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JO et économie: La redécouverte de la Seine

 

 

Pour la première fois, la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques se déroulera en dehors d’un stade, sur un fleuve, transformant ainsi la Seine en un théâtre vivant où près de 10 000 athlètes défileront à bord de plus de 90 bateaux. Si cette célébration promet un coup de projecteur sur le secteur fluvial, révélant son importance stratégique pour la ville, elle souligne également des défis de taille.( *dans la Tribune)

Depuis des siècles, Paris et la Seine entretiennent une relation symbiotique. Dès l’Antiquité, la voie d’eau a été cruciale pour le développement de la ville. La navigation fluviale a permis non seulement le transport de marchandises, mais aussi le développement économique de Paris, facilitant l’émergence d’une métropole dynamique.

La Hanse parisienne des marchands de l’eau est à l’origine du rôle de prévôt des marchands, qui constitue l’ancêtre du maire et préfigure la municipalité jusque dans le choix de son siège à l’emplacement de l’actuel Hôtel de Ville et de son blason, qui demeure aujourd’hui encore un bateau fluvial. Fondée par une charte royale en 1170, elle illustre cette histoire riche et indispensable de la Seine, qui a continuellement alimenté la croissance de la ville.

Aujourd’hui, la Seine demeure le poumon historique et économique de Paris. Elle est avant tout une voie pour le transport de marchandises, aussi dit « fret », vitale pour l’économie francilienne et celle de la vallée de la Seine.  En 2023, le fret a représenté 10 millions de tonnes et a notamment permis d’éviter 400.000 camions sur les routes, 25.000 km de bouchons et l’émission de 90.000 tonnes de CO2. Il est également indispensable pour le transport des matériaux de construction et des produits alimentaires, pour la filière métallurgique, l’économie circulaire. Mais le fret a également su se diversifier et se développer dans le transport de conteneurs depuis les années 2000 ou proposer une alternative originale de logistique urbaine pour Paris avec la livraison par barge des magasins Franprix ou la livraison des produits Ikea.

 Les bateaux de marchandises contribuent à soulager la ville de l’envahissement des flux logistiques, tout en opérant une mue écologique collective centrée sur l’économie circulaire et le verdissement des flottes. La remotorisation de plus de 40 bateaux existants avec des moteurs électriques et hybrides est un exemple de cette transition vers des pratiques plus durables.

La Seine se positionne comme le quatrième site le plus visité de Paris. Avec 11 millions de passagers transportés chaque année, les bateaux de promenade génèrent à eux seuls 130 millions d’euros de retombées économiques annuelles.

Bouquinistes, bateaux-promenades, bateaux-restaurants, bateaux événementiels, bars, clubs de sport et boîtes de nuit, le fleuve est un écosystème unique où coexistent une multitude d’usages et d’acteurs. Cette variété enrichit indéniablement la vie fluviale et témoigne de la vitalité de la Seine. Les entreprises fluviales, souvent dirigées par des entrepreneurs créatifs, contribuent à la diversité et à l’originalité de l’économie parisienne. Parmi les 130 membres de cette communauté fluviale, un tiers des entreprises n’existaient pas il y a dix ans, témoignant de la dynamique constante du secteur.

Cette diversité est essentielle pour la ville et ses habitants, mais elle pose également des défis en termes de gestion et de coordination, surtout pendant les périodes de forte activité comme les mois d’été. La cohabitation des usages sur la Seine doit être gérée de manière à ce que chacun puisse bénéficier du fleuve sans empiéter sur les activités des autres.

Depuis 2015, l’État et les collectivités ont investi plus de 1,4 milliard d’euros dans un ambitieux plan visant à améliorer la qualité de l’eau de la Seine. Ce projet, indispensable pour la tenue des épreuves de natation et de triathlon en eau libre lors des JO, prévoit également l’ouverture de plusieurs zones de baignade au grand public dès l’été 2025.

Mais cette initiative pose des défis majeurs. D’une part, malgré les investissements, la qualité de l’eau préoccupe. D’autre part, les risques sanitaires et de sécurité sont réels, notamment en raison de l’intensité des courants et de la cohabitation nécessaire avec le trafic fluvial dans un fleuve contraint. Durant l’été, on comptabilise chaque jour 400 passages de bateaux sur la Seine, une période coïncidant avec le pic d’activité touristique et le transport de marchandises.

L’introduction de zones de baignade dans un tel contexte pose des questions complexes. La sécurité des nageurs, les impacts négatifs sur les activités économiques et la gestion des périodes de haute activité fluviale doivent être soigneusement évalués. La baignade en Seine, bien qu’attrayante sur le papier, doit se faire sans compromettre les autres usages du fleuve. Des solutions doivent être trouvées pour que les baignades et les activités fluviales puissent coexister harmonieusement.

En valorisant la filière fluviale et en intégrant de nouveaux usages, Paris peut renforcer son statut de ville innovante et durable. Les investissements dans l’infrastructure fluviale, les projets de modernisation écologique et l’engouement collectif des parisiens autour du fleuve témoignent d’une vision tournée vers un avenir durable. L’exemple parisien pourrait inspirer d’autres villes européennes à repenser leur relation avec leurs cours d’eau, intégrant mobilité durable, activités économiques et espaces de loisirs. Toutefois, il est crucial que ces transformations se fassent dans le respect de l’équilibre fragile entre les différents usages du fleuve et en concertation étroite avec ceux qui le font vivre depuis plus de 100 ans.

(*) Les signataires :

  • Olivier Jamey, président – Communauté Portuaire de Paris (CPP)
  • Didier Leandri, président délégué général – E2F (Entreprises Fluviales de France)
  • Taoufiq El Amrani, directeur général – Compagnie des Bateaux-Mouches
  • Marie-Pierre Landowski, présidente – Esprit Seine
  • Matthieu Blanc, directeur métier fluvial – Sogestran / CFT
  • Marie Bozzoni, directrice générale – Vedettes de Paris
  • Ghislain de Richecour, PDG – Vedettes du Pont Neuf
  • Didier Spade, PDG – Seine Alliance
  • Arnaud Féger, président du directoire – SCAT
  • Arnaud Daniel, directeur général des activités Seine – Sodexo Live!

La redécouverte du nucléaire


La redécouverte du nucléaire

A la faveur de l’urgence climatique et, surtout, de la sécurité d’approvisionnement érigée comme priorité depuis le début de la guerre en Ukraine, de nombreux décideurs renouent avec cette source d’électricité décarbonée, du Japon à la Corée du Sud, en passant par la France ou le Royaume-Uni. Mais ce renouveau a des airs de déjà-vu, et de nombreux défis devront être relevés avant que l’intention politique ne se transforme en actes. ( un dossier de la Tribune)

Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), l’énergie nucléaire pourrait contribuer à environ 14% du mix mondial d’ici à 2050, contre 10% aujourd’hui. (Crédits : Reuters)
10 juillet 2017. A l’antenne de RTL, le ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, confirme l’ambition du gouvernement de réduire significativement la puissance du parc nucléaire français, en fermant « peut-être jusqu’à 17 réacteurs » sur 58 d’ici à 2025 sans en construire de nouveaux. Soit un repli clair de l’atome au profit des sources d’énergie renouvelables, une stratégie alors portée par le président fraîchement élu, Emmanuel Macron, dans la lignée des promesses de son prédécesseur François Hollande.

