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Superprofits : Quelle taxe équitable ?

Superprofits : Quelle taxe équitable ?

 

L’économiste Céline Azémar Développe, dans une tribune au « Monde » développe un argumentaire anti taxe sur les superprofits

 

La guerre russo-ukrainienne a un impact majeur sur l’économie mondiale, déjà fragilisée par la pandémie de Covid-19. Elle entraîne notamment l’envolée des prix du pétrole et du gaz, pénalisant les consommateurs et bénéficiant largement au secteur de l’énergie : Shell et Total ont triplé leurs bénéfices en 2022 par rapport à l’avant-guerre. Cette hausse des coûts pousse les gouvernements à prendre des mesures pour aider les ménages et les entreprises, avec notamment l’adoption d’une taxe sur les « superprofits ».

L’idée est de taxer les profits « normaux » au taux normal de l’impôt sur leUn argumentaire anti taxe sur les superprofitss sociétés, et de taxer plus fortement les profits excédentaires, résultant d’un gain exceptionnel, inattendu, non pas lié à l’investissement ou à la capacité d’innovation des entreprises, mais à un événement externe, de grande ampleur, changeant les conditions de marché.

Une telle taxe exceptionnelle sur les superprofits a été récemment adoptée en Espagne, en Italie et au Royaume-Uni. Elle demeure très controversée en France et a été rejetée par le Parlement. Ses opposants lui reprochent notamment de contrevenir à deux grands principes fiscaux : l’équité et l’efficience.

En effet, l’introduction d’une taxe sectorielle pose un problème d’inégalité de traitement des contribuables puisqu’elle peut amener à traiter différemment des entreprises ayant des caractéristiques similaires. De plus, si cette fiscalité sélective altère la concurrence, elle pourrait, à ce titre, être considérée comme une aide d’Etat, allant à l’encontre du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, au risque de sanctions de la Commission européenne.

France – l’Algérie: quelle réconciliation !

 France – l’Algérie: quelle réconciliation !

 

Un papier du Monde relativise la réconciliation entre la France et l’Algérie motivée en réalité par la nécessité de solliciter le gaz algérien

Depuis des décennies, les relations franco-algériennes n’ont été qu’une succession de périodes de tension et de réconciliation plus ou moins longues. La visite de trois jours que vient d’effectuer Emmanuel Macron en Algérie a le mérite de mettre un terme à plusieurs mois de crise diplomatique.

Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, et son homologue français ont signé une déclaration commune appelant à une « nouvelle dynamique irréversible ». Si l’irréversibilité est sujette à caution, l’élan, lui, semble réel, et guidé par la volonté partagée de repartir sur de nouvelles bases.

Les déclarations d’Emmanuel Macron sur un système algérien « politico-militaire » accusé d’entretenir une « rente mémorielle » et ses interrogations faussement ingénues sur l’existence d’une nation algérienne avant la colonisation avaient constitué le point d’orgue de la brouille. Celle-ci s’était nourrie auparavant des frustrations françaises dues à la mauvaise volonté affichée par Alger sur les principaux dossiers en cours : immigration, contrats commerciaux, travail de mémoire.

Les déclarations et les gestes qui ont ponctué la visite du président français marquent donc un retournement spectaculaire du climat entre les deux pays. Même si la substance des échanges a pu décevoir à certains égards, le symbolique revêt une importance particulière dans le contexte très psychologique et émotionnel de la relation franco-algérienne.

L’autre progrès significatif concerne la tenue d’une réunion au plus haut sommet des responsables militaires et du renseignement des deux pays. Cette rencontre, inédite depuis l’indépendance, laisse augurer d’une coopération au Sahel, au moment crucial où la France quitte le Mali.

Sur le fond, l’une des avancées notables porte sur la question des visas. Agacé par la mauvaise volonté d’Alger pour accueillir ses ressortissants expulsés de France, Paris avait décidé, à l’automne 2021, de diviser par deux le nombre de visas octroyés aux Algériens. La tension semble avoir baissé d’un cran : la France accepte d’assouplir sa position dans le cadre d’une immigration choisie, tandis que l’Algérie s’engage à lutter davantage contre l’immigration clandestine.

Quant à la question énergétique, il aurait été naïf d’attendre de ce voyage monts et merveilles. Du fait d’un manque criant d’investissements et d’une demande intérieure en forte croissance, le potentiel d’exportation de gaz de l’Algérie reste limité, et ne peut représenter à court terme une solution aux difficultés d’approvisionnement européennes, liées à la guerre russo-ukrainienne.

Si ce début de réconciliation est encourageant, il risque de buter sur trois limites. La première peut venir des franges conservatrices du régime algérien, qui voient d’un mauvais œil un retour en grâce de l’influence française. La deuxième concerne le Maroc, qui redoute que ce réchauffement ne contrecarre son plan d’autonomie du Sahara occidental, sujet de discorde avec Alger. Rabat a néanmoins des moyens de pression sur Paris en modulant son contrôle de l’immigration vers l’Europe ou sa précieuse coopération sur le terrorisme islamique. La France se retrouve ainsi prise entre les intérêts divergents d’un Maroc qui vient de normaliser ses relations avec Israël et une Algérie qui se sent de plus en plus isolée.

Santé, alimentation et environnement: Quelle cohérence ?

Santé, alimentation et environnement: Quelle cohérence  ?

 

Plusieurs experts*s’interrogent  dans The Conversation  sur la cohérence entre santé, alimentation et environnement

 

Les acteurs des politiques publiques se disent conscients de l’urgence à lutter contre les pollutions, la perte de biodiversité, le changement climatique et contre les maladies chroniques liées à l’alimentation et à l’environnement. Les politiques propres à chaque ministère n’abordent cependant souvent qu’une facette de ces problèmes, très interdépendants.

Ces politiques en silo échouent souvent à atteindre les objectifs qu’elles se sont fixés ou génèrent des effets rebonds, c’est-à-dire des effets indésirables dans un autre domaine.

C’est pourquoi des politiques plus transversales, à l’image de ce qui est initié pour la planification écologique, devraient être renforcées, et étendues aux enjeux de santé. La coordination de ces différentes politiques est aussi à renforcer à l’échelle des territoires où il plus facile de mobiliser les différents acteurs du système alimentaire.Pilotée par le Ministère de la transition écologique, la stratégie nationale bas carbone comprend un volet agricole pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, augmenter la séquestration de carbone dans les sols et produire de l’énergie.

L’objectif fixé en 2015 était de diviser les émissions par deux pour 2050. Le Haut Conseil pour le climat alerte aujourd’hui sur le rythme de réduction insuffisant au vu des enjeux d’atténuation. Les recherches montrent que les bonnes pratiques agricoles ne suffiront pas à elles seules à atteindre les objectifs ; il faudrait par exemple réduire d’environ 50 % la consommation de viande, ce qui nécessiterait un redimensionnement de l’élevage.

Depuis peu, les agriculteurs se saisissent du label « bas carbone » pour stocker du carbone dans les sols moyennant rétribution. Sachant que pour aboutir à de la matière organique stable encapsulant ce carbone il faut apporter 100 g d’azote par kg de carbone, cet apport d’azote devrait provenir des légumineuses plutôt que des engrais de synthèse dont la fabrication nécessite du gaz naturel et contribue à d’importantes émissions de protoxyde d’azote dans l’atmosphère.

Par ailleurs, la méthanisation alimentée par des déjections animales risque de créer un appel à plus d’élevage, maintenant l’objectif productiviste de l’agriculture.

Pour éviter ces déviances, il faut donc concevoir une politique répondant conjointement aux trois objectifs : production alimentaire et énergie, séquestration de carbone.

Le programme national nutrition santé recommande aujourd’hui de consommer plus de légumineuses, de fruits et légumes, si possible bio, et moins de viande (limitée à 500 grammes de viande rouge et 150 grammes de charcuteries/semaine).

Tout en respectant [la recommandation de 1 gramme de protéines par kg de poids corporel pour un adulte] sédentaire (contre 1,4 d’après les études INCAs), il est possible de diviser en moyenne par deux la quantité de viande consommée, voire plus en ne consommant qu’un tiers de protéines animales grâce à une plus grande végétalisation de l’assiette.

Les ministères concernés doivent l’encourager pour la santé des consommateurs et de l’environnement, tout en accompagnant la transformation requise des filières.

Consommer des légumineuses deux fois par semaine nécessiterait, par exemple, de quintupler leur surface cultivée ! Or le ministère de l’Agriculture ne précise pas comment libérer ces surfaces, alors même qu’il veut réduire les importations de tourteaux de soja américain. Or, sans réduction préalable de l’élevage et sans réattribution des terres à la culture de légumineuses, il est impossible de répondre aux enjeux de santé et de climat.

Soulignons que notre consommation de fruits et légumes frais est en grande partie importée – à 31 % pour les légumes et 60 % pour les fruits. Pour les noix, par exemple, décupler les surfaces couvrirait à peine plus de 50 % des besoins théoriques des Français en fruits à coque. La production de fruits et légumes doit donc être bien plus soutenue qu’elle ne l’est par les politiques publiques (0,11 %) de la PAC.

