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Défense Nucléaire : un parapluie Franco britannique commun ?

Nucléaire : un parapluie Franco britannique commun ?

 

De l’avis de nombreux observateurs, la victoire de Donald Trump annonce le retour de l’isolationnisme américain. Dès lors, le débat au long cours autour de l’autonomie stratégique européenne revient sur le devant de la scène. Si cette notion d’autonomie stratégique comporte une composante conventionnelle et industrielle évidente, une nouvelle question émerge dernièrement : en cas de désengagement de Washington, les Européens pourraient-ils eux-mêmes assurer la protection du continent au niveau nucléaire ?

 

par 

Docteur en sciences de gestion, ancien officier, enseignant en géopolitique à ESDES Business School, ESDES – UCLy (Lyon Catholic University) dans The Conversation 

Hormis la Russie, seuls deux pays européens disposent aujourd’hui de l’arme nucléaire : la France, avec 290 têtes nucléaires, et le Royaume-Uni, qui en compte 225. Au regard de la redéfinition de l’ordre mondial qu’une nouvelle présidence Trump pourrait entraîner, les capacités nucléaires de ces deux pays prennent une importance singulière.

Depuis son premier mandat, Emmanuel Macron souhaite relancer le débat sur la dissuasion nucléaire en Europe. Il évoque notamment la possibilité d’étendre la protection de l’arsenal français aux alliés européens – une option dont l’importance n’échappe à personne à l’heure où la Russie menace d’utiliser son arsenal dans le cadre du conflit avec l’Ukraine. Les Britanniques, quant à eux, n’étant pas dans la même dynamique pour l’instant, préfèrent continuer de déléguer la protection nucléaire du continent aux Américains.

En tout état de cause, l’extension des garanties nucléaires française et britannique pour la sécurité collective du Vieux Continent poserait des problèmes doctrinaux d’une grande complexité.
Depuis que la France s’est dotée de l’arme nucléaire en 1966, sa doctrine de dissuasion repose sur une notion fondamentale, très gaullienne et jusqu’à récemment jamais remise en cause par les présidents français successifs : l’arme nucléaire ne doit servir qu’à la protection des « intérêts vitaux » de la nation.

Ces intérêts vitaux n’ont jamais été clairement définis, mais ils tiennent, a minima, aux éléments indispensables à la survie et à la souveraineté du pays. Cette définition très large maintient sciemment une forme d’incertitude, pour ne pas divulguer trop d’informations à de potentiels adversaires dans l’éventualité d’une attaque.

Cependant, les crises géopolitiques et les tensions croissantes entre la Russie et le camp occidental, marquées par la formulation de menaces nucléaires par Vladimir Poutine, ont conduit Paris à remettre en cause les éléments fondamentaux de cette doctrine.

En février 2020, lors d’un discours à l’École de guerre, Emmanuel Macron a déclaré que la France était prête à s’engager dans un « dialogue stratégique » avec ses partenaires européens en vue d’explorer la meilleure façon d’intégrer l’arsenal nucléaire français dans la sécurité européenne globale – sans se substituer à l’OTAN, mais pour compléter la défense du continent. Le retour à la Maison Blanche de Donald Trump, qui a souvent critiqué avec virulence l’Alliance atlantique, incite encore plus la France et l’Europe à persévérer dans cette réflexion. Rappelons à cet égard que la doctrine de l’OTAN indique que les dissuasions française et britannique « participent significativement » à la défense du continent – sans préciser comment. Le temps semble venu d’apporter plus de clarté à cette question fondamentale.
Contrairement à celle de la France, strictement souveraine en matière nucléaire, la dissuasion du Royaume-Uni demeure fortement dépendante vis-à-vis de l’Alliance atlantique. Son système de dissuasion repose en partie sur les missiles Trident, achetés aux États-Unis bien que les têtes nucléaires soient britanniques. La souveraineté britannique dans ce domaine n’est donc pas totale ; dès lors, la marge de manœuvre de Londres en ce qui concerne une éventuelle extension de son parapluie nucléaire au reste de l’Europe est limitée.

Néanmoins, la coopération nucléaire bilatérale entre Londres et Paris, formalisée par les traités de Lancaster House signés en 2010, peut contribuer à une telle évolution.

Il demeure que le Royaume-Uni risque de ne pas pouvoir s’engager pleinement dans une dissuasion à l’échelle du Vieux Continent sans l’accord de son allié américain…

Le président français encourage ses homologues européens à participer à l’élaboration d’une « culture stratégique commune ». En matière de dissuasion nucléaire, cette approche se heurte toutefois aux réalités politiques et aux réticences de certains pays européens, qui considèrent qu’ils ne seront jamais aussi bien protégés que par le bouclier américain.

