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Électricité : retour à la consommation… en attendant Godot et le nucléaire !

Électricité : retour à la consommation… en attendant Godot et le nucléaire !

RTE a défini la stratégie pour obtenir la neutralité carbone en 2050 à travers la politique énergétique. En fait on abandonne les objectifs de diminution de consommation car cette dernière va considérablement augmenter avec l’électrification de la vie économique. On compte sur les énergies renouvelables pour absorber une partie de la croissance de la et on fait un peu l’impasse sur les nouvelles centrales nucléaires d’autant que le gouvernement n’a même pas fixé le financement et les échéances.( et qu’on a même fermé Fessenheim)

Le réseau de transport de l’électricité en France (RTE) estime dans un rapport publié ce mercredi que la France doit doubler sa production électrique pour répondre à une demande plus forte que prévue, en tenant compte de nouvelles contraintes.

En plus de devoir répondre à une demande en hausse dans les prochaines années, le pays doit composer avec de nouvelles contraintes, notamment le programme européen « Fit for 55″ qui oblige les pays de l’Union à baisser de 55% leurs émissions de CO2 par rapport à 1990.

La croissance de la consommation électrique en France devrait dépasser 10 térawattheures par an pendant la décennie 2025-2035, un rythme qui « n’a plus été atteint depuis les années 80″ selon RTE dans son bilan. Ce rythme de croissance « met en évidence l’ampleur du défi auquel le système électrique est confronté », insiste RTE. Cela implique qu’il va falloir produire rapidement plus d’électricité bas-carbone alors que les nouveaux réacteurs nucléaires annoncés par le gouvernement ne verront pas le jour avant 2035.

« Atteindre d’ici à 2035 une production électrique bas-carbone de 600 TWh minimum, et si possible de 650 TWh, voire plus, de sorte à couvrir le haut de la fourchette des perspectives de consommation électrique, apparaît ambitieux [...] mais faisable », explique RTE. Cela va conduire de fait la France à produire plus d’énergies renouvelables, et plus vite.

Pour atteindre au minimum 250 TWh d’ici à 2035, la France doit investir et construire de nouveaux moyens de produire de l’énergie renouvelable. Aujourd’hui, seuls 120 TWh proviennent des énergies renouvelables en France, soit un doublement de la production, indique le rapport. Pendant l’année 2022, les Français ont consommé 460 TWH.

La consommation devrait atteindre 615 térawattheures (TWh) en 2035 Alors que les Français ont consommé 460 TWh d’électricité en 2022. Un tel scénario suppose donc que la consommation d’électrons augmente de près de 34% en 13 ans .

« Ces perspectives de croissance marquent clairement une rupture par rapport aux années passées. Depuis 15 ans, la consommation électrique est en baisse ou stagne. C’est contre-tendanciel », a reconnu ce mercredi Xavier Piechaczyk, le président du directoire de RTE, lors d’une conférence de presse dédiée à la mise à jour de son bilan prévisionnel à l’horizon 2035.

Pour mémoire, en 2021, RTE tablait encore sur une consommation de 540 TWh à cet horizon. Cette réactualisation, publiée deux ans après la publication du rapport initial, tient compte de deux grandes évolutions : les nouveaux objectifs climatiques européens (il faut désormais diminuer les émissions de gaz à effet de serre de 55% à l’horizon 2030, et non plus de 40%) et les nouveaux enjeux d’indépendance énergétique et de réindustrialisation dans un contexte géopolitique, où les questions de souveraineté sont devenues centrales. Il intègre aussi une moins grande disponibilité de la biomasse.

Nucléaire : centrales prolongées au-delà de 40 ans

Nucléaire : centrales prolongées au-delà de 40 ans

L’autorité de sûreté nucléaire après examen va prolonger les centrales françaises au-delà de 40 ans. La première qui bénéficie de cette nouvelle durée de vie est celle de Tricastin.

Ce réacteur « est le premier réacteur du parc nucléaire français sur lequel l’ASN prend position à l’issue de son quatrième réexamen périodique, soit après environ 40 années de fonctionnement », souligne l’autorité dans un avis publié le 10 août dernier.

Cette décision est d’autant plus inédite qu’en France, l’ASN est soumise à un règlement qui ne permet pas d’acter rapidement la prolongation des réacteurs à 60 ans ou au-delà. A titre d’exemple aux Etats-Unis, les licences d’exploitation courent parfois jusqu’à 80 ans.

Actuellement, les réacteurs nucléaires français ne sont associés à aucune durée de vie. Toutefois, les calculs de sûreté sur les composants ont été réalisés pour 40 ans. Dès lors, la prolongation de leur fonctionnement au-delà de cette échéance est conditionnée à un réexamen de contrôle, qui a lieu tous les dix ans .

Cette prolongation a été rendue possible par les travaux entrepris par EDF dans le cadre de son programme « Grand carénage ». Mené depuis 2014 pour rénover le parc nucléaire français et augmenter le niveau de sûreté des réacteurs, il doit aussi permettre, à terme, la poursuite de leur exploitation significativement au-delà de 40 ans. Son coût est évalué à 66 milliards d’euros.

Nucléaire: le garant d’une indépendance énergétique

Nucléaire: le garant d’une indépendance énergétique

Depuis les trente glorieuses, la part industrielle du PIB de la France a été réduite de moitié passant d’un peu plus de 30% en 1960 à 16% en 2021*. Ce chiffre est bien inférieur à la moyenne mondiale (27,6%) mais aussi à celle de l’UE (proche de 23%). Si l’heure est à la réindustrialisation, celle-ci ne pourra intervenir seule, une industrie souveraine reposant en priorité sur une vraie sécurité énergétique. Par Philippe Charlez, Expert en questions énergétique, Institut Sapiens. dans la Tribune

Le projet de « loi pour l’industrie verte » présenté le mercredi 16 mai 2023 en Conseil des Ministres est le principal volet du plan de réindustrialisation souhaité par le Président de la République. Si le projet est louable, l’amalgame réindustrialisation/décarbonation est très critiquable. Même si 80% des jeunes associent industrie et pollution, leur vendre l’industrie comme levier de décarbonation tient au mieux de la naïveté au pire de l’imposture.

Verdir l’industrie impose le remplacement des énergies fossiles, encore très présentes dans l’industrie lourde par des vecteurs électriques : hydrogène en sidérurgie, four à arc électrique en cimenterie et en verrerie. Face à des pays émergents, dont le verdissement de l’économie n’est qu’une lointaine priorité, ce bouleversement renchérira les coûts de production. De plus, d’inévitables normes se superposeront à un outil juridico-administratif déjà très contraignant et dégraderont un peu plus la rentabilité d’entreprises déjà plombées par un excès de charges. Dans ce contexte, la France éprouvera les pires difficultés à massivement ramener au pays des activités délocalisées faute de rentabilité. L’amalgame réindustrialisation/décarbonation est d’autant plus regrettable que l’Hexagone possède déjà l’un des mix énergétiques les plus vertueux du monde.

La décarbonation (au sens large – transports, habitat) reposant en grande partie sur le remplacement d’équipements thermiques par des équipements électriques (pompes à chaleur, éoliennes, panneaux solaires, batteries, voitures électriques, piles à combustible), l’exécutif mise surtout sur le déplacement des activités industrielles traditionnelles vers cette industrie verte dont une partie écrasante (>60%) est aujourd’hui produite dans le sud-est asiatique. La ramener en Europe n’est pas seulement un problème industriel. Il s’agit aussi d’un problème de dépendance minière.