Le programme national nutrition santé encourage aussi la consommation de céréales complètes bio pour leur apport en fibres et leur qualité sanitaire, mais nous en importons déjà 75 000 tonnes alors que 90 % des Français ne consomment pas suffisamment de fibres et d’antioxydants.

Il est dès lors évident que la proposition du gouvernement de soutenir dans un premier temps l’agriculture biologique (AB) et la certification haute valeur environnementale (HVE) au même niveau témoigne du manque d’ambition pour une forte transition agroécologique comme le souligne la Commission européenne dans un récent avis.

En effet, l’HVE réduit bien moins l’exposition aux pesticides. D’autre part, il est prévu de supprimer les aides au maintien de l’agriculture biologique.

Enfin, les programmes actuels de financement de la recherche poussent à investir sur l’ultra-transformation des protéines végétales, au lieu de favoriser la transformation sobre des graines entières.

Mais cette ultra-transformation (cause) – associée le plus souvent à de l’« ultra-formulation » (effet) pour corriger la dégradation excessive des matrices alimentaires d’origine (ajout de nombreux agents cosmétiques type arômes, modificateurs de goûts, texturants, colorants…) – s’accompagne de risques accrus de maladies chroniques.

Les différents plans Ecophyto (2015, 2018, 2020) ne sont pas parvenus à leur objectif de diviser par deux l’utilisation des pesticides malgré un soutien financier conséquent.

Les efforts ont porté sur l’amélioration de l’efficience (le bon produit, au bon moment, à la bonne dose) ou la substitution (remplacer un pesticide de synthèse par un produit de biocontrôle), et non sur une reconception des systèmes permettant une diversification des cultures et de notre alimentation.

Pour renforcer la protection des cultures par les « ennemis » naturels, la recherche souligne la nécessité de combiner plusieurs leviers : diversité des espèces cultivées, des sols en bonne santé, des surfaces des parcelles réduites et 20 % d’infrastructures paysagères… Or ces leviers sont encore peu pris en compte dans les politiques agricoles.

En outre, les normes actuelles sur les limites maximales de résidus de pesticides ne suffisent pas : leur danger pour notre santé provient des effets cocktails qui sont plus qu’additifs, ainsi que des effets non considérés sur notre microbiote intestinal.

Malgré les politiques dédiées depuis 1991, les émissions d’azote dans l’environnement (nappes phréatiques autant qu’eaux de surface) restent à un niveau critique.

Entre 2000 et 2018, le nombre de captages abandonnés pour cause de pollution a doublé. Repenser la place de l’élevage et des légumineuses est urgent : pour produire 100 g de protéines, les pertes d’azote sont de 250 g pour le bœuf contre 4,5 g pour les légumineuses !

Le ministère de la Santé ne prend pas certaines mesures essentielles pour atteindre ses propres objectifs. Le 4e programme national nutrition santé propose de réduire de 20 % la consommation d’aliments ultra-transformés (35 % des calories chez les adultes et 46 % chez les enfants), mais le NutriScore, pilier des politiques de santé censé accompagner le consommateur dans ses choix, ne tient pas compte de cette caractéristique en premier choix, alors que 57 % des produits industriels notés A et B sont des aliments ultra-transformés.

Autrement dit, les objectifs de santé publique ne peuvent être atteints.

Par ailleurs, l’objectif de l’affichage environnemental en cours d’élaboration est louable : sensibiliser les consommateurs aux impacts environnementaux de leur alimentation, notamment la consommation trop élevée de protéines animales. Mais des divergences existent selon le modèle de production.

Ainsi, un modèle agroécologique s’affranchissant au maximum des intrants conduira à favoriser un élevage à l’herbe, cohérent avec les enjeux environnementaux, alors qu’un modèle basé sur les technologies de la robotique, du numérique et de la génétique favorise des animaux élevés en bâtiment.

Ces politiques publiques « en silos », sectorielles (agriculture, alimentation, environnement, santé) et réductionnistes, ne permettent donc pas structurellement de relever les défis sanitaires et environnementaux : elles ne les traitent chacune qu’en partie et génèrent des effets rebond.

L’excès d’utilisation d’azote, de pesticides, de consommation de viande et d’aliments ultra-transformés, entraîne des coûts cachés non payés directement par le consommateur : pour 1 euro dépensé en alimentation, la société doit en dépenser presque 2 pour réparer la santé et l’environnement

Pour la nécessaire refonte de notre système alimentaire, il faut donc dépasser les outils classiques d’action publique (subventions et taxes, normes et étiquetages) en les coordonnant au sein d’un pôle composé par ces quatre domaines d’action.

Pour cela, seules des politiques territorialisées permettront de décliner les ambitions nationales pour tenir compte à la fois des spécificités des territoires (sol, climat, entreprises…) et faciliter la concertation entre la société civile et les acteurs économiques. En ce sens, les projets alimentaires territoriaux constitueraient une échelle d’action privilégiée.

*auteurs

  1. Michel Duru

Directeur de recherche, UMR AGIR (Agroécologie, innovations et territoires), Inrae

  1. Anthony Fardet

Chargé de recherche, UMR 1019 – Unité de Nutrition humaine, Université de Clermont-Auvergne, Inrae

  1. Jean-Pierre Sarthou

Professeur INP-ENSAT en agronomie et agroécologie, Inrae

  1. Marie-Benoît Magrini

Économiste, Inrae

Quelle évolution alimentaire ?

Quelle évolution  alimentaire ?

 

En 1966 sortait un classique de la littérature de Science-Fiction : Soleil Vert, une dystopie qui imaginait les conséquences pour les habitants de New York d’une surpopulation et d’une surexploitation des ressources mondiale en 2022. Par Alison Imbert, Directrice d’Investissement à Partech ( dans la Tribune)

Tribune

 

Dans une ville surpeuplée où la température ne descend jamais sous les 33°C, les habitants souffrent de la faim et la nourriture issue de l’agriculture devenue rare n’est réservée qu’à une élite riche. Nous sommes en 2022 et heureusement pour les habitants de New York, la situation n’est pas aussi sombre. Cependant, les effets du réchauffement climatique, l’accroissement démographique et plus récemment la guerre en Ukraine remettent en avant le sujet de l’exploitation des ressources naturelles et ravivent les craintes de pénuries alimentaires.

Partech, en tant que fonds de capital risque, cherche à identifier des tendances de fond au sein de la Foodtech qui pourraient permettre de nourrir une population mondiale grandissante en étant plus respectueux de nos ressources sans avoir à recourir au fameux Soleil Vert de Soylent Industries.

Des applications au service de la chasse au gaspillage alimentaire

Aujourd’hui on estime que 30% de la nourriture produite chaque année est jetée. Ce gaspillage a lieu à tous les niveaux, de la production à la distribution mais aussi au sein des ménages, et serait même responsable de 10% des émissions de gaz à effet de serre dans les pays développés.

Face à ce constat des startups se sont créées : en Europe, Too Good to Go lancée à Copenhague dès 2015 est devenue une référence auprès de nombreux consommateurs européens en permettant via son application l’accès à des invendus de grandes surfaces à prix cassés. En France, Phénix s’est spécialisé dans la mise en relation entre des associations (les Resto du Cœur, etc.) et des Grandes Surfaces. Ces start-ups permettent ainsi de sauver des dizaines de millions de repas chaque année rien qu’en France et continue à innover pour offrir de nouvelles solutions contre le gaspillage alimentaire. Plus en amont, Hors Normes, lancé en 2020, propose par exemple des paniers de légumes et fruits hors format qui ne peuvent être vendus en Grande Surface.

Une nouvelle vague dans les alternatives végétales à la viande

Depuis 50 ans, la consommation mondiale de viande a été multipliée par trois. Or, cette source de protéine majeure pour nombre de Français est très gourmande en ressources : selon le Programme des Nations Unies pour l’Environnement, trois à dix kilos de protéines végétales seraient nécessaires pour produire un seul kilo de protéine animale, et c’est ainsi que plus de 70% des céréales produites dans le monde sont utilisées pour l’élevage.

Conscient de ces enjeux, 30% des Européens ont fait le choix de diminuer volontairement leur consommation de viande sans pour autant se déclarer végétariens. Pour ces consommateurs, ce changement de régime n’est pas aisé et des startups proposent des alternatives à la viande, produites à base de protéines végétales.

Apparues à la fin du XIXe aux Etats-Unis - l’un des précurseurs ne fut autre que le Dr John Harvey Kellogg lui-même, végétarien et créateur de la fameuse marque de corn-flakes - la production d’alternatives à la viande n’a réellement pris son essor que dans les années hippie 1960-70 en lien avec l’apparition des mouvements végétariens en Californie. On a ainsi vu apparaître les premiers « steaks végétaux » fabriqués à base de soja, de pois ou de champignons. Longtemps réservé à un marché de niche, ces produits - souvent loin d’imiter la saveur de la viande – ont connu récemment des progrès importants, afin de satisfaire un public plus large et moins disposés à transiger sur le goût et la texture.