En outre, la dissuasion nucléaire française n’a jamais été conçue pour protéger l’ensemble de l’Europe et sa capacité reste limitée face aux arsenaux nucléaires plus vastes de la Russie. Avec ses quelque 300 têtes nucléaires (600 au milieu des années 1980) en cohérence avec son concept de « stricte suffisance », la France dispose certes d’un arsenal dissuasif crédible, mais cette capacité reste insuffisante pour couvrir toutes les éventualités d’un conflit de haute intensité impliquant plusieurs États européens.
De plus, l’idée de déléguer ou de partager cette dissuasion nucléaire est politiquement et diplomatiquement difficile. Certains pays européens, comme l’Allemagne et les États scandinaves, pourraient considérer la mise en place d’une dissuasion nucléaire commune (qui trancherait avec la situation actuelle car la dissuasion américaine est depuis des décennies un objet récurrent du dialogue sur les questions nucléaires entre les États-Unis et la Russie) comme une provocation à l’égard de la Russie allant à l’encontre des objectifs de désarmement nucléaire et de non-prolifération qu’ils défendent activement. Les pays scandinaves et l’Allemagne sont particulièrement sensibles à la relation avec la Russie, en raison de leur proximité géographique avec cette dernière et de leur histoire. Une initiative de dissuasion commune pourrait être perçue par Moscou comme un geste hostile, risquant d’intensifier les tensions.

Enfin, une difficulté majeure persiste du point de vue doctrinal. La dissuasion entre deux acteurs repose sur la notion de crédibilité. Cette dernière existe sous deux formes : technique (la capacité d’une frappe d’atteindre son objectif) et psychologique (l’adversaire, pour être dissuadé, doit être certain que l’autre est prêt à lui faire subir un bombardement nucléaire, quitte à être frappé encore plus durement en retour). À titre d’exemple, la France peut apparaître crédible aux yeux de Moscou si elle menace de détruire des infrastructures russes en cas d’attaque russe visant le territoire français ; mais le sera-t-elle autant si elle menace de s’en prendre à la Russie en cas d’attaque russe contre la Pologne, quitte à s’exposer à voir en retour Paris rasée par les bombes russes ? Ce n’est pas certain… La question est centrale et suppose l’existence d’intérêts vitaux communs européens qui restent à définir.

Une perspective peu crédible… pour l’instant
Aujourd’hui, la dissuasion nucléaire franco-britannique ne peut pleinement se substituer à la garantie américaine. Le dépassement des stricts intérêts vitaux français constitue un jalon vers une sécurité collective renforcée, mais une telle ambition nécessite un engagement fort des autres États membres et un consensus sur la stratégie nucléaire en Europe.

En fin de compte, la dissuasion nucléaire élargie est une idée à explorer, mais elle ne pourra atteindre son plein potentiel qu’à la condition qu’une approche coordonnée, intégrée et acceptée par l’ensemble des puissances européennes puisse se faire jour. Or une telle perspective semble difficilement envisageable à ce stade.

La politique de l’administration Trump sera donc décisive pour qu’une évolution puisse avoir lieu. Dit simplement, son éventuelle politique isolationniste face à l’agressivité russe doit faire peur notamment à l’Allemagne et à l’Europe orientale. Si le président américain transforme l’OTAN en coquille vide et si Vladimir Poutine poursuit sa politique agressive après un hypothétique règlement du conflit l’opposant à l’Ukraine, alors la situation pourrait peut-être évoluer…

Premier tour des municipales : Macron tire le parapluie du comité scientifique

Premier tour des municipales : Macron tire le parapluie du comité scientifique

 

Il y a quelque chose de surréaliste dans les propos de Macron qui tente de justifier l’irresponsable décision d’organiser le premier tour des élections municipales. Pour cela,  il tire le parapluie du comité scientifique

«Si le Conseil scientifique m’avait dit que les maintenir mettrait la santé des Français en danger, je ne les aurais pas maintenus», révèle Emmanuel Macron dans le Point  à propos des élections municipales. 

Et bizarrement le comité scientifique dès le lendemain des élections présidentielles aurait conseillé un confinement généralisé. La vérité c’est qu’il y a longtemps que le comité scientifique, composée pour une grande part de chapeaux  à plumes, est instrumentalisé par le pouvoir politique pour cacher ses hésitations et ses contradictions.

La décision ou non d’organiser des élections ne relève pas de la responsabilité d’un comité scientifique surtout à quelques jours près.

