Archive pour le Tag 'pourquoi ?'

Pourquoi la baisse de natalité

Pourquoi la baisse de natalité

 

La baisse de la natalité est un phénomène que l’on observe partout dans le monde aujourd’hui. En Afrique subsaharienne, la baisse est plus lente, et ce continent reste l’unique région où la croissance démographique continue fortement, représentant environ 80 % de l’accroissement démographique mondial d’ici à la fin du siècle. Ailleurs, la natalité est souvent inférieure à deux enfants par femme. En Asie de l’Est, notamment en Chine, au Japon et en Corée du Sud, ainsi qu’en Europe de l’Est et du Sud, les taux de natalité sont extrêmement faibles et le déclin de la population a déjà commencé. Des pays comme la France, les pays scandinaves, ou encore les États-Unis, maintiennent des taux de natalité un peu plus élevés. Cependant, selon l’Insee, en France, à partir de 2035 environ, le nombre de décès devrait dépasser celui des naissances.

 

par 

Professeur d’Economie, ENSAE ParisTech dans The Conversation 

Que nous enseignent ces pays plus « avancés » dans leur vieillissement ?

Dans les pays d’Asie de l’Est, cela fait plusieurs décennies que le taux de fécondité est inférieur au seuil de remplacement des générations. Une fois que la natalité atteint un seuil très bas – proche d’un enfant par femme –, il semble difficile de la faire remonter. Ces pays sont pris dans un cercle vicieux : les familles ayant peu d’enfants investissent massivement dans leur éducation. La concurrence entre familles pousse à inscrire les enfants dans des activités coûteuses et élitistes, rendant l’éducation encore plus onéreuse. Par contraste, dans des pays plus égalitaires, comme les pays d’Europe du Nord, la pression sur les enfants est moins forte et ils coûtent moins cher aux parents.
Quels sont les principaux mécanismes qui provoquent la baisse de la natalité ?

Il y a deux grands types de raisons : d’une part, les contraintes et, d’autre part, les préférences individuelles et les normes sociales. Les contraintes concernent les personnes qui aimeraient avoir plus d’enfants mais qui ne le peuvent pas. Elles peuvent être financières, comme le coût du logement ou de l’éducation ; temporelles, car les rythmes de travail ne laissent pas assez de temps pour s’occuper d’un autre enfant ; ou biologiques, avec l’augmentation de l’âge au premier enfant et de l’infertilité. Ces contraintes sont des leviers sur lesquels l’État peut agir. Son rôle est d’aider les citoyens à faire les choix qui leur conviennent, en levant au maximum ces obstacles.

Dans ce cadre, l’intervention de l’État est légitime. En revanche, il y a une autre catégorie de raisons, liées aux normes sociales et aux préférences individuelles : ce que les gens souhaitent vraiment pour leur vie. Ici, je pense que l’État n’a pas à intervenir. Ce n’est pas son rôle de dire aux citoyens qu’ils devraient avoir d’autres préférences ou aspirations. Historiquement, les tentatives des États pour influer sur ces préférences ont rarement abouti. C’est pourquoi, j’organise la réflexion de cette manière : d’un côté, les contraintes, sur lesquelles l’État peut agir ; de l’autre, les préférences, qui relèvent des individus et des dynamiques sociales plus profondes.

Dans vos travaux, vous avez étudié l’impact des politiques familiales. Qu’est-ce qui détermine l’efficacité de ces politiques ? Y a-t-il des limites à celles-ci dans leur capacité à influencer les décisions familiales ?

On pense tout de suite aux incitations financières, comme les allocations familiales. Ce type de politique a été étudié dans de nombreux pays, dont la France. La conclusion générale est qu’elles ont peu d’effet sur la natalité. Même en Corée du Sud, où les allocations sont très élevées, la natalité a peu bougé. En France, une grande partie de la subvention au coût de l’enfant passe en fait par l’éducation et la santé, qui sont quasiment gratuites comparées aux pays anglo-saxons ou asiatiques. L’éducation, en particulier, représente une part énorme du coût d’un enfant. Les Français ne s’en rendent peut-être pas toujours compte, mais avoir un enfant coûte relativement peu cher aux parents en France.

Sur la contrainte de temps, il est crucial de permettre aux femmes de concilier carrière et vie familiale. Pendant longtemps, on observait une corrélation négative entre le taux d’emploi des femmes et la natalité : ou bien les femmes travaillaient, ou bien elles avaient des enfants. Mais au XXIᵉ siècle, cette corrélation s’est inversée. Aujourd’hui, dans les pays européens où les femmes travaillent le plus, comme la France, la natalité est aussi plus élevée. En revanche, dans des pays où le taux d’emploi des femmes est plus bas, comme l’Italie ou l’Allemagne, la natalité est également faible. L’explication est simple : dans les pays où les femmes doivent choisir, certaines privilégient le travail, d’autres, les enfants ; alors que dans les autres pays, elles peuvent concilier les deux. Cela passe par une prise en charge collective des enfants, avec des crèches accessibles et des écoles aux horaires adaptés, comme c’est le cas en France. Il y a aussi la question, complexe, de la répartition des tâches entre hommes et femmes. Par exemple, le congé paternité vise à encourager les hommes à s’impliquer davantage, mais une étude espagnole récente montre que les couples où les hommes prennent leur congé paternité ont moins souvent un autre enfant. Ce n’est pas encore un résultat généralisé, mais il invite à nuancer l’idée que la participation des hommes à l’éducation des jeunes enfants stimulerait automatiquement la natalité.

Enfin, il y a la contrainte biologique, notamment avec le développement de la procréation médicalement assistée (PMA) et d’autres innovations médicales. Je n’ai pas encore lu d’études quantifiant leur effet causal agrégé sur la natalité, mais c’est un sujet à explorer. Sur la contraception, les études ont montré qu’elle a permis aux femmes de repousser la première naissance, avec des effets positifs sur leurs études et leurs carrières. Cela change le timing des naissances, mais l’impact sur le nombre total d’enfants reste faible.

 

À côté de ces politiques, quel est le poids des normes sociales et des préférences individuelles dans le choix d’avoir des enfants ?

Le poids des normes sociales et des préférences individuelles est important. Elles sont façonnées par trois facteurs majeurs. Le premier, déjà mentionné, concerne le niveau de concurrence et d’inégalités entre familles. Dans des sociétés où il est crucial que les enfants soient en tête de la course, les parents investissent beaucoup de temps et de ressources, ce qui limite le nombre d’enfants. C’est particulièrement visible en Asie. Le deuxième facteur est lié à l’évolution des motivations économiques. Autrefois, les enfants jouaient un rôle essentiel, en tant que main-d’œuvre dans les fermes ou en tant que soutien des parents vieillissants.

Avec l’émergence de l’État providence, des systèmes de retraite et d’assurance maladie, cette fonction économique des enfants a disparu. L’État ayant pris en charge ces risques, le besoin d’avoir plusieurs enfants s’est considérablement réduit. Enfin, l’émancipation des femmes a eu un impact majeur. La fin du baby-boom coïncide avec une avancée significative des droits des femmes dans les démocraties occidentales : accès à l’emploi, indépendance financière. Autrefois, devenir mère était souvent la seule option de vie pour les femmes. Aujourd’hui, avec un éventail de choix beaucoup plus large, il n’est pas surprenant que certaines optent pour des parcours différents. Ces transformations sont des choix de société qui vont bien au-delà des questions de natalité.

Les enjeux sont très différents pour des pays vieillissants et pour des pays « jeunes ». Si les premiers peuvent avoir intérêt à stimuler les naissances, les seconds cherchent à les limiter. Finalement, y a-t-il une situation démographique optimale ?

Je dirais : non. Selon les contextes, les préoccupations varient. Dans les pays où la natalité est élevée, on s’inquiète de l’explosion démographique : comment loger, nourrir, éduquer et intégrer les nouvelles générations dans l’économie et la société ? À l’inverse, dans les pays où la natalité est basse, la question devient : comment financer notre système de protection sociale ? Comment continuer à innover et à produire avec une main-d’œuvre vieillissante ? Ces deux situations sont souvent perçues comme des menaces. Cependant, il est aussi possible de les voir sous un autre angle. Une population jeune peut être vue comme un atout, car elle est plus dynamique, créative et capable d’innover. Et il y a beaucoup d’actifs pour prendre en charge les inactifs. À l’inverse, une croissance démographique faible, voire négative, a aussi des avantages, en termes de stabilité politique, préservation des ressources, intégration des jeunes sur le marché de l’emploi. On se focalise souvent sur l’objectif de deux enfants par femme, car cela permet de maintenir une population stable. Mais, en réalité, un tel équilibre ne doit pas être perçu comme l’idéal, car il peut aussi signifier une stagnation. Chaque situation démographique présente des avantages et des inconvénients. L’important est d’identifier ces enjeux pour tirer parti des opportunités tout en minimisant les risques.

Société-Mayotte et les bidonvilles: pourquoi ?

Société-Mayotte et les bidonvilles: pourquoi ?

Analysant le démantèlement récent des bidonvilles à Mayotte, la politiste Laurie Servières met en lumière l’incapacité de l’État français à gérer la question de l’habitat informel autrement que par la violence dans le site « Metropolitics ».

101e département français depuis l’année 2011, Mayotte est incontestablement aussi le plus pauvre. En 2020, l’INSEE estimait que 77 % de ses habitants vivaient sous le seuil de pauvreté. De la déscolarisation au mal-logement, en passant par l’insécurité alimentaire ou l’accès insuffisant à l’eau, l’île affiche des résultats alarmants, en matière de développement et de protection sociale. Pourtant, c’est au prisme d’une approche essentiellement sécuritaire et militaire que le ministère de l’Intérieur, sollicité de longue date par certains élus mahorais, a décidé d’intervenir en avril 2023. Avec l’envoi de plus de 500 représentants des forces de l’ordre et une opération « Wuambushu » aux connotations guerrières non dissimulées (en mahorais, ce terme signifie « reprise »), il s’est lancé dans un âpre combat contre trois ennemis identifiés : la délinquance organisée, l’habitat informel et l’immigration incontrôlée. C’est sur le deuxième enjeu que porte cet article, car il fait de l’opération Wuambushu l’exemple le plus récent (mais aussi le plus massif et médiatisé) de réponse publique à une problématique complexe et qui déborde largement du cas mahorais : la question des bidonvilles. L’analyse de la composante d’éradication de l’habitat précaire de cette intervention sert ainsi de porte d’entrée à une réflexion plus large sur le traitement de cette question épineuse par les acteurs gouvernementaux français.

 

À Mayotte, une grande partie de la population réside dans des bidonvilles, que l’on appelle, sur place, des « bangas ». En 2017, 38 % des logements de l’île étaient construits en tôles et 37 % de l’habitat en dur ne bénéficiait pas du confort sanitaire de base. Loin de constituer une spécificité mahoraise, la production d’habitat informel apparaît dans de nombreux pays comme une des principales modalités de logement pour des populations à faibles revenus. Si elle s’accompagne souvent de risques (sanitaires, géologiques, climatiques, sociaux, etc.) et de conditions précaires d’existence (accès aux services urbains déficient, constructions hors normes, surpeuplement), elle offre une solution alternative à des millions de familles, dans un contexte de pénurie généralisée de logement abordable.

Historiquement, pourtant, la production informelle d’habitat s’est heurtée à l’hostilité des riverains et des gouvernements, qui n’ont cessé de stigmatiser les bidonvilles et leurs habitants. Tout au long du XXe siècle, la réponse des autorités à la formation et à l’expansion de ces quartiers a oscillé entre deux types de comportements : le laissez-faire, caractérisée par une tolérance tacite, ponctuelle et relative (car de fréquentes « descentes » policières pouvaient tout de même être menées) ; « l’éradication » ou délogement, consistant à expulser les habitants au prétexte de leur statut foncier irrégulier, souvent en détruisant derrière eux les habitations pour empêcher leur retour. Les travaux des historiens (de Almeida Abreu et Le Clerre 1994 ; Gonçalves Soares 2010 ; Vorms 2012) ont documenté la brutalité des opérations de démolition au bulldozer lancées dans certaines villes au début du siècle dernier, dont on semble aujourd’hui retrouver de tardives et très problématiques répliques dans les « décasages » à Mayotte.

