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Société– » La nature en ville » ou les villes à la campagne !

Société– » La nature en ville » ou les villes à la campagne !

 

par Emmanuel Desmaizières, Icade Promotion)

 

 

C’est le dilemme de l’urbanisation: faut-il faire entrer la campagne dans les villes où comme le disait l’humoriste Alphonse Allais transporter les villes à la campagne ? La contribution d’Emmanuel Desmaizières peine à convaincre surtout avec la proposition « d’un arbre par habitant »  y compris sur le balcon. La vraie question non abordée est celle de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire. 

Inter view

Les promoteurs ne peuvent plus faire comme avant et doivent adopter une stratégie bas-carbone pour réduire leur empreinte environnementale. Illustration avec le groupe Icade. (Cet article est extrait de T La Revue n°12 – « Climat : Et si on changeait nous aussi ? », actuellement en kiosque).

 

 

Lors de la présentation de votre stratégie bas-carbone en septembre 2021, Icade a lancé une filiale baptisée « Urbain des bois » et s’est engagée à faire certifier 100 % de ses programmes de bureaux neufs de plus de 5 000 m2, ainsi que 50 % de ses logements par le label d’État « Énergie positive et réduction carbone ». Un an après, où en êtes-vous dans vos démarches ?

Emmanuel Desmaizières Nous avons atteint nos objectifs, et avons même accéléré ! En effet, nous avons décidé d’aligner nos trois métiers sur une trajectoire 1,5 °C, conformément à l’Accord de Paris. Pour ce faire, nous nous sommes fixé, pour le pôle Promotion, de réduire nos émissions carbone de nos activités de 41 % entre 2019 et 2030. D’ores et déjà, la majorité de nos projets sont bas-carbone et, pour la plupart, dépassent largement les exigences de la Réglementation Environnementale (RE2020). Chez Icade Promotion, nous avons par exemple plus de 475 000 m2 de projets en construction bois, en cours ou livrés. Par exemple, le Village des athlètes à Saint-Ouen-sur-Seine, en construction mixte bois/béton bas-carbone et éco-conçu avec du réemploi, n’émettra que 740 kg de CO2 par mètre carré, soit 50 % de moins par rapport à un programme traditionnel.

L’économie circulaire va-t-elle devenir la norme dans le BTP ?

E.D. Nous avons été précurseurs en la matière en créant avec Egis, dès 2017, Cycle Up, une plateforme de réemploi pour mettre à disposition des matériaux d’un chantier A à un chantier B. Nous récupérons ainsi des cloisons, des portes, des sanitaires ou encore des faux planchers que nous réinstallons dans des projets neufs. Force est de constater que l’ensemble du secteur s’est saisi de ce levier et que le réemploi fait désormais partie du cahier des charges des grandes opérations qui sont menées. À titre d’exemple, sur le Village des athlètes, 75 % des matériaux mis en œuvre de façon temporaire pour la phase Jeux seront réemployés dans la phase héritage.

Début 2022, le groupe a pris l’engagement de faire certifier sa trajectoire « zéro émission nette » alignée 1,5 °C par l’organisme international SBTi (Science Based Targets initiative). Où en êtes-vous ?

E.D. C’est chose faite, depuis le 6 octobre dernier : l’initiative Science Based Targets (SBTi) a validé nos objectifs de décarbonation à l’horizon 2030 et 2050 pour chacun de nos trois métiers, conformément aux attentes du Net-Zero Standard. Nous sommes très fiers de cette reconnaissance par un organisme indépendant de référence. En amont de cela, nous avions proposé au vote de nos actionnaires nos stratégies climat & biodiversité lors de notre assemblée générale d’avril dernier. La résolution (« Say on climate & biodiversity ») a été approuvée à plus de 99 % ! Tous les ans, nous mesurerons notre empreinte carbone et l’atteinte de nos objectifs.

Et qu’en est-il en matière de consommations d’énergie ? Avant même les politiques de sobriété, le directeur général d’Icade, Olivier Wigniolle, expliquait à La Tribune que vous pouviez les diminuer de 20 % grâce aux outils de modélisation pour analyser les cycles de vie des bâtiments…

E.D. Nous devons être au rendez-vous de ce niveau de performance énergétique et bas-carbone, que ce soit en termes d’isolation et de performance thermique, ou en termes de biodiversité. Par exemple, à Versailles, nous développons sur une friche militaire de 19 hectares les « Jardins de Gally » qui mêlent 12 hectares de pleine terre et 50 000 m2 : 550 logements, 5 000 m² d’activités professionnelles, 5 000 m² d’hôtels, une halle, une crèche ou encore une école. Nous avons renaturé 20 % du terrain initial avec de lourdes étapes de dépollution de désartificialisation et de désimperméabilisation. Cette cité-jardin, où nous avons planté 4 000 arbres, sera ouverte sur l’espace public.

Est-ce la déclinaison de votre programme « Un arbre, Un habitant » ?

E.D. Pour tous les logements familiaux que nous produisons, soit 6 000 à 7 000 par an, nous nous engageons à planter un arbre par habitant. Sachant qu’un appartement compte en moyenne 2,5 personnes, cela en fait 15 000 au total. Par exemple, sur chaque balcon ou terrasse, nous planterons un arbre mono-tige grâce à « Symbiose by Icade », nouvelle offre lancée par un de nos collaborateurs, qui permet d’alimenter en eau les espaces extérieurs sans être relié au réseau. À l’heure de la non-artificialisation des sols, nous devons faire entrer la nature en ville.

Justement, comment abordez-vous le sujet de la non-artificialisation des sols ?

E.D. Nous nous appuyons sur les règlements d’urbanisme, comme PLU ou PLU intercommunal. En parallèle, afin d’évaluer la biodiversité positive de nos opérations, nous mesurons le coefficient de biotope par surface (CBS) entre la phase d’avant- et d’après-projet, grâce à un outil de diagnostic de biodiversité. En 2021, 46 % de nos nouvelles constructions affichaient une biodiversité positive. Enfin, au travers de nos projets d’aménagement urbain portés par nos équipes

 » La nature en ville » ou les villes à la campagne !

 » La nature en ville » ou les villes à la campagne !

par Emmanuel Desmaizières, Icade Promotion)

C’est le dilemme de l’urbanisation: faut-il faire entrer la campagne dans les villes où comme le disait l’humoriste Alphonse Allais transporter les villes à la campagne ? La contribution d’Emmanuel Desmaizières peine à convaincre surtout avec la proposition « d’un arbre par habitant »  y compris sur le balcon. la vraie question non abordée est celle de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire. 

Intreview

Les promoteurs ne peuvent plus faire comme avant et doivent adopter une stratégie bas-carbone pour réduire leur empreinte environnementale. Illustration avec le groupe Icade. (Cet article est extrait de T La Revue n°12 – « Climat : Et si on changeait nous aussi ? », actuellement en kiosque).

 

 

Lors de la présentation de votre stratégie bas-carbone en septembre 2021, Icade a lancé une filiale baptisée « Urbain des bois » et s’est engagée à faire certifier 100 % de ses programmes de bureaux neufs de plus de 5 000 m2, ainsi que 50 % de ses logements par le label d’État « Énergie positive et réduction carbone ». Un an après, où en êtes-vous dans vos démarches ?