Moins de cinq ans plus tard pourtant, le revirement politique est total. Le 10 février 2022, le même chef de l’Etat annonce en grande pompe à Belfort la prolongation « autant que possible » de toutes les centrales existantes (en-dehors de Fessenheim, arrêtée en 2020), ainsi que le lancement d’un vaste programme de construction de six réacteurs de 3ème génération (dits EPR2), plus huit posés en option sur le long terme. Dès lors, l’objectif change fondamentalement : loin du discours de 2017, il s’agit de faire d’EDF le fer de lance de la « renaissance » du nucléaire. Selon l’exécutif, il en va de la souveraineté du pays, du pouvoir d’achat de ses ménages et de la protection du climat.

Il faut dire que les planètes sont alignées : quelques mois plus tôt, une étude du gestionnaire de réseau RTE soulignait la pertinence économique d’une relance de l’atome. Laquelle se trouvait déjà renforcée par le contexte international délétère, assure alors le gouvernement.

Car avant même le début de la guerre en Ukraine, dès septembre 2021, la flambée des cours du gaz tire à la hausse les prix de l’électricité, celle-ci étant largement générée à partir de combustibles fossiles dans les Etats européens ayant décidé de sortir du nucléaire – en premier lieu l’Allemagne. De quoi décourager la France d’emprunter la même voie de fermeture progressive de son parc atomique, puisque celui-ci a l’avantage de générer du courant bon marché et décarboné, malgré les risques d’accident et les problèmes de gestion des déchets radioactifs mis en avant par ses détracteurs.

Et ce « come-back » résonne bien au-delà de l’Hexagone, qui reste le pays à l’électricité la plus nucléarisée au monde. D’aucuns pourraient penser que cette exception française bornerait la question à ses seules frontières. Mais partout sur le globe, le sujet s’impose. Jusqu’à assister à « une nouvelle aube pour l’énergie nucléaire ? », s’interrogera en juin 2022 l’Agence internationale de l’énergie (AIE). En pleine urgence climatique, cette source d’électricité très peu émettrice de CO2 fait en tout cas de l’œil à nombre de décideurs. Mais c’est bien l’agression de l’Ukraine par la Russie, le 24 février 2022, qui a changé véritablement la donne, tant le conflit bouleverse les marchés de l’énergie.
Car, à ce moment-là, une préoccupation devient centrale, en l’absence de gaz et de charbon russes : celle de la sécurité d’approvisionnement. En d’autres termes, la réduction de la dépendance à l’égard des combustibles fossiles importés, dont les prix flambent à des niveaux jamais vus, est érigée en priorité absolue. Or, « pour de nombreux gouvernements, le nucléaire fait partie des options pour y parvenir », souligne l’AIE.

De manière inattendue, c’est d’ailleurs le Japon, profondément marqué par l’accident de Fukushima, qui fait l’une des annonces les plus retentissantes. En août 2022, le Premier ministre, Fumio Kishida, indique qu’il prévoit de redémarrer plusieurs centrales après dix ans de paralysie, afin d’assurer la « sécurité énergétique » de l’archipel et lui permettre d’atteindre la « neutralité carbone ». Et fait même part de son intention de développer des réacteurs de nouvelle génération, dans un revirement très remarqué. Même chose en Corée du Sud : après avoir décidé en 2017 de réduire, puis de sortir du nucléaire, le pays signale dès la mi-2022 qu’il conservera « au minimum » la part actuelle de l’atome dans le mix électrique d’ici à 2030, soit environ 30%, et relancera le projet de construction de deux réacteurs.

Ailleurs en Asie, la Chine, qui tire 3% de son électricité de la fission de l’uranium, réaffirme quant à elle son souhait de déployer le programme le plus ambitieux au monde, avec environ 17 centrales en construction et 50 en planification. Une décision éminemment liée, là aussi, aux nouvelles exigences climatiques : en 2021, le président Xi Jinping s’était engagé à atteindre la neutralité carbone « avant 2060 ». Alors que le pays reste extrêmement dépendant du charbon, l’atome apparaît donc, pour Pékin, comme l’un des éléments clé pour y parvenir.

Les lignes bougent aussi de l’autre côté du Pacifique. Car les Etats-Unis et leurs 93 réacteurs (un record) espèrent également donner un nouveau souffle à leur parc. A l’été 2022, la Californie repousse ainsi de quatre ans la fermeture de sa dernière centrale nucléaire, Diablo Canyon. Et dans tout le pays, les licences d’exploitation des réacteurs se voient prolongées de manière inédite, pour courir jusqu’à 80 ans ! Surtout, le gouvernement regarde aussi au-delà de l’existant : dans son fameux plan d’investissement baptisé Inflation Reduction Act (IRA), le président Joe Biden débloque 6 milliards de dollars (5,6 milliards d’euros) afin d’investir dans des « modèles de réacteurs avancés ».
Sur le Vieux continent, la France ne se trouve pas non plus isolée. En effet, dès avril 2022, le Royaume-Uni s’inspire de son voisin d’outre-Manche, et lance un plan pour bâtir huit nouveaux réacteurs, en plus des quinze existants et des deux EPR qu’EDF construit déjà dans le pays. En septembre, Boris Johnson, alors Premier ministre, accélère d’ailleurs la cadence, en promettant 700 millions de livres sterling (788 millions d’euros) pour le lancement des deux EPR Sizewell C. Et appelle son successeur à « développer le nucléaire » afin qu’il se taille une place de choix dans le système électrique anglais.

Le mouvement touche aussi plusieurs membres de l’Union européenne, en-dehors des pays d’Europe centrale ayant décidé bien avant la guerre en Ukraine de se tourner vers le nucléaire (République tchèque, Hongrie, Bulgarie, Croatie, Pologne, Roumanie, Slovaquie et Slovénie). En 2022, les Pays-Bas et la Suède annoncent ainsi leur intention de disposer de nouveaux réacteurs sur leur sol. Début janvier, le Premier ministre suédois, Ulf Kristersson, ouvre même la voie à un partenariat avec la France pour bâtir ses deux prochaines installations, lors d’une visite à l’Elysée.
Et même des Etats ayant fermement décidé de sortir de l’atome il y a plusieurs années font volte-face, alors que le Vieux continent s’enlise dans la crise énergétique. En octobre 2022, après des mois d’atermoiements, l’Allemagne annonce qu’elle devra prolonger jusqu’au 15 avril 2023 ses trois dernières centrales, censées fermer à la fin de l’année. Même refrain en Belgique : les trois plus anciens des six derniers réacteurs devaient être déconnectés en 2025, mais début février 2023, les principaux ministres fédéraux du royaume lancent l’idée d’un fonctionnement « pendant l’hiver 2025-2026 ». En temps de crise énergétique mondiale, il s’agit d’être « pragmatique », glisse alors une source proche du dossier à l’AFP.