Le recours à de telles pratiques a pourtant beaucoup reculé, depuis le milieu du XXe siècle, résultat des avancées normatives obtenues sur la scène multilatérale et de la diffusion progressive de nouveaux modèles d’intervention, fondés sur la reconnaissance et l’amélioration des quartiers autoproduits. À partir des années 1970, l’émergence d’un débat international sur ce qu’on a appelé au départ « les établissements humains » a permis d’enclencher un mouvement de remise en question des modalités violentes d’intervention dans les bidonvilles. Condamnées pour les graves violations des droits humains qu’elles pouvaient générer, les politiques d’éradication ont aussi été pointées du doigt pour leur inefficacité, au regard de leur tendance à « disperser » l’habitat informel. De plus en plus impopulaires, elles ont même fait l’objet d’une mise au ban par certaines organisations internationales, soit par la création de normes spécifiques, soit par l’introduction de clauses de « non-éviction » dans les accords de coopération financière. L’avancée de la recherche a permis la reconnaissance progressive des causes profondes de la production d’habitat informel, réhabilitant celle-ci, sinon comme solution, du moins comme réponse à une demande de logements abordables insatisfaite par les marchés et gouvernements (Deboulet 2016). Des rencontres et discussions multilatérales ont enfin permis d’ancrer dans le droit international des principes fondamentaux de « non-éviction » et de droit au sol et au logement.

À partir des années 1990, forte de son expérience sur ces questions et de celle de ses experts, mondialement reconnus, la France s’est positionnée à l’avant-garde de ces débats. Très proactive lors des rencontres onusiennes Habitat II, en 1996, et Habitat III, en 2016, elle s’est prononcée en faveur de l’inscription dans le Nouvel Agenda Urbain du droit à la ville, un concept forgé par le philosophe français Henri Lefebvre. Moins de dix ans après, les images des démolitions massives de bidonvilles à Mayotte semblent pourtant questionner sa propre compréhension et mise en application d’un urbanisme vertueux et inclusif.

Contradictions françaises et exception mahoraise

À en croire Estelle Youssouffa, députée de la première circonscription mahoraise, la loi française défendrait un principe d’application différenciée du droit à la ville, à l’aune du statut des personnes. Et quand, au micro de France Inter, on l’interroge sur la possibilité ou non de reloger tous les habitants de bidonvilles de l’île, la députée rétorque :

Non. Non non, parce qu’en fait, là, dans votre question, ça sous-entend que, parce qu’on occupe illégalement un terrain et qu’on est dans un bidonville, on a droit au relogement. Non, si vous êtes en situation régulière et que vous êtes français, vous avez droit à un relogement temporaire, c’est la loi. [Ce n’]est pas un relogement permanent, c’est un relogement temporaire. Et pour les personnes qui sont en situation régulière ou français[es]. Donc une grande partie des habitants dans les bidonvilles à Mayotte sont des étrangers en situation irrégulière : ils ont vocation à être expulsés et c’est l’application du droit.

Deux distinctions font jour dans cette citation. La première, entre les propriétaires et les squatteurs, aboutit à faire de l’accès à la ville un droit payant, conditionné à des facteurs socio-économiques. Un urbanisme d’élite, en somme, que dénoncent plusieurs acteurs associatifs et militants à Mayotte. « Le souci de l’État est de chasser les pauvres de Mayotte. C’est indigne de la France, les maisons en tôle », dénonce Daniel Gros, le référent local de la Ligue des droits de l’Homme.

La seconde distinction, centrée sur le critère de nationalité, implique de n’accorder qu’aux « vrais français » (et résidents réguliers) la possibilité de bénéficier d’un relogement. Un filtrage assez surprenant, au regard de la reconnaissance désormais très large du droit au relogement sur la scène internationale, mais qui a fait la triste renommée de la France au cours des dernières années. Des expulsions répétées de migrants à Calais à celles, plus récentes, du quartier de La Chapelle à Paris, le non-relogement des étrangers semble désormais correspondre à la norme, au pays des droits de l’homme.

Dans ce contexte français déjà particulier, il faut savoir qu’à Mayotte un régime juridique encore plus particulier s’applique en matière de régulation de l’habitat informel. Depuis la loi ELAN de 2018, ce département « bénéficie », avec la Guyane, d’un statut exceptionnel qui permet au préfet de décider de la destruction des bidonvilles qui menaceraient « la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publique ».

En métropole et sur le reste du territoire français, une enquête préalable doit être menée pour justifier l’adoption de mesures d’expulsion : le droit qui s’applique à Mayotte s’inscrit donc dans un régime juridique ad hoc, qui n’est pas sans rappeler « l’état d’exception » du philosophe Agamben (2003). C’est d’ailleurs cette « exception » mahoraise qui a finalement permis à l’opération Wuambushu d’avoir lieu, alors qu’une décision de justice avait, en première instance, déclaré son interdiction.

Un des motifs de cet arrêt judiciaire portait encore une fois sur la question du relogement : centrale dans le débat sur le traitement de bidonvilles, mais visiblement très secondaire dans la planification des « décasages » en chaîne qui ont eu lieu à Mayotte depuis le mois d’avril. Plusieurs associations françaises dénoncent à cet égard de graves manquements au respect des droits humains ; elles sont relayées par des médias internationaux scandalisés qui s’interrogent sur le sort des habitants des plus de 500 logements détruits depuis la fin avril 2023. Aux yeux du gouvernement, l’argument de la non-nationalité semble primer sur toute autre considération sociale et sur l’application du droit au relogement, pourtant mentionné dans la loi ELAN.

L’ensemble de ces éléments ne laisse d’interroger quant au bien-fondé de l’approche assumée par les autorités françaises à Mayotte. Pour autant, l’opération Wuambushu est-elle une réaction « exceptionnelle » de la part d’un État au pied du mur ou exprime-t-elle un trait plus fondamental de la politique française en matière de traitement de l’habitat informel ?

Penser le cas mahorais dans l’histoire longue du traitement des bidonvilles en France

Dans l’hexagone et depuis la parution de la circulaire du 25 janvier 2018 sur « la résorption des campements illicites et des bidonvilles », le traitement des questions d’habitat informel est l’affaire de la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement, DIHAL. Rattachée aux services du Premier ministre, celle-ci a pour mission d’accompagner les autorités locales et régionales dans la mise en œuvre de politiques préventives, vis-à-vis de ces espaces. Or la circulaire ne s’applique pas aux Outre-mer, administrés directement par la Direction générale aux Outre-mer, DGOM. Un véritable paradoxe institutionnel, quand la population d’un seul bidonville mahorais parvient déjà à dépasser celle de l’ensemble des bidonvilles de l’hexagone. Ce découpage administratif explique également le fait que les habitants des bidonvilles ultramarins ne soient pas répertoriés dans les recensements nationaux de l’habitat informel.

Si on le replace dans la trajectoire longue du traitement de l’habitat informel en France, le recours quasi systématique à l’expulsion à Mayotte depuis l’entrée en vigueur de la loi ELAN s’apparente à une « règle » plutôt qu’à une exception. À une poignée d’expérimentations près (généralement portées par des organisations de la société civile), le délogement a été un levier d’action privilégié face au développement ou à la persistance de l’habitat informel, dans l’hexagone comme en Outre-mer. En 2016, le Collectif national droits de l’Homme Romeurope faisait « le triste constat de la continuité d’une politique d’expulsions répétées des habitants des bidonvilles et des squats. »

À cet égard, la circulaire de 2018 a certes représenté une avancée en termes d’institutionnalisation de la réflexion sur la question des bidonvilles, mais elle n’a pas fondamentalement changé la donne sur le terrain des politiques publiques. Sous ses allures relativement compréhensives, la « mission bidonvilles » de la DIHAL continue d’ailleurs d’inscrire son action dans une perspective de « résorption », un terme où transparaît encore l’objectif d’éradication, à rebours de la vision d’amélioration ou d’intégration qui est désormais privilégiée dans le débat international.

Une autre constante du traitement de la question des bidonvilles en France, que l’on retrouve dans le cas de l’opération Wuambushu, a été son ethnicisation (Aguilera et Vitale 2015). À partir de la seconde moitié du XXe siècle, en effet, la thématique du mal-logement n’a cessé d’être abordée au prisme d’approches sécuritaires, souvent teintées de xénophobie. De l’importation du terme bidonville en métropole, après l’indépendance des colonies, à la culpabilisation à Mayotte d’un « envahisseur » comorien, en passant par trente années de « question rom » à Paris et dans tout l’hexagone (Aguilera 2020) : l’habitat informel a systématiquement été associé à des enjeux migratoires et des discours sur la délinquance présumée d’une population « externe », d’un ennemi non français. Les spécialistes s’accordent ainsi pour affirmer que la question des bidonvilles, en France, n’a jamais été pensée pour elle-même. Pour le politiste Thomas Aguilera (2020), cet impensé découle aussi de décisions et d’actions délibérées de la part des élites gouvernantes : « le ministère de l’Intérieur et les préfectures sont restés propriétaires de l’enjeu, empêchant explicitement les ministères du Logement ou des Affaires sociales de s’en saisir ». La violence de l’opération Wuambushu et des décisions assumées au cours des derniers mois par le binôme Gérald Darmanin (ministre de l’Intérieur) – Thierry Suquet (préfet de Mayotte) révèle aujourd’hui les implications de cette capture et de la faiblesse du dispositif français en matière de traitement des enjeux d’habitat informel et précaire.

Mayotte et les bidonvilles: pourquoi ?

 Mayotte et les bidonvilles: pourquoi ?

Analysant le démantèlement récent des bidonvilles à Mayotte, la politiste Laurie Servières met en lumière l’incapacité de l’État français à gérer la question de l’habitat informel autrement que par la violence dans le site « Metropolitics ».

101e département français depuis l’année 2011, Mayotte est incontestablement aussi le plus pauvre. En 2020, l’INSEE estimait que 77 % de ses habitants vivaient sous le seuil de pauvreté. De la déscolarisation au mal-logement, en passant par l’insécurité alimentaire ou l’accès insuffisant à l’eau, l’île affiche des résultats alarmants, en matière de développement et de protection sociale. Pourtant, c’est au prisme d’une approche essentiellement sécuritaire et militaire que le ministère de l’Intérieur, sollicité de longue date par certains élus mahorais, a décidé d’intervenir en avril 2023. Avec l’envoi de plus de 500 représentants des forces de l’ordre et une opération « Wuambushu » aux connotations guerrières non dissimulées (en mahorais, ce terme signifie « reprise »), il s’est lancé dans un âpre combat contre trois ennemis identifiés : la délinquance organisée, l’habitat informel et l’immigration incontrôlée. C’est sur le deuxième enjeu que porte cet article, car il fait de l’opération Wuambushu l’exemple le plus récent (mais aussi le plus massif et médiatisé) de réponse publique à une problématique complexe et qui déborde largement du cas mahorais : la question des bidonvilles. L’analyse de la composante d’éradication de l’habitat précaire de cette intervention sert ainsi de porte d’entrée à une réflexion plus large sur le traitement de cette question épineuse par les acteurs gouvernementaux français.

