Grève SNCF: pour en finir avec le naufrage du service public ferroviaire
Jean-Louis Chambon président d’honneur, fondateur du Cercle Turgot propose d’en finir avec le naufrage de la SNCF. Certes, le représentant du Turgot peut être contesté pour sa philosophie très libérale en général mais là certains de ses propos (pas tous) peuvent être partagés par d’autres courants inquiets du suicide d’une entreprise organisé par les gauchistes de sud et de la CGT.
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« La SNCF ressemble un peu plus chaque jour à un bateau ivre, totalement hors de contrôle. Sa direction s’évertue à panser les plaies ouvertes par quelques saboteurs jusqu’au-boutistes, hors-sol, qui se prétendent gardiens de la sécurité alors qu’ils protègent jalousement leurs privilèges. Les syndicats affichent leur impuissance et sont délégitimés par la base et les autres partenaires. Quant au ministère, quasiment paralysé, il paraît vouloir s’en remettre une nouvelle fois à la providence et au temps pour résoudre un problème récurrent qui appellerait pour sa résolution – enfin ! – de la fermeté et un changement du paradigme.
Il est urgent en effet de prendre acte de l’illusion d’un pseudo-dialogue social qui, en réalité, entretient le pouvoir de nuisances des minorités, le rapport de force et les privilèges des cheminots. Trop c’est trop ! Il faut maintenant faire respecter l’ordre public et privilégier l’intérêt général par des actions déterminées de l’exécutif :
- à court terme, dans l’urgence et dans le cadre de ce que permet la loi, utiliser tous les moyens répressifs face à ces abus, c’est-à-dire dépôt de plaintes, sanctions professionnelles, pénalisations financières…
- et pour le long terme, toute reforme structurante pour sortir de cette anarchie, comme de la confusion des droits et devoirs, nécessite de passer par une réforme constitutionnelle qui, seule, pourrait inscrire clairement l’ordre des priorités entre droits individuels et intérêt général.
Car sacraliser constitutionnellement les droits des Français, de propriété, de grève, l’égalité des femmes et des hommes, etc. relève d’une obsession largement partagée par nos chefs d’Etat. Mais, par-delà les bonnes intentions, l’égalitarisme s’est substitué progressivement à l’égalité, et les droits aux devoirs.
Le statut des fonctionnaires (et autres statuts du public ou privé), en charge d’une délégation de service public, en est la parfaite illustration : à sa naissance en 1946, il répondait aux obligations (contraintes) faites aux fonctionnaires « de se rendre disponibles aux besoins du service public ». On voit aujourd’hui, avec l’installation de la « gréviculture », ce qu’il en reste : uniquement des droits…
Aussi, concilier la continuité (et la qualité) du service public est devenu en France un véritable casse-tête. Les actions conduites par « des cheminots qui ne cheminent plus » en sont la douloureuse illustration. Certes, le politique avait cru trouver, en 2007, « la bonne réponse », en instituant le principe du service minimum dans les transports, pensant équilibrer ainsi l’intérêt général et les droits individuels. Force est de constater que ce fut une parfaite imposture. Les tourments pathétiques dans lesquels sont plongés des millions d’usagers du ferroviaire par la volonté manifeste de maximisation des nuisances par les syndicats, pour des causes périphériques – la retraite notamment.
Pourtant, l’exigence d’une continuité de service public s’impose aux personnes publiques et privées, chargées de la gestion d’un service public. Par conséquent, tout service public – le ferroviaire en est un – doit fonctionner de manière régulière car il a pour finalité l’intérêt général, dont l’Etat est le garant.
De plus, les juges justifient de façon constante, lorsqu’ils ont à en débattre, des limites au droit de grève aux agents qui en abusent. Le pouvoir de réquisition est d’ailleurs aux mains des préfets et de l’administration. La «gréviculture», en préalable à tout dialogue social, a un coût induit exorbitant pour l’économie nationale et le moral de nos concitoyens : au total, le coût, direct et indirect, est estimé entre 0,10 et 0,15 point de PIB par an (toutes les études convergent, voir notamment le Journal of transportation and statistics).