Depuis les années 1950, le fonctionnement de notre société de croissance est intimement lié aux importations de pétrole et de gaz et donc fortement dépendante des pays producteurs. Si la nature a offert gratuitement le soleil et le vent à tous les terriens, il n’en n’est pas de même des métaux critiques indispensables pour construire les équipements verts. Ainsi, la complexité croissante des réseaux électriques liée à la multiplication des ENR a fortement tendu les marchés du cuivre dont plus de la moitié de la production mondiale provient du Chili, du Pérou, de la Chine et de RDC. L’explosion de la demande de batteries a aussi fortement boosté les marchés du Cobalt (64% provient de RDC), du lithium (53% est produit en Australie et 21% au Chili) et du graphite (60% provient de Chine). Quant aux terres rares et autres métaux précieux présents dans les éoliennes, dans les panneaux solaires et les électrolyseurs, 60% de leur production est concentrée en Chine. La croissance verte qui nous donne l’illusion d’une indépendance énergétique retrouvée ne fera que déplacer notre dépendance pétrolière vers une dépendance minière encore plus marquée. L’Europe en général, la France en particulier, sont-elles prêtes à faire face aux foudres écologistes et à rouvrir massivement des mines ? Rien de très concret en ce sens ne figure dans le plan de réindustrialisation pour des projets qui, sans doute, se heurteraient à une puissante contestation.

Bien que la France ne produise plus d’Uranium [les principaux producteurs sont le Kazakhstan (36%), le Canada (17%), l'Australie (11%) et le Niger (8%)], la génération électrique nucléaire possède un important avantage concurrentiel par rapport au gaz : dans le prix du MWh nucléaire, l’uranium compte pour moins de 5% (le coût des installations compte pour 95%) alors que pour le MWh gazier le combustible compte pour 90%. Contrairement au gaz, le MWh nucléaire est donc peu sensible aux aléas économiques et géopolitiques des matières premières et confère à un pays une sécurité énergétique beaucoup plus robuste. D’autant que la France, à travers Orano, dispose d’un contrôle complet sur l’ensemble de la chaîne du combustible. Une expérience recherchée, vectrice d’influence à l’export.

Mais, une donnée physique supplémentaire tranche définitivement de débat : le recyclage du combustible usé. Contrairement à l’enrichissement initial consistant à concentrer la part d’Uranium fissible contenue dans le minerai naturel, le recyclage purifie le combustible usé contenant encore une part très significative de matières valorisables (les réacteurs actuels n’utilisent que 1% du potentiel du combustible). Selon la SFEN, les réserves de combustible nucléaire usé stockés en France auraient la capacité de produire de l’électricité propre pendant près d’un millénaire. Orano fabrique ainsi à partir de combustible usé du Mox (mélange d’oxydes d’Uranium et de Plutonium) qui est utilisé dans les centrales françaises et européennes. Toutefois, depuis la catastrophe de Fukushima et compte tenu des prix faibles de l’Uranium, les électriciens ont souvent préféré s’approvisionner dans les mines plutôt que de recycler du combustible usé. Toutefois, les cours croissants de l’Uranium (il a dépassé les 50 dollars/livre au cours des dernières semaines), la guerre russo-ukrainienne et les limites de stockage devraient faire évoluer les mentalités.

L’autre difficulté du recyclage concerne la technologie. Une partie significative du combustible usé contenant du Plutonium est davantage adaptée à la surgénération de quatrième génération (type Superphénix et Astrid) qu’à la technologie à eau pressurisée (seconde et troisième génération type EPR). Superphénix et Astrid ayant été définitivement abandonnés (sauf nouveau revirement !) par l’exécutif, il y a donc peu d’espoir que ce potentiel gigantesque puisse être valorisé à moyen terme.

Dommage que la politique l’ait une fois encore emporté sur la science et la raison. Le recyclage du combustible usagé dans une nouvelle génération de réacteurs aurait permis de fournir en abondance l’électricité décarbonée mais pilotable dont la France aura besoin au cours des décennies à venir (la consommation devrait doubler d’ici 2050) mais aussi de réduire significativement le problème crucial des déchets en ramenant la plupart des produits de fission à un niveau de radioactivité comparable à celui du minerai d’uranium naturel.

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* Source World Development Indicators | DataBank (worldbank.org)

Avenir du nucléaire: plombé par l’Etatisme ?

Avenir du nucléaire: plombé par l’Etatisme ?

par Michel Villette
Professeur de sociologie, AgroParisTech – Université Paris-Saclay dans The Conversation

Le 23 juin 2023, la loi relative à « l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes » était publiée au Journal officiel. Elle simplifie le parcours d’autorisation des projets de construction de réacteurs : concertation du public, déclaration d’utilité publique, mise en compatibilité des documents d’urbanisme, autorisations d’urbanisme ou autorisation environnementale.

Le texte, largement adopté par le parlement à la mi-mai, vise à faciliter la construction de trois séries de deux EPR 2 à l’horizon 2035 sur les sites de Penly (Seine-Maritime), Gravelines (Nord), du Bugey (Ain) et du Tricastin (Drôme), comme le président-candidat Emmanuel Macron en avait pris l’engagement à Belfort en février 2022. Ainsi, la loi supprime l’objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans le mix électrique à l’horizon 2035, ainsi que le plafonnement de la capacité de production nucléaire à 63,2 gigawatts.

Il est remarquable d’observer que cette décision technologique majeure et cet investissement public de première importance n’ont suscité pratiquement aucun débat, aucune polémique, aucune protestation.

Pourtant, de nombreuses questions se posent : comment doit se prendre la décision d’investir ou de désinvestir dans la construction de nouvelles centrales nucléaires ? Où est l’équilibre des pouvoirs en la matière ? Y a-t-il encore un débat possible une fois que le chef de l’État, en réaction aux difficultés liées au conflit en Ukraine, déclare dans l’urgence que c’est la seule solution pour assurer l’approvisionnement énergétique de la France, et qu’un maigre débat à l’Assemblée nationale débouche sur un rapide consensus plutôt que sur des études et des discussions approfondies ?

Dans son Esprit des Lois (1748), Montesquieu rappelle souvent qu’un peuple n’est libre que quand le pouvoir y arrête le pouvoir. En démocratie, la modération dans les décisions gouvernementales est supposée provenir du cadre constitutionnel et législatif, mais aussi et surtout d’un équilibre entre des forces dont les intérêts s’opposent et s’équilibrent.

Immobiliser une nouvelle fois une grande part des capacités d’investissement de la France dans la construction de centrales nucléaires de type réacteur à eau pressurisée (PWR) – plutôt que dans autre chose –, c’est un choix majeur aux conséquences financières, techniques, écologiques et politiques lourdes à très long terme. C’est aussi la continuation d’un état technocratique centralisé, omniscience et omnipotent.

Comment assurer l’équilibre des pouvoirs dans un tel cas ? Suivant Montesquieu, quels pouvoirs faut-il mettre en concurrence pour obtenir la décision la plus éclairée, la plus raisonnable, la plus intelligente possible ?

Souvenons-nous que ce sont des décisions autoritaires – quasi militaires – qui ont marqué le lancement du programme nucléaire français en 1973. Sans débat parlementaire sérieux, ni cadre juridique adapté, un petit groupe d’hommes politiques, de hauts fonctionnaires, et d’ingénieurs ont pris l’option radicale du tout nucléaire, en faisant deux promesses à la population : la technologie nucléaire serait sans risque et fournirait une électricité bon marché.

La suite de l’histoire mondiale de l’industrie nucléaire a montré qu’il y avait des risques. Pourtant, ce n’est que très récemment que les autorités françaises ont commencé à mettre en place des exercices d’évacuation et de protection des populations qu’impliquerait un accident majeur improbable, mais pas impossible.

Quant au bas prix de l’électricité en France entre 1975 et 2005, il s’explique surtout par une sous-estimation du coût complet du kilowatt heure, et par un report de coûts cachés sur les générations futures : remboursement des emprunts, coût du démantèlement des installations, du recyclage et du stockage des déchets, coût éventuel d’un accident majeur.

