du « socialisme » sous la forme du parti qui porte son nom ? Sortons un instant de France ; les choses sont alors autrement plus complexes.

Il y a 20 ans, les partis socialistes ou sociaux-démocrates gouvernaient la majorité des pays de l’Union européenne. Puis ils ont presque tous traversé de profondes crises. Leur affaiblissement a donné lieu à des pronostics de disparition à plus ou moins court terme. La mort annoncée n’a pourtant pas eu lieu.

On peut certes discuter de l’orientation politique de ces partis par rapport à ce qu’ils défendaient il y a encore une trentaine d’années. Ainsi du SPD en Allemagne qui a vu sa base sociale, notamment ouvrière, s’éroder avec les réformes libérales de Schröder.

L’émergence d’une gauche radicale autour de « Die Linke » puis la montée en puissance des écologistes avait un temps semblé sortir de l’histoire le plus vieux parti ouvrier d’Europe.

Celui-ci est finalement revenu au pouvoir récemment, à la tête d’une coalition nouée fin 2021 entre le parti social-démocrate (SPD), les Verts et les libéraux, rassemblée autour du chancelier Olaf Scholz, successeur d’Angela Merkel.

En Espagne et au Portugal, le Parti socialiste gouverne également en position dominante. Dans ces trois pays, la gauche radicale était forte, tout particulièrement en Espagne. Podemos fut longtemps le modèle revendiqué de la « France insoumise »… tant que l’organisation remportait des succès éclatants.

Mais Podemos n’a pas réussi à briser l’hégémonie du Parti socialiste espagnol. À Lisbonne, les socialistes ont remporté triomphalement les élections, faisant tomber les formations de gauche radicale à un niveau historiquement bas.

En Allemagne, suite à une crise interne de Die Linke, le bastion ouvrier de la Sarre leur a complètement échappé à des élections intermédiaires : le SPD a remporté triomphalement les élections régionales, avec 43 % des suffrages.

Enfin, si le Parti travailliste britannique est largement en crise, il est loin d’avoir atteint à des élections nationales des scores aussi bas que son alter ego en France.

Ajoutons que l’adjectif socialiste lui-même peut connaître des fortunes étonnantes comme aux États-Unis où, quasiment tabou depuis la guerre froide, il est devenu à la mode dans l’aile gauche des démocrates autour de Bernie Sanders depuis une dizaine d’années.

Le socialisme existe donc encore. Dans ce contexte, l’élection présidentielle française fait presque figure d’anomalie. La différence clef – même si elle n’explique pas tout – réside dans un mode de scrutin très particulier.

L’élection présidentielle favorise à l’extrême la personnalisation, bien plus que dans la quasi-totalité des autres pays du continent. À l’heure de la crise des partis politiques, ce scrutin accroît encore le fossé entre les élections intermédiaires et locales – où les partis parviennent toujours à tirer leur épingle du jeu – et l’élection à la fonction suprême.

Le résultat apparaît en effet déformant, avec de grands partis totalement laminés. À gauche, il est frappant de constater que, depuis 2017, LFI n’a réussi nulle part à s’imposer, à aucune élection intermédiaire locale, même lorsqu’il y avait une portée nationale comme aux élections européennes.

Qui plus est l’organisation a été traversée par des crises fortes, a changé de paradigme sur des questions essentielles (notamment sur la laïcité) à distance de la campagne de 2017.

Parallèlement, là où LFI a pu obtenir des élus et un score honorable, comme aux élections régionales en Île-de-France, on constate qu’il s’agit d’une très classique union de la gauche qui lui a permis d’avoir des élus.

La personnalité de Jean-Luc Mélenchon, ses talents oratoires et la véritable « machine de guerre » construite habilement par des cadres maîtrisant parfaitement tous les codes de la présidentialisation à outrance (en mobilisant dans la dernière ligne droite le vote « utile » ou « efficace ») a permis d’écraser, comme en 2017, la totalité de ses concurrents de gauche.

Cela donne l’impression – et la probable illusion – que vient de se former un « bloc populaire » puissant. Sera-t-il en capacité de structurer une alternative durable ?

Si se répètent un processus similaire avec les mêmes acteurs de ces dernières années, on peut légitimement en douter. Certes, on ne manquera pas d’arguments en soulignant que les deux autres grands blocs, autour de LREM et du RN, parviennent à dominer la vie politique malgré leur déficit d’implantation.

Mais la comparaison trouve vite ses limites, car le libéralisme politique et élitiste d’un Macron n’a pas besoin d’une importante base militante pour s’imposer, à la différence de la gauche et des formations issues des idéaux du mouvement ouvrier. Défendre les dominés implique une structure pérenne et démocratique pour pouvoir s’affronter aux puissants.

Une gauche devient forte lorsqu’elle a acquis une implantation, qu’elle a mené une guerre de positions durable. Si les modalités de la vie politique ont assurément changé, rien n’indique que l’on puisse définitivement se passer de ce lent travail de structuration, qui permit par le passé d’importantes victoires pour les partisans du socialisme.