Et tandis que des pays nucléarisés doivent retarder leur sortie de l’atome, d’autres comptent bien accueillir leurs premières centrales. Notamment en Afrique : en 2022, le Ghana, le Kenya, la Namibie, le Nigéria, le Soudan, la Tanzanie, l’Ouganda et la Zambie, réaffirment leur souhait de se tourner vers le nucléaire civil, alors que sur le continent, seule l’Afrique du Sud possède aujourd’hui des réacteurs en service. Ce marché potentiel est d’ailleurs regardé de près par Pékin et Moscou, le géant russe Rosatom ayant annoncé à l’été 2022 qu’il lancerait la construction de la première centrale nucléaire d’Egypte.

Signe de cette effervescence, en septembre, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) relève de 10% ses projections sur la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici à 2050 par rapport à 2021 (déjà à la hausse pour la première fois depuis Fukushima). En supposant que la production d’électricité augmentera de 85%, cette source d’énergie pourrait ainsi contribuer à environ 14% du mix mondial d’ici à la moitié du siècle, contre 10% aujourd’hui, note l’organisation.

Reste que cet « élan nouveau », selon les termes de l’AIE, a en réalité des airs de déjà-vu. Car en 2009, les médias titraient déjà sur la possible « renaissance » du nucléaire, dont la part a pourtant stagné depuis.

Cette année-là, l’AIE soulignait en effet l’« intérêt accru » pour la construction de nouvelles centrales, « dans les pays nucléaires et non nucléaires ». A l’époque, des chantiers d’EPR débutaient en Chine, en Finlande et en France. Et nombre d’autres pays, parmi lesquels les États-Unis, le Royaume-Uni, la Hongrie, la République tchèque, la Pologne et même l’Italie, affirmaient leur intention d’en bâtir rapidement, dans un contexte de prise de conscience des effets du changement climatique. En septembre 2010, même la chancelière allemande Angela Merkel s’éloignait de la stratégie d’Energiewende de sortie progressive du nucléaire, repoussant l’échéance à 2040 au plus tôt, au lieu 2022.

De son côté, l’AIEA rehaussait significativement ses projections. « L’atome revient bel et bien sur le devant de la scène mondiale », indiquait alors le très médiatique Nicolas Goldberg, consultant énergie chez Colombus Consulting, dans les colonnes de l’Express. Dans ce contexte, l’association Sortir du nucléaire regrettait même un « rapport de force » ayant « plutôt évolué en faveur » de cette source d’énergie. « De plus en plus de pays comprennent qu’ils ont intérêt à réexaminer l’ensemble du mix énergétique pour trouver les moyens de décarboner leur économie », se félicitait-on chez Areva, qui conduisait le chantier de l’EPR finlandais avec le conglomérat allemand Siemens.

« Compte tenu du changement climatique mondial et de la demande croissante d’électricité dans le monde, l’énergie nucléaire reste pour nous un élément essentiel d’un mix énergétique durable », déclarait d’ailleurs à ce moment le directeur général de Siemens, Peter Loescher.

Mais l’accident de Fukushima prit le monde par surprise. Dans la foulée, l’AIE diminua de moitié son estimation de la capacité de production nucléaire supplémentaire construite d’ici à 2035. Dès lors, les annonces se mirent à pleuvoir : outre-Rhin, Angela Merkel revint sur ses précédents engagements, et fit savoir en mai 2011 que les 17 réacteurs nucléaires du pays fermeront bien en 2022. Le 18 septembre, Siemens décida de se retirer entièrement de l’industrie nucléaire. « Le chapitre est clos pour nous », commenta Peter Loescher. En mars 2012, ce fut au tour des deux grandes compagnies allemandes d’électricité RWE et E.ON de renoncer au développement de nouvelles centrales.

L’Italie, qui prévoyait de lancer un programme ambitieux après plus de vingt ans sans recours à l’atome, décida quant à elle d’instaurer un moratoire. Même chose en Chine, où toute nouvelle construction se vit gelée jusqu’à ce que les normes de sécurité nationales puissent être améliorées. « Cela a fortement limité l’expansion du parc chinois », souligne aujourd’hui à La Tribune Teva Meyer, chercheur à l’IRIS et spécialiste du nucléaire civil. Surtout, la révision des normes de sûreté consécutive à l’accident japonais renchérit considérablement les coûts de production des réacteurs, déjà difficiles à financer après la crise de 2008. « Avec le recul, dans les pays où le nucléaire s’inscrit dans un marché libéralisé, comme aux Etats-Unis, cela a eu comme conséquence la fermeture de plusieurs centrales pour des raisons économiques », relate Teva Meyer.

Résultat : même si certains pays s’accrochèrent à leur plan de relance, comme la Suède, l’Angleterre et la Finlande, le soufflé retomba : la renaissance tant espérée par la filière et redoutée par ses détracteurs resta lettre morte. C’est dans ce contexte horribilis pour l’atome que François Hollande accéda à la présidence de la France, sur un programme de baisse à 50% de la part du nucléaire d’ici à 2025 (contre 75% jusqu’alors). Une promesse inscrite dans la loi dès 2015, et balayée par Emmanuel Macron ces derniers mois.

Alors, cette fois-ci sera-t-elle la bonne pour l’énergie nucléaire ? « Au-delà du fort intérêt médiatique et politique du moment, il faudra attendre des actions concrètes avant de parler, une nouvelle fois, de renaissance », estime Teva Meyer. Et notamment en termes de financement, puisque la hausse continue des exigences de sûreté semble avoir signé la fin du nucléaire bon marché. A cet égard, la France s’est d’ailleurs battue pendant des mois pour que l’atome soit inclus dans la « taxonomie verte » de l’Union européenne, cette liste censée attirer les capitaux vers les activités durables. Au Royaume-Uni, le gouvernement planche aussi sur l’intégration de l’atome dans sa propre classification, ouvrant la voie à davantage d’investisseurs institutionnels et de fonds axés sur l’environnement.

Et s’il est suivi d’effets, ce climat de revanche pour l’atome promet d’accentuer les concurrences pour la vente et l’exploitation de nouvelles centrales. Notamment en termes de pénétration des pays non nucléarisés ; un nouveau marché que se disputeront probablement les Chinois, les Coréens, les Américains et les Russes. « On le voit en Arabie Saoudite, qui ne cache pas sa volonté de construire des réacteurs. Les Chinois sont déjà sur place, les Coréens aussi. Et les Français mettent également le paquet, avec un conseil auprès de l’ambassade à Riyad », illustre Teva Meyer. Se posera également la question de l’Asie du Sud-Est, alors que l’Indonésie et les Philippines multiplient les signaux sur une potentielle relance de leur programme nucléaire, attirant les convoitises de Pékin, Séoul, Washington et Moscou.

