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Quelle stratégie de coopération économique en Europe

Quelle stratégie de coopération économique en Europe

« Pour Airbus, comme pour Eurocopter et MBDA, la France a choisi le modèle de la ‘Best team’. Trois excellentes décisions qui ne furent pas si faciles à prendre. Trois excellentes décisions dont la France et l’Europe récoltent aujourd’hui les fruits : Airbus numéro 1 mondial des avions commerciaux, une position de leader mondial dans les hélicoptères et les missiles » (Antoine Bouvier, ancien directeur de la stratégie d’Airbus, ancien PDG de MBDA dans La Tribune)

« Pour Airbus, comme pour Eurocopter et MBDA, la France a choisi le modèle de la ‘Best team’. Trois excellentes décisions qui ne furent pas si faciles à prendre. Trois excellentes décisions dont la France et l’Europe récoltent aujourd’hui les fruits :…

Merci Président Trump ! Oui, un grand merci. Combien d’années avons-nous perdues à argumenter entre Européens sur les bénéfices et les limites de la coopération européenne ! En quelques semaines un consensus a émergé. Les Européens déplorent, à juste titre, la fragmentation de l’industrie de défense, ils appellent, à juste titre, à plus de coopération. Il y a encore loin de la coupe aux lèvres, mais c’est un pas dans la bonne direction.

De quelle coopération parlons-nous ?.

Le F-35 est un modèle de « coopération à l’américaine » : achat sur étagères, quelques contrats de sous-traitance et des réassurances militaires. Lockheed Martin, maître d’œuvre du F-35, emploie la merveilleuse expression « Global partnership ».

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En Europe, deux approches s’opposent : « Best athlete » et « Best team ». Le « Best athlete », est convaincu, certainement à juste titre, qu’il a le meilleur produit et qu’il possède toutes les compétences. Il peut être tenté de faire cavalier seul et de proposer un modèle de coopération s’inspirant de la« coopération à l’américaine » ; mais sans les réassurances militaires que seuls les Etats-Unis, malheureusement, peuvent aujourd’hui apporter.

La « Best team », est une vraie coopération. Une coopération entre partenaires, il n’y a pas un maître d’œuvre et des sous-traitants. Évidemment c’est plus compliqué. Certains programmes en coopération ont eu des débuts difficiles, mais ce sont révélés, comme le Tigre ou l’A400M, des produits exceptionnels.

Entre « Best athlete » ou « Best team », comment choisir ?

Si c’est un sport individuel, comme le saut à la perche, le « Best athlete » s’impose. Si c’est un sport collectif comme le rugby, la « Best team » fera le job. Le terrain de jeu, c’est l’Europe, c’est le Monde. C’est donc un sport collectif que joue l’équipe d’Europe. Et au rugby, chacun a sa place : le grand costaud, le petit qui court vite… à l’image de la diversité européenne. Et, bien sûr, le « Best athlète » a toute sa place dans la « Best team ». L’Europe des compétences ne peut être l’Europe d’un seul pays.

Avions commerciaux, hélicoptères et missiles… En 1970, à la création d’Airbus, la France aurait pu revendiquer la place de « Best athlète », de même en 1992 à la création d’Eurocopter et en 2001 à la création de MBDA. Mais pour Airbus, comme pour Eurocopter et MBDA, la France a choisi le modèle de la « Best team ». Trois excellentes décisions qui ne furent pas si faciles à prendre. Trois excellentes décisions dont la France et l’Europe récoltent aujourd’hui les fruits : Airbus numéro 1 mondial des avions commerciaux, une position de leader mondial dans les hélicoptères et les missiles.

Et progressivement, ces trois « Best teams » sont devenues trois « Best athletes », champions européens intégrés, capables de se battre avec succès contre leurs grands concurrents non européens. Capables aussi de protéger la souveraineté française, en particulier la dissuasion nucléaire.

Dans d’autres secteurs, l’équipe européenne ne s’est pas formée. Nous avons en France avec le Rafale un avion de combat exceptionnel. Mais force est de constater que les Etats-Unis (F-16 et F-35) ont conquis environ la moitié du marché européen. Les trois avions de combat européens, le Rafale, l’Eurofighter-Typhoon et le Saab Gripen se partagent l’autre moitié. Nous aurions fait mieux ensemble.

Indépendance et autonomie stratégique

On cite souvent le Général de Gaulle qui a construit les solides fondations de notre posture de défense : indépendance et dissuasion. Le Général était un esprit visionnaire qui bousculait les idées reçues. Le Général a imposé en 1963 le Traité de l’Élysée de réconciliation franco-allemande. Qu’imposerait-il aujourd’hui ? Nul n’est légitime pour parler à sa place.

Mais, pour rester fidèle à cet impératif d’indépendance, sans doute faudrait-il, aujourd’hui aussi, bousculer quelques idées reçues et ne pas craindre d’aborder de face des questions qui nous feraient sortir de notre zone de confort. Comment s’articulent l’autonomie stratégique française et européenne ? Comment garantir la taille critique, condition d’une industrie de défense efficace et innovante ? Comment organiser, sur le modèle de MBDA, une dépendance mutuelle « Share it or lose it » qui garantit l’indépendance de chacun des pays partenaires ? Comment les programmes en coopération peuvent-ils contribuer à la convergence des besoins capacitaires des armées européennes ?

Enfin, pense-t-on sérieusement que l’impératif de préférence européenne pourra être mis en œuvre si les grands programmes structurants européens ne sont pas confiés par les États à des « Best teams » compétentes, volontaristes et ayant appris les leçons du passé ?

Quelle politique face au réchauffement climatique

Quelle politique face au réchauffement climatique

 

En 2024, la température mondiale a excédé d’un peu plus de 1,5 °C le niveau de l’ère préindustrielle, mais on ne peut pas en déduire que la cible de l’accord de Paris a été dépassée. Il faudrait que le thermomètre affiche un dépassement sur une période plus longue pour l’affirmer. Pour autant, examiner les causes de ce pic de température nous en apprend beaucoup sur les moyens d’action à mettre en œuvre face au réchauffement climatique. Le service Copernicus et les autres centres d’observation de la température mondiale viennent de le confirmer. 2024 est bien l’année la plus chaude jamais enregistrée. Ce qui n’était qu’anticipation est devenu réalité : la hausse de la température mondiale relativement à l’ère préindustrielle a légèrement excédé 1,5 °C en 2024. Chiffres clés de 2024 pour le climat, selon les dernières observations du service européen Copernicus.  Il serait toutefois erroné de déduire, à partir de l’observation d’une seule année, que le monde a dépassé la cible de 1,5 °C visée par l’accord de Paris. En cause, non pas l’incertitude des mesures, aujourd’hui d’excellente qualité, mais la variabilité à court terme du climat. D’une année à l’autre, la température moyenne fluctue en fonction de multiples paramètres. C’est pourquoi le Groupement intergouvernemental des experts sur le climat (GIEC) préconise d’utiliser un indicateur basé sur des périodes décennales pour juger du niveau du réchauffement global. Dans tous les cas, il est crucial de comprendre les raisons de ce pic de température : les actions à mener face au réchauffement planétaire en dépendent.

 

par Christian de Perthuis
Professeur d’économie, fondateur de la chaire « Économie du climat », Université Paris Dauphine – PSL dans The Conversation 
À son article 2, l’accord de Paris engage la communauté internationale à limiter le réchauffement relativement à l’ère préindustrielle « nettement en dessous de 2 °C » et à « poursuivre l’action » pour atteindre la cible de 1,5 °C. Pour autant, il n’indique pas quel indicateur utiliser pour se situer par rapport aux objectifs.

Pour évaluer le réchauffement global, l’Organisation météorologique mondiale (OMM), une agence des Nations unies basée à Genève, utilise les informations issues de six organisations disposant de systèmes d’observations et de bases de données historiques sur les températures mondiales.

Trois sont basées aux États-Unis : l’agence publique NOOA en charge de l’observation des océans et de l’atmosphère, le GISS qui dépend de la NASA et le Berkeley Earth, une association de scientifiques à but non lucratif.

Au Japon, la base de donnée JRA-55 est gérée depuis le service de la Météorologie nationale, comme l’est la base de donnée HadCRUT5 du Hadley Center au Royaume-Uni.

Enfin, le programme européen Copernicus gère la base de données ERA5.

Sur la période la plus récente, la dispersion des estimations de la température moyenne dans le monde est très faible, mais elle augmente à mesure que l’on remonte dans le temps. Sur les périodes passées, on disposait en effet de beaucoup moins d’observations, qui n’avaient ni la précision ni la fiabilité de celles fournies aujourd’hui par les satellites.

Cela pose la question de la référence historique à prendre en compte pour calculer le réchauffement relativement à l’ère préindustrielle. Face à ce problème, le GIEC préconise de considérer la période 1850-1900 comme « proxy » pour représenter la période préindustrielle.

Dans son 6ᵉ rapport d’évaluation, il estimait à 1,1 °C la montée des températures entre 1850-1900 et la décennie 2010. Ce chiffre a été actualisé à 1,2 °C pour la décennie 2014-2023 dans l’étude Indicators of Global Climate Change 2023.
Réchauffement global par rapport à la période de référence 1850-1900. OMM, Fourni par l’auteur
L’OMM reprend ces travaux pour consolider les observations fournies par les six centres de recherche, ce qui lui permet de produire l’estimation de référence pour chaque année. L’estimation de 2024, qui intervient à la suite du record mondial de chaleur de 2023, fait apparaître un pic sur la courbe de la température mondiale sans guère d’équivalent dans le passé.

Sur quelle tendance sommes-nous ?
Pour juger si la cible de 1,5 °C a été franchie, le GIEC préconise d’utiliser des moyennes décennales plutôt que des moyennes annuelles.

Une façon de suivre cette recommandation serait d’attendre de connaître les températures de la décennie 2024-2033 pour interpréter, a posteriori, le résultat de l’année 2024. C’est une méthode sans risque, mais pas très utile pour guider l’action climatique.

Une autre voie consiste à repérer les facteurs structurels qui conditionnent l’évolution tendancielle des températures, au-delà de leurs oscillations de court terme.

Dans son bulletin provisoire sur l’état du climat en 2024, l’OMM recommande, pour y parvenir, de coupler les travaux des scientifiques utilisant les modèles climatiques et l’identification des facteurs anthropiques du réchauffement avec l’approche statistique.

L’approche statistique consiste à identifier, à partir des données historiques de température, des tendances qui gomment les effets de la variabilité du climat à court terme. En utilisant un modèle linéaire, cette tendance prend la forme d’une droite, autour de laquelle vont osciller les observations annuelles.

Au cours du XXe siècle, la hausse de la température moyenne n’a pas été continue. Du fait de ces discontinuités, les tendances qu’on peut calculer sur le très long terme ne sont pas statistiquement significatives. En revanche, la méthode statistique s’avère plus robuste pour la période démarrant en 1950. Nous l’avons appliquée à quatre sous-périodes démarrant respectivement en 1950, 1970, 1990 et 2005.
Met Office/calculs de l’auteur, Fourni par l’auteur
L’ajustement statistiquement le plus significatif (voir les coefficients dans le tableau) concerne la période de 1970 à 2024. Sur cette période, le réchauffement s’accroît de 0,2 °C par décennie. Si la tendance se poursuit, la cible de 1,5 °C sera atteinte en 2034. Le pic de température de 2024 se situe donc nettement au-dessus du réchauffement tendanciel, qui n’est que de 1,3 °C en 2024.

Mais cette interprétation doit être confrontée à un autre résultat intriguant de la méthode statistique : la tendance du réchauffement semble s’accélérer à mesure que le temps s’écoule.

