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France : un modèle de digitalisation ?

 France : un modèle de digitalisation ?

 

 

Thibault Lanxade propose que la France devienne un modèle de digitalisation dans une tribune à l’Opinion

 

« Il est temps d’intégrer la souveraineté numérique dans les missions régaliennes de l’Etat »

 

 

La France, rétive à la digitalisation ? Pas vraiment ! Si pendant longtemps notre pays s’est montré timide, hésitant, parfois résistant face à la transformation digitale, les choses ont bien changé. Ce revirement est d’autant plus sensible qu’il tire sa force des citoyens eux-mêmes qui se sont approprié le numérique dans leurs vies de tous les jours.

La France s’est approprié massivement les réseaux sociaux, elle a rattrapé son retard en matière de e-commerce, et après 15 mois de crise sanitaire, elle est familière d’une médecine digitalisée avec prise de rendez-vous numérique et téléconsultations ! Nous sommes entrés dans une nouvelle phase d’accélération de la transformation digitale. C’est une réalité dont il faut se réjouir et ce, à plus d’un titre !

Embrasser la digitalisation, c’est assurer la souveraineté numérique de notre pays et jouer un jeu égal avec nos partenaires comme nos concurrents. La France, parmi ses innombrables talents, possède les savoir-faire, les expertises, la maîtrise technologique. Le rôle clé de notre pays dans la protection des données personnelles avec le RGPD, standard Européen qui a redéfini les bases du respect de la vie privée, n’est qu’un exemple du rôle moteur de la France dans un univers numérique ultra-concurrentiel.

Parmi les missions régaliennes de l’Etat, l’on cite toujours la nécessité d’assurer la sécurité extérieure par la diplomatie et la défense du territoire ; la sécurité intérieure et le maintien de l’ordre public ; de garantir le droit et de rendre la justice ; ou encore d’assurer la souveraineté monétaire et budgétaire. Il est temps désormais d’intégrer la notion de souveraineté numérique dans cet inventaire. Comment ? En créant une méta-plateforme numérique, une plateforme des plateformes conçue pour faciliter les échanges d’information, fluidifier les interactions entre entreprises, entre les administrations…

C’est à l’Etat qu’incombe la responsabilité d’insuffler l’énergie nécessaire pour créer cette dynamique vertueuse en faveur d’une France digitale forte, ambitieuse, libérée des carcans du passé et des résistances inutiles

L’objectif : accélérer la transformation numérique, en misant et en stimulant l’engagement des citoyens dans cet effort transformationnel collectif. C’est à l’Etat qu’incombe la responsabilité d’insuffler l’énergie nécessaire pour créer cette dynamique vertueuse en faveur d’une France digitale forte, ambitieuse, libérée des carcans du passé et des résistances inutiles.

Les entreprises ont démontré, au cours de cette folle année 2020, leur capacité d’adaptation, leur résilience et leur flexibilité. Partout, dans les territoires, elles ont contribué à cette digitalisation à marche forcée. Aux autorités maintenant, de soutenir cet effort, de le pérenniser, de l’amplifier, en facilitant par exemple l’accès au très haut débit fixe et mobile au plus près des acteurs économiques.

Nos pouvoirs publics doivent plus que jamais faire preuve de courage politique pour porter à son paroxysme, l’élan qui nous permettra de faire rayonner notre pays, ses entreprises, son tissu économique au rang de modèle digital… et d’incarner la puissance du modèle « French Tech », dans le monde entier.

Thibault Lanxade est PDG du groupe Jouve

Environnement et croissance : changer de modèle économique

Environnement et croissance : changer de modèle économique

A l’occasion des Rencontres économiques d’Aix-en-Provence organisées du 2 au 4 juillet, « Le Monde » publie le texte d’Océane Mascaro, âgée de 20 ans, mention spéciale du jury de l’opération « La Parole aux 18-28 » organisée dans le cadre de cet événement.

(Une problématique cependant particulièrement complexe et qui impose une gestion dans le temps NDLR)

 

Tribune.

« Résilience » : en agroécologie, ce terme renvoie à la capacité d’un écosystème donné à revenir à son état antérieur après un choc, par exemple une catastrophe climatique. Mouvement de balancier, donc : état A, crise, retour à l’état A. L’avènement d’un état B serait pensé sur le mode de la perturbation, d’un système n’étant pas parvenu à revenir à son état « normal ».

Il est amusant de constater combien cette normalité caractérisée par la stabilité s’applique mal à notre système socio-économique. Le fonctionnement « normal » d’un système de production ne garantit pas sa pérennité ; bien au contraire, le développement du capitalisme peut miner ses propres fondements. Caractérisé par l’ouverture toujours accrue de nouveaux marchés, ce mode de fonctionnement est voué à rencontrer des limites matérielles. Pour reprendre un poncif « décroissantiste », une croissance infinie dans un monde fini est impossible.

Accumulation, extension… Dans les termes, la promotion de ces valeurs semble antithétique avec celle de stabilité, sauf à considérer une stabilité toujours reconquise in extremis, par une accumulation de pansements apposés sur des failles systémiques. C’est d’ailleurs souvent en ce sens qu’est abordé le concept de résilience dans le débat public.

Face à une crise, comment résister ? Comment parvenir à revenir, en mobilisant toutes nos forces, à la situation précédant la crise ? Résistance subie, attente se dressant exclusivement contre les perturbations ponctuelles, tendue vers l’espérance d’un retour. Cela ne devrait fonctionner que si la situation initiale était idyllique ; mais celle-ci étant structurellement instable, ce retour ne peut être que temporaire – et voué à la décrépitude.

Prenons l’exemple des indicateurs de la crise.

Jauger la crise à l’aune des indicateurs classiques est problématique, parce que les instruments finissent souvent par être considérés comme objectifs. Si l’on pointe par exemple l’effet de la pandémie et des restrictions qui l’ont accompagnée sur le secteur du tourisme, notre conservatisme instinctif – ainsi que notre désir de protéger les moyens de subsistance des travailleurs qui s’y dédient – nous mène à envisager comme horizon immédiat le rétablissement de son niveau d’activité.

Or un tourisme mondialisé, à haute fréquence, et qui ne va qu’en s’amplifiant, est proprement incompatible avec un souci de gestion écologique des ressources. Ne serait-ce que pour les émissions de gaz à effet de serre liées à l’aviation : en 2011, le secteur aérien a contribué à hauteur de 3,5 % au réchauffement climatique.

Environnement : changer de modèle économique

Environnement : changer de modèle économique

A l’occasion des Rencontres économiques d’Aix-en-Provence organisées du 2 au 4 juillet, « Le Monde » publie le texte d’Océane Mascaro, âgée de 20 ans, mention spéciale du jury de l’opération « La Parole aux 18-28 » organisée dans le cadre de cet événement.

 

Tribune.