L’électricité bon marché de l’époque s’explique aussi par la non-prise en compte dans le coût du kilowatt heure de tous les projets qui ont du être abandonnés, et qui ont été financés par des dépenses publiques : la filière graphite gaz abandonnée ; le réacteur Superphénix de Creys-Malville (Isère) supposé contribuer au recyclage des déchets les plus radioactifs, définitivement arrêté en 1997, enfin, le doublement du coût des nouveaux réacteurs de Flamanville (Manche) qui ne sont toujours pas en fonctionnement.

En se comportant à la fois en entrepreneur et en garant du programme nucléaire, l’État français a contribué à entretenir l’irresponsabilité financière des opérateurs. Il s’est substitué à eux. A contrario, dans d’autres pays tout aussi tentés par la solution nucléaire – les calculs des financiers et la logique des marchés ont joué le rôle de contre-pouvoir. Aux États-Unis en particulier, de nombreux projets de construction de centrales nucléaires ont été abandonnés parce que les investisseurs privés les trouvaient trop risqués ou pas assez rentables.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, le retour au nucléaire constitue-t-il un investissement rentable, et si oui, à quel prix du kilowatt heure ? Est-ce une solution technique porteuse d’avenir et exportable ? Pour répondre à toutes ces questions, la population ne dispose aujourd’hui que de l’avis des experts de Bercy et d’EDF. Les partis politiques ne se montrent guère en état d’exercer le rôle de contre-pouvoir. Il ne serait donc pas absurde de faire appel au secteur privé, ne serait-ce que pour tester les hypothèses économiques et technologiques retenues par les experts étatiques. Il serait intéressant et utile de comparer un investissement dans des réacteurs PWR à un investissement équivalent répartit entre des économies d’énergie, des énergies renouvelables et une accélération des recherches de pointes dans la fusion nucléaire ou, pourquoi pas, dans l’exploitation de l’hydrogène blanc récemment découvert dans le sous-sol français. Or, tous ces programmes sont en mal de financement…

Lorsqu’on veut installer un nouveau système de chauffage chez soi, on fait faire plusieurs devis et l’on étudie plusieurs solutions techniques. L’État français pourrait faire de même, évitant ainsi ses coutumiers dépassements de budgets. C’est en se tournant vers l’international que l’on peut espérer actuellement introduire suffisamment de diversité dans les débats sur les choix nucléaires. De ce point de vue, la controverse entre les Français et les Allemands sur la question nucléaire est utile et devrait stimuler la réflexion.

Faut-il, par exemple, imiter des états autoritaires – comme l’État chinois –, qui continue à construire des centrales EPR fondées sur le principe de la fission nucléaire ? Ne faut-il pas plutôt faire confiance, au contraire, à la recherche scientifique de pointe et à l’innovation comme aux États-Unis et en Allemagne, où l’on investit fortement dans le développement des centrales de nouvelle génération, basées sur le principe de la fusion ?

Depuis 2014 et encore plus depuis 2020, les investissements privés ont bondi dans ce domaine.

Aux hésitations et aux réticences de la population, tiraillée entre la peur du nucléaire, l’envie d’avoir de l’électricité bon marché, et l’envie de réduire les émissions de CO2, pourraient ainsi répondre la sagesse des marchés et le talent des scientifiques en quête de technologies nouvelles. Une réflexion sur une meilleure utilisation des fonds publics impliquerait donc que l’État français devienne plus modeste, cesse de se prendre à la fois pour un régulateur, un financeur et un entrepreneur et qu’il accepte enfin une plus sage et plus prudente répartition des rôles.

Nucléaire : deux nouveaux EPR2 à Bugey

Nucléaire : deux nouveaux EPR2 à Bugey

Alors qu’aucun plan de financement et encore moins de planification n’a été retenue, le gouvernement se borne pour l’instant à distribuer la localisation des futurs réacteurs nucléaires EPR.

La localisation des six premiers EPR2 est désormais connue. Après les centrales de Penly en Normandie et de Gravelines dans les Hauts-de-France, déjà choisies pour accueillir chacune une paire de ces nouveaux réacteurs nucléaires de nouvelle génération, le Conseil de politique nucléaire, présidé mercredi par Emmanuel Macron, a retenu le site de Bugey dans l’Ain pour l’implantation de la dernière paire de nouveaux réacteurs.

Le site de Bugey a été privilégié car c’est celui qui permet de « lancer le plus rapidement la construction puisque des études complémentaires sont à réaliser sur le site de Tricastin », a précisé le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique, évoquant un « choix rationnel pour tenir les calendriers dans les meilleurs délais ».

Pour rappel, Emmanuel Macron a annoncé l’an dernier vouloir renouveler le parc nucléaire français, avec six nouveaux réacteurs (EPR2) pour une première mise en service à l’horizon 2035. Le coût du projet s’élève à 52 milliards d’euros selon une estimation annoncée en début d’année dernière. Une mise à jour de cette évaluation est en cours. Les conclusions de la revue de programme sur les coûts et le design des six premiers EPR2 sont attendues « pour la fin de l’été, début d’automne », précise le cabinet de la ministre de la Transition énergétique. Elles devront être remises au Parlement avant le dépôt de la loi de programmation sur l’énergie et le climat (LPEC).
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La Métropole et la Ville de Lyon sont contre
Le choix de Bugey va faire grincer des dents la Métropole de Lyon et la mairie de Lyon, toutes deux écologistes et opposées à l’implantation des EPR2 dans la centrale de l’Ain.

Réacteur nucléaire : autorisation de prolongation au-delà de 30 ans

Réacteur nucléaire : autorisation de prolongation au-delà de 30 ans

Lentement mais sûrement EDF prolonge la vie de réacteur théoriquement conçu pour durer 30 ans mais qui pourrait être exploité sans dommage jusqu’à 60 ans sous réserve d’entretien. Une nouvelle prolongation vient d’ailleurs être approuvée pour les plus gros réacteurs. L’ASN approuve donc une part du programme d’EDF pour prolonger au-delà de 30 ans ses plus gros réacteurs

L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a approuvé les objectifs de réexamen présentés par EDF pour prolonger de 30 à 40 ans ses quatre plus gros réacteurs, tout en lui demandant de compléter certains éléments, selon une décision publiée mardi. «L’ASN considère que les objectifs généraux retenus par EDF pour ce réexamen sont acceptables dans leur principe», note le gendarme du nucléaire, à propos de ce 3e «réexamen périodique», décennal, prévu pour les réacteurs de 1450 mégawatts (MW).

MW». Ce 3e réexamen périodique permettra de définir les conditions de la poursuite du fonctionnement de ces réacteurs jusqu’à leurs 40 ans.

La loi en France impose à l’exploitant d’une installation nucléaire de réaliser tous les dix ans un réexamen, afin de revoir les risques .

La France compte 56 réacteurs, dont 32 de 900 MW, mis en service pour l’essentiel dans les années 1980, 20 de 1300 MW, et les derniers, de 1450.

Nucléaire: huit nouveaux réacteurs au lieu de six

Nucléaire: huit nouveaux réacteurs au lieu de six

Le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) vient de publier un document de travail intitulé « Mieux produire, la planification écologique dans l’énergie ». Repéré par Le Monde, le document révèle notamment des hypothèses de capacité de production d’électricité revues à la hausse par rapport aux objectifs annoncés par Emmanuel Macron, lors de son discours de Belfort en février 2022. Le secrétaire général à la planification écologique préconise très clairement de « pousser tous les leviers au maximum, sur le nucléaire et sur l’ensemble des énergies renouvelables ».

Dans le détail, à l’horizon 2050, le gouvernement table désormais sur la construction de 8 à 14 nouveaux réacteurs nucléaires de type EPR 2 et non plus sur une fourchette de 6 à 14, comme évoqué par le chef de l’Etat en 2022. « Huit EPR en plancher ce n’est pas un niveau choquant. C’est une trajectoire qui s’aligne sur le scénario nucléaire le plus bas de RTE [dans son rapport Futures énergétiques 2050, ndlr] », relève Nicolas Goldberg, expert énergie chez Colombus Consulting.

