Archive pour le Tag 'sacre'

Philosophie-« Le sacré , une émotion universelle »

Philosophie-« Le sacré , une émotion universelle » (Frédéric Lenoir, philosophe et essayiste)

Fin connaisseur des religions et de leur histoire, philosophe du bonheur et du développement personnel, Frédéric Lenoir explique la permanence des rites et le grand écart actuel entre l’identité, la foi et la spiritualité. ( dans la Tribune)

Le pape a accepté la bénédiction de couples homosexuels à condition que celle-ci se déroule en dehors d’une cérémonie. Les religions finissent-elles toujours par s’adapter à la société ?

FRÉDÉRIC LENOIR – Les croyances religieuses reposent sur des théologies multi-séculaires. Elles peuvent difficilement se remettre en question. Depuis deux mille ans, l’Église n’a pas changé de doctrine sur le mariage. Elle le conçoit comme l’union entre un homme et une femme, dont la finalité est la procréation. Cependant, la volonté du pape François, depuis le début de son pontificat, est d’accueillir un maximum de croyants. Il dit que l’Église ne doit pas être une douane qui refoulerait ceux qui ne sont pas dans sa norme. Avoir un geste de miséricorde à l’égard des couples de même sexe va dans ce sens, sans remettre en question la doctrine. Nous verrons peut-être, un jour, l’ordination de prêtres mariés, mais, sur l’avortement ou le mariage homosexuel, cela me semble intangible.

La fréquentation habituelle des églises est faible, mais il y a un attachement dans la population à certains symboles, comme la crèche en cette période de l’année. Comment expliquer cet écart ?

Il faut distinguer la pratique religieuse et la dimension culturelle des religions, qui est un vecteur identitaire pour toutes les civilisations, comme le rappelle Régis Debray. Même si l’on n’est pas croyant, on peut se reconnaître dans une identité culturelle et respecter le lien social qu’elle induit. C’est le cas dans toutes les religions. Il y a dans le monde musulman des non-croyants qui font le ramadan parce que c’est la vie de la société. On ne peut pas se mettre en marge.

On constate en même temps une montée du fait religieux. Pourquoi ?

La globalisation du monde, le brassage des cultures ont entraîné des replis identitaires et des conflits. Face aux autres, on veut s’affirmer ou se protéger. On voit en France des gens qui revendiquent leur appartenance à un pays chrétien alors qu’ils ne croient pas en Dieu, et qui refusent ce qui vient d’ailleurs. Une religieuse avec un voile ne leur pose pas de problème. Mais une musulmane avec un voile islamique, si.

Il y a pire, on commet toujours en 2023 des massacres et des attentats au nom de la religion…

À l’extrême, il y a du fanatisme qui engendre la violence. Mais il ne faut pas confondre trois choses, la dimension identitaire qui est politique, le sacré et la spiritualité.

Que voulez-vous dire ?

Le plus universel, c’est le sentiment du sacré. Einstein le définit très bien lorsqu’il parle de son émotion profonde devant le mystère de la vie et la beauté du monde. Face à un nouveau-né, la mort ou l’harmonie de la voûte céleste, on est bouleversé par un mystère qui nous dépasse. C’est une émotion universelle qui existe depuis la préhistoire. On en voit des traces dans les rites funéraires d’il y a cent cinquante mille ans. Et c’est cette expérience intime qui génère tous les courants spirituels et religieux du monde. Dans mon dernier livre 1, je raconte comment le sacré n’a cessé de se métamorphoser au cours de l’histoire en fonction des bouleversements des modes de vie de l’être humain : le passage au néolithique, l’invention de l’écriture, la modernité, etc.

Les terroristes islamistes sont parfois des gens très religieux, mais pas du tout spirituels

Quel est le lien entre cette expérience, qui est belle dans vos mots, et la croyance religieuse ?

La religion est la gestion collective du sacré. Elle se décline en croyances partagées et en rituels. Aujourd’hui, on voit une séparation entre le sacré, le spirituel et le religieux, qui étaient jusqu’ici regroupés. Il est possible de vivre chacune de ces expériences séparément. André Comte-Sponville, un philosophe matérialiste athée, prône ainsi une spiritualité laïque. La spiritualité, c’est la dimension individuelle du sacré, une quête intérieure. On s’interroge sur le sens de la vie, on cherche à être meilleur. À l’inverse, les terroristes islamistes sont parfois des gens très religieux, mais pas du tout spirituels : ils ne gardent que la dimension identitaire et politique de la religion.

Cette quête de spiritualité ressemble parfois à la recherche d’un bien-être immédiat. Cela a-t-il du sens ?