En appliquant la même méthode statistique à la période 1990 à 2024, la tendance du réchauffement passe de 0,2 °C à 0,23 °C par décennie et même à 0,29 °C sur les vingt dernières années. Si cette tendance de 0,29 °C se poursuivait, la limite de 1,5 °C serait alors atteinte dès 2029. Autrement dit : demain !
Augmentation des températures moyennes dans le monde par rapport à 1850-1900. Hadley Center, Fourni par l’auteur
Au total, la méthode statistique écarte l’idée que l’on serait déjà entré dans un climat où le réchauffement excède 1,5 °C, malgré le pic de températures observé en 2024. Elle nous alerte en revanche sur la proximité de l’atteinte de cette limite.

Les observations historiques laissent enfin un doute sur la tendance récente du réchauffement, qui pourrait être en phase d’accélération. Est-ce vraiment le cas ?

Pour y voir plus clair, il convient de compléter la méthode statistique par les analyses des climatologues, à l’instar de ce que préconise l’OMM.

D’où vient le pic des températures ?
L’un des principaux facteurs de variabilité du climat à court terme est le mécanisme de « l’oscillation australe » qui voit se succéder des épisodes dits El Niño qui accentuent le réchauffement et des épisodes La Niña qui jouent en sens inverse.

Ce mécanisme a joué en 2023 et 2024. Un épisode El Niño est apparu au printemps 2023, pour s’atténuer progressivement à partir de la fin de l’hiver 2024. D’une intensité moindre que celui ayant contribué au record de température de 2016, cet épisode ne permet pas, à lui seul, d’expliquer le pic des températures des deux dernières années, d’après l’analyse de la majorité des climatologues. Il faut donc chercher d’autres explications.

Les émissions de CO₂ sont en phase de nette décélération sur les quinze dernières années, sans rebond observé en 2024. Si elles restent le premier facteur de réchauffement d’origine anthropique, elles ne peuvent pas avoir contribué à l’emballement du thermomètre sur les années récentes.

En revanche, les rejets d’aérosols soufrés ont probablement joué un rôle significatif. Les rejets de ces polluants à courte de durée de séjour dans l’atmosphère refroidissent le planète. Or le durcissement des réglementations – principalement sur le transport maritime international et les centrales thermiques en Chine – a fait reculer ces émissions. Ce recul contribue au réchauffement à court terme, dans des proportions qui font l’objet de discussion parmi les scientifiques.

Un autre facteur explicatif est à chercher du côté des rétroactions climatiques. Dans son analyse d’octobre 2024, l’OMM souligne que le stock atmosphérique de CO2 continue de progresser à un rythme inchangé alors que ses émissions ralentissent. Elle impute cette discordance à l’affaiblissement des puits de carbone provoqué par le réchauffement : sécheresses, augmentation des maladies et de la mortalité des arbres, extension des feux de forêt…

Des rétroactions climatiques sont également à craindre du côté du méthane. Du fait de l’accroissement très rapide de son stock atmosphérique, la contribution du méthane au réchauffement a augmenté sur la période récente, nous rappelle l’OMM. Or, l’augmentation de son stock ne peut s’expliquer par les seules émissions anthropiques. Elle est amplifiée par le réchauffement qui accentue la production de méthane dans les zones humides et risque d’accélérer celle provoquée par la fonte du permafrost.

À lire aussi : Ces émissions de méthane faciles à éviter pour lutter contre le changement climatique

Un facteur additionnel est la réduction des rejets d’oxydes d’azote, un polluant dangereux pour la santé mais qui, une fois dans l’atmosphère, accélère la destruction du méthane.

Les implications pour l’action climatique
Si le pic de température de 2024 ne nous a pas fait dépasser la cible de 1,5 °C, l’analyse de ses causes est utile pour renforcer l’action face au réchauffement planétaire.

L’accélération des réductions d’émissions de CO2 reste la première priorité, mais elle ne suffira pas. Il faut également agir sur les autres facteurs à l’origine de l’envolée récente du thermomètre.

Les stratégies d’atténuation doivent mieux prendre en compte l’ensemble des rejets atmosphériques et leurs interactions complexes. Réduire les rejets d’aérosols et d’oxydes d’azote est une priorité sanitaire, mais cela contribue aussi à… réchauffer à court terme la planète.

Pour atténuer ce réchauffement indirect, l’une des voies les plus sûres est d’agir sur les émissions de méthane, dont la baisse provoquerait un effet de refroidissement rapide. Cela est, du reste, écrit en toutes lettres dans le « Résumé pour décideurs » du 6e rapport du GIEC :

« Des réductions fortes, rapides et durables des émissions de CH4 limiteraient également l’effet de réchauffement résultant de la diminution de la pollution par les aérosols. »

Autre implication : la prise en compte des rétroactions climatiques. En effet, le réchauffement freine l’action des puits de carbone naturels et peut même les transformer en sources d’émissions supplémentaires (par exemple via les feux de forêt ou le dépérissement des arbres). Il intensifie également les rejets de méthane par les milieux naturels.

La prise en compte de ces rétroactions climatiques rend quelque peu caduque la distinction traditionnelle entre atténuation et adaptation au changement climatique. La protection des puits de carbone naturels implique ainsi d’adapter les systèmes agricoles et forestiers au réchauffement pour renforcer leur résilience et accroître leur capacité à absorber le carbone de l’atmosphère et à le stocker de façon durable.

Sans de telles adaptations des activités reposant sur l’utilisation du « carbone vivant », les seules réductions des émissions de « carbone fossile » ne suffiront pas à nous remettre sur les rails de scénarios en phase avec les objectifs d’atténuation de l’accord de Paris.

Quelle Syrie et quel Proche-Orient ?

 Quelle Syrie et quel Proche-Orient 

Après 24 ans de pouvoir, Bachar Al-Assad a précipitamment quitté son pays pour la Russie, qui lui a accordé l’asile politique. Damas est désormais aux mains d’une coalition de rebelles sunnites, mais la stabilité ultérieure est loin d’être garantie, et les puissances régionales et plus lointaines s’interrogent sur ce que sera précisément la nouvelle donne. La chute rapide et inattendue de la capitale syrienne, Damas, aux mains des forces d’opposition sunnites marque un tournant dans l’histoire moderne du Moyen-Orient. Le régime de Bachar Al-Assad avait résisté à plus d’une décennie de soulèvements, de guerre civile et de sanctions internationales depuis le début des protestations généralisées en 2011. Pourtant, il s’est effondré en un laps de temps remarquablement court. Cette tournure soudaine des événements, l’opposition ayant avancé depuis Idlib, dans le nord, jusqu’à Damas, sans rencontrer de résistance significative, laisse les puissances régionales dans l’expectative : chacun essaie d’anticiper les retombées de ce séisme proche-oriental. Un bouleversement majeur est en cours dans la région ; le pays, ses voisins et les grandes puissances mondiales entrent dans une nouvelle réalité.

 

par ,Research Fellow, Middle East Studies, Deakin University dans The Conversation

Avec l’effondrement du régime Assad, la Syrie se retrouve fragmentée et divisée entre trois factions dominantes, chacune ayant des soutiens extérieurs et des objectifs distincts :

1. Les forces d’opposition syriennes, au premier rang desquelles Hayat Tahrir al-Sham : ces groupes, soutenus par la Turquie, contrôlent désormais le centre de la Syrie, de la frontière nord avec la Turquie à la frontière sud avec la Jordanie.

Bien qu’elles partagent une identité religieuse commune, les factions ont souvent été en conflit entre elles par le passé, ce qui pourrait entraver leur capacité à former un gouvernement uni et à maintenir la stabilité du pays à long terme.

On retrouve au sein de ces forces d’opposition aussi bien d’anciens djihadistes issus de l’État islamique et d’Al-Qaida que des groupes laïques tels que l’Armée nationale syrienne, qui s’est séparée de l’armée d’Assad après le soulèvement de 2011.

2. Les forces kurdes : Les groupes kurdes contrôlent des territoires dans le nord-est de la Syrie, à la frontière de la Turquie au nord et de l’Irak à l’est. Ils continuent de bénéficient d’un soutien des États-Unis, qui ont établi des bases militaires dans la région. Ce soutien risque d’aggraver les tensions avec la Turquie, qui considère l’autonomisation des Kurdes comme une menace pour son intégrité territoriale.

3. Les forces alaouites : Les factions alaouites pro-Assad, principalement situées dans les régions côtières de l’ouest de la Syrie, entretiennent des liens étroits avec l’Iran, l’Irak et le Hezbollah libanais. Ces régions pourraient servir de bastion aux restes des groupes alignés sur Assad après la prise de contrôle du reste du pays par l’opposition, perpétuant ainsi les divisions sectaires.

Les divisions profondes entre ces trois groupes, combinées à l’absence d’un médiateur acceptable par tous, suggèrent que la Syrie pourrait être confrontée dans les prochains mois et les prochaines années à une instabilité et à un conflit prolongés.

La chute rapide du régime d’Assad a de profondes implications pour les principaux acteurs du Moyen-Orient.

Les forces rebelles sunnites, fortement soutenues par la Turquie, ont profité d’un moment où le régime était particulièrement vulnérable. Ses alliés avaient chacun fort à faire de leur côté, la Russie étant obnubilée par sa guerre en Ukraine, tandis que l’Iran et ses mandataires avaient porté toute leur attention sur le conflit avec Israël. Les rebelles ont ainsi bénéficié d’une fenêtre d’opportunité qui leur a permis de prendre la capitale à l’issue d’une offensive éclair.

La Turquie contrôle déjà, dans les faits, une bande de territoire dans le nord de la Syrie, où son armée combat les forces kurdes syriennes. Aujourd’hui, avec la victoire de ses alliés de l’opposition syrienne, la Turquie devrait étendre son influence politique et militaire en Syrie, ce qui n’annonce rien de bon pour la minorité kurde, qui lutte pour son autonomie depuis des années.

Israël aussi se retrouve aujourd’hui dans une position stratégique plus favorable qu’auparavant. La chute d’Assad perturbe « l’axe de la résistance », composé de l’Iran, de la Syrie et des groupes mandataires de Téhéran tels que les milices chiites en Irak, le Hezbollah au Liban, le Hamas à Gaza et les rebelles houthis au Yémen.

Les lignes d’approvisionnement par lesquelles l’Iran acheminait jusqu’ici son aide militaire au Hezbollah – une aide qui était fondamentale pour le mouvement libanais – seront probablement coupées, ce qui isolera le Hezbollah et l’affaiblira encore plus.

En outre, la fragmentation de la Syrie entre plus factions ethniques et religieuses pourrait réduire l’attention régionale portée à Israël, ce qui lui donnerait la possibilité de poursuivre plus aisément ses objectifs stratégiques. Après qu’Israël a accepté un cessez-le-feu avec le Hezbollah le mois dernier, le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou avait déjà annoncé un changement d’orientation, son gouvernement se concentrant désormais sur la meilleure façon de « contrer la menace iranienne ».

L’Iran apparaît à ce stade comme le grand perdant des récents événements. Assad était un allié crucial dans le réseau régional d’alliés de Téhéran. L’effondrement de son régime intervient alors que d’autres partenaires de l’Iran, le Hamas et le Hezbollah, viennent de subir des dommages considérables infligés par Israël. L’influence régionale de la République islamique est désormais fortement réduite, ce qui la rend plus vulnérable à un conflit direct avec Israël.