 

À Mayotte, une grande partie de la population réside dans des bidonvilles, que l’on appelle, sur place, des « bangas ». En 2017, 38 % des logements de l’île étaient construits en tôles et 37 % de l’habitat en dur ne bénéficiait pas du confort sanitaire de base. Loin de constituer une spécificité mahoraise, la production d’habitat informel apparaît dans de nombreux pays comme une des principales modalités de logement pour des populations à faibles revenus. Si elle s’accompagne souvent de risques (sanitaires, géologiques, climatiques, sociaux, etc.) et de conditions précaires d’existence (accès aux services urbains déficient, constructions hors normes, surpeuplement), elle offre une solution alternative à des millions de familles, dans un contexte de pénurie généralisée de logement abordable.

Historiquement, pourtant, la production informelle d’habitat s’est heurtée à l’hostilité des riverains et des gouvernements, qui n’ont cessé de stigmatiser les bidonvilles et leurs habitants. Tout au long du XXe siècle, la réponse des autorités à la formation et à l’expansion de ces quartiers a oscillé entre deux types de comportements : le laissez-faire, caractérisée par une tolérance tacite, ponctuelle et relative (car de fréquentes « descentes » policières pouvaient tout de même être menées) ; « l’éradication » ou délogement, consistant à expulser les habitants au prétexte de leur statut foncier irrégulier, souvent en détruisant derrière eux les habitations pour empêcher leur retour. Les travaux des historiens (de Almeida Abreu et Le Clerre 1994 ; Gonçalves Soares 2010 ; Vorms 2012) ont documenté la brutalité des opérations de démolition au bulldozer lancées dans certaines villes au début du siècle dernier, dont on semble aujourd’hui retrouver de tardives et très problématiques répliques dans les « décasages » à Mayotte.

Le recours à de telles pratiques a pourtant beaucoup reculé, depuis le milieu du XXe siècle, résultat des avancées normatives obtenues sur la scène multilatérale et de la diffusion progressive de nouveaux modèles d’intervention, fondés sur la reconnaissance et l’amélioration des quartiers autoproduits. À partir des années 1970, l’émergence d’un débat international sur ce qu’on a appelé au départ « les établissements humains » a permis d’enclencher un mouvement de remise en question des modalités violentes d’intervention dans les bidonvilles. Condamnées pour les graves violations des droits humains qu’elles pouvaient générer, les politiques d’éradication ont aussi été pointées du doigt pour leur inefficacité, au regard de leur tendance à « disperser » l’habitat informel. De plus en plus impopulaires, elles ont même fait l’objet d’une mise au ban par certaines organisations internationales, soit par la création de normes spécifiques, soit par l’introduction de clauses de « non-éviction » dans les accords de coopération financière. L’avancée de la recherche a permis la reconnaissance progressive des causes profondes de la production d’habitat informel, réhabilitant celle-ci, sinon comme solution, du moins comme réponse à une demande de logements abordables insatisfaite par les marchés et gouvernements (Deboulet 2016). Des rencontres et discussions multilatérales ont enfin permis d’ancrer dans le droit international des principes fondamentaux de « non-éviction » et de droit au sol et au logement.

À partir des années 1990, forte de son expérience sur ces questions et de celle de ses experts, mondialement reconnus, la France s’est positionnée à l’avant-garde de ces débats. Très proactive lors des rencontres onusiennes Habitat II, en 1996, et Habitat III, en 2016, elle s’est prononcée en faveur de l’inscription dans le Nouvel Agenda Urbain du droit à la ville, un concept forgé par le philosophe français Henri Lefebvre. Moins de dix ans après, les images des démolitions massives de bidonvilles à Mayotte semblent pourtant questionner sa propre compréhension et mise en application d’un urbanisme vertueux et inclusif.

Contradictions françaises et exception mahoraise

À en croire Estelle Youssouffa, députée de la première circonscription mahoraise, la loi française défendrait un principe d’application différenciée du droit à la ville, à l’aune du statut des personnes. Et quand, au micro de France Inter, on l’interroge sur la possibilité ou non de reloger tous les habitants de bidonvilles de l’île, la députée rétorque :

Non. Non non, parce qu’en fait, là, dans votre question, ça sous-entend que, parce qu’on occupe illégalement un terrain et qu’on est dans un bidonville, on a droit au relogement. Non, si vous êtes en situation régulière et que vous êtes français, vous avez droit à un relogement temporaire, c’est la loi. [Ce n’]est pas un relogement permanent, c’est un relogement temporaire. Et pour les personnes qui sont en situation régulière ou français[es]. Donc une grande partie des habitants dans les bidonvilles à Mayotte sont des étrangers en situation irrégulière : ils ont vocation à être expulsés et c’est l’application du droit.

Deux distinctions font jour dans cette citation. La première, entre les propriétaires et les squatteurs, aboutit à faire de l’accès à la ville un droit payant, conditionné à des facteurs socio-économiques. Un urbanisme d’élite, en somme, que dénoncent plusieurs acteurs associatifs et militants à Mayotte. « Le souci de l’État est de chasser les pauvres de Mayotte. C’est indigne de la France, les maisons en tôle », dénonce Daniel Gros, le référent local de la Ligue des droits de l’Homme.

La seconde distinction, centrée sur le critère de nationalité, implique de n’accorder qu’aux « vrais français » (et résidents réguliers) la possibilité de bénéficier d’un relogement. Un filtrage assez surprenant, au regard de la reconnaissance désormais très large du droit au relogement sur la scène internationale, mais qui a fait la triste renommée de la France au cours des dernières années. Des expulsions répétées de migrants à Calais à celles, plus récentes, du quartier de La Chapelle à Paris, le non-relogement des étrangers semble désormais correspondre à la norme, au pays des droits de l’homme.

Dans ce contexte français déjà particulier, il faut savoir qu’à Mayotte un régime juridique encore plus particulier s’applique en matière de régulation de l’habitat informel. Depuis la loi ELAN de 2018, ce département « bénéficie », avec la Guyane, d’un statut exceptionnel qui permet au préfet de décider de la destruction des bidonvilles qui menaceraient « la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publique ».

En métropole et sur le reste du territoire français, une enquête préalable doit être menée pour justifier l’adoption de mesures d’expulsion : le droit qui s’applique à Mayotte s’inscrit donc dans un régime juridique ad hoc, qui n’est pas sans rappeler « l’état d’exception » du philosophe Agamben (2003). C’est d’ailleurs cette « exception » mahoraise qui a finalement permis à l’opération Wuambushu d’avoir lieu, alors qu’une décision de justice avait, en première instance, déclaré son interdiction.

Un des motifs de cet arrêt judiciaire portait encore une fois sur la question du relogement : centrale dans le débat sur le traitement de bidonvilles, mais visiblement très secondaire dans la planification des « décasages » en chaîne qui ont eu lieu à Mayotte depuis le mois d’avril. Plusieurs associations françaises dénoncent à cet égard de graves manquements au respect des droits humains ; elles sont relayées par des médias internationaux scandalisés qui s’interrogent sur le sort des habitants des plus de 500 logements détruits depuis la fin avril 2023. Aux yeux du gouvernement, l’argument de la non-nationalité semble primer sur toute autre considération sociale et sur l’application du droit au relogement, pourtant mentionné dans la loi ELAN.

L’ensemble de ces éléments ne laisse d’interroger quant au bien-fondé de l’approche assumée par les autorités françaises à Mayotte. Pour autant, l’opération Wuambushu est-elle une réaction « exceptionnelle » de la part d’un État au pied du mur ou exprime-t-elle un trait plus fondamental de la politique française en matière de traitement de l’habitat informel ?

Penser le cas mahorais dans l’histoire longue du traitement des bidonvilles en France

Dans l’hexagone et depuis la parution de la circulaire du 25 janvier 2018 sur « la résorption des campements illicites et des bidonvilles », le traitement des questions d’habitat informel est l’affaire de la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement, DIHAL. Rattachée aux services du Premier ministre, celle-ci a pour mission d’accompagner les autorités locales et régionales dans la mise en œuvre de politiques préventives, vis-à-vis de ces espaces. Or la circulaire ne s’applique pas aux Outre-mer, administrés directement par la Direction générale aux Outre-mer, DGOM. Un véritable paradoxe institutionnel, quand la population d’un seul bidonville mahorais parvient déjà à dépasser celle de l’ensemble des bidonvilles de l’hexagone. Ce découpage administratif explique également le fait que les habitants des bidonvilles ultramarins ne soient pas répertoriés dans les recensements nationaux de l’habitat informel.

Si on le replace dans la trajectoire longue du traitement de l’habitat informel en France, le recours quasi systématique à l’expulsion à Mayotte depuis l’entrée en vigueur de la loi ELAN s’apparente à une « règle » plutôt qu’à une exception. À une poignée d’expérimentations près (généralement portées par des organisations de la société civile), le délogement a été un levier d’action privilégié face au développement ou à la persistance de l’habitat informel, dans l’hexagone comme en Outre-mer. En 2016, le Collectif national droits de l’Homme Romeurope faisait « le triste constat de la continuité d’une politique d’expulsions répétées des habitants des bidonvilles et des squats. »

À cet égard, la circulaire de 2018 a certes représenté une avancée en termes d’institutionnalisation de la réflexion sur la question des bidonvilles, mais elle n’a pas fondamentalement changé la donne sur le terrain des politiques publiques. Sous ses allures relativement compréhensives, la « mission bidonvilles » de la DIHAL continue d’ailleurs d’inscrire son action dans une perspective de « résorption », un terme où transparaît encore l’objectif d’éradication, à rebours de la vision d’amélioration ou d’intégration qui est désormais privilégiée dans le débat international.

Une autre constante du traitement de la question des bidonvilles en France, que l’on retrouve dans le cas de l’opération Wuambushu, a été son ethnicisation (Aguilera et Vitale 2015). À partir de la seconde moitié du XXe siècle, en effet, la thématique du mal-logement n’a cessé d’être abordée au prisme d’approches sécuritaires, souvent teintées de xénophobie. De l’importation du terme bidonville en métropole, après l’indépendance des colonies, à la culpabilisation à Mayotte d’un « envahisseur » comorien, en passant par trente années de « question rom » à Paris et dans tout l’hexagone (Aguilera 2020) : l’habitat informel a systématiquement été associé à des enjeux migratoires et des discours sur la délinquance présumée d’une population « externe », d’un ennemi non français. Les spécialistes s’accordent ainsi pour affirmer que la question des bidonvilles, en France, n’a jamais été pensée pour elle-même. Pour le politiste Thomas Aguilera (2020), cet impensé découle aussi de décisions et d’actions délibérées de la part des élites gouvernantes : « le ministère de l’Intérieur et les préfectures sont restés propriétaires de l’enjeu, empêchant explicitement les ministères du Logement ou des Affaires sociales de s’en saisir ». La violence de l’opération Wuambushu et des décisions assumées au cours des derniers mois par le binôme Gérald Darmanin (ministre de l’Intérieur) – Thierry Suquet (préfet de Mayotte) révèle aujourd’hui les implications de cette capture et de la faiblesse du dispositif français en matière de traitement des enjeux d’habitat informel et précaire.

Bibliographie

  • Agamben, G. 2003. État d’exception, Homo sacer II, Paris : Éditions du Seuil.
  • Aguilera, T. 2020. « Chapitre 9. À l’ombre du Grand Paris : l’impossible gouvernance métropolitaine des bidonvilles franciliens », in P. Le Galès (dir.), Gouverner la métropole parisienne. État, conflits, institutions, réseaux, Paris : Presses de Sciences Po, p. 249-278.
  • Aguilera, T. et Vitale, T. 2015. « Bidonvilles en Europe, la politique de l’absurde », Revue Projet, n° 348, p. 68-75.
  • de Almeida Abreu, M. et Le Clerre, G. 1994. « Reconstruire une histoire oubliée. Origine et expansion initiale des favelas de Rio de Janeiro », Genèses, n° 16, p. 45-68.
  • Deboulet, A. (dir.). 2016. Repenser les quartiers précaires, Paris, Études de l’AFD.
  • Gonçalves Soares, R. 2010. Les Favelas de Rio de Janeiro. Histoire et droit, XIXe et XXe siècles, Paris : L’Harmattan.
  • Vorms, C. 2012. Bâtisseurs de banlieue à Madrid. Le quartier de la Prosperidad (1860-1936), Paris : Créaphis Éditions.