Une chose est sûre : au-delà de l’attribution des contrats, le sujet n’en a pas fini d’agiter les décideurs, les industriels et la société civile. Au point de polariser l’Union européenne, alors que fin février, onze pays membres emmenés par la France ont annoncé leur coopération dans l’atome civil pour développer « de nouveaux projets », faisant fi de l’hostilité de l’Allemagne, du Luxembourg, de l’Autriche et de l’Espagne.

Et les divisions apparaissent aussi à l’échelle nationale : dans l’Hexagone, les tensions sont telles que la consultation des citoyens sur la relance piétine : fin janvier, une poignée d’activistes anti-nucléaires a interrompu les réunions, et les associations parties prenantes Greenpeace et Sortir du nucléaire ont claqué la porte. Si bien que la Commission nationale du débat public (CNDP) a annoncé le 7 février que la discussion ne porterait plus sur la construction de six nouveaux EPR…mais sur la place du public dans la gouvernance de la politique nucléaire.

Dans son rapport de juin 2022 sur la « nouvelle aube » de l’énergie atomique, l’AIE prend d’ailleurs des pincettes : même si cette source d’énergie reste, avec l’hydraulique, « l’épine dorsale de la production d’électricité à faibles émissions de CO2 » et « aidera à s’éloigner des combustibles fossiles plus rapidement et de manière plus sûre », la fission de l’uranium peut également « se heurter à une opposition publique et politique », concèdent les experts. Si bien que l’organisation internationale ne livre finalement « aucune recommandation aux pays qui choisissent de ne pas l’utiliser ». Preuve, s’il en fallait, qu’il s’agit toujours d’un sujet très sensible.

Redécouverte de la planification

Redécouverte de la planification

 

Dans une tribune au « Monde », Eric Monnet, Prix du meilleur jeune économiste 2022, tire les leçons des succès et des limites de la planification de l’après-guerre et détaille ce qu’elle a à nous apprendre pour la transition écologique.

 

Le terme de « planification écologique » est entré dans le vocabulaire courant de la politique française. La référence à la planification de l’après-seconde guerre mondiale se justifie par la reconnaissance d’un objectif économique et social commun qui surpasse tous les autres car il est à proprement parler vital. La reconstruction d’après-guerre était effectivement vue comme la seule manière de sortir la société de la misère et du rationnement, et la modernisation – l’autre objectif du plan – comme la seule échappatoire de ce qui était perçu comme l’effondrement « malthusien » de la civilisation de l’entre-deux-guerres. Comme aujourd’hui, il y avait un sentiment partagé d’absolue nécessité et la reconnaissance du fait que, malgré ses imperfections, l’Etat était la forme d’organisation collective adéquate, à même de guider la société et éviter la catastrophe.

 

Cela ne signifiait évidemment pas que les autres formes d’organisation collective et la liberté individuelle devaient disparaître ou en souffrir. Les historiens et économistes discuteront sans doute encore longtemps pour savoir si une autre organisation et d’autres politiques auraient été plus bénéfiques aux économies européennes après 1945, mais force est de constater que la reconstruction eut lieu et qu’elle fut suivie par un important processus d’innovation et de modernisation, avant que la planification soit délégitimée par le marasme économique des années 1970. Les objectifs principaux furent, pour la plupart, rapidement atteints, ce qui ne peut manquer de susciter l’intérêt aujourd’hui, puisque des actions décisives doivent être prises à l’horizon de quelques années.

Au sein des économies capitalistes, c’est sans doute en France que la planification fut la plus théorisée et revendiquée, mais de nombreuses caractéristiques étaient partagées par d’autres pays, même si – c’est une évidence dès que l’on parle d’intervention de l’Etat – chaque pays avait ses particularités et son vocabulaire. La planification reposait sur différents principes, dont certains peuvent encore faire sens aujourd’hui : développement des compétences techniques et insertion de celles-ci au sein des administrations, concertation verticale (au sein d’un même secteur d’activité) et horizontale (entre secteurs d’activité), intégration européenne et internationale, réorganisation du secteur financier au service des objectifs de planification.

Le développement des compétences techniques et l’intégration des politiques publiques avec la recherche étaient des dimensions majeures du plan, à la fois au sein des administrations et des entreprises publiques et privées. Des « missions de productivité » pour apprendre des technologies étrangères, au développement de services de recherche dans les grandes entreprises nationalisées en passant par la création de centres de recherche fondamentale, tout était organisé pour que les savoirs nourrissent les objectifs technologiques. Il ne faut pas tomber aujourd’hui dans l’illusion que seules la technologie et l’innovation vont nous tirer d’affaire face à la crise environnementale, mais on peut mesurer combien la rénovation énergétique des bâtiments ou le développement d’énergies non carbonées ne peuvent se faire sans investissement dans la recherche et la formation, ni sans restructuration des administrations.

Politique: Redécouverte de la planification ?

Politique:  Redécouverte  de la planification ?

 

 

Pour une  refonte totale de notre système social et fiscal, estiment les économistes Yann Coatanlem et Antonio de Lecea, dans une tribune au « Monde ».

 

La question du pouvoir d’achat est, aujourd’hui, en tête des préoccupations des Français et l’accélération de l’inflation, tout comme la volatilité actuelle des prix de l’énergie renforcent le sentiment d’insécurité. Mais il faut prendre garde aux solutions politiques simplistes : les protestations contre la vie chère recoupent en fait des problématiques multiples, qu’il faut traiter individuellement, mais aussi suivant une stratégie d’ensemble cohérente.Bref, comme une renaissance de la planification, un gros mot il y a encore quelques mois !

Le manque de pouvoir d’achat souffre d’abord d’un trop-plein de « pouvoir de marché » d’entreprises qui profitent d’un cadre concurrentiel devenu inadapté. Le top 10 % des entreprises au rendement le plus élevé ont aujourd’hui un taux de rendement cinq fois plus élevé que le taux médian, alors que ce ratio était plus proche de deux il y a vingt-cinq ans. Les 10 % des entreprises les plus profitables ont vu leurs marges augmenter de 35 % depuis le début des années 2000, alors qu’elles ont stagné pour les autres entreprises, et leur profitabilité s’accroître de 50 % de plus que les autres. Le top 1 % des entreprises les plus exportatrices représentent 67 % de l’ensemble des exportations. Le top 1 % des firmes détentrices de brevets contrôle 91 % du total des brevets. Cette concentration de plus en plus extrême doit pousser les pouvoirs publics à revoir la politique de concurrence pour éviter la constitution de ces véritables impôts privés que sont les distorsions de prix et les rentes de monopoles, ou encore à faire payer aux entreprises les coûts d’environnement et d’infrastructure supportés par les budgets publics.

