« Mutualiser les livraisons des PME » !
Le chercheur en management Ridha Derrouiche suggère, dans une tribune au « Monde », d’organiser des plates-formes d’application Web permettant aux entreprises petites ou moyennes de partager un même transport pour une même destination. A priori, une idée intéressante mais qui existe depuis des dizaines et des dizaines d’années d’une part avec des bourses de fret, avec le rôle des commissionnaires de transport notamment des messagers et avec le rôle des groupes d’entreprises.Notons aussi Il est interdit de faire côtoyer certaines marchandises dans le même véhicule ( denrées périssables, marchandises dangereuses, marchandises sous température dirigée notamment)
Bref on redécouvre un peu la lune. Certes il est intéressant que des chercheurs généralistes s’intéressent de plus en plus à la problématique logistique. Mais cette question est traitée depuis longtemps par les instituts de recherche spécialisés.
Il y a longtemps qu’on mutualise les moyens de transport. Et il n’y a pas 99 % d’entreprises qui livrent directement leurs clients. Depuis des dizaines d’années existe d’ailleurs une bourse de fret où les clients proposent des marchandises à transporter au transporteur. Par ailleurs ces bourses de fret se sont multipliées. En outre, le métier de messager spécialisé sur le transport de colis est précisément de grouper les envois pour tirer la meilleure compétitivité des moyens de transport. Enfin existent désormais nombre de groupes d’entreprises de transport qui mutualisent leurs moyens toujours pour des questions de rentabilité. Enfin les chiffres évoqués concernant le rapport transport à l’environnement paraissent assez douteux.
Tribune.
Livrer toujours plus fréquemment, toujours plus vite, des quantités toujours plus petites, en minimisant les coûts, les émissions polluantes et la congestion des routes, tel est le défi auquel se confrontent les professionnels de la logistique, dont l’activité a bondi de 20 % par rapport à 2019, boom de l’e-commerce et pandémie obligent.
Pour moderniser et décarboner cette filière, qui produit près de 40 % des gaz à effet de serre du secteur du transport, le gouvernement vient d’annoncer un plan d’investissement de 1,7 milliard d’euros. Les modes les plus « vertueux » seront soutenus : le fret ferroviaire, le transport fluvial, les véhicules électriques ou à hydrogène,
Mais un point – à notre avis crucial – reste traité de manière embryonnaire. Les PME et TPE, qui constituent 99 % des entreprises françaises, livrent chacune de leur côté les restaurants, les magasins ou les particuliers. Chacune avec sa camionnette. Or, avec un coup de pouce des pouvoirs publics, financier et surtout organisationnel, elles pourraient mutualiser ces livraisons avec des conséquences positives non négligeables, tant sur le plan économique qu’écologique et sanitaire.
Nos recherches montrent qu’une telle mutualisation pourrait réduire de plus de 30 % les émissions de C02 induites, de plus de 20 % et jusqu’à 45 % les coûts de ces livraisons, avec également une diminution de 15 % des accidents (« Towards a collaborative and integrated optimization approach in sustainable freight transportation », A. Aloui, N. Mrabti, N. Hamani, R. Derrouiche, L. Delahoche, 17th IFAC Symposium on Information Control Problems in Manufacturing – à paraître en 2021).
De quoi parlons-nous précisément ? Une plate-forme comme Blablacar permet aux conducteurs de voitures particulières de prendre à bord des passagers en leur faisant partager les frais. Ainsi, il s’agirait de mettre en relation des PME et/ou TPE, via des plates-formes analogues, pour qu’elles embarquent au quotidien des produits de leurs partenaires avec les leurs.
Plusieurs expériences montrent le potentiel de la coopération dans ce domaine du transport de marchandises. Pour les livraisons du « dernier kilomètre » jusqu’au domicile des particuliers, des systèmes de transport collaboratifs commencent ainsi à se développer dans les territoires où la densité de population est trop faible pour recourir à des coursiers.