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Monnaie: Le triomphe de l’euro

Monnaie:  Le triomphe de l’euro

25 ans après son lancement officiel en 1999, l’euro est un adulte en pleine forme et le nombre de pays de la zone euro n’a cessé de croître depuis sa création, passant de 11 en 1999 à 20 avec l’entrée de la Croatie le 1er janvier 2023. Selon les termes mêmes du traité de Maastricht, la zone euro doit d’ailleurs poursuivre son élargissement à moyen terme à tous les pays de l’Union européenne (UE) qui n’ont pas souscrit explicitement une clause d’« opt out » (désengagement) comme le Danemark. Au-delà du cercle officiel de ses quelque 330 millions d’usagers équivalent à la population des États-Unis (340 millions) et incluant 4 micro-États officiellement autorisés à l’utiliser (Andorre, Monaco, Saint-Marin et Le Vatican), l’euro étend son influence à des pays ou régions qui en ont fait unilatéralement leur monnaie, comme le Monténégro ou le Kosovo, ou qui indexent volontairement leur devise sur la monnaie commune.

 

par 

Éric Pichet, Kedge Business School dans The Conversation 

Au sein même de la zone euro, les virulentes critiques des partis eurosceptiques qui estimaient que la monnaie était une forme d’abdication de la souveraineté nationale se sont progressivement estompées. La hausse régulière du taux d’adhésion de la population, qui se situe à près de 80 % aujourd’hui, les ont en effet progressivement contraints à abandonner une posture radicale car trop coûteuse électoralement.
Pour mesurer le succès de l’euro, il faut également se souvenir des pronostics apocalyptiques de nombre d’économistes monétaires anglo-saxons qui affirmaient que le projet ne verrait jamais le jour et que, dans l’hypothèse peu probable de son lancement, la monnaie exploserait à la première grande crise.

Au premier rang des sceptiques, l’économiste américain Milton Friedman expliquait en 1997, soit deux ans avant sa naissance, que, contrairement aux États-Unis, les fragmentations du droit du travail et des protections sociales nationales très disparates brideraient la libre circulation des hommes et des capitaux nécessaires au mécanisme d’ajustement d’une zone monétaire optimale.

Sur un territoire connaissant de fortes divergences de cycles économiques, par exemple entre pays industriels et touristiques, la politique monétaire de la future banque centrale s’apparenterait donc, comme l’expliquait alors Rudiger Dornbusch, professeur au MIT, à « tirer sur une cible mouvante dans le brouillard ».

Dernier argument de taille des eurosceptiques : en cas de crise grave localisée dans un seul pays, le carcan de la monnaie unique interdirait toute dévaluation de la monnaie, se traduisant nécessairement par un violent ajustement interne sous forme d’une chute brutale des revenus et du pouvoir d’achat insupportables pour la population.

C’est exactement ce qui s’est produit en Grèce au cours de la longue crise financière de 2008-2015. Le pays a effectivement frôlé la sortie de l’euro lors du référendum national du 5 juillet 2015 par lequel les citoyens grecs ont refusé à une large majorité (60 %) les conditions du plan de sauvegarde imposé par la Banque centrale européenne (BCE), la Commission européenne et le Fonds monétaire international (FMI).

Découvrant dès le lendemain l’impossibilité de retirer des billets aux distributeurs, les députés grecs ont finalement approuvé en catastrophe, le 13 juillet 2015, un plan de rigueur encore plus douloureux pour rester dans l’euro.

Depuis 2019 les drames de l’hyperinflation dans deux pays proches, au Liban qui a fait basculer 80 % du pays dans la grande pauvreté et dans une moindre mesure en Turquie, ont achevé de convaincre les Européens de la protection d’une monnaie forte.

Si les habitants de la zone euro ont très vite pris conscience des avantages pratiques de la monnaie unique avec la disparition des frais de transaction et du risque de change d’Helsinki à Lisbonne, les entreprises ont pu de leur côté comparer les prix et mettre en place rapidement des plans stratégiques servant un vaste marché unique. Quant aux marchés financiers, ils ont gagné en stabilité et en profondeur au fil de leur intégration, symbolisée par l’émergence de la bourse paneuropéenne Euronext en 2000.

Si l’euro est une indéniable réussite, le mérite en revient d’abord à la Banque centrale européenne (BCE) qui a su gérer deux crises économiques d’une ampleur jamais vue depuis 1929. Face aux deux cataclysmes économiques de 2008 et 2020, elle a dû, comme les autres grandes banques centrales, réviser de fond en comble une doctrine multiséculaire depuis la création de la banque d’Angleterre en 1694 en appliquant pour la première fois de son histoire, une politique monétaire dite non conventionnelle.

Mêlant taux d’intérêt nuls, voire négatifs, et émission massive de monnaie qui a multiplié la taille de son bilan, cette politique audacieuse a permis d’éviter deux dépressions économiques durables.

Tout au plus peut-on reprocher à l’actuelle présidente de la BCE, Christine Lagarde, et ses collègues de Francfort d’avoir tardé, contrairement à la Réserve fédérale américaine (Fed), beaucoup plus réactive, à remonter les taux quand l’inflation a resurgi brutalement en 2021. La BCE, alors soucieuse d’éviter une rechute de l’économie, avait sous-estimé la composante monétaire de l’inflation pour l’attribuer essentiellement aux chocs externes et aux goulets d’étranglement logistiques liés au Covid-19 et à la guerre en Ukraine.

Loin de l’affaiblir, les crises de sa jeunesse ont donc renforcé le pouvoir de la BCE, car après la crise des subprimes de 2008, il est apparu clairement que la stabilité financière impliquait une meilleure supervision des mastodontes de la finance qu’étaient devenues les grandes banques. Les États membres de l’Union européenne ont ainsi confié en 2014 à la BCE la supervision des 130 plus grandes banques européennes dites systémiques (qui risquaient d’ébranler la stabilité financière de la zone) maintenant le reste des quelque 8 300 banques de la zone euro sous le contrôle du superviseur national (l’ Autorité de contrôle prudentiel et de résolution en France).
Si l’Europe a évité les conséquences des faillites de la Silicon Valley Bank aux États-Unis et du Credit Suisse en 2023, il reste encore à parfaire l’union bancaire par un véritable système européen d’assurance des dépôts, aujourd’hui bloqué par l’Allemagne qui refuse toujours une solidarité financière avec les pays du Sud du continent.

Mais le point noir de la zone euro reste incontestablement le renforcement du pilier budgétaire de l’union monétaire. Pour faire partie du club de l’euro, chaque pays devait satisfaire à 5 critères de convergence : un déficit public inférieur à 3 % du PIB, une dette publique inférieure à 60 % du PIB, une inflation faible, des taux d’intérêt à long terme modérés et une stabilité de son taux de change par rapport aux autres devises européennes.

Une fois dans le club, le Pacte de stabilité et de croissance mis en place en 1997 était censé discipliner les États membres en assurant un minimum de discipline budgétaire pour éviter qu’un pays trop dépensier n’emprunte excessivement, entraînant une hausse des taux d’intérêt à long terme préjudiciable aux autres pays membres ou générant une méfiance vis-à-vis de la monnaie.

Or, les grandes crises de 2008 et de 2020 ont nécessité des politiques de soutien à l’activité via une hausse spectaculaire des déficits et de la dette. Ces politiques contra-cycliques ont conduit à une divergence entre les pays dits « frugaux » du Nord et les cigales – parmi lesquelles on peut classer la France. Cette divergence s’est en effet accentuée à partir de mars 2020 quand la Commission européenne a invoqué les circonstances exceptionnelles prévues par le traité pour suspendre les effets du Pacte jusqu’à la fin 2023.

Néanmoins, l’euro dispose aujourd’hui d’une assise suffisante pour envisager ses futures évolutions comme la mise en place d’un e-euro ou euro numérique. Ce nouveau moyen de paiement, instantané et gratuit pour les particuliers et les entreprises, rapide et sécurisé, serait directement émis par le Système européen de banques centrales de la zone euro, mais géré par des fournisseurs de services de paiement rémunérés par les commerçants via des commissions très faibles. Il devrait voir le jour à l’horizon 2026-2027.

Transformer la monnaie pour transformer la société

Transformer la monnaie pour transformer la société


La bifurcation sociale-écologique exige de gigantesques investissements pour les États, les entreprises et les particuliers. Comment les financer ? Pour répondre à ce défi, Jézabel Couppey-Soubeyran, Pierre Delandre, Augustin Sersiron proposent dans Le Pouvoir de la monnaie (Éd. Les Liens qui libèrent, janvier 2024), dont The Conversation France publie certains extraits, qu’un Institut d’émission adossé à la Banque centrale européenne (BCE) reçoive l’autorisation d’émettre de la monnaie légale sur base volontaire, désencastrée du marché de la dette, en complément de la monnaie bancaire, afin d’accorder les subventions nécessaires au financement des investissements socialement ou écologiquement indispensables mais non rentables.

par
Jézabel Couppey-Soubeyran
Maîtresse de conférences en économie, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Augustin Sersiron
Économiste et philosophe, Institut catholique de Paris (ICP)

Interviewé
Pierre Delandre
Sociologue, certifié en finances publiques et conseiller senior dans une banque centrale de l’Eurosystème.
dans » the Conversation »

Les auteurs soulignent notamment qu’il ne s’agirait pas de la première transformation monétaire de grande ampleur de l’Histoire : à chaque type de société a correspondu un type de monnaie, les bifurcations monétaires contribuant toujours aux bifurcations sociétales menant de l’un à l’autre, tant l’institution monétaire est porteuse d’une formidable force de structuration des rapports sociaux. La bifurcation écologique et sociale, qui constitue aujourd’hui le projet travaillant le corps social, appelle sa propre bifurcation monétaire.

La monnaie, un outil puissant pour transformer la société
Un défi majeur de notre temps nous semble être d’inventer une façon de créer et de mettre en circulation la monnaie qui n’encourage pas la marchandisation du monde, c’est-à-dire l’expansion sans limite du domaine de la marchandise. Permettre la monétisation sans marchandisation requiert de repenser en profondeur la forme institutionnelle de la monnaie. C’est l’une des clés de la constitution d’un monde plus juste et plus durable.

La bifurcation écologique et sociale à laquelle tant d’entre nous aspirent ne se fera pas sans bifurcation monétaire. On ne change pas la société simplement en changeant la monnaie, mais on ne la change pas non plus sans changer la monnaie – c’est ce qu’enseigne l’histoire monétaire […]. Or la monnaie qui est aujourd’hui la nôtre est une monnaie dont les modalités d’émission sont intrinsèquement capitalistes, la tournant non plus d’abord vers l’échange marchand, mais vers l’accumulation capitaliste. […]

L’autorité monétaire doit ménager en son sein l’espace de délibération collective qui permettra de réajuster en permanence ses objectifs en fonction des besoins profonds exprimés par la société, plutôt que de les fixer dans le marbre.

La rapide succession de crises que nous avons traversées révèle la variété des enjeux qui peuvent être jugés prioritaires par le corps social, dont elles mettent en évidence les carences les unes après les autres ; or aucune règle intangible ne permettrait de faire l’économie d’une délibération sur la nécessité d’allouer les nouvelles encaisses créées au verdissement de nos modes de vie et de production, ou à la reconstruction de l’hôpital public, ou à celle de nos infrastructures énergétiques, ou de nos systèmes de transport urbain dégradés, ou de notre appareil industriel, etc. Tous ces choix de société doivent être débattus, en permanence, pour permettre l’usage le plus efficace et le plus légitime possible de la formidable puissance collective que détient l’autorité monétaire. […]

Si la monnaie est aujourd’hui une monnaie bancaire, c’est-à-dire créée par les banques, généralement en contrepartie d’une dette et rapportant ainsi des profits à son émetteur, il n’en a pas toujours été ainsi historiquement, loin de là. Sur le temps long, la monnaie s’avère extraordinairement multiforme, ne cessant de muter d’une époque à une autre, de connaître de véritables bifurcations. […]

[La monnaie marchande apparaît dans les sociétés palatiales de la Haute Antiquité (Mésopotamie, Égypte), qui sont] entièrement polarisées par les « grands organismes » (temples ou palais), sortes de personnes morales qui possèdent d’immenses domaines d’agropastoralisme avec champs irrigués et pâturages, mais aussi de véritables complexes manufacturiers dotés de divers ateliers mobilisant tous les savoir-faire artisanaux. […] Toutes les activités économiques nouvelles qui se développent […] sont d’abord cultuelles, subordonnées au service des dieux, car la production est avant tout destinée à satisfaire leurs besoins.

[Dès lors], pour estimer la valeur des stocks de ressources, les rations dues aux ouvriers, les entrées et sorties de denrées, les fermages, les redevances, les prêts, etc., les « fonctionnaires » des temples commencèrent à rapporter tous les types de biens, dont ils géraient les flux, à un seul bien, érigé en étalon. […] C’est ainsi que fut mise en place une unité de compte rendant des objets hétérogènes commensurables du point de vue de leur valeur, c’est-à-dire du désir qu’ils inspirent, exprimé dans un langage numérique institué : c’est l’avènement du langage de la valeur, qui permet d’établir des relations d’équivalence socialement objectivées entre des quantités de biens divers.

[2500 ans plus tard, dans l’antiquité classique (perse et gréco-romaine) se joue un] tournant anthropologique [qui] nous semble reposer notamment sur trois inventions techniques et culturelles majeures : les premières pièces de monnaie frappées, qui permettent l’essor des échanges décentralisés ; l’alphabet, qui permet la diffusion massive de l’écriture ; la cavalerie montée, qui permet l’avènement de vastes empires dont le pouvoir politique s’éloigne des populations qu’il régit. Là encore, la forme de la monnaie évolue en cohérence avec l’ensemble des rapports sociaux, qui se restructurent en profondeur. […]

[Après l’effondrement médiéval (recul des villes, de l’écrit et des échanges, rareté monétaire) et le renouveau des sociétés coloniales (découverte des mines d’argent des Amériques, imprimerie, essor marchand tiré par le commerce triangulaire), le projet de société capitaliste de la révolution industrielle s’appuie sur la monnaie bancaire, créée par la dette, donc tournée non plus vers l’accumulation de richesse passée (or ou argent) mais vers la production de richesse future (industrielle puis financière), tout comme le pouvoir politique issu des urnes se fonde sur un projet pour l’avenir (le programme électoral) et non sur la légitimité traditionnelle du passé (le sang royal).]

Verse-t-on dans les coquecigrues et autres calembredaines en imaginant que l’on puisse transformer le mode d’émission de la monnaie ? En réalité, une transformation monétaire est déjà en cours, la création monétaire a déjà commencé à s’affranchir d’une contrepartie dette. Nous l’avons vu au niveau des banques commerciales qui, avec la monnaie acquisitive, créent de la monnaie en achetant des titres. Les banques centrales ont largement amplifié ce mouvement avec les mesures d’exception qu’elles ont dû prendre pour gérer les crises, financière puis sanitaire.

Elles ont ainsi déjà créé d’énormes quantités de monnaie centrale selon le mode acquisitif, par achat de titres plutôt que par prêt, et elles ont même déjà donné de la monnaie centrale (aux banques, en petite quantité). C’est donc que la bifurcation monétaire a déjà commencé ! À ceci près que les banques centrales qui en ont eu l’initiative l’ont entreprise non pas dans l’optique de dépasser le capitalisme financier ni de le transformer, mais bien plutôt de le sauver coûte que coûte. […]

Le mode volontaire d’émission monétaire est un processus par lequel un organe de décision (un Institut européen d’émission monétaire, à créer) aurait le pouvoir d’émettre, dans le cadre d’une gouvernance ouverte sur la société civile, les quantités nécessaires de monnaie centrale (des euros fongibles avec ceux de la BCE et du circuit bancaire classique) pour remplir des missions d’intérêt général fixées démocratiquement. La décision d’émission consisterait à émettre de la monnaie que la banque centrale mettrait à disposition de la Caisse du développement durable, organe d’exécution, pour la réalisation des missions qui lui sont assignées sans la moindre obligation de remboursement ni charge d’intérêt.

Cette émission monétaire serait la traduction pure et simple de l’expression d’une volonté politique démocratique (d’où l’expression « mode volontaire de création monétaire »). Elle serait ainsi directement affectée aux objectifs d’intérêt général, aux biens communs et aux biens publics, sans contrepartie comptable exigible, ni remboursement, ni intérêt. Ce mécanisme échappe totalement aux mécanismes bancaires classiques (émission par le crédit ou par acquisition de titres), puisqu’il s’agit en réalité d’une subvention. […] Mise en circulation par des subventions, la monnaie volontaire serait donc entièrement désencastrée de la dette et des mécanismes classiques du marché bancaire, pour être affectée à des objectifs de bien commun. […]

L’institution monétaire, démocratisée, pourrait équilibrer les objectifs sociétaux, permettant la réalisation d’objectifs privés, sous le signe de la rentabilité financière, financés par les modes bancaires de création monétaire, d’une part, et la réalisation d’objectifs collectifs, par le mode volontaire de création monétaire, sous les signes du non-marchand, du social et de l’écologie, d’autre part. On atteindrait de la sorte une configuration monétaire mettant en valeur la complémentarité des objectifs marchands et non marchands pour réaliser une forme d’équilibre entre les intérêts individuels et collectifs, entre les intérêts à court terme et à long terme, les intérêts de l’économie et ceux du lien social et de la nature.

Il nous semble que l’instauration d’un mécanisme de monnaie volontaire tracerait le chemin du développement durable en allégeant l’endettement et en se libérant des injonctions de rentabilité financière, de croissance ou de concurrence. C’est un projet de société porté par un projet de monnaie, une monnaie à mission, avec laquelle il deviendrait possible de prendre soin de la planète et de la société, pour un avenir enfin authentiquement social et écologique.

Une monnaie numérique officielle en Angleterre et ailleurs ?

Une monnaie numérique en Angleterre et ailleurs ?


Les projets de monnaies numériques fleurissent partout dans le monde. La grande question est de savoir si ces monnaies seront complètement libres ou si elles seront sous le contrôle des banques centrales. Pour le reste une monnaie numérique jouera le même rôle que la monnaie actuelle mais sera destiné à être échangé uniquement via des ordinateurs et autres outils numériques donc avec suppression des billets et autres pièces.

La banque centrale européenne comme d’autres étudient cette possibilité. En la matière, le Royaume-Uni ne fait pas exception. L’actuel Premier ministre, Rishi Sunak, souhaite Que ce projet aboutisse des 2024.Si c’est le cas les autres banques centrales seront incitées à mettre rapidement en œuvre leurs propres projets

Monnaie Argentine: une dévaluation plus de 50%

Monnaie Argentine: une dévaluation plus de 50%

L’Argentine est un des pays les plus endettés au monde et sa monnaie est très dévalorisée. Du coup, face à une perspective d’inflation actuellement de l’ordre de 10 à 150 % par an, le gouvernement décide de dévaluer la monnaie, le peso, de 50 %. Cette mesure drastique s’inscrit dans un plan de très grande rigueur constate consistant aussi réduire les investissements et les subventions. L’objectif est de réduire l’endettement et de limiter l’inflation.

Pour lutter contre cette hyperinflation, les autorités Précédentes avaient alors aligné le taux de change du peso sur le dollar américain, selon le principe 1 dollar = 1 peso. Cela a permis de reprendre confiance dans la monnaie argentine et d’arrêter l’effet « planche à billets », c’est-à-dire la création à outrance de monnaie par la Banque centrale, ce qui provoquait une inflation rapide.

Malgré ces mesures, voilà plusieurs décennies que l’Argentine connaît une inflation chronique. Celle-ci prend sa source dans des causes aussi bien internes qu’externes et s’inscrit en lien avec les crises qui ont fragilisé le pays et entravé son développement.

Après la crise de 2001, les politiques économiques mises en œuvre par les présidents de centre gauche Eduardo Duhalde (2002-2003) puis Nestor Kirchner (2003-2007) se sont essentiellement fondées sur le protectionnisme, l’interventionnisme de l’État et un soutien à la consommation.

En dépit de cela, Les inégalités, déjà prégnantes après des années de croissance économique erratique, se sont aggravées : le taux de pauvreté, en hausse depuis 2017, a atteint 42 % en 2020.

Les mesures budgétaires adoptées pour faire face à la crise (hausse des dépenses de santé, transferts financiers et soutien économique aux ménages et secteurs les plus touchés) ont augmenté le déficit public .

L’Argentine a solidement renoué avec la croissance en 2021 (10,2 % de croissance enregistrée) – une croissance soutenue notamment par une reprise de la consommation des ménages et des entreprises, et par la hausse des prix des matières premières.

Le taux de pauvreté demeure élevé et bien supérieur à son niveau pré-Covid, à 36,5 % (au premier semestre de 2022). En parallèle, l’emploi informel avoisine toujours les 49 %, tandis que les salaires réels demeurent inférieurs à leur niveau de 2017, sans qu’une véritable trajectoire haussière ne se dessine.

Parmi les différentes mesures à mettre en place, la consolidation budgétaire, c’est-à-dire la réduction du déficit public, est le premier point d’ancrage et le critère essentiel pour les autres éléments
.
Le ministre de l’Économie a assuré que le gouvernement va maintenir des programmes sociaux d’aide à l’accès à l’emploi et «renforcer les politiques sociales pour ceux qui en ont besoin, sans intermédiaires», a-t-il insisté, a l’image des «cartes alimentaires» (bons d’achat pour les plus démunis).

Inflation et monnaie : l’orthodoxie financière en cause

Inflation et monnaie : l’orthodoxie financière en cause


Pour les partisans de l’orthodoxie financière, il n’y a pas de doute: seul le relèvement des taux d’intérêt peut contribuer à lutter contre l’inflation. C’est souvent la position de la Banque de France. Le problème est que la science économique est une science molle et approximative et que les lois d’hier sont souvent remises en question par la complexité des problématiques et leur évolution rapide.

Il faut dire que les différents responsables de la Banque de France sont souvent plus près des intérêts de l’Allemagne que de ceux de la France. Relever en effet à nouveau les taux d’intérêt, c’est prendre le risque de tuer définitivement la petite perspective très hypothétique de croissance notamment en 2024.

Pour l’instant, on prévoit en effet uniquement une augmentation de l’activité de l’ordre de 1 %. Un pronostic par ailleurs fragile avec l’évolution de la guerre en Ukraine et des événements au Proche-Orient. En outre et surtout, il se pourrait bien que l’outil magique des taux d’intérêt ne serve pas la lutte contre l’inflation mais au contraire l’alimente. Voire à cet égard toutes les perspectives d’augmentation des tarifs de produits et services en 2024. En effet par anticipation, nombre de produits et services voient leurs tarifs progresser dans la perspective du renchérissement du coût de l’argent.

En septembre, les gardiens de l’euro ont décidé à une « solide majorité » de relever les taux d’intérêt à 4,5%, son plus haut niveau depuis 1999.

« Une décision difficile » face à un contexte économique incertain. Telles sont les conditions dans lesquelles la Banque centrale européenne a décidé de relever son taux directeur le 14 septembre dernier. Des coulisses décrites dans un compte-rendu de réunion de la BCE publié ce jeudi, et consulté par l’AFP. D’après celui-ci, le choix d’augmenter les taux ou faire une pause était assujetti à « des considérations tactiques » aux impacts multiples.

Lors de cette réunion, les gardiens de l’euro ont décidé à une « solide majorité » de relever les taux d’intérêt à 4,5%, son plus haut niveau depuis 1999. Depuis juillet 2022, c’est la dixième fois d’affilée que l’institution de Francfort effectue ce geste. Ce, dans un contexte d’inflation en baisse en zone euro mais encore appelée à durer.

D’après le document, les partisans d’une pause ont, durant cette réunion, donné de la voix, arguant notamment qu’une nouvelle hausse des taux « risquait de répéter la situation qui s’était produite en 2011 », lorsque des hausses avaient dû être « rapidement inversées », au début de la crise de la dette souveraine.

Dollar : monnaie de référence encore pour longtemps

Dollar : monnaie de référence encore pour longtemps

La politiste Carla Norrlöf liste, dans une tribune au « Monde », les raisons pour lesquelles une remise en cause de la domination du dollar – dont l’hégémonie est un facteur de stabilité – est peu probable.

De nombreux experts pensent que l’hégémonie mondiale du dollar américain, qui dure depuis près de quatre-vingts ans, touche enfin à sa fin. Cette issue n’est pas impossible : des crises économiques, une polarisation intérieure accrue et de puissants vents géopolitiques contraires pourraient en effet aboutir à l’effondrement de la monnaie américaine. Mais ce n’est pas probable.

Les débats sur l’avenir du système monétaire international ne tiennent en effet pas compte de la domination complète et profonde du billet vert, de son rôle essentiel sur les marchés publics et privés, et des diverses incitations à détenir des dollars. Tant que les synergies renforçant les différentes possibilités d’usage du dollar continueront à prévaloir, il sera difficile de réduire l’écart béant qui le sépare des autres monnaies.

Certes, la primauté et l’omniprésence du billet vert dans le système financier mondial sont devenues une pomme de discorde majeure dans la lutte entre les grandes puissances – Etats-Unis, Chine et Russie.

Ces défis géopolitiques s’inscrivent dans un contexte de taux d’intérêt élevés et de polarisation de la politique américaine, qui a conduit à des négociations interminables sur le plafond de la dette américaine au début de l’année. Pris dans leur ensemble, ces facteurs risquent d’ébranler la perception de sécurité attachée aux actifs en dollars. Mais pour que le billet vert soit détrôné, il faudrait que des acteurs multiples soutiennent un changement de monnaie substantiel.

En dehors des Etats-Unis, le dollar est à la fois un moyen d’échange, une unité de compte ou de réserve de valeur. Les gouvernements et les autorités monétaires utilisent le dollar pour intervenir sur les marchés des changes, pour détenir des réserves officielles et comme monnaie d’ancrage. Les acteurs privés, quant à eux, s’en servent pour la facturation et le règlement des échanges, ainsi qu’à des fins d’investissement. C’est l’interaction entre ces différents acteurs et rôles qui a propulsé le dollar dans sa position hégémonique.

Le dollar surpasse de loin son principal rival, l’euro, dans le rôle de monnaie de réserve pour stabiliser le taux de change ou modifier les taux d’intérêt. Les décisions des gouvernements sont donc déterminantes pour le maintien de la primauté du dollar.