Concernant le nucléaire existant, le gouvernement table sur une prolongation des 56 réacteurs nucléaires (représentant une capacité de 61 GW) jusqu’à 60 ans. Il considère aussi un scénario défavorable, dans lequel neuf tranches devraient fermer avant cet anniversaire pour des raisons de sûreté. Sur cette question de la prolongation, le gendarme du nucléaire vient justement de demander à EDF de justifier, d’ici fin 2024, l’hypothèse d’une poursuite du fonctionnement des réacteurs actuels jusqu’à 60 ans et au-delà. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) instruira alors le dossier afin de prendre une position fin 2026, indique-t-elle.
Il table également sur l’hypothétique développement bde l’éolien en mer, avec un objectif légèrement rehaussé mais les perspectives probables très en dessous des objectifs comptes tenus des délais et des oppositions.

Nucléaire et Allemagne : c’est non négociable pour la France

Nucléaire Et Allemagne : c’est non négociable pour la France

Une nouvelle fois la France à travers la voix du ministre de l’économie a tenu à rappeler qu’elle n’entend pas suivre l’exemple catastrophique de l’Allemagne en matière d’énergie. L’Allemagne a en effet fait le choix malheureux de faire reposer sa politique sur le gaz et en l’habillant par le développement des énergies renouvelables pour faire plaisir aux écolos. Un bilan catastrophique pour la puissante industrie d’outre-Rhin. À l’inverse la France avait fait le choix du nucléaire avant que Macon ne le mette entre parenthèses avec en particulier la fermeture de Fessenheim puis en se ravisant pour décider la construction de 14 EPR et de SMR.

Le nucléaire français est donc «une ligne rouge absolue» qui ne «sera jamais négociable», a déclaré jeudi le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire lors d’un colloque, sur fond de désaccords franco-allemands sur le rôle de l’atome dans la nouvelle stratégie énergétique européenne. «Le nucléaire est une ligne rouge absolue pour la France et la France ne renoncera à aucun de ces avantages compétitifs liés à l’énergie nucléaire», a déclaré jeudi le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire, en clôture du colloque annuel de l’Union française de l’électricité.

«Le nucléaire est un avantage économique, c’est aussi une part de notre identité industrielle. C’est ce que nous sommes comme nation, c’est ce que nous sommes comme économie et ce que ce que nous sommes, comme peuple innovant et créatif», a-t-il plaidé.

Energie Nucléaire : L’enjeu des SMR (petits réacteurs modulaires) ?

Energie Nucléaire : L’enjeu des SMR (petits réacteurs modulaires) ?

Les Small Modular Reactor (SMR) sont d’abord plus petits, et produisent plus d’énergie thermique (de l’ordre de 10 à 50 % plus élevée). Tout en étant plus efficaces, ils rejettent d’autant moins d’énergie dans l’environnement, ce qui signifie moins de consommation d’eau pour les refroidir. Certains concepts de réacteurs modulaires peuvent même se passer d’eau, ce qui ouvre la porte à des réacteurs dans des zones arides (au prix d’un refroidissement moins efficace et d’un peu moins de performance énergétique mais ce n’est plus le moment de faire des chichis).par Par Charles Cuvelliez, Ecole Polytechnique de Bruxelles, université dans la Tribune.

Ces réacteurs utiliseront des taux d’enrichissements en uranium supérieurs aux taux des réacteurs d’aujourd’hui (5%) : on évoque jusqu’à 10-20 %. De tels taux permettent des plus longues périodes de production et une meilleure utilisation du combustible sans toutefois causer de problèmes de prolifération. Ces réacteurs pourront même être assemblés par modules en usines, comme des voitures, ne fût-ce que les composants principaux : fini les chantiers pharaoniques sur site, qui ne se ressemblent (et ne finissent) jamais. Ces réacteurs peuvent avoir toutes les échelles, depuis plusieurs centaines de MW jusqu’à quelques MW. Ils sont soit à neutrons rapides (les neutrons de la réaction de fission qui vient d’avoir lieu peut directement initier la réaction suivante) ou à neutrons lents (il faut ralentir le neutron qui vient de la réaction de fission précédente via un modérateur avant qu’il ne soit utilisable pour créer la réaction de fission suivante).

Un autre progrès notable des réacteurs modulaires, c’est leur sécurité intrinsèque. Dans les réacteurs actuels, les fonctions de sécurité clés sont accomplies par la combinaison d’équipements en fonctionnement et de systèmes en réserve : des générateurs diesels auxiliaires pour continuer à alimenter les équipements dans la centrale en cas de panne électrique, des sources alternatives d’eau, des moyens additionnels de pompage et de circulation d’eau de refroidissement et des actions requises de la part de l’opérateur et de ses équipes qui ont intérêt à être à la hauteur. La promesse des réacteurs modulaires c’est de prévoir ces mêmes fonctions de manière passive, par l’effet de la gravité pour certains systèmes, par des ressorts mécaniques qui activent des valves qui se relâchent quand le système arrive en zone dangereuse… On y optimise la circulation naturelle des fluides pour évacuer la chaleur résiduelle à long terme du cœur.

Avec certains concepts, on garantit une réactivité qui évolue en sens inverse de la hausse de température. Que demander de mieux qu’une réaction de fission qui ralentit à mesure que le réacteur s’emballe. On essaie d’avoir un milieu monophasique, à l’état liquide, en permanence pour ne jamais avoir, par exemple, d’eau qui bout et dégrade le refroidissement du réacteur, même en situation accidentelle.

Avec les réacteurs à sel fondu ou au gaz, la capacité thermique de ces derniers est plus grande, ce qui permet de capturer plus vite sous forme d’énergie thermique l’énergie provenant de la réaction atomique. L’hélium ou sels fondus réduisent les risques d’interaction chimiques avec les matériaux du réacteur et de ses circuits, ce qui diminue leur dégradation. Même la conception des éléments combustibles est modernisée pour la rendre isotrope, c’est-à-dire de même forme géométrique quel que soit l’angle, ce qui réduit, par cette homogénéité, le risque de rupture du combustible (et le relâchement de radioactivité).

Mais tout n’est pas (encore) rose : ce sont des designs pour lesquels on n’a pas de recul ni d’équipes opérationnelles entrainées. Il y a encore de la marge d’innovation avec les progrès dans le digital, en sciences des données et en intelligence artificielle qui peuvent tellement apporter à la sécurité et à l’efficacité de ces nouveaux concepts… ou les rendre vulnérables (au cyberattaques). On pourrait automatiser la détection des risques qui se matérialisent dans l’installation. On pourrait ne remplacer les composants critiques que quand c’est nécessaire plutôt qu’à intervalles réguliers pour éviter des maintenances inutiles qui, à leur tour, peuvent entraîner des défaillances.

Un fonctionnement fiable et la manière de gérer les accidents hypothétiques restent aussi dépendants du choix du réacteur modulaire. Pour les réacteurs refroidis au gaz, il est, par exemple, essentiel de limiter, en cas d’accident, l’arrivée d’air ou d’eau dans le réacteur pour minimiser l’oxydation du graphite et donc le relâchement de radioactivité dans les bâtiments ou l’environnement. Les réacteurs à sels fondus, eux, exigeront une chimie fine et un contrôle strict de la température pour atténuer la corrosion des métaux ou la solidification du sel pendant les opérations sur les canalisations. Les réacteurs à sodium liquide doivent maintenir une atmosphère inerte pour éviter les réactions chimiques explosives lors de fuites de sodium.

Comme les réacteurs travaillent à plus haute température, dans des conditions différentes d’utilisation d’aujourd’hui pour les réacteurs traditionnels en fonctionnement, on doit encore optimiser les matériaux utilisés pour garantir une meilleure résistance à la corrosion et à l’irradiation. Sans cela, on devra les remplacer plus fréquemment : la maintenance sera plus difficile et plus fréquente, ce qui rajoute des coûts, de la complexité et des temps d’arrêt pour les réacteurs.

