Macron récupérateur des popularités des anciens présidents
Il est clair que les éloges prononcés à l’occasion de la disparition de Chirac sont excessifs. D’une certaine manière, c’est la tradition dans ce genre d’exercice. Chirac n’aura sans doute pas été un très grand président mais c’est vrai qu’avec le temps notamment sa popularité a augmenté. Un phénomène sans doute lié à sa simplicité et au caractère très familier des relations qu’il entretenait avec des Français. Exactement le contraire de Macron qui lui s’est installé dans la posture d’un monarque républicain très au-dessus de toutes les institutions, des corps intermédiaires et des sujets. Sujets auxquels d’ailleurs il conseille avec une condescendance très méprisante de traverser la rue pour trouver du travail. Par parenthèse, le jardinier destinataire de cette recommandation de Macron est toujours en galère avec des contrats temporaires dans la restauration. L’intéressé a bien traversé la rue mais la pauvreté du trottoir d’en face ressemble curieusement à celle où il se trouvait précédemment. Sans doute conscient du rejet qu’il provoque voir même de la haine Macron se fait en quelque sorte brocanteur récupérateur des morceaux de popularité des un et des autres. D’où cet hommage à Jacques Chirac justement soulignant les qualités que Macron ne procède pas à savoir la simplicité et la compassion.
Alors qu’Emmanuel Macron loue un Jacques Chirac qui « nous rassemblait », David Doukhan, chef du service politique d’Europe, note que depuis son élection en 2017, « l’unité du pays a été mis à mal », avec notamment la crise des « gilets jaunes ». Or, rappelle-t-il, Jacques Chirac, « très marqué par les émeutes de mai 1968″, mais également par les grèves de 1995, « a passé ses deux mandats avec l’idée chevillée au corps de ne pas fracturer les Français ». Emmanuel Macron, lui, « réforme fort », note encore David Doukhan, et peut-être, en rendant hommage à un président rassembleur, « a-t-il envie de s’en inspirer ».
Cet avis est partagé par l’éditorialiste d’Europe 1 Michaël Darmon. Selon lui, Emmanuel Macron a tenté de « récupérer un peu de la personnalité » de Jacques Chirac, et « de récupérer un peu l’amour que les Français lui portent ». Une façon pour l’actuel locataire de l’Élysée de dire : « Je veux aussi tisser mon lien avec les Français », estime encore Michaël Darmon. En parlant d’un Jacques Chirac « que nous aimions autant qu’il nous aimait », Emmanuel Macron « place toute de suite la notion de lien affectif puissant, puisque c’est certainement ce qui lui manque ».
Dans son discours, Emmanuel Macron a multiplié les allusions à l’amour de Jacques Chirac pour les Français, y compris « les plus humbles ». « On se souvient de la phrase d’Emmanuel Macron sur ‘ceux qui ne sont rien’ et qui avait beaucoup choqué », relève David Doukhan. Plus tard, le chef de l’État a également salué le talent de l’ancien président pour « réconcilier proximité et grandeur ». Or, note encore le chef du service politique d’Europe 1, après son élection, Emmanuel Macron « a tout de suite enfilé le costume de la grandeur, mais a mis du temps à retrouver de la proximité ».