Faite

Limites de la Cop 29: pourquoi ?

Limites de la Cop 29: pourquoi ?

 

Les débats âpres auxquels cette conférence annuelle a donné lieu ont mis en évidence une fragilisation de la diplomatie climatique. Les pays développés ont opposé l’ampleur de l’effort financier demandé à une conjoncture économique et politique défavorable. ( papier du Monde)

 

La conclusion dans une grande confusion, le 24 novembre, de la 29e Conférence des parties sur le climat (COP29), organisée à Bakou (Azerbaïdjan), doit être considérée pour ce qu’elle est : un signal d’alarme. L’accord obtenu de justesse permet certes de ménager les apparences. En mettant en avant les 300 milliards de dollars (287 milliards d’euros) d’aide annuelle promis à l’horizon 2035 aux pays les plus pauvres, qui sont les plus touchés par les effets du changement climatique, les pays développés ont également beau jeu de mettre en avant le triplement, par rapport à leurs engagements précédents, d’une contribution qui ne repose cependant que sur le volontariat.

Il n’empêche. Les débats âpres auxquels cette conférence annuelle a donné lieu ont surtout mis en évidence une fragilisation de la diplomatie climatique, rattrapée par les mêmes effets corrosifs qui minent les autres outils du multilatéralisme. Donald Trump, dont l’ombre a plané sur Bakou et qui prendra place dans le bureau Ovale de la Maison Blanche le 20 janvier 2025, les incarne mieux que quiconque : nationalisme étriqué, primauté de l’unilatéralisme et négation de la réalité même du changement du climat et du lien avec les activités humaines.

L’affrontement Nord-Sud qui s’est matérialisé lors de cette conférence des Nations unies repose sur une équation devenue très difficile à résoudre. Plus les efforts prendront du retard dans la transition énergétique des pays en développement comme dans leur adaptation aux conséquences du changement climatique, plus les besoins vont grandir. C’est la raison pour laquelle ces pays ont campé sur des montants d’aide bien supérieurs aux 300 milliards de dollars qui constituent pourtant le point d’arrivée des négociations, critiquées avec virulence dans les secondes qui ont suivi leur conclusion.

Le petit groupe de pays développés a opposé l’ampleur de l’effort demandé de leur part, reflet de leur responsabilité historique dans la dette climatique à laquelle le monde est confronté, à une conjoncture économique et politique défavorable. Le ralentissement de la croissance, qui entraîne déjà des coupes claires dans leurs programmes d’aides, se double en effet d’un mouvement de contestation dans une partie de leurs opinions publiques contre la légitimité de tels engagements.

Cette bataille sur l’aide n’est pas le seul motif de déception. Un an après la Conférence des parties sur le climat de Dubaï, l’objectif d’une transition écologique hors des combustibles fossiles est resté au stade de l’incantation. Le travail de sape de l’Arabie saoudite et de la Chine a empêché toute avancée concrète. La défiance qui s’est exprimée à Bakou oblige même à considérer un rare point positif avec prudence.

Les règles régissant les marchés du carbone, c’est-à-dire les échanges d’émissions de CO2 entre pays et entreprises, ont enfin été adoptées après presque neuf ans de négociations, mais sans que leur application soit accompagnée d’outils de contrôle adéquats et de la transparence nécessaire.

Survenant juste après l’échec de la COP sur la biodiversité de Cali (Colombie), qui avait déjà achoppé sur la question des financements, les résultats pour le moins mitigés de Bakou font que le prochain rendez-vous prévu en 2025 à Belem, au Brésil, pourrait avoir des allures de quitte ou double pour le climat.

Pourquoi des étudiants ne savent plus écrire

Pourquoi des étudiants ne savent plus écrire

C’est la question que pose Aude Denisot professeur de droit à l’université du Maine dans son nouveau livre.  «Cette question ne peut plus rester accessoire. Dans aucune des disciplines qui demandent de la rédaction. Parce qu’au-delà d’un défaut d’orthographe, ce sont désormais des copies qu’on ne comprend plus».
«Mes élèves de Terminale deviennent incapables de construire une phrase avec logique. Ils ont du mal à structurer leur pensée, non pas qu’ils soient moins intelligents qu’avant, mais à cause d’une défaillance syntaxique» explique Emmanuelle*, professeure de philosophie .

Dans le classement international Pisa qui évalue le niveau de connaissance des  élèves de 15 ans  sur les 85 pays participants la France occupe la  26e place.

 

 

Pourquoi personne ne tente d’assassiner Kamala Harris ? (Elon Musk sur X).

Pourquoi personne ne tente d’assassiner Kamala Harris ? (Elon Musk sur X).

 

La folie d’Elon Musk ( Soutien inconditionnel de Trump)  se confirme avec cette déclaration scandaleuse où il s’étonne sur Twitter (X) que Kamala Harris voire Biden ne fasse pas aussi l’objet  de tentative d’assassinat. Évidemment cela a suscité de nombreuses réactions surtout négatives y compris de la Maison-Blanche qui a qualifié le propos de « rhétorique irresponsable. Une déclaration qui en tout cas ne va pas redorer le blason de Twitter où les annonceurs sont font de moins en moins nombreux pour ne pas être salis par des propos polémiques voire scandaleux.

Le propriétaire de X n’a eu d’autre choix que de justifier sa publication, qui était selon lui une blague mal comprise. «J’ai appris une leçon : ce n’est pas parce qu’un groupe rit de ce que je dis, que cela en fera forcément une publication drôle sur X.» Deux minutes plus tard, il renchérit : «Il s’avère que les blagues sont BEAUCOUP moins drôles quand elles sont écrites, et quand les gens n’en connaissent pas le contexte.» Finalement, 9 heures après sa publication initiale, l’entrepreneur a décidé de l’effacer.

 

Economie-Chute des marchés financiers : pourquoi ?

Economie-Chute des marchés financiers : pourquoi ?

 

Début août, de Tokyo à Paris, en passant par Francfort et Londres, les principales places financières mondiales ont subi une forte correction. Pour certaines, ce fut un «lundi noir» : l’indice Nikkei de la Bourse de Tokyo a perdu 12,4% – sa pire journée depuis 37 ans –, le CAC 40 (Paris) 1,42%, le FTSE (Londres) 2,04%, le Dax (Francfort) 1,82%. Outre-Atlantique, les trois principaux indicateurs de Wall Street ont, eux aussi, conclu sur une chute brutale : 3,43% pour le Nasdaq – son plus fort repli en une journée depuis septembre 2022 –, 3% pour le S&P 500 et 2,60% pour le Dow Jones. La nervosité a même touché le marché des cryptoactifs : le cours du Bitcoin a perdu près de 17%Face à de telles secousses, une question s’impose : Pourquoi maintenant ? Les réponses apportées ont été principalement de deux ordres. D’une part, les opérations de «yen carry trade». Cette stratégie de portage consiste à s’endetter, à un bas taux d’intérêt, pour investir, dans le reste du monde, sur des produits ayant des rendements plus élevés que le taux d’emprunt et profiter ainsi du différentiel de taux. Depuis plusieurs mois, les positions se sont multipliées sur la devise nippone, dont le cours par rapport au dollar américain ou à l’euro était resté faible. Le relèvement inattendu, le 31 juillet, des taux d’intérêt par la Bank of Japan afin de soutenir la monnaie nationale, qui s’était fortement dépréciée (10%) par rapport au dollar américain, a débouché sur une réduction de l’écart de taux et sur une appréciation du yen par rapport aux principales devises internationales, provoquant les premières pertes pour «les carry-traders». D’autre part, la dégradation mondiale du climat des affaires, en particulier, le ralentissement de l’économie américaine, même si la situation est encore plus préoccupante en Europe, en Chine, au Japon… Dans un contexte où les marchés ont pris connaissance de toute une batterie d’indicateurs extrêmement mauvais (indicateur d’activité manufacturière ISM, commandes de biens durables…), les craintes d’une récession aux États-Unis se sont amplifiées à la suite de la publication de statistiques sur l’emploi, plus mauvaises qu’anticipées.

 

par Michel Ruimy
Professeur affilié, ESCP Business School dans The Conversation 
L’économie américaine a créé, en juillet, 114 000 emplois soit environ 30% de moins qu’attendu tandis que le taux de chômage s’établissait, en légère hausse, à 4,3% de la population active, son plus haut niveau depuis 2021. Ces chiffres ont provoqué un changement brutal de narratif. Les marchés sont passés d’une surveillance quasi exclusive du taux d’inflation à celles du taux de croissance et du marché du travail. Aujourd’hui, toute mauvaise nouvelle fait vendre les marchés alors qu’il y a quelque temps encore, une situation similaire aurait été anticipée comme le signe d’une future baisse de taux d’intérêt.

La réaction des marchés à ces nouvelles a été exagérée. En effet, la hausse du principal taux d’intérêt directeur de la Bank of Japan (passage de 0,10% à 0,25%) positionne le nouveau niveau, loin de l’objectif de celui des «Fed funds» de la banque centrale américaine (5,50%). Il n’y a donc pas péril en la demeure ! De même, les craintes de récession aux États-Unis apparaissent exagérées en dépit du ralentissement de l’activité et de ses perspectives pour le second semestre de l’année. Même à 4,3%, le taux de chômage américain reste en phase avec une situation de plein-emploi.

En cas de dégradation de la situation, la Federal Reserve a annoncé, à cet égard, dès le 31 juillet, qu’elle n’hésiterait pas à assouplir sa politique monétaire en septembre prochain, ce qui aurait dû rassurer la Bourse. Si ces évolutions ont contribué à la tourmente du 5 août, elles paraissent cependant insuffisantes pour justifier l’ampleur de la chute et de son processus viral.

Ces derniers mois et semaines, il y a eu beaucoup d’excès sur les marchés et, avec eux, une nécessité de purger un certain nombre d’entre eux. Cette correction résulte de la conjonction de plusieurs facteurs de nervosité. Tout d’abord, la chute des cours boursiers nous indique que nous sommes davantage sur une « crise de compte de résultats » que sur une «crise bilantaire». En effet, aucun acteur financier n’a rencontré de difficultés financières. Les établissements de crédit sont moins endettés et le système financier moins exposé à une crise de liquidités qu’auparavant, les prêteurs privés assumant désormais une grande partie des risques qui, antérieurement, reposaient sur les banques.

En fait, les diverses anticipations optimistes sur l’essor des nouvelles technologies, notamment sur celui de l’intelligence artificielle (IA), ont poussé fortement à la hausse les cours boursiers des entreprises du secteur. Par leur forte croissance et leur forte rentabilité, ces sociétés ont déjà enrichi les investisseurs. Mais, si le potentiel de l’IA ne fait pas débat, en revanche, la valorisation élevée de ces acteurs inquiétait les opérateurs. Dans un contexte de ralentissement économique et après l’annonce par Berkshire Hathaway, le fonds d’investissement de Warren Buffett, de la vente de la moitié de ses actions Apple, leur crainte a été de voir les entreprises technologiques – les «Magnificent Seven» – réaliser de lourds investissements dans l’intelligence artificielle pour des résultats jugés peu convaincants. Cette chute pourrait être ainsi le début du dégonflement de la bulle financière, liée au boom de l’intelligence artificielle, annoncée depuis plusieurs mois.
Ensuite, la publication des chiffres de l’emploi américain a interpellé les marchés. La croissance marginale du taux de chômage a suffi à activer une règle heuristique de mesure du cycle économique : la règle de Sahm. Celle-ci établit un lien entre taux de chômage et risque de récession aux États-Unis : historiquement, si la moyenne des trois derniers mois du taux de chômage surpasse de 0,5 point de pourcentage son niveau le plus bas des douze derniers mois, l’économie américaine vient de rentrer en récession. Cette règle a daté, avec succès, la plupart des récessions américaines passées. La crainte que cette règle ne se vérifie de nouveau est, en partie, responsable du fléchissement des bourses mondiales.

