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Tourner la page radicalité de Mélenchon et la page jupitérienne de Macron

 

Tourner la page radicalité de Mélenchon  mais aussi celle de Macron, c’est l’objectif que se donne désormais Raphaël Glucksmann ex tête de liste PS- place publique–aux européennes. Pour Raphaël Glucksmann l’esthétique de la radicalité n’est en fait que du sectarisme et conduit au blocage du pays.

 

 

La gauche ne pourra gouverner que si elle accepte de «négocier des compromis» et renonce à la «radicalité», ce qui suppose de «tourner la page Macron et Mélenchon », affirme le député européen et leader de Place publique Raphaël Glucksmann dans un entretien au Point mardi. À gauche, «on est terrorisés à l’idée d’être considérés comme impurs si on négocie des compromis. Mais pourquoi faire de la politique si c’est pour se condamner à l’impuissance et aux postures ?», interroge l’ex-tête de liste PS/Place publique aux européennes.
«Si on veut l’augmentation du smic et des salaires, un ISF climatique, le renforcement des services publics en zone rurale ou une grande politique de réindustrialisation, cela passe par des discussions poussées avec d’autres forces politiques», argumente Glucksmann. «Quand je suis devenu député européen, j’avais cette tendance française à confondre compromis et compromission, mais j’ai appris et compris. Il faut rompre avec l’esthétique de la radicalité, qui n’est en fait que du sectarisme et empêche justement toute transformation radicale, en finir avec le mythe de la toute-puissance et délaisser Jupiter comme Robespierre. Et donc tourner la page Macron et Mélenchon», ajoute l’eurodéputé.
Pour Raphaël Glucksmann, qui dit n’avoir «jamais cru à l’aplanissement magique des divergences extrêmement profondes» avec LFI, le Nouveau Front Populaire ne peut être qu’une «unité d’action électorale contre l’extrême droite». «En 2027, ce sera la social-démocratie, et non un succédané du macronisme ou un avatar du populisme de gauche, qui fera face au lepénisme», assure-t-il. La candidate du Nouveau Front populaire (NFP) à Matignon, Lucie Castets, a elle-même évoqué ces derniers jours la nécessité pour l’alliance de gauche de chercher des «accords», faute de majorité absolue à l’Assemblée pour appliquer son programme. Elle doit être reçue vendredi par le président Macron, qui a convié à l’Élysée les différents chefs de partis et de groupes parlementaires pour des consultations, en vue d’enfin nommer un gouvernement, plus d’un mois après la démission de celui de Gabriel Attal.

Politique-Lucie Castets: Inexpérience, radicalité…. et psychorigidité

Politique-Lucie Castets:  Inexpérience, radicalité…. et psychorigidité

 

Sur le site Atlantico, Jean-Luc Demarty  considère que la nomination de conduirait directement le pays vers une faillite type grecque. Pour lui, la candidate du NFP n’a pas du tout le niveau ni l’expérience sans parler de son comportement psychorigide. Après un  passage peu glorieux à la direction du trésor, elle a été mutée dans un poste de second rang à la Ville de Paris où elle a laissé filer l’endettement qui atteindra bientôt 10 milliards. Ce qu’on appelle sans doute la preuve d’un « bon ancrage à gauche ». 

 

par Jean-Luc Demarty , ancien Directeur Général du Commerce Extérieur de la Commission Européenne (2011-2019), ancien Directeur Général Adjoint et Directeur Général de l’Agriculture de la Commission Européenne (2000-2010) et ancien Conseiller au cabinet de Jacques Delors (1981-1984; 1988-1995) dans Atlantico.

« …Auparavant Lucie Castets avait été administrateur civil de base à la Direction du Trésor à partir de 2014 après sa sortie de l’ENA, puis au sein de TRACFIN, service du ministère de l’économie et des finances responsable de la lutte contre le blanchiment, où elle a occupé un poste non opérationnel, avec une poignée d’agents sous sa responsabilité, de représentation au sein du Groupe d’Action Financière (GAFI), organisme international intergouvernemental chargé de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, localisé à l’OCDE. Elle s’est distinguée par la mauvaise ambiance qu’elle faisait régner au sein de TRACFIN en colportant des remarques venimeuses à propos de ses collègues femmes en particulier, curieux comportement pour une féministe revendiquée. C’est probablement la raison pour laquelle sa candidature au poste de directeur adjoint a été écartée, ce qui l’a conduite à quitter le ministère de l’économie et des finances pour la Ville de Paris. C’est en soi un comportement étrange. En effet les administrateurs civils de la Direction du Trésor font généralement une très belle carrière au sein du ministère de l’économie et des finances, administration beaucoup plus prestigieuse que la Ville de Paris. C’est le signe d’un caractère qui ne supporte pas que sa haute idée de ses capacités soit mise en doute. »

 

Lucie Castets: Inexpérience, radicalité…. et psychorigidité

 Lucie Castets:  Inexpérience, radicalité…. et psychorigidité

 

Sur le site Atlantico, Jean-Luc Demarty  considère que la nomination de conduirait directement le pays vers une faillite type grecque. Pour lui, la candidate du NFP n’a pas du tout le niveau ni l’expérience sans parler de son comportement psychorigide. Après un  passage peu glorieux à la direction du trésor, elle a été mutée dans un poste de second rang à la Ville de Paris où elle a laissé filer l’endettement qui atteindra bientôt 10 milliards. Ce qu’on appelle sans doute la preuve d’un « bon ancrage à gauche ». 

 

par Jean-Luc Demarty , ancien Directeur Général du Commerce Extérieur de la Commission Européenne (2011-2019), ancien Directeur Général Adjoint et Directeur Général de l’Agriculture de la Commission Européenne (2000-2010) et ancien Conseiller au cabinet de Jacques Delors (1981-1984; 1988-1995) dans Atlantico.

« …Auparavant Lucie Castets avait été administrateur civil de base à la Direction du Trésor à partir de 2014 après sa sortie de l’ENA, puis au sein de TRACFIN, service du ministère de l’économie et des finances responsable de la lutte contre le blanchiment, où elle a occupé un poste non opérationnel, avec une poignée d’agents sous sa responsabilité, de représentation au sein du Groupe d’Action Financière (GAFI), organisme international intergouvernemental chargé de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, localisé à l’OCDE. Elle s’est distinguée par la mauvaise ambiance qu’elle faisait régner au sein de TRACFIN en colportant des remarques venimeuses à propos de ses collègues femmes en particulier, curieux comportement pour une féministe revendiquée. C’est probablement la raison pour laquelle sa candidature au poste de directeur adjoint a été écartée, ce qui l’a conduite à quitter le ministère de l’économie et des finances pour la Ville de Paris. C’est en soi un comportement étrange. En effet les administrateurs civils de la Direction du Trésor font généralement une très belle carrière au sein du ministère de l’économie et des finances, administration beaucoup plus prestigieuse que la Ville de Paris. C’est le signe d’un caractère qui ne supporte pas que sa haute idée de ses capacités soit mise en doute. »

 

Écologie–La radicalité fait reculer la cause environnementale

Écologie–La radicalité fait reculer la cause environnementale
(Bertrand Piccard)

Dans un entretien exclusif avec La Tribune, au lendemain de la conclusion de la COP 27 de Charm el-Cheikh , Bertrand Piccard, président de la Fondation Solar Impulse, psychiatre et explorateur, auteur du premier tour du monde en ballon (1999) puis en avion solaire (2015-2016), dresse le bilan amer de cette décevante Conférence sur le Climat. Entretien dans la Tribune

(La 28ème Conférence des Parties sur le Climat de l’ONU (COP 28) se déroulera du 30 novembre au 12 décembre 2023 à Dubaï, aux Émirats Arabes Unis! )

Une tribune intéressant mais un peu approximative sur la question du coût de l’électricité et des conditions nécessaires à la production de l’hydrogène NDLR

COP 27 s’est terminée sur une déclaration finale peu ambitieuse et une résolution sur la compensation des dégâts causés par le changement climatique subi par les pays vulnérables. Quel bilan en tirez-vous ?
BERTRAND PICCARD- Le bilan est très contrasté entre, d’un côté, un secteur privé qui prend beaucoup d’initiatives, certains pays qui sont avant-gardistes dans leur lutte contre le changement climatique et, de l’autre, des négociations qui aboutissent à des mesures extrêmement peu ambitieuses. C’est tout juste si l’objectif de contenir la hausse de la température moyenne à 1,5 degré d’ici à la fin du siècle a été conservé. On le doit probablement en partie à l’appui du G20 qui s’est tenu en Indonésie.

À Charm el-Cheikh, des pays voulaient revenir en arrière, passer à 2 degrés, parce qu’ils disaient que l’objectif était impossible à tenir. Il n’y a pas eu de progrès par rapport au charbon, au pétrole et au gaz et, au stade actuel, on voit qu’on n’est pas du tout en ligne pour empêcher la catastrophe. L’accord final stipule que les pays qui ne sont pas en ligne avec cet objectif doivent corriger leurs intentions, leurs engagements, mais il ne s’agit que d’une incitation. Ce n’est pas du tout quelque chose de contraignant. Mais on parle, c’est vrai, d’une avancée historique parce qu’il faut bien mettre de l’historique quelque part pour compenser la catastrophe du reste.

Certains disent que c’est historique qu’on ait enfin pris en compte les revendications des pays les plus vulnérables au changement climatique causés par les pays industrialisés. C’est vrai, c’est une question de pollueur payeur. Il y a un fond qui a été déterminé. Mais on ne dit pas encore comment il sera utilisé, ni combien il y aura dedans, alors qu’autrefois on parlait de 100 milliards de dollars par an. Ce qui a permis d’arracher l’accord des Occidentaux, c’est que ce fond va être ciblé sur les pays vulnérables, en excluant la Chine, qui se considérait comme un pays en développement et voulait recevoir une partie de ces indemnités, alors qu’elle est la deuxième puissance économique mondiale et le gros pollueur de la planète. Bref, un peu de ménage a été fait. Tant mieux, mais on est encore très loin de ce qu’il faut pour éviter la catastrophe.

L’ombre de la crise géopolitique, que ce soit la guerre en Ukraine, l’attitude protectionniste de la Chine, ou le comportement des pays producteurs de pétrole, a-t-elle fait voler en éclat l’esprit de l’Accord de Paris ?
Je pense que les pays européens se sont beaucoup repliés sur eux-mêmes à cause de la crise ukrainienne. C’est indéniable. C’était assez difficile pour eux de pouvoir exiger d’autres pays de réduire leur consommation de pétrole, de charbon et de gaz, alors qu’eux-mêmes rouvrent des mines de charbon. Cela décrédibilise les demandes. Ce qu’on voit, c’est une revendication justifiée des plus démunis face aux nantis. Cela se voit à toutes les échelles de la société.

En France, dans les revendications politiques et sociales, mais aussi à l’échelle mondiale où, indéniablement, les pays les plus démunis veulent se faire aider par les pays les plus riches. On a beaucoup trop de déséquilibres financiers dans ce monde. Il y a des gens qui n’ont plus rien à perdre. Il y a une vraie revendication. Il y a de plus en plus de personnes qui considèrent -à raison – qu’il est inacceptable de vivre en-dessous du minimum vital, en-dessous des seuils de santé, d’éducation… La lutte contre les changements climatiques cristallise aussi cette revendication sociale des pays pauvres vis-à-vis des pays riches.

