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Surconsommation et environnement: des explications pseudo-scientifiques

Surconsommation et environnement:  des explications pseudo-scientifiques

 

Des chercheurs en neurosciences et sociologie mettent en garde contre la thèse, qu’ils jugent scientifiquement infondée, selon laquelle une de nos structures cérébrales nous conditionnerait à surconsommer.

 

 

Selon Thierry Ripoll et Sébastien Bohler, les ravages écologiques liés à la surconsommation des ressources planétaires seraient dus aux comportements individuels déterminés par notre cerveau. Une structure, le striatum, piloterait par l’intermédiaire d’une molécule neurochimique, la dopamine, le désir de toujours plus, sans autolimitation, indiquaient-ils récemment dans un entretien au Monde. Cette thèse a des conséquences politiques : notre programmation biologique conditionnerait les organisations socio-économiques possibles. Le modèle de croissance économique serait le seul compatible avec le fonctionnement cérébral humain. Cela disqualifie les projets politiques de décroissance ou de stabilité basés sur la délibération démocratique. Conséquences possibles : changer notre nature comme défendu par les transhumanistes, ou contraindre à consommer moins de façon autoritaire.Cette thèse, qui n’a pas fait l’objet d’une expertise contradictoire, est sans fondement scientifique. Elle repose sur un mésusage des neurosciences, une lecture psycho-évolutionniste dévoyée et une méconnaissance des sciences humaines et sociales. Nous soulignons ici les inepties en neurosciences (les autres faiblesses scientifiques sont décrites dans une version plus longue de cette tribune).

Tout d’abord, le striatum ne produit pas de dopamine (il la reçoit), et la dopamine n’est pas l’« hormone du plaisir », ce que reconnut dès 1997 Roy Wise, auteur de cette hypothèse dans les années 1970. L’absence de « fonction stop » du striatum, pour lequel il faudrait toujours « augmenter les doses », est une invention de Sébastien Bohler (reprise sans recul par Ripoll) en contresens avec les études scientifiques. Plus largement, la vision localisationniste du XIXe siècle consistant à rattacher une fonction psychologique (le plaisir, le désir, l’ingéniosité) à une structure cérébrale est totalement obsolète. Le fonctionnement d’une aire cérébrale est donc rarement transposable en termes psychologiques, a fortiori sociologiques.

Rien ne justifie non plus une opposition entre une partie de cerveau « récente » (et rationnelle) et une autre « archaïque » (et émotionnelle, donc responsable de nos désirs). Le striatum, le système dopaminergique et le cortex frontal, régions du cerveau présentes chez tous les mammifères, ont évolué de concert. Chez les primates, dont les humains, le cortex préfrontal a connu un développement et une complexification sans équivalent. Mais cette évolution correspond aussi à l’accroissement de liens avec le reste du cerveau, dont le système dopaminergique et le striatum, qui se sont également complexifiés. Le striatum archaïque est donc un neuromythe.




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