Emmanuel Desmaizières Nous avons atteint nos objectifs, et avons même accéléré ! En effet, nous avons décidé d’aligner nos trois métiers sur une trajectoire 1,5 °C, conformément à l’Accord de Paris. Pour ce faire, nous nous sommes fixé, pour le pôle Promotion, de réduire nos émissions carbone de nos activités de 41 % entre 2019 et 2030. D’ores et déjà, la majorité de nos projets sont bas-carbone et, pour la plupart, dépassent largement les exigences de la Réglementation Environnementale (RE2020). Chez Icade Promotion, nous avons par exemple plus de 475 000 m2 de projets en construction bois, en cours ou livrés. Par exemple, le Village des athlètes à Saint-Ouen-sur-Seine, en construction mixte bois/béton bas-carbone et éco-conçu avec du réemploi, n’émettra que 740 kg de CO2 par mètre carré, soit 50 % de moins par rapport à un programme traditionnel.

L’économie circulaire va-t-elle devenir la norme dans le BTP ?

E.D. Nous avons été précurseurs en la matière en créant avec Egis, dès 2017, Cycle Up, une plateforme de réemploi pour mettre à disposition des matériaux d’un chantier A à un chantier B. Nous récupérons ainsi des cloisons, des portes, des sanitaires ou encore des faux planchers que nous réinstallons dans des projets neufs. Force est de constater que l’ensemble du secteur s’est saisi de ce levier et que le réemploi fait désormais partie du cahier des charges des grandes opérations qui sont menées. À titre d’exemple, sur le Village des athlètes, 75 % des matériaux mis en œuvre de façon temporaire pour la phase Jeux seront réemployés dans la phase héritage.

Début 2022, le groupe a pris l’engagement de faire certifier sa trajectoire « zéro émission nette » alignée 1,5 °C par l’organisme international SBTi (Science Based Targets initiative). Où en êtes-vous ?

E.D. C’est chose faite, depuis le 6 octobre dernier : l’initiative Science Based Targets (SBTi) a validé nos objectifs de décarbonation à l’horizon 2030 et 2050 pour chacun de nos trois métiers, conformément aux attentes du Net-Zero Standard. Nous sommes très fiers de cette reconnaissance par un organisme indépendant de référence. En amont de cela, nous avions proposé au vote de nos actionnaires nos stratégies climat & biodiversité lors de notre assemblée générale d’avril dernier. La résolution (« Say on climate & biodiversity ») a été approuvée à plus de 99 % ! Tous les ans, nous mesurerons notre empreinte carbone et l’atteinte de nos objectifs.

Et qu’en est-il en matière de consommations d’énergie ? Avant même les politiques de sobriété, le directeur général d’Icade, Olivier Wigniolle, expliquait à La Tribune que vous pouviez les diminuer de 20 % grâce aux outils de modélisation pour analyser les cycles de vie des bâtiments…

E.D. Nous devons être au rendez-vous de ce niveau de performance énergétique et bas-carbone, que ce soit en termes d’isolation et de performance thermique, ou en termes de biodiversité. Par exemple, à Versailles, nous développons sur une friche militaire de 19 hectares les « Jardins de Gally » qui mêlent 12 hectares de pleine terre et 50 000 m2 : 550 logements, 5 000 m² d’activités professionnelles, 5 000 m² d’hôtels, une halle, une crèche ou encore une école. Nous avons renaturé 20 % du terrain initial avec de lourdes étapes de dépollution de désartificialisation et de désimperméabilisation. Cette cité-jardin, où nous avons planté 4 000 arbres, sera ouverte sur l’espace public.

Est-ce la déclinaison de votre programme « Un arbre, Un habitant » ?

E.D. Pour tous les logements familiaux que nous produisons, soit 6 000 à 7 000 par an, nous nous engageons à planter un arbre par habitant. Sachant qu’un appartement compte en moyenne 2,5 personnes, cela en fait 15 000 au total. Par exemple, sur chaque balcon ou terrasse, nous planterons un arbre mono-tige grâce à « Symbiose by Icade », nouvelle offre lancée par un de nos collaborateurs, qui permet d’alimenter en eau les espaces extérieurs sans être relié au réseau. À l’heure de la non-artificialisation des sols, nous devons faire entrer la nature en ville.

Justement, comment abordez-vous le sujet de la non-artificialisation des sols ?

E.D. Nous nous appuyons sur les règlements d’urbanisme, comme PLU ou PLU intercommunal. En parallèle, afin d’évaluer la biodiversité positive de nos opérations, nous mesurons le coefficient de biotope par surface (CBS) entre la phase d’avant- et d’après-projet, grâce à un outil de diagnostic de biodiversité. En 2021, 46 % de nos nouvelles constructions affichaient une biodiversité positive. Enfin, au travers de nos projets d’aménagement urbain portés par nos équipes Synergies Urbaines, et de notre nouvelle offre AfterWork dédiée à la restructuration et à la transformation des bureaux, nous construisons la ville sur la ville et participons à l’atteinte de l’objectif de zéro artificialisation nette de la France.

La personnalisation de la nature est une erreur

nature: La personnalisation est une erreur

La personnalisation de la nature est une erreur

Louis de Redon est par ailleurs avocat Of Counsel au sein du cabinet Mialot Avocats où il conseille et défend, notamment, plusieurs associations de protection de l’environnement et collectivités territoriales.

Face aux menaces toujours plus prégnantes des activités humaines et des pollutions qu’elles génèrent, et alors que nous sommes entrés dans ce que les scientifiques appellent la sixième extinction de masse, beaucoup s’interrogent sur le cadre juridique dans lequel nous évoluons : celui-ci n’interdirait-il pas, de manière structurelle, une politique ambitieuse de conservation de la nature ?
Comme si tous nos efforts seraient vains tant que la table des paradigmes fondamentaux n’est pas renversée.

Parmi les objets principiels questionnés, celui de la singularité de l’être humain dans l’ordre du vivant ; et donc la personnalité juridique qui lui est accordée.
Ainsi, dans le débat public, l’idée est portée de faire de la nature, et/ou de certaines de ses composantes, des personnes. À en croire les tenants de cette innovation, qui n’en est pas une, la personnalité serait le remède à bien des maux. La nature, jusque-là sans voix et sans droit, serait alors considérée par la justice.
Quelle est la finalité recherchée d’une telle proposition ?

Si l’objectif est de parvenir à une sanctuarisation du vivant non humain à hauteur du vivant humain, pour garantir la conservation de la nature, alors ce saisissement relève d’une vision fantasmée de la condition d’« Homo sapiens ».
Pour apporter des éléments de réponse, il est primordial de s’interroger sur ce qu’est la personnalité juridique (et surtout sur ce qu’elle n’est pas) : son périmètre, les enjeux qui y sont attachés et, bien entendu, les effets de son attribution.

En résumé, dire si la personnalisation de la nature serait une nouvelle fausse bonne idée.
La personnalité est avant tout une fiction juridique. Au sens étymologique (du latin persona : le « masque d’acteur »), c’est le masque dont les citoyens s’affublent pour prendre part à la comédie humaine. Cette fiction nous impose de jouer dans une pièce aux règles clairement définies. Ainsi, une personne est avant tout un acteur de la vie en société, soumis au droit.

La personnalisation de la nature: une erreur

La personnalisation de la nature: une erreur

Louis de Redon est par ailleurs avocat Of Counsel au sein du cabinet Mialot Avocats où il conseille et défend, notamment, plusieurs associations de protection de l’environnement et collectivités territoriales.

Face aux menaces toujours plus prégnantes des activités humaines et des pollutions qu’elles génèrent, et alors que nous sommes entrés dans ce que les scientifiques appellent la sixième extinction de masse, beaucoup s’interrogent sur le cadre juridique dans lequel nous évoluons : celui-ci n’interdirait-il pas, de manière structurelle, une politique ambitieuse de conservation de la nature ?
Comme si tous nos efforts seraient vains tant que la table des paradigmes fondamentaux n’est pas renversée.

Parmi les objets principiels questionnés, celui de la singularité de l’être humain dans l’ordre du vivant ; et donc la personnalité juridique qui lui est accordée.
Ainsi, dans le débat public, l’idée est portée de faire de la nature, et/ou de certaines de ses composantes, des personnes. À en croire les tenants de cette innovation, qui n’en est pas une, la personnalité serait le remède à bien des maux. La nature, jusque-là sans voix et sans droit, serait alors considérée par la justice.
Quelle est la finalité recherchée d’une telle proposition ?

Si l’objectif est de parvenir à une sanctuarisation du vivant non humain à hauteur du vivant humain, pour garantir la conservation de la nature, alors ce saisissement relève d’une vision fantasmée de la condition d’« Homo sapiens ».
Pour apporter des éléments de réponse, il est primordial de s’interroger sur ce qu’est la personnalité juridique (et surtout sur ce qu’elle n’est pas) : son périmètre, les enjeux qui y sont attachés et, bien entendu, les effets de son attribution.

En résumé, dire si la personnalisation de la nature serait une nouvelle fausse bonne idée.
La personnalité est avant tout une fiction juridique. Au sens étymologique (du latin persona : le « masque d’acteur »), c’est le masque dont les citoyens s’affublent pour prendre part à la comédie humaine. Cette fiction nous impose de jouer dans une pièce aux règles clairement définies. Ainsi, une personne est avant tout un acteur de la vie en société, soumis au droit.

La personne est ensuite un « sujet de droit ». À ce titre, elle dispose de droits et de devoirs : des obligations regroupées au sein de son « patrimoine » (du latin pater : ce qui vient du « père ») ; un patrimoine dont nous avons hérité et que nous ambitionnons de transmettre aux générations futures.

Pour que cette transmission ait lieu, nous devons faire des choix. La personnalité, c’est cela : être en capacité de choisir. Être capable de différencier le bien du mal, le juste de l’injuste, le légal de l’illégal, et de répondre de ces choix devant la justice des hommes. Doués de raison, « Homo sapiens » est l’animal sachant, et la raison, le savoir et la capacité à dépasser notre instinct de prédateur, emportent notre responsabilité.
Les personnes sont les entités juridiques responsables de leurs actes.
Il existe deux grands types de personnes : les hommes et les femmes de chair et d’os – personnes physiques –, et leurs regroupements – personnes morales – (l’État, ses collectivités, les entreprises et les associations).
Qu’elles soient physiques ou morales, ces personnes sont soumises au droit, disposent d’un patrimoine, ont des obligations de faire et de ne pas faire, et engagent leur responsabilité devant les tribunaux.
Il fut un temps où les animaux étaient appréhendés par notre système judiciaire comme des personnes.
Au Moyen Âge, les cochons étaient jugés pour homicide et les pucerons pour ravages aux cultures. Un avocat était commis d’office. Le procureur prenait ses réquisitions. Et le glaive de la justice tombait : de l’écartèlement en place publique (puis exposition au gibet) de la truie mangeuse d’enfant à l’excommunication (à coups de goupillons) de moucherons fléaux des vergers, la machine pénale ne faisait pas dans le détail.
On le comprend, la personnalité n’est nullement un régime de protection. Et il existe des choses – res – qui disposent d’une protection intégrale et effective, à l’image des monuments historiques.
En réalité, la personnalité est un statut juridique qui soumet le sujet de droit à la loi ; qu’elle protège ou qu’elle ne protège pas (voire qu’elle menace et/ou sanctionne).
Pendant des siècles, le viol sur conjoint, une personne, était légal ; il était même encouragé. Il s’appelait alors « devoir conjugal » : que l’épouse consente, ou pas, à l’acte sexuel avec son époux, elle y était tenue, car soumise à cette règle du mariage (abrogée en 1990 en France).

Aujourd’hui encore, des dizaines de SDF meurent de froid chaque hiver dans la rue. Or ils disposent de la personnalité. Des milliers migrants meurent noyés chaque année dans la Méditerranée. Ils disposent aussi de la personnalité. Ce qui fait que les SDF et les migrants arrêteront de mourir sous notre regard aussi indifférent que coupable, ce n’est pas leur statut de personne, mais bien le régime juridique que nous déciderons, ou pas, de leur attribuer et les moyens humains, matériels et financiers, que nous allouerons, ou pas, à leur sauvetage.
Si nous attribuons la personnalité à certains fleuves, comme la Loire par exemple, qu’est-ce que cela changera ?

Si nous envisageons de passer par la création d’une association, c’est-à-dire le regroupement de femmes et d’hommes autour d’un objet visant à porter la voix de Loire dans le débat public et devant les tribunaux, alors cette solution existe déjà ! Elle est déjà inscrite dans notre droit : les associations de protection de l’environnement sont légions et elles ont joué, jouent encore et joueront toujours, un rôle aussi déterminant qu’indispensable en matière de lutte écologique.

En revanche si l’ambition est de donner la personnalité au fleuve lui-même, il faut alors se demander quels seront les droits et devoirs à lui opposer. Par exemple, dire en cas de crue si la Loire est responsable des dommages qu’elle cause et devant quelle juridiction elle aura à en répondre.
En réalité, la Loire est « objet de droit ». Elle fait partie du patrimoine commun de la Nation, res communis, tout comme la biodiversité ou les forêts, et nous avons l’obligation de la protéger.

Ce qu’il convient donc de faire, ce ne n’est pas de lui attribuer des droits et des devoirs, mais d’en imposer aux femmes et aux hommes qui sont interaction avec elle ; au premier rang desquels, les personnes qui en ont la charge : collectivités et administrations, mais aussi leurs émanations (comme l’Établissement Public Loire), qui établissent les règles d’usage et de conservation (et qui sont chargées d’en faire respecter l’application).

En cas de crue dévastatrice, ce n’est évidemment pas la responsabilité du fleuve qui est engagée, mais bien celle des élus et des techniciens qui ont, ou pas, établi le plan de prévention des risques et réalisé, ou pas, les investissements structurels nécessaires (déversoirs, barrages,…).

Finalement, si nous retenons la « patrimonialité » commune de la nature, qui est une belle idée interdisant une appropriation privée du vivant tout en mettant la communauté des hommes de manière solidaire face à sa responsabilité, la personnalité est alors non seulement inutile, mais aussi incompatible.

En effet, nous sommes, et serons toujours, dépendants des ressources naturelles et contraints à des prélèvements (de préférence responsables et durables). Or, on ne peut pas être une personne et entrer, même en partie, dans le patrimoine, même commun, d’une autre personne (il s’agit du principe d’indisponibilité du corps humain). Cela nous renverrait à une période de notre histoire où la propriété et l’exploitation de personnes par d’autres personnes étaient juridiquement possibles. Cela n’est évidemment plus acceptable.
La remise en cause de la summa divisio, c’est-à-dire la distinction cardinale entre les personnes et les choses, n’est pas un sujet de conservation de la nature. Elle relève d’une forme de misanthropie : elle pose la haine de l’être humain, et la négation de sa singularité dans le monde du vivant, comme un moyen de rupture écologique alternatif à une transition respectueuse de nos acquis humanistes.

Le mouvement d’écologie profonde pose une égalité biosphérique de principe (tous les êtres vivants seraient d’égale dignité), autour d’une affirmation de l’antispécisme (un mouvement qui entend mettre fin à la discrimination des hommes envers les animaux), et la remise en cause de la personnalité juridique est structurante de ce choix civilisationnel. Il s’agit d’un combat politique et idéologique bien plus qu’écologique.

Cela n’est assurément pas l’ambition de nombreuses personnes qui s’interrogent sur la personnalité. Il peut alors être soumis à leur critique que donner à la nature un statut identique à celui des hommes conduit finalement à l’assimiler à ce que nous sommes plutôt qu’à la reconnaître pour ce qu’elle est. Et cela serait finalement une négation de la singularité du vivant non humain.
Ou bien est-ce un simple cache-sexe posé devant notre incapacité à faire des choix qui nous engagent et qui nous responsabilisent face à la crise que nous provoquons !
Or, nous n’avons plus le temps pour les fausses bonnes idées, pour le greenwashing ou pour l’alibi écologique aux luttes idéologiques.

Nous sommes soumis à une obligation de résultat : sauver la biodiversité ou périr avec elle. Si la personnalité a été attribuée à la nature, ou à certaines de ses composantes, dans quelques autres pays à la culture juridique bien différente de la nôtre (comme l’Équateur, la Bolivie, Inde, la Colombie ou encore la Nouvelle-Zélande), le moins que l’on puisse dire, c’est que cela n’a pas entraîné de progrès foudroyants en matière de protection de l’environnement ; parfois même l’inverse.

En conclusion, il convient de dire avec force que la personnalisation de la nature s’inscrit soit dans une conceptualisation anthropocentrée du monde qui nous entoure, soit dans la négation de la dignité humaine qui est au cœur de notre projet de société ; il n’y pas d’alternative.

En tout état de cause, l’attribution de la personnalité n’est point ajustement juridique. Il s’agit d’un séisme qui ébranle l’édifice même de cinq cents ans de construction de l’État de droit et d’affirmation progressive des droits de l’Homme (sur la notion d’État, voir aussi les trois leçons au Collège de France de Pierre Bourdieu).

La nature ne peut être juridiquement une personne ; sauf à redéfinir ce qu’est une personne et donc ce qu’est le droit et ce qu’est notre société.

Entre le paradis supposé – voire fantasmé – de la personnalité, et l’enfer supposé – voire caricaturé – des choses, nous sommes pour l’instant au purgatoire du brainstorming…
Plutôt que de soumettre la nature aux choix des hommes, pourquoi ne pas la reconnaître (enfin) comme un véritable objet de droit ; un objet, certes, mais un objet singulier, précieux et fragile, devant être saisi à la fois avec force et délicatesse par un droit sui generi. Une troisième voie juridique, ni personne, ni chose ; une voie sur mesure tracée en fonction des enjeux de conservation, mais aussi de responsabilisation des acteurs humains.

dans The Conversation

Environnement -Droits accordés à la nature: des principes très théoriques

Environnement -Droits accordés à la nature: des principes très théoriques

Les organisations environnementales les plus radicales réclament déjà depuis un moment une sorte de révolution juridique avec la reconnaissance d’une personnalité juridique de la nature. D’après eux, cela donnerait l’occasion de changer la vision du monde fondée sur la prééminence de l’être humain sur la planète.

Pourtant accorder des droits à ceux qui ne peuvent pas les exercer relèvent d’une certaine naïveté voire d’une certaine hypocrisie.

En effet, comment s’organisera la prise en charge de la défense des droits sinon par l’intermédiaire humain. D’une certaine manière, l’intermédiation humaine interviendrait donc à la fois comme institution judiciaire en même temps que défenseur des droits de la nature.

Cette idée qu’on peut comprendre compte tenu de l’ampleur des dégâts et des enjeux environnementaux ne peut être opérationnelle et sera forcément gérée de manière humaine.

Dans cette revendication, il ne s’agit pas simplement de reconnaître des droits au vivant mais à l’ensemble de la nature ( montagne, mer, terre etc.).

Juridiquement, ces propositions peuvent paraître assez irréalistes. En particulier si on reconnaît des droits on pourrait aussi reconnaître des devoirs. Exemple pourquoi pas aussi un procès à un volcan qui causerait des dommages à la nature et ou au vivant !

Ce positionnement environnemental radical n’a guère de sens.

Droits accordés à la nature: des principes très théoriques

Droits accordés à la nature: des principes très théoriques

Dans les organisations environnementales les plus radicales réclament déjà depuis un moment une sorte de révolution juridique avec la reconnaissance d’une personnalité juridique de la nature. D’après eux, cela donnerait l’occasion de changer la vision du monde fondée sur la prééminence de l’être humain sur la planète.

Pourtant accorder des droits à ceux ne peuvent pas les exercer relèvent d’une certaine naïveté voire d’une certaine hypocrisie.

En effet comment s’organisera la prise en charge de la défense des droits sinon par l’intermédiaire humain. D’une certaine manière, l’intermédiation humaine interviendrait donc à la fois comme institution judiciaire en même temps que défenseur des droits de la nature.

Cette idée qu’on peut comprendre compte tenu de l’ampleur des dégâts et des enjeux environnementaux ne peut être opérationnelle et sera forcément gérée de manière humaine.

Dans cette revendication, il ne s’agit pas simplement de reconnaître des droits au vivant mais à l’ensemble de la nature ( montagne, mer, terre etc.).

Juridiquement, ces propositions peuvent paraître assez irréalistes. En particulier si on reconnaît des droits on pourrait aussi reconnaître des devoirs. Exemple pourquoi pas aussi un procès un volcan qui causerait des dommages à la nature et ou au vivant !

Ce positionnement environnemental radical n’a guère de sens.

Gestion de l’eau : «Laisser faire la nature, c’est de l’idéologie»( FNSEA)

Gestion de l’eau : «Laisser faire la nature, c’est de l’idéologie»( FNSEA)

 

 

Dans une interview au JDD, Christiane Lambert rappelle qu’un stockage «intelligent» de l’eau est nécessaire pour faire face aux épisodes de sécheresse.

Lors  d’un déplacement dans les Alpes-de-Haute-Provence avec des agriculteurs touchés par la sécheresse, Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique, a rappelé que « l’eau potable, c’est 20 % des prélèvements de la consommation. Les usages agricoles, c’est le double ».« Nous avons déjà réduit de 30 % nos besoins en eau », lui répond Christiane Lambert, présidente de la FNSEA. Pour le JDD, la syndicaliste fait un bilan de la situation et met en lumière les moyens déjà mis en oeuvre par les agriculteurs contre la sécheresse historique qui touche la France.

« Beaucoup de cultures sont en train de brûler, les prairies jaunissent et les animaux qui cherchent à se nourrir abîment la terre en la grattant. Le manque de fourrage va toucher toute la France et tous les élevages : bovins, ovins, caprins et les chevaux. Le maïs a moins d’épis et des grains plus petits. Sur mon exploitation, nous n’en aurons pas assez pour nourrir nos porcs. Le calendrier des récoles a changé quasiment partout. Beaucoup ont déjà fini les moissons qui ne devaient pas commencer avant des semaines. Les vendanges vont démarrer dans certains vignobles avec trois semaines d’avance. Tous les travaux deviennent pénibles pour les agriculteurs qui travaillent dans des bâtiments et sous serre, ou pour ceux qui doivent récolter à haute intensité pour éviter que les fruits ou les légumes ne se perdent. Avec la chaleur, la production a beaucoup mûri et se conserve moins bien. Il a fallu mettre le turbo, travailler quinze heures par jour, d’autant que comme l’Espagne a été touchée par le gel et l’Italie par la sécheresse, l’Europe manque de fruits. Il y a des places à prendre pour les producteurs français sur les marchés allemands ou britanniques. »

« Il est très difficile de garantir entre 22 à 28 degrés dans certains bâtiments. La température est même montée à 37-38 degrés dans les plus anciens qui ne sont pas équipés de systèmes de rafraîchissement. Nous déployons des solutions depuis dix ans. Nous avons intégré dans les constructions neuves des éléments qui favorisent le rafraîchissement des animaux, comme des rideaux d’eau. Nous sommes au travail pour améliorer les choses. Les producteurs laitiers, par exemple, ont trouvé des solutions pour réduire de 15 % leur empreinte carbone en optimisant la gestion des troupeaux. Celle du litre de lait a baissé de 23 % en quinze ans. Mais il faut savoir qu’un élevage qui ferme ne rouvre jamais. Les aider est un enjeu de résilience. Moins de producteurs signifient des prix plus élevés. Nous ne voulons pas que la précarité alimentaire progresse. »

 

Vous sentez-vous visés par les efforts de réduction de consommation demandés à l’ensemble de la population ?


On entend partout qu’il faut changer de modèle mais nous, cela fait dix ans qu’on s’adapte. Il n’y a pas de climatosceptiques en agriculture. Nous avons déjà réduit de 30 % nos besoins en eau. Dans beaucoup de départements, comme ceux qui comptent des productions des végétaux spécifiques, des pépinières ou des cultures de semence, les agriculteurs n’ont pas le choix : ils ont besoin d’eau. Mais au global, 5 % seulement des agriculteurs sont irrigants. Dans ma commune sur 13 producteurs, un seul arrose. Et comme je le rappelle souvent : une tomate, c’est 90 % d’eau. L’eau des agriculteurs sert à nourrir les hommes.

 Au niveau de l’exécutif, vous estimez-vous soutenu ?

L’année dernière, nous avons travaillé dans le cadre du Varenne de l’eau et du changement climatique. Nous venions de connaître une période de gel historique. Il fallait se mettre autour de la table. Trois mille personnes ont été consultées. Et comme à chaque fois qu’une grande consultation est lancée, les agriculteurs se sont engagés. Certaines personnes n’ont pas voulu y prendre part… Nous avons l’habitude. Les gens veulent une alimentation de proximité mais pas qu’un élevage s’installe à côté de chez eux. Une des mesures prioritaires portait sur la mise en place d’un dispositif d’assurance récolte. Elle a été votée par les parlementaires en mars. Nous travaillons pour qu’elle soit applicable dès 1er janvier 2023. Ce serait une sacrée performance ; 30 % seulement des agriculteurs sont assurés.

Laisser faire la nature c’est bien, beau et bon, mais c’est de l’idéologie

Où en est-on du problème de stockage de l’eau que vous soulevez depuis longtemps ?


Un délégué interministériel a été nommé pour lever les freins sur certains dossiers. Il a une liste de 23, prêts à sortir. Certains remontent à plus de quinze ans, ne sont toujours pas réglés, alors que certaines zones connaissent une quatrième année de sécheresse. Stocker de l’eau intelligemment est une priorité. Laisser faire la nature c’est bien, beau et bon, mais c’est de l’idéologie. La situation climatique que nous connaissons nécessite une gestion humaine du problème. Sans stockage artificiel, certains qui n’ont pas accès à l’eau vont se retrouver condamnés à faire des cultures non irriguées. Ca sera blé, blé, blé. Et la monoculture, on sait à quoi ça peut mener.

L’alliance entre les républicains et le rassemblements national est contre nature (Philippe Bas )

L’alliance entre les républicains et le rassemblements national est contre nature  (Philippe Bas )

 

Aussi atterré par la politique d’autarcie proposée par Marine Le Pen que par celle, reposant sur la violence d’Etat, d’Eric Zemmour, le sénateur (LR) de la Manche estime, dans une tribune au « Monde », que « toute recherche d’une synthèse avec cette “autre droite” serait contre nature et nécessairement vouée à l’échec ».

 

Tribune.

 

J’ai honte de devoir constater qu’à rebours de toute morale, dans un pays amoureux des libertés, on puisse proposer, sans être immédiatement accusé de fouler aux pieds l’idéal français, une politique reposant sur la violence d’Etat pour renvoyer les étrangers (un million, dit Eric Zemmour). Je suis également atterré qu’on puisse, comme Mme Le Pen, proposer une politique d’autarcie qui aurait tôt fait de nous isoler du reste du monde. Nous offrons face à Emmanuel Macron une tout autre alternative que l’extrême droite.

Il n’y a rien de bien nouveau dans les prétentions idéologiques de M. Zemmour, mais une radicalité que le lepénisme, dans sa variante « marinienne », avait progressivement réussi à rendre bonasse. Le Rassemblement national (RN), premier parti compassionnel de France, est paradoxalement l’héritier du parti communiste d’antan : il parle à tous les malheureux. Tous sont appelés à croire aux turpitudes des puissants et aux solutions-miracles. Les boucs émissaires sont désignés (CAC 40, technocrates, politiciens, Europe, mondialisation, immigration…). L’antisémitisme semble refoulé, mais cela ne suffira jamais à faire du RN un nouveau parti centriste, n’en déplaise à M. Zemmour. C’est avant tout un parti « populiste ».

Notre faiblesse, comme celle de la gauche, a été de lui abandonner le terrain. Mais ce n’est pas en reproduisant son discours qu’on retrouvera l’adhésion des classes moyennes, c’est au contraire en combattant ses chimères, sa brutalité, en lui opposant nos propres solutions …. Car la République n’a pas de meilleur moyen d’assurer durablement sa propre légitimité que de répondre aux attentes du plus grand nombre.

Le RN demeure un grand danger, parce qu’il veut que l’Etat impose une politique intransigeante et sectaire qu’aucun principe fondamental de l’Etat de droit ni aucune réalité internationale, européenne ou économique ne sauraient entraver ou tempérer. Mais nier le droit, n’est-ce pas aussi nier la liberté ? Nier la réalité, n’est-ce pas aussi se condamner à une dictature rampante ? Les riches s’en tireront toujours en plaçant leurs capitaux là où ils prospéreront. Les classes moyennes, elles, n’auront aucun moyen d’échapper aux conséquences dévastatrices de l’isolement de la France, acculée à la récession. La dette publique étranglera notre économie et anéantira l’épargne nationale. Tout est danger, rien n’est crédible dans ce programme, tout autant que dans celui de Jean-Luc Mélenchon, à l’extrême gauche.

La menace de la nature sur l’économie et la stabilité financière

La menace de la  nature sur l’économie et la stabilité financière

Une étude, réalisée avec la participation de banques centrales, insiste sur le fait que les menaces sur la nature devraient être intégrées dans leurs évaluations des risques et dénonce la dépendance des systèmes économiques et financiers envers des écosystèmes fonctionnels et en bonne santé. (franceinfo)

ASelon un rapport (lien en anglais) publié jeudi 24 mars et élaboré par des chercheurs en collaboration avec le réseau Network of Central Banks and Supervisors for Greening the Financial System (NGFS), les banques centrales sous-estiment la menace significative que représente la perte de la biodiversité et de ses richesses, dont dépendent pourtant entreprises et institutions financières.

Si les impacts du changement climatique sont de plus en plus intégrés dans l’évaluation des risques économiques, c’est beaucoup moins le cas pour des menaces similaires issues de la destruction de la nature, constate cette étude. « Nous érodons la biodiversité à un rythme qui nuit aux écosystèmes qui nous fournissent nourriture, eau et air pur. Ce qui pourrait causer des risques importants pour la stabilité économique, financière et sociale », a commenté Ravi Menon, président du NGFS, rappelant que « la biodiversité est la base de la vie sur notre planète ».

Le rapport insiste sur le fait que les menaces sur la nature devraient être intégrées dans l’évaluation des risques des banques centrales, notant la dépendance des systèmes économiques et financiers envers des écosystèmes fonctionnels et en bonne santé. Par exemple, les rendements agricoles sont menacés par la réduction des populations de pollinisateurs victimes des pesticides ou de la réduction de leurs habitats. « La perte de biodiversité est une menace pour la stabilité financière », explique à l’AFP Nick Robins, de la London School of Economics, qui a codirigé ce rapport. Or, « peut-être que les investissements actuels des entreprises et des institutions financières ne sont pas conformes à un écosystème en bonne santé », pointe-t-il.