Toutes les familles de réacteurs modulaires n’ont pas atteint la même maturité. Cette dernière est dépendante de trois facteurs.

Dans l’ordre de maturité croissante de ces nouveaux réacteurs, on trouve les réacteurs rapides au gaz, les réacteurs à sels fondus (faible maturité). Les réacteurs à sodium liquide, au sels fluorés et les microréacteurs à gaz haute tempéreuse (supérieur à 1.100 K) viennent ensuite. Les réacteurs les plus matures sont les réacteurs à eau pressurisé de petite taille qui s’inspirent des réacteurs à eau pressurisée actuels.

Il ne faut pas s’en inquiéter. Les réacteurs d’aujourd’hui à eau pressurisée ont aussi connu des étapes avant d’être commercialisés à grande échelle : recherche et développement pour prouver la faisabilité scientifique et technique des caractéristiques clés de ces réacteurs : combustibles, milieu de refroidissement et caloporteur, le système utilisé pour le réacteur, ses composants, sa configuration. Ensuite, il s’agissait de démontrer via un proof of concept que le système tout intégré est viable. Enfin, vient la démonstration de la performance pour confirmer la possibilité de passer à un plus grande échelle, accumuler de l’expérience opérationnelle et valider le comportement et sa performance. Un démonstrateur commercial termine le cycle…

Exploiter des petits réacteurs modulaires ouvre de nouvelles portes opérationnelles insoupçonnées : c’est par exemple le concept de flotte de réacteurs opérant sur un site. La maintenance se fait par vagues, de sorte qu’il y a toujours des réacteurs en fonctionnement pour fournir de la puissance électrique au réseau. On peut même imaginer le réacteur embarqué vers une usine d’où on fera la maintenance et où on le rechargera en combustible, un peu comme quand on amène sa voiture à l’entretien. Bien sûr, déplacer des réacteurs pleins de combustible radioactif présente d’autre contraintes de sécurité et réglementaires.

On voudrait aussi avec les réacteurs modulaires automatiser les opérations pour réduire le besoin en personnel. Cela va nécessiter plus de gestion par informatique avec les contraintes de plus de sécurité et de fiabilité dans leur développement. On voudrait pouvoir diriger à distance les réacteurs, et cela ne devrait pas déplaire au régulateur qui pourrait aussi inspecter à distance et en continu ce qui se passe.

La sécurité et les plans d’urgence avec du personnel réduit va mettre l’accent sur les équipes locales de secours qui devront monter au front et en compétences. En cas de feu, inondation, tremblements de terre, les premiers à intervenir ne seront plus le personnel sur site mais les pompiers locaux.

On voudrait aussi gérer d’une seule salle de contrôle plusieurs réacteurs à la fois, un concept qui fonctionne déjà pour des porte-avions. L’USS Enterprise avait une salle de contrôle unique qui dirige 8 réacteurs. Enfin, on veut aussi utiliser les réacteurs modulaires pour d’autres usages que l’électricité (production de chaleur industrielle, production d’hydrogène), ce qui signifiera d’autres préoccupations et objectifs pour gérer des opérations. On ne produit pas un électron comme on produit une molécule d’hydrogène.

L’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) recense aujourd’hui plus de 80 modèles de réacteurs : pour ne pas devoir fabriquer 80 types de combustibles différents, pour que le passage à l’échelle soit possible, pour qu’une usine à réacteurs où on les fabrique et les entretiens fasse sens, seuls quelques modèles doivent percer. Il est donc urgent de ne plus se poser de questions existentielles sur le nucléaire (oui/non) mais d’y aller à toute vitesse en soutien du renouvelable pour ne pas se laisser déborder par le climat.

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Finances: Le livret A à toutes les sauces : pour le nucléaire, pour le logement, pour l’industrie, pour la défense !

Finances: Le livret A à toutes les sauces : pour le nucléaire, pour le logement, pour l’industrie, pour la défense !

En panne de financement et face à une dette colossale, quelques responsables politiques se rabattent systématiquement sur l’utilisation des fonds du livret A comme solution pour le financement des projets. Notons qu’au départ le livret A est destiné surtout au financement du logement. Justement un secteur qui connaît une crise sans précédent avec l’écoulement des prêts pour les candidats à l’accession. Un énorme décalage entre l’offre et la demande. Les candidats potentiels sont de plus en plus de l’accession en raison de la folie des prix de l’immobilier. La cible potentielle des futures acheteurs ne cesse de se réduire. La location est aussi victime de cette situation mais aussi du fatras de normes qui pratiquement génèrent des surcoûts impossibles à amortir pour les appartements et maisons à mettre en location.

Parallèlement on s’interroge aussi sur la possibilité maintenant de financer les projets de défense en sollicitant aussi le livret A.
Un livret A qu’on imagine d’une façon plus générale mettre la disposition de toutes l’industrie. Enfin le même livret pourrait servir à l’énorme besoin de financement d’EDF pour les centrales décidées par le gouvernement mais non financées.

Bref le signe qu’on décide de grandes orientations sans prévoir le financement en se rabattant sur des fonds normalement destinés au secteur du logement qui connaît pourtant une crise sans précédent.

Face aux difficultés de financement que rencontre cette filière, notamment ses startups et ses PME, et des dangers d’une mise en œuvre d’une taxonomie trop radicale au niveau européen qui exclurait l’industrie de la défense, quatre députés, dont le président de la commission de la défense de l’Assemblée nationale Thomas Gassilloud (Renaissance), ainsi que le rapporteur du projet de loi de programmation militaire en cours d’examen, Jean-Michel Jacques (Renaissance), Christophe Plassard (Horizon) et enfin Jean-Louis Thiériot (Les Républicains) pourraient avoir trouvé une esquive imparable : « mobiliser une partie de l’encours non centralisé du livret A et du Livret de développement durable au service des entreprises contribuant à la souveraineté nationale, dont font partie les entreprises de la BITD (la base industrielle et technologique de défense, soit l’ensemble des industries de défense du pays Ndlr)», selon un amendement déposé mercredi à l’issue d’une discussion entre Bercy et les parlementaires.

Le livret A à toutes les sauces : pour le nucléaire, pour le logement, pour l’industrie, pour la défense

Le livret A à toutes les sauces : pour le nucléaire, pour le logement, pour l’industrie, pour la défense

En panne de financement et face à une dette colossale, quelques responsables politiques se rabattent systématiquement sur l’utilisation des fonds du livret A comme solution pour le financement des projets. Notons qu’au départ le livret A est destiné surtout au financement du logement. Justement un secteur qui connaît une crise sans précédent avec l’écoulement des prêts pour les candidats à l’accession. Un énorme décalage entre l’offre et la demande. Les candidats potentiels sont de plus en plus de l’accession en raison de la folie des prix de l’immobilier. La cible potentielle des futures acheteurs ne cesse de se réduire. La location est aussi victime de cette situation mais aussi du fatras de normes qui pratiquement génèrent des surcoûts impossibles à amortir pour les appartements et maisons à mettre en location.

Parallèlement on s’interroge aussi sur la possibilité maintenant de financer les projets de défense en sollicitant aussi le livret A.
Un livret A qu’on imagine d’une façon plus générale mettre la disposition de toutes l’industrie. Enfin le même livret pourrait servir à l’énorme besoin de financement d’EDF pour les centrales décidées par le gouvernement mais non financées.

Bref le signe qu’on décide de grandes orientations sans prévoir le financement en se rabattant sur des fonds normalement destinés au secteur du logement qui connaît pourtant une crise sans précédent.

Face aux difficultés de financement que rencontre cette filière, notamment ses startups et ses PME, et des dangers d’une mise en œuvre d’une taxonomie trop radicale au niveau européen qui exclurait l’industrie de la défense, quatre députés, dont le président de la commission de la défense de l’Assemblée nationale Thomas Gassilloud (Renaissance), ainsi que le rapporteur du projet de loi de programmation militaire en cours d’examen, Jean-Michel Jacques (Renaissance), Christophe Plassard (Horizon) et enfin Jean-Louis Thiériot (Les Républicains) pourraient avoir trouvé une esquive imparable : « mobiliser une partie de l’encours non centralisé du livret A et du Livret de développement durable au service des entreprises contribuant à la souveraineté nationale, dont font partie les entreprises de la BITD (la base industrielle et technologique de défense, soit l’ensemble des industries de défense du pays Ndlr)», selon un amendement déposé mercredi à l’issue d’une discussion entre Bercy et les parlementaires.

Nucléaire : loi adoptée…..Mais sans financement

Nucléaire : loi adoptée…..Mais sans financement

Le texte supprime surtout l’objectif d’une réduction à 50% de la part de l’énergie nucléaire dans le mix électrique français d’ici à 2035 (initialement 2025). Mais cette loi ne prévoit pas les conditions de financement qui pourraient être définies dans une loi ultérieure dite de programmation notamment pour l’entretien du parc actuel et la construction d’EPR (six d’abord et huit ensuite). Une loi de programmation qui comme d’habitude risque de demeurer approximative en matière de délais

Seuls les groupes Verts et LFI ont voté contre, pendant que le PS s’abstenait. Soutenu par 399 voix contre 100, le projet de loi simplifie les démarches afin de concrétiser l’ambition d’Emmanuel Macron de bâtir six nouveaux réacteurs EPR à l’horizon 2035, et de lancer des études pour huit autres. Il est limité aux nouvelles installations situées dans des sites nucléaires existants ou à proximité, comme à Penly (Seine-Maritime), Gravelines (Nord)…

Au grand dam des opposants au nucléaire, il prend de vitesse la future loi de programmation pluriannuelle de l’énergie, attendue au mieux cet été. «Tout a été fait dans le désordre. (…) Seule cette loi de programmation pourrait décider de la relance ou non du nucléaire», s’est indigné l’Insoumis Maxime Laisney. L’ONG Greenpeace et le réseau Sortir du nucléaire n’ont pas manqué de protester: «le gouvernement met donc la charrue avant les bœufs et acte une relance à marche forcée», dénoncent-ils.

À l’Assemblée, une commission d’enquête parlementaire menée par le LR Raphaël Schellenberger et le macroniste Antoine Armand, ouvertement pro-nucléaires, a pointé du doigt une «divagation politique» depuis trente ans sur les questions énergétiques. Face à l’urgence climatique, et après les craintes de coupures de courant cet hiver sur fond de guerre en Ukraine, «il ne faut plus avoir le nucléaire honteux», plaide la députée Renaissance Maud Bregeon, ancienne d’EDF et rapporteure du projet de loi. À droite, les LR soutiennent le texte tout en critiquant «le tête-à-queue spectaculaire» d’Emmanuel Macron sur la question.

Le nucléaire divise toujours l’Europe

Le nucléaire divise toujours l’Europe

D’un côté une alliance contre le nucléaire menée par l’Autriche s’oppose toujours fermement au développement du nucléaire. Dans le même temps des études d’opinion montrent clairement que le nucléaire retrouve un net soutien dans la plupart des pays.

Depuis la crise énergétique , les opinions publiques sont nettement plus favorables au nucléaire pour produire de l’électricité. C’est ce que montre un rapport de la Fondation Robert-Schuman qui s’appuie sur des données Obs’COP et Dynamique de l’opinion publique.

« L’énergie nucléaire semble offrir une alternative de nouveau crédible », observent Mathieu Brugidou et Jérémy Bouillet, les auteurs de l’étude. Elle est poussée, d’une part, par sa reconnaissance au niveau européen dans le cadre de la taxonomie et, d’autre part, par la guerre « qui replace l’impératif de sécurité énergétique au coeur des débats sur l’énergie », selon eux. La même tendance est à l’oeuvre partout, quelles que soient les stratégies énergétiques des pays.

Mais parallèlement opposés s’organisent. L’Autriche, la Belgique, l’Estonie, le Danemark, l’Allemagne, l’Irlande, la Lettonie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal et l’Espagne ont ainsi participé à une réunion afin d’élaborer une stratégie en vue des prochaines négociations.

L’impasse survient un jour avant que les pays de l’Union ne s’accordent sur des objectifs plus stricts en matière de développement des énergies renouvelables d’ici à 2030, un élément clé des plans du bloc visant à réduire les émissions de CO2 et à se sevrer du gaz russe. La France mène une campagne visant à faire reconnaître la contribution de « l’hydrogène à faible teneur en carbone », c’est-à-dire l’hydrogène produit à partir de l’énergie nucléaire. Les pays pro-nucléaires ont fait des demandes similaires concernant une loi régulant le marché du gaz, dont les ministres discuteront mardi.

La ministre autrichienne de l’Energie, Leonore Gewessler, a déclaré que les onze pays avaient rejeté la tentative de lier ces deux dossiers. « Le groupe demande des objectifs ambitieux pour la loi sur les énergies renouvelables afin d’avoir un mandat clair pour les investisseurs et les clients », a-t-elle précisé dans un communiqué. « Cela devrait permettre d’atteindre les objectifs stratégiques européens visant à devenir moins dépendant des importations d’énergie et à développer massivement les énergies locales et renouvelables », a indiqué la ministre.

Nucléaire : suppression du plafond de production à 50% et condamnation la politique de Hollande et Macron

Nucléaire : suppression du plafond de production à 50% et condamnation la politique de Hollande et Macron

On se souvient que Hollande, assisté de Macon,avait massacré la filière nucléaire en fixant la part de cette énergie à 50 % maximum. Un verrou qui vient de sauter à l’assemblée nationale. Et pour cause,cette politique a tué l’avantage énergétique de la France qui a même été contrainte d’importer de l’électricité de l’extérieur.

Avec une mauvaise foi incroyable, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher a expliqué qu’elle ne veut «ni plafond ni plancher» sur le sujet. m

Dans le sillage du Sénat, l’Assemblée nationale a supprimé lundi soir l’objectif de réduction à 50% de la part de l’énergie nucléaire dans le mix électrique français d’ici à 2035, lors de l’examen du projet de loi d’accélération du nucléaire. Introduit par le Sénat, l’article adopté en première lecture fait sauter un «verrou» introduit dans la loi en 2015 sous la présidence de François Hollande pour réduire la part du nucléaire, que l’exécutif souhaite désormais relancer.

Avec une hypocrisie lamentable la ministre a déclaré «J’étais très heureuse d’avoir contribué au discours de Belfort» d’Emmanuel Macron, consacré notamment à la relance du nucléaire en février 2022, mais la loi en cours d’examen «est supposée être une loi technique» d’accélération, pas une loi de programmation sur le mix énergétique.

La ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher a expliqué qu’elle ne veut «ni plafond ni plancher» sur le sujet, alors que l’énergie nucléaire représente environ 70% de la production d’électricité habituellement, mais seulement 63% en 2022 en raison des arrêts de plusieurs réacteurs pour corrosion.
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À VOIR AUSSI – «La loi nucléaire révèle une prise de conscience de l’échec de l’anti-nucléarisme»

La redécouverte du nucléaire


La redécouverte du nucléaire

A la faveur de l’urgence climatique et, surtout, de la sécurité d’approvisionnement érigée comme priorité depuis le début de la guerre en Ukraine, de nombreux décideurs renouent avec cette source d’électricité décarbonée, du Japon à la Corée du Sud, en passant par la France ou le Royaume-Uni. Mais ce renouveau a des airs de déjà-vu, et de nombreux défis devront être relevés avant que l’intention politique ne se transforme en actes. ( un dossier de la Tribune)

Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), l’énergie nucléaire pourrait contribuer à environ 14% du mix mondial d’ici à 2050, contre 10% aujourd’hui. (Crédits : Reuters)
10 juillet 2017. A l’antenne de RTL, le ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, confirme l’ambition du gouvernement de réduire significativement la puissance du parc nucléaire français, en fermant « peut-être jusqu’à 17 réacteurs » sur 58 d’ici à 2025 sans en construire de nouveaux. Soit un repli clair de l’atome au profit des sources d’énergie renouvelables, une stratégie alors portée par le président fraîchement élu, Emmanuel Macron, dans la lignée des promesses de son prédécesseur François Hollande.

