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Macron ne comprend rien ! (Dominique Méda)

Dominique Méda : Macron  ne comprend rien ! 

« On a l’impression d’une double dissolution : de l’Assemblée nationale et de la société tout entière » : la sociologue et philosophe Dominique Meda ne décolère pas contre Emmanuel Macron, qui « ne comprend rien de la société » et dont elle avait lié la victoire en 2017 à celle, « plus tard », de l’extrême droite. Elle livre son effroi devant un processus de déréliction qui semble inarrêtable, elle argumente sa vive inquiétude face au projet économique, social, sociétal, anti-écologique et anti-européen du Rassemblement national. Mais elle garde espoir. D’une part dans la société pensée par le Nouveau Front populaire, d’autre part dans un renouveau démocratique auquel elle invite toutes les parties prenantes, y compris patronales, à participer.  (dans la Tribune)

Philosophe, sociologue et haute fonctionnaire : de ces trois points de vue, comment interprétez-vous ce moment historique ?

Ayant été formée à la philosophie, je suis effrayée par la place qu’a prise la sophistique dans la politique. Depuis ses origines, la philosophie est un effort pour lutter contre ceux qui, au lieu de chercher la vérité et la justice, trompent les gens auxquels ils s’adressent avec des raisonnements fallacieux, des illusions et de beaux discours pour gagner leurs faveurs. On a l’impression aujourd’hui qu’une partie des politiques disent n’importe quoi, mentent sciemment pour obtenir les votes de celles et ceux qui souffrent et qui n’ont pas le temps d’aller vérifier leurs propos ou de s’enquérir des conséquences des politiques proposées. Comme sociologue, je suis désolée que nos dirigeants politiques ne lisent pas plus les travaux qui depuis des années alertent sur l’énorme malaise de la société française et apportent des explications. Comme haute fonctionnaire, je suis convaincue que les choix appliqués depuis une trentaine d’années dans notre pays ne sont pas les bons et que nous avons octroyé trop d’importance au prisme économique, économiciste, au lieu de nous intéresser aux conditions de vie concrètes de nos concitoyens. Et j’englobe évidemment la gauche dans cette critique.

 

Comment sortir de la crise du travail  (Dominique Méda  )

Comment sortir de la crise du travail  (Dominique Méda  )

Dominique Méda,professeure de sociologie, directrice de l’Institut de Recherche Interdisciplinaire en Sciences Sociales (Université Paris Dauphine-PSL)

Changer les organisations de travail passe par un partage de la gouvernance des entreprises avec les salariés, plaide la sociologue dans Le Monde

Les débats suscités par la réforme des retraites ont eu l’immense mérite de faire prendre conscience de l’ampleur de la crise du travail à une large partie de l’opinion publique et des responsables politiques. Certains députés Renaissance le reconnaissent à voix basse : il aurait fallu commencer par traiter cette question avant d’ouvrir le chantier des retraites. Le gouvernement explique lui aussi mettre désormais le travail en tête de ses priorités. Mais en apportant quels remèdes à la crise ? Tentons donc d’esquisser le programme de transformation que les données d’enquête nous suggèrent.

Depuis 1978, une enquête remarquable est consacrée en France à l’analyse approfondie des conditions de travail. Portée par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), elle s’intéresse aujourd’hui à un échantillon représentatif de 25 000 actifs occupés. Les ministres du travail ont ainsi à leur disposition un formidable outil pour suivre le rapport au travail de nos concitoyens.

La vague 2005 de l’enquête avait permis de mettre en évidence une pause dans l’intensification du travail ; celle de 2013 avait montré l’immense malaise des agents de la fonction publique d’Etat et aurait dû jouer le rôle d’alerte sur les conditions de travail à l’hôpital – plus de 36 % des agents de la fonction publique hospitalière disaient en effet « ne pas ressentir la fierté du travail bien fait ».

Mais les résultats de la vague 2019 de l’enquête étaient encore plus édifiants : 37 % des actifs occupés déclaraient ne pas se sentir capables de tenir dans leur travail jusqu’à la retraite ! Toutes les catégories sociales étaient concernées, puisque 32 % des cadres et 39 % des ouvriers et employés étaient dans ce cas. Les moins de 30 ans et les femmes, en particulier les femmes avec enfants, étaient les plus concernés…..

Et de proposer une forme de cogestion pour définir les conditions de travail.

« Penser une économie sans passer par la case chômage » (Dominique Méda )

 « Penser une économie sans passer par la case chômage » (Dominique Méda )

 

Comment passer de La convention citoyenne aux travaux pratiques s’interroge  dans le Monde la sociologue Dominique Méda. La problématique générale est bien posée mais c’est la mise en œuvre de la TJ qui pose des difficultés. En effet il faut éviter la case chômage produirait une crise sociale insurmontable, en même temps ne pas relancer la croissance grise qui ne remet pas en question mode de production et de consommation. Un exercice donc on peut parler en général mais qu’il faut ensuite décliner par branches professionnelles, par zone géographique, par catégorie socioprofessionnelle et en plus de manière progressive pour ne pas provoquer davantage de cartes que de bénéfices. Bref il y a encore du travail à faire approfondir la réflexion.

 

« Le 14 juin dernier, le Président de la République annonçait solennellement : « Il nous faut aussi créer les emplois de demain par la reconstruction écologique qui réconcilie production et climat », promettant de détailler au début du mois de juillet le nouveau chemin proposé. Entre-temps, les 150 citoyens réunis dans la convention citoyenne pour le climat ont rendu leurs propositions, qui sont autant de précieuses balises. Rédigées dans un langage extrêmement clair, passées au tamis des expériences personnelles de chaque citoyen, et issues d’un savant dosage entre apports des experts et délibérations collectives (l’alchimie en sera analysée par la trentaine de chercheurs observateurs de la convention – dont je fais partie), ces mesures donnent en effet les clés d’une transition écologique concrète combinant relance verte et nouvelles pratiques de sobriété.

 

Certes, des milliards ont déjà été versés ou programmés pour soutenir notre économie frappée de plein fouet par la crise liée au Covid-19, certes il est urgent de soutenir les entreprises et les emplois qui risquent de disparaître massivement, mais nous ne devons pas pour autant le faire de façon aveugle, comme l’a rappelé notamment le Haut Conseil pour le climat. Ce dernier a en effet publié un rapport spécial au mois d’avril, destiné à rappeler que la crise sanitaire est sans doute une crise endogène – c’est-à-dire provoquée non pas par la colère des dieux, mais par la démesure des humains – et à conjurer le gouvernement de ne pas recommencer les mêmes erreurs qu’en 2008, c’est-à-dire de ne pas s’engager dans une relance « brune », qui aggraverait la situation climatique, mais au contraire dans une relance verte, qui nous permettrait d’engranger de nombreux bénéfices, notamment en termes de santé. Parmi les mesures proposées par la convention citoyenne pour le climat, nombreuses sont en effet celles qui auront une action déterminante en matière de santé : développer les autres modes de transport que la voiture individuelle, interdire les centres-villes aux véhicules les plus émetteurs de gaz à effet de serre, réduire la circulation des poids lourds devrait permettre de diminuer drastiquement la pollution de l’air, qui fait chaque année 48 000 morts, c’est-à-dire plus que le Covid ; mais également lutter contre la malbouffe, et donc s’attaquer résolument à ses comorbidités (obésité, diabète, hypertension…) dont on a constaté le caractère fatal pendant la crise sanitaire. On dispose donc bien d’un ensemble d’outils permettant de renforcer la résilience de la société et de satisfaire les aspirations prioritaires de nos concitoyens. »

Dominique Meda : « Rebâtir une économie sans passer par la case chômage » (Dominique Méda )

Dominique Meda : « Rebâtir une économie sans passer par la case chômage » (Dominique Méda )

Comment passer de La convention citoyenne aux travaux pratiques s’interroge  dans le Monde la sociologue Dominique Méda

 

Le 14 juin dernier, le Président de la République annonçait solennellement : « Il nous faut aussi créer les emplois de demain par la reconstruction écologique qui réconcilie production et climat », promettant de détailler au début du mois de juillet le nouveau chemin proposé. Entre-temps, les 150 citoyens réunis dans la convention citoyenne pour le climat ont rendu leurs propositions, qui sont autant de précieuses balises. Rédigées dans un langage extrêmement clair, passées au tamis des expériences personnelles de chaque citoyen, et issues d’un savant dosage entre apports des experts et délibérations collectives (l’alchimie en sera analysée par la trentaine de chercheurs observateurs de la convention – dont je fais partie), ces mesures donnent en effet les clés d’une transition écologique concrète combinant relance verte et nouvelles pratiques de sobriété.

 

Certes, des milliards ont déjà été versés ou programmés pour soutenir notre économie frappée de plein fouet par la crise liée au Covid-19, certes il est urgent de soutenir les entreprises et les emplois qui risquent de disparaître massivement, mais nous ne devons pas pour autant le faire de façon aveugle, comme l’a rappelé notamment le Haut Conseil pour le climat. Ce dernier a en effet publié un rapport spécial au mois d’avril, destiné à rappeler que la crise sanitaire est sans doute une crise endogène – c’est-à-dire provoquée non pas par la colère des dieux, mais par la démesure des humains – et à conjurer le gouvernement de ne pas recommencer les mêmes erreurs qu’en 2008, c’est-à-dire de ne pas s’engager dans une relance « brune », qui aggraverait la situation climatique, mais au contraire dans une relance verte, qui nous permettrait d’engranger de nombreux bénéfices, notamment en termes de santé.Parmi les mesures proposées par la convention citoyenne pour le climat, nombreuses sont en effet celles qui auront une action déterminante en matière de santé : développer les autres modes de transport que la voiture individuelle, interdire les centres-villes aux véhicules les plus émetteurs de gaz à effet de serre, réduire la circulation des poids lourds devrait permettre de diminuer drastiquement la pollution de l’air, qui fait chaque année 48 000 morts, c’est-à-dire plus que le Covid ; mais également lutter contre la malbouffe, et donc s’attaquer résolument à ses comorbidités (obésité, diabète, hypertension…) dont on a constaté le caractère fatal pendant la crise sanitaire. On dispose donc bien d’un ensemble d’outils permettant de renforcer la résilience de la société et de satisfaire les aspirations prioritaires de nos concitoyens.

« Rendre inopérante la production de fausse science » (Dominique Méda)

« Rendre inopérante la production de fausse science » (Dominique Méda)

 

Seuls des chercheurs indépendants et bien payés peuvent s’opposer aux « marchands de doute » qui dissimulent la nocivité de produits industriels pour la santé et l’environnement, explique la sociologue, Dominique Méda, dans sa chronique au « Monde ».

 

«  L’enquête récente consacrée par Le Monde aux méthodes employées par Coca-Cola pour s’exonérer de toute responsabilité dans la pandémie mondiale d’obésité et de diabète a pleinement confirmé ce que les sociologues de sciences ont établi de manière rigoureuse depuis plusieurs années : les procédures nécessaires pour contrôler et réguler les pratiques des grandes entreprises, mais plus généralement pour protéger les consommateurs et les citoyens d’informations fausses ou biaisées, font encore cruellement défaut.

Un livre publié en 2010 par Naomi Oreskes et Erik M. Conway, traduit en 2012 sous le titre Les Marchands de doute (éditions Le Pommier), a magistralement démontré, au terme de plusieurs années d’enquête, comment de grandes entreprises, souvent soutenues par des groupes d’intérêt et des organisations farouchement hostiles à l’idée même de régulation, étaient parvenues à mettre massivement en doute les résultats scientifiques les mieux établis, qu’il s’agisse des méfaits du tabagisme, des agents chimiques (CFC) responsables du trou d’ozone, ou du CO2. De nombreux travaux ont depuis été consacrés à la mise en évidence de ces pratiques, par exemple celle des industriels de l’amiante dans Ignorance scientifique & inaction publique (Emmanuel Henry, Les Presses de Sciences Po, 2017).

Dans tous les cas, les méthodes des semeurs de doute sont les mêmes : profiter du fait qu’il n’est scientifiquement pas toujours possible d’affirmer qu’un fait A est de manière absolument certaine, exclusivement et à 100 %, la cause d’un fait B (le soda de l’obésité, le tabac du cancer, l’activité humaine du réchauffement climatique…), c’est-à-dire profiter de ce qui caractérise précisément l’éthique scientifique pour remettre massivement en cause les résultats de la science. Il suffit alors de disposer des voix de quelques scientifiques égarés, non spécialistes de la discipline, aveuglés par une idéologie ou plus rarement corrompus, qui soutiendront des positions contraires immédiatement surmédiatisées, de requalifier l’ensemble en « controverse » au sein de laquelle les différentes positions apparaîtront pourvues de la même légitimité, puis de focaliser l’attention, grâce au financement de chercheurs embarqués dans ces croisades, sur d’autres causes probables des problèmes (l’absence d’activité physique, la teneur en goudron, le soleil…). ….»




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