La banque interaméricaine de développement a de son côté estimé que les politiques visant à empêcher l’Amazonie d’atteindre le point de basculement qui pourrait éventuellement la transformer en savane (freiner la déforestation, investir dans une agriculture durable, améliorer la gestion des incendies) pourraient générer environ 340 milliards de richesses supplémentaires.

Créer une économie protectrice de la nature

Réussir la transition vers une économie mondiale protectrice de la nature est un défi, relève le rapport. Certains pays ont commencé à prendre des mesures, note l’étude, qui appelle malgré tout les banques centrales à élaborer une approche coordonnée pour répondre à la crise mondiale de la biodiversité.

Publié au moment où les délégations de près de 200 pays sont réunies à Genève dans le cadre de négociations visant à établir d’ici la fin de l’année un accord pour mieux protéger la biodiversité, le rapport souligne enfin l’impact que le système financier peut avoir sur la nature, notamment via les choix de prêts, d’investissements et d’assu

Au nom de l’environnement : « Crimes contre la nature » de Karl Jacoby

Au nom de l’environnement : « Crimes contre la nature » de Karl Jacoby

L’historien américain retrace les violences qui ont accompagné la création des parcs nationaux aux Etats-Unis, à la fin du XIXe et au début du XXe siècle.

Souvenir du parc national de Yellowstone, 1927. BETTMANN/BETTMANN ARCHIVE

« Crimes contre la nature. Voleurs, squatteurs et braconniers : l’histoire cachée de la conservation de la nature aux Etats-Unis » (Crimes against Nature. Squatters, Poachers, Thieves, and the Hidden History of American Conservation), de Karl Jacoby, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Frédéric Cotton, Anacharsis, « Essais », 442 p., 23 €.

Wilderness serait, selon certains, un terme intraduisible en français. « Monde sauvage », « Grande Nature », proposent les autres… Autant d’approximations lexicales pour qualifier un préjugé commun. L’Européen peine en effet à concevoir l’espace américain en tant que territoire humanisé de longue date. Exemple type : le Grand Canyon, star des parcs nationaux, jalousement réglementé au nom du devoir sacré de préservation d’espaces « vierges », et dont les occupants premiers furent chassés, voire criminalisés.

Crimes contre la nature est un livre fondateur du courant désormais bien établi de la « borderlands history », l’histoire des marges, des frontières. Publiée en 2001 par le jeune et déjà brillant historien Karl Jacoby (né en 1965), traduite aujourd’hui en français, cette enquête repose sur de nombreuses archives – rapports de terrain, décisions de justice, presse locale… – concernant des territoires que les autorités jugèrent, la guerre de Sécession terminée (1865) et le pouvoir fédéral renforcé, « menacés » par une surexploitation anarchique. Au banc des accusés voisinaient Amérindiens, petits Blancs, fermiers, trappeurs vivant en grande partie de chasse, de cueillette, de pêche, et usant des forêts selon des codes coutumiers.

L’ouvrage ne se déclare pas d’emblée partisan. Il le devient au fil de la lecture des documents d’époque, longtemps occultés, qui rendent manifestes les dommages collatéraux et les angles morts du mouvement « préservationniste », dont les principales figures, toujours célébrées, demeurent John Muir (1838-1914), le président Theodore Roosevelt (1858-1919) et autres membres fondateurs du Sierra Club ou du Boone and Crockett Club.

Défendre les équilibres naturels en expulsant, au mépris de leurs droits acquis et de leurs pratiques d’autosubsistance, des occupants de longue date jugés irresponsables, procède d’une vision surplombante, aujourd’hui remise en question. Les critiques qu’adressent à l’ONG environnementaliste WWF ou à l’Unesco les défenseurs des droits autochtones se sont multipliées récemment. Les Amériques sont loin d’avoir le monopole de ce problème, ainsi que le démontre l’africaniste Guillaume Blanc dans son essai L’Invention du colonialisme vert (Flammarion, 2020).

Coronavirus : le rapport nature-santé humaine en cause

Coronavirus : le rapport nature-santé humaine en cause

Les deux dirigeantes du WWF France, Véronique Andrieux et Isabelle Autissier, soulignent, dans une tribune au « Monde », la relation directe entre la déforestation, le recul de la biodiversité et la pandémie, appelant à un sursaut des dirigeants mondiaux

Tribune. Dans le monde, 43 millions d’hectares de forêts perdus entre 2004 et 2017 ont été perdus, soit l’équivalent de 80 % de la superficie de la France métropolitaine, et ce sur seulement 24 « fronts de déforestation », c’est-à-dire les points les plus chauds de la déforestation mondiale. C’est sur ce constat alarmant que s’ouvre la dernière étude du WWF, qui souligne notamment la responsabilité de l’agriculture commerciale dans la dynamique de la déforestation.

L’humanité paie les conséquences de la surexploitation de la nature. Feux de forêts géants, recul de la biodiversité et pandémie mondiale sont liés : la multiplication des crises doit nous faire prendre conscience de l’urgence de changer notre rapport à la nature. Il y a un an, le monde entier découvrait un virus dont on ignorait encore presque tout. Aujourd’hui, le Covid-19 a emporté sur son passage 1,9 million de vies – l’équivalent en heures de travail de plus d’un milliard d’emplois, selon l’Organisation internationale du travail – et aussi quelques certitudes sur ce qu’est une politique économique raisonnable.

La pandémie a surtout mis en évidence le lien entre destruction de la nature et menace sur la santé humaine. 70 % des maladies émergentes (Zika, Ebola, Nipah, etc.) et presque toutes les pandémies connues (par exemple la grippe, le VIH, le Covid-19) ont pour origine des zoonoses, c’est-à-dire des maladies causées par des infections d’origine animale. C’est le constat que dresse la Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), l’équivalent du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) pour la biodiversité.

Une logique d’effet domino

Les scientifiques nous disent ainsi que les causes sous-jacentes aux pandémies comme le Covid-19 sont les mêmes que celles qui ravagent les forêts, détruisent la biodiversité et dérèglent le climat. Déforestation et destruction d’écosystèmes naturels, commerce et consommation d’espèces sauvages, ces destructions et surexploitations générées par nos modes de vie ne sont pas seulement un drame en soi.

Dans une logique d’effet domino, elles conduisent à d’autres catastrophes pour l’humanité : en détruisant les forêts, prairies, savanes, on rapproche la faune sauvage du bétail et des hommes. Ces contacts de plus en plus fréquents permettent aux micro-organismes pathogènes des animaux sauvages de s’adapter et d’infecter les humains.

Reconnecter notre économie aux réalités de la nature

 Reconnecter notre économie aux réalités de la nature

 

 Tribune d’un collectif dans le monde

Alors que la crise sanitaire a démontré la fragilité de notre modèle agricole, un collectif de personnalités engagées pour une transition écologique et solidaire plaide pour un nouveau pacte entre villes et campagne et invite à repenser notre relation à la terre.

Tribune. Le Covid-19 aura eu au moins un mérite : révéler au plus grand nombre la vulnérabilité de notre système et rendre manifeste l’urgence de proposer de nouveaux modèles de production et de vivre-ensemble, plus résilients, porteurs de sens, créateurs de richesses et de solidarités. Face aux crises écologiques, économiques et sociales s’impose une évidence : la nécessité de (re)toucher terre. Un retour à la terre que nous entendons au sens large, c’est-à-dire repenser les relations ville-campagne, reconnecter notre société hors-sol au vivant et redonner une place centrale à l’agriculture et aux paysans.

Le modèle urbain consumériste arrive en bout de course. Cette impasse invite à changer de regard sur la ruralité. Loin des congestions automobiles et du stress, agriculteurs, entrepreneurs, associations, artistes et collectivités inventent chaque jour d’autres façons de produire, de travailler, d’habiter. Ils refont battre le cœur des villages, mettent de la poésie dans nos vies, permettent la résilience alimentaire et économique, mettent les gens en relation et ouvrent à de nouvelles solidarités.

Ce foisonnement d’expériences offre une occasion pour les campagnes de jouer un rôle politique fort dans la construction du monde de demain et invite à penser de nouveaux équilibres territoriaux. Oui, les campagnes qualifient les villes aujourd’hui ! Nous plaidons pour un nouveau pacte ville-campagne qui favoriserait les complémentarités et les mises en cohérence plutôt que l’irresponsable « laisser-faire » libéral.

Miser sur l’intelligence collective

Les nouveaux modes de travail et les technologies rendent aujourd’hui possible un exode urbain. Le confinement loin des villes aura permis à de nombreux citadins de l’expérimenter temporairement, et pour certains de sauter le pas définitivement. Mais pour que ce phénomène soit une véritable opportunité, il doit faire l’objet de « politiques d’accueil ». Et inversement, les projets des néoruraux doivent s’inscrire dans le respect des spécificités et des besoins locaux. Seul un projet politique qui s’inscrit dans des processus de rencontres entre les différents acteurs fera sens, et permettra à chacun de s’approprier le territoire et de travailler ensemble.

La diversité et le lien sont les seules réponses à la complexité. Les crises actuelles ont pris racine dans un mal invisible : celui de l’uniformisation des êtres et des territoires. Face à l’ineptie d’un monde cloisonné, nous devons concentrer nos efforts sur le lien à l’autre : entre citadins et ruraux, entre les mondes agricoles, économiques, politiques et artistiques. La résilience ne peut se créer qu’en misant sur nos complémentarités. L’innovation naît de l’intelligence collective.

 

« Le productivisme destructeur de la nature « 

« Le productivisme destructeur de la nature « 

Pointant quelques inexactitudes dans les propos de Christian Jacob qui s’en prend à l’« idéologie écologiste », Stanislas Rigal, biologiste de la conservation, souligne dans une tribune au « Monde », qu’il est erroné de penser que décroissance est synonyme de récession.

Tribune. 

 

Il faut commencer par souligner que la tribune du président Les Républicains Christian Jacob (« Pour respecter les accords de Paris via la décroissance, il faudrait rester confinés pendant trente ans »Le Monde du 23 novembre) fait l’effort d’apporter quelques nuances là où le débat tourne souvent autour d’idées générales. Cependant, les inexactitudes qu’elle contient sont malheureusement encore nombreuses et nécessitent une clarification.

Reprenons dans l’ordre.

La population mondiale en 2050 nécessitera-t-elle une augmentation considérable de production agricole ? On peut légitimement se poser la question, alors qu’actuellement environ 30 % de la nourriture produite est gaspillée, que 820 millions de personnes sont en sous-alimentation sévère, mais que 13,2 % des adultes sont obèses.

Un problème de répartition

C’est un problème de répartition qui est en jeu ici, car il y a suffisamment de capacité de production sans recourir à la déforestation ou à l’expansion du modèle agricole industriel occidental qui fait déjà des ravages dans le monde entier et qui est, par nature, non durable. N’oublions pas que la majorité de la production est assurée par de petites exploitations qui, pourtant, sont loin d’occuper la majorité des surfaces agricoles.

Mais venons-en au point central de la tribune : la récession n’est pas la décroissance.

La seule écologie réaliste, notamment dans les sociétés occidentales, est celle qui fait décroître l’impact humain sur la biosphère et les quantités d’énergie et de matière extraites de l’environnement.

Alors que la récession est un phénomène inattendu, touchant la quasi-totalité des secteurs sans discernement, créant du chômage, diminuant les moyens de subsistance des plus pauvres et accentuant les inégalités, la décroissance est une entreprise prévue, se concentrant sur les secteurs ayant l’impact environnemental le plus négatif, améliorant le quotidien des plus nombreux, réduisant les inégalités par une redistribution des ressources et une démarchandisation du monde.

Le concept de nature est très culturel

Le  concept de nature est très culturel

 

Le philosophe de l’écologie, Frédéric Ducarme,  rappelle dans le Monde que notre rapport à la nature est très marqué par le christianisme et que le concept est apparu au temps des premières civilisations urbaines.

Chercheur au Muséum national d’histoire naturelle, Frédéric Ducarme s’est spécialisé dans la philosophie de l’écologie. En 2020, il a cosigné deux études sur le concept de nature dans l’histoire et dans l’espace, l’une publiée en janvier dans Palgrave Communications (revue dont le titre est désormais Humanities and Social Sciences Communication), l’autre parue le 29 septembre dans Conservation Biology.

En science, on parle beaucoup de nature – et c’est d’ailleurs le titre d’une des plus grandes revues scientifiques. Pourtant il subsiste un grand flou autour de ce mot polysémique…

Le terme de « nature » est passé dans les angles morts de beaucoup de disciplines. Les scientifiques l’utilisent mais ne l’aiment pas trop, disant qu’il n’est pas scientifique. Et, du côté des philosophes, on l’utilise mais on ne l’aime pas plus, en disant que ce n’est pas un concept philosophique. Du coup, personne ne le théorise vraiment alors qu’il est très employé : entre 1990 et 2015, il figure dans le titre de plus de 7 000 articles scientifiques, mais aucun d’eux ne le définit. C’est quasiment le seul concept majeur que personne ne définit.

Vous expliquez que les philosophes grecs de l’Antiquité ont plutôt une vision dynamique de la nature, comme Héraclite, qui y voit un écoulement, mais que tout cela change avec le christianisme…

Dans le dogme chrétien, on a un Dieu « pantocrator », maître de tout, qui, surtout, est au-dessus de la nature, ce qui lui permet d’être parfait. C’est la grande originalité des religions monothéistes, alors que les dieux grecs sont loin d’être parfaits. Dans l’Iliade, ces dieux sont vraiment tous des sagouins : ils sont remplis de passions, ils piquent des crises de colère ou de peur, ils ont des besoins alimentaires, sexuels et peuvent même mourir. Dans les religions polythéistes, les dieux sont soumis à la nature. Dans les monothéismes abrahamiques, Dieu est en dehors de la nature et celle-ci lui est subordonnée. Toute dynamique ne peut venir que de Dieu et la nature est profondément statique : c’est la Création. D’où l’idée, répandue jusqu’au XVIIIe siècle, que la science a pour but de décrypter le plan divin. Ce à quoi Darwin va s’opposer en faisant intervenir l’histoire dans la biologie.

Comment l’homme se situe-t-il dans cette nature ?

L’idée est que l’homme est plongé dans la nature mais n’en relève pas totalement. Il a une âme qui tend vers le royaume de Dieu. Dans l’Evangile selon Matthieu, il est dit qu’il ne faut pas trop investir dans les choses de la Terre, qui sont destinées à être rongées par la vermine. Il existe une hiérarchie stricte entre le monde physique, qui doit être méprisé, et le domaine purement moral, qui relève du divin – un domaine métaphysique au-delà du physique. La nature est certes le fruit de Dieu, mais elle est un peu brute et c’est à l’homme de s’en faire le jardinier. Chez Buffon (1707-1788) existe cette idée que la nature seule tend vers le croupissement, la pourriture, et que seul l’homme peut bien l’ordonner… comme le jardin des Plantes.

