Touraine : « Chavez n’est pas une référence «
Après les déclarations dithyrambiques du sous ministre Lurel sur Chavez, le gouvernement rame pour minimiser l’affaire. Lurel avait notamment souhaité qu’il y ait davantage de dictateurs comme Chavez dans le monde ; deux erreurs, la première, c’est de ne pas avoir envoyé un vrai ministre aux obsèques de Chavez (une tradition de la diplomatie internationale), la seconde, le faiat de confier ce portefeuille de sous ministre à un amateur ; malheureusement il n’est pas le seul au gouvernement. « J’ai honte pour mon pays (…) M. Hollande réagissez! », a tweeté dimanche l’ancien ministre de la Défense et député UDI Hervé Morin, emboîtant le pas à une demi-douzaine d’élus et responsables de l’opposition qui depuis samedi ont exprimé leur indignation. En cause: des propos du ministre des Outre-mer qui représentait le gouvernement français vendredi aux obsèques nationales du président vénézuélien Hugo Chavez, décédé mardi des suites d’un cancer. Interrogé après la cérémonie par RTL et Europe 1, Victorin Lurel, né en Guadeloupe, où il fut député et président de région, a confié son émotion et une certaine admiration pour le leader sud-américain qu’il avait rencontré et qu’il a comparé à de grandes figures de la politique française. »Chavez c’est de Gaulle plus Léon Blum », a-t-il dit. « Moi je dis, et ça pourra m’être reproché, (…) que le monde gagnerait à avoir beaucoup de dictateurs comme Hugo Chavez puisqu’on prétend que c’est un dictateur. Il a pendant ses 14 ans (au pouvoir) respecté les droits de l’Homme », a aussi déclaré le ministre. Dimanche soir, interrogé à l’émission BFM Politique, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls a vivement réagi: « J’en ai marre de participer à ces petites polémiques qui nous éloignent de l’essentiel ». Sa collègue Marisol Touraine (Affaires sociales) a elle répondu sur le fond au « Grand jury » (RTL-Le Figaro-LCI), en invitant à ne pas oublier « les faces sombres du chavisme » lors qu’on évoque la mémoire de l’ancien président du Venezuela. »Le bilan sur les droits de l’homme est contrasté, faire de Chavez une figure de référence internationale n’a pas de sens, mais oublier son charisme et ce qu’il a fait pour les plus pauvres serait également une faute », a souligné Mme Touraine. La ministre a rappelé le soutien de Chavez au régime iranien, comme l’avait fait un peu plus tôt Anne Hidalgo (PS) sur Europe 1, en le condamnant « totalement ». Mercredi au lendemain du décès, Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche) s’était distingué dans la classe politique en rendant un vibrant hommage à Chavez, à sa défense des pauvres et à son « idéal inépuisable de la révolution ». Le président Hollande avait affiché une certaine retenue dans son communiqué de condoléances, tout comme Najat Vallaud-Belkacem. « Hugo Chavez ne laissait personne indifférent et, sans nécessairement partager ses orientations, on ne peut évidemment que saluer la volonté qui était la sienne de justice et de développement », avait dit la porte-parole du gouvernement. Comme Yves Jégo (UDI) ou ses collègues UMP Dominique Bussereau, Lionnel Luca et Christian Estrosi la veille, le député Hervé Mariton s’est dit « choqué » dimanche par les déclarations de M. Lurel, y voyant « une faute grave dont il conviendrait que le président de la République, le Premier ministre, s’excusent ». Présentant elle aussi Chavez comme « un dictateur », « un démagogue », la présidente du Medef Laurence Parisot a accusé sur France 3 Victorin Lurel de « déshonorer notre pays en s’exprimant ainsi ». D’un point de vue économique, elle a reproché à Chavez de n’avoir pas su profiter de la richesse pétrolière de son pays, et d’avoir « fait en sorte que toutes les élites quittent le pays ». Au Parti socialiste, Julien Dray a surtout critiqué le niveau des réactions en France depuis mercredi sur le bilan de Chavez. « On a senti la haine de classe de ceux qui ne savent pas ce qu’il a fait pour son peuple », a-t-il fait valoir, regrettant aussi que la France n’ait pas envoyé à ces funérailles d’Etat « une personnalité de premier plan » comme le chef de la diplomatie Laurent Fabius.