Chine : La monnaie chinoise s’écoule

Chine : La monnaie chinoise s’écoule

En raison de la faiblesse de son économie mais aussi de la crise financière qui affecte notamment le secteur immobilier la monnaie chinoise ne cesse de reculer en particulier par rapport au dollar.

La plupart des monnaies asiatiques souffrent par rapport au dollar notamment la monnaie chinoise.

Le soutien monétaire à l’économie chinoise est entravé , alors qu’elle est confrontée à un ralentissement de la reprise économique post-COVID. Compte tenu du manque de soutien monétaire, les investisseurs appellent maintenant le gouvernement à mettre en place des mesures fiscales plus ciblées.

Mais les analystes s’attendent à ce que Pékin s’abstienne de prendre de telles mesures, en invoquant le niveau élevé de la dette publique.

Néanmoins, toute nouvelle détérioration de l’économie chinoise est de mauvais augure pour le yuan, qui est déjà confronté à l’écart croissant entre les taux d’intérêt locaux et américains.

Les inquiétudes concernant la Chine ont affaibli la plupart des monnaies asiatiques. Le dollar australien et le yen japonais se sont légèrement affaiblis et s’échangeaient tous deux près de leurs plus bas niveaux en neuf et dix mois.Le yuan a atteint son plus faible cours face au dollar, cotant jusqu’à 7,3503 yuans pour un dollar pour la première fois depuis décembre 2007. Ce mardi, il se reprenait à 7,1986 pour un dollar, mais a perdu près de 6% de sa valeur depuis le début de l’année.

La semaine dernière, le yen a touché un plus bas de 43 ans face au dollar. « L’Asie-Pacifique se trouve au milieu d’une série de hausses rapides des taux d’intérêt en provenance des États-Unis. Les pressions macroéconomiques s’exerceront sur les taux de change régionaux, comme en témoigne le creusement des déficits des comptes courants dans de nombreux pays.

D’autres secteurs pourraient à leur tour subir les conséquences de ces dépréciations. « La baisse des devises asiatiques, yen et yuan par exemple, a plusieurs inconvénients. Les effets amplifient l’inflation importée, pèsent sur le sentiment des investisseurs et limitent le financement. Bien que les entreprises de la région Asie-Pacifique aient largement géré les effets de l’asymétrie des devises jusqu’à présent, ces tensions pèsent sur les entités dont la dette en dollars est importante et arrive à échéance dans les 12 à 18 mois à venir », explique John Plassard.

Un yuan faible peut aider à soutenir la réduction des surcapacités chinoises dans le secteur manufacturier, mais un yuan trop fort pourrait accroître les craintes du G7 de voir la Chine se lancer dans une sorte de guerre des devises. Nous pensons donc que les autorités voudront maintenir le yuan « suffisamment bas » pour éviter une crise immobilière plus profonde, notamment dans le contexte des problèmes du marché immobilier, mais « suffisamment élevé » pour empêcher l’intensification de la rivalité entre les États-Unis et la Chine et l’augmentation des mesures protectionnistes », prévoient dans un note de recherche les experts d’Allianz Trade.

L’appréciation du dollar reflète sa large domination aujourd’hui sur la scène internationale. La Banque populaire de Chine soulignait d’ailleurs lundi que « bien que le yuan se soit récemment quelque peu déprécié par rapport au dollar américain, il reste fondamentalement stable par rapport à un panier de devises ».

Le rôle international du yuan reste marginal
Surtout, la prépondérance du billet vert montre qu’il est loin de pouvoir être détrôné. Car malgré la volonté du gouvernement chinois d’internationaliser le yuan, une mesure inscrite dans le plan quinquennal de 2021, le rôle de la devise chinoise reste encore largement marginal, même s’il va croissant. Ainsi, selon le dernier pointage du système de transaction SWIFT, la part du yuan dans le commerce international était de 2,77% contre 1,81% il y a un an.

De même, à la fin du premier trimestre de cette année, la part de la devise chinoise dans les réserves mondiales de change s’élevait à 2,58%, sans commune mesure avec celle du dollar (59,02%), de l’euro (19,77%), et même du yen (5,47%), ou de la livre sterling (4,85%), selon les données du Fonds monétaire international (FMI)

La monnaie chinoise en baisse

La monnaie chinoise en baisse


Conséquence des difficultés que connaît la Chine sur le plan économique, la monnaie continue de perdre de la valeur notamment par rapport au dollar. La Chine connaît en effet une crise financière grave affecte en particulier l’immobilier mais aussi les finances des collectivités locales. Par ailleurs les exportations sont en retrait et la consommation ne prend pas le relais. Le doute concernant l’efficacité de la politique imposée par le président Xi commence à se propager dans les couches moyennes. Le cours du yuan évoluait vendredi dans l’après-midi autour de 7,308 yuans pour un dollar après avoir atteint la veille son plus bas point depuis novembre, à 7,3175. Sur un an, le billet vert s’est apprécié de près de 7% face au yuan.

« Les difficultés des marchés chinois ont pris de l’ampleur au cours de la semaine écoulée, avec une série de données économiques décevantes et de nouvelles négatives concernant les secteurs de l’immobilier et de la banque », commente Tommy Wu, analyste chez Commerzbank, cité par l’AFP.

Ainsi, les ventes au détail ont été moins fortes qu’attendu en juillet, la production industrielle continue à ralentir. Pékin a même suspendu mardi la publication mensuelle de ses chiffres détaillés de chômage chez les jeunes, après le niveau record atteint ces derniers mois.

Monnaie-L’Euro, bourreau et sauveur

Monnaie-L’Euro, bourreau et sauveur

L’Euro, bourreau et sauveur

L’euro constitue souvent le moyen simpliste de reporter sur la monnaie européenne nombre de maux dont souffre la France notamment la hausse des prix.

On sait cependant que les Français ne se caractérisent pas par une grande connaissance dans le domaine financier. Le groupe Allianz qui avait effectué un sondage sur 19 pays a d’ailleurs démontré que dans ce domaine la France occupait la place peu enviable de dernière en matière de culture financière.

Reste cependant que les Français ne changeraient plus maintenant l’euro contre le franc. Sans doute parce qu’inconsciemment, ils se rendent compte de la solidité de la monnaie européenne qui ne maintient son niveau que grâce à la compétitivité globale de l’Europe et notamment aux exportations allemandes.

Il est clair que dans l’hypothèse d’un retour du franc, on assisterait immédiatement à une dévaluation puisqu’en général on considère que La surévaluation de l’euro en France est d’environ 20 à 25 % par rapport à l’Allemagne.

L’euro d’un certain point de vue et en dépit de l’inflation actuelle maintient un certain niveau de pouvoir d’achat. Reste que c’est quand même un handicap pour les économies aussi peu compétitives que celle de la France. Cela freine les exportations et au contraire d’une certaine manière favorise les importations. Pour preuve, le déséquilibre extraordinaire de la balance commerciale de la France surtout en 2022. Un résultat dû à un manque de productivité globale, un manque de travail général de la population active et un écroulement de l’industrie.