En 2021, ce sont près de 5 milliards de dollars qui ont été investis dans le secteur afin de développer des recettes innovantes et de se rapprocher de saveurs bien connues ; on retrouve ainsi aujourd’hui des équivalents végétaux de steak de bœuf, de nuggets de poulet ou même de lardons.

L’américain Beyond Meat a été précurseur de cette nouvelle vague et ses steaks végétaux sont désormais bien connus aux USA. En France, la marque Garden Gourmet de Nestlé se retrouve de plus en plus dans nos rayons au côté de belles startups françaises comme LaVie, ou HappyVore.

Mais au-delà du goût, une question se pose souvent aux consommateurs tentés par ces alternatives à la viande : quand est-il de la qualité nutritionnelle de produits par nature transformés ? La question est légitime quand on regarde la longueur de certaines listes d’ingrédients, mais les progrès sont notables. Par exemple, une marque comme LaVie et son bacon végétal (qui a fait le buzz récemment avec sa campagne de pub et son partenariat avec Burger King), contient seulement 6 ingrédients, tous d’origine naturelle, et est sans graisse saturée ni nitrite, et avec la même teneur en protéine que du bacon, les fibres en plus. De plus, LaVie s’engage à acheter 90% de ses ingrédients en Europe et produit en Vendée.

Demain, une viande sans élevage ?

Les substituts à la viande sont un bon moyen de consommer des protéines en limitant l’impact sur les ressources. Mais, même si des progrès importants ont été réalisés sur le goût et les qualités nutritives, celles-ci ne pourront jamais complétement imiter le goût de la viande ou son apport en protéines, notamment pour les produits à base de « fibres musculaires » comme un blanc de poulet, une côte de bœuf ou un filet de saumon.

La prochaine vague qui se profile semble être celle de la viande cultivée ou dite de cultures cellulaires. La méthode est simple, au moins sur le papier : il s’agit de prélever des cellules animales (dîtes souches), de leur procurer des nutriments au sein d’une cuve spéciale (bioréacteur) pour en favoriser la multiplication et ainsi obtenir des fibres musculaires. Cela permettrait par exemple, à partir de prélèvements de cellules d’un oeuf de produire des millions de blanc de poulet.

Ces techniques, à l’origine développées pour la médecine notamment dans le cas de greffes, sont désormais testées par différentes start-ups à travers le monde comme Upside et BlueNalu aux Etats-Unis, Mosa Meat et Meatable au Pays-Bas, ou encore Gourmey en France, et sont aujourd’hui en mesure de produire des steaks, du saumon ou encore du foie gras en tout point similaires aux produits traditionnels.

A grande échelle, cette viande sans élevage présente de très nombreux avantages : elle permettrait d’économiser les ressources naturelles (notamment en eau et en terres agricoles), de diminuer l’émission de gaz à effet de serre liée à l’élevage, de mettre fin à la souffrance animale, de favoriser la souveraineté alimentaire via une production locale limitant le recours aux importations étrangères (46% du poulet consommé en France est importé d’Ukraine ou du Brésil), de diminuer les risques sanitaires (épidémies, etc.), d’améliorer la traçabilité des produits et de supprimer l’usage des hormones et des antibiotiques.

L’enjeu pour cette filière naissante est désormais d’investir pour arriver à passer de petites productions à une production industrielle à grande échelle, pour être en mesure de commercialiser cette viande à un prix comparable à la viande d’élevage. En parallèle les cadres réglementaires doivent s’adapter à cette nouvelle offre ; Singapour a été précurseur en permettant à Eat Just de commercialiser des nuggets fabriqués à partir de viande cultivée, alors que les Etats-Unis et l’Europe continuent à travailler sur le sujet.

Quelles perspectives pour la souveraineté européenne ?

Partout dans le monde, les initiatives se multiplient dans la Foodtech afin de répondre aux enjeux de l’agriculture de demain. Aucune solution miracle n’existe pour faire face aux défis qui nous attendent mais ce sont l’ensemble de ces initiatives en plus de celles des filières agricoles traditionnelles qui permettront en combinant savoir-faire et technologie de relever ces défis. Et si 5 milliards de dollars ont été investis en 2021 pour développer des protéines alternatives (végétales ou de culture) dans le monde, on déplore que la majeure partie de ces investissements soient américains.

Si nous voulons garantir notre souveraineté alimentaire, il est nécessaire que les fonds d’investissement européens soutiennent financièrement les startups qui s’attèlent à relever cet enjeu, en France comme en Europe.

Remontée des taux : quelle évolution ?

Remontée des taux : quelle évolution ?

Karl Eychenne, stratégiste et économiste explique la course perdue de la remontée des taux derrière l’inflation dans la Tribune.

Un article intéressant mais qui ne souligne pas assez le fait que l’inflation constitue un excellent moyen pour opérer un transfert de charges de l’endettement de certaines entreprises, des Etats et de certains particuliers sur les ménages. Une sorte d’impôt transparent mais pas indolore. NDLR

 

Ils ont bien essayé. Mais non. Les taux d’intérêt se sont ravisés, après avoir tenté de s’élever un peu. Le pompon de l’inflation sembla inaccessible. Trop haut, trop tard. Et après tout, pourquoi faire ? L’inflation est tellement loin maintenant : « il ne sert à rien de semer dans le sable », ont pu se dire les investisseurs, comme Alain le philosophe lucide. Aux États-Unis, en Europe, en France en particulier : l’OAT 10 ans a d’abord monté de 0 % à près de 2,5 % de janvier à mi-juin, avant de reculer à 1,7 % aujourd’hui. Grotesque ou exubérant, au choix.

En langage de marché, cela donne des investisseurs ayant d’abord anticipé des remontées de taux d’intérêt directeurs agressives des Banques Centrales. Puis pschitt. Aujourd’hui, les marchés anticipent toujours des hausses de taux pour 2022, mais presque 0,5 % de moins que ce qui était prévu il y a quelques semaines encore. D’après la finance qui voit loin, les taux directeurs américains devraient finalement remonter de 1,75 à 3%, contre 3,5% anticipé il y a peu. Les taux de dépôt de la Banque Centrale européenne devraient monter de – 0,5 à 0,5 %, contre 1% anticipé il y a quelques jours à peine.

La rechute a 3 causes possibles, de la plus tordue à la plus recevable.

« C’est au pied du mur que nécessité fait vertu », c’est beau, mais c’est faux. Les taux aussi étaient au pied du mur de l’inflation, mais le mur était trop haut. Après quelques tentatives, les taux ont capitulé. Ils se sont finalement rangés sur le côté, comme un sportif à cours de compétition, s’essoufflant au bout de quelques accélérations. Il est tout à fait envisageable que cette défaite des taux s’explique par l’abus de produits dopants des années durant. Il s’agit des politiques monétaires dites non – conventionnelles, un genre d’EPO qui fut administré à l’investisseur en manque d’inspiration.

Condamné à l’ivresse des taux bas, l’investisseur serait désormais inapte au krach obligataire. Pire qu’un lâcher prise, l’investisseur « laisse tomber » la lutte contre l’inflation. Il fait comme s’il ne savait pas :  « ce que tu ne sais pas ne peut pas t’angoisser » se dit l’investisseur ayant lu Epicure.

L’investisseur raffole des raisonnements, il en trouve toujours un pour donner un sens à ses choix, et un autre pour justifier ses choix de la vieille. Mais il y a un souci quand même, l’investisseur ne fait pas trop la différence entre le raisonnement rigoureux et le foireux. Or, il semblerait bien que l’on soit du côté foireux depuis le début de l’année. Comment justifier des taux qui s’envolent puis s’écrasent ? Rien de tel qu’une foireuse utilisation de la transitivité de l’implication pour vous faire gober n’importe quelle ânerie :

  • Toute hausse des taux provoque une récession
  • Or toute récession provoque une baisse des taux
  • Donc toute hausse des taux provoque une baisse des taux

La baisse des taux d’hier est donc la conséquence de la hausse des taux d’avant-hier. Nous voilà éclairés.

Dans le désordre, il est relevé les fulgurances suivantes :

  • « L’inflation têtue obligera finalement les Banques Centrales à jeter le bébé avec l’eau du bain… je veux dire casser la croissance si c’est le prix à payer pour briser l’inflation.
  • De toute façon, le mal est fait. Le pouvoir d’achat a déjà mu en pouvoir déchu… regardez la confiance des consommateurs s’effondrer, celle des entreprises trembler.
  • Avec ou sans le durcissement des politiques monétaires, la croissance économique devrait sérieusement ralentir dans le meilleur des cas, passer en territoire négatif probablement. »

Cette lecture pas très jouasse de l’actualité économique peut aider à comprendre les exubérances des taux. D’abord ce furent les craintes de course à l’échalote des Banques Centrales derrière l’inflation hystérique qui provoquèrent les tensions sur les taux. Puis vint le temps des cerises gâtées, celles annonçant que le remède des politiques monétaires restrictives serait pire que le mal. Et les taux se remirent donc à baisser.

Cette 3e explication est probablement la plus élégante pour justifier la spectaculaire trajectoire des taux. Les termes du langage employé sont bien compris par ceux qu’on appelle les initiés. Une explication probablement plus élégante donc, mais certainement aussi douteuse que les deux autres explications. Finalement, le profane sera autorisé de tiquer un peu. Il pourra même se permettre de penser que de tels mouvements de taux sont quand même un peu troublants, un terme poli pour signifier autre chose.