La fragmentation de la Syrie est également synonyme de risques importants pour la sécurité des pays voisins, à savoir la Turquie, l’Irak, la Jordanie et le Liban. Les flux de réfugiés, la violence transfrontalière et les tensions sectaires risquent de s’intensifier. La Turquie accueille déjà plus de 3 millions de réfugiés syriens, dont beaucoup espèrent rentrer chez eux maintenant que le gouvernement d’Assad n’est plus là.

En Irak et au Liban, cette instabilité pourrait exacerber des situations politiques et économiques déjà plus que fragiles. La balkanisation de la Syrie selon des critères ethniques et religieux pourrait encourager d’autres groupes de la région à se rebeller contre les gouvernements pour obtenir leur propre autonomie. Cela risque de renforcer les divisions et de prolonger le conflit dans toute la région.

Si de nombreux Syriens ont célébré la chute d’Assad, il reste à voir si leur vie s’améliorera significativement. En l’absence d’un gouvernement unifié et internationalement reconnu en Syrie, il est peu probable que les sanctions soient levées, ce qui continuera d’avoir des effets délétères sur une économie syrienne déjà dévastée, aggravant la crise humanitaire et alimentant l’extrémisme.

Haine en ligne : quelle régulation ?

Haine en ligne : quelle régulation ? 

 

Le procès de l’assassinat de Samuel Paty se poursuit devant la cours d’assise spéciale de Paris. Un certain nombre d’accusés comparaissent pour avoir mené une campagne de haine sur les réseaux sociaux avant le meurtre. Depuis 2020, de nouvelles lois – européennes et françaises – sont entrées en vigueur pour lutter contre les violences en ligne. Que retenir de ces législations ? Sont-elles efficaces ? Le procès de l’assassinat de Samuel Paty a débuté lundi 4 novembre. Sur le banc des accusés se trouvent notamment ceux qui ont créé la polémique et intentionnellement faussé la réalité d’un des cours de l’enseignant portant sur la liberté d’expression. Dans une vidéo, le père d’une élève qui sera jugé durant le procès avait appelé à écrire à la direction de l’établissement « pour virer ce malade » et livrait publiquement le nom du professeur, son numéro de téléphone portable et l’adresse du collège. Les insultes, menaces et commentaires haineux contre l’enseignant et la directrice du collège inondèrent les réseaux sociaux Facebook, WhatsApp, Instagram, Twitter, Snapchat, YouTube, TikTok, Google… devenus de véritables tribunaux virtuels. Suite à l’émoi suscité par ces événements, la France a adopté en 2021 plusieurs lois pour contrer la haine en ligne, notamment l’article surnommé « Samuel Paty » de la loi sur le respect des principes de la République qui criminalise les actes d’intimidation et d’entrave au travail des enseignants par la diffusion de messages haineux.

par  Docteur en droit international, Auteurs historiques The Conversation France

Plus largement, ces dernières années, de multiples initiatives législatives, à l’échelle française et européenne ont cherché à responsabiliser les plates-formes de contenus, les réseaux sociaux mais aussi les utilisateurs pour limiter les impacts de la violence en ligne.

Entré en vigueur en 2023, le Règlement européen sur les services numériques (Digital Services Act, DSA) a notamment pour objectif d’endiguer la viralité de contenus violents pour éviter d’y exposer les utilisateurs. Il exige aussi la publication de rapports de transparence par les réseaux sociaux et plates-formes de partage tels que Facebook, Google Search, Instagram, LinkedIn, Pinterest, Snapchat, TikTok, X (anciennement Twitter) et YouTube.

En vertu de ce texte, les réseaux sociaux doivent aussi donner des informations sur leurs équipes de modération de contenu, mettre en place des mécanismes de signalement des contenus illicites et fournir des informations sur le fonctionnement de leurs algorithmes de recommandation.

Ce partage d’informations sur le fonctionnement des algorithmes devrait permettre aux utilisateurs de mieux comprendre et contrôler ce qu’ils voient en ligne. Il est surtout utile pour le Centre européen pour la transparence algorithmique qui contrôle l’application du règlement.

Les plates-formes doivent également évaluer et réduire les risques systémiques pour la sécurité publique et les droits fondamentaux liés à leurs algorithmes comme la propagation de la haine en ligne. Ces éléments doivent figurer dans les rapports émis à la disposition de la Commission européenne. Dans le cas contraire, ou si les actions des plates-formes ne reflètent pas suffisamment les attentes du DSA, c’est la Commission européenne qui prendra l’attache de l’entreprise et procédera en cas d’inertie de celle-ci à un rappel à la loi public. C’est précisément ce qu’a fait Thierry Breton en août dernier en s’adressant à Elon Musk.

Un outil de dénonciation permettant aux employés ou autres lanceurs d’alerte de signaler les pratiques nuisibles des très grandes plates-formes en ligne et des moteurs de recherche a été mis en place.

Avant ces nouvelles mesures, ces entreprises n’étaient soumises qu’à un code de conduite non juridiquement contraignant et dont les résultats avaient atteints leurs limites.

Comment évaluer l’efficacité de ces mesures ? Nous le saurons bientôt, la Commission européenne a ouvert, le 18 décembre 2023 une procédure contre X (ex-Twitter) après avoir mené une enquête préliminaire pour non respect de l’obligation de transparence et des défaillances dans la modération de contenus. X interdit aussi aux chercheurs éligibles d’accéder de manière indépendante à ses données conformément au règlement. La société encourt une amende pouvant aller jusqu’à 6 % de son chiffre d’affaires mondial et, en cas de manquements répétés, elle peut voire l’accès à son service restreint dans l’Union européenne.

Aujourd’hui, l’épée de Damoclès des sanctions financières et surtout le blocage du service sur le territoire européen font peser un risque économique et réputationnel que les plates-formes souhaitent éviter. Plusieurs procédures formelles ont été lancées par la Commission européenne contre le réseau social X en 2023, TikTok, AliExpress et Meta cette année.

En France, la loi « Sécuriser et Réguler l’Espace Numérique » (SREN) promulguée en mai 2024 sanctionne les plates-formes qui échouent à retirer les contenus illicites dans un délai rapide (75 000 euros d’amende) et met aussi en place des mécanismes pour mieux sensibiliser et protéger les utilisateurs contre les dangers en ligne.

Cela se traduit par l’information des collégiens en milieu scolaire et des parents en début d’année. Une réserve citoyenne du numérique (rattachée à la réserve civique) est également instaurée avec pour but lutter contre la haine dans l’espace numérique et à des missions d’éducation, d’inclusion et d’amélioration de l’information en ligne. Ce dispositif qui constitue un moyen officiel d’alerte auprès du procureur de la République aurait été le bienvenu il y a 4 ans, au moment de l’affaire Paty. À l’époque, seuls la médiation scolaire et le référent laïcité du rectorat avaient été actionnés, sans effet.

Les plates-formes en ligne ont des obligations légales croissantes issues du règlement européen et de la loi SREN pour prévenir et réagir au cyberharcèlement et aux contenus illicites, avec une responsabilité à plusieurs niveaux.

L’obligation de modération proactive signifie que les plates-formes doivent mettre en place des systèmes pour détecter, signaler et retirer rapidement les contenus haineux, violents, ou incitant au cyberharcèlement. C’est l’ARCOM (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) qui veille à ce que les éditeurs et fournisseurs de services d’hébergement de sites retirent effectivement ces contenus et conduit des audits pour vérifier la conformité aux règles. Cette obligation, issue du règlement européen sur les services numériques et de la loi SREN, sera mise en œuvre grâce à la publication d’un rapport annuel le nombre de signalements effectués. À ce jour, le premier rapport n’a pas été publié.

Les hébergeurs qui ont connaissance du caractère illicite du contenu et qui n’informent pas les autorités compétentes, par exemple, le procureur de la République, ni bloqué l’accès à cette publication, encourent des sanctions allant jusqu’à 250 000 euros d’amende et un an d’emprisonnement pour le dirigeant.

Les plates-formes doivent également sensibiliser leurs utilisateurs aux risques de cyberharcèlement et fournir des outils pour signaler facilement les contenus et comportements nuisibles. C’est le cas par exemple sur XFacebookInstagram.

En France, le cyberharcèlement est un délit sévèrement puni par des lois visant à lutter contre le harcèlement moral et les actes répétés de violence en ligne, notamment sur les réseaux sociaux. Une personne coupable de harcèlement moral encourt jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende. Si la victime est mineure, ces peines sont alourdies à trois ans de prison et 45 000 € d’amende. Des peines plus graves peuvent s’appliquer en cas d’incapacité de travail de la victime ou si les actes conduisent au suicide ou à la tentative de suicide, avec une sanction maximale de dix ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende.

Pour protéger les victimes de harcèlement groupé, en 2018 la loi Schiappa avait introduit un délit de « harcèlement en meute » ou raid numérique, visant à pénaliser les attaques concertées de multiples internautes contre une victime, même si chaque participant n’a pas agi de façon répétée.

La loi SREN prévoit également que les personnes reconnues coupables de cyberharcèlement peuvent se voir interdites de réseaux sociaux pendant six mois ou un an en cas de récidive. Ce bannissement inclut la création de nouveaux comptes durant la période d’interdiction. Les plates-formes risquent des amendes allant jusqu’à 75 000 € si elles ne bannissent pas les utilisateurs condamnés pour cyberharcèlement ou ne bloquent pas la création de nouveaux comptes pour les récidivistes.

Trump: Quelle politique internationale ?

Trump: Quelle politique internationale ?

Face au retour de Trump à la Maison Blanche, les puissances mondiales – partenaires comme adversaires de la prochaine administration – vont revoir leur politique étrangère. En effet, ce second mandat s’inscrira sans doute dans la ligne du premier, caractérisé par le principe d’« America First », et pourrait modifier profondément l’ordre mondial actuel. La réélection de Donald Trump marque un tournant pour les relations internationales. Son administration, axée sur « l’Amérique d’abord » (« America First ») et un engagement international limité, vise à redéfinir le rôle des États-Unis, se présentant comme « un acteur de paix » donnant la priorité à ses affaires intérieures. Aimant rappeler qu’il est le premier président depuis les années 1970 à n’avoir déclenché aucune guerre – alors même que les tensions mondiales atteignent un point critique –, Trump hérite d’un monde traversé par de nombreux conflits de grande ampleur, spécialement en Ukraine et au Proche-Orient. En Asie, sa volonté de réduire l’engagement militaire américain influencera sans doute la réponse de Washington à l’implication de la Corée du Nord en Ukraine et aux tensions entre Taïwan et la Chine.
Par , Responsable du programme « Politiques et relations internationales » à la faculté de langues étrangères, Université de Tours dans the Conversation 

Ces points chauds mettront à l’épreuve les alliances mondiales, forçant l’administration Trump à jongler entre prudence stratégique et préservation des intérêts de ses alliés. Mais qui Trump considère-t-il comme ses alliés, que veut-il précisément sur le plan de la politique internationale et comment compte-t-il arriver à ses fins ?

L’isolationnisme est profondément ancré dans la politique étrangère américaine, comme le montre le discours d’adieu de George Washington, en 1784, qui mettait déjà ses concitoyens en garde contre les alliances complexes. Ce principe réapparaît dans la doctrine trumpiste « America First ».

Durant son premier mandat, Trump avait limité l’implication des États-Unis à l’étranger et remis en question les institutions multilatérales, comme l’OTAN, préférant des percées diplomatiques gérées en bilatéral avec les États concernés, à l’instar des accords d’Abraham, ou des actions symboliques telles que l’élimination du général iranien Ghassem Soleimani, conduites sans déployer de troupes.

Bien que cette approche suscite des critiques – notamment dans la mesure où elle tend à fragiliser les alliances existantes –, elle s’inscrit dans une tradition américaine d’autonomie stratégique.