« Résilience » : en agroécologie, ce terme renvoie à la capacité d’un écosystème donné à revenir à son état antérieur après un choc, par exemple une catastrophe climatique. Mouvement de balancier, donc : état A, crise, retour à l’état A. L’avènement d’un état B serait pensé sur le mode de la perturbation, d’un système n’étant pas parvenu à revenir à son état « normal ».

Il est amusant de constater combien cette normalité caractérisée par la stabilité s’applique mal à notre système socio-économique. Le fonctionnement « normal » d’un système de production ne garantit pas sa pérennité ; bien au contraire, le développement du capitalisme peut miner ses propres fondements. Caractérisé par l’ouverture toujours accrue de nouveaux marchés, ce mode de fonctionnement est voué à rencontrer des limites matérielles. Pour reprendre un poncif « décroissantiste », une croissance infinie dans un monde fini est impossible.

Accumulation, extension… Dans les termes, la promotion de ces valeurs semble antithétique avec celle de stabilité, sauf à considérer une stabilité toujours reconquise in extremis, par une accumulation de pansements apposés sur des failles systémiques. C’est d’ailleurs souvent en ce sens qu’est abordé le concept de résilience dans le débat public.

Face à une crise, comment résister ? Comment parvenir à revenir, en mobilisant toutes nos forces, à la situation précédant la crise ? Résistance subie, attente se dressant exclusivement contre les perturbations ponctuelles, tendue vers l’espérance d’un retour. Cela ne devrait fonctionner que si la situation initiale était idyllique ; mais celle-ci étant structurellement instable, ce retour ne peut être que temporaire – et voué à la décrépitude.

Prenons l’exemple des indicateurs de la crise.

Jauger la crise à l’aune des indicateurs classiques est problématique, parce que les instruments finissent souvent par être considérés comme objectifs. Si l’on pointe par exemple l’effet de la pandémie et des restrictions qui l’ont accompagnée sur le secteur du tourisme, notre conservatisme instinctif – ainsi que notre désir de protéger les moyens de subsistance des travailleurs qui s’y dédient – nous mène à envisager comme horizon immédiat le rétablissement de son niveau d’activité.

Or un tourisme mondialisé, à haute fréquence, et qui ne va qu’en s’amplifiant, est proprement incompatible avec un souci de gestion écologique des ressources. Ne serait-ce que pour les émissions de gaz à effet de serre liées à l’aviation : en 2011, le secteur aérien a contribué à hauteur de 3,5 % au réchauffement climatique.

Le modèle Essilor pour devenir une entreprise de stature mondiale

Le modèle Essilor pour devenir une entreprise de stature mondiale

 

 

Xavier Fontanet, son PDG de 1991 à 2010, raconte l’aventure de l’entreprise Essilor, devenue un leader mondial du marché du verre ophtalmique. La Tribune évoque le récit de cette réussite.

 

Onze ans après avoir quitté ses fonctions de président directeur-général, Xavier Fontanet a pris la plume pour expliquer dans un ouvrage (1) l’essor fulgurant d’Essilor au cours des deux décennies pendant lesquelles l’entreprise se mondialise et devient un leader incontesté du marché du verre ophtalmique. Cela ne s’est pas fait sans gros efforts, nous dit l’auteur, mais ce qui émane avant tout de ce livre, c’est un enthousiasme sans limite pour l’exploration et la conquête de parts de marché qui alimenteront une croissance industrielle durable, capable d’aligner les intérêts de toutes les parties prenantes : clients, collaborateurs, partenaires, fournisseurs, et actionnaires.

Essilor est une entreprise provinciale devenue leader mondial. En cette période difficile qui pose question sur la capacité française de préserver sa souveraineté, cet ouvrage est rafraîchissant. Il n’est sans doute pas possible de bien comprendre l’entreprise Essilor si on ne comprend pas bien les intérêts qu’elle sert. Elle est au service des personnes qui ne voient pas bien. Globalement, les Asiatiques sont assez myopes, en particulier les Chinois qui ont des yeux trop longs. A l’inverse, les Indiens auraient plutôt les yeux trop courts, c’est-à-dire qu’ils sont hypermétropes et deviennent presbytes. Partout, il faut pouvoir traiter les différents problèmes de vue qui varient aussi en fonction de l’âge. Or, nous explique Xavier Fontanet, des technologies différentes répondent à ces problèmes qui obéissent, qui plus est, à des structures de marché distinctes selon les pays.

A partir de la décision de recentrer l’activité d’Essilor autour du verre ophtalmique en abandonnant les contacts et les montures, l’entreprise va se focaliser exclusivement sur les verres. Elle va investir massivement dans le remplacement du verre minéral (celui de nos vitres) par des verres organiques et le verre progressif. Ce que l’on voit bien dans le livre, c’est comment ces innovations augmentent le service rendu aux individus. Le verre CR39 inventé par René Granperret, co-fondateur d’Essilor, « ne cassait pas, était beaucoup plus léger et coupait mieux les UV que les verres minéraux. » Ce sont eux qui ont rendu possible la réduction de l’épaisseur des verres des personnes souffrant de myopie. Quant aux progressifs, il va sans dire que le service rendu par ces verres qui permettent de voir de près, de loin et de manière intermédiaire est lui aussi indéniable.

C’est autour de ces atouts qu’a pu s’exprimer le génie de personnes comme Xavier Fontanet et celui de cette multitude de collaborateurs que l’ancien PDG nous fait découvrir, dans un hommage qui donne presque le tournis. Cela enfonce bien l’idée dans la tête du lecteur que la réussite d’Essilor est avant tout celle d’un collectif. Comme le précise Fontanet: « On vous dit souvent : ‘Attention, personne n’est irremplaçable… ’ Je ne suis absolument pas d’accord, les personnes sont clés. »

Et effectivement, la conquête par Essilor des marchés américains, chinois, indien, coréen, japonais, australien sud-américain reposait, au-delà des joint-ventures et acquisitions, sur les personnes que l’entreprise a su s’attacher. La description de l’embauche de He Yi pour la direction en Chine est particulièrement savoureuse. Il avait implanté les yaourts Danone dans l’Empire du milieu et semblait ouvert à de nouveaux défis. Fontanet raconte, qu’informé de l’opportunité un vendredi soir alors qu’il est en voiture avec toute sa famille pour aller passer un week-end en Normandie, il n’hésite pas à faire demi-tour sur l’autoroute pour prendre un avion pour Hong-Kong le soir même et boucler l’embauche le lendemain. Quand Fontanet parle de travailler dur, il sait et incarne et ce dont il parle.