Moins de cinq ans plus tard pourtant, le revirement politique est total. Le 10 février 2022, le même chef de l’Etat annonce en grande pompe à Belfort la prolongation « autant que possible » de toutes les centrales existantes (en-dehors de Fessenheim, arrêtée en 2020), ainsi que le lancement d’un vaste programme de construction de six réacteurs de 3ème génération (dits EPR2), plus huit posés en option sur le long terme. Dès lors, l’objectif change fondamentalement : loin du discours de 2017, il s’agit de faire d’EDF le fer de lance de la « renaissance » du nucléaire. Selon l’exécutif, il en va de la souveraineté du pays, du pouvoir d’achat de ses ménages et de la protection du climat.

Il faut dire que les planètes sont alignées : quelques mois plus tôt, une étude du gestionnaire de réseau RTE soulignait la pertinence économique d’une relance de l’atome. Laquelle se trouvait déjà renforcée par le contexte international délétère, assure alors le gouvernement.

Car avant même le début de la guerre en Ukraine, dès septembre 2021, la flambée des cours du gaz tire à la hausse les prix de l’électricité, celle-ci étant largement générée à partir de combustibles fossiles dans les Etats européens ayant décidé de sortir du nucléaire – en premier lieu l’Allemagne. De quoi décourager la France d’emprunter la même voie de fermeture progressive de son parc atomique, puisque celui-ci a l’avantage de générer du courant bon marché et décarboné, malgré les risques d’accident et les problèmes de gestion des déchets radioactifs mis en avant par ses détracteurs.

Et ce « come-back » résonne bien au-delà de l’Hexagone, qui reste le pays à l’électricité la plus nucléarisée au monde. D’aucuns pourraient penser que cette exception française bornerait la question à ses seules frontières. Mais partout sur le globe, le sujet s’impose. Jusqu’à assister à « une nouvelle aube pour l’énergie nucléaire ? », s’interrogera en juin 2022 l’Agence internationale de l’énergie (AIE). En pleine urgence climatique, cette source d’électricité très peu émettrice de CO2 fait en tout cas de l’œil à nombre de décideurs. Mais c’est bien l’agression de l’Ukraine par la Russie, le 24 février 2022, qui a changé véritablement la donne, tant le conflit bouleverse les marchés de l’énergie.
Car, à ce moment-là, une préoccupation devient centrale, en l’absence de gaz et de charbon russes : celle de la sécurité d’approvisionnement. En d’autres termes, la réduction de la dépendance à l’égard des combustibles fossiles importés, dont les prix flambent à des niveaux jamais vus, est érigée en priorité absolue. Or, « pour de nombreux gouvernements, le nucléaire fait partie des options pour y parvenir », souligne l’AIE.

De manière inattendue, c’est d’ailleurs le Japon, profondément marqué par l’accident de Fukushima, qui fait l’une des annonces les plus retentissantes. En août 2022, le Premier ministre, Fumio Kishida, indique qu’il prévoit de redémarrer plusieurs centrales après dix ans de paralysie, afin d’assurer la « sécurité énergétique » de l’archipel et lui permettre d’atteindre la « neutralité carbone ». Et fait même part de son intention de développer des réacteurs de nouvelle génération, dans un revirement très remarqué. Même chose en Corée du Sud : après avoir décidé en 2017 de réduire, puis de sortir du nucléaire, le pays signale dès la mi-2022 qu’il conservera « au minimum » la part actuelle de l’atome dans le mix électrique d’ici à 2030, soit environ 30%, et relancera le projet de construction de deux réacteurs.

Ailleurs en Asie, la Chine, qui tire 3% de son électricité de la fission de l’uranium, réaffirme quant à elle son souhait de déployer le programme le plus ambitieux au monde, avec environ 17 centrales en construction et 50 en planification. Une décision éminemment liée, là aussi, aux nouvelles exigences climatiques : en 2021, le président Xi Jinping s’était engagé à atteindre la neutralité carbone « avant 2060 ». Alors que le pays reste extrêmement dépendant du charbon, l’atome apparaît donc, pour Pékin, comme l’un des éléments clé pour y parvenir.

Les lignes bougent aussi de l’autre côté du Pacifique. Car les Etats-Unis et leurs 93 réacteurs (un record) espèrent également donner un nouveau souffle à leur parc. A l’été 2022, la Californie repousse ainsi de quatre ans la fermeture de sa dernière centrale nucléaire, Diablo Canyon. Et dans tout le pays, les licences d’exploitation des réacteurs se voient prolongées de manière inédite, pour courir jusqu’à 80 ans ! Surtout, le gouvernement regarde aussi au-delà de l’existant : dans son fameux plan d’investissement baptisé Inflation Reduction Act (IRA), le président Joe Biden débloque 6 milliards de dollars (5,6 milliards d’euros) afin d’investir dans des « modèles de réacteurs avancés ».
Sur le Vieux continent, la France ne se trouve pas non plus isolée. En effet, dès avril 2022, le Royaume-Uni s’inspire de son voisin d’outre-Manche, et lance un plan pour bâtir huit nouveaux réacteurs, en plus des quinze existants et des deux EPR qu’EDF construit déjà dans le pays. En septembre, Boris Johnson, alors Premier ministre, accélère d’ailleurs la cadence, en promettant 700 millions de livres sterling (788 millions d’euros) pour le lancement des deux EPR Sizewell C. Et appelle son successeur à « développer le nucléaire » afin qu’il se taille une place de choix dans le système électrique anglais.

Le mouvement touche aussi plusieurs membres de l’Union européenne, en-dehors des pays d’Europe centrale ayant décidé bien avant la guerre en Ukraine de se tourner vers le nucléaire (République tchèque, Hongrie, Bulgarie, Croatie, Pologne, Roumanie, Slovaquie et Slovénie). En 2022, les Pays-Bas et la Suède annoncent ainsi leur intention de disposer de nouveaux réacteurs sur leur sol. Début janvier, le Premier ministre suédois, Ulf Kristersson, ouvre même la voie à un partenariat avec la France pour bâtir ses deux prochaines installations, lors d’une visite à l’Elysée.
Et même des Etats ayant fermement décidé de sortir de l’atome il y a plusieurs années font volte-face, alors que le Vieux continent s’enlise dans la crise énergétique. En octobre 2022, après des mois d’atermoiements, l’Allemagne annonce qu’elle devra prolonger jusqu’au 15 avril 2023 ses trois dernières centrales, censées fermer à la fin de l’année. Même refrain en Belgique : les trois plus anciens des six derniers réacteurs devaient être déconnectés en 2025, mais début février 2023, les principaux ministres fédéraux du royaume lancent l’idée d’un fonctionnement « pendant l’hiver 2025-2026 ». En temps de crise énergétique mondiale, il s’agit d’être « pragmatique », glisse alors une source proche du dossier à l’AFP.

Et tandis que des pays nucléarisés doivent retarder leur sortie de l’atome, d’autres comptent bien accueillir leurs premières centrales. Notamment en Afrique : en 2022, le Ghana, le Kenya, la Namibie, le Nigéria, le Soudan, la Tanzanie, l’Ouganda et la Zambie, réaffirment leur souhait de se tourner vers le nucléaire civil, alors que sur le continent, seule l’Afrique du Sud possède aujourd’hui des réacteurs en service. Ce marché potentiel est d’ailleurs regardé de près par Pékin et Moscou, le géant russe Rosatom ayant annoncé à l’été 2022 qu’il lancerait la construction de la première centrale nucléaire d’Egypte.

Signe de cette effervescence, en septembre, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) relève de 10% ses projections sur la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici à 2050 par rapport à 2021 (déjà à la hausse pour la première fois depuis Fukushima). En supposant que la production d’électricité augmentera de 85%, cette source d’énergie pourrait ainsi contribuer à environ 14% du mix mondial d’ici à la moitié du siècle, contre 10% aujourd’hui, note l’organisation.

Reste que cet « élan nouveau », selon les termes de l’AIE, a en réalité des airs de déjà-vu. Car en 2009, les médias titraient déjà sur la possible « renaissance » du nucléaire, dont la part a pourtant stagné depuis.

Cette année-là, l’AIE soulignait en effet l’« intérêt accru » pour la construction de nouvelles centrales, « dans les pays nucléaires et non nucléaires ». A l’époque, des chantiers d’EPR débutaient en Chine, en Finlande et en France. Et nombre d’autres pays, parmi lesquels les États-Unis, le Royaume-Uni, la Hongrie, la République tchèque, la Pologne et même l’Italie, affirmaient leur intention d’en bâtir rapidement, dans un contexte de prise de conscience des effets du changement climatique. En septembre 2010, même la chancelière allemande Angela Merkel s’éloignait de la stratégie d’Energiewende de sortie progressive du nucléaire, repoussant l’échéance à 2040 au plus tôt, au lieu 2022.

De son côté, l’AIEA rehaussait significativement ses projections. « L’atome revient bel et bien sur le devant de la scène mondiale », indiquait alors le très médiatique Nicolas Goldberg, consultant énergie chez Colombus Consulting, dans les colonnes de l’Express. Dans ce contexte, l’association Sortir du nucléaire regrettait même un « rapport de force » ayant « plutôt évolué en faveur » de cette source d’énergie. « De plus en plus de pays comprennent qu’ils ont intérêt à réexaminer l’ensemble du mix énergétique pour trouver les moyens de décarboner leur économie », se félicitait-on chez Areva, qui conduisait le chantier de l’EPR finlandais avec le conglomérat allemand Siemens.

« Compte tenu du changement climatique mondial et de la demande croissante d’électricité dans le monde, l’énergie nucléaire reste pour nous un élément essentiel d’un mix énergétique durable », déclarait d’ailleurs à ce moment le directeur général de Siemens, Peter Loescher.

Mais l’accident de Fukushima prit le monde par surprise. Dans la foulée, l’AIE diminua de moitié son estimation de la capacité de production nucléaire supplémentaire construite d’ici à 2035. Dès lors, les annonces se mirent à pleuvoir : outre-Rhin, Angela Merkel revint sur ses précédents engagements, et fit savoir en mai 2011 que les 17 réacteurs nucléaires du pays fermeront bien en 2022. Le 18 septembre, Siemens décida de se retirer entièrement de l’industrie nucléaire. « Le chapitre est clos pour nous », commenta Peter Loescher. En mars 2012, ce fut au tour des deux grandes compagnies allemandes d’électricité RWE et E.ON de renoncer au développement de nouvelles centrales.

L’Italie, qui prévoyait de lancer un programme ambitieux après plus de vingt ans sans recours à l’atome, décida quant à elle d’instaurer un moratoire. Même chose en Chine, où toute nouvelle construction se vit gelée jusqu’à ce que les normes de sécurité nationales puissent être améliorées. « Cela a fortement limité l’expansion du parc chinois », souligne aujourd’hui à La Tribune Teva Meyer, chercheur à l’IRIS et spécialiste du nucléaire civil. Surtout, la révision des normes de sûreté consécutive à l’accident japonais renchérit considérablement les coûts de production des réacteurs, déjà difficiles à financer après la crise de 2008. « Avec le recul, dans les pays où le nucléaire s’inscrit dans un marché libéralisé, comme aux Etats-Unis, cela a eu comme conséquence la fermeture de plusieurs centrales pour des raisons économiques », relate Teva Meyer.

Résultat : même si certains pays s’accrochèrent à leur plan de relance, comme la Suède, l’Angleterre et la Finlande, le soufflé retomba : la renaissance tant espérée par la filière et redoutée par ses détracteurs resta lettre morte. C’est dans ce contexte horribilis pour l’atome que François Hollande accéda à la présidence de la France, sur un programme de baisse à 50% de la part du nucléaire d’ici à 2025 (contre 75% jusqu’alors). Une promesse inscrite dans la loi dès 2015, et balayée par Emmanuel Macron ces derniers mois.

Alors, cette fois-ci sera-t-elle la bonne pour l’énergie nucléaire ? « Au-delà du fort intérêt médiatique et politique du moment, il faudra attendre des actions concrètes avant de parler, une nouvelle fois, de renaissance », estime Teva Meyer. Et notamment en termes de financement, puisque la hausse continue des exigences de sûreté semble avoir signé la fin du nucléaire bon marché. A cet égard, la France s’est d’ailleurs battue pendant des mois pour que l’atome soit inclus dans la « taxonomie verte » de l’Union européenne, cette liste censée attirer les capitaux vers les activités durables. Au Royaume-Uni, le gouvernement planche aussi sur l’intégration de l’atome dans sa propre classification, ouvrant la voie à davantage d’investisseurs institutionnels et de fonds axés sur l’environnement.

Et s’il est suivi d’effets, ce climat de revanche pour l’atome promet d’accentuer les concurrences pour la vente et l’exploitation de nouvelles centrales. Notamment en termes de pénétration des pays non nucléarisés ; un nouveau marché que se disputeront probablement les Chinois, les Coréens, les Américains et les Russes. « On le voit en Arabie Saoudite, qui ne cache pas sa volonté de construire des réacteurs. Les Chinois sont déjà sur place, les Coréens aussi. Et les Français mettent également le paquet, avec un conseil auprès de l’ambassade à Riyad », illustre Teva Meyer. Se posera également la question de l’Asie du Sud-Est, alors que l’Indonésie et les Philippines multiplient les signaux sur une potentielle relance de leur programme nucléaire, attirant les convoitises de Pékin, Séoul, Washington et Moscou.

Une chose est sûre : au-delà de l’attribution des contrats, le sujet n’en a pas fini d’agiter les décideurs, les industriels et la société civile. Au point de polariser l’Union européenne, alors que fin février, onze pays membres emmenés par la France ont annoncé leur coopération dans l’atome civil pour développer « de nouveaux projets », faisant fi de l’hostilité de l’Allemagne, du Luxembourg, de l’Autriche et de l’Espagne.

Et les divisions apparaissent aussi à l’échelle nationale : dans l’Hexagone, les tensions sont telles que la consultation des citoyens sur la relance piétine : fin janvier, une poignée d’activistes anti-nucléaires a interrompu les réunions, et les associations parties prenantes Greenpeace et Sortir du nucléaire ont claqué la porte. Si bien que la Commission nationale du débat public (CNDP) a annoncé le 7 février que la discussion ne porterait plus sur la construction de six nouveaux EPR…mais sur la place du public dans la gouvernance de la politique nucléaire.

Dans son rapport de juin 2022 sur la « nouvelle aube » de l’énergie atomique, l’AIE prend d’ailleurs des pincettes : même si cette source d’énergie reste, avec l’hydraulique, « l’épine dorsale de la production d’électricité à faibles émissions de CO2 » et « aidera à s’éloigner des combustibles fossiles plus rapidement et de manière plus sûre », la fission de l’uranium peut également « se heurter à une opposition publique et politique », concèdent les experts. Si bien que l’organisation internationale ne livre finalement « aucune recommandation aux pays qui choisissent de ne pas l’utiliser ». Preuve, s’il en fallait, qu’il s’agit toujours d’un sujet très sensible.

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