La spiritualité, telle qu’elle a été initiée par les grands courants de sagesse d’Orient et d’Occident, lie toujours la transformation de soi à l’engagement dans le monde. C’est le gage d’une spiritualité authentique. Or on trouve en effet de nos jours, notamment dans la mouvance du développement personnel, certaines personnes qui se regardent le nombril en pratiquant toutes sortes d’exercices spirituels sans rien faire pour améliorer la société. Ce « narcissisme spirituel » a déjà été dénoncé par le premier lama tibétain qui a voyagé en Occident, Chögyam Trungpa, qui a écrit dans les années 1970 sur le matérialisme spirituel : nous sommes des consommateurs de tout, y compris de pratiques spirituelles !

Vous ne pensez pas qu’on se réfugie dans l’irrationnel parce que la société aurait un peu perdu le sens de la science, de la raison, du progrès ?

C’est vrai pour le développement actuel d’une certaine pensée magique ou superstitieuse, mais ne confondons pas spiritualité et irrationalité ! Après la révolution quantique, la science elle-même est devenue plus modeste et reconnaît que le réel ne peut pas être appréhendé, dans toute sa complexité, avec notre seule raison logique. C’est pourquoi les principaux fondateurs de la physique quantique, comme Niels Bohr, Erwin Schrödinger ou Werner Heisenberg, ont engagé un dialogue fécond avec la spiritualité orientale pour tenter d’expliquer les conséquences philosophiques de leurs découvertes, celles-ci trouvant « une application, un renforcement et un raffinement de l’antique sagesse », selon le mot de Robert Oppenheimer. Ils ont ainsi tourné le dos au scientisme du XIXe siècle et ouvert un dialogue passionnant entre science et spiritualité, qui a une approche plus intuitive du réel.

Vous avez beaucoup travaillé sur le bonheur. Comment rester optimiste avec une actualité mondiale aussi dramatique ?

D’abord, il faut arrêter de regarder des images anxiogènes toute la journée, qui donnent le sentiment que tout va mal. Le monde ne va pas plus mal qu’autrefois, sauf que, de nos jours, nous voyons instantanément le spectacle de tout ce qui va mal dans le monde. Je préfère vivre aujourd’hui que pendant la Première ou la Seconde Guerre mondiale. Et puis surtout : ne restons pas passifs. Le meilleur moyen de supporter les malheurs du monde, c’est de s’engager, de faire ce qu’on peut à son petit niveau pour faire reculer la souffrance, l’ignorance ou l’injustice.

Noël, c’est demain. Nous voulons tous que ce soit un jour heureux. Il semble que cette pression produise parfois l’effet inverse, non ?

Tout à fait ! L’injonction au bonheur rend malheureux. C’est la raison pour laquelle les fêtes de fin d’année sont redoutées par beaucoup de monde ! On sait pourtant que l’une des conditions essentielles du bonheur, c’est l’amour, ce sont les liens familiaux et amicaux. Et Noël, c’est l’occasion de resserrer ces liens. Mais il ne s’agit pas de se mettre trop de pression, et si c’est trop pesant, il faut pouvoir s’en émanciper.

Quel vœu formez-vous pour 2024 ?

Que les gens soient de plus en plus conscients. Être lucide, cela permet d’agir de manière plus juste et de s’engager. Avec l’une de mes associations, Seve 2, nous faisons philosopher les enfants dans les écoles pour qu’ils apprennent le discernement et le respect des autres. Nos ateliers vont bientôt être testés par Gabriel Attal dans de nombreuses classes pour voir leur impact sur le développement de l’empathie. On en a vraiment besoin !

L’Odyssée du sacré (Albin Michel, 2023).

Macron : sacré de «champion de la Terre»……. Mais pas en France

Macron : sacré de «champion de la Terre»……. Mais pas en France

Il y a évidemment de quoi sourire avec ce titre de champion de la terre décernée à Macron lors de la deuxième édition du « One Planet Summit », un titre international mais en contradiction avec la politique menée sur le territoire national. De ce point de vue, il y a une grande confusion. Macron n’est pas le champion de la terre, il est le champion des discours sur la terre et sur le climat. Par contre sa politique environnementale est indigente voir en contradiction totale avec son discours. Pour s’en persuader, il suffit par exemple de constater la très mauvaise position de la France concernant la qualité de l’air même si on n’en registre une toute petite amélioration. La politique environnementale est un tissu de contradictions. C’est d’ailleurs ce qui a conduit le médiatique Nicolas Hulot a démissionné avec fracas. Il y a bien ici ou là quelques mesures qui ont été prises mais elles sont loin d’être à la hauteur des enjeux concernant par exemple la politique énergétique, la politique des transports, la prise en compte de la biodiversité ou encore l’aménagement du territoire. L’annonce de la remise de ce prix a donc suscité ironie et perplexité en France, moins d’un mois après la démission du ministre de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot et à l’heure où le bilan du chef de l’État sur la question climatique reste contrasté.  « On vit une situation ubuesque », a indiqué  Jean-François Juillard, directeur général de Greenpeace France, sur Europe 1. « On s’est dit que cela tenait plus de la blague que de la récompense sérieuse, quand on sait à quel point les actions sont loin des promesses faites par Emmanuel Macron. » Interrogé dimanche sur le titre décerné à son successeur, François Hollande, qui était au pouvoir lors de l’adoption de l’accord de Paris en 2015, a lui de son côté estimé qu’il y avait « les Champions de la Terre et ceux que l’Histoire retiendra ».