Et c’est d’ailleurs une des marques de fabrique de la maison, dont on peut espérer qu’elle est toujours à l’ordre du jour, celle d’être véritablement capable de pratiquer la méritocratie. Comme l’écrit l’auteur : « ce qui compte, c’est d’avoir contribué [...] Cela me rappelle mon arrivée en 1991… On ne me présentait pas les gens en me donnant leur poste – directeur de ceci ou directrice de cela, on me disait : ‘celui que vous allez rencontrer, c’est celui qui a démarré l’usine de Manaus’, ‘c’est celle qui a conçu le soft qui a permis dans les années 2000 de gagner un jour sur les livraisons’… Essilor est une vraie méritocratie. »

Le livre passe en revue nombre d’éléments qui ont contribué au succès de l’entreprise. Qu’il s’agisse d’un marketing très créatif en Chine « le verre Essilor coule la concurrence » ou porter des lunettes c’est avoir de meilleures notes, du programme de « marketing rural » en Inde à partir d’une caravane capable d’équiper 200 personnes par jour avec des verres de prescription, de l’actionnariat salarié autour d’une association d’actionnaires salariés très impliqués, l’auteur résume les choses en deux clés essentielles. Il se dit convaincu « que les deux clés de la bonne marche d’une entreprise sont la confiance et la stratégie. La confiance, c’est la confiance en soi et la confiance en l’autre, parce que rien ne renforce plus la confiance en soi que la confiance que vous portent les autres. [...] Il faut, aussi, avoir confiance dans la stratégie. C’est là que c’est difficile, car il faut que la stratégie soit bonne, faute de quoi, les gens intelligents ne suivront pas. »

La saga Essilor est un ouvrage de stratégie décrivant les enjeux liés à la mondialisation d’une entreprise. Mais, c’est aussi l’histoire d’une entreprise industrielle allant à l’encontre de l’idée dévastatrice d’une « société sans usine », où la valeur se créerait avant tout dans la recherche, la communication et le marketing. Comme le montre bien le livre, la créativité opérationnelle, financière, marketing, informatique, juridique et technologique se nourrissent mutuellement. Séparer la production du reste, c’est se couper les ailes de la créativité. La France est aujourd’hui l’un des trois pays les plus désindustrialisés d’Europe et n’arrive pas à organiser une décrue massive de ses impôts de production, en dépit des ravages qu’ils font. Elle devrait méditer ce bel exemple français de création d’un champion industriel national devenu mondial et se demander comment faire en sorte d’en avoir plus.

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(1) Xavier Fontanet « Conquérir le monde avec son équipe », éditions Les Belles Lettres, collection Manitoba, 2021, 177 pages, 15 euros.

Macron pour «un nouveau modèle de prospérité» !

Macron pour  «un nouveau modèle de prospérité» !

 

Une nouvelle formule séduisante pour Macron : s’engager vers un nouveau modèle de prospérité mais une formule creuse sans véritable contenu qui se borne à rappeler l’art de vivre à la française. Une vague allusion à la relocalisation des productions agro alimentaires. Une allusion encore plus vague aux valeurs traditionnelles. Bref en même temps très floue et très allusive. «A partir du 19 mai ,  les Français «vont aspirer à retrouver l’art de vivre à la française, la convivialité», a-t-il déclaré devant des représentants de l’agroalimentaire. «Cette prospérité doit aider à produire en France dans les secteurs qui sont les vôtres, à retrouver un maillage sur le territoire».

 

Il a aussi jugé qu’«une prospérité mal maîtrisée qui détricotait les territoires, les défigurait, bousculait les chaînes de valeurs, n’était pas souhaitable».

Le chef de l’Etat a promis «d’utiliser ce redémarrage pour aller plus loin sur l’apprentissage», et évoqué un «deuxième temps» de la relance, avec des concertations menées cet été.

Bref une déclaration très vague qui  englobe beaucoup de sujets mais qui n’en éclaire pas beaucoup. Une manière aussi de faire un clin d’œil aux écolos en déclarant: P une manière a: «on est capable en France de faire du poulet à bas coût qu’on exporte en Arabie Saoudite»., Un modèle qu’il critique.

 

Le modèle des métropoles qui désertifie la France

 Le modèle des métropoles qui désertifie la France

L’historien Pierre Vermeren  dépeint dans son dernier livre (L’Impasse de la métropolisation) les bouleversements de l’organisation du territoire français et de notre société depuis quarante ans, marqués par la concentration de la production de richesse dans un petit nombre de très grandes agglomérations. Pour Le Figaro l’auteur explique l’ampleur et la brutalité de la mutation intervenue. Il en analyse les conséquences sociales selon lui catastrophiques pour la France.

Pierre Vermeren est normalien, agrégé et docteur en histoire. Auteur d’une dizaine d’ouvrages, tel On a cassé la République 150 ans d’histoire de la nation(Tallandier, 2020), il publie ce jeudi L’Impasse de la métropolisation(Gallimard, coll. «Le Débat»).


- La «métropolisation» caractérise les mutations de l’espace français depuis plusieurs décennies, expliquez-vous dans votre livre. Qu’est-ce que cela veut dire? Et pourquoi ce modèle vous semble-t-il à bout de souffle?

 

Pierre VERMEREN. - En quarante ans, la France a connu la plus grande mutation économique et sociale de son histoire. La métropolisation est une recomposition générale de la répartition des hommes, des espaces et des richesses sur notre territoire. Elle consiste en la concentration des classes aisées, des activités rentables et des anywhere - les mondialisés, par opposition aux enracinés – sur une petite partie du territoire.

 

Pandémie : une opportunité pour un nouveau modèle économique ?

Pandémie : une opportunité pour un nouveau modèle économique ?

 « La pandémie a provoqué un désastre sanitaire, économique et social, mais peut s’avérer être une chance pour développer un modèle économique de rupture » estime dans l’Opinion  William Thay e président du think-tank Le Millénaire, spécialisé en politiques publiques et portant un projet gaulliste et réformateur au service de la grandeur de la Franceet  Olivier Bodo est secrétaire général délégué du Millénaire.

 

La gestion de la crise sanitaire, économique et sociale ne sera considérée comme un échec que si nous ne pouvons pas en tirer les enseignements. Nous devons mettre en place les conditions nécessaires pour répondre aux problèmes conjoncturels hérités de la crise, mais également aux maux structurels français. Nous devons libérer donc les énergies pour faire de la France le paradis du travail grâce à notre cadre de vie.

Notre pays doit se préparer à effectuer une transition de son économie qui est sous perfusion. En effet, mis à part le transport aérien, le tourisme ou la restauration qui ont été immédiatement impactés, les autres secteurs de notre économie se stabilisent grâce aux dispositifs de soutien. De fait, la véritable crise va commencer au moment où ceux-ci vont disparaître. Cet arrêt conduira à une asphyxie des acteurs économiques aussi bien des ménages que des entreprises. C’est pourquoi ces mécanismes doivent être arrêtés progressivement pour permettre une transition en douceur.