Le second mandat devrait confirmer et renforcer cette orientation : il s’agira, pour Washington, de mettre en garde contre des engagements à long terme qui pourraient compromettre les intérêts américains et de miser sur des alliances temporaires. Trump, en minimisant ses engagements internationaux, souhaite que l’Amérique demeure influente mais non contrainte, n’agissant qu’en fonction de ses propres intérêts.

Au Moyen-Orient, Donald Trump vise à renforcer les alliances de son premier mandat, notamment avec Israël et avec le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, qui s’est félicité de son retour au pouvoir.

Durant son premier mandat, Trump avait, acte hautement symbolique, transféré l’ambassade de son pays de Tel-Aviv à Jérusalem, répondant ainsi à une vieille demande de la droite israélienne ; il avait également soutenu Israël à travers les accords d’Abraham, qui ont normalisé les relations de Tel-Aviv avec plusieurs nations arabes, tout en isolant l’Iran.

Lors du second mandat, il cherchera sans doute à approfondir ces alliances via des incitations diplomatiques et économiques qui permettraient d’élargir ces accords. Notamment pour satisfaire sa base évangélique, très investie dans le soutien à Israël.

La politique de Trump au Moyen-Orient est aussi marquée par une approche sélective et transactionnelle illustrée par sa coopération avec l’Arabie saoudite. Cette approche est centrée sur des ventes d’armes et la lutte contre l’influence iranienne, et a été mise en œuvre malgré les critiques dont elle a fait l’objet à la suite de l’affaire Khashoggi.

Son approche à l’égard de l’Iran reste quant à elle inflexible. Lors du premier mandat, il avait retiré les États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien et mis en place des sanctions sévères à l’encontre de Téhéran. Il poursuivra sans doute cette ligne dure, privilégiant l’endiguement à la diplomatie. Ce second mandat pourrait donc renforcer un front uni avec Israël et l’Arabie saoudite contre l’Iran.

Enfin, concernant Gaza et le Liban, Trump a promis la paix en demandant à son ami Nétanyahou de mettre fin à ces guerres d’ici à son arrivée au pouvoir, sans commenter particulièrement les opérations israéliennes, lesquelles ne semblent nullement augurer d’une fin prochaine de ces conflits.

L’évolution des relations entre les États-Unis et l’Europe face au conflit ukrainien reflète un équilibre délicat entre priorités intérieures américaines et engagements internationaux. Le retour de Trump au pouvoir et son penchant pour la désescalade avec la Russie pourraient modifier le soutien américain envers Kiev, reprenant en partie l’approche initiale de l’administration Biden qui cherchait à éviter toute confrontation directe avec Moscou.

L’échange téléphonique entre Donald Trump et le président Zelensky, consécutif à l’élection du premier le 5 novembre dernier, illustre aussi l’existence de nouvelles influences non conventionnelles en diplomatie, puisqu’Elon Musk y a participé. Même si Zelensky a laissé entendre que son échange avec Trump ne l’a pas laissé « désespéré. », on pourrait assister à une nette réduction du soutien américain à l’effort de guerre ukrainien, ce qui pourrait faire basculer la dynamique régionale en faveur de Moscou. Une perspective qui inquiète les alliés européens de Kiev, particulièrement en Europe de l’Est.

Elle représente également un « signal d’alarme » pour l’Union européenne quant à la nécessité d’acquérir une autonomie stratégique – projet qui a motivé plusieurs récentes déclarations des membres de l’UE.

L’Europe pourrait ainsi se saisir de cette occasion pour renforcer son autonomie au sein de l’OTAN, et ouvrir la voie à des pays comme la France et la Pologne pour prendre les rênes de sa politique de défense.

Donald Trump a sélectionné des figures fidèles pour occuper des postes clés en politique étrangère et de défense. Marco Rubio, le futur secrétaire d’État, est un homme politique de premier plan, sénateur de Floride, connu pour ses positions conservatrices en matière de politique étrangère et sa rhétorique anti-chinoise virulente. Figure de proue du Parti républicain, Rubio a toujours plaidé en faveur d’une fermeté maximale en matière de sécurité nationale et d’un soutien entier à Israël.

Au poste de secrétaire à la Défense, Trump a nommé Pete Hegseth, animateur de Fox News et vétéran de la Garde nationale. Connu pour ses opinions conservatrices et ses critiques visant la diffusion du « wokisme » dans l’armée, Hegseth n’a qu’une expérience limitée en matière de stratégie militaire internationale, ce qui a suscité des inquiétudes parmi les responsables de la défense quant à sa capacité à diriger Le Pentagone.

La Central Intelligence Agency (CIA) sera placée sous la férule de John Ratcliffe, ancien directeur du renseignement national (2020-2021) et fidèle allié de Trump. Le précédent mandat de Ratcliffe avait été pointé du doigt par de nombreux observateurs qui lui reprochaient de tenter de politiser la communauté du renseignement. Dans la prochaine administration, la direction du renseignement devrait être l’affaire de Tulsy Gabbard, transfuge du Parti démocrate connue pour ses positions très compréhensives à l’égard de Moscou dans le conflit russo-ukrainien.

En outre, Trump a choisi le représentant Mike Waltz, un Républicain de Floride et Béret vert de l’armée à la retraite, comme conseiller à la sécurité nationale. Waltz, qui est connu pour ses prises de position hostiles à l’égard de la Chine, apporte une vaste expérience militaire à ce poste. Sa nomination est le signe d’une évolution potentielle vers une position plus agressive en matière de sécurité nationale. Ils doivent tous être confirmés par le Sénat au cours des prochaines semaines.

Rappelons que la première administration Trump a été marquée par des conflits internes. Des figures comme James Mattis (premier secrétaire à la Défense) et Rex Tillerson (premier secrétaire d’État) ont, par exemple, souvent divergé de la ligne présidentielle ce qui a pu créer une politique étrangère parfois incohérente et a abouti à leur limogeage rapide.

Au vu des dernières nominations, la deuxième administration sera sans doute plus alignée, composée d’une équipe choisie pour soutenir pleinement le programme nationaliste du président. Le choix comme cheffe de cabinet de Susan Wiles, première femme à ce poste et soutien de longue date de Trump, souligne cette cohésion qui doit permettre au nouveau président de mettre en œuvre une politique étrangère plus affirmée et plus unilatérale, tout en réduisant les engagements internationaux et favorisant une approche transactionnelle des alliances.

La réélection de Trump pourrait redéfinir la dynamique mondiale à l’heure des conflits touchant l’Europe et le Moyen-Orient ainsi que d’un continent asiatique en proie aux tensions. En plaçant « l’Amérique d’abord », il pourrait pousser ses alliés à repenser leur politique extérieure et notamment à adopter une plus grande autonomie vis-à-vis de Washington.

En Europe, les dirigeants se réunissent déjà pour se préparer à une période d’instabilité, reconnaissant qu’une action décisive sera essentielle.

Les adversaires, eux aussi, pourraient faire preuve de prudence ; l’imprévisibilité de Donald Trump pourrait accroître la pression sur l’Iran, la Corée du Nord et la Chine. Ce nouveau chapitre promet donc une trajectoire turbulente où la capacité d’adaptation tiendra un rôle essentiel.

Budget-Quelle politique économique ?

Budget-Quelle politique économique de l’offre ?

OPINION. Les Français ont voté le 7 juillet 2024 pour élire leurs députés. Aucun parti ne répond plus clairement à leurs préoccupations en termes de politique économique. Cette tribune met en avant des idées pour réduire les dépenses sans réformes structurelles et pour amplifier les investissements productifs sans augmenter la dette publique.
Par Gabriel Gaspard, Chef d’entreprise à la retraite, spécialiste en économie financière dans la Tribune

D’inspiration libérale, les adeptes de la politique de l’offre considèrent que pour obtenir une forte croissance à moyen ou long terme il faut aider les entreprises à améliorer leur offre de biens et de services pour conquérir de nouveaux marchés. Pour augmenter les profits, ils préconisent de supprimer le maximum de freins fiscaux (impôts, taxes et charges sociales) qui entravent leurs développements dans une économie mondialisé.

L’ancien chancelier allemand, Helmut Schmidt résumait cette politique : « les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain ».

Avec l’ancien Président français Valéry Giscard d’Estaing il a appuyé la mise en place de l’Europe politique et du Système monétaire européen. Mais les entreprises ont-elles réellement investi pour développer la productivité ?

  • C’est quoi une politique économique pro-européenne ?
C’est « la mise en place d’un environnement réglementaire et institutionnel sain et une économie qui fonctionne bien sont essentiels pour réaliser des gains de compétitivité, encourager les investissements, favoriser la création d’emplois, améliorer le niveau de vie et produire une croissance durable dans l’ensemble des États membres de l’Union.

De nombreuses économies de l’Union ont été et sont encore soumises à des processus d’ajustement visant à corriger les déséquilibres macroéconomiques accumulés dans le passé, beaucoup devant également composer avec un faible potentiel de croissance. Cette situation est souvent le résultat de retards ou d’insuffisances dans la mise en œuvre de réformes structurelles dans ces économies.

L’Union a fait de la mise en œuvre des réformes structurelles une de ses priorités d’action, afin de donner un caractère durable à la reprise, de libérer le potentiel de croissance nécessaire pour renforcer la capacité d’ajustement, et de soutenir le processus de convergence », Commission européenne.

Il existe de nombreuses manières de réaliser des réformes structurelles : des réglementations allant dans le sens d’une plus grande flexibilité des marchés du travail, une libération du marché des biens et services, une simplification des régimes fiscaux, une réduction globale du poids des dépenses publique en particulier sociale, etc.

Ces réformes structurelles, de tendance libérale, sont souvent critiquées dans plusieurs pays européens quant à leur efficacité. Les critiques portent surtout sur les efforts d’extrême rigueurs demandées à certaines populations et de leurs conséquences dramatiques sur le plan social. La mise en œuvre de telles politiques d’austérité, de manière simultanée, dans tous les pays européens, est-elle considérée comme une erreur de politique économique ?

Le traité de Lisbonne encadre actuellement le fonctionnement de l’Union européenne. Après le rejet, par la France et les Pays-Bas (référendums de 2005), du traité établissant une Constitution pour l’Europe rédigé par la convention sur l’avenir de l’Europe, le traité a été signé lors du Conseil européen de Lisbonne du 13 décembre 2007 et a été ratifié par tous les États membres.

La France et les Pays-Bas ont rejeté, par référendums en 2005, ce traité établissant une Constitution pour l’Europe rédigée par la convention sur l’avenir de l’Europe. Il a alors été signé lors du Conseil européen de Lisbonne du 13 décembre 2007 puis ratifié par tous les États membres.

Il y a donc 16 ans, après la signature de ce traité, la production de richesse européenne était de 10,36% supérieure à celle des États-Unis alors qu’en 2023 elle était de 48,77% inférieure. Le PIB de l’Union européenne a augmenté de 2008 à 2023 de 12,58% (mesuré en dollars courant), pour la France c’est 3,41% soit 0,213% par an, contre 84,83 % pour les États-Unis et 287,58% pour la Chine (source Banque mondiale).

  • C’est quoi une politique économique pro-business ?

Avec 82,52 milliards d’euros en 2008 et 156,88 milliards d’euros versés en 2019, les subventions aux entreprises sont devenues le premier poste de dépenses de l’État français. Les aides publiques aux entreprises sont en principe interdites (sauf cas particuliers) par le droit européen car elles « faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions » (article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne). Avec le déploiement massif des aides en réponse à la pandémie, cette aide s’est élevée à près de 175 milliards d’euros en 2022. En 15 ans elle a augmenté de 112,07%.