Par ailleurs, les crises à répétition, qu’elles soient sanitaires, économiques, climatiques ou géopolitiques, ont touché de manière disproportionnée les plus défavorisés. Durant la pandémie de Covid, on a recouru à un arsenal d’aides qui ont certainement atténué l’impact économique de la crise, mais dont le manque de ciblage suffisamment précis a pu, dans certains cas, créer des situations injustes et alourdir les déficits publics. De même, si dans la lutte contre la hausse du prix de l’essence, des aides d’urgence de l’Etat et des régions apparaissent nécessaires, elles contredisent l’impact de la taxe carbone dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Ces risques dérivés de l’action d’urgence seraient considérablement amoindris si l’on disposait d’une approche des crises ex ante, c’est-à-dire des filets de sécurité offrant une garantie raisonnable de ne pas être laissé sur le carreau. Le revenu universel peut jouer ce rôle d’amortisseur, avec l’avantage non négligeable de changer la psychologie des anticipations : avec moins de peur du lendemain, on peut davantage prendre de risques personnels qui contribuent à la prospérité du pays et les citoyens peuvent mieux accepter des choix politiques de long terme.

 

Industrie : la redécouverte !

Industrie : la redécouverte !

 

 

Le gouvernement a peut-être redécouvert l’intérêt d’une industrie forte. Il y a cependant du chemin à parcourir pour redresser la situation en France qui a vu son industrie réduite de moitié en une vingtaine d’années. Encore aujourd’hui, la politique industrielle est gérée à court terme par Bercy et  il y a longtemps que le ministère de l’industrie a lui aussi disparu. Pour redonner un peu d’oxygène à un secteur qui ne cesse de s’affaiblir, Bercy a cependant décidé de mettre une petite enveloppe de 100 millions à disposition de l’industrie le gouvernement veut aider financièrement des projets dans cinq secteurs « critiques » et prioritaires : la santé, l’agroalimentaire, l’électronique et l’industrie lourde. Il est cependant clair qu’avec une telle enveloppe le projet manque sérieusement d’ambition.

L’idée est d’aller vite avec un appel à projets doté d’une enveloppe de 100 millions d’euros lancé dès cet été. « Cela concerne les créations de nouvelles lignes, les augmentations de capacités ou la modernisation des sites. Chaque comité de filière industriel nous a remonté des domaines dans lesquels des relocalisations ou de nouveaux projets sont possibles. Ce n’est pas de la théorie », explique Agnès Panier-Runacher, la ministre déléguée à l’industrie, qui a déjà en main une trentaine de projets concrets proposés par des entreprises pour « pallier les vulnérabilités dans certains secteurs ».

Le premier terrain de jeu visé est celui de l’industrie pharmaceutique et de la santé, avec les médicaments, le matériel et notamment celui manié en réanimation et en diagnostic in vitro, ou encore l’utilisation des données. Le deuxième concerne l’électronique, Bercy déplorant la grande déprime de la production de cartes électroniques – un segment dans lequel « la France est pieds et poings liés par rapport à l’Asie, mais où les industriels français peuvent se construire des positions de niche et une capacité à ajuster la production aux besoins », souligne Agnès Panier-Runacher.

 

Le gouvernement a également des vues sur la production de lin, de chanvre, de colza, de pois ou de lentilles, sur les nouvelles protéines animales, la transformation agroalimentaire, les emballages en biomatériaux ou sur la traçabilité des aliments. Bercy insiste également sur les projets liés à la chimie ou à la sidérurgie , « l’arrêt de la chaîne logistique internationale ayant mis le doigt sur nos impasses », dit-elle. . Bercy veut soutenir au moins une dizaine de gros projets cette année.

Coronavirus : la redécouverte des territoires ?

Coronavirus : la redécouverte des territoires ?

Par Anne Albert-Cromarias, Groupe ESC Clermont et Alexandre Asselineau, Burgundy School of Business suggère que la pandémie permettra peut-être une redécouverte des territoires tellement la concentration urbaine a montré ses contradictions. (Papier dans la tribune

 

« Mi-mars, un mois plus tard donc, nous avons assisté à un véritable exode des habitants des grandes métropoles face à la menace du Covid-19. Notamment (mais pas seulement), 17% des Parisiens auraient ainsi fui la capitale, anticipant (plus ou moins) l’enfer présumé du confinement à venir dans la promiscuité et les difficultés d’une grande ville.

Les conséquences supposées (puis avérées) du confinement sur la vie quotidienne ont incité ces urbains à préférer des coins du territoire plus tranquilles, où l’on bénéficie d’air pur et de logements plus vastes, parfois de jardins ou de la nature environnante, où associer l’indispensable « distanciation sociale » et l’approvisionnement en denrées de première nécessité est plus aisé.

L’assaut des résidences secondaires s’est avéré réel, posant par ailleurs de vraies questions sur le plan sanitaire à l’origine d’un accueil parfois plus que réservé des autochtones …

Cet exode met surtout en exergue, en lien avec notre propos, les atouts avérés, mais si peu encouragés, des territoires ruraux sur la grande ville.

Le télétravail comme révélateur

Cette longue période de confinement impose à nombre d’entre nous de lâcher prise sur le quotidien ou, à tout le moins, de le réinventer. Chacun voit ses habitudes chamboulées et l’organisation du travail est, pour presque tous, inédite.

Près de 9 millions de travailleurs français seraient aujourd’hui au chômage partiel, et environ 45% de la population active ne travaillerait plus, si l’on rajoute les salariés en arrêt maladie (notamment pour garde d’enfants).

Pour ceux qui peuvent poursuivre leur activité, le télétravail prend un essor totalement inenvisageable il y a seulement encore quelques semaines. Il restait en effet relativement anecdotique dans des entreprises encore frileuses à l’idée de devoir lâcher la pointeuse, et pas nécessairement revendiqué non plus par des salariés attachés au lien social procuré par la présence sur le lieu de travail. Aujourd’hui, 5,1 millions de personnes seraient concernées en France.

Cela ouvre des perspectives nouvelles dans une économie de la connaissance, fortement tertiaire et digitalisée. Certes, tout n’est pas rose, loin de là, et les difficultés à télétravailler sont nombreuses, surtout lorsque l’on a de jeunes enfants ou que l’on ne dispose ni d’un matériel adapté ni d’un wifi adéquat.

Cependant, les entreprises s’aperçoivent que les collaborateurs, même à distance et malgré les difficultés et le stress du confinement qu’il ne faut en aucun cas négliger, peuvent aussi rester engagés et performants. Quant aux managers, dans le même temps, ils découvrent une nouvelle facette à leur activité, nécessitant de privilégier la confiance, l’autonomie et la priorisation plus précise des missions, dans leurs objectifs et leurs contenus. Autant d’éléments positifs que les experts du management appellent de leurs voeux depuis longtemps.