Les Allemands n’ont pas totalement tort de considérer que la France vit au-dessus de ses moyens et surtout à ses crochets. Mais l’Allemagne a également tout fait pour affaiblir le développement industriel en France par exemple en tuant la politique énergique du pays avec une folle libéralisation des prix. Une majorité de Français est pour l’euro alors qu’il y a dix ans, en pleine crise des dettes souveraines, près d’un sur trois souhaitait le retour au franc. Ils jugent les diverses fonctions de la monnaie européenne dans le contexte actuel de crise et d’inflation.

71 % des Français estiment que l’euro est une bonne chose pour la France. Sa popularité est de 69 % dans les autres pays qui l’ont adopté comme monnaie. (iStock)

En France, 71 % de la population estime que l’euro est une bonne chose pour le pays, et 18 % sont d’un avis opposé, selon le dernier sondage de l’Eurobaromètre en octobre. Il y a plus de dix ans, en pleine crise de la zone euro, 30 % des Français voulaient revenir au franc, selon un sondage TNS Sofres réalisé pour la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol).
L’attachement à une monnaie reflète la confiance dans sa capacité à conserver une valeur stable même dans les crises. Le taux de change global de l’euro est en légère hausse cette année. En 2022, la monnaie européenne a baissé essentiellement contre le dollar (-6,6 %), une chute qui favorise l’inflation en France.

La monnaie et l’éthique

La monnaie et l’éthique ( François Villeroy de Galhau)

« La guerre russe en Ukraine nous met au défi d’un dialogue à réinventer avec les autorités politiques », écrit le gouverneur de la Banque de France qui défend le concept d’ éthique de la monnaie.

Un article intéressant mais qui peine cependant à convaincre des dimensions éthiques de la monnaie et de son influence bénéfique sur les marchés des matières premières, de l’énergie mais aussi sur la croissance, la cohésion sociale et même l’environnement.La politique monétaire entretient déjà des relations difficiles avec la seule économie notamment en ce moment vis-à-vis de l’inflation. Lui attribuer d’autres vertus relève d’une surévaluation non documentée des Banques centrales et de la monnaie. Un article qui manque sérieusement d’argumentation scientifique NDLR

L’actualité brûlante – ô combien – ne doit pas nous faire oublier les caps longs ; c’est la leçon de sagesse d’un Michel Camdessus et de ses 89 ans. L’homo economicus a inventé la monnaie très tôt dans l’histoire de l’humanité. Presque aussitôt après, d’innombrables pratiques abusives furent observées : trafic du poids d’or ou d’argent, balances faussées… Les hommes ont dès lors rapidement invoqué l’éthique.

Si l’éthique de l’argent peut se résumer par ces mots de Dumas fils, « l’argent est un bon serviteur, mais un mauvais maître », je parlerai plutôt ici d’éthique de la monnaie. Sa première spécificité, c’est sa dimension « souveraine » : il n’y a pas de monnaie sans autorité publique qui la garantisse et en soit responsable. Il a fallu beaucoup de temps, jusqu’au XIXe siècle avec la création des banques centrales et l’émission des premiers billets de banque, pour que se « dématérialise » la confiance en la monnaie. Pour nous, banques centrales, cette confiance repose sur trois éléments clés, certes différents, mais étroitement imbriqués… et remis en cause aujourd’hui.

L’indépendance d’abord, aujourd’hui inscrite dans les statuts de la plupart des banques centrales – et notamment ceux de l’Eurosystème – depuis la fin du XXe siècle. Mais indépendance n’est pas isolement. La guerre russe en Ukraine nous met au défi d’un dialogue à réinventer avec les autorités politiques : parce que la géopolitique est aujourd’hui un déterminant majeur de l’économie, et parce que le marché de l’énergie, sa régulation et la fixation de ses prix sont clés pour l’inflation.

Ensuite le mandat : la stabilité des prix est aujourd’hui le mandat premier de la plupart des banques centrales. Certaines en ont des plus larges, comme la Fed qui inclut l’emploi ; d’autres se sont montrées sensibles au changement climatique ou aux inégalités. Certains observateurs se demandent alors si les banques centrales ne perdent pas de vue leur prime responsabilité.
Objectifs secondaires. Dans ce contexte, à l’éthique de conviction, je préfère l’éthique de responsabilité – qui favorise le réalisme et un mandat plus ciblé.

Le mandat de l’Eurosystème est clairement hiérarchisé entre un objectif principal de stabilité des prix qui, seulement s’il est atteint, nous amène à contribuer à des objectifs secondaires : croissance, cohésion sociale, environnement. L’engagement fort de l’Eurosystème à lutter contre le changement climatique est pleinement justifié par les profondes conséquences de celui-ci sur la stabilité des prix, en raison de ses effets sur l’activité et le système financier.

Enfin, les banques centrales doivent rendre compte de manière compréhensible de nos décisions de politique monétaire, même complexes. Notre communication doit résister au risque de « dominance politique » ou de « dominance des marchés » qui irait à l’encontre de notre indépendance, mais aussi à la dictature du court-termisme, liée à la récente série de crises.

Pour conclure, la confiance s’appuie sur des fondations humaines essentielles, patiemment construites au fil du temps. Les réunions internationales auxquelles participent les banquiers centraux ne sont pas des lieux d’accords banals, mais des forums de véritable dialogue fondé sur un diagnostic commun, où nous partageons nos préoccupations : autant d’échanges qui ne seront pas divulgués, instrumentalisés ou déformés. C’est la meilleure manière pour que nous avancions ensemble. Ainsi, dans les eaux agitées où nous, banquiers centraux, naviguons, l’éthique de la monnaie doit plus que jamais servir de fil conducteur.

Francois Villeroy de Galhau est gouverneur de la Banque de France. Ce texte est issu de son discours prononcé le 14 septembre 2022 au Fonds Monétaire International à Washington, dans le cadre des conférences Michel Camdessus.

Monnaie: La chute du yen

Monnaie: La chute du yen

Depuis septembre, le Japon intervient sur le marché des changes en procédant à des achats massifs de yens en dollars afin de stabiliser sa monnaie qui flirte avec ses plus bas niveaux depuis 32 ans face au billet vert. Le yen a perdu 20 % depuis le début de l’année par rapport au dollar.

Parmi les facteurs explicatifs, la grande différence de politique monétaire avec d’un côté les Américains qui procèdent à des relèvements significatifs des taux d’intérêt et inversement une banque centrale japonaise qui maintient des taux très bas pour ne pas tuer la croissance.

