Surdoués : quels sont les signes ?
Un article intéressant du Figaro évoque ce qui caractérise les surdoués. Pas forcément la capacité de mémoire mais surtout une curiosité qui permet une compréhension anticipée des problématiques.
Être surdoué n’est pas une pathologie. Les personnes diagnostiquées (ou non) comme tel possèdent une intelligence supérieure à la moyenne. Mais ce qui les distingue, c’est leur rapport différent avec ce qui les entoure. Cette approche particulière est fréquemment mal appréhendée, aussi bien dans sa définition que dans ses conséquences. S’il est impossible de dresser le portrait-robot d’une personne à haut potentiel, certains signes matérialisent ce fonctionnement si particulier.
● Vous êtes plus curieux
«Ils sont plus désireux d’avoir des éléments de réponse qui permettent d’arriver à une réponse argumentée, aussi juste que possible, dans la mesure où le questionnement a été plus poussé», explique Monique de Kermadec, psychologue clinicienne et psychanalyste spécialisée dans les questions de haut potentiel intellectuel (L’Enfant précoce aujourd’hui, le préparer au monde de demain, 2015, Albin Michel). «Sur un sujet qui peut être très superficiel de base, on va se retrouver à creuser pendant des heures voire des jours», illustre Théo Bertrand, entrepreneur et business développer de 25 ans, diagnostiqué surdoué à 14 ans. Béatrice Millêtre, docteur en psychologie (Petit guide à l’usage des parents qui pensent que leur enfant est doué, 2011, Payot) poursuit: «Ils vont avoir des passions, pas une seule, et l’implication est très forte, plus que la moyenne.» «Ce sont des moulins à questions, ils ont un besoin de tout comprendre», conclut Violaine Carli, psychologue clinicienne, spécialisée dans les thérapies comportementales et cognitives.
● Vous avez une pensée en arborescence
«C’est un peu le bordel parce que tout s’allume un peu en même temps, beaucoup d’infos plus ou moins pertinentes vont arriver, témoigne Théo. Jeune, j’avais une incapacité à maîtriser cette grosse énergie cognitive et les flux d’idées.» «La pensée en arborescence est une façon particulière de penser. Par association et analogie, le questionnement se poursuit et ne s’arrête pas à la première question, à la première idée», explique Monique de Kermadec.
● Vous avez du mal à restituer une idée
«Avec la pensée en arborescence, la pensée va très vite. Souvent ils ont une déduction logicomathématique qui ressemble à une fulgurance. La personne va trouver une solution de manière évidente mais ne saura pas restituer son développement. À partir de la seconde, voire de la troisième, quand on demande aux élèves de développer le cheminement vers le résultat, c’est là que ça peut poser problème», explique Violaine Carli. «Ils peuvent se retrouver en «difficulté», non pas par ce qu’ils n’ont pas saisi, mais parce qu’ils arrivent à une conclusion par un raisonnement qui leur est propre», abonde Monique de Kermadec.
«En français ou en philosophie je m’éclatais car j’écrivais au fil de ma pensée, se souvient Théo. En revanche, en mathématiques, où on nous demande de produire un développement, vu que ça me semblait évident je n’avais pas envie d’écrire mon raisonnement, j’allais droit au but.» «Dans certains cas, on peut parler d’intelligence intuitive ou d’intuition mathématiques. Pour la personne surdouée, le résultat est la première étape consciente du raisonnement. La fin, c’est le début», analyse Béatrice Millêtre.
● Vous apprenez et comprenez plus vite
«La rapidité avec laquelle ils retiennent les choses vient de la rapidité de leur compréhension du sujet. Certaines personnes ont des mémoires phénoménales sans être particulièrement intelligentes. Ce qui fait la différence, c’est le traitement de l’information», explique Monique de Kermadec. «Certains tendance à être plus scolaires donc la mémoire de travail va être plus importante, ils vont pouvoir capter une grande quantité d’informations autant sensorielles qu’informationnelles», précise Violaine Carli.
● Vous vous ennuyez rapidement
«L’éducation n’est pas forcément très souple dans sa façon de faire apprendre. Souvent ça passe par de la répétition pour faire entrer des notions dans la tête des élèves. Un étudiant surdoué va souvent saisir le fond de l’idée dès la première ou la deuxième écoute. Lors des autres répétitions, il tourne en rond, parce qu’il a déjà saisi «le truc». C’était mon cas», témoigne Théo Bertrand. «Et puis, avec cette pensée en arborescence, tu pars dans un faisceau de réflexions périphériques, et tu oublies l’objet de l’attention de base», poursuit-il. «L’ennui est un sujet complexe, car on peut avoir différentes raisons de s’ennuyer: parce qu’on ne comprend rien, parce qu’on nous répète des choses que l’on sait déjà ou encore parce que l’on s’éternise sur une information, décrypte Monique de Kermadec. Or, une fois l’information intégrée par le surdoué, son intérêt est de passer à autre chose. C’est une question de contenu et de temporalité.»
● Vous êtes plus sensible que la moyenne
Violaine Carli aiguille en abordant la notion «d’hypersensibilité». «L’intensité est propre au fonctionnement des surdoués», explique Monique de Kermadec. «Cela est dû à une plus grande intelligence émotionnelle, ils sont plus stimulables, poursuit Béatrice Millêtre. Ils ressentent plus un stimulus auquel les autres ne vont pas prêter attention. Comme ils sont plus stimulables, la réaction émotionnelle est plus grande.» «L’aversion à l’injustice est une chose qui nous est très propre, par exemple. Je me faisais plus sortir de cours car je m’indignais contre ce que je jugeais injuste qu’à cause de mon comportement. Aujourd’hui je sais pourquoi. On est des gens très passionnés. C’est instinctif, et je l’ai compris que quand on m’en a parlé à mes 14/15 ans», assure Théo. «On pourrait parler d’hyper-empathie, analyse Violaine Carli. Une sorte d’éponge émotionnelle.»
● Vous vous sentez parfois incompris
«Ce n’est pas parce qu’on est surdoué qu’on est incompris. C’est propre à chaque parcours, avertit Monique de Kermadec. Si on est entouré par des personnes qui nous font sentir une différence, on peut arriver à la conclusion qu’on a quelque chose qui ne va pas, qu’on est en tort. Cette notion de différence négative est quelque chose qu’on intègre en fonction de l’entourage.» «Ce sentiment se rapporte à des surdoués qui n’iraient pas bien. Celui qui va bien sait qu’il fonctionne différemment et a appris à faire avec. Ce n’est pas inhérent, c’est une conséquence d’une méconnaissance de son fonctionnement par soi et les autres», ajoute Béatrice Millêtre. Et d’enrichir: «Ils ont une plus grande intelligence sociale. Quand ils sont en phase avec eux-mêmes, ils sont très sociables. C’est un cliché, les surdoués qui vont mal. L’environnement (scolaire et familial) est responsable à 70% de la façon dont ils se manifestent aux autres.»
Et dans tout ça, quelle importance revêt le test de Q.I? «Si c’est pour mettre une étiquette c’est vain. Un chiffre n’apporte pas les conseils et les réponses, avertit d’emblée Monique de Kermadec. Ce test est important dans l’optique où l’on cherche le meilleur accompagnement pour la personne concernée. Vouloir connaître et se connaître au mieux est une mission positive.» «Ne pas savoir qui l’on est, se forcer à s’adapter sans savoir pourquoi peut créer un sentiment de décalage et de défaillance. C’est pourquoi il est important de savoir que l’on est à haut potentiel», parachève Violaine Carli.