En comparant l’évolution de cette aide annuelle moyenne de 7,47% à la croissance annuelle moyenne de 0,213%, l’aide publique n’a pas réellement profité aux investissements et à la croissance. Déjà en 2021, un rapport de l’observatoire des multinationales révélait que les « entreprises se sont servies des aides publiques versées par l’État pour faire face à la crise sanitaire pour rémunérer les actionnaires, tout en supprimant des emplois ».

À titre indicatif, le CAC40 a progressé de 16,95% de 2008 à 2023. Le taux d’évolution de la distribution de dividendes entre 2008 (43 milliards d’euros) et 2023 (67,8 milliards d’euros) est de 57,67%. La moyenne des dividendes versés par les sociétés françaises du CAC40 selon la capitalisation boursière de 2008 est de 3,6% (source Banque de France).

Les Premiers ministres de gauche ou de droite sont tous pro-business.

Manuel Valls : « my government is pro-business »Elisabeth Borne : « oui, nous menons une politique pro-business » et le nouveau premier ministre Michel Barnier, l’ancien commissaire européen, souhaite appliquer une politique économique de l’offre, pro-business et pro-européenne.

Quelle politique économique est la plus adaptée pour la France ?

Pour les défenseurs de la politique économique libérale de l’offre, l’État est la cause de tous les problèmes et la solution doit être de réduire son influence sur l’économie. En France le budget mis en place est en contradiction avec cette thèse et les aides aux entreprises deviennent irraisonnables au regard du droit européen.

Mais lorsque la machine économique est en panne, il faut la relancer soit par la politique économique de l’offre, soit par la politique monétaire, soit par l’économie de la demande.

En Europe, la politique monétaire est de la responsabilité de la Banque centrale européenne BCE. La France n’a pas la main sur la stabilité de l’euro, ni sur la création de liquidités, ni sur les taux directeurs et ni sur les taux d’intérêt du marché monétaire, etc. La première mission de la BCE est de maintenir la stabilité des prix. Du fait des crises financières, avec les politiques monétaires non conventionnelles, la stabilité financière a supplanté celle des prix. Cette politique est au détriment de la croissance, des revenus des ménages, de la crise immobilière, etc.

Concernant la politique de la demande pour créer de la croissance, en augmentant par exemple le SMIC ou le salaire des fonctionnaires, etc., le gouvernement agirait sur la demande pour relancer l’emploi et la production. Ces augmentations induiraient une hausse des dépenses ou une baisse des recettes. Ce mécanisme peut mener à une récession ou à des déficits financés par l’emprunt. Pour combler ce déficit, le gouverneur de la Banque de France recommande une combinaison de réductions des dépenses publiques et de hausses d’impôts ciblées.

Pour la Chine le modèle économique de croissance est en adéquation avec la théorie de l’offre de Schumpeter. Elle est basée sur une création de crédit extrêmement élevé par les Banques, avec une prise en main des entreprises chinoises, publiques comme privées, par les organes du Parti communiste. Ceci n’a pas évité la crise immobilière actuelle, le chômage des jeunes, etc.

Pour les États-Unis, les banques américaines ont accordé massivement des prêts immobiliers aux particuliers à faibles revenus. Ces prêts, à taux variables sont soutenus par les pouvoirs publics. Ils voient dans la construction immobilière un moyen pour dynamiser l’économie à court terme. Et c’est la crise des subprimes 2007-2008. En 10 ans, cette crise financière a coûté approximativement 1 541 Md€ à la France en termes de produit intérieur brut (PIB) selon les calculs d’Eric Dor, directeur des études économiques à IESEG School of Management.

Quant à la France et à l’Europe, malgré toutes les aides, la productivité s’effondre. Entre l’année 2000 et 2022 la croissance du PIB par heure travaillée en Europe a été uniquement de 1,2%. De 1990 à 2022, la France a gagné en 33 ans en moyenne 0,85% par an.

Forcée de rester dans l’Europe et dans la zone euro, la France ne peut plus rétablir sa compétitivité et sa croissance, sauf si elle adapte fortement sa politique de l’offre, pro-européenne et pro-business. La leçon apprise des grandes crises passées est de ne pas réduire brutalement les déficits publics, les dettes publiques, les aides aux entreprises, les droits sociaux, etc.

Quelques propositions :

  • Attribuer au mieux les aides aux entreprises.
    À garder dans les aides publiques aux entreprises les subventions pour la recherche et le développent, pour l’investissement immatériel en capital (c’est-à-dire la propriété intellectuelle, la R&D, les logiciels, la technologie, le capital humain…), pour un budget total dépassant les 3% du PIB et allant jusqu’à 4,5% à 5%. Les subventions doivent être en proportion du chiffre d’affaires réalisé en France, par des sociétés ayant leurs sièges sociaux en France.
    Toutes les sociétés qui ont recours aux aides publiques doivent obligatoirement respecter la « règle des trois tiers » après acquittement des impôts : un tiers pour les actionnaires, un tiers pour le réinvestissement et un tiers en prime pour les salariés ou dans un cadre d’un plan d’épargne salariale.
  • Financer les fonds propres des entreprises par la Bourse.
    La Bourse ne finance que les riches. Pourtant elle peut jouer un rôle primordial pour trouver les capitaux nécessaires à l’expansion surtout des entreprises de tailles intermédiaires ETI. Malgré l’effort d’Euronext, une majorité de ces entreprises n’y a pas encore accès en raison de coûts administratifs et financiers trop élevés. Longue, ardue, plutôt coûteuse et très encadrée, la procédure a pourtant un intérêt vital : permettre aux dirigeants d’obtenir un financement en fonds propres. Certaines entreprises pourraient faire faillite après l’arrêt des aides de l’État.
  • Créer 3.5 millions de petites et moyennes entreprises PME en 5 ans.
    Aux États-Unis, la candidate démocrate à la présidentielle américaine a promis, en cas de victoire, la création de 25 millions de nouvelles petites entreprises en quatre ans. En France il faudrait créer 700 000 entreprises innovantes et régionales par an.

La France doit comme l’Allemagne compter plusieurs caisses de crédit publiques en plus des banques commerciales privées et des banques coopératives pour financer des prêts participatifs.

La principale force de l’économie allemande est ce que l’on appelle le «Mittelstand» soit 3,5 millions d’entreprises familiales innovantes. Par contre la France a choisi de développer des champions nationaux côtés en Bourse (uniquement 25% de l’activité des entreprises cotées au CAC40 est réalisé en France). Les PME du Mittelstand se financent en majorité via 500 caisses d’épargnes publiques (2.492,8 milliards d’euros).

Les Caisses de crédit publiques ainsi créées pourront emprunter directement à la Banque centrale européenne BCE. Du point de vue des Traités européens, « il n’existe aucune barrière juridique à un prêt de la BCE à un établissement public de crédit  ». C’est l’article 123-2 traité de Lisbonne.

  • Financer les investissements productifs par l’épargne. Cette idée, qui ne plait pas beaucoup aux banques commerciales, vise à stimuler la croissance de l’industrie française et à éviter que les capitaux se tournent vers des pays économiquement plus attractifs. Une grande partie de l’épargne française dort ou est placée dans des projets climaticides, etc.

Selon l’INSEE, en 2023, le taux d’épargne des ménages est égal à 16,9%. Il a atteint 20,4% en 2020 (pandémie). En revanche le taux d’investissement des ménages est de nouveau en forte baisse (-8,5%)

Avec une épargne financière estimée à 4 427,7 milliards d’euros en 2023 et 935,5 milliards d’euros déposés sur les produits d’épargne réglementée ; un encours des dépôts à vue des particuliers au mois de juillet 2024 de 478 milliards d’euros ; une partie de cette manne peut être utilisée pour créer un nouveau livret d’épargne réglementé. Ce fonds servira à des investissements productifs dans la transition écologique, etc., au lieu d’exporter cette épargne, via les banques commerciales, pour acheter des titres de dettes étrangers. Avec des plafonds de versement, le nouveau produit d’épargne serait garanti et rémunéré. Le nouveau contrat devrait présenter plusieurs atouts pour les consommateurs : flexibilité, frais de gestion nuls, pas de frais de transfert, avantages fiscaux, etc.

Dans un budget, il faut tout simplement arrêter de gaspiller les ressources :
« Ne dépensez jamais votre argent avant de l’avoir » Thomas Jefferson.

Israël : L’Iran se félicite de l’opération du Hezbollah qu’elle a inspirée

Israël : L’Iran se félicite de l’opération du Hezbollah qu’elle a inspirée

Faute sans doute d’avoir les moyens de répliquer directement à Israël après la mort sur son sol du responsable du Hamas, une nouvelle fois l’Iran a instrumentalisé Hezbollah pour  lancer des centaines d’engins explosifs vers Israël.

Du coup, l’Iran se félicite de cette opération qui en réalité est la sienne et qui vise surtout à montrer à l’opinion publique au Moyen-Orient la puissance théorique de Téhéran.

En réalité d’Iran n’est pas en capacité de mener une guerre contre Israël compte tenu de la faiblesse de son armée mais aussi d’un climat interne délétère caractérisé par un affaiblissement économique et par un discrédit auprès de la population. Sans parler des divisions internes chez les religieux qui dirigent le pays.

À la place l’ Iran a donc sollicité le Hezbollah qui a expédié une salve de drones et de rockets  sur Israël précisant toutefois dimanche avec prudence que la réplique était terminée. Le Hezbollah n’est pas non plus en situation de gagner une guerre contre Israël et sa position interne est fragilisée par l’écroulement du pays

L’Iran a salué ce lundi 26 août l’attaque menée la veille par le Hezbollah libanais, son allié, contre des positions israéliennes, affirmant qu’Israël avait perdu son «pouvoir offensif et dissuasif» !

Quelle véritable inflation ?

Quelle véritable inflation ?

La question de la véritable inflation constitue un enjeu économique, financier mais aussi surtout social. Par exemple en 2024 officiellement l’inflation paraît maîtrisée par rapport au passé avec une progression qui serait de 2,3 % sur un an en juillet. Dans le même temps , on espère une augmentation des salaires de l’ordre de 4% surtout en raison des difficultés de recrutement lié au manque de qualification et aux modifications du rapport au travail.

Nombres d’experts vont donc conclure qu’en moyenne le pouvoir d’achat des ménages aura augmenté. C’est évidement faire d’économie d’une analyse un peu approfondir de ce qu’est réellement l’inflation. Si on devait faire la démonstration que l’inflation est sous-estimée il suffirait de se référer à la baisse de consommation notamment concernant les produits alimentaires mais encore le budget moyen consacré par les Français à leurs vacances. Sur le plan méthodologique confondre un indice moyen des prix de la consommation avec l’inflation n’a aucun sens surtout quand l’indice des prix est obsolète en raison de la modification structurelle des dépenses selon le niveau de revenus des ménages.

La vérité c’est que tout augmente et bien davantage que ce qui est mesuré par l’INSEE qui produit toujours un indicateur obsolète qui ne rend pas compte de la modification structurelle des dépenses des ménages. Dans ces dépenses ,il faut prendre en compte le fait que le logement représente près de 25 %, à peu près autant que l’alimentaire. Reste en outre le transport qui représente 15 % comme les biens et services, en forte hausse également à 15 %. En gros, pour 80 % des ménages les dépenses sont déjà affectées. Et pour les moins favorisés les dépenses ajustables sont négligeables voire nulles.

L’inflation ne porte préjudice réellement que lorsqu’on est amené à effectuer des dépenses ce qui est le cas pour les ménages peu défavorisés qui ne peuvent épargner. L’inflation affecte donc en totalité les revenus dans ce cas. Il en va différemment pour les ménages plus aisés pour lesquels les dépenses de consommation courante ne sont finalement que marginales.

En moyenne en France, les ménages comprennent deux personnes pour un revenu toujours en moyenne de 2000 €. Par l’inflation est vraisemblablement égale au double de celle qui est mesurée depuis plusieurs années. Surtout si on prend mieux en compte l’évolution considérable du prix des services et autres abonnements qui pèsent de plus en plus dans les budgets. La vérité c’est que l’inflation constitue un véritable phénomène anti redistributif qui plombe le pouvoir d’achat des moins aisés au profit de ce qui peuvent faire des placements financiers dont la rentabilité s’est envolée à la hausse ces dernières années.

«La gauche, quelle nullité !» ( Ruffin)

«La gauche, quelle nullité !» ( Ruffin)

Le député ex-LFI François Ruffin  se demande si la gauche ne fait pas le «choix de la défaite»et  pousse un coup de gueule contre les alliés du Nouveau Front populaire (NFP).

«La gauche, quelle nullité ! (…) Parce que je le dis, ils ont été nuls pendant deux ans, ils ont été nuls pendant les six mois de campagne européenne où on avait une gauche en miettes, le moral dans les chaussettes parce qu’ils y étaient allés chacun dans son couloir: Parti communiste, Parti socialiste, France insoumise, les Ecologistes», déplore-t-il.

«Il y a la possibilité, peut-être au moins d’essayer de prendre le pouvoir, peut-être pas tout le pouvoir, mais des bouts du pouvoir pour en faire quelque chose: pour les salaires, pour les frigidaires, pour les découverts des gens, pour leurs horaires», affirme François Ruffin.

Le député, qui a acté pendant la campagne législative sa rupture avec Jean-Luc Mélenchon, regrette les conditions qui sont posées par les uns et les autres dans les tractations au sein de la gauche. «Stop! Arrêtez le cinéma! Vous voulez pas y aller? Vous ne voulez pas y aller, mais dites-le !», s’exclame-t-il encore.

 

Programme du RN: quelle crédibilité ?

Programme du RN: quelle crédibilité ?

Toutes les études d’opinion soulignent que le vote RN est un vote de colère et de mécontentement alimenté par les débats sur l’immigration et l’insécurité, mais aussi et surtout par la baisse du pouvoir d’achat. Ce ressentiment est encore ravivé par la hausse du prix du gaz de 12 % en moyenne décidée par la Commission de régulation de l’électricité (indépendante du gouvernement) annoncée au lendemain de la dissolution et qui entrera en vigueur au lendemain du premier tour… Aujourd’hui, ses électeurs n’ont pratiquement pas étudié le programme budgétaire du RN.

 

 

par ,Professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business School dans The Conversation 

Le mode de scrutin par circonscription uninominal à deux tours amplifiant le score du parti hégémonique du moment il est tout à fait possible que le RN dispose non seulement d’une majorité à la prochaine Chambre, mais même, ce qui paraissait impensable il y a encore quelques mois, d’une majorité absolue. Et ce d’autant que les électeurs tentés par l’aventure RN mais encore réticents peuvent être désinhibés par le maintien rassurant à la tête de l’État d’un président disposant de pouvoirs forts dans son domaine réservé (armée et diplomatie) et de l’arme de la dissolution qu’il pourra de nouveau dégainer dans un an. L’Assemblée nationale ayant le dernier mot pour voter les lois de finances, le programme fiscal et budgétaire du parti va être scruté par les marchés financiers au cours des prochaines semaines.

Au cours des dernières années, le soutien massif des Français à la monnaie unique a eu raison de la volonté affichée par Marine Le Pen lors des présidentielles de 2017 de sortir de l’euro. Le parti a depuis considérablement édulcoré son projet et, en 2024, il est simplement question pour lui de baisser la contribution de la France au budget européen et de refuser tout impôt prélevé par l’UE en redonnant aux États le pouvoir exclusif de proposer de nouvelles normes.

La doctrine de justice fiscale du RN reste fondée sur la préférence nationale. Mais les velléités d’un retour de la souveraineté nationale (comme l’exigence d’un débat sur la pertinence de la politique monétaire européenne, la limitation de la contribution nette de la France à l’Union européenne à 2 milliards d’euros par an – soit 5 à 7 milliards d’économies – une taxation plus élevée du transport maritime et aérien ou l’abrogation des règles du marché européen de l’énergie) se heurteraient aux traités qu’il faudrait alors renégocier…

Le programme social du RN prévoit de revenir en partie sur l’emblématique réforme des retraites qui comme nous l’avions signalé lors de son adoption s’avère moins efficace qu’espérée avec un déficit attendu de 5,8 milliards en 2024 et de 14 milliards en 2030.

Même si le parti a finalement abandonné l’idée d’un retour de l’âge légal pour tous à 60 ans, il veut toujours ramener le nombre d’annuités requises de 42 à 40 ans, ce qui coûterait au bas mot 25 milliards par an. Cela mettrait gravement en péril l’équilibre financier déjà précaire du système de retraites. Le RN prétend également revenir sur la hausse de la participation des Français aux frais de santé et sur la limitation des arrêts maladie alors même que le déficit de la branche maladie à plus de 10 milliards d’euros en 2023 ne montre pas de signe de réduction.

La taxation des « surdividendes », surprofits et « surachat d’actions » que Marine Le Pen avait été la première personnalité politique à proposer avant l’élection présidentielle de 2022, le remplacement de l’IFI par un ISF ciblant la « spéculation financière », et la limitation de la flat tax aux revenus inférieurs à 60 000 euros ne rapporteraient au mieux que quelques milliards d’euros et leurs effets pervers (comme le retour d’une vague de délocalisations d’entreprises mais aussi de particuliers refusant le retour de l’ISF) risqueraient même d’être supérieurs aux gains annoncés. En tout cas, ces recettes seraient très loin de compenser l’instauration d’une TVA à 0 % sur les produits de première nécessité ainsi que la réduction de la TVA sur les prix de l’énergie à 5,5 % d’un coût d’au moins 10 milliards tout en étant, selon le Conseil des prélèvements obligatoires, deux fois moins efficace que le défunt bouclier tarifaire.

Toujours côté dépenses, l’augmentation de 10 % des salaires sans charges patronales jusqu’à trois fois le smic coûterait également 10 milliards par an tout en réduisant les recettes sociales. Quant à l’exonération de l’impôt sur le revenu pour tous les actifs jusqu’à 30 ans, il ferait perdre 4 milliards de recettes fiscales. Si la suppression totale de la cotisation foncière des entreprises qui était pertinemment programmée pour réduire le poids des impôts de production est une bonne piste pour améliorer la compétitivité des entreprises, l’idée de supprimer la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) pour aider les PME est baroque car cette dernière n’est acquittée que par les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 19 millions d’euros alors que la petite entreprise est définie comme ayant un chiffre d’affaires inférieur à 15 millions, le tout représentant un manque à gagner d’environ 11 milliards d’euros par an.

Comme nous le rappelions récemment sur ce site, les marges de manœuvre des finances publiques sont désormais nulles. À l’exception de la fin de la subvention au service public radiophonique et audiovisuel via sa privatisation qui pourrait assez vite économiser 3,5 milliards d’euros, les pistes d’économies budgétaires proposées par le RN sont nébuleuses.

La réforme de l’État, visant en particulier la suradministration, la lutte contre les fraudes, fiscale et sociale, sont des chantiers de long terme et leur rendement sera, au vu de l’histoire, très éloigné des 15 milliards attendus. Quant à l’interdiction stricte des bons du Trésor indexés sur l’inflation, elle ne présente aucun… intérêt et n’aura strictement aucun impact à court ou à long terme : les 10 à 14 milliards d’euros d’économie sur ce poste sont donc totalement illusoires.

C’est d’ailleurs sur le front des taux d’intérêt des obligations d’État que va se jouer la crédibilité du programme du RN, l’annonce de la dissolution ayant ouvert une forte période d’incertitudes. La Bourse de Paris a accusé le coup perdant 3 % en 3 jours, les valeurs bancaires étant les plus touchées par une éventuelle hausse des coûts d’emprunt. Si l’euro est resté à peu près stable, l’indicateur le plus instructif sera dans les prochaines semaines le spread de taux d’intérêt avec l’Allemagne qui est passé de 50 points de base à 64 points. Cette hausse a une conséquence : elle renchérit mécaniquement à moyen terme le coût d’une dette publique parmi les plus élevées de la zone euro.

Il y a même pire puisque l’État emprunte depuis le 12 juin à un taux supérieur à celui… du Portugal pourtant noté A – soit 3 crans en dessous de notre pays (AA-), ce qui paraissait inimaginable il y a encore quelques jours.

Dans ces conditions, il est clair que les ambitions budgétaires et fiscales du RN seraient très largement revues à la baisse en cas de victoire. Même ainsi les inévitables dérapages supplémentaires des comptes publics de la nouvelle politique se heurteront très vite aux réalités économiques. Certes, la protection de la monnaie unique évitera un scénario à la Liz Truss, l’éphémère première ministre britannique de l’automne 2022. Après l’annonce de son programme fiscal et budgétaire, la livre s’était en effet effondrée et les taux d’intérêt envolés contraignant l’imprudente première ministre à démissionner moins de deux mois après sa nomination.

L’appartenance de la France à la zone euro interdira la solution de facilité de la dévaluation qui fut utilisée jadis par des gouvernements désireux de s’affranchir des contraintes internationales car les Français refuseront toute sortie de l’euro. Le seul moyen de rétablir les comptes publics sera alors de procéder à un ajustement budgétaire d’ores et déjà inéluctable mais qui devra s’effectuer brutalement et dans l’urgence.

Cet ajustement devrait être certes moins violent que ce qu’a connu la Grèce ou l’Irlande au cours de la dernière décennie, mais il entraînera une hausse du chômage – notamment des jeunes – une baisse du pouvoir d’achat des fonctionnaires et des retraités c’est-à-dire précisément des électeurs que le parti a attiré récemment et surtout des classes populaires qui constituent traditionnellement son socle électoral.

G7: Quelle solidarité avec l’Afrique ?

G7:  Quelle solidarité avec l’Afrique ?

A l’occasion du 50ᵉ sommet du G7, du 13 au 15 juin en Italie, le chef de l’Etat africain  a exhorté, dans une tribune au « Monde », les dirigeants des principaux pays donateurs à réformer l’architecture financière mondiale.

 


Le changement climatique continue de ravager l’Afrique, qui endure des conditions météorologiques extrêmes et des catastrophes naturelles à une échelle sans précédent. Mon propre pays, le Kenya, vient tout juste de connaître sa plus longue sécheresse jamais observée, pour ensuite subir des inondations dévastatrices qui ont fait 289 morts et touché plus de 800 000 personnes. Dans le même temps, le Malawi, la Zambie et le Zimbabwe ont récemment souffert d’une sécheresse sévère, qui a exposé plusieurs millions de personnes à la famine, tandis que la région du Sahel a été frappée par une vague de chaleur écrasante, qui a fait plus de 100 morts au Mali.

Le changement climatique provoque de plus en plus de sécheresses en Afrique, compromettant les approvisionnements en eau. Il détruit des vies et des moyens de subsistance, paralyse la production alimentaire et endommage des maisons ainsi que des infrastructures. Il modifie les schémas migratoires, il exacerbe les conflits et contraint ainsi des populations entières à fuir en quête de moyens de subsistance alternatifs pour survivre.
La situation est d’autant plus difficile que les Etats africains payent des taux d’intérêt jusqu’à huit fois plus élevés que ceux des prêts habituels de la Banque mondiale, ce qui rend ces pays encore plus démunis face aux défis liés au climat. Cette inégalité résulte d’un système financier international établi en 1945, époque à laquelle la plupart des Etats africains n’existaient pas encore, qui demeure biaisé en faveur des pays riches. De nombreux pays africains sont pris au piège d’un cycle perpétuel de dette, ne bénéficiant que de très peu voire d’aucune marge de manœuvre budgétaire pour le développement et les investissements dans l’atténuation ou l’adaptation au changement climatique.

FOOT et politique: Appel des bleus de l’équipe de France à voter : quelle légitimité ?

FOOT et politique: Appel des bleus de l’équipe de France à voter : quelle légitimité ?

 

S’il est clair que le vote constitue un des éléments majeurs de la démocratie, on ne peut cependant la réduire à cela. La démocraties devant être permanente et  vivante et pas seulement le jour d’une élection. De ce point de vue, l’appel des bleus de l’équipe de France de foot pour inciter au vote  n’éclaire guère le sujet de la démocratie aujourd’hui trop confisquée par une élite politique et-ou  technocratique.

Par ailleurs, on peut se poser la question de la légitimité des footballeurs à s’immiscer dans le champ politique. Jusqu’alors ,  ils n’ont pas forcément démontré leurs compétences dans ce domaine.

Il y a à ce propos une grande confusion entre les personnalités compétentes et le star-system. De la même manière, les vedettes du spectacle vont également intervenir sans davantage de légitimité autre que l’éclairage médiatique. De quoi ajouter encore un peu plus de confusion dans une crise politique déjà fort complexe.

Défense : quelle politique européenne ?

Défense : quelle politique européenne ?

L’Europe puissance… C’est le souhait de la France et de ses présidents, qui rêvent à travers l’Europe de retrouver un lustre stratégique définitivement perdu au sortir de la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Un transfert qui s’est révélé vain tant les Européens préfèrent dans leur très grande majorité à une Europe de la défense le parapluie confortable des Etats-Unis, qui peuvent influer en retour sur les décisions européennes dans ce qu’ils ont de plus intime, leur politique de défense.

 

par Michel  Cabirol dans la Tribune

 

A force de se heurter à un mur de refus, l’ambition française a progressivement glissé ces dernières années vers un concept plus minimaliste. Après avoir vendu sur tous les toits des capitales européennes l’idée d’une Europe de la défense souveraine et autonome, la France promeut désormais le principe moins clinquant et surtout moins disruptif d’une défense européenne. De quoi parle-t-on ? D’un pilier européen fort au sein de l’OTAN, qui pourtant était en état de « mort cérébrale » avant la guerre en Ukraine. Un concept qui fait beaucoup moins peur aux Européens et laisse encore (jusqu’à quand ?) à la France ses illusions de grandeurs de l’Europe.

Ni la guerre sur le sol européen en Ukraine vingt ans après le conflit violent en ex-Yougoslavie (1991-2001), ni la menace d’une réélection de Trump, ni les fréquentes démonstrations de force de la Chine, ni la montée des nationalismes, y compris en son sein, n’ont véritablement réveillé la conscience des Européens. Et pourtant, ils ne doivent compter que sur eux-mêmes pour se défendre et défendre leurs intérêts vitaux, qui ne sont pas que commerciaux. L’Europe ouverte aux quatre vents ne fait peur à aucune grande puissance. Elle est même absente ou en ordre dispersé sur des sujets qui devraient pourtant la concerner (Gaza, Haut-Karabagh…).

L’Allemagne et la France ont deux identités stratégiques différentes sur les plans militaire, diplomatique et idéologique. Elles sont très clairement irréconciliables sur ces points en raison de leur ADN et de leur histoire. C’est en grande partie pour cela qu’une défense européenne unie semble vaine en dépit des efforts de la France de faire vivre à tout prix cette relation au mépris même des intérêts français. Le fameux « moteur » franco-allemand n’a jamais existé en Allemagne. Et c’est assumé à haut niveau à Berlin. Mais il reste ancré de façon indélébile dans les esprits romantiques des dirigeants français. Pourtant, les choix en matière d’armement sont très révélateurs des options diplomatiques des pays. Et celui de Berlin est très clair. L’Allemagne préfère acheter des armements américains comme en témoignent les acquisitions les plus emblématiques de l’armée allemande ces dernières années (cinq avions de patrouille maritime P-8 Poseidon, 35 F-35 et de 60 CH-47F).

C’est vrai également pour la plupart des pays européens. Entre l’Europe et le grand large (Etats-Unis), ils choisissent le plus souvent le grand large. Les pays européens achètent à profusion des armes « Made in USA ». Selon le Sipri (Stockholm International Peace Research Institute), environ 55 % des importations d’armes par les pays européens sur la période 2019-23 proviennent des États-Unis (contre 35 % en 2014-18). Loin, très loin derrière viennent l’Allemagne et la France, qui représentent respectivement 6,4 % et 4,6 % des importations des pays européens.

Enfin, l’Allemagne convoite ouvertement depuis une quinzaine d’année le leadership  dans le domaine de la défense et le spatial à la France. Deux secteurs où l’industrie française a (pour combien de temps encore ?) un leadership. Cela s’est vu dans le SCAF (Système de combat aérien du futur), où les Allemands ont tenté une OPA coordonnée au niveau politique et industriel pour partager le manche de ce programme européen (France, Allemagne et Espagne) au détriment de Dassault Aviation et de la France.

Comment construire une Europe de la défense efficace basée sur les compétences (et non pas les prétendues compétences) des industriels des 27 pays membres de l’Union européenne (UE). Il faut saluer le travail colossal de la commissaire polonaise au marché intérieur et à l’industrie Elżbieta Ewa Bieńkowska (2014-2019), qui a lancé contre toute attente des initiatives européennes dans le domaine de la défense et du spatial. Ce travail de pionnière a été repris avec la fougue qui caractérise Thierry Breton, qui n’a eu de cesse de pousser les murs pour lancer des initiatives sur le terrain comme l’augmentation de la fabrication de munitions dans le cadre de l’initiative ASAP, et faire avancer l’Europe de la défense. Ce qui lui a valu de sévères inimitiés au sein de la Commission. Au final, à eux deux, ils ont planté des graines (Fonds européen de défense, EDIRPA…), qui pourraient un jour être les fondations solides d’une Europe de l’armement. Rendez-vous dans cinq, dix ou quinze ans pour cueillir les fruits de ces initiatives. A condition bien sûr que ces graines soient régulièrement arrosées et qu’il y ait toujours une volonté politique.

Dans un moment aussi crucial pour l’Europe avec la guerre en Ukraine, il fallait une personnalité, certes clivante, comme Thierry Breton pour pousser des projets loin d’être gagnés à l’avance et améliorer la souveraineté de l’Europe. « A chaque fois que j’ai proposé une nouvelle ambition, ça a toujours été non, avait-il expliqué en début d’année à quelques journalistes. C’était d’ailleurs le cas avec ASAP. Lorsque j’ai lancé ASAP – il fallait être un peu gonflé  -, je suis allé demander aux Etats membres et au Parlement européen de me donner les moyens financiers pour financer des usines d’armement qui fabriquent des munitions. En trois mois, on a obtenu l’autorisation des deux (…) Dès qu’on lance une idée, c’est toujours non. Je ne suis pas surpris ». La méthode Breton : « essayer en permanence et sans tabou de mettre sur la table les grands enjeux auxquels nous sommes confrontés nous en Europe ». Thierry Breton, qui se revendique comme le commissaire européen aux industries de Défense, a su faire le job dans un contexte difficile.

Société et Intelligence artificielle : quelle éthique ?

Société et  Intelligence artificielle : quelle éthique ?

 Pour Laetitia Pouliquen, directrice du think tank «NBIC Ethics», si la généralisation de l’IA et des algorithmes ne s’accompagne pas d’une réflexion sur la nature de l’homme, la société risque de sombrer dans des dérives dystopiques et transhumanistes. Interview dans le Figaro
Laetitia Pouliquen est directrice de «NBIC Ethics», un think tank traitant de l’éthique des technologies auprès des institutions européennes. Elle est également l’auteur de Femme 2.0: Féminisme et transhumanisme: quel avenir pour la femme? (éd. Saint-Léger, 2016).
Pour beaucoup, la généralisation de l’intelligence artificielle dans notre quotidien va profondément transformer notre mode de vie. Pensez-vous que le monopole des GAFAM dans ce domaine laisse suffisamment de place à une réflexion éthique quant à ces changements ?
Laetitia POULIQUEN. – Il est évident que notre quotidien va être profondément transformé, que ce soit dans notre rapport au réel ou à l’autre, par l’immission de la machine, de l’IA, et des algorithmes dans nos vies journalières. Le social, le sociétal, et même l’anthropologie sont en train de se refaçonner. La digitalisation de notre quotidien nous fait perdre de vue une certaine vision de l’homme. Face à ces changements, une réflexion morale est nécessaire pour établir un cadre légal, pour ne pas oublier ce qu’est l’homme et en quoi se différencie-t-il de la machine.

Cette réflexion éthique dans le domaine de l’I.A est tout à fait possible, notamment dans le cadre de l’Union européenne. Nous, européens, sommes pris entre deux feux, d’une part les GAFAM américaines, et d’autre part les BATX chinoises (Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi), et nous restons limités en termes d’investissement, de recherche et de développement. Cependant, notre approche qui est plus axée sur l’éthique que sur l’investissement, nous confère un rôle tout particulier dans le développement des nouvelles technologies. L’Europe est historiquement le premier foyer de réflexion philosophique et morale, et doit continuer de l’être dans les secteurs de pointe.

L’approche morale de l’Union européenne vis-à-vis de l’IA, notamment avec son «Guide éthique de l’intelligence artificielle», est-elle toujours pertinente ?

Toute réflexion morale, que ce soit dans le domaine de la robotique ou autre, s’appuie sur une certaine conception de l’homme et du monde, qui peut être parfois totalement déconnectée. Ainsi, bien qu’elle se veuille «éthique», l’approche de l’Union européenne n’est pas nécessairement bonne, tout dépend des fondements anthropologiques sur lesquels elle s’appuie.

Nous sommes, en occident, perdus dans une errance morale sans fin. Il faut réinvestir la philosophie et les humanités dans le domaine de l’I.A.

En 2017, par exemple, le rapport Delvaux présenté auprès de la Commission européenne a provoqué beaucoup de débats. Dans ce rapport législatif, la député européenne luxembourgeoise Maddy Delvaux, proposait certaines mesures très idéalisées et idéologisées quant à la défense des robots. Certains articles présentaient l’augmentation de l’homme comme quelque chose d’essentiellement positif, d’autres établissaient la notion de personnalité morale pour les robots, afin de les faire sujets de droits… La version originale voulait même permettre aux robots d’avoir un patrimoine assurantiel et d’investir en Bourse, afin de pouvoir financer leur propre évolution, on nageait en plein délire dystopique. Ce texte s’appuyait sur une conception de l’homme et de la machine totalement déconnectée de la réalité, qui ne différenciait plus le vivant du mécanique.

Nous avons donc rédigé une lettre ouverte à la Commission européenne, avec le soutien de 300 signataires européens, afin d’alerter sur les dangers de ce projet. Et parmi ces 300 personnes, il n’y avait pas que des représentants du secteur technologique, mais aussi des philosophes, des anthropologues, des psychiatres, et même des théologiens, pour bien rappeler ce qu’est l’homme, et sa différence avec la machine. Il est nécessaire de remettre les penseurs au centre de la réflexion sur l’intelligence artificielle, et de les intégrer aux groupes d’experts de la Commission européenne. Cependant, malgré quelques modifications et une large médiatisation de notre lettre ouverte, le rapport Delvaux a fini par être adopté.