On retrouve la même problématique dans d’autres pays quant au rapport entre l’inflation et la croissance. Une monnaie faible constitue en effet un atout pour faciliter les exportations, à l’inverse les importations voient leur prix se renchérir.

Malgré une inflation nationale évoluant depuis avril au-delà de son objectif (2% hors produits frais) et ayant accéléré en septembre à 3% sur un an, la BoJ estime que les conditions ne sont pas encore réunies pour un resserrement monétaire au Japon.

Il est clair que le Japon donne priorité à la croissance par rapport à la politique monétaire.
Ainsi le Japon a lancé un énorme plan de relance de 266 milliards d’euros (39.000 milliards de yens) .

Le mois dernier, la Banque du Japon (BoJ) a abaissé à 2,4% sa prévision de croissance du PIB en 2022/23, contre 2,9% lors de ses précédents pronostics en avril. Mais elle a relevé de 0,1 point sa perspective de croissance pour 2023/24, à 2%.

Le sursaut du dernier trimestre ne cache qu’à peine le problème de fond rencontré par l’économie japonaise. Son moteur historique, le commerce extérieur, continue d’être freiné par les confinements chinois et par la chute du yen. Résultat : le pays affiche un déficit commercial depuis août 2021, soit près d’un an.

Cette mauvaise passe du commerce extérieur alimente un cercle vicieux, puisqu’il alimente l’instabilité du yen, qui elle-même influence la balance commerciale… Malgré cette situation, la Banque du Japon insiste sur sa politique monétaire ultra-accommodante pour lutter contre l’inflation .

Le bitcoin, monnaie légale, s’écroule au Salvador

Le bitcoin, monnaie légale, s’écroule au Salvador

Le bitcoin comme monnaie légale au Salvador s’écroule non seulement en raison de la baisse considérable de sa valeur mais aussi en raison de sa non utilisation.

En septembre 2021, le bitcoin tournait autour de 45.000 dollars, puis en novembre il a atteint 68.000 dollars mais après une chute vertigineuse il se négocie actuellement sous les 20.000 dollars.
Le bitcoin, dont les cours sont à la baisse, esten fait utilisé par une minorité de Salvadoriens qui considèrent ce pari emblématique du président Nayib Bukele comme «un échec», selon une enquête universitaire publiée mardi. Quelque 75,6% des personnes interrogées disent n’avoir jamais utilisé la cryptomonnaie en 2022, et 77% considèrent que son adoption il y a 14 mois comme monnaie légale, à côté du dollar, «a été un échec», révèle le sondage mené par l’Université jésuite d’Amérique centrale (UCA).

Le bitcoin «est la mesure la plus impopulaire du gouvernement, la plus critiquée et la plus mal appréciée», a déclaré le recteur de l’UCA, Andreu Oliva, commentant les résultats de l’étude. L’idée du président Bukele était de favoriser les transferts d’argent des quelque 3 millions d’émigrés, principalement aux Etats-Unis, vers leurs proches restés au pays, en économisant les frais bancaires. Un enjeu stratégique, puisque ces transferts pèsent plus du quart du PIB du Salvador. Mais selon les données de la Banque centrale salvadorienne début septembre, un an après l’instauration du bitcoin, «moins de 2%» des envois d’argent des émigrés sont passés par la cryptomonnaie. En septembre 2021, le bitcoin tournait autour de 45.000 dollars, puis en novembre il a atteint 68.000 dollars mais après une chute vertigineuse il se négocie actuellement sous les 20.000 dollars.

Monnaie numérique: L’Europe en retard

 Monnaie numérique: L’Europe en retard

Par Rafik Ammar est chargé de la communication et du développement au sein de l’Association française des trésoriers d’entreprise (AFTE) dans l’Opinion .

 

 

 

Les nouveaux systèmes de paiement sont d’importance mondiale. Les autorités des différentes juridictions doivent veiller à la conformité de leurs principes et règles à ceux pratiqués au niveau international. Le rôle des autorités est de veiller à l’existence de règles qui encouragent la concurrence entre fournisseurs tout en utilisant une approche réglementaire neutre sur le plan technologique. Afin de créer une réglementation prudente pour les émetteurs et les consommateurs, l’Union européenne devrait établir des exigences spécifiques pour l’obtention d’une licence bancaire par les nouveaux organismes.

Les stablecoins ou cryptomonnaies stables ont un caractère mondial, elles existent dans de nombreux pays et beaucoup d’autres les adopteront à l’avenir. La Chine est l’un des pays les plus avancés dans l’utilisation de la blockchain avec son projet pilote sur le yuan numérique annoncé en 2020. Elle a inclus des dispositions relatives à la monnaie numérique dans le champ d’application de la loi.

Face à ces initiatives, l’UE est à la traîne. En revanche, le Royaume-Uni fait des progrès. Le comité de politique financière de sa banque centrale doit publier un rapport sur les effets des stablecoins, qui traitera aussi d’une monnaie numérique de banque centrale. Il cherche à montrer comment le système de réglementation devrait être ajusté pour garantir la confiance tout en soutenant l’innovation.

De nombreux pays n’ont pas de base juridique nationale et ne considèrent pas les monnaies numériques comme égales à la monnaie fiduciaire en raison de leur valeur instable. De ce fait, les fournisseurs de stablecoins ne sont pas protégés. Pour parvenir à une réglementation mondiale, des règles doivent être créées en matière d’informations fournies par les clients aux émetteurs. Les utilisateurs de ces monnaies doivent savoir comment leurs données personnelles sont utilisées et stockées. Actuellement, banques et sociétés de crédit sont réglementées par des lois dans tous les pays et un niveau de réglementation similaire devrait s’appliquer en matière de monnaie numérique.

Au niveau de l’UE, la législation qui doit régir l’utilisation des stablecoins en tant que catégorie de monnaies numériques est la « Réglementation des marchés des crypto-actifs » (MiCA). Voici quelques points d’améliorations souhaitables. Une différenciation plus claire est nécessaire entre plateformes de monnaie électronique, stablecoins à domaine ouvert, et projets d’entreprise qui doivent être soutenus de manière appropriée sur le plan fiscal. Des normes techniques de réglementation doivent être publiées par les autorités européennes de surveillance afin de remédier à toute ambiguïté sur la distinction entre les crypto-actifs, au titre de MiCA, et les instruments financiers, si une telle ambiguïté survenait avec le développement du secteur.

Le règlement européen devrait prévoir des règles plus proportionnées afin d’inciter les petites entreprises à entrer sur le marché, notamment en fixant des exigences de fonds propres à un niveau raisonnablement élevé. Il faut alléger les obligations disproportionnées imposées aux entreprises par la législation et encourager l’innovation afin de retrouver plus de souveraineté dans le secteur financier. L’UE doit rebattre les cartes dans la course à la création de monnaie numérique de banque centrale.