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Par Jean-Numa Ducange, Professeur des Universités, Université de Rouen Normandie.

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

Socialisme: mort ou refondation

Socialisme: mort ou refondation

Après la défaite de la candidate du Parti socialiste, Anne Hidalgo, au premier tour de l’élection présidentielle, l’historienne Marion Fontaine, spécialiste des socialismes et du mouvement ouvrier, analyse, dans une tribune au « Monde », les conditions d’une éventuelle refondation.

 

Un article intéressant mais qui oublie un facteur essentiel à savoir l’oubli voire le mépris des couches populaires et sociales chez les dirigeants du parti. Difficile dans ces conditions de faire un vrai parti social démocrate.

 

Tribune.

 Le Parti socialiste (PS) est défait. Certains verront avec satisfaction dans ce résultat l’ultime punition pour les errements passés, la conversion au libéralisme économique, les renoncements et la corruption morale entraînés par le pouvoir. D’autres estimeront à l’inverse que cette défaite est la preuve de l’incapacité des socialistes français à effectuer leur mue sociale-démocrate, ce mot-valise dont on ne sait jamais très bien s’il désigne un modèle européen, aux traits de plus en plus flous, ou un centrisme vaguement progressiste.

Ces discussions, mêlées souvent de rancœur et d’amertume, sur ce que devrait être ou sur ce qu’aurait dû être un « vrai » PS attestent au moins qu’il se joue là des passions et des questions qui sont loin d’être closes. Mais il faudrait en renouveler la teneur.

On avancera sur ce point une hypothèse en forme de paradoxe. Lorsque l’on regarde bien, la situation du PS est bien plus grave que ne laisse à penser son score électoral, aussi infime soit-il ; mais, quand on regarde mieux, cette situation même témoigne de l’ouverture d’autres possibles.

La tentation probable après ce désastre sera de vouloir refaire ou de vouloir recommencer. Recomposer un parti en lui donnant un autre nom. Revenir aux bases locales, qui sont à peu près tout ce qui reste au PS. Reprendre des idées en y ajoutant l’écologie, en donnant à l’ensemble une tonalité plus réformiste ? Plus radicale ? Retrouver un grand homme (une grande femme ?) susceptible d’assumer le leadership du parti et de concourir à l’élection présidentielle. Refaire en somme un nouvel Epinay (1971), ce moment objet aujourd’hui de bien des nostalgies et qui est devenu un mythe aux effets délétères. Cette reconstruction peut fonctionner : qui saurait prédire l’avenir dans ce contexte ? Mais il est probable qu’elle n’aboutisse pas et que la crise actuelle soit plus structurelle.

On assiste peut-être moins en effet à la fin du cycle d’Epinay qu’à l’achèvement de celui ouvert au congrès de Tours, il y a un peu plus d’un siècle (1920). Celui-ci vit s’organiser les deux grandes formations, socialiste et communiste, qui allaient marquer de leur rivalité, de leur haine, de leur entente plus rarement, l’histoire de la gauche au cours du XXe siècle.

Les deux en sont réduites en 2022 à l’étiage le plus bas. Les modes d’organisation partisane, les formes de leadership qu’elles avaient constituées n’opèrent plus guère. Les questions qu’elles se sont posées avec fracas, la réforme et la révolution, le rapport au modèle bolchevik, ont perdu leur sens ou ont changé de nature. Cette histoire ne fut pas entièrement peine perdue pourtant. La seule création de l’Etat-providence moderne et l’approfondissement de la démocratisation des sociétés suffisent à le rappeler.

 

Le socialisme, écologie du XXIe siècle !!!

Le socialisme, écologie du XXIe siècle !!!

 

Le socialisme doit au prix d’un travail théorique, intégrer le paradigme écologique, analyse, dans une tribune pour « Le Monde », Patrick Vieu, ancien conseiller « environnement et territoires » de François Hollande.

Effectivement il y a de quoi s’interroger par rapport à une idéologie qui a surtout privilégié le productivisme et contesté le droit de la biodiversité sur le droit social. En outre en France le socialisme s’est perdu dans les terrains mouvants social libéralisme. Il pourrait tout autant se perdre maintenant dans un paradigme écologique le conduisant vers le gauchisme.

 

Forts de leurs résultats aux dernières élections municipales, départementales et régionales, les socialistes rêvent de redevenir la force centrale d’une grande alliance majoritaire « de la gauche et des écologistes ».

Ainsi, le Parti socialiste (PS) a-t-il opéré sa conversion à la « social-écologie ». S’il continue, dans son projet, de revendiquer le « primat de l’humanisme et de la justice sociale », c’est pour affirmer « la nécessité de donner une actualité à ces combats en intégrant pleinement le paradigme écologique pour construire le socialisme du XXIe siècle ».