Démocratie- Quelle légitimité des cours suprêmes ?

Démocratie- Quelle légitimité des cours suprêmes ?

 

 

 

La cour suprême des États-Unis vient notamment de décider du transfert de responsabilité aux Etats concernant le droit à l’avortement. En clair il s’agit de permettre aux états réactionnaires de revenir sur l’ancien principe fédéral qui libéralisait l’avortement . Nombre de pays ont ainsi au-dessus de leur Parlement une cours suprême ou équivalent ayant le dernier mot en matière de droit.

 

En France, le rôle est assuré par le conseil constitutionnel part mais aussi par le Conseil d’État. Comme aux États-Unis, le conseil constitutionnel est pourtant une institution à caractère politique puisque ses membres sont désignés par les politiques. Le conseil d’État, lui est constitué de hauts fonctionnaires.

 

Ces hautes institutions n’ont en fait aucune vraie légitimité démocratique. Elles sont soumises aux mêmes pressions et influences que les autres institutions. Le pire sans doute ce qu’elles ont intervenir sur des sujets en général très brûlants mais complexes et pour lesquels elles n’ont pas de vraies compétences techniques et même sociétales. Ces institutions sont supposées être indépendantes, ce qui évidemment n’est jamais le cas. Dès lors se pose la question du maintien d’organisations superfétatoires et archaïques.

Démocratie- Quelle légitimité des cours suprêmes en France et ailleurs ?

DémocratieQuelle légitimité des cours suprêmes en France et ailleurs ?

 

 

 

La cour suprême des États-Unis vient notamment de décider du transfert de responsabilité aux Etats concernant le droit à l’avortement. En clair il s’agit de permettre aux états réactionnaires de revenir sur l’ancien principe fédéral qui libéralisait l’avortement . Nombre de pays ont ainsi au-dessus de leur Parlement une cours suprême ou équivalent ayant le dernier mot en matière de droit.

 

En France le rôle est assuré par le conseil constitutionnel part mais aussi par le Conseil d’État. Comme aux États-Unis, le conseil constitutionnel est pourtant une institution à caractère politique puisque ses membres sont désignés par les politiques. Le conseil d’État, lui est constitué de hauts fonctionnaires.

 

Ces hautes institutions n’ont en fait aucune vraie légitimité démocratique. Elles sont soumises aux mêmes pressions et influences que les autres institutions. Le pire sans doute ce qu’elles ont intervenir sur des sujets en général très brûlants mais complexes et pour lesquels elles n’ont pas de vraies compétences techniques et même sociétales. Ces institutions sont supposées être indépendantes, ce qui évidemment n’est jamais le cas. Dès lors se pose la question du maintien d’organisations superfétatoires et archaïques.

Quelle légitimité des cours suprêmes en France et ailleurs ?

Quelle légitimité des cours suprêmes ?

 

 

 

La cour suprême des États-Unis vient notamment de décider du transfert de responsabilité aux Etats concernant le droit à l’avortement. En clair il s’agit de permettre aux états réactionnaires de revenir sur l’ancien principe fédéral qui libéralisait l’avortement . Nombre de pays ont ainsi au-dessus de leur Parlement une cours suprême ou équivalent ayant le dernier mot en matière de droit.

 

En France le rôle est assuré par le conseil constitutionnel part mais aussi par le Conseil d’État. Comme aux États-Unis, le conseil constitutionnel est pourtant une institution à caractère politique puisque ses membres sont désignés par les politiques. Le conseil d’État, lui est constitué de hauts fonctionnaires.

 

Ces hautes institutions n’ont en fait aucune vraie légitimité démocratique. Elles sont soumises aux mêmes pressions et influences que les autres institutions. Le pire sans doute ce qu’elles ont intervenir sur des sujets en général très brûlants mais complexes et pour lesquels elles n’ont pas de vraies compétences techniques et même sociétales. Ces institutions sont supposées être indépendantes, ce qui évidemment n’est jamais le cas. Dès lors se pose la question du maintien d’organisations superfétatoires et archaïques.

Dette publique : Quelle gestion ?

Dette publique : Quelle gestion ?

 En raison de la pandémie, les critères de Maastricht portant sur les budgets et la dette publique ont été suspendus. L’Allemagne plaide en faveur d’un retour à leur application, contrairement aux pays du Sud de l’Europe, Italie et France en tête, qui parient sur la croissance pour réduire les déficits. Un choix qui n’est pas sans risque. Par Marc Guyot et Radu Vranceanu, professeurs à l’Essec ( la Tribune)

Au début de la crise du Covid-19, en mars 2020, l’Union européenne (UE) a activé la clause générale de sauvegarde qui suspend la règle prudentielle de gestion budgétaire (Fiscal Compact), notamment le déficit maximal de 3%. Les gouvernements du Sud de l’Europe ont assimilé cet assouplissement à une licence à dépenser sans limites, le retour à la règle budgétaire étant remis aux calendes grecques. Cette semaine, l’UE a décidé de maintenir la suspension pour 2023.

La crise du Covid-19 pouvant être aujourd’hui considérée comme passée les pays européens font maintenant face à la gestion de la dette post-Covid-19 et aux divergences qu’elle révèle. Le point de vue exprimé par Christian Linder, le ministre allemand des Finances, dans le Financial Times du 21 mai 2021, semble en opposition nette avec le point de vue exprimé dans la lettre commune rédigée par Emmanuel Macron et Mario Draghi, le 31 décembre 2021 dans le même journal.

Selon le duo latin, la bonne manière de réduire le poids de la dette est de favoriser la croissance. S’il est exact qu’une forte croissance réduise automatiquement le poids de la dette par rapport au PIB, nous sommes dubitatifs de voir les deux dirigeants des économies parmi les moins dynamiques de la zone euro faire fond sur cette stratégie. En effet, la croissance ne se décrète pas et ne s’est encore jamais obtenu à coup de grands plans de réindustrialisation et d’investissements publics dans la recherche. Si les deux compères tablent sur une croissance nominale nourrie par l’inflation, ils commettent une erreur grave en imaginant que les taux d’intérêt vont rester constants. En effet, le taux des obligations du trésor est sur le point d’augmenter avec l’inflation anticipée, et, face à l’inflation actuelle, la BCE n’a plus la capacité de racheter des dettes sans limite, sous peine de dégrader encore plus ces anticipations d’inflation.

Le ministre allemand Christian Linder plaide sans surprise pour un retour rapide aux règles pré-Covid-19 de déficits maitrisés et affirme clairement que si les pays membres de la zone euro peuvent encore actuellement dévier de la règle budgétaire, cela ne signifie pas qu’il est raisonnable de le faire.

L’Allemagne présente une gestion des finances publiques extrêmement rigoureuse, dont le principe de stabilité est gravé dans la constitution. En 2019, le ratio dette sur PIB de l’Allemagne était de 58,9% du PIB. Pendant la crise du Covid-19, le pays a mis en place de fortes mesures de soutien budgétaire qui ont porté la dette à 69,3% du PIB en 2021, ratio toutefois inférieur à son endettement de 2015 (données Eurostat). A situation exceptionnelle réponse exceptionnelle, puis ce pays s’est orienté vers un retour rapide à l’équilibre budgétaire, le déficit public allemand passant de -4,3% en 2020 à -3,7% en 2021.

La situation en Italie, Espagne, France et autres pays du Sud était déjà dans le rouge avant le Covid-19 avec des dettes publiques sur PIB respectivement de 134%, 98,3% et 97,4% en 2019. La lutte contre le Covid-19 les a fait passer à respectivement 150,8%, 118,4% et 112,9% du PIB en 2021. Avec des déficits publics à -6,9%, -7,2% et -6,5% en 2021, le retour rapide du déficit sous la barre des 3% semble être impossible. En France, où la campagne présidentielle a donné lieu à un concours de promesses et largesses électorales de tous les candidats, François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, s’est senti obligé, le 10 mai, de recommander à Emmanuel Macron de restreindre ses ambitions dépensières ou de nouvelles réductions d’impôts.

Un raisonnement superficiel nous dit que lorsque la dette publique représente 100% du PIB, si le taux d’intérêt augmente de 1 point de pourcentage, le coût de la dette augmente de 1% du PIB. Dans la mesure où les obligations du Trésor ont des maturités très variées, l’impact de la hausse du taux d’intérêt n’est pas immédiat mais il faut toutefois anticiper ses effets. D’ailleurs une partie de l’endettement public est basé sur des obligations indexées sur l’inflation qui répercutent immédiatement les anticipations d’inflation. En 2021, la charge d’intérêt de la dette a rebondi de 5 milliards d’euros comparé à 2020, essentiellement en raison de ces instruments.

Si le gouvernement se décide à adopter une politique de rigueur budgétaire, la réduction du poids de la dette ne va pas non plus être immédiate. Pour prendre un exemple simple, en supposant que le déficit primaire soit nul, avec un taux d’intérêt à 2% et une croissance nominale à 5%, la réduction du ratio dette/PIB de 100% à 60% prendrait… 17 ans. Avec un taux d’intérêt de 1%, il faudrait quand même 13 ans pour revenir à 60%.

Nous nous réjouissons du fait qu’Emmanuel Macron a décidé de mettre en place une planification énergétique pour réduire les émissions de carbone en ligne avec ses engagements européens. Il serait tout aussi sage de mettre en place une vraie planification budgétaire. S’il ne faut pas laisser la planète en piteux état aux générations futures, il ne faut pas non plus leur léguer une montagne de dettes publiques ayant essentiellement servi à soutenir le confort de cette génération. Si le débat est vif sur la règle budgétaire que l’Union européenne devrait adopter dans le monde d’après Covid-19, il est fort probable que la discipline budgétaire sera imposée aux gouvernements par le marché lui-même via la remontée des taux d’intérêts et le coût de la dette. Dès lors, la réduction de la dette relève plus de la sagesse pratique que de la discipline dogmatique.

Récession économique : quelle ampleur?

Récession économique  : quelle ampleur? 

 

Un papier de Philippe Mabille s’interroge sur l’ampleur de la récession incontournable qui vient (dans la Tribune ,extrait)

 

 

Signe que le pouvoir n’est pas si tranquille, il annonce sans attendre l’élection des nouveaux députés des mesures fortes sur le pouvoir d’achat pour contrer la flambée des prix. Le paquet anti-inflation de Macron 2 suffira-t-il pour amadouer les électeurs sans inquiéter les marchés ?, Pas si sûr que Macron soit sauvé, et nous avec, par le « quoi qu’il en coûte ».

Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, tonne qu’une hausse de 1 point des taux d’intérêt à long terme, c’est 40 milliards d’euros de charges de dette en plus : la capacité d’endettement de Macron s’amenuise donc comme peau de chagrin. Christine Lagarde, qui apparemment ne sera pas Premier ministre (elle est plus utile à Francfort pour freiner la hausse des taux, dit-on) se prépare à se résoudre à durcir le ton et les taux à partir de juillet.

Sur les marchés financiers, ça va secouer, a prévenu Jerome Powell, le puissant patron de la Réserve fédérale américaine qui a déjà enclenché un cycle de durcissement de sa politique monétaire qui « ne se fera pas sans douleur »

Le carnage a commencé pour les spéculateurs en crypto-monnaies qui vivent un véritable krach avec un bitcoin en forte chute (malgré un rebond vendredi) sous les 30.000 dollars.

Au-delà des cryptos, toute la bulle de la tech s’effondre, en particulier les stars du Nasdaq En Californie, la fête est finie, on se prépare déjà pour la récession qui vient et l’on se rappelle l’éclatement de la bulle internet avec nostalgie.

Les marchés financiers redécouvrent une règle d’or de l’investissement : normalement, la valeur des actions est liée au niveau des taux. La fin de l’argent gratuit fait d’autant plus mal que beaucoup d’investisseurs s’étaient endettés à taux zéro pour spéculer. Du coup, c’est la course au cash pour les grands fonds d’investissement.

« Toute la question est de savoir combien de morceaux de viande les banques centrales vont retirer à coup de scalpel du malade pour le soigner de ses excès ? », raconte un grand banquier… Cryptos, SPACs, Fintechs, Private Equity, bourses mondiales : cela va tanguer, dans un monde déstabilisé par la guerre en Ukraine et ses conséquences sur les prix de l’énergie et les chaînes d’approvisionnement.

Le confinement des grandes villes chinoises achève de ternir le tableau alors que le sommet mondial sur le Covid rappelle que sans vaccination mondiale, on n’est pas prêt de sortir de la pandémie.

Bien sûr, comme l’aurait dit, dans une formule restée célèbre, Edith Cresson, la Première Premier ministre évoquée plus haut, dans une petite phrase que lui a attribuée une journaliste de Paris Match : « la bourse ? J’en ai rien à cirer ! » (on s’en souvient d’autant plus que les marchés financiers se sont effondrés dans la foulée – pas à cause d’elle…). Vieille tradition française : de Gaulle n’a-t-il pas affirmé que la politique de la France «  ne se fait pas à la corbeille » ? Mais si, un peu quand même. Pour Emmanuel Macron, ce nouveau contexte sur les marchés va affecter sa capacité à mettre en œuvre la fameuse « planification écologique » qu’il veut piquer au programme de Mélenchon. Financer par un crédit de plus en plus cher un bouclier énergétique et alimentaire pour les Français les plus modestes ne va pas résister longtemps au mur de l’argent et des réalités. Quant à la transition écologique, que ce soit pour l’Etat, les entreprises et les ménages, il va bien falloir trouver quelqu’un pour payer les énormes investissements indispensables pour décarboner nos économies et nos industries. En Russie, les sanctions liées à la guerre en Ukraine promettent de faire plonger le pays en récession dès cette année.

Le contrecoup sera violent pour l’Occident alors que les premières coupures de gaz russe sont en train d’advenir via la Pologne. Au point que Berlin accuse Moscou de mener une guerre énergétique et que l’Union européenne dénonce un « pacte » entre la Russie et la Chine.

Bref, le baptême du nouveau gouvernement Macron II ne sera pas de tout repos. Inflation, récession, démondialisation, réchauffement climatique : on a connu période plus détendue. A l’image de Sagittarius A*, le trou noir découvert cette semaine au centre de la galaxie, qui absorbe toute l’énergie qui l’environne, le monde entre dans un trou noir de la croissance, avec une récession inévitable. Nous sommes peut-être tout simplement en train de sortir, douloureusement, de quinze ans d’aberrations économiques provoquées par la grande crise financière de 2008 ? Celle-ci a engendré un gonflement anormal du bilan des banques centrales qui a masqué l’inflation et soutenu artificiellement le prix des actifs (immobilier, bourses, crypto-actifs).

Quelle régulation du marché européen de l’électricité ?

 

 

L’Europe connaît une crise énergétique qui s’est traduite notamment par une envolée des prix de l’électricité qui a obligé les gouvernements à prendre des mesures. Cela remet-il en cause la libéralisation du marché de l’électricité qui doit relever deux défis majeurs: la décarbonation accélérée et la guerre en Ukraine? Par Charles Cuvelliez et Patrick Claessens, Ecole Polytechnique de Bruxelles, Université de Bruxelles ( dans la Tribune).

 

La libéralisation de l’électricité a-t-elle donc tout faux avec des prix qui augmentaient même avant la guerre en Ukraine, sans compter les craintes de pénurie qui s’annoncent (et qui pèsent pour beaucoup dans les prix qui montent). Alors qu’est-ce que la libéralisation et le couplage des marchés électriques nationaux ou les lois du marché ont apporté (de bien) ? La sûreté de l’approvisionnement, la complémentarité des moyens de production, quand il n’y a pas assez de vent ou de soleil dans un pays (pouvoir alors bénéficier de la capacité de production hydraulique ou du nucléaire des pays voisins), le tout à un prix acceptable puisque l’électricité grâce à ce couplage s’écoule, aux lois de la physique près, des régions où elle est la moins chère vers là où elle est la plus chère. La France bénéficie de cette sécurité malgré la mise à l’arrêt d’une grande partie de son parc nucléaire. La Belgique en a bénéficié quand plusieurs de ses réacteurs étaient aussi à l’arrêt pour examiner les conséquences des défauts de cuve.  Aujourd’hui, deux défis de plus se posent à la libéralisation des marchés qui ne les avait pas prévus : la décarbonation accélérée et la guerre en Ukraine.

La décarbonation mettra plus de sources d’énergie renouvelables et intermittentes dans le marché. Il y aura des acteurs qui sortiront de ce marché parce qu’ils ne peuvent produire de l’électricité à bas carbone tandis que d’autres, actifs dans le renouvelable, vont y entrer. La demande en électricité va aussi changer de profil au fur et à mesure de l’électrification de l’économie pour la décarboner. Des évènements extrêmes comme on le connait aujourd’hui (géopolitique) et connaitra demain (crise économique, épisodes de grand froid, rupture d’approvisionnement) s’inviteront aussi dans l’équation dont le résultat final est une volatilité qui est là pour rester. Que faire pour l’atténuer, la compenser ? Par des sources d’énergie flexibles nouvelles à l’échelle de la seconde, de la journée, de l’année, via du stockage, via d’autres sources d’énergie (batteries, turbines, des stations de pompage hydraulique, des technologies qui renforcent le réseau électrique, meilleur guidage de la demande en électricité). La volatilité des prix actuelle envoie en tout cas aujourd’hui un signal clair d’investissement pour plus de ressources flexibles. Soyons patient. Il ne faudrait pas, dit l’ACER, dans son évaluation de l’efficacité du marché européen de l’électricité, qu’un interventionnisme peut-être nécessaire aujourd’hui mais mal ciblé mette à mal ces signaux.

A court terme, pour éviter que plus d’acteurs encore ne sortent du marché de gros (comme du marché de détail d’ailleurs), ces derniers doivent se prémunir contre cette volatilité qui fera désormais partie de leur modèle d’affaire. C’est déjà le cas via des contrats bilatéraux long terme en dehors des marchés de trading. Mais ces contrats à terme présentent un risque crédit qui exige en retour que ces acteurs apportent des garanties financières (des collatéraux) qui ne sont pas accessibles à tous (tout comme tout le monde n’a pas un bon risque crédit). Les contrats long terme ne sont pas la panacée et n’annihilent pas non plus la volatilité. Dans cette veine, il y a les PPA (Power Purchase Agreements), des achats à long terme d’électricité verte (sur 5 à 20 ans) qui, à cause du risque crédit qu’ils impliquent ne sont offerts qu’à des grands acteurs. Il faut trouver un moyen de les rendre abordables à de plus petits acteurs, jusqu’aux groupements de consommateurs.

Pour plus de décarbonation, faut-il plus d’énergie renouvelable ou faut-il mieux la déployer ? On a surtout favorisé jusqu’ici, dit l’ACER, les capacités de production au point de subventionner les opérateurs ou de leur garantir un revenu mais si, ensuite, on taxe les revenus excessifs des opérateurs, en renouvelable ou pas, c’est reprendre ce qu’on a donné. Il serait plus efficace, dit l’ACER, de se tourner vers des schémas de rémunération orientés sur la mise à disposition de capacité de production plutôt que rémunérer ce qui est produit. D’office, des projets d’investissement iront là où ils sont le plus utiles, là où on manque justement de capacité de production. Les bourses d’électricité devraient aussi prévoir, dit l’ACER, des contrats à long terme à plus de trois ans (uniquement possible en bilatéral), de façon à élargir les moyens de se prémunir contre la volatilité du marché.

Les autres barrières

Il y a aussi, dans les marchés de gros, des barrières à l’entrée qui rendent le marché électrique aujourd’hui inefficace sans que le marché lui-même ne soit en cause : il faut encore améliorer les réseaux électriques, pour y connecter sans souci, des capacités de production renouvelable et des sources d’énergie flexibles à travers des zones géographiques étendues. Il faut mieux développer les instruments pour se prémunir contre les hausses de prix. Des organismes publics pourraient utiliser des instruments financiers pour se protéger contre la volatilité des prix au nom des clients, ce qui remplacerait à la fois le tarif social et le blocage des prix sans en avoir le côté intrusif. Et s’il faut vraiment un blocage des prix, qu’on songe à compenser les producteurs dont le coût de production dépasse le prix imposé.

Que faire dans l’immédiat ?

Ces mesures sont des améliorations structurelles du marché libéralisé tel qu’on le connait, dit l’ACER mais que faire là, maintenant, tout de suite, avec la guerre en Ukraine ? L’ACER a examiné les mesures prises par les États membres et a établi une taxonomie entre les plus interventionnistes (taxer les revenus excessifs des opérateurs ou bloquer les prix) et les moins interventionnistes (support ciblé aux utilisateurs vulnérables). Les mesures les plus interventionnistes sont les plus susceptibles de perturber le marché et d’envoyer de mauvais signaux aux acteurs de marché et aux investisseurs. Ces mesures étant prises, de manière dispersée, pays par pays, comment les transferts d’électricité entre pays vont-ils se réaliser? L’électricité continuera-t-elle bien d’aller des zones où son prix est le moins cher vers celles où il est le plus cher (et diminuer ce dernier au final).

L’ACER distingue, dans sa taxonomie interventionniste, 5 mesures : soutien aux groupes de consommateurs le plus vulnérables avec des chèques énergie, la taxation des profits au-dessus d’un certain niveau et redistribution aux consommateurs, subventionner le coût du gaz consommé par les producteurs pour qu’ils limitent en retour le prix auquel ils proposent leur électricité au marché, bloquer le prix de l’électricité et alors, le pire, segmenter le marché et réguler l’électricité en fonction du marché ou de la technologie, avec des prix et des quotas par filière (nucléaire, gaz…) ? Ceci  aboutirait, dit l’ACER, à une fragmentation qui rendrait la concurrence inefficace avec moins d’acteurs par filière, moins d’équilibrage naturel entre sources de production, en fonction de leur abondance et de leur prix, pour assurer la sécurité d’approvisionnement.

La taxation des profits indus semble le plus juste mais est difficile à mettre en place dit l’ACER. Comment l’évaluer surtout au regard des contrats à long terme d’électricité déjà vendus à des prix plus faibles que ceux du trading ? On va donc taxer des producteurs sur un prix qu’ils n’ont pas pratiqué ? Les subsides, quant à eux, cacheraient les vrais problèmes en ne donnant pas les bons signaux comme la présence de sous-capacités. On ne s’en rendra compte que quand la pénurie se manifeste.

Jouer en amont sur le gaz

Ceci dit, la volatilité des marchés est essentiellement due aujourd’hui à la volatilité du gaz. N’est-ce pas là qu’il faut adresser le problème. On interviendrait ainsi non pas sur les marchés de l’électricité qu’on perturberait moins. Là aussi, des contrats à long terme sécuriseraient l’approvisionnement et rendraient les prix moins volatils. Cela permettrait aussi de sécuriser l’exportation, l’exploitation de nouveaux champs gaziers et la construction d’infrastructures grâce à cet engagement. Le stockage de gaz, bien développé en Europe, est un autre coussin pour la volatilité : on l’a vu avec la Pologne qui ne craint pas la rupture d’approvisionnement en gaz décrété par la Russie.

Plusieurs États membres ont activé le recours au fournisseur de dernier ressort du fait de la sortie du marché d’acteurs alternatifs qui ne pouvaient faire face à la volatilité des marchés. Cela a plutôt bien fonctionné. Aucun consommateur ne s’est retrouvé sur le carreau. Ce qui fonctionne moins bien, c’est l’information au client qui a signé des contrats qui lui ont mis le couteau sur la gorge. Et de citer le cas de contrats qui s’indexe sur les prix de marché J+1. L’ACER évoque l’idée d’une obligation similaire à MiFID pour les clients : c’est une régulation qui impose de n’offrir au client que des produits financiers qu’il est capable de comprendre. Certains contrats d’électricité mériteraient le même traitement. On pourrait même étendre les profils défensif, neutre et agressif pour définir le type de portefeuille boursier aux contrats d’électricité.

Enfin, l’ACER évoque tout ce qu’on peut atteindre en rendant dynamique la demande, qu’elle puisse mieux répondre aux signaux du marché. Las, la faible pénétration des compteurs intelligents rend cette piste encore lointaine mais le temps presse : quand toutes les voitures seront électriques, si tout le monde recharge sa voiture au même moment, il va y avoir un problème. S’il faut agir sur la demande, il faut se tourner vers les gros consommateurs industriels et mieux les rémunérer. Et n’oublions pas que l’économie doit s’électrifier pour se décarboner : la consommation d’un ménage passera de la sorte de 3.500 KWh à 16.000 KWh par an si les transports et le chauffage sont électrifiés. Oui, le temps presse.

Pour l’ACER, rien ne justifie de renverser la table du marché de gros de l’électricité mais on peut l’améliorer. Il ne faut pas avoir honte de l’admettre : l’impact financier de la décarbonation accélérée voulue par l’Europe (et c’est tant mieux) impose d’adapter sa copie.

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Pour en savoir plusACER’s Final Assessment of the EU Wholesale Electricity Market Design, April 2022

Présidentielle : quelle légitimité démocratique pour Macron !

Présidentielle : quelle légitimité démocratique  pour Macron ! 

Un cri de révolte pour protester contre le caractère d’illégitimité d’élection de Macron ; un cri qui peut s’entendre mais qui mériterait d’être encore approfondi sur ce qu’on entend par illégitimité. Indiscutablement, l’élection de Macron est juridiquement légitime mais le problème c’est que politiquement, elle ne l’est pas.

En effet, le reproche essentiel fait à Macron, c’est son ascension politique jusqu’au plus haut niveau sans jamais avoir eu le moindre passé social, la moindre expérience collective sociétale, la moindre représentativité collective.  Macron est un bourgeois technocrate choisi et financé par les plus grandes entreprises. Cela évidemment pour favoriser un projet de société de marché.

Les Français sont une majorité à le considérer comme moralement et politiquement illégitime. Pour preuve surtout le premier parti de France de 40 à 50 % d’abstention, de non-inscrits ou de mal inscrits. Même si par ailleurs juridiquement son élection n’est pas contestable . En fait Macron recueille seulement 15% des votants potentiels au premier tour. 

 

tribune

« J’ai accepté que mon candidat n’ait pas passé le premier tour. Et je me suis tournée vers celui qui correspondait le mieux à mes attentes parmi les deux finalistes, estime Mélanie Tellaa. C’est un choix légitime, un vote d’adhésion au regard du processus électoral de la Ve République. [...] Ce n’est pas un choix par défaut. »

Je ne suis personne mais je pense représenter une certaine opinion. Emmanuel Macron vient d’être réélu et je suis particulièrement choquée des réactions des personnalités politiques.

Je fais partie des gens qui ont voté pour lui. Pas au premier tour. J’ai voté pour lui au second tour. Et je voudrais m’inscrire en faux contre tout ce qui se dit en ce moment même. Non, ce n’est pas un choix par défaut. Oui, ce choix que j’ai fait et que des millions de gens ont fait, ce choix est un choix démocratique.

J’ai lu les programmes. J’ai évalué les candidats selon leur adéquation à mes principes, à mes valeurs et j’ai évalué leur capacité à faire des propositions réalistes. Tout ça a été le fruit de recherches personnelles, de réflexions. Et oui, j’ai choisi de voter pour Emmanuel Macron au deuxième tour. J’ai accepté que mon candidat n’ait pas passé le premier tour. Et je me suis tournée vers celui qui correspondait le mieux à mes attentes parmi les deux finalistes.

C’est un choix légitime, un vote d’adhésion au regard du processus électoral de la Ve République. Je rejette les accusations d’illégitimité démocratique.

Je refuse que les candidats qui n’ont pas conquis assez de voix pour passer au second tour osent parler de vote par défaut. Je regrette aussi qu’ils évoquent le vote « barrage » avec mépris. Car ce vote barrage n’est pas méprisable et n’est pas moins fort que le vote d’adhésion : c’est un vote d’adhésion aux valeurs de la République. C’est un vote contre l’extrême-droite dont le discours est banalisé.

Mais conforter le désespoir de certains citoyens qui voyaient dans le choix à faire un choix du pareil au même, c’est oublier que Marine Le Pen est la candidate d’un parti dont les propositions sont pour beaucoup contraires aux traités européens et à la Constitution française. Ses mesures visent à diviser les Français selon leurs origines ou leurs religions. Lutter contre cela est tout à fait légitime.

Je regrette que ceux qui essuient encore leur défaite n’arrivent pas à relever la tête pour respecter ces électeurs dont je fais partie et qui ont participé à la réélection du président de la République. Je regrette que l’on nie mon choix. Je regrette que l’on compare les dangers de l’extrémisme à un choix républicain.

Et je leur dis à tous : l’offre politique existe. Chacun doit s’en saisir et prendre ses responsabilités. Pour ma part, c’est clair. J’ai voté Macron et je l’ai fait exprès.

Mélanie Tellaa, Angresse (Landes)


« J’ai accepté que mon candidat n’ait pas passé le premier tour. Et je me suis tournée vers celui qui correspondait le mieux à mes attentes parmi les deux finalistes, estime Mélanie Tellaa. C’est un choix légitime, un vote d’adhésion au regard du processus électoral de la Ve République. [...] Ce n’est pas un choix par défaut. »(tribune d’un lecteur du « Monde »)

 

Je ne suis personne mais je pense représenter une certaine opinion. Emmanuel Macron vient d’être réélu et je suis particulièrement choquée des réactions des personnalités politiques.

Je fais partie des gens qui ont voté pour lui. Pas au premier tour. J’ai voté pour lui au second tour. Et je voudrais m’inscrire en faux contre tout ce qui se dit en ce moment même. Non, ce n’est pas un choix par défaut. Oui, ce choix que j’ai fait et que des millions de gens ont fait, ce choix est un choix démocratique.

J’ai lu les programmes. J’ai évalué les candidats selon leur adéquation à mes principes, à mes valeurs et j’ai évalué leur capacité à faire des propositions réalistes. Tout ça a été le fruit de recherches personnelles, de réflexions. Et oui, j’ai choisi de voter pour Emmanuel Macron au deuxième tour. J’ai accepté que mon candidat n’ait pas passé le premier tour. Et je me suis tournée vers celui qui correspondait le mieux à mes attentes parmi les deux finalistes.

C’est un choix légitime, un vote d’adhésion au regard du processus électoral de la Ve République. Je rejette les accusations d’illégitimité démocratique.

Je refuse que les candidats qui n’ont pas conquis assez de voix pour passer au second tour osent parler de vote par défaut. Je regrette aussi qu’ils évoquent le vote « barrage » avec mépris. Car ce vote barrage n’est pas méprisable et n’est pas moins fort que le vote d’adhésion : c’est un vote d’adhésion aux valeurs de la République. C’est un vote contre l’extrême-droite dont le discours est banalisé.

Mais conforter le désespoir de certains citoyens qui voyaient dans le choix à faire un choix du pareil au même, c’est oublier que Marine Le Pen est la candidate d’un parti dont les propositions sont pour beaucoup contraires aux traités européens et à la Constitution française. Ses mesures visent à diviser les Français selon leurs origines ou leurs religions. Lutter contre cela est tout à fait légitime.

Je regrette que ceux qui essuient encore leur défaite n’arrivent pas à relever la tête pour respecter ces électeurs dont je fais partie et qui ont participé à la réélection du président de la République. Je regrette que l’on nie mon choix. Je regrette que l’on compare les dangers de l’extrémisme à un choix républicain.

Et je leur dis à tous : l’offre politique existe. Chacun doit s’en saisir et prendre ses responsabilités. Pour ma part, c’est clair. J’ai voté Macron et je l’ai fait exprès.

Mélanie Tellaa, Angresse (Landes)

Quelle évolution du droit du travail depuis Macron ?

Quelle évolution du droit du travail depuis Macron  ?

 

Les ordonnances votées en début de quinquennat ont ouvert la voie à une individualisation de la négociation, affaiblissant ainsi le rôle des syndicats. Par David Sanson, ENS de Lyon

 

Les ordonnances Macron de 2017 ont profondément modifié le droit du travail en renforçant le « dialogue social » à l’échelle de l’entreprise, faisant de celle-ci le lieu central de la production des normes d’emploi.

Ce texte entérinait ainsi un changement inédit de hiérarchie des normes dans le droit du travail, en instaurant la primauté des accords d’entreprise sur les accords collectifs de branche professionnelle. Cette transformation radicale permet de faire de la loi non plus un outil de protection des travailleurs, mais, avant tout, un moyen de sécuriser la compétitivité des entreprises.

Cinq ans plus tard, nous vous proposons de revenir sur l’esprit, les raisons et les répercussions inédites de ces mesures phares qui ont fortement marqué le début du quinquennat du président Emmanuel Macron.

 

Rappelons tout d’abord que si ces trente dernières années ont été marquées en France par la consécration du « dialogue social » comme forme légitime des relations sociales en entreprise, la pratique de la négociation collective à l’échelle des organisations a été, pendant très longtemps, quasi inexistante en France.

En effet, ce sont seulement les lois Auroux de 1982 qui ont, pour la première fois, rendu obligatoires les négociations collectives en entreprise. Depuis, de nombreuses réformes législatives se sont succédé, toutes animées par une volonté d’étendre le périmètre et le contenu de ces négociations décentralisées.

Le développement d’un dialogue local est, depuis lors, présenté par le législateur comme une solution privilégiée pour désamorcer les velléités contestataires des syndicats et des salariés, qui reposeraient avant tout sur une incompréhension des réalités économiques et des contraintes managériales auxquelles sont confrontées leurs directions.

Derrière cette promotion d’un idéal démocratique de coopération entre les salariés et leur management, ces transformations de la législation attestent d’une réalité plus sombre. Notamment, ces mesures ont commencé récemment à remettre en question le « principe de faveur » sur lequel le droit du travail français est fondé afin de mieux protéger les travailleurs.

Selon ce principe historiquement ancré, un accord d’entreprise ne pouvait exister que s’il était plus favorable, pour les salariés, aux règles négociées dans la convention collective ou les accords de branche, afin d’éviter une course au « moins-disant » social.

La succession des lois Fillon de 2004 et Bertrand de 2008 sont les premières brèches symboliques qui ont ouvert progressivement des possibilités de dérogation aux conventions collectives pour les accords d’entreprise, mais seulement sur certains critères et dans certaines conditions. Plus récemment, les lois Rebsamen de 2015El Khomri de 2016 puis, surtout, les ordonnances Macron, en 2017, parachèvent cette (r)évolution discrète.

Les ordonnances Macron, tout particulièrement, ont des implications d’une ampleur sans précédent : elles permettent désormais de renégocier complètement les clauses des conventions collectives dans tous les domaines, en actant la primauté aux accords d’entreprise sur les accords collectifs de branche, y compris en cas d’accords moins favorables pour les travailleurs.

En inversant ainsi la hiérarchie des normes, ces décrets ont alors ouvert, pour la première fois, la possibilité d’une individualisation des négociations collectives à l’échelle des entreprises.

Si les ordonnances Macron ne défendent donc pas des idées nouvelles, elles actent cependant l’aboutissement concret de plus de trente ans de « tournant entrepreneurial » du droit du travail : en déconsidérant les notions de classes et de subordination qui en constituaient le fondement, elles interprètent ce droit non plus comme un outil de protection des travailleurs, mais comme un moyen de sécuriser la compétitivité des entreprises.

En ce sens, ces multiples réformes ont surtout permis de relayer les doléances patronales, fidèlement reprises dans les ordonnances Macron, qui, en plus de déplafonnement des indemnités prud’homales en cas de licenciements abusifs (hors cas de harcèlement), facilitent par exemple les procédures de licenciements économiques tout en flexibilisant davantage les accords de maintien dans l’emploi.