Boulet.  erreurs. Pour en sortir renforcé, il est ainsi nécessaire de changer de modèle. La transformation de notre économie ne doit pas répondre uniquement aux problèmes engendrés par la crise sanitaire ; elle doit également répondre aux problèmes structurels qui existaient auparavant. La pandémie a révélé la faiblesse du système économique français fortement dépendant de la consommation des ménages ainsi que la vulnérabilité d’approvisionnement de certains secteurs liés à des structures de production essentiellement basées à l’étranger. De plus, elle a ouvert des perspectives intéressantes en termes d’opportunités : il y aura clairement un avant et un après Covid.

« Il est nécessaire de rompre avec notre politique économique fondée sur la consommation et les dépenses publiques »

Pour faire de la France le paradis du travail, il est nécessaire dans un premier temps de libérer les énergies des acteurs économiques pour leur redonner de l’oxygène tout en leur offrant un avantage comparatif. Tout d’abord, la diminution temporaire du taux de TVA dans les secteurs sinistrés doit encourager la consommation ou la reconstitution de la trésorerie des entreprises. Ensuite, une attention particulière devra être portée au niveau d’endettement des entreprises et au risque de faillite qui en découle. Pour cela, nous pouvons procéder à un allongement de la période de remboursement mais également, en ce qui concerne les PGE, envisager de supprimer le paiement des intérêts et limiter le remboursement au seul principal.

Enfin, la fiscalité française ne doit plus être un boulet, mais un avantage pour nos acteurs économiques. Pour cela, il faudrait aligner progressivement notre fiscalité sur celle du Royaume-Uni pour offrir un avantage comparatif à la France par rapport à ses voisins européens. Cet alignement passerait par une diminution du montant des cotisations sociales patronales, la baisse du montant de l’impôt sur les sociétés (IS) pour l’établir dès cette année à 25 % puis 20 % et la suppression de certains impôts de production qui sont une contre-logique économique.

Pour faire de la France le paradis du travail, il est nécessaire dans un second temps d’entamer des réformes structurelles. Tout d’abord, il est nécessaire de rompre avec notre politique économique fondée sur la consommation et les dépenses publiques. La France doit redevenir une nation d’industriels et de savants en se réindustrialisant et en montant en gamme tant en termes de production que de compétences humaines. Ensuite, nous pouvons renforcer l’attractivité des régions sinistrées grâce, notamment, aux mutations du monde du travail engendrées par la crise sanitaire. Cela nécessite le développement des moyens de communication à travers les réseaux internet et téléphonique ainsi que des infrastructures d’accueil et de transports. Enfin, les réformes fiscales doivent permettre de libérer des marges de manœuvre supplémentaires aux entreprises pour investir sur le capital humain. En effet, en améliorant le bien-être des salariés et en renforçant leurs compétences, les acteurs économiques devraient enregistrer des gains de productivité.

La pandémie a provoqué un désastre sanitaire, économique et social, mais peut s’avérer être une chance pour développer un modèle économique de rupture. En effet, nous pouvons profiter de notre cadre de vie jugé agréable pour favoriser l’attractivité de la France. Il s’agit ainsi de créer un cercle vertueux par une montée en gamme pour rompre avec le perpétuel nivellement par le bas afin de faire de notre pays le paradis du travail.

William Thay est président du think-tank Le Millénaire, spécialisé en politiques publiques et portant un projet gaulliste et réformateur au service de la grandeur de la France. Olivier Bodo est secrétaire général délégué du Millénaire.

Banque centrale : changer de modèle pour éviter la catastrophe environnementale et sociale

Banque centrale : changer de modèle pour éviter la catastrophe environnementale et sociale

 

L’économiste Barry Eichengreen affirme, dans sa chronique au Monde , que lutter contre le réchauffement et les inégalités pourrait entrer dans le mandat des banques centrales sans menacer leur indépendance.

Chronique.

 

Nous avons l’habitude de penser que la mission des banques centrales est de veiller à la stabilité des prix et au plus de cibler l’inflation en veillant à la fluidité du système de paiements. Mais avec la crise financière de 2008 et aujourd’hui celle du Covid-19, nous les avons vues intervenir pour soutenir un éventail de plus en plus large de marchés et d’activités, par exemple le système de prêts aux institutions financières venant en aide aux PME fragilisées par la pandémie, le Paycheck Protection Program Liquidity Facility, mis en place par la Réserve fédérale (Fed) des Etats-Unis. Cela n’a plus grand-chose à voir avec la banque centrale qu’a connue la génération de nos parents.

 

Aujourd’hui, Christine Lagarde, la présidente de la Banque centrale européenne (BCE), et Lael Brainard, qui siège au conseil des gouverneurs de la Fed, ont exhorté les banquiers centraux à l’action face au changement climatique. Dans le contexte du mouvement Black Lives Matter, Maxine Waters, députée de Californie à la Chambre des représentants des Etats-Unis, a incité le président de la Fed, Jerome Powell, à être plus actif concernant les inégalités, et plus encore les inégalités raciales.

Ces appels font pousser des hauts cris aux puristes, qui préviennent que, en chargeant de ces nouvelles responsabilités les banques centrales, on risque de les détourner de leur objectif premier, le contrôle de l’inflation. Surtout, ils craignent que cela ne compromette leur indépendance. L’idée selon laquelle leurs objectifs statutaires sont mieux servis par des mains qui ne dépendent pas d’un mandat électif fait consensus. Mais les banquiers centraux doivent justifier leurs actions et expliquer pourquoi les mesures qu’ils décident servent les objectifs fixés. Avec un mandat beaucoup plus étendu, la justification des mesures prises est plus difficile à communiquer, les succès ou les échecs, plus délicats à juger. Et, dans la mesure où la politique monétaire n’a qu’une influence limitée sur le changement climatique ou les inégalités, intégrer ces variables à leurs cibles, c’est condamner les banques centrales à l’échec, et leur indépendance opérationnelle pourrait alors être reconsidérée par des politiques que ces fiascos laisseraient insatisfaits.

Ces arguments ne sont pas sans pertinence. En même temps, les banquiers centraux ne peuvent s’abandonner à l’inaction alors que l’urgence demande que tout le monde soit à la manœuvre. Le changement climatique et le creusement des inégalités ouvrent des crises proprement existentielles. Si les banquiers centraux les ignoraient, cela apparaîtrait comme une démonstration hautaine et dangereuse de leur indifférence. Et leur indépendance serait dès lors réellement en danger.

Poste : le modèle en perpétuelle révision

Poste : le modèle en perpétuelle révision

Du fait de la crise sanitaire le courrier encore diminué en 2020 de leur de 20 %. Mais la baisse était déjà continue les années passées avec une baisse de 7 % annuelle. La Poste voit donc son modèle de manière quasi perpétuelle grâce aux nouveaux services notamment logistiques qui ne cessent  de grimper du fait du e-commerce (Colissimo a gagné des parts de marché l’an passé. Son chiffre d’affaires a grimpé de 20%.) et les services aux particuliers. Parallèlement La Poste développe son activité financière avec un certain succès ( CNP).