La nature de criminalités boursières

La  nature  de criminalités boursières  

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Trois principales infractions boursières ont été décelées par l’autorité des marchés boursiers (AMF) le délit d’initié, la manipulation de cours et la diffusion de fausse information d’après  Jean-Jacques Quisquater, Université de Louvain, et Charles Cuvelliez, Université de Bruxelles.( Dans la Tribune)

 

 

  »On pourrait dire, à lire une étude de l’AMF, que le délit d’initié est de moins en moins réservé aux initiés : lors d’un fusion-acquisition, toute une chaîne d’acteurs se met en place pour la réaliser. Chaque acteur, banque-conseil, cabinet d’avocats ou cabinet comptable, consultants, le régulateur, les diffuseurs d’informations financières, les agences de relations publiques et même des bureaux de traductions sont autant de portes d’entrée supplémentaire, pendant l’opération, pour un hacker qui peut se procurer des informations privilégiées sur la fusion/acquisition. Plusieurs cas concrets sont cités par l’étude où chaque fois un acteur différent a pu être pénétré avec succès. Le phishing reste la manière la plus simple et la plus efficace de pénétrer le maillon faible car il y en a souvent un dans cette longue chaîne. Les diffuseurs d’informations sont par exemple vulnérables puisque on peut y placer des annonces à l’avance avec une date d’embargo. L’AMF mentionne que des fuites de données antérieures, même des années avant, peuvent être exploitées plus tard pour du spearphising (phishing personnalisé) particulièrement efficace : le mail mentionne des informations si « historiques » qu’on a de la peine à croire qu’elles ne sont pas légitimes. Ce phishing peut aussi prendre la forme d’un mail venant d’un des acteurs impliqués dans l’opération de fusion-acquisition à un autre acteur dont on a toutes les raisons de croire qu’ils sont légitimes car qui d’autre est au courant, se dira-t-on. L’AMF met aussi en garde contre les nouveaux comportements numériques des entreprises, comme l’utilisation d’Office 365, l’usage du cloud ou l’utilisation d’objets connectés liés au laptop sur lequel on travaille. Sans familiarité avec ces nouveaux usages, des comportements dangereux, involontaires et exploitables se développeront.

Les manipulations de cours ont, elles, lieu par la prise de contrôle de comptes de traders de particuliers, même en petit nombre, pour donner des tendances au marché via un comportement coordonné de ces comptes piratés, comprend-t-on, sur des actions peu liquides ou des penny stocks dont les cours peuvent varier rapidement avec quelques dizaines d’acheteurs. C’est la technique du pump & dump. En Asie, les autorités ont même peur des activités de trading qui vont se faire de plus en plus sur des interfaces non dédiées comme les messageries instantanées ou les réseaux sociaux. L’AMF met en avant le problème de la sécurisation, plus vaste qu’imaginé, des applications de comptes de trading des acteurs non bancaires. Ce sont surtout les applications de trading mobile qui sont peu sécurisées (certaines données envoyées au serveur ne sont même pas chiffrées a repéré une étude).

 

Enfin, il y a aussi le risque futur de manipulation des cours via un piratage des algorithmes de trading qui occupent déjà 50 % à 80 % des échanges quotidiens sur certaines classes d’actifs. Il y a aussi le risque de manipulations d’algorithmes d’intelligence artificielle via des données volontairement erronées et orientées au profit de certains.

 

La diffusion de fausses informations est sans doute l’attaque le plus facile à mettre en œuvre : elle nécessite peu de moyens et est facilement anonyme (utilisation d’un wifi public, du réseau TOR…) et ce d’autant plus que l’enregistrement de noms de domaine et l’hébergement de sites inernet qui servent à diffuser l’information ne brillent pas, rappelle l’AMF, par leurs précautions quant à celui qui les ouvre (sans compter la durée de conservation de ces informations qui est faible). Quand il y a une enquête, elle aboutit le plus souvent en regardant plutôt les transactions boursières que laissent les criminels qui ont diffusé les fausses informations et qui veulent en tirer bénéfice (quid alors quand ce sont des activistes qui ont lancé les rumeurs, sans appât du gain). Les enquêtes sont internationales par nature, ce qui les complique puisque, selon le pays, les pouvoirs d’investigation des autorités ou des régulateurs sont différents. Seuls les coupe-circuit des Bourses permettent de limiter les mouvements trop importants en capitalisation boursière qui en résultent.

 

Pour l’AMF, la chaîne de diffusion des informations financières doit être sérieusement revue et contrôlée (au sens, comprend-t-on, de l’assurance-qualité) : il y a tellement d’intervenants qu’on n’en arrive à ne plus savoir qui est habilité à diffuser une information correcte et quand. Il faudrait clarifier le canal officiel de diffusion de l’information financière et renforcer la sensibilisation des agences de presse pour éviter le piratage en amont (réception d’un faux communiqué de presse considéré à tort comme vrai) ou en aval (diffusion d’un faux communiqué injecté dans les systèmes d’information même de l’agence de presse). De ce point de vue, Twitter tient le pompon. L’AMF relève à juste titre combien les gens sur des réseaux comme Twitter ont tendance à plus vite relayer du faux sensationnaliste que du vrai. Il y a, en plus, dit l’AMF, des algorithmes spécifiques qui collectent le contenu circulant sur les médias sociaux pour pouvoir réagir très vite en cas d’information cruciale. Ces algorithmes de lecture automatisée sont sensibles aux fausses informations plus que les humains, le filtrage par ces derniers reste essentiel.

L’AMF remarque enfin qu’il existe, au-delà de la diffusion de fausses informations directement liées à une société pour en influencer le cours de Bourse, quantité d’autres voies pour arriver à ces mêmes fins. Et de citer tous les indicateurs qui influencent la Bourse comme les indices de matières premières, la confiance des ménages MCSI (calculé par l’université de Michigan puis transmis à Thomson Reuters), les conditions météorologiques… Enfin, les deepfakes représentent le défi le plus aigu : comment distinguer un deepfake du président de la FED qui fait une annonce sur les taux.

 

L’AMF se penche aussi sur les coûts de la cybercriminalité boursière. Le FMI, explique-t-elle, estime que 90 % des coûts d’une cyberattaque sont de nature indirecte dont 75 % liés au départ de clients suite à la perte de réputation. La perte d’information stratégique et la reconstruction d’un nouveau système de production sont les deux autres composantes principales des coûts indirects. Les coûts directs, comme ceux liés à l’investigation forensique, à l’aide juridique, à la remédiation et l’amélioration des systèmes touchés, à l’assistance aux clients, à la perte éventuelle de revenu court terme sont peut-être facilement quantifiables mais ils ne représentent pas la majeure proportion des coûts.

Autre facteur tangible : la chute du cours en Bourse des sociétés cotées. Elle oscille entre 1% et 5% dès la divulgation de l’attaque. Les sociétés qui annoncent elles-mêmes une cyberattaque subissent une chute de leur cours plus petite par rapport à une divulgation qui ne vient pas d’elle. Etre pris sur le fait n’est pas une bonne chose, la morale est presque sauve (vive le RGPD !). Enfin, il faut attendre 45 jours pour que le cours récupère son niveau initial.

 

Si on a très peu de recul en termes de données historiques, l’obligation de rapporter des attaques avec toute une série de réglementations qui arrive, sanctions financières à la clé, la souscription aux cyber-assurances va permettre d’avoir des données fiables dans les années à venir et mettre fin à l’à peu près dans les estimations de l’impact des cyberattaques.

Comme le mentionne l’AMF, une autre étude plus générale devra être réalisée dans le contexte des ICO et des cryptomonnaies. On pourrait aussi y ajouter le sujet du blanchiment d’argent qui n’a pas été examiné. »

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