 

 

Goldman N°1 du top 50: le sacre du silence

Goldman N°1 du top 50: le sacre du silence

 

 

Analyse  Guillaume Erner, sociologue et animateur sur France Culture, analyse le triomphe de Goldman dans le TOP 50 des personnalités. Catalogue du showbiz, audimat, jeux olympiques de la popularité, thermomètre des politiques ? C’est un peu tout ça mélangé ce  sondage sur les personnalités préférées des Français. Le pire,  c’est que la personnalité qui serait préférée est un chanteur particulièrement discret et qui ne souhaitait plus figurer dans ce palmarès d’auberge espagnole. Interview de Guillaume Emer :

En 30 ans de Top 50, on est passé du Commandant Cousteau et l’Abbé Pierre à Jean-Jacques Goldman et Omar Sy. Les ressorts de la popularité ont-ils changé?
Ce n’est pas comme cela que je poserais la réflexion. D’abord, Cousteau et l’Abbé Pierre avaient de par leur histoire une sorte de singularité difficilement remplaçable aujourd’hui. Cousteau et Nicolas Hulot, par exemple, ne sont pas interchangeables. Mais le plus étonnant et celui sur lequel il faut s’attarder, pour moi, est Jean-Jacques Goldman. Après tout, il a eu une vie de chanteur et on pourrait se dire pourquoi lui et pas un autre? Mais c’est au contraire un cas unique. Sur le plan médiatique, il existe par son absence. On en sait finalement peu sur lui. C’est ce qui contribue à le rendre populaire.

 

Il est l’illustration que la popularité n’est pas qu’une affaire de visibilité…
C’est vertigineux : il ne dit rien et les Français célèbrent justement en lui le fait qu’il ne veuille pas jouer le jeu. Goldman représente précisément un contre-jeu médiatique, suffisamment puissant pour que les gens pensent encore à lui alors qu’il fait tout pour qu’on l’oublie! C’est un beau pied de nez à notre époque. Goldman ne rentre dans aucune case : on ne l’entend quasiment jamais, il n’est pas sur les réseaux sociaux… Aux antipodes, il y a les efforts désespérés de certains pour exister médiatiquement, sans que cela ne créé forcément de la popularité.

 

Mais après tout, arrive-t-on à expliquer objectivement la popularité?
Disons qu’il n’est en fait pas uniquement question ici de popularité mais aussi d’agrément. Dans ce domaine, on parle de « forme mode ». La forme mode, ce sont des individus qui existent socialement de manière quasiment indépendante, au-delà de ce qu’ils sont – car quelqu’un peut être très aimé par les Français sans qu’il soit lui-même très aimable – ou de ce qu’ils ont fait objectivement. Pour moi, c’est un champ de recherche passionnant. L’Abbé Pierre, on comprend facilement pourquoi il est populaire. Goldman, c’est déjà plus compliqué… Jean Rochefort ou Jean d’Ormesson aussi, c’était cela d’une certaine façon. Tout le monde n’a pas forcément en tête un film de Rochefort ni a lu un livre de Jean d’Ormesson, mais ça ne les empêchait pas d’être aimé des Français.

 

Que peut nous dire également ce classement de notre société?
Ce qui me parait le plus frappant, c’est qu’il est avant tout question ici de personnalités non-clivantes. Comme si la popularité était à rechercher dans le consensuel alors qu’on pourrait croire que nous sommes au contraire dans une époque qui a tendance à provoquer des personnages clivants, notamment ceux qui seraient rompus « au buzz ». Nous sommes dans une société médiatique et narcissique qui place la célébrité en valeur suprême. La problématique de certains est de fabriquer de la notoriété. L’important n’est alors non pas d’être aimé mais d’exister.

 

Mais la « peopolisation » n’a pas forcément pris corps dans le Top 50.
Non, il n’y a pas de personnalités issues de la téléréalité, notamment. On peut faire la distinction entre notoriété exogène et notoriété endogène. La notoriété exogène, c’est par exemple Teddy Riner : il est très bon judoka et devient connu pour cela. D’autres au contraire, prenons Kim Kardashian, ont développé une notoriété telle qu’on ne se souvient pas pourquoi ils sont connus. C’est de la notoriété endogène et on ne la retrouve effectivement pas dans ce classement. Une explication : à l’heure de la « peopolisation », on peut être connu pour une ou deux caractéristiques. Ici, c’est un classement de personnalités qui ont, dans la représentation que les individus en ont, une plus forte densité. Entre eux et les Français, c’est à la fois une relation plus complexe et plus englobante.

 




L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol