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«Plasturgie: crise des matières premières».

«Plasturgie:  crise des matières premières».

Emmanuelle Perdrix, présidente de Polyvia explique les raisons de la crise des matières premières en plasturgie ( dans l’Opinion)

 

Tribune

Automobile, électroménager, informatique, acier, béton, coton ou pâte à papier : cette liste — nullement exhaustive — ne reflète pas le talent de Prévert, mais la réalité d’une crise mondiale sans précédent, celle des matières premières.

Dans la vie quotidienne, c’est le marchand de vélos qui ne dispose plus de dérailleurs, le constructeur automobile contraint de stopper une ligne d’assemblage faute de semi-conducteurs, ou encore le fabricant de seringues ou d’appareillage médical, privé des matières premières polymères nécessaires à leur production.

Car le secteur de la plasturgie n’échappe pas à ce terrible constat. Les pétrochimistes, qui fabriquent les polymères, ont une stratégie clairement planétaire. Mais faute d’investissements suffisants dans leurs unités de production depuis environ deux décennies, l’Europe se retrouve en situation de dépendance, condamnée à des importations continues.

Cette vulnérabilité a éclaté au grand jour, dans un contexte où s’agrégeaient plusieurs contraintes très dommageables : une baisse de production des produits raffinés liée à la crise du secteur des transports internationaux, une mauvaise anticipation de la reprise par les créateurs de matières premières, mais également le froid polaire qui, régnant sur le Texas, a provoqué la paralysie de sites pétrochimiques décisifs pour le secteur.

Résultat : l’Europe ne profite pas du rebond perceptible ailleurs. Au contraire : le marché domestique chinois, de plus en plus consommateur en plastiques, préempte une bonne partie des volumes, quitte à les payer plus cher. Résultat : c’est bien d’une crise de l’offre dont nous pâtissons aujourd’hui.

« Dans tous les cas, on le voit, la situation appelle à une indispensable intervention du pouvoir politique »

A ce titre, le cas des transformateurs de polymères est emblématique puisqu’ils se trouvent placés au centre d’une chaîne qui réduit à peu de choses leurs marges de manœuvre : en amont, des fournisseurs de matières premières dont on a vu qu’en situation de pénurie, ils donnent priorité à un marché asiatique plus dynamique et synonyme de contrats plus rémunérateurs. Conséquence : des plasturgistes français — majoritairement des PME — confrontés à une hausse exponentielle des prix, approvisionnés de façon aléatoire et soumis à des délais de livraison exagérément rallongés.

Et en aval, des engagements contractuels devenus inapplicables mais qui génèrent des pénalités de retard de la part des « donneurs d’ordre », clients de la plasturgie. En résumé, la « double peine » pour des chefs d’entreprise, freinés par un déficit de matières premières, mais néanmoins sanctionnés puisqu’ils ne peuvent délivrer les quantités prévues dans les délais impartis…

« Force majeure ». A l’heure où l’Etat souligne — à juste titre — l’impératif d’une « reconquête de notre souveraineté industrielle », reconnaissons qu’une telle situation semble, à tout le moins, paradoxale. Cette incongruité n’a d’ailleurs pas échappé à la ministre déléguée chargée de l’Industrie, Madame Pannier-Runacher. Celle-ci a récemment appelé à ne pas appliquer « à la lettre » les clauses de pénalité, « mais à tenir compte d’une situation dans laquelle le fournisseur est confronté à une problématique qui le dépasse complètement ». Et d’inviter les filières à « travailler là-dessus ».

Propos fondé qui invite, d’évidence, à revoir certaines pratiques. Dans cette perspective, dessinons ici une piste concrète : la « force majeure » que les producteurs de matières premières ont le droit d’invoquer pour échapper à d’éventuelles pénalités quand ils ne parviennent pas à honorer strictement leurs engagements, devrait pouvoir s’appliquer à l’ensemble de la filière. Dans les faits, la crise de la Covid a (parfois) conduit des cocontractants à « adapter » le contrat plutôt que d’opter pour la solution plus radicale que représente la « force majeure ». Une réponse souple et pragmatique, plutôt qu’une attitude rigoriste et déconnectée du contexte : c’est cette approche qu’il conviendrait sans doute d’étendre.

Dans tous les cas, on le voit, la situation appelle à une indispensable intervention du pouvoir politique. C’est vrai à l’échelle européenne, si l’objectif est bien de relocaliser à terme la production de matières premières plastiques. A défaut, le Vieux Continent subira systématiquement l’impact des fluctuations de l’offre mondiale, avec des crises récurrentes à la clé. C’est vrai aussi au niveau national, où la restauration d’une authentique indépendance économique passe par une évolution de certaines règles, au bénéfice de ceux qui, quotidiennement, ancrés dans la trame de nos territoires, recrutent, innovent, produisent et préparent la société durable de demain.

Emmanuelle Perdrix est présidente de Polyvia.




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