Tout ceci n’est tout simplement plus supportable ! Il est temps d’adresser à la société civile un signe clair en affirmant que, désormais et sans doute dans le cadre de la révision constitutionnelle (en éternelle préparation !), les droits de l’usager-contribuable et de l’intérêt collectif devront l’emporter sur ceux d’une minorité agissante. Cette révolution, à portée de main, nécessiterait de passer par deux axes :
1/ Reconstruire le cadre légal en rendant incompatible le statut et la mission de service publique avec le droit de grève (étendu à l’ensemble des délégataires de service public, fonctionnaires compris), avec l’obligation d’assurer le service public, en donnant simultanément aux directions les moyens d’atteindre cet objectif par un pouvoir d’astreinte sur leurs agents, surpassant les choix et autres caprices individuels. En Allemagne, les agents du ferroviaire n’ont pas le droit de grève, dans les pays nordiques c’est un honneur et un devoir d’assurer le service en toutes circonstances ; en France, agents hospitaliers, militaires, pompiers, etc. sont déjà dans cette même obligation de fait.
2/ Responsabiliser les acteurs en considérant que tout acte délibéré susceptible de créer un dysfonctionnement dans le service public est constitutif d’une « faute lourde » qui doit être sanctionnée puisque contraire, par nature, à la mission centrale que reçoit chaque fonctionnaire par son « contrat de travail », dont il est le comptable devant chaque citoyen (dans le secteur privé, ce type d’acte est sanctionné par un licenciement). D’autre part, les directions des administrations devraient être prioritairement appréciées (notation, prime variable) par la mesure de leur efficacité, pour permettre à leur organisation d’atteindre le service public maximum. Enfin, les organisations qui appelleraient aux dysfonctionnements des services publics verraient légalement leur responsabilité engagée et mise en cause par les usagers qui en subissent les préjudices – à commencer par la suppression des subventions étatiques qui nourrissent in fine des bataillons de permanents syndicaux.
Ainsi, par le courage politique, l’intérêt général pourrait retrouver sa juste place à côté des intérêts corporatistes ou syndicaux, en rappelant les uns et les autres à leurs devoirs et à une obligation de résultat de qualité de service public. Contrairement à ce que redoutent de nombreux hommes politiques, l’opinion qui ne supporte plus ces nuisances pourrait d’ailleurs saluer ces évolutions radicales.
On ne peut espérer refonder une organisation sociale dont les fondations fissurées remontent à 1945, ni ramener à la raison les « partenaires sociaux », sans adapter les règles du jeu des missions du service public. C’est le cap que le président Emmanuel Macron devrait pouvoir donner à la prochaine révision constitutionnelle, en marquant ainsi vraiment l’histoire de sa vision du nouveau monde. »
Coût du service public : comment trouver un meilleur équilibre entre accessibilité, efficacité et coût
La question posée dans le cadre du grand débat était : « Comment faire évoluer le lien entre impôts, dépenses et services publics pour mieux répondre aux besoins des Français ? »
De fait, dans certaines parties du territoire, ce lien paraît de plus en plus ténu voire inexistant, en tout cas très de plus en plus éloigné. Dans nombre de villages, il y a déjà longtemps qu’il n’existe pratiquement plus de services publics et le dernier qui semblait devoir résister, à savoir la Poste, disparaît aussi. En cause évidemment, un aménagement du territoire qui privilégie l’hyper concentration autour de quelques centres et qui conduit le reste à la désertification. . La mode aujourd’hui est à la métropolisation, c’est à dire à la sururbanisation (qui constitue pourtant une aberration environnementale) tandis que certaines petites villes, des villages s’appauvrissent, des villes moyennes stagnent ou régressent. L’élément le plus significatif de cette désertification c’est la raréfaction de l’emploi. Du coup, les populations sont contraintes de rechercher des embauches de plus en plus loin de leur domicile (20, 30, 50 kms). Jusqu’au jour où elles décident de quitter leur zone d’habitat pour rejoindre des zones plus riches en emplois et en services. Pour preuve de cette désertification : la baisse dramatique de la valeur du patrimoine immobilier. Par manque de populations, les services rétrécissent comme peau de chagrin. Le cœur de la problématique de la désertification, c’est la disparition de l’emploi qui génère mécaniquement la fermeture des commerces et des services. La réactivation des villes moyennes, des zones rurales défavorisées passe d’abord par une analyse fine des réalités et de leur évolution sur longue période (emploi, PIB, population, services etc.) ; aussi