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« Face au terrorisme protéiforme : une société de vigilance « ( Jean-Charles Brisard)

« Face au terrorisme protéiforme : une société de vigilance « ( Jean-Charles Brisard)

Jean-Charles Brisard, président du Centre d’analyse du terrorisme (CAT), évoque la menace terroriste « protéiforme, fragmentée, diffuse et largement imprévisible », qui impose selon de changer les méthodes de surveillance.

Tribune dans le JDD

« Depuis les lois de 1986, socle de notre arsenal antiterroriste, la lutte contre le terrorisme a longtemps été une cause d’union nationale transcendant les clivages politiques. Elle devient désormais, après chaque attentat, un enjeu partisan, instrumentalisé pour diviser, cliver la société, ce qui est précisément l’effet recherché par les terroristes. Certains ont du mal à accepter cette vérité que nos ennemis sont aussi des Français - 62% des auteurs d’attentats depuis Mohamed Merah. D’autres ne jurent que par les fichés S, prêtant aux fichiers une vertu qu’ils n’ont pas et oubliant que 60% des auteurs d’attentats depuis 2012 n’étaient pas fichés.

Nous sommes confrontés depuis deux ans à un terrorisme endogène de faible intensité qui est le fait d’individus majoritairement inconnus des services de renseignement. Ils mettent en œuvre des modes opératoires improvisés, des armes rudimentaires et n’ont plus de liens avec des réseaux ou organisations terroristes. Ces passages à l’acte sont nourris par la propagande djihadiste, mais aussi par les exhortations de la mouvance islamiste radicale, comme l’a montré l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine. Enfin, la majorité des actes terroristes (60% ces trois dernières années) ont lieu en province.

Il convient d’amplifier ce mouvement pour associer les maires à l’évaluation du risque, à la détection et à la prévention

La menace est donc protéiforme, fragmentée, diffuse et largement imprévisible, échappant en grande partie à la détection des services de renseignement. Elle nous impose un changement de paradigme pour adapter notre organisation et nos méthodes afin d’impliquer tous les services de l’État et les collectivités locales.

Le président de la République a eu les mots justes après l’attentat de la préfecture de police de Paris en octobre 2019, évoquant une « société de vigilance ». L’État ne peut pas tout et doit s’appuyer en premier lieu sur les capteurs locaux dont disposent les maires pour créer un maillage territorial préventif au plus près de la menace. Cette évolution passera par de nouveaux moyens juridiques au profit des polices municipales pour faire d’elles de véritables auxiliaires des services de l’État.

La France doit également lever des verrous institutionnels ou juridiques qui n’ont plus lieu d’être. S’agissant du partage des fichiers des individus radicalisés et fichés S avec les maires, la circulaire Castaner de 2018 était un premier pas, très timide. Il convient d’amplifier ce mouvement pour associer les maires à l’évaluation du risque, à la détection et à la prévention. Il s’agit également de permettre l’usage, bloqué par la CNIL, de technologies biométriques au service de la sécurité des Français. Avec un impératif commun : faire mieux, avec de nouveaux acteurs, et innover dans nos méthodes et nos outils. »




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