D’ailleurs, au-delà de la situation sanitaire actuelle, espérons-le exceptionnelle, un télétravail choisi, partiel, et bien organisé, peut présenter de nombreux avantages. À l’heure où l’urgence des enjeux climatiques et environnementaux devient criante, il peut générer des externalités positives : baisse significative des temps et des coûts de transports, des embouteillages et de la pollution induite, réduction du stress, optimisation du temps de travail et de l’utilisation des locaux de l’entreprise, etc. Et, avec le travail à domicile rendu possible, on peut choisir d’habiter un peu plus loin de la grande ville …

Réhabiliter les territoires ruraux

D’une façon générale, en cette période de crise sanitaire sans précédent, plus d’échappatoire. L’heure est à la remise en cause des fonctionnements obsolètes ou inefficaces qu’on ne questionne jamais tant les habitudes sont ancrées, par routine, par manque de temps, par mimétisme et parce que, au fond, c’est confortable.

On est loin, désormais, d’un raisonnement selon lequel « hors métropole, point de salut ». La crise du Covid-19 l’a non seulement annoncé, mais aussi prouvé. Nos modes de vie modernes, privilégiant un entassement des populations sur des surfaces toujours plus petites, sont peut-être même, pour partie, raisons de la pandémie actuelle. Mais plus sûrement, et de longue date, d’une large panoplie de problèmes sociaux.

Cette crise pourrait donc constituer le point de départ d’une politique d’aménagement du territoire et de développement des campagnes radicalement nouvelle et différente. Outre un travail accru de décentralisation, deux conditions préalables nous semblent néanmoins indispensables.

D’une part, et l’essor sans précédent du télétravail l’a bien montré, il s’agirait d’accélérer le déploiement du haut débit dans les territoires ruraux, pour mettre fin aux inégalités territoriales dans ce domaine aussi.

D’autre part, le crise pourrait inciter à organiser le désenclavement des territoires. Les infrastructures de transport « propres » en sont un élément clé, et doivent être réinvesties. Le train constitue probablement l’option la plus rationnelle, parce que moins coûteuse et surtout moins polluante, d’autant plus si le train à hydrogène se développe enfin.

À condition, là aussi, de réduire drastiquement les inégalités territoriales qui restent très fortes, comme en atteste par exemple la carte isochrone de la SNCF mesurant les temps de trajet des principales villes françaises au départ de Paris.

La crise sanitaire majeure que nous traversons est – aussi – le signe qu’il nous faut nous transformer. Et cette transformation, qui sera institutionnelle, économique, sociale, environnementale, ne peut passer que par une mutation radicale de notre rapport aux métropoles et aux territoires.

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Par Anne Albert-Cromarias, Enseignant-chercheur HDR, management stratégique, Groupe ESC Clermont et Alexandre Asselineau, Directeur de la Recherche BSB, enseignant-chercheur en Stratégie et Management stratégique, Burgundy School of Business

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

Convention citoyenne pour le climat : redécouverte de la lune !

Convention citoyenne pour le climat  : redécouverte de la lune !

 

Dans la Tribune un citoyenne ( anonyme) tirée au hasard  comme  autres, s’exprime sur les travaux de cette convention dont plus personne ne parle; Et pour cause la convention redécouvre la lune:  la relocalisation les circuits courts, la mobilité propre ou la relance verte.  Comme si les innombrables associations environnementales qui luttent depuis des années terrain n’existaient pas et n’agissaient pas déjà sur ce terrain   

 

Quels sont alors les principaux chantiers du monde d’après ?

Plusieurs de nos propositions pour la sortie de crise portent sur des facteurs de mobilité plus propre. Il nous semble également nécessaire de revoir notre manière de nous nourrir et, plus globalement, de produire, en mettant en œuvre des formes de relocalisation et en accordant une préférence aux circuits courts. La rénovation écologique des bâtiments est un autre chantier qui peut être mis en place rapidement et contribuer grandement tant à la relance économique qu’à la réduction des gaz à effet de serre.

Vous insistez sur la relocalisation. Mais à quelle échelle justement réorganiser le monde d’après : nationale, régionale, européenne ?

Tout dépend du secteur, de l’industrie… et plusieurs niveaux s’imbriquent. Depuis les début de nos travaux, nous sommes conscient.e.s des limites de notre mandat, purement national. En matière climatique, l’échelle européenne voire mondiale est en effet fondamentale.

Mais l’épidémie du coronavirus nous a aussi montré à quel point, pour des produits aussi fondamentaux que ceux sanitaires, nous sommes redevables à d’autres pays, au prix d’ailleurs d’importantes externalités négatives. C’est une dépendance qui nous interroge. Nous appelons donc à redéfinir nos secteurs stratégiques et, au moins pour ceux-ci, à relocaliser une partie de la production.

Appelez-vous à une remise en cause radicale de la mondialisation ?

Il est certain que nos travaux nous ont amené.e.s à interroger le schéma de la mondialisation, et à penser un autre modèle, des modalités de croissance plus vertueuses voire de décroissance. Nous remettons effectivement en cause les grands mécanismes du commerce international. Et il est aussi tentant de faire un parallèle entre les effets négatifs de la mondialisation sur la diffusion du virus et sur le climat. Nous n’en appelons pourtant pas au protectionnisme.

Une partie de nos membres sont des frontalier.es., qui nous ont témoigné de leur sentiment terrible de repli national en ce moment de crise, où chaque Etat déploie sa stratégie. Une telle approche nous inquiète aussi concernant le climat. Nous espérons que le projet du Pacte vert européen tienne, même si nous souhaitons qu’il aille au-delà du simple financement de la transition, qu’il exprime également une communion d’objectifs.

L’enjeu du financement va justement être au centre des plans de relance. Quelle est votre position à ce propos ?

Nous avons eu la chance d’avoir beaucoup d’explications de la part d’expert.e.s sur les investissements bruns et verts. Sur ce point, nous sommes unanimes : il faut réduire voire arrêter les premiers. Même si nous ne rejetons pas la finance internationale dans son ensemble, nous demandons à ce que les investissements soient bien orientés. Dans l’automobile par exemple, nous souhaitons qu’on soutienne surtout le développement de véhicules propres. Nous en sommes toutefois conscient.e.s : la relance ne pourra pas être que verte, il faudra aussi tenir compte d’autres nécessités. Mais l’environnement doit être pris en compte.

Quelles leçons tirer du confinement ?

La situation est évidemment très difficile pour tout le monde. Mais c’est quand même heureux de constater que des choses qu’on pensait infaisables deviennent possibles face à la contrainte. L’engouement pour les circuits courts montre par exemple une prise de conscience énorme de la richesse de ce que l’on fabrique. On assiste partout à des élans de solidarité et de créativité. Cela redonne confiance : les gens sont prêts au changement. Il s’agit maintenant de réfléchir à comment faire perdurer cela sans imposer des contraintes aussi radicales.

Si les Français se sont adaptés à ces contraintes, c’est parce qu’elles sont temporaires, et parce qu’ils partagent l’objectif primaire de sauver des vies. Mais comment créer le consensus autour de l’urgence climatique ?

Notre mission c’est justement d’avertir, afin d’éviter qu’il ne faille arriver à une situation dramatique avant que ce consensus ne se crée. Nous nous devons également de formuler nos propositions de la manière la plus consciencieuse et pertinente possible, afin d’inciter l’Etat à prendre les décisions les plus efficaces, puis de continuer de les promouvoir, y compris à l’échelle des territoires.