Rafik Ammar est chargé de la communication et du développement au sein de l’Association française des trésoriers d’entreprise (AFTE).

Monnaie: « La fin du cash »

 

 Monnaie: « La fin du cash » 

 

par David Lacombled, David Lacombled , président de la Villa numéris ( dans l’Opinion)

 

 

 

Aucun objet ou support ne semblent échapper à la dématérialisation fut-elle la plupart du temps une rematérialisation. Certes les CD ont disparu au profit de fichiers mais il faut toujours une machine, hier un lecteur, aujourd’hui un smartphone, pour écouter de la musique. Il en va de même pour la monnaie qui semble vouée à disparaître. La crise sanitaire est passée par là. Le «sans contact» est désormais bien pris en main. Neuf Français sur dix l’utilisent. Le changement de plafond, de 30 à 50 euros en mai 2020 a servi d’accélérateur. Les solutions mobiles permettent de s’en affranchir et d’aller au-delà. Même si les transactions du quotidien se font encore majoritairement en espèces sonnantes et trébuchantes, le volume du «sans contact» est multiplié par deux chaque année, depuis 2016, selon une étude de la Banque centrale européenne.

Autre signe du recul des espèces, le nombre de distributeurs automatiques de billets (DAB) baisse significativement selon un « Etat des lieux de l’accès du public aux espèces en France métropolitaine » publié lundi par la Banque de France. Sur un total de 48 831 distributeurs, près de 1000 ont été enlevés au cours de l’année écoulée, essentiellement dans « les villes les plus peuplées et les mieux équipées ». Pour des établissements bancaires soucieux d’optimiser leurs circuits de distribution, le défi sera de maintenir un réseau sur l’ensemble du territoire, au plus proche de personnes plus âgées et moins connectées, donc plus coûteux.

 

 

Les décideurs publics l’ont bien compris. Hâter le mouvement serait explosif. Les transformations sont toujours plus efficaces quand elles ne sont pas imposées. La démonétisation à marche forcée en Inde, à partir de 2016, s’est soldée par un échec, faisant perdre au pays un point de produit intérieur brut (PIB) sans pour autant stopper les circuits illicites, l’argent au noir et recouvrir plus de taxes. Le cash a retrouvé ses niveaux d’antan et continue d’irriguer des économies parallèles.

Intraçable, le liquide est la monnaie de l’économie souterraine. Le travail au noir ou au gris (seule une partie des heures travaillées est déclarée) constitue une réalité palpable. Difficile à quantifier par nature, son poids est estimé à 12% du PIB en France. Il existe de fortes disparités y compris en Europe. Y couper court radicalement mettrait à mal l’édifice tant l’économie de plus en plus en plus dématérialisée a aussi besoin de petites mains qui s’avèrent précieuses. Certainement de nombreux métiers viendraient-ils à disparaître sans la circulation de liquide car ils ne résisteraient pas à l’accumulation des charges. En cela, la défiscalisation des pourboires versés dans l’hôtellerie ou la restauration, quel que soit le mode de règlement, est un signal encourageant même si elle reste cantonnée aux années 2022 et 2023. Un bilan s’imposera pour en apprécier pleinement la portée sur des métiers dont on voit bien qu’il faudrait des mesures autrement plus incitatives pour les revaloriser, à commencer par une baisse des charges.

Alors que l’inflation des prix accroît les tensions du quotidien, où de nombreuses familles comptent à l’euro près, face au marché, une nouvelle économie de subsistance se fait jour, faite d’entraide et de débrouille aussi parfois, d’échanges non monétaires la plupart du temps. Loin d’être irréconciliables, ces économies se nourrissent l’une de l’autre sans jamais se croiser. Sans être encouragée, l’économie parallèle ne saurait être niée. C’est bien là que la puissance publique se doit d’être imaginative pour inventer de nouveaux modèles dans lesquels les citoyens se retrouvent parce qu’ils peuvent être utiles aux autres aussi.

David Lacombled est président de la Villa numéris.

La monnaie numérique au service du développement

La monnaie numérique au service du développement

Agustin Carstens

Directeur général de la Banque des règlements internationaux

La reine Maxima des Pays-Bas

mandataire spéciale du secrétaire général des Nations-unies pour l’inclusion financière au service du développement

 

La reine des Pays-Bas et le directeur de la Banque des règlements internationaux recommandent, dans une chronique au « Monde », aux banques centrales de faire du numérique l’outil d’inclusion financière des plus pauvres.

 

Chronique.

Les banques centrales du monde entier débattent de la question d’émettre ou non leurs propres monnaies numériques (MNBC). Celles-ci doivent être conçues et mises en œuvre de façon à garantir aux personnes « non bancarisées » un accès aux services financiers essentiels.

Selon la Banque mondiale, 1,7 milliard d’adultes dans le monde n’ont pas accès aux services du secteur financier formel et doivent recourir à des solutions de rechange, souvent à un coût ou à un risque important. Cette exclusion financière aggrave la pauvreté et la fragilité face aux difficultés de la vie, limite les chances, étouffe l’espoir d’un avenir meilleur.
Les gens ont besoin d’un moyen rapide, sûr et bon marché de transférer de l’argent. A ce jour, les banques centrales ont largement répondu à ce besoin en fournissant la forme la plus inclusive de monnaie dont nous disposons actuellement : l’argent liquide. Mais la seule utilisation de l’argent liquide exclut les personnes non bancarisées du système financier formel et des services financiers, en particulier du crédit.

Or le paysage des paiements est en train de changer, en raison de l’adoption généralisée des technologies numériques et mobiles, une tendance accélérée par la pandémie de Covid-19. Il est donc impératif d’atténuer l’écart numérique grandissant d’accès aux services financiers.

Les services traditionnels ont des coûts et des exigences potentiellement prohibitifs, tels que les frais de transaction, les soldes de compte minimum ou les preuves d’identification formelle. Par ailleurs, certains groupes sociaux ont un faible niveau de confiance dans les paiements numériques, ou sont peu équipés de smartphones.

Les MNBC, par leur nature même, contiennent les avantages uniques d’une monnaie de banque centrale – la sécurité, la finalité, la liquidité et l’intégrité. Elles peuvent contourner de nombreux intérêts commerciaux acquis qui se sont créés autour des systèmes de paiement, et qui ont contribué à leurs coûts élevés pour les utilisateurs. Elles peuvent également réduire les risques de crédit et de liquidité inhérents à d’autres formes de monnaie numérique. Une MNBC a le potentiel de mettre à niveau et de connecter des systèmes de paiement – à la fois au niveau national et au-delà des frontières. Cela pourrait inciter les pays dont les infrastructures financières sont limitées à passer directement à une MNBC, offrant ainsi à chacun la possibilité de se connecter à un système de paiement inclusif, sûr et efficace.

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