Archive pour le Tag 'mercantilisme'

«L’Europe, victime du mercantilisme allemand»

«L’Europe, victime du mercantilisme allemand»

Emmanuel Sales , président de la Financière de la Cité,  estime dans l »Opinion que l’Europe a été victime du mercantilisme allemand..

L’Allemagne a-t-elle une vocation européenne ? La question, iconoclaste, mérite d’être posée. La culture allemande a produit des fruits parmi les plus élevés de la culture européenne. Mais depuis son unité tardive, l’Allemagne en tant qu’entité politique s’est développée contre l’Europe. L’accord de libre-échange entre l’Union européenne et la Chine sur le point d’être signé à la va-vite alors que le vieux continent continue de lutter contre la pandémie qui frappe ses industries et ses emplois semble confirmer cette analyse.

Depuis sa réunification, l’Allemagne a mis en œuvre avec succès une stratégie mercantiliste consistant à comprimer sa demande (consommation et investissement) pour gagner des parts de marché à l’international. Elle a joué un rôle clé dans l’industrialisation de la Chine en lui fournissant les machines-outils lui permettant d’accélérer son développement et d’intensifier l’automatisation de ses usines en rognant sur les coûts. La qualité des produits allemands est certainement irréprochable. Mais l’excédent commercial formidable de l’Allemagne est moins due à la compétitivité de son industrie qu’à ses politiques de déflation interne et à son appartenance à l’union monétaire qui lui a permis d’éviter l’appréciation de sa monnaie nationale.

Pour l’Europe, les implications politiques de cette stratégie ne sont pas neutres. Le Président Xi a jeté le voile. La Chine estime qu’elle n’a pas eu « sa place au soleil ». Comme l’Allemagne wilhelmienne, elle est passée du nationalisme continental à la Weltpolitik, fondée sur l’impérialisme économique, l’exaltation du passé national et la répression des libertés civiques. Elle souhaite mettre fin à sa position enclavée en développant de nouvelles routes commerciales vers l’Europe, sécuriser ses sources d’énergie, assurer le contrôle de son espace maritime, s’approprier nos technologies dans une logique d’affirmation de soi. La poursuite de l’expansion et le maintien du régime politique sont à ce prix.

En suivant le « modèle allemand » de contraction des dépenses internes l’Europe s’est affaiblie et s’est rendue plus dépendante de la demande extérieure

Syndrome d’encerclement. Nous avons vu entre 1914 et 1945 les conséquences ravageuses de cette politique lorsqu’un Etat est atteint d’un syndrome d’encerclement et d’injustice historique. Face à la Chine, l’Europe ne doit pas simplement sauvegarder ses intérêts commerciaux, mais protéger ses industries et son savoir-faire pour construire l’indépendance stratégique que le Président Macron appelle de ses vœux. L’arrivée d’une nouvelle équipe au pouvoir à Washington, plus technique et visiblement mieux disposée vis-à-vis de Pékin, renforce cette exigence.

Pour cela, il faut relancer la demande globale, soutenir la consommation et nos investissements, rompre avec le libéralisme doctrinaire qui inspire depuis trop longtemps notre vision des échanges. L’Europe ne peut avoir pour seule ambition de vendre des Mercedes et des sacs à main au reste du monde. La loi des avantages comparatifs ne vaut plus lorsqu’elle conduit un pays à perdre ses forces productives. En suivant le « modèle allemand » de contraction des dépenses et des investissements, l’Europe s’est affaiblie et s’est rendue plus dépendante de la demande extérieure.

L’adoption du plan de relance européen est une première étape. Mais c’est trop peu et trop tard. En outre, la soumission de toutes les initiatives, de la recherche jusqu’à la politique monétaire (!), aux objectifs de réduction du réchauffement climatique laisse planer un certain parfum de déflation sur la stratégie économique européenne. Derrière des ambitions de soutien à la croissance européenne, l’Allemagne continue d’avancer ses pions à l’abri du bouclier stratégique américain et de l’union monétaire. Aurons-nous le courage de nous y opposer ?

Emmanuel Sales est président de la Financière de la Cité.

 

« Avec Trump, le mercantilisme remplace le multilatéralisme »

« Avec Trump, le mercantilisme remplace le  multilatéralisme »

Pour La Tribune, Corinne Vadcar analyste senior à la CCI Paris Ile-de-France revient sur les enjeux de cette décision.

Quelles pourraient être les conséquences directes des décisions de Donald Trump sur le commerce international ?

CORINNE VADCAR - A court terme, la première conséquence est que l’Union européenne vient de déposer un recours auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). La seconde conséquence est que la Commission européenne pourrait aussi mettre en place des taxes supplémentaires sur certains produits comme les Harley-Davidson, le bourbon, les produits agricoles ou des produits issus de l’industrie sidérurgique. Dans tous les cas, la décision américaine est à replacer dans un contexte politique qui est la perspective des élections de mi-mandat en novembre prochain.

A moyen terme, la guerre commerciale pourrait avoir un impact structurel et géographique sur le commerce mondial. L’expérience du passé permet de se faire une idée. Sous le mandat de George Bush fils, des entreprises américaines ont parfois importé des produits qui contenaient de l’acier au lieu d’importer des matériaux bruts, ce qui leur permettait d’échapper aux surtaxes sur l’acier. Par ailleurs, les entreprises européennes, notamment allemandes, qui exportent de l’acier outre-Atlantique, pourraient rechercher d’autres marchés. Dans tous les cas, les mesures douanières américaines et les contre-mesures européennes devraient entraîner une réorganisation des flux de commerce (« trade diversion »).

A plus long terme, la croissance du commerce international pourrait ralentir. L’attitude américaine va à l’encontre des règles de l’OMC. Cette situation peut clairement générer de l’incertitude et de l’attentisme des deux côtés de l’Atlantique. Les Etats-Unis étant le premier partenaire commercial de l’Union européenne, on peut supposer qu’il va y avoir, à un moment donné, une baisse des échanges entre les deux puissances économiques.

Dans quelle mesure le pouvoir d’achat des Européens et les entreprises européennes pourraient-ils être touchés ?

En ce qui concerne les produits américains qui seraient ciblés par les Européens, il devrait y avoir peu d’impact sur le consommateur. Il ne s’agit pas de produits stratégiques et les Européens ont la possibilité de se reporter sur d’autres produits.

En revanche, il pourrait y avoir des conséquences indirectes via le ralentissement de l’activité des entreprises dans les secteurs liés aux produits soumis aux taxes américaines et européennes. Au regard du volume d’échanges d’aluminium et d’acier entre les États-Unis et l’Europe, il faut, cependant, relativiser ces conséquences. Du côté de l’industrie automobile, l’enquête actuellement menée aux États-Unis pourrait, en revanche, avoir un impact plus significatif si elle aboutit d’ici à quelques temps.

Que pensez-vous des ripostes annoncées par l’Europe ou le Canada ?

Les ripostes européennes s’inscrivent avant tout dans un cadre légal, celui de l’OMC. Elles sont la réponse aux mesures unilatérales de Donald Trump, décidées au nom de la sécurité nationale et considérées comme abusives par Bruxelles. Le fait de vouloir entamer une procédure pour régler un différend devant l’OMC est une démarche qui respecte la légalité. Les mesures de rétorsion de l’Union européenne s’inscrivent dans le respect des règles juridiques du multilatéralisme commercial.

A court terme, il y a peu de chances que Donald Trump revienne sur sa décision sachant qu’il y a la perspective des élections. Mais qui sait ? Il y a quelques jours, le président américain est venu au secours du fabricant chinois de téléphonie ZTE alors que celui-ci était menacé par les sanctions américaines.

L’administration Trump est-elle favorable au libre-échange malgré ces différentes décisions ?

L’administration américaine est favorable au libre-échange dans la mesure où celui-ci est gagnant pour les États-Unis. Pendant des années, on a vu se construire un système international qui allait dans le sens de l’intérêt collectif. Avec leur dernière décision, les Américains s’éloignent de cette construction. Les États-Unis ne veulent plus d’un jeu gagnant/gagnant mais d’un jeu gagnant/perdant pour réduire leur déficit commercial.

Les États-Unis prennent-ils vraiment des risques vis-à-vis des règles de l’OMC ?

Les risques sont limités dans la mesure où les procédures pour régler les différends à l’OMC sont très longues. Il apparaît que le chef d’État américain veut passer outre les règles du multilatéralisme. Avec la politique commerciale de Donald Trump, le mercantilisme devient la règle au détriment du multilatéralisme, ce qui pourrait accentuer les déséquilibres sur la scène internationale. On est dans des jeux de puissance de la part de la Chine et des États-Unis qui peuvent refermer l’âge d’or du multilatéralisme comme garant de la stabilité mondiale.




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