Quelle réponse attendez-vous des pouvoirs publics ?

Nous souhaitons au moins un avis de réception. Mais ils sont libres de prendre cela en compte comme ils le peuvent dans la situation actuelle. La nôtre n’est qu’une contribution.

A quand le reste de vos travaux ?

Nous espérons encore pouvoir tenir une session physique en juin, où nous pourrions voter solennellement toutes nos mesures. Mais tout est encore incertain, et d’autres options surgissent : voter virtuellement à distance, reporter tout à septembre…

Comment conserver une place au regard citoyen dans la durée, une fois que la Convention citoyenne sera clôturée ?

Nous y réfléchissons depuis le début de nos travaux. Nous avons en effet une très grande responsabilité, car on ne nous a pas seulement confié de réfléchir à un sujet lourd de sens, mais aussi de mener à bien le premier exercice démocratique de ce type en France. Si nous échouons, si nos propositions ne sont pas abouties ou pertinentes, l’échec sera double.

La redécouverte de la mobilité !

La redécouverte de la mobilité !

 

S’il existe bien un phénomène qui caractérise les sociétés modernes, c’est bien celui de la mobilité. Un phénomène particulièrement bien à étudié depuis des dizaines d’années et bien connu par deux nombreuses institutions d’études et de recherches. Il existe des centaines d’études sur le sujet. Un article surprenant de la Tribune donne l’impression qu’on découvre cette mobilité. Pour preuve l’interview de Sylvie Landriève co-directrice du Forum Vies Mobiles qui semble découvrir la place centrale de la mobilité dans la vie contemporaine.

 

 Votre enquête nationale dévoilée début mars montrait que les trajets domicile-travail concernaient plus de 8 Français sur 10. A l’heure du confinement, comment font les Français ?

SYLVIE LANDRIÈVE: Nous avons effectivement voulu connaître les déplacements de tous les Français. On a retenu trois grands motifs de déplacement: les activités choisies – familiales, sociales, loisirs et sports -, ce qui est vital – alimentations et santé – et les trajets pour le travail. On voit tout d’abord que les Français se déplacent deux fois plus que ce qu’on croyait (10h et 400km par semaine en moyenne). Il existe toutefois une gigantesque disparité entre ceux qui vivent en relativement grande proximité et les personnes qui parcourent 100 kilomètres par jour. Dans ce contexte de confinement, les déplacements choisis sont de facto écartés, quand les activités vitales ne sont pas celles qui nécessitent le plus de trajets. Reste la question du travail.

Travailler ou pas peut multiplier par près de deux les distances parcourues chaque semaine et les déplacements du domicile vers le travail concernent 80% des gens. C’est sans compter les 40% qui ont des déplacements dans le cadre de leur travail: les 27% dont le métier consiste à rouler (conducteurs, pilotes, taxis, livreurs…) et les 13% qui ont impérativement besoin d’un véhicule pour leurs déplacements professionnels quotidiens: les services à domicile (aide-ménagères, dépanneurs), les infirmiers-médecins ou encore les commerciaux. Autant de situations différentes en temps de confinement.

Le télétravail rebat-il les cartes ?
Nous faisons comme si le domicile-travail était le seul sujet. Le confinement révèle en fait quatre situations bien différentes: ceux qui peuvent effectivement travailler à domicile (mais pendant combien de temps ?), ceux dont le métier est essentiel en cas de confinement et qui doivent travailler pour les autres, ceux qui n’ont pas d’autre choix que l’arrêt de travail et plus étrangement, ceux qui doivent aller travailler, même quand leur métier n’est pas essentiel en phase de confinement, comme les cols bleus.
Avec cette injonction à aller au travail, on laisse entendre que leur activité est vitale au risque d’une diffusion évitable du virus. Des salariés commencent à exercer leur droit de retrait et des grèves commencent à éclater en Italie.

Cette situation peut-elle amorcer une réflexion plus générale sur nos modes de vie ?
Cette crise rend sensible quelque chose auquel on ne fait habituellement pas attention: la place centrale de la mobilité dans nos modes de vie. Pour le meilleur (liberté, émancipation, …) et pour le pire (pollution, émissions de CO2, fatigue, dépendance aux territoires lointains, …). Cette crise est peut-être l’occasion effectivement de repenser la place des déplacements et du travail dans nos vies. D’ailleurs, quand on les interroge sur ce que serait le futur idéal pour eux, les gens disent aspirer à vivre plus proches de la nature. Dans les circonstances exceptionnelles que nous vivons, on a vu une partie des Franciliens passer à l’acte.

 

Municipales Paris : la redécouverte des arbres !

Municipales Paris  : la redécouverte des arbres  !

Curieusement les candidats à la mairie de Paris semblent redécouvrir l’intérêt des arbres dans une agglomération. La maire actuelle de Paris propose de planter 170 000 arbres, les écolos de fleurir les balcons et Griveaux de transférer des gares parisiennes en banlieue … peut-être même en Province. sans parler des visions urbanistiques fantaisistes qui imaginent Paris en centre national de l’agriculture urbaine. En gros, le blé pousserait dans des pots  de fleurs et des tomates en suspension pousseraient le long des façades. La maire de la capitale promet de créer des «dizaines de rues végétales et 100% piétonnes» dans tous les arrondissements de la capitale.

La Ville de Paris est chargée de la gestion de 184 500 arbres. 96 500 en bordure des rues et 87 500 dans les parcs, jardins et cimetières. Il faut à  cela ajouter les arbres du bois de Boulogne et du bois de Vincennes sur 1 840 hectares soit environ 300 000 arbres. Le vrai problème n’est peut-être pas l’insuffisance d’arbres mais le nombre excessif d’habitants au mètre carré qui rend la ville assez inhabitable tant du point de vue de la qualité de l’air, que du bruit et de la promiscuité générale.

Création d’une centaine de «mini forêts urbaines», de «dizaines de rues végétales» et plantation de 170.000 arbres : Anne Hidalgo détaille ses propositions pour introduire davantage de nature dans Paris, Dimanche. La, présentera jeudi 6 février son programme pour les municipales de mars dont «le socle sera l’écologie», dit-elle. Elle propose une «végétalisation massive» qui passera «par la création de dizaines de rues végétales et 100% piétonnes, dans tous les arrondissements». «Enherbées», elles «formeront un grand parcours vert parisien». Anne Hidalgo prévoit aussi des «forêts urbaines» derrière l’Opéra, sur le parvis de l’Hôtel de ville, devant la gare de Lyon et encore au pied de la tour Montparnasse. Et «une centaine de mini forêts urbaines – une trentaine d’arbres et de la pelouse – sur des petites parcelles de 200 mètres carrés dans chaque arrondissement, comme cela se fait à Tokyo».

Également à son programme : «Débitumer et végétaliser une bonne moitié des huit hectares des quais de Seine», des nouveaux parcs, «deux très grands potagers urbains», dans le bois de Vincennes et dans le bois de Boulogne. Bref heureusement que les échéances électorales viennent rappeler la nécessité de trouver une meilleure harmonie entre l’urbanisation et le cadre de vie. Cet appétit de verdure est sans doute alimenté par la montée des écolos qui pourraient bien faire la différence comme force d’appoint significative lors de l’élection du maire. Dans cette effervescence verte, Benjamin Griveaux tient sans doute le pompon des propositions saugrenues en envisageant de déménager la Gare de l’Est en banlieue. Pourquoi pas aussi en province et même très loin de Paris, à Strasbourg par exemple. La fusion entre la Gare de l’Est et la gare Strasbourg permettrait alors  é d’économiser tous les déplacements par train sur cet axe …. ou alors de les reporter sur la route. Le report de la Gare de l’Est en banlieue risque d’ailleurs de multiplier les transports parasites comme cela s’est produit lorsque les grandes surfaces étaient écartées de Paris. Les déplacements parasites ont alors été multipliés par 1000.

La redécouverte des dépenses contraintes !

La redécouverte des dépenses contraintes !

C’est la redécouverte des dépenses contraintes en fête de la réalité pouvoir d’achat. En effet l’indice  moyen de l’INSEE qui mesure l’évolution des prix est largement obsolète. Pour résumer, on constate une évolution régulière de la structure de consommation des ménages avec une part de plus en plus importante des dépenses contraintes pour les bas revenus et l’inverse pour les ménages . Si ces dépenses contraintes représente 30 % du pouvoir d’achat en moyenne, elles peuvent atteindre qu’à 60 % pour les ménages pauvres et seulement 10 % pour les ménages. En clair pour les plus pauvres il reste de l’ordre  350 € les dépenses ajustables quand les dépenses contraintes ont été réglées. D’après l’Insee, le poids des dépenses contraintes, passé de 12,4% du revenu disponible en 1951 à près de 30% en moyenne 2017, ne cesse de s’accroître dans un mouvement qui s’explique pour «plus des trois quarts» par la hausse des coûts liés au logement. Le niveau de vie arbitrable médian mensuel s’élevait, en 2011, à 1050 euros seulement, un montant qui passe à 1530 euros pour la troisième quartile, mais descend à 670 euros pour le premier quartile. Les ménages pauvres, quant à eux, n’ont que 340 euros en moyenne, tandis que les classes moyennes disposent de 1190 euros après paiement des dépenses contraintes. Parmi les dépenses contraintes intégrées notamment le loyer, l’énergie, les assurances le transport et autre abonnements

Redécouverte de l’eau: le vin sans alcool !

Redécouverte de l’eau:  le  vin sans alcool !

Il y a avait déjà la bière sans alcool, maintenant c’est  le vin, bref la redécouverte de l’eau ou au mieux du jus de raisin.  Sans gluten, sans sucre, sans sel, sans graisse et sans calories et maintenant sans alcool, l’industrie alimentaire et viticole progresse à pas de géant. On va bientôt redécouvrir le pain sans mie (la galette du Sahel), la confiture sans sucre (la compote)  et peut-être même le fil à couper le beurre. Du vin sans sucre sans alcool est donc la nouvelle découverte, sans doute demain le vin sans vigne. Certes il faut évidemment condamner les excès dans tous les domaines mais tout est question d’équilibre et à force d’inventer des  ersatz de produits alimentaires on va finir par tuer le plaisir gastronomique. Aujourd’hui, Les Domaines Pierre Charvin ont  osé produire du vin sans alcool et le vendre en France. La start-up a vu le jour dans l’Hérault en 2010 à l’initiative de Mathilde Boulachin et Fabien Gross, deux entrepreneurs qui ne sont pas issus du sérail de la viticulture. En quelques années, cette marque s’est fait une belle place sur le marché du vin avec des produits innovants et originaux.  « Ces produits existent depuis longtemps, mais nous avons fait en sorte de les rendre plus accessibles aux consommateurs en créant un design et des gammes plus tendance », a expliqué Mathilde Boulachin à BFM Business.

Immobilier : la redécouverte de Hollande

Immobilier : la redécouverte de Hollande

 

Mieux vaut tard que jamais mais il serait temps que le gouvernement prenne conscience de l’impact de l’immobilier sur l’économie ; d’une manière plus générale des conséquences négatives de l’ensemble du BTP sur la croissance. Un impact qui pourrait être de l’ordre de 1% et qui pèse énormément sur l’emploi local pourtant non délocalisable. La construction est  toujours dans le rouge et plombe la croissance, une construction  encore en repli de 4% ;  le secteur enregistre un nouveau recul après celui de 2013. L’atonie du secteur pèse toujours sur la croissance de l’économie française et constituera le principal facteur de son retard sur les autres pays de la zone euro cette année, estime l’Insee. Dans sa notre trimestrielle de conjoncture publiée jeudi, l’Institut a revu en légère baisse sa prévision pour 2015 à 1,1%, soit 0,1 point de moins que précédemment, du fait d’un « trou d’air » qu’il juge temporaire dans la production industrielle au printemps et au début de l’été.  Son estimation pour le PIB français reste supérieure à celle du gouvernement (1,0%). Mais elle se situe nettement en dessous de ses attentes pour l’ensemble de la zone euro (+1,6% en 2015), un décalage que l’Insee attribue au marasme de l’investissement en logements. Alors que le pouvoir d’achat des ménages progresse, l’Insee attend un repli de 3,9% de l’investissement en construction en 2015 après -3,3% en 2014.   »Le principal frein au décollage de l’activité en France reste le secteur de la construction », a souligné Vladimir Passeron, chef du département conjoncture de l’Insee. L’Institut estime ainsi à -0,4 point l’impact sur la croissance du seul secteur qui voit encore son climat des affaires se dégrader. « Les dépenses en logement des ménages, qui ont déjà reculé de 25% depuis 2007, continueraient encore de baisser en seconde partie de l’année », juge l’Insee, invoquant les délais dans ce secteur où les signaux positifs se matérialisent tardivement. Depuis 2010, le nombre de primo-accédants, c’est-à-dire le nombre de personnes qui achètent un logement pour la première fois, a diminué de 20%. Une chute préoccupante pour François Hollande, qui a promis que des mesures seraient annoncées d’ici la fin de l’année, à l’occasion du projet de loi de finances rectificative. Car le gouvernement l’a bien compris : la construction peu bel et bien être un levier pour faire redémarrer l’économie.  C’est dans cette perspective que, depuis un an, le gouvernement a commencé à revoir les plafonds, le ciblage et le zonage du prêt à taux zéro. Dans 30.000 petites communes en zone rurale, celui-ci est désormais étendu aux logements anciens à condition d’y effectuer des travaux. Et le gouvernement pourrait peut-être l’élargir à d’autres communes, plus grandes. Des  mesures bien insuffisantes car la vraie question est de resolvabiliser les primo accédants, ce qui suppose notamment  auusi une refonte de la durée des prêts et une réforme du foncier.




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