Pour autant, cette règle est-elle vraiment fiable ? Car le caractère «heuristique» de cet indicateur signifie qu’une régularité statistique est observée mais qu’aucune loi économique n’est sous-tendue par une modélisation de la réalité. Il n’en demeure pas moins que cette règle permet d’affirmer, avec une certaine confiance, que l’économie américaine connaît une détérioration du marché de l’emploi qui devrait préoccuper les autorités monétaires même si des indicateurs clés de l’économie semblent toujours bons. C’est, pour le moment, le seul indicateur économique porteur de ce message. Les tensions du marché du travail américain agitent les marchés pour de bonnes raisons, mais l’heure du «hard landing» n’a probablement pas encore sonné.

Par ailleurs, le stress observé le 5 août est un signal envoyé aux autorités monétaires. En effet, le marché est un indicateur avancé du cycle économique. Les bourses anticipent et réagissent à l’évolution des principaux indicateurs économiques dans le monde, aux «faits et gestes» des acteurs économiques… Les dernières statistiques relatives au marché du travail ont interpellé les opérateurs de marché. L’écart entre les prévisions et les résultats est tel qu’il interroge sur le bon pilotage de l’économie américaine, facteur clef à quelques semaines de l’élection présidentielle. Les banques centrales sont donc dans l’obligation de gérer la situation économique correctement afin d’éviter une récession au risque de poser un grave problème aux États, incapables de faire face à une potentielle crise du fait de la dégradation de leurs finances publiques.

Enfin, la chute des indices boursiers peut également être expliquée par des raisons techniques, comme le trading de haute fréquence (THF). Le THF est une méthode automatisée s’appuyant sur des algorithmes complexes et sur des ordinateurs puissants pour exécuter des ordres à très grande vitesse – de l’ordre de la nanoseconde – en tirant profit d’écarts de prix, même minimes, sur les valeurs. Optimiser la vitesse d’accès au marché et le volume quotidien d’ordres passés est donc essentiel.

Aujourd’hui, près des deux tiers des transactions effectuées sur les marchés «actions» sont réalisées selon ce processus. La maximisation opérationnelle a donc un réel impact sur les marchés financiers à l’échelle mondiale en accentuant les variations, tant à la hausse qu’à la baisse, des cours boursiers en un court laps de temps. Ceci s’est déjà fait sentir par le passé (Cf. «Flash crash» du 6 mai 2010, 1er août 2012 : Quasi-faillite de Knight Capital, 5 février 2018 : forte baisse du Dow Jones…). Il est donc vraisemblable que le THF ait joué un rôle non négligeable sur les performances boursières enregistrées.

Le risque d’une crise systémique ?
Prédire l’orientation du marché en fonction des performances précédentes n’est pas nouveau. À ce jour, il n’y a pas de déséquilibres macro-économiques ou financiers pouvant mener à une crise globale. Les marchés ont besoin de souffler après les incertitudes géopolitiques et les tensions économiques de ces dernières années. De surcroît, la Federal Reserve devrait commencer prochainement à baisser ses taux directeurs et apporter de l’oxygène à l’économie.

Pour l’instant, la seule raison valable de la chute de la Bourse réside dans la correction de la flambée excessive des actions de ces derniers mois. Quant aux autres raisons profondes, elles tiennent à «autre chose», en particulier aux rumeurs qui ont fait paniquer temporairement les investisseurs (Troisième guerre mondiale, risque d’une crise politico-sociale majeure en France et dans l’ensemble de la zone euro, risque d’une faillite bancaire de grande envergure…). La rapidité avec laquelle les bourses mondiales ont rebondi les jours suivants semble montrer que ces dangers ont pour l’instant été mis de côté. Jusqu’à quand ? L’avenir le dira. Il est trop tôt pour être inquiet, pas pour être vigilant.

Chute des marchés financiers : pourquoi ?

Chute des marchés financiers : pourquoi ?

 

Début août, de Tokyo à Paris, en passant par Francfort et Londres, les principales places financières mondiales ont subi une forte correction. Pour certaines, ce fut un «lundi noir» : l’indice Nikkei de la Bourse de Tokyo a perdu 12,4% – sa pire journée depuis 37 ans –, le CAC 40 (Paris) 1,42%, le FTSE (Londres) 2,04%, le Dax (Francfort) 1,82%. Outre-Atlantique, les trois principaux indicateurs de Wall Street ont, eux aussi, conclu sur une chute brutale : 3,43% pour le Nasdaq – son plus fort repli en une journée depuis septembre 2022 –, 3% pour le S&P 500 et 2,60% pour le Dow Jones. La nervosité a même touché le marché des cryptoactifs : le cours du Bitcoin a perdu près de 17%Face à de telles secousses, une question s’impose : Pourquoi maintenant ? Les réponses apportées ont été principalement de deux ordres. D’une part, les opérations de «yen carry trade». Cette stratégie de portage consiste à s’endetter, à un bas taux d’intérêt, pour investir, dans le reste du monde, sur des produits ayant des rendements plus élevés que le taux d’emprunt et profiter ainsi du différentiel de taux. Depuis plusieurs mois, les positions se sont multipliées sur la devise nippone, dont le cours par rapport au dollar américain ou à l’euro était resté faible. Le relèvement inattendu, le 31 juillet, des taux d’intérêt par la Bank of Japan afin de soutenir la monnaie nationale, qui s’était fortement dépréciée (10%) par rapport au dollar américain, a débouché sur une réduction de l’écart de taux et sur une appréciation du yen par rapport aux principales devises internationales, provoquant les premières pertes pour «les carry-traders». D’autre part, la dégradation mondiale du climat des affaires, en particulier, le ralentissement de l’économie américaine, même si la situation est encore plus préoccupante en Europe, en Chine, au Japon… Dans un contexte où les marchés ont pris connaissance de toute une batterie d’indicateurs extrêmement mauvais (indicateur d’activité manufacturière ISM, commandes de biens durables…), les craintes d’une récession aux États-Unis se sont amplifiées à la suite de la publication de statistiques sur l’emploi, plus mauvaises qu’anticipées.

 

par Michel Ruimy
Professeur affilié, ESCP Business School dans The Conversation 

 
L’économie américaine a créé, en juillet, 114 000 emplois soit environ 30% de moins qu’attendu tandis que le taux de chômage s’établissait, en légère hausse, à 4,3% de la population active, son plus haut niveau depuis 2021. Ces chiffres ont provoqué un changement brutal de narratif. Les marchés sont passés d’une surveillance quasi exclusive du taux d’inflation à celles du taux de croissance et du marché du travail. Aujourd’hui, toute mauvaise nouvelle fait vendre les marchés alors qu’il y a quelque temps encore, une situation similaire aurait été anticipée comme le signe d’une future baisse de taux d’intérêt.

La réaction des marchés à ces nouvelles a été exagérée. En effet, la hausse du principal taux d’intérêt directeur de la Bank of Japan (passage de 0,10% à 0,25%) positionne le nouveau niveau, loin de l’objectif de celui des «Fed funds» de la banque centrale américaine (5,50%). Il n’y a donc pas péril en la demeure ! De même, les craintes de récession aux États-Unis apparaissent exagérées en dépit du ralentissement de l’activité et de ses perspectives pour le second semestre de l’année. Même à 4,3%, le taux de chômage américain reste en phase avec une situation de plein-emploi.

En cas de dégradation de la situation, la Federal Reserve a annoncé, à cet égard, dès le 31 juillet, qu’elle n’hésiterait pas à assouplir sa politique monétaire en septembre prochain, ce qui aurait dû rassurer la Bourse. Si ces évolutions ont contribué à la tourmente du 5 août, elles paraissent cependant insuffisantes pour justifier l’ampleur de la chute et de son processus viral.

Ces derniers mois et semaines, il y a eu beaucoup d’excès sur les marchés et, avec eux, une nécessité de purger un certain nombre d’entre eux. Cette correction résulte de la conjonction de plusieurs facteurs de nervosité. Tout d’abord, la chute des cours boursiers nous indique que nous sommes davantage sur une « crise de compte de résultats » que sur une «crise bilantaire». En effet, aucun acteur financier n’a rencontré de difficultés financières. Les établissements de crédit sont moins endettés et le système financier moins exposé à une crise de liquidités qu’auparavant, les prêteurs privés assumant désormais une grande partie des risques qui, antérieurement, reposaient sur les banques.

En fait, les diverses anticipations optimistes sur l’essor des nouvelles technologies, notamment sur celui de l’intelligence artificielle (IA), ont poussé fortement à la hausse les cours boursiers des entreprises du secteur. Par leur forte croissance et leur forte rentabilité, ces sociétés ont déjà enrichi les investisseurs. Mais, si le potentiel de l’IA ne fait pas débat, en revanche, la valorisation élevée de ces acteurs inquiétait les opérateurs. Dans un contexte de ralentissement économique et après l’annonce par Berkshire Hathaway, le fonds d’investissement de Warren Buffett, de la vente de la moitié de ses actions Apple, leur crainte a été de voir les entreprises technologiques – les «Magnificent Seven» – réaliser de lourds investissements dans l’intelligence artificielle pour des résultats jugés peu convaincants. Cette chute pourrait être ainsi le début du dégonflement de la bulle financière, liée au boom de l’intelligence artificielle, annoncée depuis plusieurs mois.
Ensuite, la publication des chiffres de l’emploi américain a interpellé les marchés. La croissance marginale du taux de chômage a suffi à activer une règle heuristique de mesure du cycle économique : la règle de Sahm. Celle-ci établit un lien entre taux de chômage et risque de récession aux États-Unis : historiquement, si la moyenne des trois derniers mois du taux de chômage surpasse de 0,5 point de pourcentage son niveau le plus bas des douze derniers mois, l’économie américaine vient de rentrer en récession. Cette règle a daté, avec succès, la plupart des récessions américaines passées. La crainte que cette règle ne se vérifie de nouveau est, en partie, responsable du fléchissement des bourses mondiales.

Pour autant, cette règle est-elle vraiment fiable ? Car le caractère «heuristique» de cet indicateur signifie qu’une régularité statistique est observée mais qu’aucune loi économique n’est sous-tendue par une modélisation de la réalité. Il n’en demeure pas moins que cette règle permet d’affirmer, avec une certaine confiance, que l’économie américaine connaît une détérioration du marché de l’emploi qui devrait préoccuper les autorités monétaires même si des indicateurs clés de l’économie semblent toujours bons. C’est, pour le moment, le seul indicateur économique porteur de ce message. Les tensions du marché du travail américain agitent les marchés pour de bonnes raisons, mais l’heure du «hard landing» n’a probablement pas encore sonné.

Par ailleurs, le stress observé le 5 août est un signal envoyé aux autorités monétaires. En effet, le marché est un indicateur avancé du cycle économique. Les bourses anticipent et réagissent à l’évolution des principaux indicateurs économiques dans le monde, aux «faits et gestes» des acteurs économiques… Les dernières statistiques relatives au marché du travail ont interpellé les opérateurs de marché. L’écart entre les prévisions et les résultats est tel qu’il interroge sur le bon pilotage de l’économie américaine, facteur clef à quelques semaines de l’élection présidentielle. Les banques centrales sont donc dans l’obligation de gérer la situation économique correctement afin d’éviter une récession au risque de poser un grave problème aux États, incapables de faire face à une potentielle crise du fait de la dégradation de leurs finances publiques.