Au-delà des mots, le socialisme est-il en mesure de véritablement « intégrer » le paradigme écologique ? Avant d’être politique ou technique, la question est philosophique. Et si elle mérite d’être posée, c’est que le socialisme et l’écologie politique, nés dans des contextes radicalement différents, reposent sur des hypothèses fondamentalement divergentes.


On peut caractériser l’écologie politique par quelques traits qui en forment la matrice intellectuelle et sont autant de critiques adressées à l’ordre contemporain. L’écologie politique s’inscrit d’abord en faux contre l’anthropocentrisme qui fait de l’homme le maître et possesseur d’une nature conçue comme une « ressource » utile. Elle récuse le modèle productiviste engendré par un capitalisme prédateur à l’origine des désastres écologiques actuels, et dénonce l’autonomie de la technique moderne qui, par un processus auto-entretenu, expose l’humanité au risque de sa propre destruction.

Elle exige ainsi de repenser la responsabilité de l’homme envers la nature et les générations futures. A l’individualisme possessif de la société libérale, elle oppose une pensée de la globalité, dans laquelle les fins de l’individu n’ont de signification morale qu’indexées au bien du « tout » : espèce, communauté, société, humanité. Enfin, l’écologie politique attribue à la verticalité des structures institutionnelles la confiscation de la décision publique au détriment des citoyenLe socialisme, dont les origines intellectuelles puisent à l’héritage des Lumières, tombe sous le coup de ces critiques. Au prisme de l’écologie politique, la vision socialiste des rapports de l’homme à la nature ne le distingue guère de l’idéologie libérale.

Comme le libéralisme, le socialisme a toujours lié l’idéal d’autonomie à celui de l’abondance matérielle. Jamais il n’a séparé cet idéal de l’espérance dans le progrès scientifique et technique, la production de richesses et l’attachement à la propriété. L’humanisme, qui constitue l’ADN du socialisme, exclut de reconnaître des droits à des entités non humaines. Si la nature doit être préservée, ce n’est pas en raison de sa valeur intrinsèque, mais de celle que l’homme lui attribue. Enfin, si les socialistes entendent rééquilibrer les pouvoirs de l’Etat, c’est davantage dans le cadre d’une démocratie représentative décentralisée que dans celui d’une démocratie directe dont ils se sont toujours méfiés.

Le socialisme démocratique et participatif comme réponse à la dictature communiste chinoise ?

Le  socialisme démocratique et participatif comme réponse à la dictature communiste chinoise ?

 

 

 

Tribune dans le monde de Thomas Piketti (extrait)

Alors que le Parti communiste chinois (PCC) célèbre ses 100 ans, les pays occidentaux peinent toujours à définir leur attitude face au régime de Pékin. Disons-le d’emblée : la bonne réponse passe par la fin de l’arrogance occidentale et la promotion d’un nouvel horizon émancipateur et égalitaire à l’échelle mondiale, une nouvelle forme de socialisme démocratique et participatif, écologique et postcolonial.S’ils s’en tiennent à leur posture habituelle de donneurs de leçons et à un modèle hypercapitaliste hors d’âge, les pays occidentaux risquent d’avoir le plus grand mal à relever le défi chinois.

Autoritaire et oppressif, le régime chinois a certes de multiples fragilités. Selon le Global Times, quotidien officiel, la démocratie à la chinoise serait supérieure au supermarché électoral à l’occidentale, car elle confie les destinées du pays à une avant-garde motivée et déterminée, à la fois sélectionnée et représentative de la société – le PCC compte quelque 90 millions de membres –, et plus profondément impliquée au service de l’intérêt général que l’électeur occidental moyen, versatile et influençable.

En pratique, cependant, le régime s’apparente de plus en plus à une dictature numérique parfaite, tellement parfaite que personne n’a envie de lui ressembler. Le modèle de délibération à l’intérieur du PCC est d’autant moins convaincant qu’il ne laisse aucune trace à l’extérieur, alors que, à l’inverse, chacun peut voir de plus en plus nettement la mise en place d’une surveillance généralisée sur les réseaux sociaux, la répression des dissidents et des minorités, la brutalisation du processus électoral à Hongkong, les menaces portées sur la démocratie à Taïwan.

La capacité d’un tel régime à séduire les opinions des autres pays (et pas uniquement leurs dirigeants) paraît limitée. Il faut ajouter la forte montée des inégalités, le vieillissement accéléré, l’extrême opacité qui caractérise la répartition des richesses, le sentiment d’injustice sociale qui en découle et qui ne pourra être éternellement apaisé par quelques mises à l’écart.

Malgré ces fragilités, le régime dispose de solides atouts. Lorsque des catastrophes climatiques surviendront, il n’aura pas de mal à stigmatiser les responsabilités des anciennes puissances, qui, en dépit de leur population limitée (environ 15 % de la population mondiale pour l’ensemble Etats-Unis, Canada, Europe, Russie, Japon), représentent près de 80 % des émissions carbone cumulées depuis le début de l’ère industrielle.




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