Comment l’État et l’Union européenne peuvent-ils mettre en place une éthique de l’intelligence artificielle, alors qu’ils se proclament neutre et refusent d’imposer des normes morales à l’individu ?

C’est le principal problème de notre époque. Légiférer sur des questions morales à propos de l’IA est devenu presque impossible aujourd’hui, du fait du relativisme de notre société. Il n’y a plus de socle commun, de principes universels sur lesquels s’appuyer. Quand on ne sait plus dire ce qu’est l’homme, on ne sait plus dire ce qu’est la machine. L’individu moderne ne supporte plus d’autre ordre moral et naturel que son propre désir. Le «je» est devenu la mesure de l’humanité. Et la déconnexion du réel, liée au numérique, renforce ce relativisme. Nous sommes, en occident, perdus dans une errance morale sans fin. Il faut réinvestir la philosophie et les humanités dans ce domaine.

Les comités censés être «éthiques», ont donc tendance à s’appuyer non pas sur la morale mais sur une logique capitalistique, car les bénéfices, eux, ne sont pas relatifs. Et on a vu cela très clairement dans le «Guide d’éthique de la Commission européenne» sur l’intelligence artificielle, qui a fait suite au rapport Delvaux. Parmi les 53 experts qui ont participé à ce guide, 90% d’entre eux étaient dans le business technologique, experts, ou représentants de groupes de consommateurs, mais il n’y avait presque aucun philosophe, anthropologue, ou psychiatre… L’approche n’était absolument pas humaine, mais économique. Si l’on ne se pose pas la question de ce qu’est l’homme, les guides d’éthique sur l’IA risquent de se transformer en véritables projets dystopiques et transhumanistes.
Que conseillez-vous pour encadrer l’utilisation de l’IA et répondre aux problèmes d’éthique ?

J’avais proposé plusieurs éléments lors de la rédaction du «Guide d’éthique sur l’I.A» à l’Union européenne. Une des propositions portait sur la liberté de l’individu. L’idée était de permettre à l’utilisateur, s’il ne veut pas passer par un algorithme, que ce soit pour un contrat d’assurance, un prêt ou autre, de demander une interaction humaine. Je recommandais donc une graduation, une notation, qui permet de voir si on a affaire à un service «entièrement I.A», «IA avec supervision humaine», ou «entièrement humain». Quand on parle de justice, de banque, de gestion du patrimoine, et surtout des droits de l’homme, il est essentiel de savoir à qui on a affaire, un humain ou une I.A. Mais ça n’a pas été repris, l’approche de ce guide d’éthique est restée bien plus juridique qu’éthique.

J’avais également tenté de mettre en place un label pour les algorithmes, qui s’appelait «Ethic inside», et qui garantirait le respect des règles éthiques européennes. Mais il est presque impossible de suivre le chemin par lequel un algorithme en est arrivé à telle ou telle décision, et donc de dire s’il est éthique ou non, s’il respecte les règles. Il y a également la question de la responsabilité qui complique les choses. Qui est responsable des décisions d’un algorithme : l’entreprise, le développeur, l’utilisateur, ou l’IA elle-même ? Comment objectiver le caractère moral d’un algorithme si on ne peut même pas répondre à cette question ? Les développeurs ne peuvent pas être jugés responsables d’algorithmes tellement complexes qu’ils ne les maîtrisent plus totalement. Par sa nature même, l’I.A échappe en partie à notre contrôle, et on ne va pas pour autant lui donner une personnalité morale… C’est un vrai casse-tête. Il est donc extrêmement compliqué de mettre en place des points de contrôle pour des algorithmes aussi complexes, surtout quand ils sont mondialisés sur internet.

Société- Intelligence artificielle : quelle éthique ?

Société- Intelligence artificielle : quelle éthique ?

 Pour Laetitia Pouliquen, directrice du think tank «NBIC Ethics», si la généralisation de l’IA et des algorithmes ne s’accompagne pas d’une réflexion sur la nature de l’homme, la société risque de sombrer dans des dérives dystopiques et transhumanistes. Interview dans le Figaro
Laetitia Pouliquen est directrice de «NBIC Ethics», un think tank traitant de l’éthique des technologies auprès des institutions européennes. Elle est également l’auteur de Femme 2.0: Féminisme et transhumanisme: quel avenir pour la femme? (éd. Saint-Léger, 2016).
Pour beaucoup, la généralisation de l’intelligence artificielle dans notre quotidien va profondément transformer notre mode de vie. Pensez-vous que le monopole des GAFAM dans ce domaine laisse suffisamment de place à une réflexion éthique quant à ces changements ?
Laetitia POULIQUEN. – Il est évident que notre quotidien va être profondément transformé, que ce soit dans notre rapport au réel ou à l’autre, par l’immission de la machine, de l’IA, et des algorithmes dans nos vies journalières. Le social, le sociétal, et même l’anthropologie sont en train de se refaçonner. La digitalisation de notre quotidien nous fait perdre de vue une certaine vision de l’homme. Face à ces changements, une réflexion morale est nécessaire pour établir un cadre légal, pour ne pas oublier ce qu’est l’homme et en quoi se différencie-t-il de la machine.

Cette réflexion éthique dans le domaine de l’I.A est tout à fait possible, notamment dans le cadre de l’Union européenne. Nous, européens, sommes pris entre deux feux, d’une part les GAFAM américaines, et d’autre part les BATX chinoises (Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi), et nous restons limités en termes d’investissement, de recherche et de développement. Cependant, notre approche qui est plus axée sur l’éthique que sur l’investissement, nous confère un rôle tout particulier dans le développement des nouvelles technologies. L’Europe est historiquement le premier foyer de réflexion philosophique et morale, et doit continuer de l’être dans les secteurs de pointe.

L’approche morale de l’Union européenne vis-à-vis de l’IA, notamment avec son «Guide éthique de l’intelligence artificielle», est-elle toujours pertinente ?

Toute réflexion morale, que ce soit dans le domaine de la robotique ou autre, s’appuie sur une certaine conception de l’homme et du monde, qui peut être parfois totalement déconnectée. Ainsi, bien qu’elle se veuille «éthique», l’approche de l’Union européenne n’est pas nécessairement bonne, tout dépend des fondements anthropologiques sur lesquels elle s’appuie.

Nous sommes, en occident, perdus dans une errance morale sans fin. Il faut réinvestir la philosophie et les humanités dans le domaine de l’I.A.

En 2017, par exemple, le rapport Delvaux présenté auprès de la Commission européenne a provoqué beaucoup de débats. Dans ce rapport législatif, la député européenne luxembourgeoise Maddy Delvaux, proposait certaines mesures très idéalisées et idéologisées quant à la défense des robots. Certains articles présentaient l’augmentation de l’homme comme quelque chose d’essentiellement positif, d’autres établissaient la notion de personnalité morale pour les robots, afin de les faire sujets de droits… La version originale voulait même permettre aux robots d’avoir un patrimoine assurantiel et d’investir en Bourse, afin de pouvoir financer leur propre évolution, on nageait en plein délire dystopique. Ce texte s’appuyait sur une conception de l’homme et de la machine totalement déconnectée de la réalité, qui ne différenciait plus le vivant du mécanique.

Nous avons donc rédigé une lettre ouverte à la Commission européenne, avec le soutien de 300 signataires européens, afin d’alerter sur les dangers de ce projet. Et parmi ces 300 personnes, il n’y avait pas que des représentants du secteur technologique, mais aussi des philosophes, des anthropologues, des psychiatres, et même des théologiens, pour bien rappeler ce qu’est l’homme, et sa différence avec la machine. Il est nécessaire de remettre les penseurs au centre de la réflexion sur l’intelligence artificielle, et de les intégrer aux groupes d’experts de la Commission européenne. Cependant, malgré quelques modifications et une large médiatisation de notre lettre ouverte, le rapport Delvaux a fini par être adopté.

Comment l’État et l’Union européenne peuvent-ils mettre en place une éthique de l’intelligence artificielle, alors qu’ils se proclament neutre et refusent d’imposer des normes morales à l’individu ?

C’est le principal problème de notre époque. Légiférer sur des questions morales à propos de l’IA est devenu presque impossible aujourd’hui, du fait du relativisme de notre société. Il n’y a plus de socle commun, de principes universels sur lesquels s’appuyer. Quand on ne sait plus dire ce qu’est l’homme, on ne sait plus dire ce qu’est la machine. L’individu moderne ne supporte plus d’autre ordre moral et naturel que son propre désir. Le «je» est devenu la mesure de l’humanité. Et la déconnexion du réel, liée au numérique, renforce ce relativisme. Nous sommes, en occident, perdus dans une errance morale sans fin. Il faut réinvestir la philosophie et les humanités dans ce domaine.

Les comités censés être «éthiques», ont donc tendance à s’appuyer non pas sur la morale mais sur une logique capitalistique, car les bénéfices, eux, ne sont pas relatifs. Et on a vu cela très clairement dans le «Guide d’éthique de la Commission européenne» sur l’intelligence artificielle, qui a fait suite au rapport Delvaux. Parmi les 53 experts qui ont participé à ce guide, 90% d’entre eux étaient dans le business technologique, experts, ou représentants de groupes de consommateurs, mais il n’y avait presque aucun philosophe, anthropologue, ou psychiatre… L’approche n’était absolument pas humaine, mais économique. Si l’on ne se pose pas la question de ce qu’est l’homme, les guides d’éthique sur l’IA risquent de se transformer en véritables projets dystopiques et transhumanistes.
Que conseillez-vous pour encadrer l’utilisation de l’IA et répondre aux problèmes d’éthique ?

J’avais proposé plusieurs éléments lors de la rédaction du «Guide d’éthique sur l’I.A» à l’Union européenne. Une des propositions portait sur la liberté de l’individu. L’idée était de permettre à l’utilisateur, s’il ne veut pas passer par un algorithme, que ce soit pour un contrat d’assurance, un prêt ou autre, de demander une interaction humaine. Je recommandais donc une graduation, une notation, qui permet de voir si on a affaire à un service «entièrement I.A», «IA avec supervision humaine», ou «entièrement humain». Quand on parle de justice, de banque, de gestion du patrimoine, et surtout des droits de l’homme, il est essentiel de savoir à qui on a affaire, un humain ou une I.A. Mais ça n’a pas été repris, l’approche de ce guide d’éthique est restée bien plus juridique qu’éthique.

J’avais également tenté de mettre en place un label pour les algorithmes, qui s’appelait «Ethic inside», et qui garantirait le respect des règles éthiques européennes. Mais il est presque impossible de suivre le chemin par lequel un algorithme en est arrivé à telle ou telle décision, et donc de dire s’il est éthique ou non, s’il respecte les règles. Il y a également la question de la responsabilité qui complique les choses. Qui est responsable des décisions d’un algorithme : l’entreprise, le développeur, l’utilisateur, ou l’IA elle-même ? Comment objectiver le caractère moral d’un algorithme si on ne peut même pas répondre à cette question ? Les développeurs ne peuvent pas être jugés responsables d’algorithmes tellement complexes qu’ils ne les maîtrisent plus totalement. Par sa nature même, l’I.A échappe en partie à notre contrôle, et on ne va pas pour autant lui donner une personnalité morale… C’est un vrai casse-tête. Il est donc extrêmement compliqué de mettre en place des points de contrôle pour des algorithmes aussi complexes, surtout quand ils sont mondialisés sur internet.

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