par une prise en compte des typologies différenciées des zones dont l’approche globale masque les disparités. Au-delà, il convient d’agir sur les leviers susceptibles d’abord de fixer la population active existante et d’encourager la création d’emplois. Bien entendu une commune ne peut, à elle seule, inverser ces tendances lourdes même si elle peut intervenir utilement dans le champ actuel de sa responsabilité. Beaucoup de communes se préoccupent de leur développement pour autant l’environnement défavorable limite leur action (fiscalité, réglementation, transport, équipements et services). En fonction de certains scénarios économiques, sociaux et démographiques, en 2040-2050, certains villages se transformeront en zones pour retraités voire même disparaîtront (d’autant qu’à cette date un Français sur trois aura plus de 60 ans). L’activité économique interagit sur la qualité et le niveau des services et réciproquement. Si localement on se préoccupe légitimement des équipements et des services publics, par contre le soutien à l’emploi et à l’économie locale en particulier est plus déficient. Or en fonction du rythme de destruction des emplois locaux, ce devrait être aussi une priorité. Encore une fois compte tenu de la mode de la « métropolisation » ‘ pas spécifique à la France, il y a fort à parier qu’on pourra attendre encore longtemps des mesures significatives pour le développement rural des zones défavorisées. On ne saurait se limiter à quelques dispositions certes utiles mais très insuffisantes (couverture internet, bureau de poste, quelques services …peut-être). . Parallèlement on doit aussi s’interroger sur le concept même de service public, son coût, son fonctionnement et son financement ; en effet, si le rythme de suppression des services s’accélère, c’est notamment pour des raisons socio-économiques évoquées précédemment mais aussi à cause d’un coût que la collectivité a du mal à assumer. Ce coût explique largement que le pays détienne le double record du monde de prélèvement obligatoire et de dépenses publiques par rapport au PIB. Un record qui porte atteinte à la compétitivité donc aussi à l’emploi. Dans son acception un peu générale, la tendance est forte d’assimiler service public, secteur public voire statut des personnels. Trois notions pourtant à distinguer. La première découle du champ régalien de l’État (ou plus généralement des collectivités) lequel mériterait sans doute d’être mieux défini, sans doute plus restreint et en même temps mieux assumé. Certaines tâches doivent être toujours être assumés par l’État directement mais sans nécessairement gérer directement la logistique. La deuxième confusion concernant le service public vise le statut des personnels. Si on peut comprendre par exemple que les infirmières ou ASH soient fonctionnaires, c’est plus discutable pour les jardiniers, les menuisiers, et autres comptables. Le problème c’est qu’on résume souvent la problématique des conditions de travail par exemple du personnel des hôpitaux à celle des infirmières. La troisième dimension du service public est liée à la structure juridique qui l’effectue. Or rien n’indique que l’intérêt général doive être exclusivement assumé par le secteur public. De nombreuses fonctions d’intérêt général sont en effet exercées notamment par voie de délégation à des organisations parapubliques ou privées (santé, transport, formation etc.) Du coup, l’amalgame des trois définitions conduit souvent en fait à masquer une défense corporatiste et coûteuse du service public qui au total porte atteinte à la qualité, à l’accessibilité et à la compétitivité de ce service. Faute de cela non seulement tout service public disparaîtra des petites communes mais nombre de fonctions d’intérêt général vont aussi s’étioler dans les petites et moyennes villes (les hôpitaux par exemple). La problématique n’est pas simple, le service public pour certaines de ses activités constitue un atout indiscutable pour le progrès social mais aussi économique, il n’en demeure pas un boulet financier qui hypothèque son avenir. Avant d’envisager cette réforme du service public, il sera nécessaire au préalable de procéder à une évaluation qualitative et quantitative des contenus, du fonctionnement et du coût. L’évaluation qualitative est indispensable car ce n’est par la même chose par exemple en terme d’accessibilité d’avoir la possibilité d’obtenir un rendez vous au bout de 15 jours ou au bout de 5 mois chez un cardiologue ou un ophtalmologue. Autre exemple, Ce n’est pas non plu la même chose de disposer en permanence de la 4G en téléphonie mobile et de recevoir des SMS le lendemain de leur émission dans le zones blanches ou mal couvertes. Enfin, le traitement est différent quand il suffit de faire 500 m pour retirer 100 euros à la Poste ou faire 40 kms.