BCE: la presse allemande condamne Draghi au nom des épargnants allemands
C’est presque unanimement que la presse allemande condamne les mesures de politique accommodante prise par le président de la BCE ; une condamnation qui concerne surtout la baisse de rémunération pour l’épargne et indirectement la baisse de l’euro que cela va entraîner. Comme d’habitude, l’Allemagne défend le principe d’une monnaie forte et combat la dévaluation compétitive. La presse allemande a la dent dure avec la Banque Centrale Européenne au lendemain de l’annonce par l’institution d’un paquet de mesures aussi amples qu’inédites en vue de combattre la faible inflation en zone euro. Le quotidien économique « Handelsblatt » fait ce vendredi sa Une en montrant un Mario Draghi allumant un cigare avec un billet de 100 euros en flamme, le tout sous-titré « Whatever it takes. Le jeu dangereux de Mario Draghi avec l’argent des épargnants allemands ». Un titre du reste montré la veille dans les pages du journal, à la manière d’un « teaser », comme si la réunion de jeudi n’avait rien changé au constat qui prévalait avant … Ce qui est neuf et inquiétant, note en revanche l’éditorialiste, est que « le marché a perdu la confiance en Mario Draghi, le magicien des marchés ». Le journal en veut pour preuve qu’après le cours feu d’artifice en bourse de jeudi, à la suite de l’avalanche de mesures annoncées par la BCE, les places financières ont cédé à la désillusion . Le verdict : « Draghi et ses troupes ont creusé eux-mêmes un trou d’où ils peuvent à peine sortir. Et ils creusent maintenant encore plus profond ». Mais en chemin vers un objectif d’inflation de 2% devenu « illusoire » à atteindre, la BCE va provoquer « des dégâts collatéraux énormes » avec à la clé diverses bulles financières, des banques encore plus fragilisées, et l’expropriation des épargnants. La BCE est ainsi en bonne voie pour « perdre la confiance », y compris chez ses plus fervents partisans durant la crise financière. « Le président de la BCE Mario Draghi a choisi lui-même la mauvaise voie », renchérit le quotidien de centre-gauche « Süddeutsche Zeitung ». « Il déprécie l’argent sans générer de la croissance. Au lieu de cela, il exproprie les épargnants de facto et se prive d’armes contre une véritable crise qui pourrait bientôt survenir à travers le monde. Boursicoteurs et politiciens se sont habitués à l’argent pas cher comme à une drogue, laquelle doit résoudre leurs problèmes. Au lieu de cela, nous devrions tous en ressentir les effets secondaires. Le président de la BCE a mis le feu à tout son arsenal l. Avec quel argent va-t-il soutenir l’Europe si une nouvelle grosse dépression à la 2008 devait se reproduire ? Mario Draghi est en route pour ruiner l’avenir de l’Europe », s’emporte le journal bavarois. Le quotidien conservateur « Frankfurter Allgemeine Zeitung » souligne de son côté que « pour Draghi il n’y a pas de limite, du fait que la BCE déclare elle-même que tout ce qu’elle fait est du ressort de son mandat. Cela est dangereux pour un organe indépendant de la politique comme une banque centrale. Néanmoins, la Cour européenne de justice, en conflit avec la Cour constitutionnelle allemande à propos de l’achat d’obligations d’État par la puissante institution européenne, lui a délivré un laissez-passer – bien que la BCE ne soit soumise à aucun contrôle démocratique, en dehors du fait que ce sont les chefs d’Etats et de gouvernements qui désignent ses administrateurs », note le journal francfortois. Taux de refinancement amené à zéro, taux sur les dépôts enfoncé en territoire négatif, rachats d’actifs en quantité toujours plus importante…