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La poste voudrait aussi solliciter les pouvoirs publics pour obtenir des compensations financières liées aux missions de service public de La Poste : accessibilité bancaire, aménagement du territoire, diffusion de la presse et service postal universel, avec notamment la distribution 6 jours sur 7 du courrier sur tout le territoire national. Alors que jusqu’en 2019, ce service universel s’équilibrait de lui-même avec le colis, Philippe Wahl estime que ce ne sera plus cas à l’avenir et qu’une compensation de l’État est désormais nécessaire. «La Poste ne peut réussir à se transformer avec un déficit structurel du service universel postal», martèle le PDG.

 

Le problème est que cette revendication risque de réveiller les services de distribution privés qui eux aussi effectuent des missions de service public mais sans le statut, ni les compensations.

Football français : un modèle qui va s’écrouler

Football français : un modèle qui va s’écrouler

Après l’échec financier de Mediapro et les effets délétères de la pandémie, le football traverse une crise économique durable et doit de toute urgence se réinventer, estime l’ancien président de club de Lens et de Nantes, Luc Dayan, dans une tribune au « Monde ».

 

Tribune.

 

Evoluant au sein d’un univers législatif et politique inadapté, encadré par un supposé contrôle des comptes bien inefficace, le football français n’a pas su, voulu ou pu penser son développement. L’échec de Mediapro et la pandémie de Covid-19 ne font que révéler plus rapidement que prévu les grandes faiblesses de notre football national.

Sans les multiples prêts garantis par l’Etat (PGE) contractés par la plupart des clubs, obtenus en s’appuyant sur des chiffres d’affaires gonflés par les ventes d’actifs – les joueurs –, le sinistre serait majeur. L’endettement de nos clubs est massif et ne date pas d’hier. Quelques actionnaires aux reins solides soutiennent la trésorerie de leurs clubs, mais pour combien de temps encore ? Quant aux autres, ils jonglent comme ils le peuvent…

Depuis vingt ans, le désordre, l’instabilité, la permissivité financière, voire morale, des instances, les comportements et les déclarations de certains footballeurs ou entraîneurs ont donné une mauvaise image de notre football. L’affaire du bus de Knysna, les litiges dont se sont estimés victimes certains clubs (Entente SSG, Luzenac, etc.), en raison de règlements interprétés « à la tête du client », les dépôts de bilan de clubs historiques comme Sedan, Strasbourg ou Bastia, le procès des affaires du PSG, celui des transferts à l’OM, les élections à la tête de la Ligue de football professionnel (LFP), reflet des conflits d’intérêts entre dirigeants de club également décideurs dans les instances, les conséquences de l’arrêt brutal du championnat 2019-2020, sans oublier les récurrentes affaires de mœurs ou les problèmes de gouvernance à la Fédération française de football (FFF) révélés récemment, la liste est longue. Et la justice, qui agit peu, et souvent avec retard.

Quant à certains journalistes, qui vivent de la bête, ils l’entretiennent pour mieux la tuer quand c’est leur intérêt. Il est plus facile pour eux de clouer au pilori joueurs ou dirigeants quand ils chutent, alors qu’ils les encensent quand ils gagnent, faisant vendre leurs journaux.

L’illusion collective qui a démarré après la Coupe du monde 1998 est désormais avérée. Les joueurs de l’équipe de France évoluant quasiment tous à l’étranger, le football de club est resté très faible en comparaison avec l’Angleterre, l’Allemagne, l’Espagne et même l’Italie. La formation française, qui est une des meilleures du monde, a profité de l’arrêt Bosman et a permis de rentrer de l’argent dans le système national, mais aux dépens de la qualité du jeu fourni. Le transfert de joueur est devenu l’outil d’une cavalerie salariale inflationniste entre clubs du monde entier. Ces transferts étant payés de façon étalée dans le temps, les créances que détiennent les clubs français seront en conséquence de moins en moins certaines.

Énergie :« Éolien : modèle pas durable « 

Énergie :« Éolien : modèle pas durable « 

Serge Savasta, Associé gérant du fonds d’investissement Omnes Capital, estime que le modèle éolien n’est pas durable ni économiquement ni écologiquement.(Chronique dans le Monde, extraits)

L’investisseur Serge Savasta affirme, dans une tribune au « Monde », que la production d’énergie éolienne ne peut être rentable que si les parcs atteignent une taille critique, au final moins préjudiciable à l’environnement que la multiplication de petits équipements.

Tribune. Aujourd’hui, de l’Espagne au Danemark, du Portugal à la Finlande, des PME construisent des centrales solaires et éoliennes terrestres qui produisent, sans aucune aide d’Etat, une des électricités les plus compétitives du monde, vendue entre 30 et 40 euros du mégawattheure à long terme à des clients privés.

Les retombées économiques sont excellentes : une énergie propre, bon marché et utile à la performance économique des entreprises, des revenus fonciers locaux, le financement de la mise à niveau des réseaux électriques, des taxes de toutes sortes…

Mais en France, nous n’en profitons pas.

Nous bénéficions pourtant d’un des meilleurs potentiels éoliens terrestre et solaire d’Europe. Mais nous persistons à pérenniser un système basé sur l’obligation d’EDF de racheter l’électricité d’origine solaire ou éolienne à un prix subventionné.

Bien sûr, ce système a été la clé de voûte du développement de la filière lorsque ces technologies n’étaient pas matures, mais nous pouvons dès aujourd’hui décider de nous en affranchir pour développer de grands projets sans aides d’Etat et ainsi permettre l’accélération de la transition énergétique de notre pays sans coût pour la collectivité.

Les subventions actuelles ne sont en effet que la contrepartie de contraintes imposées au nom de l’acceptabilité des énergies renouvelables. On peut s’en passer en construisant des éoliennes plus hautes et des centrales solaires plus grandes, car sur ces deux technologies, les effets d’échelle sont un facteur-clé de succès.

Or, il est aujourd’hui impossible d’obtenir des autorisations administratives qui le permettent. Et cela conduit à voir des projets de taille sous-optimale s’agglutiner dans les zones les plus ventées ou les plus ensoleillées, ce qui crée logiquement des oppositions locales exacerbées.

Naturellement, accepter de réduire les contraintes auxquelles sont exposées les centrales solaires et éoliennes, c’est prendre le risque politique de subir un peu plus, pour un temps en tout cas, la fronde de lobbies locaux et nationaux. Mais ce serait surtout décider de mettre enfin en œuvre une véritable stratégie de transition énergétique rentable. Et cela permettrait aussi de ne pas avoir à chercher des économies en remettant injustement en question des subventions accordées dans le passé à des centrales solaires qui en avaient pourtant besoin.