«Si le Conseil scientifique m’avait dit que les maintenir mettrait la santé des Français en danger, je ne les aurais pas maintenues. J’assume totalement la décision. Si le Conseil scientifique nous éclaire par des avis, il y a tout au long de cette crise un ordre politique et un ordre scientifique. Les choix politiques sont faits par le pouvoir démocratique», affirme-t-il. Le problème ,c’est que Macon ne saurait représenter le pouvoir démocratique. Juridiquement sa représentativité ne peut être discuté mais politiquement il est depuis longtemps très minoritaire dans le pays et ne peut donc se référer à ce pseudo pouvoir démocratique. Et d’ajouter en toute mauvaise foi que les Français contaminés ce jour-là l’ont été davantage dans les bars que dans les bureaux de vote ! Un curieux argumentaire, pas très élégant en plus !

L’expert « indépendant »: le nouveau parapluie des politiques

L’expert « indépendant »: le nouveau parapluie des politiques

Les conseils d’experts dits indépendants se multiplient, pour servir de parapluie à des responsables politiques de plus en plus contestées par l’opinion.  On voit un peu partout fleurir des institutions dites indépendantes sans qu’on ait vraiment bien analysé les conditions objectives de leur fonctionnement  et ce qui définit  l’indépendance. Affirmer que les experts sont  indépendants parait en effet un peu excessif pour la seule raison que l’indépendance, c’est-à-dire l’affranchissement de toute considération extérieure autre que l’intérêt général, constitue en fait une sorte d’exception rare dont le prix à supporter et particulièrement lourd pour les intéressés. En clair, mieux vaut renoncer à une carrière brillante!  L’expert indépendant, dans une institution ou pas, doit en effet être en capacité s’il le faut de contredire les points de vue du monde économique, social, technologique, environnemental et des institutions. Or la plupart de ces institutions  indépendantes sont composés par les pouvoirs publics et le choix dès le départs sont faussés. La plupart de ces institutions fonctionnent  aussi sur des crédits publics et où des ressources fiscales d’entreprise. Pourtant la dépendance éthique est indissociablement liée à l’indépendance économique. Ceux  qui ont participé à ces différentes institutions ou  commissions dites « indépendantes » savent bien que 80 % des participants, en réalité de façon conscient ou inconsciente, sont au service de ceux  qui les ont désignés. L’expert réellement indépendant est définir d’abord, à trouver ensuite ! le papier du Monde:

 

« C’est dans les années 1990 que l’on a vu fleurir, en France comme dans bien d’autres pays, à l’échelon national comme international, nombre d’agences, hautes autorités, cours de justice, commissions d’arbitrage, etc., pour, en vrac, réguler les marchés, gérer la dette publique ou la politique monétaire, surveiller l’éthique du personnel politique ou de la recherche biologique, évaluer la conformité aux lois ou à la Constitution, protéger la concurrence ou punir les fraudes dans l’industrie, la finance, l’alimentation, le médicament, combattre la prolifération nucléaire… Dotées, selon les cas, de fonctions de consultation, d’évaluation, d’arbitrage, de prescription, de certification, de contrôle, de sanction, ces institutions ne sont pas toutes nouvelles – comme les banques centrales, la Cour des comptes, le Conseil constitutionnel ou la Cour européenne de justice –, mais toutes ont réaffirmé dans les trois décennies écoulées leur volonté d’autonomie sur le thème de « l’indépendance » vis-à-vis du pouvoir politique.

Il s’est ainsi développé un discours de promotion de « l’indépendance », passée du registre de la morale personnelle (du magistrat, du fonctionnaire, du scientifique) à celui d’une garantie d’efficacité, de justice, de transparence et de poursuite de l’intérêt commun que ne sauraient plus assumer des autorités politiques élues et des administrations bureaucratisées, minées par le clientélisme, la démagogie, le corporatisme et les lobbies.

Ce mouvement, conceptualisé par la « théorie de l’agence », développée par les économistes américains et promouvant l’idée d’un « agent » auquel un « principal » délègue pouvoir et autonomie en échange d’une rationalité accrue, a également reçu le soutien des médias, qui, eux aussi soucieux de leur « indépendance » vis-à-vis des pouvoirs politiques et économiques, usent volontiers pour désigner ces institutions des termes de « gendarme », « sages », « vigie », « avocat », comme pour souligner l’impartialité et l’expertise de leurs travaux – il n’est qu’à voir la transe qui s’empare des rédactions parisiennes à l’approche de la publication du rapport annuel de la Cour des comptes ou d’un avis du Conseil constitutionnel. « L’indépendance s’est imposée comme une catégorie politique centrale de nos démocraties », constatent les auteurs.

Il était donc temps que la recherche en science politique, en sociologie et en droit se penche sur le fonctionnement réel de ces « indépendantes », non pas pour en dénoncer les éventuelles compromissions et malfaçons – d’autres s’en chargent –, mais pour en décortiquer les discours, faire l’histoire de leur construction, identifier leurs règles de professionnalisation et d’appartenance socioculturelle, bref, décrire par le menu ce qui s’apparente de fait à un nouveau mode d’exercice du pouvoir politique.




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