L’an dernier vous disiez à l’issue de la Cop 26 de Glasgow, qui elle aussi avait été fortement critiquée pour son manque d’ambition que la Cop n’était que la partie émergée de la lutte contre les changements climatiques et qu’il y avait eu des avancées en coulisse. Y a-t-il eu de telles avances en coulisse à Charm el-Cheik ?
Oui, ce qui manque, ce sont les consensus politiques finaux. Car, pour avoir l’unanimité, c’est toujours le pays le moins ambitieux qui gagne. En revanche, au niveau des coalitions, cela avance. À Glasgow, une coalition avait été créée contre le méthane. Cette année j’ai participé à la réunion des 50 ministres qui avaient signé cette coalition. C’était une rencontre destinée à contrôler ce que chacun avait fait dans le cadre de la lutte contre le méthane. Cela avance aussi au niveau de la finance, des entreprises privées, des solutions techniques.

C’est pourquoi je suis très frustré de voir que les négociations politiques sont si peu ambitieuses, alors qu’il y a autant de solutions prêtes et autant d’engagements prêts à être fructifiés au niveau du secteur privé.
Vous avez évoqué la crise en Ukraine. La crise énergétique qu’elle a provoquée et le retour du charbon ou du gaz porte-t-il un coup très dur à la transition écologique ou va-t-il au contraire permettre de l’accélérer ?
Cela porte un coup dur à la transition. La plupart des gens ne comprennent pas que la réponse devrait être la même pour les deux situations. La crise en Ukraine et la transition énergétique nécessitent toutes les deux qu’on diminue la part des énergies fossiles pour la remplacer par des énergies renouvelables et qu’on augmente tous les systèmes qui permettent d’être plus efficient sur le plan de l’énergie, des ressources, de l’alimentation, des déchets… C’est la même réponse, mais dans l’esprit des gens c’est dissocié. Pour eux, la crise ukrainienne va nous donner froid cet hiver ou l’hiver prochain et la lutte contre le réchauffement climatique coûte cher. Les deux problèmes s’ajoutent, alors qu’ils devraient se soustraire.
Vous avez évoqué la finance, le président d’une grande banque française affirmait récemment que la finance jouait le jeu et que le financement du charbon serait fini en 2030. Et qu’il était possible de viser fin 2037 en Europe pour le pétrole en raison de l’électrification du parc automobile. Croyez-vous que le rôle de la finance soit en train de changer sous la pression de la société civile ?

Effectivement, je pense que les dates sont justes sur l’arrêt des énergies sales. Maintenant je ne sais pas ce que vont faire les banques chinoises ou émiraties.
Il y a deux poids, deux mesures ?
L’Occident, au niveau secteur privé, va plus vite. À Glasgow il y avait eu un texte disant qu’il fallait viser la diminution progressive du charbon. L’Inde a demandé cette année de rajouter du charbon, du gaz et du pétrole parce qu’ils en utilisent beaucoup, alors que l’Occident utilise plutôt du gaz et du pétrole. Les pays occidentaux ont refusé que le gaz et le pétrole soient placés dans les objectifs de diminution progressive. C’est quand même ahurissant ! Il y aura toujours beaucoup trop de gens qui voudront utiliser le pétrole, le gaz et le charbon, mais ce ne sera probablement plus financés par les banques occidentales qui sont loyales à la cause climatique et ont la volonté de se désengager des énergies polluantes.

Vous étiez jusqu’ici très prudent sur le nucléaire pour réussir la transition écologique. Or, la crise actuelle montre les effets pervers de ce renoncement puisqu’il entraîne aujourd’hui une augmentation de l’électricité issue du charbon ou du gaz. Greta Thunberg a changé d’avis et n’appelle plus à l’arrêt de l’atome. Quelle est votre position aujourd’hui ?
Je dois dire que le nucléaire reprend une place qu’il n’avait plus. Je suis d’accord, il est aberrant aujourd’hui de démonter les centrales nucléaires si elles fonctionnent et si elles sont sûres. Mais il faut voir le prix que cela coûte. Le renouvelable aujourd’hui coûte moins cher que le nucléaire, même en comptant le stockage. Donc il faut être prudent si on veut reconstruire des centrales nucléaires, car on va se retrouver avec un prix d’électricité beaucoup plus élevé qu’avec le renouvelable.

Aujourd’hui, on voit des choses extraordinaires. Quand on parle de l’intermittence du renouvelable et qu’on affirme qu’on ne pourra pas le stocker, on voit que l’on peut construire de très grands réseaux, sur plusieurs fuseaux horaires, avec des renouvelables différents et des câbles qui transportent l’électricité produite en continu, à très haut voltage. On ne perd presque rien. 1% par 1000 km, ce qui est insignifiant. Il y a un projet qui pourra fournir 8% de l’électricité britannique. Elle sera produite au Maroc et sera acheminée en Angleterre en passant par des câbles sous-marins via les côtes espagnoles et portugaises. C’est extraordinaire. Ce courant sera livré en Angleterre pour beaucoup moins cher que le nucléaire. Ou faut-il investir ? Il faut donc être très prudent quand on veut faire davantage de vieilles choses, plutôt que de faire des nouvelles.

Depuis le crise sanitaire, les pays occidentaux cherchent à réindustrialiser leurs pays (ce qui permet d’éviter les émissions liées au transport) et à recréer un secteur minier pour disposer des métaux rares nécessaires à la transition énergétique. Or, de telles initiatives se heurtent parfois à l’hostilité des écologistes. L’écologie radicale peut-elle entraver ce processus de rapprochement de la production des centres de consommation, qui permet de baisser les émissions ?
Vous répondez avec la question. Dès qu’on est radical, on échoue à atteindre un objectif consensuel, un objectif bon pour l’ensemble. Qu’on soit radical de droite, de gauche ou écologique. Ce qu’il faut, ce n’est pas de la radicalité mais du réalisme, atteindre un objectif indépendamment de sa propre idéologie. Il faut prendre ce qu’il y a de bon partout. Il n’y a aucune raison, quand on est écologiste et qu’on veut protéger l’environnement, de rejeter tout ce qui permet sur le plan énergétique ou sur le stockage des minéraux, de bloquer tous les progrès. En fait, en étant trop radical, on arrive à l’opposé de ce que veut l’écologie : on atteint un rejet de la part des autres. On fait peur, on effraye. Aujourd’hui, l’écologie devrait fédérer et réunir, plutôt qu’effrayer ou rejeter.

On voit beaucoup de mouvements de jeunes qui bloquent des autoroutes, s’accrochent à des tableaux. Est-ce que ce mouvement, qui traduit une éco anxiété, peut être efficace pour changer les mentalités de ceux qui ne veulent pas changer et faire accepter une bascule plus rapide des choses. Pensez-vous que ces mouvements aient un rôle à jouer d’éveilleur de conscience, ou qu’ils sont contre-productifs ?
C’est le thème d’une chronique que j’ai écrite sur l’éco-violence et l’éco-résistance. Cela m’interroge beaucoup. En fait, les terroristes et les résistants sont toujours définis en fonction de leur camp et de l’époque. Les résistants les plus valeureux en France durant la Deuxième Guerre étaient considérés comme des terroristes par les Allemands. On va voir comment on jugera les éco-violents. C’est vrai que c’est révoltant de voir qu’il ne se passe rien. Quand on voit que des gens polluent outrageusement par pur égoïsme, il y a de quoi commencer à s’agiter. Et il y a des gens qui s’agitent beaucoup, parfois au point de devenir violents. Je ne peux pas soutenir la violence, mais je peux la comprendre. Tout dépend contre quoi elle est axée.

Si c’est sur des tableaux qui n’ont absolument rien à voir avec les changements climatiques, c’est immature. Si c’est sur des choses hyper polluantes, on peut se demander si ce n’est pas un acte assez héroïque. Autrefois, il y avait des écologistes qui s’opposaient aux transferts des déchets radioactifs, qui bloquaient des trains. Ils attaquaient directement la cause qu’ils voulaient défendre. Si on dégonfle les pneus des SUV en ville, on s’attaque à la cause qu’on veut défendre. C’est différent que de jeter de la soupe sur des tableaux qui n’ont rien à voir avec la cause. Il faut bien regarder. Je ne soutiens pas la violence, mais il y a un moment où, voyant qu’il ne se passe rien, je comprends que certains deviennent violents.

L’Europe a pris une réglementation pour la fin des moteurs thermiques dans l’automobile en 2035, mais ne devrait-elle pas prendre aussi des décisions plus dures concernant le poids des véhicules électriques, mettre des limites de poids ou taxer ceux qui ne veulent rien changer à leurs habitudes ?
Taxer très fortement, ceux qui ont de quoi acheter de grosses voitures, lourdes polluantes et chères ont de quoi payer les taxes. Ce n’est pas vraiment utile. Ce serait de nouveau les gens les plus démunis qui souffriraient le plus. Je crois qu’il faut des limites de poids. C’est aberrant d’avoir des voitures très lourdes, même électriques, ou extrêmement puissantes, alors que la vitesse est limitée à 130 km/h sur autoroute.

À quoi cela sert de pouvoir rouler à 200 km/h. Il faudrait mettre des limites de poids. Mais c’est difficile pour le législateur, parce qu’il faut intervenir sur les gammes de production et je pense que les constructeurs vont s’y opposer fermement. Le courage politique serait de l’imposer massivement. On ne peut plus accepter qu’autant de choses aussi polluantes soient mises sur le marché. Mais il n’y a pas que les grosses voitures, il y des chauffages polluants, des gadgets, des ampoules incandescentes qui continuent à être vendues dans certains pays à la place des LED. Il faut aller beaucoup plus vite. Mais je tiens à souligner que la Commission et le Parlement européen sont beaucoup plus ambitieux que les pays pris individuellement. Il faut vraiment leur tirer notre chapeau.

Concernant l’hydrogène, il existe un débat en Europe entre ceux qui prônent une production locale et ceux qui préfèrent miser sur le commerce international pour l’importer. Quel est votre point de vue ?
On a commencé à faire le projet Desertech pour produire de l’hydrogène au Maghreb et le transporter en Europe. Mais on voit une autre tendance qui est en train de se dessiner. Les pays du sud demandent aux pays du Nord, au lieu de faire monter l’hydrogène, de faire descendre l’industrie chez eux. De mettre l’industrie plus près de la production de l’hydrogène. Comme on voit qu’il faut de l’hydrogène pour décarboner les aciéries et les productions d’engrais, les pays du sud demandent que les industries d’engrais et d’industrie soient délocalisées chez eux. Ce n’est pas aussi facile que ce qu’on croit. Mais moi je pense que ce qui est intéressant pour l’hydrogène, c’est quand même d’en produire chez soi, plutôt que de le transporter.

La prochaine Cop se tiendra à Dubaï. Que pensez-vous du choix de ce pays du Golfe, symbole de la démesure ?
Dubaï ne produit ni pétrole, ni de gaz. Ce n’est donc pas Dubaï qui va pousser le pétrole. D’autres émirats en produisent, comme Abu Dhabi, et c’est vrai que cette Cop va être essentiellement une Cop des Émirats arabes unis. Je connais bien les gens des Émirats. Ils ont absolument besoin d’un succès à cette Cop. Ils ne peuvent pas se contenter d’avoir le même type de résultat qu’à Glasgow ou Charm el-Cheik. Et les Occidentaux ne vont pas accepter davantage de pétrole dans le futur parce que la Cop est à Dubaï. Il est possible que les négociations soient assez dures, mais qu’on avance quand même. Il ne faut pas oublier qu’Abu Dhabi est un pays qui gagne plus avec ses placements financiers qu’avec son pétrole. C’est pour cela qu’on avait décollé avec Solar Impulse depuis Abu Dhabi Ils ont des sociétés qui investissent beaucoup dans les énergies renouvelables, ce n’est pas un bloc monolithique en faveur du pétrole Abu Dhabi, ni Dubaï.
La question n’était pas tant sur le pétrole que sur l’exubérance de Dubaï…

L’exubérance, c’est quelque chose de choquant, mais Dubaï se veut tolérant sur le plan religieux, ethnique, en disant que c’est une terre d’accueil pour toutes les religions. Dubaï présente des excès, mais aussi un certain nombre d’avantages. C’est pour cela que tellement de gens ont choisi Dubaï pour la prochaine Cop. Mais c’est vrai que quand on vit avec des bâtiments qui sortent de terre comme des champignons, mal isolés ou refroidis, des grosses voitures juste pour rouler en ville, c’est clair que c’est aberrant. Mais je ne sais pas si c’est la Cop qui va changer cela, car cela existe aussi aux Etats-Unis et dans d’autres pays.

La biodiversité est menacée par le réchauffement climatique, mais elle est plus difficile à appréhender pour les entreprises, car elle est moins quantifiable. Qu’attendez-vous de la Cop 15 de la biodiversité ?
La chute de la biodiversité est un des résultats du changement climatique. En luttant contre le changement climatique, en mettant en place des solutions, des énergies renouvelables, de l’efficience énergétique, de l’efficience de l’agriculture, de la production industrielle, on va protéger la biodiversité, mais cela ne suffira pas. Ce qu’il faut beaucoup plus de législation, de règlementation. Cela ne sert à rien d’interdire la pêche illégale et la déforestation tant que l’on continue à importer des produits de manière légale. On a le droit d’acheter du poisson pêché illégalement ou du soja ou de l’huile de palme qui contribue à la déforestation. Il faut légiférer pour que ces aberrations ne soient plus permises. Il y a une hypocrisie totale de notre côté. Il faut légiférer pour que cela ne soit plus permis. À ce moment-là, vous verrez la biodiversité s’améliorer.

Politique-Contre la radicalité stérile, le retour de la social-démocratie ?

Politique-Contre la radicalité stérile, le retour de la social-démocratie ?

Par
Pierre-Nicolas Baudot
Doctorant en science politique à l’Université Paris-Panthéon-Assas, ATER à l’Université Clermont-Auvergne, spécialisé en histoire sociale des idées partisanes, Université Paris 2 Panthéon-Assas

Le printemps 2023 a vu le retour inattendu des références à la social-démocratie. Le 10 juin, l’ancien premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve lançait son mouvement, La Convention. Se revendiquant d’une « gauche sociale-démocrate », il fustigeait l’impasse de la Nupes et la stratégie jugée brutale de la France Insoumise (LFI). Quelques mois plus tôt, le député LFI François Ruffin adoptait une stratégie prônant le « rassemblement » après s’être déclaré « social-démocrate » à la une du Nouvel Observateur. À son tour, le secrétaire national du parti communiste Fabien Roussel tendait la main au « centre gauche », estimant la Nupes dépassée.

Au sein du PS, la stratégie d’alliance a également suscité de profondes divisions, exprimées lors du dernier congrès. Faut-il voir dans ces initiatives éparses un « retour de la social-démocratie » ? Pour cela, il importe d’observer le sens acquis par cette étiquette, ainsi que le degré d’homogénéité des acteurs qui s’en réclament.

Dès son apparition au XIXe siècle, la social-démocratie a été parcourue par d’importants débats quant au rapport à l’égalité sociale, à la participation démocratique ou aux institutions. Aujourd’hui, la revendication de cette identité ne recouvre qu’imparfaitement les positions politiques adoptées en réalité. Le politiste Fabien Escalona et l’économiste Romaric Godin ont ainsi montré que l’héritage de la social-démocratie se retrouve plutôt dans le programme de la Nupes qu’auprès de ses critiques.

En plaçant l’égalité sociale, la redistribution, les procédés démocratiques et la refonte institutionnelle au cœur de son action, le programme de la Nupes interroge bien, sans toujours le revendiquer, les fondements du néo-libéralisme.

À l’inverse, par leur contribution au délitement de l’État social et leur inclinaison pour une « politique de l’offre », l’« aile gauche du macronisme » comme les héritiers du hollandisme semblent s’être écartés des fondements doctrinaux de la social-démocratie. Ce constat invite à interroger le rôle politique dévolu à cette étiquette.

Le lancement de La Convention illustre la fonction politique de la référence à l’identité sociale-démocrate. Entouré de François Hollande et de plusieurs des figures de la social-démocratie européenne, Bernard Cazeneuve a construit son discours autour de la revendication d’une culture de gouvernement. Il a rejoué l’opposition traditionnelle entre les courants radicaux de la gauche, jugés irréalistes, et sa branche réformiste, raisonnable, capable d’assumer sa vocation à gouverner.

Ce schéma s’observe dans la trajectoire de nombre des partis socialistes européens. Leur identité s’est progressivement ancrée dans les capacités à intégrer les contraintes économiques et budgétaires de l’État et à exercer durablement le pouvoir, plutôt que dans une revendication idéologique ou une alternative politique marquée.

En France, c’est ce qu’illustre le premier septennat de François Mitterrand. La rupture avec le projet de 1981 et l’adoption des outils de la gouvernementalité libérale sont alors justifiées en tant que gages de la capacité du parti à gérer les affaires courantes du pays.

En prolongeant ce schéma, le discours de Bernard Cazeneuve passe sous silence les positions social-libérales du hollandisme (concernant, par exemple, les crédits d’impôts aux entreprises ou la loi travail). Il renvoie également la Nupes à une irresponsabilité de radicaux, voire à une extrême gauche pendant de l’extrême droite.

En arguant que le pouvoir ne se conquiert pas par les marges, il s’agit de revendiquer une position centrale susceptible d’agréger des intérêts divers et de profiter des logiques d’alternance. C’est une position que reprennent les courants qui, au sein du PS, se sont exprimés contre la Nupes. Cependant, en dépit de leur revendication de centralité, la ligne Cazeneuve comme les anti-Nupes du PS demeurent largement minoritaires au plan électoral.

L’avenir et les mouvements du balancier

Il est possible de distinguer plus précisément plusieurs types de stratégies.

Autour de Bernard Cazeneuve, un premier camp anticipe la fin du macronisme (et, dans une moindre mesure, la fin du mélenchonisme) et attend que le mouvement de balancier profite à la gauche. Pour que cela se produise, cette gauche veut se défaire de tout soupçon de radicalité susceptible d’effrayer les électeurs du bloc central. Elle cherche aussi à incarner un versant plus social et plus écologiste du macronisme, pour ne pas être simplement confondue avec celui-ci.

Chez les anti-Nupes du PS, où les élus locaux occupent une place centrale, la logique est autre. Ceux-ci voient dans l’alliance Nupes un accord électoral forgé sur les bases d’un rapport de force national qui diffère de leur situation locale. Le socialisme local s’est progressivement construit dans une forme de dépolitisation et dans la constitution d’alliances autour du PS. La conclusion d’un accord national marqué à gauche et où le PS est nettement minoritaire entre en contradiction avec cette dynamique.

Enfin, les positions adoptées par François Ruffin visent à dépasser l’hétérogénéité de l’électorat de gauche et l’hostilité d’une partie de celui-ci à l’égard de la France Insoumise. Pour cela, il rompt avec les stratégies conflictuelles et centre son propos autour de l’emblème fédérateur du social.

La question qui se pose est de savoir si ces divers acteurs sont réellement disposés à faire évoluer leur projet. Sont-ils susceptibles d’y intégrer des innovations permettant de proposer une alternative lisible au paradigme néolibéral et une issue à la crise sociale-démocrate ?

Dans les années 1970, la social-démocratie est parvenue à renforcer puis à conserver ses positions de pouvoir en renouvelant son projet et son assise électorale. En France, le PS a proposé une perspective de refonte du mode de gestion de l’économie et un débouché politique au libéralisme culturel. Cette offre lui a permis d’agréger les intérêts de certains segments des classes populaires et des classes moyennes salariées.

Par la suite, l’offre sociale-démocrate s’est progressivement trouvée assimilée à l’économie néolibérale, sans parvenir à incarner une réelle alternative.

Par ailleurs, une autre partie de la gauche est restée campée sur l’opposition chimérique entre les enjeux socio-économiques (redistribution, emploi, imposition…) et les enjeux culturels (oppression des femmes, des minorités…). Elle a ainsi freiné les innovations programmatiques. Par le passé, intégrer la diversification des combats pour l’émancipation a pourtant permis à la social-démocratie de mieux résister au déclin électoral que les partis communistes notamment, en faisant évoluer sa base électorale. En France, ce fut, par exemple, le cas avec la politique culturelle sous François Mitterrand, avec le PACS sous Lionel Jospin ou le mariage pour tous sous François Hollande.

En se revendiquant d’une gauche « universaliste et républicaine », Bernard Cazeneuve multiplie les critiques sur les compromissions de LFI (évoquant un « parti de l’outrance » ou l’accusant de « fabriquer des votes d’extrême droite en quantité industrielle ».

Fabien Roussel puis François Ruffin placent en opposition le « social » et le « sociétal » (questions de genre, de sexe, de religion, de multiculturalisme, etc.). Ils tentent de neutraliser le second au titre du potentiel clivant qu’ils lui attribuent.

En reposant sur l’implicite d’une défiance des classes populaires à l’égard des enjeux dits « culturels », cette analyse repose sur une distinction artificielle entre deux dimensions étroitement articulées. Les classes populaires sont elles aussi concernées par les enjeux de lutte contre les diverses formes de stigmatisation. De plus, d’une part, la lutte pour l’émancipation interroge directement les fondements du régime économique (concernant par exemple, la division sexuelle du travail). D’autre part, la mise en cause du néo-libéralisme contient des implications quant à la dignité individuelle et collective (comme les questions liées au système de retraite).

Rejeter cette position revient à espérer qu’une partie de l’électorat de gauche délaisse ses revendications d’émancipation, au nom du « rassemblement ». À travers cela apparaît une série de résistances à un renouvellement doctrinal qui, pourtant, caractérise l’histoire longue de la social-démocratie et lui a permis, par le passé, d’incarner une alternative électorale et de se maintenir au rang des partis de gouvernement.

En définitive, il apparaît donc qu’en France, en 2023, évoquer un retour de la social-démocratie revient avant tout à opposer arbitrairement radicalité et responsabilité politique. Cela conduit à prêter une cohérence interne à des stratégies politiques divergentes.

Contre la radicalité stérile, le retour de la social-démocratie ?

Contre la radicalité stérile, Le retour de la social-démocratie ?

Par
Pierre-Nicolas Baudot
Doctorant en science politique à l’Université Paris-Panthéon-Assas, ATER à l’Université Clermont-Auvergne, spécialisé en histoire sociale des idées partisanes, Université Paris 2 Panthéon-Assas

Le printemps 2023 a vu le retour inattendu des références à la social-démocratie. Le 10 juin, l’ancien premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve lançait son mouvement, La Convention. Se revendiquant d’une « gauche sociale-démocrate », il fustigeait l’impasse de la Nupes et la stratégie jugée brutale de la France Insoumise (LFI). Quelques mois plus tôt, le député LFI François Ruffin adoptait une stratégie prônant le « rassemblement » après s’être déclaré « social-démocrate » à la une du Nouvel Observateur. À son tour, le secrétaire national du parti communiste Fabien Roussel tendait la main au « centre gauche », estimant la Nupes dépassée.

Au sein du PS, la stratégie d’alliance a également suscité de profondes divisions, exprimées lors du dernier congrès. Faut-il voir dans ces initiatives éparses un « retour de la social-démocratie » ? Pour cela, il importe d’observer le sens acquis par cette étiquette, ainsi que le degré d’homogénéité des acteurs qui s’en réclament.

Dès son apparition au XIXe siècle, la social-démocratie a été parcourue par d’importants débats quant au rapport à l’égalité sociale, à la participation démocratique ou aux institutions. Aujourd’hui, la revendication de cette identité ne recouvre qu’imparfaitement les positions politiques adoptées en réalité. Le politiste Fabien Escalona et l’économiste Romaric Godin ont ainsi montré que l’héritage de la social-démocratie se retrouve plutôt dans le programme de la Nupes qu’auprès de ses critiques.

En plaçant l’égalité sociale, la redistribution, les procédés démocratiques et la refonte institutionnelle au cœur de son action, le programme de la Nupes interroge bien, sans toujours le revendiquer, les fondements du néo-libéralisme.

À l’inverse, par leur contribution au délitement de l’État social et leur inclinaison pour une « politique de l’offre », l’« aile gauche du macronisme » comme les héritiers du hollandisme semblent s’être écartés des fondements doctrinaux de la social-démocratie. Ce constat invite à interroger le rôle politique dévolu à cette étiquette.

Le lancement de La Convention illustre la fonction politique de la référence à l’identité sociale-démocrate. Entouré de François Hollande et de plusieurs des figures de la social-démocratie européenne, Bernard Cazeneuve a construit son discours autour de la revendication d’une culture de gouvernement. Il a rejoué l’opposition traditionnelle entre les courants radicaux de la gauche, jugés irréalistes, et sa branche réformiste, raisonnable, capable d’assumer sa vocation à gouverner.

Ce schéma s’observe dans la trajectoire de nombre des partis socialistes européens. Leur identité s’est progressivement ancrée dans les capacités à intégrer les contraintes économiques et budgétaires de l’État et à exercer durablement le pouvoir, plutôt que dans une revendication idéologique ou une alternative politique marquée.

En France, c’est ce qu’illustre le premier septennat de François Mitterrand. La rupture avec le projet de 1981 et l’adoption des outils de la gouvernementalité libérale sont alors justifiées en tant que gages de la capacité du parti à gérer les affaires courantes du pays.

En prolongeant ce schéma, le discours de Bernard Cazeneuve passe sous silence les positions social-libérales du hollandisme (concernant, par exemple, les crédits d’impôts aux entreprises ou la loi travail). Il renvoie également la Nupes à une irresponsabilité de radicaux, voire à une extrême gauche pendant de l’extrême droite.

En arguant que le pouvoir ne se conquiert pas par les marges, il s’agit de revendiquer une position centrale susceptible d’agréger des intérêts divers et de profiter des logiques d’alternance. C’est une position que reprennent les courants qui, au sein du PS, se sont exprimés contre la Nupes. Cependant, en dépit de leur revendication de centralité, la ligne Cazeneuve comme les anti-Nupes du PS demeurent largement minoritaires au plan électoral.

L’avenir et les mouvements du balancier

Il est possible de distinguer plus précisément plusieurs types de stratégies.

Autour de Bernard Cazeneuve, un premier camp anticipe la fin du macronisme (et, dans une moindre mesure, la fin du mélenchonisme) et attend que le mouvement de balancier profite à la gauche. Pour que cela se produise, cette gauche veut se défaire de tout soupçon de radicalité susceptible d’effrayer les électeurs du bloc central. Elle cherche aussi à incarner un versant plus social et plus écologiste du macronisme, pour ne pas être simplement confondue avec celui-ci.

Chez les anti-Nupes du PS, où les élus locaux occupent une place centrale, la logique est autre. Ceux-ci voient dans l’alliance Nupes un accord électoral forgé sur les bases d’un rapport de force national qui diffère de leur situation locale. Le socialisme local s’est progressivement construit dans une forme de dépolitisation et dans la constitution d’alliances autour du PS. La conclusion d’un accord national marqué à gauche et où le PS est nettement minoritaire entre en contradiction avec cette dynamique.

Enfin, les positions adoptées par François Ruffin visent à dépasser l’hétérogénéité de l’électorat de gauche et l’hostilité d’une partie de celui-ci à l’égard de la France Insoumise. Pour cela, il rompt avec les stratégies conflictuelles et centre son propos autour de l’emblème fédérateur du social.

La question qui se pose est de savoir si ces divers acteurs sont réellement disposés à faire évoluer leur projet. Sont-ils susceptibles d’y intégrer des innovations permettant de proposer une alternative lisible au paradigme néolibéral et une issue à la crise sociale-démocrate ?

Dans les années 1970, la social-démocratie est parvenue à renforcer puis à conserver ses positions de pouvoir en renouvelant son projet et son assise électorale. En France, le PS a proposé une perspective de refonte du mode de gestion de l’économie et un débouché politique au libéralisme culturel. Cette offre lui a permis d’agréger les intérêts de certains segments des classes populaires et des classes moyennes salariées.

Par la suite, l’offre sociale-démocrate s’est progressivement trouvée assimilée à l’économie néolibérale, sans parvenir à incarner une réelle alternative.

Par ailleurs, une autre partie de la gauche est restée campée sur l’opposition chimérique entre les enjeux socio-économiques (redistribution, emploi, imposition…) et les enjeux culturels (oppression des femmes, des minorités…). Elle a ainsi freiné les innovations programmatiques. Par le passé, intégrer la diversification des combats pour l’émancipation a pourtant permis à la social-démocratie de mieux résister au déclin électoral que les partis communistes notamment, en faisant évoluer sa base électorale. En France, ce fut, par exemple, le cas avec la politique culturelle sous François Mitterrand, avec le PACS sous Lionel Jospin ou le mariage pour tous sous François Hollande.

En se revendiquant d’une gauche « universaliste et républicaine », Bernard Cazeneuve multiplie les critiques sur les compromissions de LFI (évoquant un « parti de l’outrance » ou l’accusant de « fabriquer des votes d’extrême droite en quantité industrielle ».

Fabien Roussel puis François Ruffin placent en opposition le « social » et le « sociétal » (questions de genre, de sexe, de religion, de multiculturalisme, etc.). Ils tentent de neutraliser le second au titre du potentiel clivant qu’ils lui attribuent.

En reposant sur l’implicite d’une défiance des classes populaires à l’égard des enjeux dits « culturels », cette analyse repose sur une distinction artificielle entre deux dimensions étroitement articulées. Les classes populaires sont elles aussi concernées par les enjeux de lutte contre les diverses formes de stigmatisation. De plus, d’une part, la lutte pour l’émancipation interroge directement les fondements du régime économique (concernant par exemple, la division sexuelle du travail). D’autre part, la mise en cause du néo-libéralisme contient des implications quant à la dignité individuelle et collective (comme les questions liées au système de retraite).

Rejeter cette position revient à espérer qu’une partie de l’électorat de gauche délaisse ses revendications d’émancipation, au nom du « rassemblement ». À travers cela apparaît une série de résistances à un renouvellement doctrinal qui, pourtant, caractérise l’histoire longue de la social-démocratie et lui a permis, par le passé, d’incarner une alternative électorale et de se maintenir au rang des partis de gouvernement.

En définitive, il apparaît donc qu’en France, en 2023, évoquer un retour de la social-démocratie revient avant tout à opposer arbitrairement radicalité et responsabilité politique. Cela conduit à prêter une cohérence interne à des stratégies politiques divergentes.

La radicalité fait reculer la cause de l’écologie (Bertrand Piccard)

La radicalité fait reculer la cause de l’écologie
(Bertrand Piccard)

Dans un entretien exclusif avec La Tribune, au lendemain de la conclusion de la COP 27 de Charm el-Cheikh , Bertrand Piccard, président de la Fondation Solar Impulse, psychiatre et explorateur, auteur du premier tour du monde en ballon (1999) puis en avion solaire (2015-2016), dresse le bilan amer de cette décevante Conférence sur le Climat. Entretien dans la Tribune

Une tribune intéressant mais un peu approximative sur la question du coût de l’électricité et des conditions nécessaires à la production de l’hydrogène NDLR

COP 27 s’est terminée sur une déclaration finale peu ambitieuse et une résolution sur la compensation des dégâts causés par le changement climatique subi par les pays vulnérables. Quel bilan en tirez-vous ?
BERTRAND PICCARD- Le bilan est très contrasté entre, d’un côté, un secteur privé qui prend beaucoup d’initiatives, certains pays qui sont avant-gardistes dans leur lutte contre le changement climatique et, de l’autre, des négociations qui aboutissent à des mesures extrêmement peu ambitieuses. C’est tout juste si l’objectif de contenir la hausse de la température moyenne à 1,5 degré d’ici à la fin du siècle a été conservé. On le doit probablement en partie à l’appui du G20 qui s’est tenu en Indonésie.

À Charm el-Cheikh, des pays voulaient revenir en arrière, passer à 2 degrés, parce qu’ils disaient que l’objectif était impossible à tenir. Il n’y a pas eu de progrès par rapport au charbon, au pétrole et au gaz et, au stade actuel, on voit qu’on n’est pas du tout en ligne pour empêcher la catastrophe. L’accord final stipule que les pays qui ne sont pas en ligne avec cet objectif doivent corriger leurs intentions, leurs engagements, mais il ne s’agit que d’une incitation. Ce n’est pas du tout quelque chose de contraignant. Mais on parle, c’est vrai, d’une avancée historique parce qu’il faut bien mettre de l’historique quelque part pour compenser la catastrophe du reste.

Certains disent que c’est historique qu’on ait enfin pris en compte les revendications des pays les plus vulnérables au changement climatique causés par les pays industrialisés. C’est vrai, c’est une question de pollueur payeur. Il y a un fond qui a été déterminé. Mais on ne dit pas encore comment il sera utilisé, ni combien il y aura dedans, alors qu’autrefois on parlait de 100 milliards de dollars par an. Ce qui a permis d’arracher l’accord des Occidentaux, c’est que ce fond va être ciblé sur les pays vulnérables, en excluant la Chine, qui se considérait comme un pays en développement et voulait recevoir une partie de ces indemnités, alors qu’elle est la deuxième puissance économique mondiale et le gros pollueur de la planète. Bref, un peu de ménage a été fait. Tant mieux, mais on est encore très loin de ce qu’il faut pour éviter la catastrophe.

L’ombre de la crise géopolitique, que ce soit la guerre en Ukraine, l’attitude protectionniste de la Chine, ou le comportement des pays producteurs de pétrole, a-t-elle fait voler en éclat l’esprit de l’Accord de Paris ?
Je pense que les pays européens se sont beaucoup repliés sur eux-mêmes à cause de la crise ukrainienne. C’est indéniable. C’était assez difficile pour eux de pouvoir exiger d’autres pays de réduire leur consommation de pétrole, de charbon et de gaz, alors qu’eux-mêmes rouvrent des mines de charbon. Cela décrédibilise les demandes. Ce qu’on voit, c’est une revendication justifiée des plus démunis face aux nantis. Cela se voit à toutes les échelles de la société.

En France, dans les revendications politiques et sociales, mais aussi à l’échelle mondiale où, indéniablement, les pays les plus démunis veulent se faire aider par les pays les plus riches. On a beaucoup trop de déséquilibres financiers dans ce monde. Il y a des gens qui n’ont plus rien à perdre. Il y a une vraie revendication. Il y a de plus en plus de personnes qui considèrent -à raison – qu’il est inacceptable de vivre en-dessous du minimum vital, en-dessous des seuils de santé, d’éducation… La lutte contre les changements climatiques cristallise aussi cette revendication sociale des pays pauvres vis-à-vis des pays riches.

L’an dernier vous disiez à l’issue de la Cop 26 de Glasgow, qui elle aussi avait été fortement critiquée pour son manque d’ambition que la Cop n’était que la partie émergée de la lutte contre les changements climatiques et qu’il y avait eu des avancées en coulisse. Y a-t-il eu de telles avances en coulisse à Charm el-Cheik ?
Oui, ce qui manque, ce sont les consensus politiques finaux. Car, pour avoir l’unanimité, c’est toujours le pays le moins ambitieux qui gagne. En revanche, au niveau des coalitions, cela avance. À Glasgow, une coalition avait été créée contre le méthane. Cette année j’ai participé à la réunion des 50 ministres qui avaient signé cette coalition. C’était une rencontre destinée à contrôler ce que chacun avait fait dans le cadre de la lutte contre le méthane. Cela avance aussi au niveau de la finance, des entreprises privées, des solutions techniques.

C’est pourquoi je suis très frustré de voir que les négociations politiques sont si peu ambitieuses, alors qu’il y a autant de solutions prêtes et autant d’engagements prêts à être fructifiés au niveau du secteur privé.
Vous avez évoqué la crise en Ukraine. La crise énergétique qu’elle a provoquée et le retour du charbon ou du gaz porte-t-il un coup très dur à la transition écologique ou va-t-il au contraire permettre de l’accélérer ?
Cela porte un coup dur à la transition. La plupart des gens ne comprennent pas que la réponse devrait être la même pour les deux situations. La crise en Ukraine et la transition énergétique nécessitent toutes les deux qu’on diminue la part des énergies fossiles pour la remplacer par des énergies renouvelables et qu’on augmente tous les systèmes qui permettent d’être plus efficient sur le plan de l’énergie, des ressources, de l’alimentation, des déchets… C’est la même réponse, mais dans l’esprit des gens c’est dissocié. Pour eux, la crise ukrainienne va nous donner froid cet hiver ou l’hiver prochain et la lutte contre le réchauffement climatique coûte cher. Les deux problèmes s’ajoutent, alors qu’ils devraient se soustraire.
Vous avez évoqué la finance, le président d’une grande banque française affirmait récemment que la finance jouait le jeu et que le financement du charbon serait fini en 2030. Et qu’il était possible de viser fin 2037 en Europe pour le pétrole en raison de l’électrification du parc automobile. Croyez-vous que le rôle de la finance soit en train de changer sous la pression de la société civile ?

Effectivement, je pense que les dates sont justes sur l’arrêt des énergies sales. Maintenant je ne sais pas ce que vont faire les banques chinoises ou émiraties.
Il y a deux poids, deux mesures ?
L’Occident, au niveau secteur privé, va plus vite. À Glasgow il y avait eu un texte disant qu’il fallait viser la diminution progressive du charbon. L’Inde a demandé cette année de rajouter du charbon, du gaz et du pétrole parce qu’ils en utilisent beaucoup, alors que l’Occident utilise plutôt du gaz et du pétrole. Les pays occidentaux ont refusé que le gaz et le pétrole soient placés dans les objectifs de diminution progressive. C’est quand même ahurissant ! Il y aura toujours beaucoup trop de gens qui voudront utiliser le pétrole, le gaz et le charbon, mais ce ne sera probablement plus financés par les banques occidentales qui sont loyales à la cause climatique et ont la volonté de se désengager des énergies polluantes.

Vous étiez jusqu’ici très prudent sur le nucléaire pour réussir la transition écologique. Or, la crise actuelle montre les effets pervers de ce renoncement puisqu’il entraîne aujourd’hui une augmentation de l’électricité issue du charbon ou du gaz. Greta Thunberg a changé d’avis et n’appelle plus à l’arrêt de l’atome. Quelle est votre position aujourd’hui ?
Je dois dire que le nucléaire reprend une place qu’il n’avait plus. Je suis d’accord, il est aberrant aujourd’hui de démonter les centrales nucléaires si elles fonctionnent et si elles sont sûres. Mais il faut voir le prix que cela coûte. Le renouvelable aujourd’hui coûte moins cher que le nucléaire, même en comptant le stockage. Donc il faut être prudent si on veut reconstruire des centrales nucléaires, car on va se retrouver avec un prix d’électricité beaucoup plus élevé qu’avec le renouvelable.

Aujourd’hui, on voit des choses extraordinaires. Quand on parle de l’intermittence du renouvelable et qu’on affirme qu’on ne pourra pas le stocker, on voit que l’on peut construire de très grands réseaux, sur plusieurs fuseaux horaires, avec des renouvelables différents et des câbles qui transportent l’électricité produite en continu, à très haut voltage. On ne perd presque rien. 1% par 1000 km, ce qui est insignifiant. Il y a un projet qui pourra fournir 8% de l’électricité britannique. Elle sera produite au Maroc et sera acheminée en Angleterre en passant par des câbles sous-marins via les côtes espagnoles et portugaises. C’est extraordinaire. Ce courant sera livré en Angleterre pour beaucoup moins cher que le nucléaire. Ou faut-il investir ? Il faut donc être très prudent quand on veut faire davantage de vieilles choses, plutôt que de faire des nouvelles.

Depuis le crise sanitaire, les pays occidentaux cherchent à réindustrialiser leurs pays (ce qui permet d’éviter les émissions liées au transport) et à recréer un secteur minier pour disposer des métaux rares nécessaires à la transition énergétique. Or, de telles initiatives se heurtent parfois à l’hostilité des écologistes. L’écologie radicale peut-elle entraver ce processus de rapprochement de la production des centres de consommation, qui permet de baisser les émissions ?
Vous répondez avec la question. Dès qu’on est radical, on échoue à atteindre un objectif consensuel, un objectif bon pour l’ensemble. Qu’on soit radical de droite, de gauche ou écologique. Ce qu’il faut, ce n’est pas de la radicalité mais du réalisme, atteindre un objectif indépendamment de sa propre idéologie. Il faut prendre ce qu’il y a de bon partout. Il n’y a aucune raison, quand on est écologiste et qu’on veut protéger l’environnement, de rejeter tout ce qui permet sur le plan énergétique ou sur le stockage des minéraux, de bloquer tous les progrès. En fait, en étant trop radical, on arrive à l’opposé de ce que veut l’écologie : on atteint un rejet de la part des autres. On fait peur, on effraye. Aujourd’hui, l’écologie devrait fédérer et réunir, plutôt qu’effrayer ou rejeter.

On voit beaucoup de mouvements de jeunes qui bloquent des autoroutes, s’accrochent à des tableaux. Est-ce que ce mouvement, qui traduit une éco anxiété, peut être efficace pour changer les mentalités de ceux qui ne veulent pas changer et faire accepter une bascule plus rapide des choses. Pensez-vous que ces mouvements aient un rôle à jouer d’éveilleur de conscience, ou qu’ils sont contre-productifs ?
C’est le thème d’une chronique que j’ai écrite sur l’éco-violence et l’éco-résistance. Cela m’interroge beaucoup. En fait, les terroristes et les résistants sont toujours définis en fonction de leur camp et de l’époque. Les résistants les plus valeureux en France durant la Deuxième Guerre étaient considérés comme des terroristes par les Allemands. On va voir comment on jugera les éco-violents. C’est vrai que c’est révoltant de voir qu’il ne se passe rien. Quand on voit que des gens polluent outrageusement par pur égoïsme, il y a de quoi commencer à s’agiter. Et il y a des gens qui s’agitent beaucoup, parfois au point de devenir violents. Je ne peux pas soutenir la violence, mais je peux la comprendre. Tout dépend contre quoi elle est axée.

Si c’est sur des tableaux qui n’ont absolument rien à voir avec les changements climatiques, c’est immature. Si c’est sur des choses hyper polluantes, on peut se demander si ce n’est pas un acte assez héroïque. Autrefois, il y avait des écologistes qui s’opposaient aux transferts des déchets radioactifs, qui bloquaient des trains. Ils attaquaient directement la cause qu’ils voulaient défendre. Si on dégonfle les pneus des SUV en ville, on s’attaque à la cause qu’on veut défendre. C’est différent que de jeter de la soupe sur des tableaux qui n’ont rien à voir avec la cause. Il faut bien regarder. Je ne soutiens pas la violence, mais il y a un moment où, voyant qu’il ne se passe rien, je comprends que certains deviennent violents.

L’Europe a pris une réglementation pour la fin des moteurs thermiques dans l’automobile en 2035, mais ne devrait-elle pas prendre aussi des décisions plus dures concernant le poids des véhicules électriques, mettre des limites de poids ou taxer ceux qui ne veulent rien changer à leurs habitudes ?
Taxer très fortement, ceux qui ont de quoi acheter de grosses voitures, lourdes polluantes et chères ont de quoi payer les taxes. Ce n’est pas vraiment utile. Ce serait de nouveau les gens les plus démunis qui souffriraient le plus. Je crois qu’il faut des limites de poids. C’est aberrant d’avoir des voitures très lourdes, même électriques, ou extrêmement puissantes, alors que la vitesse est limitée à 130 km/h sur autoroute.

À quoi cela sert de pouvoir rouler à 200 km/h. Il faudrait mettre des limites de poids. Mais c’est difficile pour le législateur, parce qu’il faut intervenir sur les gammes de production et je pense que les constructeurs vont s’y opposer fermement. Le courage politique serait de l’imposer massivement. On ne peut plus accepter qu’autant de choses aussi polluantes soient mises sur le marché. Mais il n’y a pas que les grosses voitures, il y des chauffages polluants, des gadgets, des ampoules incandescentes qui continuent à être vendues dans certains pays à la place des LED. Il faut aller beaucoup plus vite. Mais je tiens à souligner que la Commission et le Parlement européen sont beaucoup plus ambitieux que les pays pris individuellement. Il faut vraiment leur tirer notre chapeau.

Concernant l’hydrogène, il existe un débat en Europe entre ceux qui prônent une production locale et ceux qui préfèrent miser sur le commerce international pour l’importer. Quel est votre point de vue ?
On a commencé à faire le projet Desertech pour produire de l’hydrogène au Maghreb et le transporter en Europe. Mais on voit une autre tendance qui est en train de se dessiner. Les pays du sud demandent aux pays du Nord, au lieu de faire monter l’hydrogène, de faire descendre l’industrie chez eux. De mettre l’industrie plus près de la production de l’hydrogène. Comme on voit qu’il faut de l’hydrogène pour décarboner les aciéries et les productions d’engrais, les pays du sud demandent que les industries d’engrais et d’industrie soient délocalisées chez eux. Ce n’est pas aussi facile que ce qu’on croit. Mais moi je pense que ce qui est intéressant pour l’hydrogène, c’est quand même d’en produire chez soi, plutôt que de le transporter.

La prochaine Cop se tiendra à Dubaï. Que pensez-vous du choix de ce pays du Golfe, symbole de la démesure ?
Dubaï ne produit ni pétrole, ni de gaz. Ce n’est donc pas Dubaï qui va pousser le pétrole. D’autres émirats en produisent, comme Abu Dhabi, et c’est vrai que cette Cop va être essentiellement une Cop des Émirats arabes unis. Je connais bien les gens des Émirats. Ils ont absolument besoin d’un succès à cette Cop. Ils ne peuvent pas se contenter d’avoir le même type de résultat qu’à Glasgow ou Charm el-Cheik. Et les Occidentaux ne vont pas accepter davantage de pétrole dans le futur parce que la Cop est à Dubaï. Il est possible que les négociations soient assez dures, mais qu’on avance quand même. Il ne faut pas oublier qu’Abu Dhabi est un pays qui gagne plus avec ses placements financiers qu’avec son pétrole. C’est pour cela qu’on avait décollé avec Solar Impulse depuis Abu Dhabi Ils ont des sociétés qui investissent beaucoup dans les énergies renouvelables, ce n’est pas un bloc monolithique en faveur du pétrole Abu Dhabi, ni Dubaï.
La question n’était pas tant sur le pétrole que sur l’exubérance de Dubaï…

L’exubérance, c’est quelque chose de choquant, mais Dubaï se veut tolérant sur le plan religieux, ethnique, en disant que c’est une terre d’accueil pour toutes les religions. Dubaï présente des excès, mais aussi un certain nombre d’avantages. C’est pour cela que tellement de gens ont choisi Dubaï pour la prochaine Cop. Mais c’est vrai que quand on vit avec des bâtiments qui sortent de terre comme des champignons, mal isolés ou refroidis, des grosses voitures juste pour rouler en ville, c’est clair que c’est aberrant. Mais je ne sais pas si c’est la Cop qui va changer cela, car cela existe aussi aux Etats-Unis et dans d’autres pays.

La biodiversité est menacée par le réchauffement climatique, mais elle est plus difficile à appréhender pour les entreprises, car elle est moins quantifiable. Qu’attendez-vous de la Cop 15 de la biodiversité ?
La chute de la biodiversité est un des résultats du changement climatique. En luttant contre le changement climatique, en mettant en place des solutions, des énergies renouvelables, de l’efficience énergétique, de l’efficience de l’agriculture, de la production industrielle, on va protéger la biodiversité, mais cela ne suffira pas. Ce qu’il faut beaucoup plus de législation, de règlementation. Cela ne sert à rien d’interdire la pêche illégale et la déforestation tant que l’on continue à importer des produits de manière légale. On a le droit d’acheter du poisson pêché illégalement ou du soja ou de l’huile de palme qui contribue à la déforestation. Il faut légiférer pour que ces aberrations ne soient plus permises. Il y a une hypocrisie totale de notre côté. Il faut légiférer pour que cela ne soit plus permis. À ce moment-là, vous verrez la biodiversité s’améliorer.

La radicalité fait reculer l’écologie

La radicalité fait reculer l’écologie
(Bertrand Piccard)

Dans un entretien exclusif avec La Tribune, au lendemain de la conclusion de la COP 27 de Charm el-Cheikh , Bertrand Piccard, président de la Fondation Solar Impulse, psychiatre et explorateur, auteur du premier tour du monde en ballon (1999) puis en avion solaire (2015-2016), dresse le bilan amer de cette décevante Conférence sur le Climat. Entretien dans la Tribune

Une tribune intéressant mais un peu approximative sur la question du coût de l’électricité et des conditions nécessaires à la production de l’hydrogène NDLR

COP 27 s’est terminée sur une déclaration finale peu ambitieuse et une résolution sur la compensation des dégâts causés par le changement climatique subi par les pays vulnérables. Quel bilan en tirez-vous ?
BERTRAND PICCARD- Le bilan est très contrasté entre, d’un côté, un secteur privé qui prend beaucoup d’initiatives, certains pays qui sont avant-gardistes dans leur lutte contre le changement climatique et, de l’autre, des négociations qui aboutissent à des mesures extrêmement peu ambitieuses. C’est tout juste si l’objectif de contenir la hausse de la température moyenne à 1,5 degré d’ici à la fin du siècle a été conservé. On le doit probablement en partie à l’appui du G20 qui s’est tenu en Indonésie.

À Charm el-Cheikh, des pays voulaient revenir en arrière, passer à 2 degrés, parce qu’ils disaient que l’objectif était impossible à tenir. Il n’y a pas eu de progrès par rapport au charbon, au pétrole et au gaz et, au stade actuel, on voit qu’on n’est pas du tout en ligne pour empêcher la catastrophe. L’accord final stipule que les pays qui ne sont pas en ligne avec cet objectif doivent corriger leurs intentions, leurs engagements, mais il ne s’agit que d’une incitation. Ce n’est pas du tout quelque chose de contraignant. Mais on parle, c’est vrai, d’une avancée historique parce qu’il faut bien mettre de l’historique quelque part pour compenser la catastrophe du reste.

Certains disent que c’est historique qu’on ait enfin pris en compte les revendications des pays les plus vulnérables au changement climatique causés par les pays industrialisés. C’est vrai, c’est une question de pollueur payeur. Il y a un fond qui a été déterminé. Mais on ne dit pas encore comment il sera utilisé, ni combien il y aura dedans, alors qu’autrefois on parlait de 100 milliards de dollars par an. Ce qui a permis d’arracher l’accord des Occidentaux, c’est que ce fond va être ciblé sur les pays vulnérables, en excluant la Chine, qui se considérait comme un pays en développement et voulait recevoir une partie de ces indemnités, alors qu’elle est la deuxième puissance économique mondiale et le gros pollueur de la planète. Bref, un peu de ménage a été fait. Tant mieux, mais on est encore très loin de ce qu’il faut pour éviter la catastrophe.

L’ombre de la crise géopolitique, que ce soit la guerre en Ukraine, l’attitude protectionniste de la Chine, ou le comportement des pays producteurs de pétrole, a-t-elle fait voler en éclat l’esprit de l’Accord de Paris ?
Je pense que les pays européens se sont beaucoup repliés sur eux-mêmes à cause de la crise ukrainienne. C’est indéniable. C’était assez difficile pour eux de pouvoir exiger d’autres pays de réduire leur consommation de pétrole, de charbon et de gaz, alors qu’eux-mêmes rouvrent des mines de charbon. Cela décrédibilise les demandes. Ce qu’on voit, c’est une revendication justifiée des plus démunis face aux nantis. Cela se voit à toutes les échelles de la société.

En France, dans les revendications politiques et sociales, mais aussi à l’échelle mondiale où, indéniablement, les pays les plus démunis veulent se faire aider par les pays les plus riches. On a beaucoup trop de déséquilibres financiers dans ce monde. Il y a des gens qui n’ont plus rien à perdre. Il y a une vraie revendication. Il y a de plus en plus de personnes qui considèrent -à raison – qu’il est inacceptable de vivre en-dessous du minimum vital, en-dessous des seuils de santé, d’éducation… La lutte contre les changements climatiques cristallise aussi cette revendication sociale des pays pauvres vis-à-vis des pays riches.

L’an dernier vous disiez à l’issue de la Cop 26 de Glasgow, qui elle aussi avait été fortement critiquée pour son manque d’ambition que la Cop n’était que la partie émergée de la lutte contre les changements climatiques et qu’il y avait eu des avancées en coulisse. Y a-t-il eu de telles avances en coulisse à Charm el-Cheik ?
Oui, ce qui manque, ce sont les consensus politiques finaux. Car, pour avoir l’unanimité, c’est toujours le pays le moins ambitieux qui gagne. En revanche, au niveau des coalitions, cela avance. À Glasgow, une coalition avait été créée contre le méthane. Cette année j’ai participé à la réunion des 50 ministres qui avaient signé cette coalition. C’était une rencontre destinée à contrôler ce que chacun avait fait dans le cadre de la lutte contre le méthane. Cela avance aussi au niveau de la finance, des entreprises privées, des solutions techniques.

C’est pourquoi je suis très frustré de voir que les négociations politiques sont si peu ambitieuses, alors qu’il y a autant de solutions prêtes et autant d’engagements prêts à être fructifiés au niveau du secteur privé.
Vous avez évoqué la crise en Ukraine. La crise énergétique qu’elle a provoquée et le retour du charbon ou du gaz porte-t-il un coup très dur à la transition écologique ou va-t-il au contraire permettre de l’accélérer ?
Cela porte un coup dur à la transition. La plupart des gens ne comprennent pas que la réponse devrait être la même pour les deux situations. La crise en Ukraine et la transition énergétique nécessitent toutes les deux qu’on diminue la part des énergies fossiles pour la remplacer par des énergies renouvelables et qu’on augmente tous les systèmes qui permettent d’être plus efficient sur le plan de l’énergie, des ressources, de l’alimentation, des déchets… C’est la même réponse, mais dans l’esprit des gens c’est dissocié. Pour eux, la crise ukrainienne va nous donner froid cet hiver ou l’hiver prochain et la lutte contre le réchauffement climatique coûte cher. Les deux problèmes s’ajoutent, alors qu’ils devraient se soustraire.
Vous avez évoqué la finance, le président d’une grande banque française affirmait récemment que la finance jouait le jeu et que le financement du charbon serait fini en 2030. Et qu’il était possible de viser fin 2037 en Europe pour le pétrole en raison de l’électrification du parc automobile. Croyez-vous que le rôle de la finance soit en train de changer sous la pression de la société civile ?

Effectivement, je pense que les dates sont justes sur l’arrêt des énergies sales. Maintenant je ne sais pas ce que vont faire les banques chinoises ou émiraties.
Il y a deux poids, deux mesures ?

L’Occident, au niveau secteur privé, va plus vite. À Glasgow il y avait eu un texte disant qu’il fallait viser la diminution progressive du charbon. L’Inde a demandé cette année de rajouter du charbon, du gaz et du pétrole parce qu’ils en utilisent beaucoup, alors que l’Occident utilise plutôt du gaz et du pétrole. Les pays occidentaux ont refusé que le gaz et le pétrole soient placés dans les objectifs de diminution progressive. C’est quand même ahurissant ! Il y aura toujours beaucoup trop de gens qui voudront utiliser le pétrole, le gaz et le charbon, mais ce ne sera probablement plus financés par les banques occidentales qui sont loyales à la cause climatique et ont la volonté de se désengager des énergies polluantes.

Vous étiez jusqu’ici très prudent sur le nucléaire pour réussir la transition écologique. Or, la crise actuelle montre les effets pervers de ce renoncement puisqu’il entraîne aujourd’hui une augmentation de l’électricité issue du charbon ou du gaz. Greta Thunberg a changé d’avis et n’appelle plus à l’arrêt de l’atome. Quelle est votre position aujourd’hui ?
Je dois dire que le nucléaire reprend une place qu’il n’avait plus. Je suis d’accord, il est aberrant aujourd’hui de démonter les centrales nucléaires si elles fonctionnent et si elles sont sûres. Mais il faut voir le prix que cela coûte. Le renouvelable aujourd’hui coûte moins cher que le nucléaire, même en comptant le stockage. Donc il faut être prudent si on veut reconstruire des centrales nucléaires, car on va se retrouver avec un prix d’électricité beaucoup plus élevé qu’avec le renouvelable.

Aujourd’hui, on voit des choses extraordinaires. Quand on parle de l’intermittence du renouvelable et qu’on affirme qu’on ne pourra pas le stocker, on voit que l’on peut construire de très grands réseaux, sur plusieurs fuseaux horaires, avec des renouvelables différents et des câbles qui transportent l’électricité produite en continu, à très haut voltage. On ne perd presque rien. 1% par 1000 km, ce qui est insignifiant. Il y a un projet qui pourra fournir 8% de l’électricité britannique. Elle sera produite au Maroc et sera acheminée en Angleterre en passant par des câbles sous-marins via les côtes espagnoles et portugaises. C’est extraordinaire. Ce courant sera livré en Angleterre pour beaucoup moins cher que le nucléaire. Ou faut-il investir ? Il faut donc être très prudent quand on veut faire davantage de vieilles choses, plutôt que de faire des nouvelles.

Depuis le crise sanitaire, les pays occidentaux cherchent à réindustrialiser leurs pays (ce qui permet d’éviter les émissions liées au transport) et à recréer un secteur minier pour disposer des métaux rares nécessaires à la transition énergétique. Or, de telles initiatives se heurtent parfois à l’hostilité des écologistes. L’écologie radicale peut-elle entraver ce processus de rapprochement de la production des centres de consommation, qui permet de baisser les émissions ?
Vous répondez avec la question. Dès qu’on est radical, on échoue à atteindre un objectif consensuel, un objectif bon pour l’ensemble. Qu’on soit radical de droite, de gauche ou écologique. Ce qu’il faut, ce n’est pas de la radicalité mais du réalisme, atteindre un objectif indépendamment de sa propre idéologie. Il faut prendre ce qu’il y a de bon partout. Il n’y a aucune raison, quand on est écologiste et qu’on veut protéger l’environnement, de rejeter tout ce qui permet sur le plan énergétique ou sur le stockage des minéraux, de bloquer tous les progrès. En fait, en étant trop radical, on arrive à l’opposé de ce que veut l’écologie : on atteint un rejet de la part des autres. On fait peur, on effraye. Aujourd’hui, l’écologie devrait fédérer et réunir, plutôt qu’effrayer ou rejeter.

On voit beaucoup de mouvements de jeunes qui bloquent des autoroutes, s’accrochent à des tableaux. Est-ce que ce mouvement, qui traduit une éco anxiété, peut être efficace pour changer les mentalités de ceux qui ne veulent pas changer et faire accepter une bascule plus rapide des choses. Pensez-vous que ces mouvements aient un rôle à jouer d’éveilleur de conscience, ou qu’ils sont contre-productifs ?
C’est le thème d’une chronique que j’ai écrite sur l’éco-violence et l’éco-résistance. Cela m’interroge beaucoup. En fait, les terroristes et les résistants sont toujours définis en fonction de leur camp et de l’époque. Les résistants les plus valeureux en France durant la Deuxième Guerre étaient considérés comme des terroristes par les Allemands. On va voir comment on jugera les éco-violents. C’est vrai que c’est révoltant de voir qu’il ne se passe rien. Quand on voit que des gens polluent outrageusement par pur égoïsme, il y a de quoi commencer à s’agiter. Et il y a des gens qui s’agitent beaucoup, parfois au point de devenir violents. Je ne peux pas soutenir la violence, mais je peux la comprendre. Tout dépend contre quoi elle est axée.

Si c’est sur des tableaux qui n’ont absolument rien à voir avec les changements climatiques, c’est immature. Si c’est sur des choses hyper polluantes, on peut se demander si ce n’est pas un acte assez héroïque. Autrefois, il y avait des écologistes qui s’opposaient aux transferts des déchets radioactifs, qui bloquaient des trains. Ils attaquaient directement la cause qu’ils voulaient défendre. Si on dégonfle les pneus des SUV en ville, on s’attaque à la cause qu’on veut défendre. C’est différent que de jeter de la soupe sur des tableaux qui n’ont rien à voir avec la cause. Il faut bien regarder. Je ne soutiens pas la violence, mais il y a un moment où, voyant qu’il ne se passe rien, je comprends que certains deviennent violents.

L’Europe a pris une réglementation pour la fin des moteurs thermiques dans l’automobile en 2035, mais ne devrait-elle pas prendre aussi des décisions plus dures concernant le poids des véhicules électriques, mettre des limites de poids ou taxer ceux qui ne veulent rien changer à leurs habitudes ?
Taxer très fortement, ceux qui ont de quoi acheter de grosses voitures, lourdes polluantes et chères ont de quoi payer les taxes. Ce n’est pas vraiment utile. Ce serait de nouveau les gens les plus démunis qui souffriraient le plus. Je crois qu’il faut des limites de poids. C’est aberrant d’avoir des voitures très lourdes, même électriques, ou extrêmement puissantes, alors que la vitesse est limitée à 130 km/h sur autoroute.

À quoi cela sert de pouvoir rouler à 200 km/h. Il faudrait mettre des limites de poids. Mais c’est difficile pour le législateur, parce qu’il faut intervenir sur les gammes de production et je pense que les constructeurs vont s’y opposer fermement. Le courage politique serait de l’imposer massivement. On ne peut plus accepter qu’autant de choses aussi polluantes soient mises sur le marché. Mais il n’y a pas que les grosses voitures, il y des chauffages polluants, des gadgets, des ampoules incandescentes qui continuent à être vendues dans certains pays à la place des LED. Il faut aller beaucoup plus vite. Mais je tiens à souligner que la Commission et le Parlement européen sont beaucoup plus ambitieux que les pays pris individuellement. Il faut vraiment leur tirer notre chapeau.

Concernant l’hydrogène, il existe un débat en Europe entre ceux qui prônent une production locale et ceux qui préfèrent miser sur le commerce international pour l’importer. Quel est votre point de vue ?
On a commencé à faire le projet Desertech pour produire de l’hydrogène au Maghreb et le transporter en Europe. Mais on voit une autre tendance qui est en train de se dessiner. Les pays du sud demandent aux pays du Nord, au lieu de faire monter l’hydrogène, de faire descendre l’industrie chez eux. De mettre l’industrie plus près de la production de l’hydrogène. Comme on voit qu’il faut de l’hydrogène pour décarboner les aciéries et les productions d’engrais, les pays du sud demandent que les industries d’engrais et d’industrie soient délocalisées chez eux. Ce n’est pas aussi facile que ce qu’on croit. Mais moi je pense que ce qui est intéressant pour l’hydrogène, c’est quand même d’en produire chez soi, plutôt que de le transporter.

La prochaine Cop se tiendra à Dubaï. Que pensez-vous du choix de ce pays du Golfe, symbole de la démesure ?
Dubaï ne produit ni pétrole, ni de gaz. Ce n’est donc pas Dubaï qui va pousser le pétrole. D’autres émirats en produisent, comme Abu Dhabi, et c’est vrai que cette Cop va être essentiellement une Cop des Émirats arabes unis. Je connais bien les gens des Émirats. Ils ont absolument besoin d’un succès à cette Cop. Ils ne peuvent pas se contenter d’avoir le même type de résultat qu’à Glasgow ou Charm el-Cheik. Et les Occidentaux ne vont pas accepter davantage de pétrole dans le futur parce que la Cop est à Dubaï. Il est possible que les négociations soient assez dures, mais qu’on avance quand même. Il ne faut pas oublier qu’Abu Dhabi est un pays qui gagne plus avec ses placements financiers qu’avec son pétrole. C’est pour cela qu’on avait décollé avec Solar Impulse depuis Abu Dhabi Ils ont des sociétés qui investissent beaucoup dans les énergies renouvelables, ce n’est pas un bloc monolithique en faveur du pétrole Abu Dhabi, ni Dubaï.
La question n’était pas tant sur le pétrole que sur l’exubérance de Dubaï…

L’exubérance, c’est quelque chose de choquant, mais Dubaï se veut tolérant sur le plan religieux, ethnique, en disant que c’est une terre d’accueil pour toutes les religions. Dubaï présente des excès, mais aussi un certain nombre d’avantages. C’est pour cela que tellement de gens ont choisi Dubaï pour la prochaine Cop. Mais c’est vrai que quand on vit avec des bâtiments qui sortent de terre comme des champignons, mal isolés ou refroidis, des grosses voitures juste pour rouler en ville, c’est clair que c’est aberrant. Mais je ne sais pas si c’est la Cop qui va changer cela, car cela existe aussi aux Etats-Unis et dans d’autres pays.

La biodiversité est menacée par le réchauffement climatique, mais elle est plus difficile à appréhender pour les entreprises, car elle est moins quantifiable. Qu’attendez-vous de la Cop 15 de la biodiversité ?
La chute de la biodiversité est un des résultats du changement climatique. En luttant contre le changement climatique, en mettant en place des solutions, des énergies renouvelables, de l’efficience énergétique, de l’efficience de l’agriculture, de la production industrielle, on va protéger la biodiversité, mais cela ne suffira pas. Ce qu’il faut beaucoup plus de législation, de règlementation. Cela ne sert à rien d’interdire la pêche illégale et la déforestation tant que l’on continue à importer des produits de manière légale. On a le droit d’acheter du poisson pêché illégalement ou du soja ou de l’huile de palme qui contribue à la déforestation. Il faut légiférer pour que ces aberrations ne soient plus permises. Il y a une hypocrisie totale de notre côté. Il faut légiférer pour que cela ne soit plus permis. À ce moment-là, vous verrez la biodiversité s’améliorer.

Radicalité et CGT : aussi une guerre de succession

Radicalité et CGT : aussi une guerre de succession

La radicalité de la CGT explique par la stratégie habituelle de l’organisation mais aussi par des problèmes de succession.

La première succession concerne la place de la CGT dans l’univers syndical. La CFDT a prit la succession de la CGT et est devenu grâce à sa politique réaliste le premier syndicat de France. D’une façon générale les syndicats réformistes sont désormais majoritaires en France.

La seconde succession concerne celle du patron de la CGT. La candidate de Martinez est très contestée par les plus ultra gauche et les plus corpo de l’organisation. Philippe Martinez soutient en effet Marie Buisson, issue de la Fédération de l’éducation, de la recherche et de la culture (Ferc-CGT).

Le choix de Marie Buisson ne fait pas l’unanimité parmi les 32 fédérations qui composent la CGT. La puissante Fédération nationale des industries chimiques (Fnic), dont font partie les grévistes CGT de TotalEnergies, n’est pas favorable à la désignation de cette professeure en lycée professionnel, qui n’est pas issue du mouvement ouvrier. Aux yeux des membres de la Fnic, comme de la CGT-Cheminots, seule une opposition frontale et sans concession au patronat et au gouvernement peut permettre des avancées sociales.

« Il y a deux visions du syndicalisme dans la même centrale, avec des projets relativement différents, résume l’historien Sylvain Boulouque. Il y a un groupe très contestataire, chez les cheminots ou dans l’union départementale des Bouches-du-Rhône, proche de la Fédération syndicale mondiale (FSM), où l’on retrouve les fédérations syndicales nord-coréennes, chinoises ou cubaines. C’est l’héritage du vieux communisme. La CGT, au niveau national, est quant à elle adhérente de la Confédération syndicale internationale (CSI), qui s’inscrit beaucoup plus dans une culture de la négociation sociale et de la défense des libertés démocratiques. »

Les racines de la radicalité

Les racines de la radicalité

Notion à la fois stigmatisante et valorisante, la radicalité est un vocable politique qui est en train de passer de la gauche à la droite. ( un papier du « Monde »)

Histoire d’une notion.

 

C’est le mot repoussoir. Ou bien une posture brandie comme un étendard. La radicalité est plus souvent employée pour discréditer une pensée et renvoyer à l’outrance, voire à la violence d’un mouvement ou d’un camp. Dans le langage courant, la radicalité se confond souvent avec l’extrémisme. Mais elle est parfois revendiquée afin de désigner l’urgence d’un constat ou l’intransigeance d’un combat.

Aujourd’hui, explique l’historien des idées François Cusset, l’usage du terme « radical » est « une stratégie de délégitimation de toute forme d’opposition politique non électorale, et une manière de renvoyer dos à dos l’extrême gauche et l’extrême droite, qui depuis toujours vise à faire passer le mouvement social pour un fascisme rouge, une hystérie politique dangereuse ».

Actuellement, résument Valérie Bonnet, Béatrice Fracchiolla et Lilian Mathieu, chercheurs en sciences sociales qui ont coordonné un dossier de la revue Mots consacrée au sujet, « la radicalité peut autant être revendiquée comme un label valorisant  par ses connotations d’intransigeance, voire de rudesse politique, comme dans le cas du groupuscule néofasciste Unité radicale –, ou jouer comme un stigmate  comme lorsque le qualificatif de radical sert à disqualifier un féminisme considéré comme outrageusement hostile aux hommes ou trop exigeant » (« De la racine à l’extrémisme. Discours des radicalités politiques et sociales », Mots, n° 123, ENS éditions, juillet 2020).

« Radical » est un mot forgé sur le bas latin radicalis, issu de radixradicis (« racine »), qui désigne, depuis le XVe  siècle « ce qui tient à la racine, au principe d’un être ou d’une chose, donc ce qui est profond », rappelle le Dictionnaire historique de la langue française, dirigé par le linguiste Alain Rey (Le Robert, 2002). Nombre d’auteurs qui se réclament d’une certaine radicalité n’hésitent pas à renvoyer à son origine latine. Ainsi pour Marx, être radical, c’est « saisir les choses à la racine », écrit-il dans Critique de la philosophie du droit de Hegel (1844). Dans cette acception, la radicalité ce n’est pas l’extrémisme, mais tout d’abord une pensée conséquente de l’analyse des fondements (d’un problème, d’une question, d’une condition). Dans un usage plus courant, elle désigne l’intransigeance d’une pensée qui va jusqu’au bout de ses conséquences, parfois même une forme de rigorisme ou d’intégrisme.

Le retour des idéologies et de la radicalité ?

Le retour des idéologies et de la radicalité ?

Tarik Yildiz, Sociologue et essayiste, constate dans l’Opinion le retour des idéologies et de la radicalité. Et considère que « Les idées, les concepts, ne concernent pas qu’une élite intellectuelle « 

Tribune

 

 

 

Les mouvements qui, il y a quelques décennies, revendiquaient la capacité à reléguer au second plan les intérêts individuels au profit d’une cause supérieure, ont perdu de leur superbe. Cependant, comme l’a illustré le récent débat entre Eric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon, un retour en force des idéologies et de leur traduction radicale semble se dessiner : discussions à l’occasion du procès des attentats du 13 novembre 2015, résultats d’études sociologiques et d’opinion, engouement autour de programmes politiques évoquant une forme de radicalité…

A l’occasion de la publication de leur enquête auprès de 7 000 lycéens en 2017, les sociologues Anne Muxel et Olivier Galland définissaient la radicalité comme supposant un « ensemble d’attitudes ou d’actes marquant la volonté d’une rupture avec le système politique, social, économique, et plus largement avec les normes et les mœurs en vigueur dans la société », atteignant son point le plus extrême lorsqu’elle « s’accompagne d’une justification de l’usage de la violence ».

Ils révélaient alors ce que beaucoup avaient observé à l’occasion d’enquêtes qualitatives : une radicalité importante existait dans l’échantillon interrogé — un quart des lycéens ne condamnaient par exemple pas totalement les attentats contre Charlie Hebdo et le Bataclan — avec plus de force encore chez les élèves s’identifiant comme musulmans. De multiples facteurs peuvent expliquer ce constat qui, contrairement à ce qu’ont longtemps avancé de nombreux chercheurs, ne se limite pas à la seule condition socio-économique.

 Bien qu’apparaissant comme « le soupir de la créature opprimée, l’âme d’un monde sans cœur », le phénomène religieux ne constitue pas la seule expression de la radicalité. Le sentiment de perdre une partie de son identité, de ne plus être protégé par l’Etat, la perception d’une forme de mollesse dans la traduction des discours en actes ont, par exemple, fait partie des déterminants de l’action des Gilets jaunes.

Les débats politiques comme les résultats de certains sondages révèlent en outre une attente de fermeté d’une partie de la population, notamment concernant le traitement de la délinquance, la protection des frontières ou l’affirmation de valeurs, quelle que soit la nature de ces dernières. Il s’agit de répondre à une certaine « fatigue d’être soi » à travers un système de pensée sûr de lui-même, répondant aux inquiétudes avec force.

L’idéologisation de la politique paraît salutaire. Seul un programme politique reflétant des convictions claires pourra éviter le développement d’une radicalité à la marge du système politique, qui comporterait de nombreux dangers

Cette force ne doit cependant pas sacrifier la nuance : lorsqu’Eric Zemmour affirme que « l’islam et la République ne sont pas compatibles », il oublie qu’il existe des expressions très diverses de l’islam, et que l’analyse de la doctrine ne peut se faire indépendamment des pratiques. De même, lorsqu’il évoque « un petit jihad » pour qualifier le développement de la délinquance, il n’a que partiellement raison. Si certains délinquants considèrent en effet, en évoquant leur religion, qu’il est conforme à leur morale de voler des « mécréants », ce phénomène est loin d’être général.

Tout en évitant la recherche absolue du consensus, de « l’extrême centre », conduisant parfois à masquer des problématiques et des inquiétudes bien réelles, il convient de ne pas faire fi de la complexité.

Dans ces conditions, l’idéologisation de la politique paraît salutaire. Seul un programme politique reflétant des convictions claires pourra éviter le développement d’une radicalité à la marge du système politique, qui comporterait de nombreux dangers. Apporter une réponse aussi bien idéologique que politique paraît essentiel.

Renouer avec la puissance de l’idéologie en assumant la prééminence de l’intérêt collectif sur les intérêts individuels, en faisant des valeurs des objets qui méritent le dépassement de soi. Les idées, les concepts, ne concernent pas qu’une élite intellectuelle : l’Histoire nous enseigne, parfois avec cruauté, qu’ils sont essentiels lors des transformations sociétales.

Sans aller jusqu’à considérer que le risque de guerre civile soit imminent, souvenons-nous de la phrase du sanguinaire Mao Tsé-toung : « La politique est une guerre sans effusion de sang et la guerre une politique sanglante. » Quelles que soient les opinions des candidats, l’enjeu est de dépasser une vision purement utilitariste de l’action publique et de redonner à la politique sa noblesse idéologique.

Tarik Yildiz, sociologie et essayiste, est l’auteur, notamment, de De la fatigue d’être soi au prêt-à-croire. Lutter contre la délinquance pour combattre le radicalisme islamiste (Editions du Puits de Roulle, 2020).

Primaire écolo : la radicalité pour argument Sandrine Rousseau et des analyses à coups de serpe

Primaire écolo : la radicalité pour argument Sandrine Rousseau et des analyses à coups de serpe

 

À l’extrême gauche, Mélenchon n’a qu’à bien se tenir car en matière de radicalité Sandrine Rousseau va bientôt figurer au hit-parade. t sa principale caractéristique. D’ailleurs elle ne prend même pas le temps de justifier ses propositions. Être radical pour elle constitue en soi un programme. Preuve lors du débat avec Yannick Jadot, Elle a surtout accusé ce dernier de n’être pas assez radicale assez «radical». «J’ai lu ton programme. Je vois à quel point il n’y a pas de transformation suffisante pour permettre d’atteindre les objectifs du Giec», l’a-t-elle interpellé. «L’écologie de gouvernement que tu proposes est une écologie qui ne va pas au bout du chemin», a-t-elle jugé. La réponse du concerné ne s’est pas fait attendre: «Si gouverner, c’est renoncer, il faut arrêter de faire de la politique. Il faut s’engager dans les mouvements sociaux». «

En matière de déplacements, l’ancienne porte-parole d’Europe écologie les Verts s’est prononcée pour la « démobilité ». Une idée globalement intéressante mais concrètement qui ne précise pas comment doivent être assurés les déplacements domicile travail pour ceux qui se lèvent tôt ( dontles transports collectifs sont inadaptés), pour ceux qui ne disposent pas d’alternative à l’automobile notamment en zone diffuse (banlieue, zone rurale,). Par contre à juste titre, Sandrine Rousseau milite pour une voiture beaucoup plus légère moins consommatrice d’énergie et moins polluante.

 

Cependant elle se prononce pour une taxe carbone qui va surtout pénaliser les plus pauvres. Le problème d’Europe écologie les Verts c’est que ce parti ri risque de voter pour la plus radicale comme candidat mais le moins populaire auprès de l’électorat. L’égérie du « wokisme »  en France ne recueille  en effet que de leur de 2 % dans les sondages pour les élections présidentielles.




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