Enfin, la chute des indices boursiers peut également être expliquée par des raisons techniques, comme le trading de haute fréquence (THF). Le THF est une méthode automatisée s’appuyant sur des algorithmes complexes et sur des ordinateurs puissants pour exécuter des ordres à très grande vitesse – de l’ordre de la nanoseconde – en tirant profit d’écarts de prix, même minimes, sur les valeurs. Optimiser la vitesse d’accès au marché et le volume quotidien d’ordres passés est donc essentiel.

Aujourd’hui, près des deux tiers des transactions effectuées sur les marchés «actions» sont réalisées selon ce processus. La maximisation opérationnelle a donc un réel impact sur les marchés financiers à l’échelle mondiale en accentuant les variations, tant à la hausse qu’à la baisse, des cours boursiers en un court laps de temps. Ceci s’est déjà fait sentir par le passé (Cf. «Flash crash» du 6 mai 2010, 1er août 2012 : Quasi-faillite de Knight Capital, 5 février 2018 : forte baisse du Dow Jones…). Il est donc vraisemblable que le THF ait joué un rôle non négligeable sur les performances boursières enregistrées.

Le risque d’une crise systémique ?
Prédire l’orientation du marché en fonction des performances précédentes n’est pas nouveau. À ce jour, il n’y a pas de déséquilibres macro-économiques ou financiers pouvant mener à une crise globale. Les marchés ont besoin de souffler après les incertitudes géopolitiques et les tensions économiques de ces dernières années. De surcroît, la Federal Reserve devrait commencer prochainement à baisser ses taux directeurs et apporter de l’oxygène à l’économie.

Pour l’instant, la seule raison valable de la chute de la Bourse réside dans la correction de la flambée excessive des actions de ces derniers mois. Quant aux autres raisons profondes, elles tiennent à «autre chose», en particulier aux rumeurs qui ont fait paniquer temporairement les investisseurs (Troisième guerre mondiale, risque d’une crise politico-sociale majeure en France et dans l’ensemble de la zone euro, risque d’une faillite bancaire de grande envergure…). La rapidité avec laquelle les bourses mondiales ont rebondi les jours suivants semble montrer que ces dangers ont pour l’instant été mis de côté. Jusqu’à quand ? L’avenir le dira. Il est trop tôt pour être inquiet, pas pour être vigilant.

Sahara occidental : pourquoi Macron soutient le Maroc

Sahara occidental : pourquoi Macron soutient le Maroc

Mardi 30 juillet 2024, après sept années passées à la tête de la République française, le président français Emmanuel Macron a adressé une lettre personnelle au roi du Maroc, Mohamed VI, à l’occasion des festivités du vingt-cinquième anniversaire de son règne. Outre les félicitations d’usage, Macron, rompant avec sa position de grande prudence sur ce dossier, a déclaré que le plan marocain de large autonomie au Sahara occidental dans le cadre de la souveraineté marocaine était désormais pour la France, non seulement la seule base de négociation valable (devant l’ONU en charge du règlement de ce conflit depuis 1991), mais de surcroît que le Sahara ex-espagnol, dès maintenant et à l’avenir, serait considéré par la France comme relevant de la souveraineté marocaine.

 

par 

Professeur des universités, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne dans The Conversation
Le conflit dit du Sahara occidental est désormais cinquantenaire : il a pour objet un territoire de 220 000 km2 que se disputent le Maroc et le Front Polisario soutenu par Alger, et il a a donné lieu à un conflit armé ouvert de 1975 à 1988. Le plan “de large autonomie au Sahara” occidental dans le cadre de la souveraineté marocaine a été proposé par le Royaume en avril 2007. La France du mandat finissant de Jacques Chirac (1995-2007), puis celle de Nicolas Sarkozy (2007-2012) l’avaient parrainé et soutenu. Mais entre-temps, si la France – qui a toujours été aux côtés du Maroc dans le cadre de ce conflit – est restée fidèle à sa position initiale, elle l’a à tout le moins mis en sourdine.

En effet, les présidents François Hollande (2012-2017) et Macron (depuis 2017) ont tenté de renouer une relation bilatérale forte avec Alger, en vue d’une réconciliation franco-algérienne. Cela impliquait, dans le délicat jeu de balance franco-algéro-marocain, de prendre un peu de champ sur le dossier saharien. Par ailleurs, pour des raisons diverses et ayant peu à voir avec le dossier saharien, la relation bilatérale franco-marocaine est entrée en 2014 dans une crise durable et profonde. Celle-ci a atteint son acmé en septembre 2023, après que le tremblement de terre de Marrakech a révélé au monde la fin de non-recevoir marocaine aux propositions d’assistance française, un camouflet pour Paris qui a attisé jusqu’au sommet des deux États des relations électriques.
Or près d’un an plus tard, Macron confirme non seulement le ralliement ancien de la France à la position marocaine, pour la plus grande satisfaction de Rabat, mais il affirme aussi l’exclusivité du plan d’autonomie comme base de négociations. Macron n’a pas rompu avec la légalité internationale, puisque l’ONU reste le maître d’œuvre du dossier. C’est donc une nouveauté relative. Mais la France n’avait jamais acté la “souveraineté” marocaine dans les mots. Pourquoi la position française ainsi réactivée a-t-elle réjoui Rabat – dès le lendemain le roi du Maroc a écrit à Macron pour se féliciter de cette annonce et l’inviter au Maroc – et suscité une levée de boucliers en Algérie ?

Alger a immédiatement rappelé son ambassadeur à Paris et laissé entendre que la visite en France du président Abdelmadjid Tebboune en octobre était annulée. Et qu’est-ce qui a soudain incité Macron à changer de partenaire principal au Maghreb ? Car c’est bien à cela qu’aboutit ce choix.

Mes recherches portent sur l’histoire du Maroc contemporain, l’histoire des élites maghrébines et l’histoire religieuse et politique du monde arabo-berbère contemporain, entre autres. Au cours de dernières années, j’ai consacré de nombreux articles et ouvrages à la politique extérieure du Maroc, à la rivalité historique entre le Maroc et l’Algérie ainsi qu’à la relation franco-marocaine. Dans cet article, je tente d’apporter des éléments de réponse aux questions soulevées plus haut.
Lorsque Jacques Chirac a appuyé, en avril 2007, le plan marocain de large autonomie, il s’agissait d’une position avancée par rapport aux autres puissances. Or entre-temps, d’autres pays comme l’Allemagne ou l’Espagne, sont allés plus loin que la France dans le soutien à la position marocaine. Surtout, en décembre 2020, en échange du soutien du Maroc aux accords d’Abraham, les États-Unis et Israël ont reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara ex-espagnol -dont Rabat contrôle et occupe 80 % du territoire. Ce ralliement du Maroc à la reconnais sance de l’État d’Israël, et l’ouverture de relations diplomatiques et de coopération entre les deux pays ont exaspéré l’Algérie, qui a rompu ses relations diplomatiques avec Rabat à l’été 2021. La frontière terrestre des deux pays est fermée depuis 1994.

Ainsi, la position française pro-marocaine de 2007 était dépassée par celle de ses plus proches alliés occidentaux. Or la France sortant d’une longue période de crise avec son traditionnel allié marocain, Mohamed VI a posé comme préalable à la reprise d’une coopération de haut niveau -le fameux “partenariat d’exception” – que la France rejoigne le peloton de tête de ses soutiens sur ce dossier, que Rabat considère comme l’alpha et l’oméga de sa politique internationale.

En actant l’exclusivité du plan de large autonomie, le président Macron a répondu à la demande pressante du Maroc. La brouille entre les deux pays n’était pas uniquement diplomatique, mais d’abord personnelle entre leurs deux chefs d’État. Après plusieurs années de crise entre les deux pays, la brouille a pris un caractère personnel sous Macron qui aime placer les relations bilatérales sur un plan affectif avec ses homologues.

Celui-ci a tenté une relation de grande proximité avec Tebboune. Cela a exaspéré Rabat qui estimait que l’on ne s’éloigne pas de ses amis pour se rapprocher d’une puissance hostile. Macron a assumé cet éloignement avec Rabat pour se rapprocher d’Alger. Mais secoué par le Hirak – un mouvement de contestation -, Alger a choisi en 2021 de rompre brutalement ses relations diplomatiques avec Rabat après les accords d’Abraham.

Enfin, au cours du même été, la révélation par les services de renseignements français que le programme Pegasus, conçu en Israël, avait permis aux services marocains d’écouter des milliers de hautes personnalités algériennes et françaises durant le Hirak algérien, a poussé Macron à demander des explications au roi Mohamed VI. Une conversation peu amène s’en est suivie… l’un accusant l’autre de mensonge. Une manière de faire jugée inacceptable à Rabat.
Ensuite, Emmanuel Macron a eu le sentiment d’être allé au bout des possibilités de sa relation avec Alger. Quel résultat après des années d’attentions et de propositions aimables, d’invitations (le voyage du président Tebboune en France a été repoussé plusieurs fois), de messages de repentir (dès 2017, la colonisation assimilée à un “crime contre l’humanité” par Macron) ? Beaucoup de déceptions politiques et économiques (Alger achète ses armes à Moscou et réalise ses grands contrats d’équipement avec la Chine), sans parler du soutien algérien à la Russie dans les conflits d’Ukraine ou du Sahel, et au Hamas et à l’Iran face à Israël…

Les positions françaises devenaient illisibles. En revenant à l’amitié marocaine, Macron tente-t-il pour autant son fameux “en même temps” ? On ne peut l’exclure, même si la réaction d’Alger augure mal du processus en cours avec ce pays.

D’autres éléments ont potentiellement été mis dans la balance par le Maroc, comme la grâce accordée lors de la fête du Trône, le 30 juillet, aux quatre journalistes et intellectuels marocains – dont l’historien franco-marocain Maâti Monjib – emprisonnés au Maroc. En effet, il a souvent été reproché à Emmanuel Macron d’oublier la question des droits de l’homme en Afrique, et cette libération de prisonniers politiques libère l’espace de la relation bilatérale.

Enfin, cette reconnaissance correspondait aux 25 ans de règne de Mohamed VI, anniversaire qui risquait d’être occulté par les Jeux olympiques. La France de Macron a offert un de ses vœux les plus chers au monarque.
En définitive, la France semble revenir à ses fondamentaux diplomatiques dans cette région. Plus que jamais, la politique extérieure de la France se décide à l’Élysée, et les parlementaires ne semblent pas être intervenus à aucun moment dans ce processus. Il ne fait guère que de doute que le Quai d’Orsay – ministère français des Affaires étrangères – est en partie satisfait de ce rapprochement qui rejoint sa diplomatie ancienne, tant les positions diplomatiques tranchantes de l’Algérie avec celles de la France sur de nombreux domaines essentiels étaient problématiques.

Il n’en reste pas moins que Paris ne peut pas se brouiller avec Alger après s’être rapproché de Rabat, et qu’un modus vivendi complexe s’impose entre les trois pays pour cogérer des dossiers très sensibles, qui vont de l’islam de France aux flux migratoires méditerranéens, en passant par la situation conflictuelle qui cerne le Maghreb au Sahel et en Libye.

Télévision-Exclusion de C8 pourquoi pas de C News ?

Télévision-Exclusion de C8 pourquoi pas de C News ?

Exclusion de C8 de la TNT : « la décision de l’Arcom est courageuse mais les outrances de Cyril Hanouna ne sont pas le cœur du problème »
Interview de 
Camille Broyelle
Professeur de Droit Public, Université Paris-Panthéon-Assas dans The Conversation. 