D’ailleurs, le risque politique lié à la réduction des contraintes est loin d’être insurmontable : un parc équipé de turbines hautes et puissantes nécessitera deux à trois fois moins d’éoliennes, ce qui réduira son impact visuel. Il pourra même être implanté dans des zones peu ventées, ce qui permettra de mieux répartir les capacités de production.

« Éolien : modèle pas durable « 

« Éolien : modèle pas durable « 

Serge Savasta, Associé gérant du fonds d’investissement Omnes Capital, estime que le modèle éolien n’est pas durable ni économiquement ni écologiquement.(Chronique dans le Monde, extraits)

L’investisseur Serge Savasta affirme, dans une tribune au « Monde », que la production d’énergie éolienne ne peut être rentable que si les parcs atteignent une taille critique, au final moins préjudiciable à l’environnement que la multiplication de petits équipements.

Tribune. Aujourd’hui, de l’Espagne au Danemark, du Portugal à la Finlande, des PME construisent des centrales solaires et éoliennes terrestres qui produisent, sans aucune aide d’Etat, une des électricités les plus compétitives du monde, vendue entre 30 et 40 euros du mégawattheure à long terme à des clients privés.

Les retombées économiques sont excellentes : une énergie propre, bon marché et utile à la performance économique des entreprises, des revenus fonciers locaux, le financement de la mise à niveau des réseaux électriques, des taxes de toutes sortes…

Mais en France, nous n’en profitons pas.

Nous bénéficions pourtant d’un des meilleurs potentiels éoliens terrestre et solaire d’Europe. Mais nous persistons à pérenniser un système basé sur l’obligation d’EDF de racheter l’électricité d’origine solaire ou éolienne à un prix subventionné.

Bien sûr, ce système a été la clé de voûte du développement de la filière lorsque ces technologies n’étaient pas matures, mais nous pouvons dès aujourd’hui décider de nous en affranchir pour développer de grands projets sans aides d’Etat et ainsi permettre l’accélération de la transition énergétique de notre pays sans coût pour la collectivité.

Les subventions actuelles ne sont en effet que la contrepartie de contraintes imposées au nom de l’acceptabilité des énergies renouvelables. On peut s’en passer en construisant des éoliennes plus hautes et des centrales solaires plus grandes, car sur ces deux technologies, les effets d’échelle sont un facteur-clé de succès.

Or, il est aujourd’hui impossible d’obtenir des autorisations administratives qui le permettent. Et cela conduit à voir des projets de taille sous-optimale s’agglutiner dans les zones les plus ventées ou les plus ensoleillées, ce qui crée logiquement des oppositions locales exacerbées.

Naturellement, accepter de réduire les contraintes auxquelles sont exposées les centrales solaires et éoliennes, c’est prendre le risque politique de subir un peu plus, pour un temps en tout cas, la fronde de lobbies locaux et nationaux. Mais ce serait surtout décider de mettre enfin en œuvre une véritable stratégie de transition énergétique rentable. Et cela permettrait aussi de ne pas avoir à chercher des économies en remettant injustement en question des subventions accordées dans le passé à des centrales solaires qui en avaient pourtant besoin.

D’ailleurs, le risque politique lié à la réduction des contraintes est loin d’être insurmontable : un parc équipé de turbines hautes et puissantes nécessitera deux à trois fois moins d’éoliennes, ce qui réduira son impact visuel. Il pourra même être implanté dans des zones peu ventées, ce qui permettra de mieux répartir les capacités de production.

«Le rééquilibrage du modèle économique chinois»

 «Le rééquilibrage du modèle économique chinois»

 

Pour l’économiste en charge de l’Asie chez Euler Hermes, la rapide reprise de son économie permet au gouvernement chinois d’envisager l’avenir avec une certaine sérénité, même si l’endettement demeure un sujet sensible (interview l’Opinion)

 

 

 

Moins d’un an après la sortie des chaînes de montage des premiers modèles produits dans son usine de Shanghai, Tesla a commencé à exporter, lundi, ses premières Model 3S made in China vers l’Europe. Plusieurs milliers d’exemplaires à destination des marchés français, belge, italien ou encore allemand ont été embarqués et devraient atteindre le Vieux continent à la fin du mois de novembre.

Comment analysez-vous la situation de la Chine aujourd’hui ?

La Chine est sortie de la crise avant tout le monde parce qu’elle a aussi été la première à avoir été frappée par la pandémie. Nous avions déjà noté en avril que les trois-quarts de l’économie étaient revenus au niveau d’avant la Covid, en particulier au niveau productif. La consommation a été plus lente à redémarrer. Malgré une courbe des contaminations rapidement maîtrisée, les Chinois ont mis plus de temps à retrouver le chemin de la confiance. Reste que le PIB est revenu au niveau de fin 2019 dès le deuxième trimestre. Cela a été possible grâce à des stimuli budgétaire et monétaire même si sur ce plan, il a été plus faible. Toutefois, compte tenu de la politique de désendettement mise en œuvre depuis 2017, l’initiative gouvernementale peut être considérée comme un retournement. La reprise de la production encouragée par les autorités s’est accompagnée d’un essor significatif des exportations. En effet, elles ont été soutenues par une forte demande en fournitures médicales, en produits électroniques — dans un contexte de travail et d’enseignement à distance dans de nombreux pays — et plus curieusement en biens de construction et de décoration intérieure, stimulée par les politiques de soutien des gouvernements étrangers. Cela a permis à la Chine d’accroître sa part de marché dans les exportations mondiales de 20 % à 25 %, et d’aider significativement sa reprise. Cela va lui permettre d’enregistrer une croissance de 2 % en 2020. Elle sera le seul pays du G20 avec un chiffre positif attendu cette année.

La question du rééquilibrage de son économie paraît essentielle.

Cela a commencé dès la fin des années 2000 à la suite de la crise financière. Il s’agissait de rééquilibrer le développement en réduisant la dépendance aux exportations. D’ailleurs, leur part dans le PIB total a baissé, passant de 35 % à 25 % en dix ans. Mais en réalité, on a assisté davantage à une poussée de la demande intérieure qu’à un ralentissement des exportations proprement dit. Le rééquilibrage reste une priorité à long terme. Les discussions actuelles sur le prochain plan quinquennal portent notamment sur la stratégie de la circulation duale, qui vise à stimuler la demande intérieure en lui donnant un rôle central dans la croissance, tout en y répondant grâce à la production domestique. Car, au cours des dix dernières années, ce sont plutôt les produits importés qui ont accompagné la hausse de la consommation intérieure.

Cela explique la politique en faveur du développement technologique.

En effet, cela répond au désir d’être moins dépendant des importations de technologies dans un contexte de tensions notamment avec les Etats-Unis. La guerre commerciale est devenue une guerre technologique. Les dirigeants chinois ont, d’une part, pris conscience de la vulnérabilité de leur pays sur le plan technologique, et d’autre part, ils ont l’ambition d’en faire un leader dans des domaines émergents sur les plans de l’innovation, de la production ou des normes. Ils ne cherchent pas, par exemple, à s’imposer dans le secteur automobile traditionnel, mais mettent en avant l’électrique où ils investissent beaucoup pour prendre la direction des opérations dans le monde.

« Cette année, l’endettement devrait probablement approcher les 300 % du PIB. C’est assez inquiétant car, à la différence d’autres pays développés similairement endettés, la Chine n’a jusqu’à présent pas beaucoup dépensé pour le système de santé ou de retraite »

On peut aussi évoquer le désir de transformer les villes.

L’urbanisation va avoir une place assez importante dans le nouveau plan quinquennal dans la mesure où elle s’inscrit dans l’objectif d’accroître la consommation privée. Le développement urbain doit s’accompagner d’une augmentation des revenus des ménages et par conséquent de la demande. Après avoir tenté de développer les provinces intérieures, il apparaît que la stratégie des pouvoirs publics porte désormais plutôt sur la création de méga-clusters et leur connectivité, en mettant l’accent sur les infrastructures autour, par exemple, de Shanghai, de Shenzhen ou du triangle Pékin-Tianjin-Hebei.

Dans ces conditions, quelle croissance aura la Chine dans les années à venir ?

Dans une étude à paraître ces jours-ci, nous estimons que la croissance moyenne du PIB chinois devrait s’établir entre 3,8 % et 4,9 % en fonction du scénario des réformes structurelles et du succès de sa politique de rééquilibrage. Cela dit, je crois qu’il serait intéressant de la part des dirigeants chinois de ne plus imposer d’objectif de croissance. Cette année, avec la crise sanitaire, c’est la première fois que la Chine n’a pas annoncé un tel objectif. A long terme, c’est quelque chose de plutôt bénéfique car cela n’incite pas les entreprises publiques ou les autorités provinciales à courir après la croissance sans prendre en compte les problématiques d’endettement ou de déficits budgétaires.

L’endettement est un des risques les plus importants…

A la fin de 2019, il s’élevait à environ 260 % du PIB. Cette année, il devrait probablement approcher les 300 %. C’est assez inquiétant car, à la différence d’autres pays développés similairement endettés, la Chine n’a jusqu’à présent pas beaucoup dépensé pour le système de santé ou de retraite. Or, ce sont des dépenses nécessaires si elle veut à long terme augmenter la consommation privée. Actuellement, les ménages chinois épargnent énormément, environ 35 %, notamment parce que la protection sociale n’est pas encore assez complète.

Néanmoins l’économie chinoise semble sur de bons rails.

C’est assez évident d’autant plus que la Chine a la capacité de se projeter à long terme, ce qui manque cruellement aux Européens. Toutefois, je suis un peu moins confiante sur son avenir qu’en 2014, c’est-à-dire avant les tensions avec les Etats-Unis et à un moment où les risques liés à l’endettement étaient moins urgents.

« Modèle Amish » : propos outrancier pour le maire écolo de Grenoble

« Modèle Amish » : propos outrancier pour le maire écolo de Grenoble

Sur France info le maire écolo de Grenoble qui n’a pas hésité à faire dans la caricature et  reproche la même chose au président de la république. Pourtant c’est comme une sorte de boomerang qui revient sur des écolos bobos après des récentes prises de position provocatrices comme celle du maire de Lyon qui a considéré « que la 5 G ne servirait qu’à regarder des films pornos dans l’ascenseur ». (interview)

 

Amish, lampe à huile… Vous reconnaissez-vous dans ces propos du président ?

Éric Piolle : C’est totalement outrancier. On pense à trois choses quand on écoute le président de la République dire cela. D’abord, il y a cette caricature d’un modèle néolibéral qui, finalement, n’est plus en phase avec les aspirations de la société et devient extrêmement violent. Et Macron, finalement choisit ce camp de la violence. Bientôt, il dira qu’on mange les enfants ! La deuxième, c’est qu’il y a une vraie question sur les gaz à effet de serre. Le poids du numérique dans ces émissions est grandissant, donc il nous faut réfléchir là où on nous dit que les gaz à effet de serre liés au numérique vont être multipliés par deux. Et puis, il y a une troisième chose, c’est ce mépris des territoires.

Il faut qu’il sorte un peu de son bunker à Paris. Sa ‘start-up nation’, elle ne parle pas à beaucoup de gens qui, aujourd’hui, n’ont pas accès au numérique. Éric Piolle, maire EELV de Grenoble à franceinfo

Procès du terrorisme : le modèle d’identification surtout en cause

Procès du terrorisme : le modèle d’identification surtout en cause

Professeur des universités, Gilles Kepel est spécialiste de l’islam et du monde arabe contemporain. Il dirige la chaire Moyen-Orient Méditerranée à l’Ecole normale supérieure. Il considère que à travers le procès du terrorisme c’est surtout le modèle d’identification qui est en cause. Interview dans le monde

Comment analyser les récentes menaces d’al-Qaïda contre Charlie hebdo ?

Sans doute pour faire croire qu’al-Qaïda existe encore. Aujourd’hui personne ne s’intéresse plus à Zawahiri et ses acolytes, réfugiés quelque part entre le Pakistan et l’Afghanistan. Il reste un groupe dissident dans la zone de désescalade d’Idlib, dans le nord-ouest syrien, où se trouvent du reste plusieurs Français sous la houlette du Sénégalo-Niçois Omar Diaby, parmi lesquels peut-être Hayat Boumedienne, la veuve Coulibaly. Mais leur lien avec ce qui fut al-Qaïda est flou. La « marque » al-Qaïda, qui concurrençait Coca-Cola pour la notoriété mondiale, ne vaut plus grand-chose désormais.

Depuis 2015, quelles conséquences la vague d’attentats a-t-elle eues sur la communauté musulmane en France ?

Les attentats ont fait basculer les choses dans le mauvais sens. Ils ont créé un modèle d’identification, une sorte de banalisation de ce type de mal – pour reprendre une formule de Hannah Arendt – qui se sont traduits par la funeste série d’attentats. Bien sûr, la majorité de nos concitoyens de culture musulmane a condamné ces monstres mais on observe, par exemple dans le sondage Ifop-Fondation Jean-Jaurès-Charlie hebdo, qu’une partie de la jeunesse se refuse à se prononcer en ce sens, en arguant que le problème n’est pas là, que le coupable est la société française « islamophobe ». Cette évolution a été dynamisée par la victimisation exploitée par les milieux islamistes qui se sont efforcés de retourner la charge de la preuve avec le slogan #jenesuispascharlie, les « oui mais », les « ils l’ont bien cherché ». Enfin, la mouvance islamo-gauchiste, qui construit une identité de la jeunesse musulmane sur le rejet de la société française dans ses fondements mêmes, considérés comme racistes, néocoloniaux, etc., a vite compris le parti à tirer de cette exploitation victimaire. Et a trouvé des relais dans le monde universitaire.

Quelles sont les manifestations concrètes de cette « idéologie victimaire » ?

La jeunesse issue des quartiers entre aujourd’hui massivement à l’université, en grande partie grâce aux politiques de discrimination positive. C’est très bien. Mais j’observe qu’un nombre croissant de personnes y entre avec cette idéologie islamo-gauchiste qui touche aussi les maîtres-assistants, les jeunes professeurs qui se sentent obligés de se prononcer sur des critères de bienséance idéologique plus qu’avec des arguments scientifiques. Le postulat de départ est que les musulmans sont les opprimés d’aujourd’hui et que, comme tels, rien de ce qui émane de l’islam ne saurait être l’objet d’un jugement. Une vision normative synonyme pour moi de terrible régression intellectuelle.

Jusqu’à quel point ces arguments portent-ils dans la population musulmane ? L’essayiste Hakim El Karoui estime qu’un quart des musulmans « se mettent à l’écart du système de valeurs républicaines »…

Les tentatives de justification, type « Ils n’avaient qu’à ne pas publier les caricatures », portent beaucoup dans la jeunesse musulmane et vont jusqu’à toucher des gens originaires du Maghreb ou autre qui se définissent par ailleurs comme parfaitement laïques, féministes, qui boivent de l’alcool et mangent du porc. Par un phénomène d’identification à la stigmatisation, le contre-discours islamo-gauchiste a prospéré dans les failles de notre société. En suscitant un réflexe de défense identitaire, il interdit de porter un jugement moral sur les assassins. Dire : « C’est votre faute, nous sommes les véritables victimes » permet d’évacuer les actes de la conscience. Un mois après la tuerie de la Promenade des Anglais a émergé, sur les plages de la Côte d’Azur, l’affaire du burkini, comme pour faire oublier qu’un jihadiste au volant de son camion avait massacré 86 personnes. On invente ainsi une autre culpabilité en miroir, appât auquel mord le New York Times et d’autres qui disent : « La France est islamophobe et raciste : elle interdit le burkini ».

En quoi le procès actuel peut-il influer sur les mentalités ? A vous écouter, la « messe » est dite ?

En restituant la parole des victimes, en donnant la parole aux survivants et aux accusés, le procès a pour fonction de construire une vérité sociale sur laquelle s’établit la justice. C’est pour cela qu’il est très important. D’autant que les deux procès Merah ont été des ratages complets, la théorie du « loup solitaire » – véritable forfaiture intellectuelle de la part de l’ancien patron du renseignement, Bernard Squarcini – a empêché la connaissance de ce phénomène qui fonctionnait très tôt en réseau, et donc retardé la manifestation de la vérité. L’affaire Merah est maudite : ne pas l’avoir comprise a ouvert la voie à tout ce qui a suivi.

Vous récusez l’idée que les accusés seraient des « lampistes » ?

La culture de l’excuse explique que « les vrais auteurs sont morts ou en fuite » et qu’« on ne peut rien démontrer ». Dire cela, c’est ne rien comprendre à la nébuleuse du jihadisme français. Il ne s’agit évidemment pas de me prononcer sur la culpabilité des accusés, c’est au tribunal de le faire. Mais les universitaires spécialisés savent qu’on a des filières construites et structurées autour d’affinités, de voyages en Syrie ou en Irak, du quartier des Buttes-Chaumont, des Merah qui ont fait école, de Toulouse qui rayonnait sur la Belgique, de liens avec l’Algérie, la Tunisie.

Il y aurait une forme de naïveté à présenter ce procès comme celui des « seconds couteaux » ?

De la naïveté mais aussi une volonté de ne pas savoir, parce que cela poserait des problèmes trop complexes que ce sondage nous envoie en pleine figure. On se rendrait compte que les politiques publiques sont souvent déterminées par des calculs électoraux. On ne peut plus dire en 2020 qu’on ne connaît pas ce phénomène documenté encore récemment par les livres d’Hugo Micheron, Le Jihadisme français, et Bernard Rougier, Les Territoires conquis de l’islamisme ». Le monde de la police et du renseignement, extrêmement sophistiqué désormais par contraste avec l’époque 2012-2015, maîtrise parfaitement cette mouvance. Avec ce procès, il nous faut affronter le fait que des gens élevés en France, nourris par l’aide sociale à l’enfance depuis la mort de leurs parents pour les frères Kouachi, arrivent dans une rédaction et tuent 11 personnes de sang-froid, après avoir été mis en condition par une idéologie religieuse qui déshumanise leurs victimes – comme s’ils détruisaient des avatars dans un jeu vidéo.

Une loi contre le séparatisme est en préparation, alimentant un débat sémantique. Quelle est votre position ?

Je n’étais pas convaincu par ce terme – je l’ai d’ailleurs dit au Président – car cela peut constituer l’arbre qui cache la forêt. Il existe effectivement une logique séparatiste, nourrie par le jihadisme et ses avatars. Elle touche des populations qui, jusqu’à une époque récente, étaient assez marginales. Le sondage de la Fondation Jean-Jaurès semble cependant indiquer que cela est en pleine progression. C’est l’exemple hallucinant de Mickaël Harpon, embauché comme handicapé à la Préfecture de police de Paris, réislamisé dans une mosquée radicale, et affecté dans un service chargé du suivi de la radicalisation… qui semble pratiquer en effet un « séparatisme » culturel d’avec la société dont il tue les membres. A ce séparatisme – et parfois entremêlé à lui – vient s’ajouter l’entrisme dans les institutions : un leader communautaire va voir un candidat en disant « Je vous apporte les voix de mes coreligionnaires contre tel poste d’adjoint, telle attribution ». Cela s’est encore vérifié lors des dernières municipales. Dans cette logique communautariste, la charia et l’identité religieuse passent avant les lois de la République et la citoyenneté commune. A partir du moment où on traduit cette conception en fait social, on crée le continuum entre la rupture culturelle salafiste et les conditions du passage à l’acte jihadiste contre l’autre – stigmatisé comme « kuffar » (« infidèle »). Mais certains de mes collègues universitaires pensent le contraire : pour éviter ce passage à l’acte, le communautarisme serait nécessaire car il gère la paix sociale… Je crains que, justement, si on se focalise exclusivement sur le « séparatisme », on ne traite que le symptôme final – heureusement encore assez réduit en nombre – et qu’on ne rate le continuum avec la rupture culturelle qu’instaure le communautarisme, que je tiens pour le début nécessaire (mais non suffisant) de ce processus.

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