Le coût du retrait de l’économie française en Russie
La France est le troisième investisseur étranger en Russie, derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni, rappelle le consultant en stratégie-finance Michel Noiry dans une tribune au « Monde ». Il estime qu’un départ ne pourrait se faire qu’au prix d’une « casse monumentale ».
Tribune.
Depuis la disparition de l’Union soviétique, même si le cadre juridique est instable, la Russie présente les caractéristiques d’une économie libérale, plutôt ouverte aux investissements étrangers. Telle que définie par les lois de 1999 et de 2008, la liberté d’établissement est, en règle générale, garantie. La prise de participation majoritaire au capital d’une entreprise locale est autorisée.
Seules demeurent des obligations de déclaration auprès de la Banque de Russie, ainsi que des demandes d’autorisation spécifiques auprès de la commission de contrôle des investissements étrangers, nécessaires pour les investissements étrangers dans certains secteurs stratégiques comme les ressources naturelles, l’énergie, les transports, les communications et l’industrie de défense.
Par ailleurs, une loi de 2015 limite la propriété étrangère des médias russes à 20 %. Les flux d’investissements étrangers en Russie sont très significatifs. Ils ont atteint un sommet de 68 milliards d’euros en 2008 pour se stabiliser autour de 30 milliards d’euros par an (par comparaison, la France attire en moyenne environ 25 milliards d’euros par an). Plombés par la crise sanitaire, ils ont chuté de 95 % en 2020, à 1,4 milliard d’euros, contre 29 milliards d’euros en 2019.
Le stock d’investissements étrangers en Russie était de 441 milliards d’euros en 2017. A cette époque, la France était le troisième investisseur étranger, derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni. A noter que les positions s’équilibrent presque si l’on considère que, pour sa part, la Russie investit également à l’étranger (36,8 milliards d’euros en 2017) et détient un stock d’investissements de l’ordre de 380 milliards d’euros (valeur 2017).
Selon le ministère de l’économie, plus de 500 entreprises françaises (dont 35 groupes du CAC 40) opèrent en Russie. En 2020, malgré le COVID, les exportations françaises vers la Russie ont atteint 5,2 milliards d’euros, faisant de la Russie le septième marché extérieur de la France, hors Union européenne.
Parmi les grands noms de l’économie française présents en Russie, on note des sociétés comme Auchan (39 000 employés, 277 magasins), Leroy Merlin (35 000 employés, 107 magasins, 1,3 milliard d’euros d’investissements), Danone (9 000 employés, 15 usines, 2,5 milliards d’euros d’investissements), Saint-Gobain (2 000 employés, 9 sites de production, 0,5 milliard d’euros d’investissement), LVMH (4 000 employés, 140 magasins), Société générale (2,1 milliards d’euros d’investissement, une filiale, Rosbank, dont les activités représentent, en 2021, 2,8 % du produit net bancaire et 2,7 % du résultat net de la banque), Schneider Electric (8 000 employés, 5 usines, 1 milliard d’euros d’investissements) et Total (9 milliards d’euros d’investissements, 1 usine de production et plusieurs participations dans des grands projets d’infrastructure).