 

 

L’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, a décidé le 24 juillet d’écarter C8 et NRJ 12 de la procédure d’attribution des canaux pour une diffusion via la télévision numérique terrestre. Camille Broyelle, professeure de droit public et responsable du Master droit du numérique, parcours droit des médias de l’Université Panthéon Assas, analyse les raisons et les conséquences de cette décision.

Pouvez-vous rappeler quel est le processus d’attribution des chaînes de la TNT ?

Pour le comprendre, il faut rappeler la TNT repose sur l’utilisation de fréquences hertziennes qui sont limitées. Les fréquences hertziennes sont une ressource rare : seulement 31 chaînes de télévision nationales peuvent y être accueillies. Une sélection doit donc être faite. Depuis la loi du 30 septembre 1986, elle incombe à une autorité administrative indépendante, dont les membres sont nommés par le président de la République, du Sénat et de l’Assemblée nationale.

Ceci rappelé, la procédure est prévue par la loi pour attribuer les fréquences disponibles, qu’il s’agisse d’éditeurs de chaînes qui exploitent déjà une chaîne ou de nouveaux entrants. Les chaînes sont autorisées pour une durée limitée, 10 ans au maximum. Pour 15 chaînes actuelles, les autorisations arrivent à échéance en 2025. L’Arcom a donc remis en compétition leurs fréquences. 27 candidats ont déposé un dossier, 25 ont été déclarés recevables et une entreprise s’est désistée. 24 candidats ont soutenu leur projet devant l’Arcom.

 

Tout est donc fini pour C8 et NRJ 12 ?

Nous entrons maintenant dans une deuxième phase, qui est celle de la rédaction des conventions. Les éditeurs de télévisions et l’Arcom vont mettre à l’écrit le projet éditorial et les engagements des chaînes (par exemple, en faveur de la création) et les garanties nécessaires au respect de la loi de 1986, notamment, pour protéger l’indépendance, l’honnêteté et le pluralisme de l’information.

Normalement, les deux parties arrivent à un accord. Toutefois, ces négociations peuvent aussi ne pas aboutir. Dans ce cas, l’Arcom a la possibilité de puiser dans le vivier des éditeurs non sélectionnés pour établir une convention. La jurisprudence administrative le permet. Mais il me semble peu probable que l’Arcom aille « repêcher » les éditeurs sortants qu’elle a écartés.

Nous n’avons pas encore le détail de la décision, mais quels motifs peuvent expliquer la mise à l’écart de NRJ 12 et de C8 ?

Pour C8, les raisons sont assez évidentes. Parmi les critères de sélection qui sont énoncés dans la loi, figure pour les candidats sortants la façon dont ils ont respecté le pluralisme, l’honnêteté et l’indépendance de l’information, c’est-à-dire des principes essentiels au fonctionnement démocratique de l’État.

Au regard des mises en demeure et sanctions dont la chaîne C8 a fait l’objet, on imagine que l’Arcom a estimé ne pas pouvoir lui faire confiance. Les maigres garanties promises par C8 n’ont pas suffi, notamment la diffusion en différé, de Touche pas à mon poste.

L’exigence de diversité des opérateurs a également dû jouer. Les groupes Bolloré et NRJ perdent chacun une chaîne, ce qui permet l’arrivée de nouveaux entrants, OFtv, du groupe Ouest France et Réels TV porté par Daniel Kretinsky.

En tant que juriste, diriez-vous que cette décision n’est pas une surprise pour C8 tant les manquements sont nombreux ?

Oui et je pense que cela aurait dû être aussi le cas s’agissant de Cnews. Pas plus que C8, CNews n’a observé les principes d’honnêteté, d’indépendance et de pluralisme de l’information qui sont fondamentaux. Le pluralisme vise à protéger le public en s’assurant qu’il dispose de toutes les opinions, afin d’être véritablement éclairé. Il faut insister : les fréquences de la TNT sont rares, seules 31 chaînes peuvent être accueillies, et pour exploiter une chaîne il faut être puissant économiquement. Si le droit du public de bénéficier d’une offre pluraliste de médias était dicté par les lois du marché, seules les idées bénéficiant de l’appui d’entreprises financièrement puissantes pourraient diffuser sur la TNT. C’est pour l’éviter que la loi de 1986 impose à chaque éditeur de respecter le pluralisme dans ses propres programmes. En réalité, les manquements à la loi ne sont pas liés aux outrances de Cyril Hanouna. Le principal manquement est dans l’exploitation de chaînes afin d’assurer la promotion d’une idéologie. Il est également imputable à CNews.
Lors de l’audition devant l’Arcom, le directeur des antennes du groupe Canal Plus, Gérald-Brice Viret, avait proposé de diffuser en léger différé l’émission de Cyril Hanouna.

C8 interdit, qu’est-ce qui empêche le groupe Bolloré de le diffuser sur Cstar, voire Cnews dans un format renouvelé, voire en clair sur Canal plus, qui sont toutes trois des chaînes du même groupe ?

C’est vraisemblablement ce qui risque de se passer. Cela s’est produit récemment lorsque, à la suite de la dissolution de l’Assemblée nationale, la direction d’Europe 1 (propriété du groupe Bolloré) a décidé de confier l’antenne à Cyril Hanouna afin de couvrir l’actualité. La facture de l’émission était identique à celle présentée sur C8. En pleine période électorale, pendant deux semaines, à un moment où le respect du pluralisme est strictement encadré pour garantir la sincérité du scrutin, le présentateur s’est livré à un traitement univoque de l’actualité, ce qui a valu d’ailleurs à Europe 1 une mise en demeure de l’Arcom.

Finalement, comment qualifierez-vous la décision de l’Arcom concernant C8 ?

La décision est politiquement courageuse. Les chaînes C8 et CNews invoquent régulièrement, sur leur plateau, l’argument populiste classique consistant à se targuer de la volonté populaire (celle qu’exprimerait l’audience) contre l’Arcom (et à travers elle, le respect du droit). La décision de l’Arcom est également courageuse en ce qu’elle n’a pas cédé au chantage économique que l’on a vu se dessiner pendant les auditions publiques consistant à lier le sort de Canal+, dont l’existence est essentielle à l’industrie du cinéma, à celui des chaînes C8 et CNews.

En rejetant la candidature de C8, et non pas celle de CNews, l’Arcom donne à penser que seules les outrances de Cyril Hanouna sont sanctionnées, alors que devrait l’être avant tout la prise de pouvoir médiatique, sur la TNT, consistant pour la chaîne C8 comme pour la chaîne CNews à s’être muées en chaînes d’opinion, au prix d’une méconnaissance de l’honnêteté et de l’indépendance de l’information et en méconnaissance flagrante de la loi. Il reste que politiquement, la décision est forte et laisse à penser que l’Arcom se montrera particulièrement vigilante à l’égard des médias audiovisuels du groupe Bolloré.

Politique : Pourquoi pas Nabilla comme première ministre ?

Politique :P ourquoi pas Nabilla comme première ministre ?

Les différents partis politiques se concurrencent quant à la médiocrité de leur leader. Ainsi cette semaine on a assisté à des propositions pour le poste de Premier ministre tout à fait fantaisistes. D’autres viendront dans le climat de décomposition politique actuelle. La dernière proposition de la gauche et celle d’une  » haute fonctionnaire » chargée des finances et  des achats à la mairie de Paris (on a discrètement effacé son CV de Wikipédia pour en faire une éventuelle première ministre présentable !).  Au sein même de la majorité ( l’ancienne) , on a même avancé le nom de Darmanin qui cherche à faire une alliance avec les anciens républicains, Édouard Philippe, Vauquiez voire certains du rassemblement national ( les petits dîners secrets notamment entre Édouard Philippe et Le Pen).

L’Opinion considère, après avoir salué le vote anti Macron, que la France politique est ingérable et réclame un gouvernement d’union. Gouvernement d’union impossible avec les oukazes des uns et des autres qui d’ailleurs pensent davantage à l’élection présidentielle de 2027( voire avant) qui a la gouvernance dans l’intérêt général actuellement.

Au point où on en est, on pourrait aussi avancer l’idée de Nabilla comme future première ministre, elle remplit les conditions d’incompétence totale comme d’autres candidats.

Exclusion de C8 pourquoi pas de C News ?

Exclusion de C8 pourquoi pas de C News ?

Exclusion de C8 de la TNT : « la décision de l’Arcom est courageuse mais les outrances de Cyril Hanouna ne sont pas le cœur du problème »

 
Interview de 
Camille Broyelle
Professeur de Droit Public, Université Paris-Panthéon-Assas dans The Conversation. 

 

 

L’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, a décidé le 24 juillet d’écarter C8 et NRJ 12 de la procédure d’attribution des canaux pour une diffusion via la télévision numérique terrestre. Camille Broyelle, professeure de droit public et responsable du Master droit du numérique, parcours droit des médias de l’Université Panthéon Assas, analyse les raisons et les conséquences de cette décision.

Pouvez-vous rappeler quel est le processus d’attribution des chaînes de la TNT ?

Pour le comprendre, il faut rappeler la TNT repose sur l’utilisation de fréquences hertziennes qui sont limitées. Les fréquences hertziennes sont une ressource rare : seulement 31 chaînes de télévision nationales peuvent y être accueillies. Une sélection doit donc être faite. Depuis la loi du 30 septembre 1986, elle incombe à une autorité administrative indépendante, dont les membres sont nommés par le président de la République, du Sénat et de l’Assemblée nationale.

Ceci rappelé, la procédure est prévue par la loi pour attribuer les fréquences disponibles, qu’il s’agisse d’éditeurs de chaînes qui exploitent déjà une chaîne ou de nouveaux entrants. Les chaînes sont autorisées pour une durée limitée, 10 ans au maximum. Pour 15 chaînes actuelles, les autorisations arrivent à échéance en 2025. L’Arcom a donc remis en compétition leurs fréquences. 27 candidats ont déposé un dossier, 25 ont été déclarés recevables et une entreprise s’est désistée. 24 candidats ont soutenu leur projet devant l’Arcom.

 

Tout est donc fini pour C8 et NRJ 12 ?

Nous entrons maintenant dans une deuxième phase, qui est celle de la rédaction des conventions. Les éditeurs de télévisions et l’Arcom vont mettre à l’écrit le projet éditorial et les engagements des chaînes (par exemple, en faveur de la création) et les garanties nécessaires au respect de la loi de 1986, notamment, pour protéger l’indépendance, l’honnêteté et le pluralisme de l’information.

Normalement, les deux parties arrivent à un accord. Toutefois, ces négociations peuvent aussi ne pas aboutir. Dans ce cas, l’Arcom a la possibilité de puiser dans le vivier des éditeurs non sélectionnés pour établir une convention. La jurisprudence administrative le permet. Mais il me semble peu probable que l’Arcom aille « repêcher » les éditeurs sortants qu’elle a écartés.

Nous n’avons pas encore le détail de la décision, mais quels motifs peuvent expliquer la mise à l’écart de NRJ 12 et de C8 ?

Pour C8, les raisons sont assez évidentes. Parmi les critères de sélection qui sont énoncés dans la loi, figure pour les candidats sortants la façon dont ils ont respecté le pluralisme, l’honnêteté et l’indépendance de l’information, c’est-à-dire des principes essentiels au fonctionnement démocratique de l’État.

Au regard des mises en demeure et sanctions dont la chaîne C8 a fait l’objet, on imagine que l’Arcom a estimé ne pas pouvoir lui faire confiance. Les maigres garanties promises par C8 n’ont pas suffi, notamment la diffusion en différé, de Touche pas à mon poste.

L’exigence de diversité des opérateurs a également dû jouer. Les groupes Bolloré et NRJ perdent chacun une chaîne, ce qui permet l’arrivée de nouveaux entrants, OFtv, du groupe Ouest France et Réels TV porté par Daniel Kretinsky.