C’est également dans cette perspective que ces ordonnances viennent bouleverser les modalités des négociations collectives dans de multiples domaines. En particulier, le fonctionnement des instances de représentation du personnel (IRP) a été profondément remanié.

La fusion des trois instances traditionnelles (CE, CHSCT, DP) en une seule (le Comité social et économique, ou « CSE ») est l’une des mesures les plus emblématiques de ces décrets : présentée comme une manière de simplifier le dialogue dans l’entreprise, cette refonte contraint en réalité fortement les représentants des salariés, en diminuant leurs ressources, et en limitant la portée réelle de leur prérogatives.

Soulignons en ce sens la réduction du nombre de représentants du personnel - jusqu’à 50 % - pour une charge de travail plus importante, ou bien encore le délai raccourci pour les possibilités de recours à des experts extérieurs (dont le financement, jusqu’alors aux frais de l’employeur, doit désormais être pour partie pris en charge sur le budget du CSE).

Notons que la suppression des CHSCT ôte d’ailleurs aux représentants des salariés l’un des dispositifs qui leur était le plus favorable dans le jeu des négociations. Enfin, les modalités même de fonctionnement du CSE peuvent être directement négociées au cas par cas, laissant ainsi toute latitude aux entreprises de définir leurs propres modalités de négociations et faisant dès lors des droits syndicaux eux-mêmes un enjeu (central) de la négociation d’entreprise. C’est ainsi aux représentants des salariés de négocier… leurs propres ressources pour négocier.

Cette vision contractuelle des relations professionnelles, qui passe complètement sous silence la nature asymétrique des liens de subordination propre aux relations hiérarchiques, se trouve en décalage complet avec la réalité des rapports de force que les salariés et leurs représentants peuvent aujourd’hui construire face à leur direction.

La fragilisation des protections collectives confère alors au patronat une position particulièrement favorable pour imposer sans contreparties le contenu et l’issue des négociations. Avec le renversement du « principe de faveur » qui fragilise le droit des salariés, les ordonnances Macron offrent en effet aux équipes de direction des outils supplémentaires d’individualisation et de flexibilisation du travail et des rémunérations, comme l’ont récemment illustré plusieurs enquêtes approfondies.

De façon plus subtile que les anciennes pratiques de répression directe, ces outils du dialogue social peuvent aussi être investis comme des moyens habiles de sélectionner les « bons » représentants des salariés et les « bonnes formes » de contestation, en encourageant notamment un syndicalisme de concertation, plus consensuel et conciliant. À ce titre, les ordonnances Macron consacrent les efforts des représentants du patronat et du législateur pour, comme le soulignait le sociologue Étienne Penissat, « institutionnaliser, légitimer et soutenir un syndicalisme « gestionnaire » compatible avec les exigences du capitalisme contemporain », tout en marginalisant, de fait, les postures syndicales contestataires.

Alors que l’esprit de ces réformes tend à discréditer toute notion de conflits et de subordination, ces évolutions nous invitent ainsi, au contraire, à réfléchir aux manières dont les représentants des salariés peuvent continuer à bâtir un rapport de force favorable à la défense des travailleurs, dans un contexte où l’asymétrie sociale avec leur employeur se trouve renforcée par les nouvelles règles de négociations collectives d’entreprise.

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Par David Sanson, Professeur régulier (eq. MCF), Université du Québec à Montréal (UQAM), ENS de Lyon.

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

Quelle politique salariale pour les fonctionnaires ?

Quelle politique salariale pour les fonctionnaires ?

 

Les trois directeurs des ressources humaines, Emilie Agnoux, Noam Leandri et Johan Theuret présentent, dans une tribune au « Monde », quelques propositions, en faveur d’une politique salariale juste, ce qui rendrait la fonction publique plus attractive.

Un article intéressant mais qui évidemment fait l’impasse sur l’adaptation du nombre de fonctionnaires aux véritablex tâches régaliennes et donc sur l’articulation entre qualitatif et quantitatif NDLR

 

Tribune.

Les politiques de rémunération des fonctionnaires ont principalement évolué selon deux objectifs depuis le début des années 2000, surtout depuis 2007 avec la révision générale des politiques publiques (RGPP). D’une part, les évolutions salariales ont été couplées à la maîtrise des dépenses publiques. D’autre part, la volonté a été de transformer l’architecture de la rémunération des fonctionnaires en allant d’une rémunération d’une fonction publique de la carrière, tenant compte du grade, vers une fonction publique de l’emploi, orientée vers le métier.

Le premier objectif a été rempli par le gel de la valeur du point d’indice pendant de très nombreuses années, ce qui a notamment entraîné une perte de pouvoir d’achat pour les agents publics et soulève aujourd’hui de réels problèmes d’attractivité des métiers des services publics. Le second objectif est un quasi-échec. La complexité des mécanismes de rémunération rend l’architecture peu lisible, peu attractive et peu incitative, dès lors que les classifications par métier – répertoire des métiers dans la fonction publique territoriale (FPT) et dictionnaire interministériel des métiers et des compétences dans la fonction publique de l’Etat (FPE) – se superposent aux grades sans être couplées aux enjeux salariaux.

Ces effets provoquent une insatisfaction salariale. Ainsi, 41 % des agents publics s’estiment mal payés contre 35 % des salariés du secteur privé. Pourtant, le salaire moyen dans la fonction publique est proche du salaire moyen dans le secteur privé (2 320 euros nets contre 2 424 euros nets dans le secteur privé). Mais l’existence de très fortes disparités entre fonctions publiques, entre catégories et entre les femmes et les hommes exacerbent l’insatisfaction salariale.

A ces disparités s’ajoutent une complexité technique, une perte de pouvoir d’achat (partiellement compensée par les déroulements de carrière) et une faible dynamique au regard des qualifications et expériences acquises. Certes, ces effets ont essayé d’être corrigés par des mesures sectorielles (Ségur de la santé, Grenelle de l’éducation, Beauvau de la sécurité…) ou par des dispositifs spécifiques (garantie individuelle du pouvoir d’achat, part grandissante du régime indemnitaire, dont le montant de cotisation pour la retraite est plafonné à 20 % du traitement indiciaire).

Ces mesures sectorielles et ces dispositifs correctifs renforcent les inégalités entre agents et l’illisibilité des rémunérations. Elles n’ont par ailleurs pas évité le tassement des grilles et la démotivation qui s’ensuit. Le tassement des grilles est provoqué par les augmentations du smic, qui progresse plus vite que le salaire moyen de la fonction publique. Ainsi, l’effet de rattrapage des hausses du smic par les grilles indiciaires fait que les quatre premiers échelons de la catégorie C et les premiers échelons de la catégorie B sont rémunérés au smic, soit plus de 600 000 fonctionnaires.

Ukraine : quelle baisse de croissance pour l’Europe

 Ukraine : quelle  baisse de croissance pour l’Europe ? 

L’OCDE estime que la guerre en Ukraine va affecter de façon significative la croissance de l’Europe. Initialement la perspective de croissance en 2022 avait été fixée à 4 %. Le conflit en Ukraine pourrait en faire perdre la moitié environ.

En cause notamment le gonflement de l’inflation initialement attendue à 5 % en moyenne et qui pourrait atteindre 7 % environ. De quoi affecter de façon très sérieuse le pouvoir d’achat des ménages, la consommation et l’activité générale. En effet les prix des matières premières et de l’énergie était déjà la hausse mais la guerre a encore nourri l’augmentation non seulement de l’industrie manufacturière mais aussi de l’industrie alimentaire

L’invasion russe de l’Ukraine pourrait coûter «un point à un point et demi» de croissance à l’Europe, en fonction de la durée du conflit, tandis que l’inflation pourrait encore augmenter «de deux points à deux points et demi», a estimé la cheffe économiste de l’OCDE, Laurence Boone, auprès du Journal du dimanche. Si la Française précise que «le degré d’incertitude est élevé» quant à ces estimations, elle considère qu’il faudra mener «une réflexion en profondeur concernant les sujets fondamentaux, dont la sécurité alimentaire, énergétique et numérique, ainsi que l’organisation des échanges commerciaux».

Interrogée sur la hausse des prix généralisés dans la foulée de la guerre en Ukraine, elle a estimé que le conflit «pousse à la hausse les anticipations de prix des céréales et des engrais dont la Russie et l’Ukraine sont exportatrices», et qu’il «peut affecter non seulement les récoltes de cette année, mais peut-être aussi celles de 2023».

Le choc n’est pour autant «pas comparable à celui subi dans les années soixante-dix, parce que les institutions sont différentes». «L’inflation restera élevée cette année, mais pourrait commencer à ralentir en 2023, en fonction de l’évolution de la guerre», a-t-elle souligné. En réponse, elle préconise d’«élaborer des politiques budgétaires ciblées pour aider les ménages et les entreprises à passer le cap».

«Les restrictions aux exportations doivent quant à elles être évitées – elles n’ont jamais donné de bons résultats par le passé, au contraire», a-t-elle encore plaidé. «Les dispositifs budgétaires ciblés aideront la politique monétaire en permettant d’ancrer les anticipations inflationnistes, tout en préservant le pouvoir d’achat des plus vulnérables, sans mettre en danger la transition énergétique».

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