En tant que juriste, diriez-vous que cette décision n’est pas une surprise pour C8 tant les manquements sont nombreux ?

Oui et je pense que cela aurait dû être aussi le cas s’agissant de Cnews. Pas plus que C8, CNews n’a observé les principes d’honnêteté, d’indépendance et de pluralisme de l’information qui sont fondamentaux. Le pluralisme vise à protéger le public en s’assurant qu’il dispose de toutes les opinions, afin d’être véritablement éclairé. Il faut insister : les fréquences de la TNT sont rares, seules 31 chaînes peuvent être accueillies, et pour exploiter une chaîne il faut être puissant économiquement. Si le droit du public de bénéficier d’une offre pluraliste de médias était dicté par les lois du marché, seules les idées bénéficiant de l’appui d’entreprises financièrement puissantes pourraient diffuser sur la TNT. C’est pour l’éviter que la loi de 1986 impose à chaque éditeur de respecter le pluralisme dans ses propres programmes. En réalité, les manquements à la loi ne sont pas liés aux outrances de Cyril Hanouna. Le principal manquement est dans l’exploitation de chaînes afin d’assurer la promotion d’une idéologie. Il est également imputable à CNews.
Lors de l’audition devant l’Arcom, le directeur des antennes du groupe Canal Plus, Gérald-Brice Viret, avait proposé de diffuser en léger différé l’émission de Cyril Hanouna.

C8 interdit, qu’est-ce qui empêche le groupe Bolloré de le diffuser sur Cstar, voire Cnews dans un format renouvelé, voire en clair sur Canal plus, qui sont toutes trois des chaînes du même groupe ?

C’est vraisemblablement ce qui risque de se passer. Cela s’est produit récemment lorsque, à la suite de la dissolution de l’Assemblée nationale, la direction d’Europe 1 (propriété du groupe Bolloré) a décidé de confier l’antenne à Cyril Hanouna afin de couvrir l’actualité. La facture de l’émission était identique à celle présentée sur C8. En pleine période électorale, pendant deux semaines, à un moment où le respect du pluralisme est strictement encadré pour garantir la sincérité du scrutin, le présentateur s’est livré à un traitement univoque de l’actualité, ce qui a valu d’ailleurs à Europe 1 une mise en demeure de l’Arcom.

Finalement, comment qualifierez-vous la décision de l’Arcom concernant C8 ?

La décision est politiquement courageuse. Les chaînes C8 et CNews invoquent régulièrement, sur leur plateau, l’argument populiste classique consistant à se targuer de la volonté populaire (celle qu’exprimerait l’audience) contre l’Arcom (et à travers elle, le respect du droit). La décision de l’Arcom est également courageuse en ce qu’elle n’a pas cédé au chantage économique que l’on a vu se dessiner pendant les auditions publiques consistant à lier le sort de Canal+, dont l’existence est essentielle à l’industrie du cinéma, à celui des chaînes C8 et CNews.

En rejetant la candidature de C8, et non pas celle de CNews, l’Arcom donne à penser que seules les outrances de Cyril Hanouna sont sanctionnées, alors que devrait l’être avant tout la prise de pouvoir médiatique, sur la TNT, consistant pour la chaîne C8 comme pour la chaîne CNews à s’être muées en chaînes d’opinion, au prix d’une méconnaissance de l’honnêteté et de l’indépendance de l’information et en méconnaissance flagrante de la loi. Il reste que politiquement, la décision est forte et laisse à penser que l’Arcom se montrera particulièrement vigilante à l’égard des médias audiovisuels du groupe Bolloré.

Politique : Pourquoi pas Nabilla comme première ministre ?

Politique :P ourquoi pas Nabilla comme première ministre ?

Les différents partis politiques se concurrencent quant à la médiocrité de leur leader. Ainsi cette semaine on a assisté à des propositions pour le poste de Premier ministre tout à fait fantaisistes. D’autres viendront dans le climat de décomposition politique actuelle. La dernière proposition de la gauche et celle d’une  » haute fonctionnaire » chargée des achats à la mairie de Paris (on a discrètement effacé son CV de Wikipédia pour en faire une éventuelle première ministre présentable !).  .Au sein même de la majorité ( l’ancienne) , on a même avancé le nom de Darmanin qui cherche à faire une alliance avec les anciens républicains, Édouard Philippe, Vauquiez voire certains du rassemblement national ( les petits dîners secrets notamment entre Édouard Philippe et Le Pen).

L’Opinion considère, après avoir salué le vote anti Macron, que la France politique est ingérable et réclame un gouvernement d’union. Gouvernement d’union impossible avec les oukazes des uns et des autres qui d’ailleurs pensent davantage à l’élection présidentielle de 2027( voire avant) qui a la gouvernance dans l’intérêt général actuellement.

Au point où on en est, on pourrait aussi avancer l’idée de Nabilla comme future première ministre, elle remplit les conditions d’incompétence totale comme d’autres candidats.

France: Pourquoi pas de modèle économique consensuel ?

France:  Pourquoi pas de modèle économique consensuel ? 

 

Le consultant Patrick d’Humières constate, dans une tribune au « Monde », qu’aucun parti politique ne soutient les principes d’une économie efficace et « responsable », alliant principes de bonne gouvernance et juste répartition de la valeur.

 

Nos partis politiques ne sont pas les meilleurs économistes du pays… Depuis deux siècles, chacun s’accroche à une vision idéologique des équilibres macroéconomiques qui n’a guère varié : les libéraux professent l’efficacité des marchés libres depuis la révolution industrielle du XIXe siècle, la répartition de la valeur devant rester leur affaire, et l’Etat n’aurait pas à s’en occuper ; les socioredistributifs, auxquels les échecs de l’Etat-providence n’ont rien appris jusqu’à ce jour, affichent depuis la grande crise des années 1930 un keynésianisme ; quant aux étatistes, qui ont eu leur heure de gloire à travers le redressement gaulliste, ils n’avouent pas qu’ils sont enfermés dans le protectionnisme et l’affaiblissement des droits contractuels des parties.

La crise démocratique actuelle a relancé cette triple offre régressive et dépassée, qui s’émancipe des savoirs d’efficacité économique existants et fait fi des schémas adoptés par la plupart de nos partenaires développés. En plus du fait qu’elle représente un coût social et démocratique très élevé.

Mais pourquoi donc la France n’est-elle pas parvenue à se doter au fil de ses soubresauts politiques d’un modèle économique consensuel qui aurait permis de sanctuariser les grandes règles du jeu économique applicables aux entreprises ? L’explication la plus connue est la complicité inavouée entre un pilotage étatique qui ne se lasse pas de faire gonfler la sphère de l’aide publique et les grands groupes qui savent négocier leur liberté et leur fiscalité, sans que la réflexion sur l’intérêt général soit très approfondie.

C’est ce mécanisme que révèle, par exemple, le récent rapport du Sénat sur la façon dont Total assume plus ou moins les intérêts collectifs français : les sénateurs en ont conclu qu’une action publique spécifique devrait permettre à l’Etat de faire mieux respecter les intérêts énergétiques français par la multinationale.

Les trois modèles historiques ont leurs thuriféraires intéressés dans chaque camp. Ils occultent la montée des aspirations de la plupart des Français pour une économie responsable, alliant des principes de bonne gouvernance à une juste répartition de la valeur, en passant par des constantes de fiscalité et de contribution locale et sociale visant un « juste profit ».

Panne informatique mondiale : Pourquoi ?

Panne informatique mondiale : Pourquoi ? 

La panne géante qui s’est produite vendredi est liée à une incompatibilité entre une mise à jour effectuée par l’entreprise leader dans le domaine de la cybersécurité et les appareils Windows. François Deruty, en charge des cybermenaces au sein de la société Sekoia.io, apporte son éclairage sur Franceinfo.

De Brisbane à Berlin, en passant par Paris, l’économie mondiale tourne au ralenti, vendredi 19 juillet. Des avions cloués sur le tarmac en Europe, le numéro d’appel d’urgence américain hors service, des services hospitaliers affectés aux Pays-Bas… Plusieurs pays sont touchés par des incidents en cascade. La raison : une panne informatique géante liée à une incompatibilité entre le logiciel de CrowdStrike, une entreprise spécialisée dans la cybersécurité, et les appareils Windows. « Le problème a été identifié, isolé et un correctif a été déployé », a affirmé à la mi-journée George Kurtz, patron de l’entreprise mise en cause, sur le réseau social X. Il a précisé que les systèmes Mac et Linux ne sont pas touchés.

 

Franceinfo : Quelle est l’origine de cette panne informatique ? 

François Deruty : Il semblerait que la société américaine CrowdStrike ait réalisé une mise à jour de l’un de ses équipements qu’on appelle un EDR (Endpoint detection and response). Pour schématiser, un EDR correspond à un antivirus de nouvelle génération. Visiblement, cette mise à jour a un problème de format et fait « planter » les terminaux Windows sur lesquels les EDR sont installés. C’est a priori pour cette raison qu’on voit des écrans bleus [synonymes d'une erreur système] partout à travers la planète.

Microsoft a également signalé une panne de service, est-ce que ces deux bugs sont liés ? 

La situation reste confuse, mais cette panne mondiale est liée à la mise à jour défectueuse de CrowdStrike et non au système d’exploitation [Windows] lui-même, comme on a pu l’entendre à plusieurs reprises. Microsoft a eu une panne ce matin qui a été réglée au bout d’une heure. Elle n’a rien à voir et n’a pas eu le même impact. Autrement dit, c’est avant tout un problème de CrowdStrike sur du [matériel fonctionnant avec un logiciel] Microsoft, pas l’inverse.

De Sydney à Paris en passant par Tokyo, de nombreux pays et villes de la planète sont directement touchés par cette panne informatique. Comment expliquer l’échelle planétaire de cette panne ?

CrowdStrike est une entreprise américaine, leader mondial dans le domaine de la cybersécurité et de la cyberdétection. Il s’agit d’une entreprise dont les produits sont utilisés par de nombreux clients, et ce, dans tous types de domaines et secteurs économiques. Depuis ce [vendredi] matin, on a vu de nombreux aéroports à l’arrêt, mais en réalité, il n’y a rien de spécifique à l’aviation. Cette panne peut toucher n’importe quelle entreprise cliente de CrowdStrike et n’importe quel secteur économique : le ferroviaire, les activités bancaires, les télécommunications…

Comment expliquer que CrowdStrike ait déployé une mise à jour contenant un bug aussi important ? 

Des mises à jour qui ne se passent pas très bien, c’est assez commun en informatique. Mais de cette ampleur-là, c’est rare. Normalement, on réalise des tests à plusieurs reprises avant de déployer la mise à jour. Il y a des procédures à suivre. La question qui se pose désormais, c’est : comment une entreprise de cette taille a-t-elle procédé et quel a été le processus de validation ? Nous aurons sans doute des réponses et des éclaircissements une fois que CrowdStrike sera parvenu à surmonter cette crise.

Est-il possible d’estimer la durée de cette perturbation et d’envisager un retour à la normale ?

Les équipes techniques de CrowdStrike sont sur le pont, elles ont communiqué très vite, en expliquant les différents moyens techniques disponibles pour réparer les machines ou revenir à des versions antérieures. C’est plus ou moins facile en fonction de l’architecture des différents systèmes. Mais le temps que les clients appliquent cette solution et que tout revienne à la normale, ça va prendre beaucoup de temps.

Que faire si son ordinateur est touché par cette panne ? 

Si vous êtes concerné, il faut contacter le service informatique de votre entreprise – qui a normalement pris les devants – et se renseigner avec les différents communiqués officiels de CrowdStrike qui expliquent comment remettre son système dans un état fonctionnel. Il est vivement recommandé d’appliquer les correctifs, les mises à jour et les recommandations le plus tôt possible

12345...36



L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol