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Inflation : la Banque de France promet encore la lune

Inflation : la Banque de France promet encore la lune

Une nouvelle fois la Banque de France se fait le porte-parole du pouvoir et des intérêts financiers. Ainsi le gouverneur de la Banque de France vient -il d’annoncer que l’inflation va revenir à 2 % d’ici alors que les augmentations affectent tous les produits et tous les secteurs. L’objectif est bien entendu de refroidir les ardeurs en matière de revalorisation des revenus et particulièrement des salaires. En outre, les prospectives économiques en matière de croissance de la Banque France apparaissent particulièrement volontaristes. La fin de l’année. Un véritable mensonge au moment où les consommateurs et les ménages prennent connaissance de la flambée« L’inflation reviendra à 2 % dans un an au plus tard » (François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France).

Les prévisions dans le marc de café du gouverneur de la Banque de France dans » la Tribune ».

L’inflation recule, la plupart des pays de la zone euro ont échappé à la récession en 2023. Quel regard portez-vous sur l’économie européenne en ce début d’année ?

FRANÇOIS VILLEROY DE GALHAU- Sur la seule conjoncture économique, les incertitudes ont plutôt tendance à un peu diminuer. Nous avons d’ailleurs très peu modifié nos prévisions entre septembre et décembre. Il y a un ralentissement de l’activité, en France comme en Europe. Et, plus positivement, un net recul de l’inflation.

Quel niveau de croissance attendez-vous pour cette année ?

Nous prévoyons un rythme de croissance d’environ 0,2 % par trimestre, à l’image de celle attendue au dernier trimestre de 2023 : cela conduirait à 0,9 % sur l’ensemble de 2024. Ce rythme traduit évidemment un ralentissement. Mais ce ne serait pas un retournement de la conjoncture, ni une récession, en France comme en Europe.

À court terme, la désinflation : elle entraînera une hausse en moyenne du pouvoir d’achat, car les prix augmenteront dorénavant moins vite que les salaires !!!. Par conséquent, le moteur de notre croissance change : celui de 2023 était les exportations, celui de 2024 sera la consommation. C’est un moteur plus régulier et plus sûr, d’autant plus que l’investissement des entreprises nous paraît résister relativement bien.

Les experts de l’économie: Prévisions ou marc de café

Les experts de l’économie: Prévisions ou marc de café 

 

 

La  « narratologie » ne s’est jamais portée aussi bien qu’aujourd’hui. Par Karl Eychenne, chercheur chez Oblomov & Bartleby ( dans la Tribune).

Souvent ils se trompent, parfois pour de bonnes raisons. Ainsi, il n’est pas rare que nos experts de l’économie et de la finance nous annoncent l’inverse de qui va se produire. Mais on leur pardonne, car ils ont parfois des circonstances atténuantes, comme en 2022 par exemple. Qui aurait pu prévoir l’arrivée des extraterrestres, les Russes en Ukraine ?

 

L’auteur pourrait ajouter que certains experts mentent à dessein pour servir les intérêts de ceux qui les rémunèrent par exemple des groupes de pression, des multinationales ou encore des gouvernements NDLR

Les conséquences économiques d’un conflit armé seront toujours inaudibles face à l’ineffable. Néanmoins, ces conséquences n’en sont pas moins utiles pour éclairer certains faits. Par exemple, on peut alors justifier le second souffle de l’inflation en Europe par des tensions sur les prix de l’énergie (pétrole et gaz en provenance de Russie). Un second souffle de l’inflation qui poussera la Banque Centrale européenne dans ses retranchements, et les marchés au fond du trou.

Il l’était déjà depuis bien longtemps. À un point tel que même après coup, on restait incapable de l’expliquer. Même après que l’évènement se soit réalisé, il restait aussi incompréhensible. D’un certain point de vue, on dira alors que les experts sont aussi mauvais en prévision (l’art de prévoir demain) qu’en « rétro-diction » (l’art de prévoir hier).

Qu’à cela ne tienne. L’expert n’est pas du genre à se laisser abattre. Il n’est peut-être pas un expert en futurologie, mais il n’a plus rien à prouver en narratologie. Il s’agit de l’art du récit, cette capacité de raconter des choses, mais pas n’importe quelles choses. Des choses qui donnent envie d’être écoutées. Et si en plus, ce qui est raconté n’est pas dénué de style, alors on est pas loin du but ultime, le seul en vérité que puisse espérer l’expert. Car on l’aura compris, pour la prévision, l’expert ne fera jamais mieux que le doigt mouillé ou le marc de café.

Raconter. Se la raconter. Pas si facile en vérité. ChatGPT par exemple, le robot conversationnel révolutionnaire, est bien capable de raconter. Mais il ne lui viendrait jamais à l’idée de « se la raconter ». Pour être honnête, l’ambition de l’expert est parfois plus modeste. Il ne contraint pas toujours son besoin de raconter à celui de s’écouter parler. Parfois, son but est juste d’occuper l’espace, l’espace sonore.

Dans un monde parfait, les paroles débiles ou inutiles sont inhibées par le bon sens de celui qui se retient de les dire, et tout cela produit alors ce que l’on appelle du silence. C’est le moment de rappeler le seul aphorisme compréhensible du Tractatus de Wittgenstein, philosophe ou logicien :

Hélas, dans notre monde, il n’existe pas ce réflexe de bon sens de l’orateur. Il estime que sa seule capacité à parler justifie sa logorrhée ou diarrhée verbale. Cela dit, peut-être tout n’est-il pas à jeter ? En effet, il est tout à fait possible que dans la quantité extraordinaire d’histoires qui nous sont livrées par les conteurs, on finisse par tomber sur la vraie histoire, ou en tous les cas une histoire qui fait sens.

Christian Salmon, Monsieur Story Telling, vient tout juste de nous livrer ses réflexions sur l’art d’occuper le silence (« l’art du silence »). En particulier, il nous propose une distinction entre ceux qui « racontent des histoires » et ceux qui racontent UNE histoire. Les premiers sont des ambianceurs, produisant une forme de bruit de fond, musique d’ascenseur, voire acouphène. Les autres sont des acousticiens, des experts du son, comme s’ils nous chuchotaient quelque chose, de leur petite voix intérieure. Les ambianceurs ne pourront pas s’empêcher de remplacer le silence par du bruit, les acousticiens s’imposent de ne parler que si ce qu’ils ont en dire est plus beau que le silence (Sénèque).

En clair, il semble bien que nos experts de l’économie et de la finance soient (le plus souvent) des ambianceurs.

Inévitablement, c’est lorsque le silence est le plus présent, parce que l’évènement est à ce point sidérant que l’ambianceur surjoue et parle plus encore. Il est alors pris d’une forme d’ébriété narrative, une expression que l’on doit à l’écrivain Camille de Toledo (« une histoire du vertige »), qui lui aussi a quelques doutes sur la quantité de mots que nous choisissons de débiter pour raconter le monde.

Aujourd’hui, il semblerait bien que nous soyons dans ce type de moment, où se conjuguent l’incertain et l’inconnu. Un moment qui militerait plutôt pour une forme de retenue, de silence, un silence non pas hébété, mais de réflexion. Comme si ce silence était en quête d’un sas vers une intelligence de l’évènement. Mais au lieu de cela, les experts de l’économie et de la finance n’ont jamais été aussi bavards, ils préfèrent une autre stratégie, celle consistant à débiter le plus d’âneries possibles (en témoigne le nombre hallucinant de scénarios antagonistes ou contradictoires), en espérant tomber sur celle qui fera sens.

Prévisions économiques dans le marc de café de la Banque de France !

Prévisions économiques dans le marc de café de la Banque de France !

 


Le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau est coutumier deu pronostics fondés davantage sur son souhait personnel- et le marc de café- que sur des analyses pertinentes. Rappelons-nous par exemple de l’annonce du caractère très provisoire de l’inflation qui devait connaître son pic au cours de l’été 2022. Malheureusement,l’inflation sera encore aussi forte en 2023 qu’en 2022 et évidemment va se cumuler.

En fait, le gouverneur de la Banque de France prend enfin conscience que la hausse des taux d’intérêt dont il a été partisan jusque-là comme ses amis allemands risquent de tuer la croissance. Dès lors, il tente de freiner les velléités de nouvelles augmentations du coût de l’argent.

Bien entendu, il n’en sait strictement rien car la hausse des taux d’intérêt correspond certes à l’augmentation des matières premières et de l’énergie mais aussi à un réajustement monétaire pour mieux faire coïncider masse monétaire et richesse réelle. Pour preuve, ne cesse de perdre de la valeur par rapport au dollar. La banque centrale européenne a distribué sans compter des masses de liquidités dont une grande partie a servi la spéculation et l’inflation.

Il se pourrait tout aussi bien qu’on connaisse une crise monétaire encore plus grande au cours de 2023 avec l’éclatement de plusieurs bulles.

Pourtant le gouverneur de la Banque de France a estimé jeudi qu’une période «de stabilisation monétaire» s’ouvrait et qu’il faudrait que les taux directeurs de la Banque centrale européenne atteignent un pic d’ici l’été. Pour tenter de juguler l’inflation, qui a atteint en 2022 des niveaux historiques, la plupart des banques centrales à travers le monde ont drastiquement remonté leurs taux directeurs, jusqu’alors proches de zéro.

«Après avoir atteint en décembre un niveau proche du “taux d’intérêt neutre” à 2%, nous entamons la deuxième phase vers la stabilisation monétaire: il serait souhaitable d’atteindre le bon “taux terminal” d’ici l’été prochain, mais il est trop tôt pour préjuger de son niveau», a déclaré le gouverneur dans ses vœux pour la nouvelle année. «Nous serons prêts ensuite à rester à ce taux terminal le temps nécessaire: la course de vitesse des hausses de taux en 2022 devient plutôt une course de fond, et la durée comptera au moins autant que le niveau», ajoute François Villeroy de Galhau.

Autres prévisions tout aussi incertaines, la Banque de France prévoit un «pic au premier semestre» de l’inflation avant une diminution vers 4% à la fin de cette année» et un objectif de 2% «d’ici fin 2024 à fin 2025».

Les prévisions économiques dans le marc de café de la Banque de France

Les prévisions économiques dans le marc de café de la Banque de France !


Le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau est coutumier deu pronostics fondés davantage sur son souhait personnel- et le marc de café- que sur des analyses pertinentes. Rappelons-nous par exemple de l’annonce du caractère très provisoire de l’inflation qui devait connaître son pic au cours de l’été 2022. Malheureusement,l’inflation sera encore aussi forte en 2023 qu’en 2022 et évidemment va se cumuler.

En fait, le gouverneur de la Banque de France prend enfin conscience que la hausse des taux d’intérêt dont il a été partisan jusque-là comme ses amis allemands risquent de tuer la croissance. Dès lors, il tente de freiner les velléités de nouvelles augmentations du coût de l’argent.

Bien entendu, il n’en sait strictement rien car la hausse des taux d’intérêt correspond certes à l’augmentation des matières premières et de l’énergie mais aussi à un réajustement monétaire pour mieux faire coïncider masse monétaire et richesse réelle. Pour preuve, ne cesse de perdre de la valeur par rapport au dollar. La banque centrale européenne a distribué sans compter des masses de liquidités dont une grande partie a servi la spéculation et l’inflation.

Il se pourrait tout aussi bien qu’on connaisse une crise monétaire encore plus grande au cours de 2023 avec l’éclatement de plusieurs bulles.

Pourtant le gouverneur de la Banque de France a estimé jeudi qu’une période «de stabilisation monétaire» s’ouvrait et qu’il faudrait que les taux directeurs de la Banque centrale européenne atteignent un pic d’ici l’été. Pour tenter de juguler l’inflation, qui a atteint en 2022 des niveaux historiques, la plupart des banques centrales à travers le monde ont drastiquement remonté leurs taux directeurs, jusqu’alors proches de zéro.

«Après avoir atteint en décembre un niveau proche du “taux d’intérêt neutre” à 2%, nous entamons la deuxième phase vers la stabilisation monétaire: il serait souhaitable d’atteindre le bon “taux terminal” d’ici l’été prochain, mais il est trop tôt pour préjuger de son niveau», a déclaré le gouverneur dans ses vœux pour la nouvelle année. «Nous serons prêts ensuite à rester à ce taux terminal le temps nécessaire: la course de vitesse des hausses de taux en 2022 devient plutôt une course de fond, et la durée comptera au moins autant que le niveau», ajoute François Villeroy de Galhau.

Autres prévisions tout aussi incertaines, la Banque de France prévoit un «pic au premier semestre» de l’inflation avant une diminution vers 4% à la fin de cette année» et un objectif de 2% «d’ici fin 2024 à fin 2025».

Marc de café de la Banque de France : un pronostic de stabilisation monétaire

Marc de café de la Banque de France : un pronostic de stabilisation monétaire


le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau est coutumier deux pronostics fondés davantage sur son souhait personnel- et le marc de café- que sur des analyses pertinentes. Rappelons-nous par exemple de l’annonce du caractère très provisoire de l’inflation qui devait connaître son pic au cours de l’été 2022. Malheureusement l’inflation sera encore aussi forte en 2023 qu’en 2022 et évidemment va se cumuler.

En fait, le gouverneur de la Banque de France prend enfin conscience que la hausse des taux d’intérêt dont il a été partisan jusque-là comme ses amis allemands risquent de tuer la croissance. Dès lors, il tente de freiner les velléités de nouvelles augmentations du coût de l’argent.

Bien entendu, il n’en sait strictement rien car la hausse des taux d’intérêt correspond certes à l’augmentation des matières premières et de l’énergie mais aussi à un réajustement monétaire pour mieux faire coïncider masse monétaire et richesse réelle. Pour preuve,l’euro ne cesse de perdre de la valeur par rapport au dollar. La banque centrale européenne a distribué sans compter des masses de liquidités dont une grande partie a servi la spéculation et l’inflation.

Il se pourrait tout aussi bien qu’on connaisse une crise monétaire encore plus grande au cours de 2023 avec l’éclatement de plusieurs bulles.

Pourtant le gouverneur de la Banque de France a estimé jeudi qu’une période «de stabilisation monétaire» s’ouvrait et qu’il faudrait que les taux directeurs de la Banque centrale européenne atteignent un pic d’ici l’été. Pour tenter de juguler l’inflation, qui a atteint en 2022 des niveaux historiques, la plupart des banques centrales à travers le monde ont drastiquement remonté leurs taux directeurs, jusqu’alors proches de zéro.

«Après avoir atteint en décembre un niveau proche du “taux d’intérêt neutre” à 2%, nous entamons la deuxième phase vers la stabilisation monétaire: il serait souhaitable d’atteindre le bon “taux terminal” d’ici l’été prochain, mais il est trop tôt pour préjuger de son niveau», a déclaré le gouverneur dans ses vœux pour la nouvelle année. «Nous serons prêts ensuite à rester à ce taux terminal le temps nécessaire: la course de vitesse des hausses de taux en 2022 devient plutôt une course de fond, et la durée comptera au moins autant que le niveau», ajoute François Villeroy de Galhau.

Autres prévisions tout aussi incertaines, la Banque de France prévoit un «pic au premier semestre» de l’inflation avant une diminution «vers 4% à la fin de cette année» et un objectif de 2% «d’ici fin 2024 à fin 2025».

Prospective et marc de café : Macron serait candidat d’après Castaner !

Prospective et marc de café : Macron serait candidat d’après Castaner !


Il est clair que Christophe castaner n’a pas décroché la lune et qu’il n’aura sans doute jamais non plus le prix Nobel. Ce transfuge du parti socialiste annonce en effet que Macron  sera sans doute candidat et que le contenu du programme visera à mettre en œuvre les réformes qu’il  n’a pas été possible de réaliser au cours des 5 ans passès.

Le « nouveau projet, c’est d’abord porter les grandes réformes que nous n’avons pas réussi à faire pendant ce quinquennat », a déclaré solennellement dimanche le député des Alpes-de-Haute-Provence, à commencer par la réforme des retraites.

 

Le président du groupe LREM à l’Assemblée nationale, comme Madame Soleil,  prévoit l’avenir et annonce la candidature proche d’Emmanuel Macron à l’élection présidentielle. « Je ne doute pas qu’il soit candidat, il sera candidat » mais  »il lui appartiendra de le dire« , a déclaré Christophe Castaner sur BFMTV, s’en tenant à un délai de « plusieurs jours ou plusieurs semaines ».On se doute évidemment que ce ne sera pas dans plusieurs années !

 

Le « nouveau projet, c’est d’abord porter les grandes réformes que nous n’avons pas réussi à faire pendant ce quinquennat », a souligné le député des Alpes-de-Haute-Provence, à commencer par la réforme des retraites. Il faut  »sauver le régime des retraites aujourd’hui, il est totalement déficitaire, il y a une situation grave, donc on ne peut fermer les yeux », a martelé Christophe Castaner.

Mais le pouvoir d’achat, principale préoccupation des Français, devrait aussi être au programme, a assuré le président du groupe LREM, qui a défendu l’action de l’actuel gouvernement à ce sujet. « Nous avons mis en place à la fois des aides directes avec le chèque énergie ou l’indemnité inflation, nous avons mis en place des mesures directes pour protéger les Français. »

Bref, le propos fait ressentir une certaine fatigue et ou une certaine paresse chez  le président du groupe de la république en marche à l’Assemblée nationale. Mais ce n’est pas forcément un handicap dans le parti en marche puisque le seul qui décide de tout, c’est Macron.

 

«Quelle vague verte?» ( Marc Grivel, métropole de Lyon)

 «Quelle vague verte?» ( Marc Grivel, métropole de Lyon)

Marc Grivel considère dans l’Opinion que la victoire des écolos est une illusion d’optique.

Les élections municipales et métropolitaines de 2020 ont conduit, selon de nombreux commentateurs, à une « vague verte historique » avec la victoire de listes écologistes ou à forte dominante écologiste, notamment sur la métropole de Lyon. C’est pourtant une illusion d’optique : la réalité politique profonde de nos territoires est plus nuancée. Nous pouvons et devons aujourd’hui tirer quelques enseignements de ces élections.

La « vague verte » engloutie par le raz-de-marée de l’abstention

Le contexte sanitaire, social et politique, l’incertitude chronique sur la tenue du second tour des élections dans un entre-deux tours dilué dans le confinement, tout autant que la profonde crise de confiance entre les citoyens et le monde politique déjà existante ont conduit à un « raz-de-marée » de l’abstention, alors que, jusqu’ici, les élections municipales résistaient et constituaient le rempart de la démocratie de proximité.

Dans l’agglomération de Lyon, l’illisibilité des élections métropolitaines, la méconnaissance des enjeux, d’incompréhensibles alliances de second tour et l’absence de double scrutin dans près de deux tiers des communes (dont les conseils municipaux avaient été élus dès le 1er tour), ont encore accentué ce phénomène de désintérêt et de défiance.

Des résultats révélateurs d’une fracture territoriale qui s’approfondit

Au-delà même de la situation inédite dans lequel s’est inscrit ce scrutin, on constate que les résultats électoraux sont bien plus contrastés que la lecture simpliste qu’en ont donnée beaucoup de médias : la « poussée verte » est issue des centres urbains développés alors que, traduisant une vraie biodiversité électorale, la situation est bien différente dans les territoires périphériques et, au-delà, dans les territoires ruraux.

Il suffit d’observer les résultats des élections sénatoriales qui découlent de ces élections locales : la majorité de la droite et du centre droit en sort élargie, il n’y a pas eu de déferlante d’élus verts dans la Chambre haute.

Ces élections locales sont en réalité révélatrices de l’accentuation de la fracture territoriale avec un creusement des disparités démographiques et socio-économiques entre les grandes villes et les territoires périurbains ainsi que les villes moyennes et les territoires ruraux.

Un vote écolo conjoncturel porté par un changement structurel de génération

Dans les centres urbains et dans ce contexte d’abstention, le vote militant soutenant les listes écologistes, ainsi que le vote sur la seule préoccupation environnementale (sociétale, transversale, dont personne n’est propriétaire), ont pesé lourd. Il faut dire que l’inertie du monde politique, sur au moins trois décennies, a donné progressivement le sentiment aux Français que les problèmes écologiques n’étaient pas pris à bras-le-corps.

Nos concitoyens, notamment les plus jeunes, veulent que les choses aillent plus loin, plus vite et pensent – souvent à juste titre – qu’il est urgent d’agir. La « vague » électorale écolo, conjoncturelle par définition, révèle « en grand » l’arrivée sur la scène politique d’une génération nouvelle, qui vient amplifier le dégagisme amorcé en 2017. Elle va durablement imprimer sa marque dans la politique française et, en conséquence, la nature et le sens de nos engagements politiques individuels et collectifs.

Pour autant, la base politique n’est pas solide, le béton est encore frais. Ces élections confirment l’affaiblissement des partis de la gauche de gouvernement traditionnelle qui a permis à EELV, en bien des endroits, de préempter la position de clef de voûte de listes de gauche plurielle portées par ce changement générationnel fédérant des électeurs plus jeunes, plus militants, plus mobilisables.

Une métropole fragilisée par des dysfonctionnements programmés

Sur la métropole de Lyon, le nouveau mode de scrutin sur la base de 14 circonscriptions (dont le découpage pose encore question), avec son système de prime majoritaire, a en outre bénéficié à plein à EELV. Les résultats auraient été bien différents si le mode électoral était moins impropre à représenter la réalité politique des 59 communes.

Le conseil métropolitain issu de ces élections, et sa majorité, ne sont plus à l’image des territoires et de leurs habitants. Comment pourrait-il en être autrement quand 35 maires sur 59 n’en sont pas membres ?

Un phénomène subséquent a provoqué le déracinement préoccupant du conseil de la métropole : les associations ont remplacé les communes. À la faveur des élections de 2020 sont en effet entrés en masse dans l’hémicycle des militants associatifs, présents en force sur les listes écologistes, qui défendaient jusqu’ici des intérêts sectoriels, aussi louables et indispensables soient-ils. Or on ne gère pas une collectivité territoriale comme une communauté d’associations !

La légitimité d’un maire et celle d’un président d’association sont loin d’être les mêmes pour les citoyens. Alors qu’une association gère une cause, un intérêt spécifique, un maire doit gérer de nombreuses causes et intérêts de toute nature, pour des habitants très divers, et son arbitrage politique au quotidien se nomme l’intérêt général.

Espérons que la majorité métropolitaine saura s’ancrer dans la réalité et la diversité territoriales de la métropole et en tirer des décisions pragmatiques concertées. Dans le cas contraire, ce basculement de la métropole des communes vers les associations va conduire, amplifié par des arbitrages verticaux s’exonérant de réelles concertations, à des dysfonctionnements institutionnels majeurs préjudiciables aux orientations des politiques publiques et aux investissements. Au regard des enjeux pour la deuxième métropole de France et son 1,4 million d’habitants, les six ans à venir sont donc interrogés. Ils ne peuvent pas et ne doivent pas être six ans perdus.

Marc Grivel est conseiller de la métropole de Lyon, président du groupe Synergies métropole, maire de Saint-Cyr-au-Mont-d’Or de 2008 à 2020 et 1er vice-président de la Métropole de Lyon de 2017 à 2020.

Crise économique: Christine Lagarde lit dans le marc de café

Crise économique: Christine Lagarde lit dans le marc de café

 

Christine Lagarde s’est sans doute livré l’exercice de lecture de l’avenir dans le marc de café en affirmant notamment une probabilité de robotisation de 70 à 75 % dans l’industrie. Aussi une réduction des chaînes d’approvisionnement ( des flux ?) D’environ 35 %. On peut légitimement se demander où Christine Lagarde va chercher ces chiffres la. Et en plus d’affirmer que l’Europe  est particulièrement bien placé dans cette évolution des processus de production et de distribution. Une espèce de discours ésotérique fondé sur des chiffres tout à fait fantaisistes et colorés évidemment parce que c’est la mode de problématique écologique et de développement de la numérisation. Elle reprend des thèmes à la mode ( y compris si certains sont structurels) comme si ces évolutions pouvaient sortir l’Europe  de la crise conjoncturelle qu’elle subit. Pour l’avenir , des évolutions des modes de production et de distribution interviendront mais le problème c’est  comment, dans quelle proportion et dans quel calendrier . la venir décrit par Christine Lagarde relève de prédictions type Madame Soleil. La crise économique engendrée par la pandémie de Covid-19 va «changer profondément» l’économie mondiale, vers plus d’écologie, de numérisation et dans les modes de travail, et l’Europe est en «excellente position», a estimé samedi la présidente de la BCE.

Cette crise «va être une accélération de transformations qui étaient déjà latentes dans nos économies», a prédit la présidente de la Banque centrale européenne, présente en visioconférence aux rencontres économiques d’Aix-en-Seine à Paris.

«En fabrication, en travail, en commerce, ce que nous venons de vivre va accélérer les transformations et va entraîner probablement une évolution vers un mode vie plus soutenable et plus écologique», a-t-elle ajouté. Elle a notamment évoqué le télétravail, qui va «transformer les modes de fonctionnement de l’ensemble des salariés», au moins des pays développés, et «l’accélération de la numérisation, dans les services ou l’automatisation dans les industries». «On estime en ce moment que la crise devrait entraîner une contraction des chaînes d’approvisionnement de l’ordre de 35% et une augmentation de la robotisation dans les industries de l’ordre de 70 à 75%», a indiqué Mme Lagarde. Par ailleurs, du fait du confinement qui a concerné au même moment la majorité des habitants de la planète, le commerce en ligne s’est fortement développé. Cette évolution devrait encore s’accélérer à l’avenir «au détriment du commerce plus traditionnel», a-t-elle ajouté.

Face à ces transformations, «l’Europe est en excellente position pour prendre cette transition en marche», a-t-elle jugé. Le continent «héberge déjà le plus vaste secteur d’économie circulaire et d’innovation écologique au monde», a noté Mme Lagarde, ajoutant que l’euro était la première monnaie utilisée pour l’émission d’obligations vertes. Elle a toutefois estimé que cela ne serait «pas suffisant» et qu’il faudrait mettre en place «un cadre de politique économique qui permette de mobiliser les financements» nécessaires. Un discours qui se veut euphorisant qui mélange tous les thèmes à la mode sans indiquer évidemment un seul exemple d’un secteur qui pourrait évoluer dans les sens  très divers qu’  évoquent la patronne de la BCE

Le travail cause de la pandémie et du changement climatique) ? Marc Guyot et Radu Vranceanu)

Le  travail  cause de la  pandémie  et du  changement climatique) ? Marc Guyot et Radu Vranceanu)

 

 

 

 

Chronique de Marc Guyot et Radu Vranceanu, Professeurs d’économie à l’ESSEC dans la Tribune

 

Le déconfinement et la reprise progressive de l’activité dans un grand nombre de domaines a également touché la production de manifestes indiquant la direction que l’humanité doit prendre une fois la crise résolue. La lecture du document « Démocratiser l’entreprise pour dépolluer la planète » est édifiante

 

Celui publié dernièrement par Le Monde et d’autres journaux internationaux ce vendredi 15 mai - Démocratiser l’entreprise pour dépolluer la planète - atteint des sommets à la hauteur de la période que nous vivons. Ses respectables auteurs, tous universitaires reconnus dans leur domaine de spécialisation propre, affirment que l’exploitation des travailleurs dans les entreprises et l’économie de marché sont non seulement la cause du changement climatique mais également celle de la crise du coronavirus. Dès lors, leur proposition pour vaincre le virus et stopper le changement climatique est l’emploi garanti pour tous et la co-représentation des travailleurs dans les conseils d’administration. Bien qu’ils dénomment « green deal » cette proposition, on ne voit pas immédiatement en quoi l’emploi garanti à vie ou l’autogestion pourraient contribuer à stopper la pandémie et diminuer les émissions de dioxyde de carbone.

On y apprend par ailleurs que c’est la soumission de l’hôpital aux lois du marché qui est la cause du nombre élevé de décès dus au coronavirus. Le ministère de la Santé, les ARS et le haut personnel de direction de ces places fortes de l’interventionnisme d’Etat apprécieront. On doit donc déduire en corolaire que les relativement bonnes performances des hôpitaux et des systèmes de santé allemand ou sud-coréen proviennent d’une meilleure résistance à l’économie de marché.

En reprenant un concept ancien, présent dans une littérature très spécifique, les auteurs dénoncent la « marchandisation » du travail, qui, selon eux, ne doit pas être vendu et échangé comme une marchandise ordinaire. Pour les rassurer, nous leur recommandons la lecture des 3.500 pages du code du travail français et particulièrement celle des mille et une règles qui fixent le salaire minimum, la durée maximale du travail, la durée minimale, les congés, la couverture sociale, les modalités de négociation, les sanctions pour licenciement abusif, les droits de chômeurs, etc. Sans considération pour la protection du travail propre à notre pays, ils demandent donc la création d’une garantie d’emploi pour tous, financée en Europe par… la BCE. La suggestion d’un tel transfert de dépenses directement sur la banque centrale rejoint celles des grands partis populistes qui rêvent encore d’un retour aux monnaies nationales et d’une monétisation des dépenses sociales, en tout dédain du risque d’inflation. Cette proposition risque de recevoir un accueil particulièrement froid chez nos amis allemands.

Conscient peut-être que leurs propositions ne sont pas franchement nouvelles, les auteurs du manifeste proposent néanmoins du neuf en matière de novlangue. Les employés ne sont plus des travailleurs mais des « investisseurs en travail ». Les auteurs insistent également sur le fait que les humains au travail ne sont pas des ressources. Faudra-t-il débaptiser dans l’urgence les départements des ressources humaines dans toutes les infâmes entreprises et leur trouver un nom novlangue moins attentatoire à leur dignité ? Nous attendons la position de la ministre du Travail ex-directrice des ressources humaines d’une grande entreprise présumée maltraitante.

En cherchant bien dans le manifeste, il est néanmoins possible de trouver des points sur lesquels il est possible d’être d’accord. Il est dit que les personnels essentiels qui ont travaillé pendant la période de confinement ont témoigné de la dignité du travail et de l’absence de banalité de leurs fonctions. Nous appuyons sans réserve ces paroles qui par ailleurs sont approuvées par 100% des Français.

De notre côté nous estimons que la crise révèle la nécessité d’une révision en profondeur de l’organisation de notre système de soin dont la faille essentielle n’est pas dans les moyens alloués mais dans le gaspillage de ceux-ci du fait d’une centralisation extrême qui a montré encore une fois ses limites. Nous partageons également l’objectif de lutte contre le réchauffement climatique mais nous estimons que l’objectif de limitation de l’augmentation des températures à 2 degrés en 2050, tel qu’il a été défini par les accords de Paris, peut être atteint par un déploiement courageux de la taxe carbone et par le développement de l’énergie renouvelable tiré par l’innovation technologique et la finance verte.

 

Pas de conquête des acquis sociaux sans révolution (Marc Lambron, académicien )

Pas de  conquête des acquis sociaux sans  révolution (Marc Lambron, académicien )

 

 

Invité sur Europe 1, l’académicien Marc Lambron, auteur de Carnet de bal : chroniques 4 (Grasset), est revenu sur les mouvements sociaux qu’a connu la France en 2019, notamment la mobilisation contre la réforme des retraites. Ils illustrent d’après lui l’essence et l’aspiration révolutionnaires spécifiques à la France.

« Nous sommes dans un pays d’essence et d’aspiration révolutionnaire depuis au moins deux siècles et la conquête des acquis sociaux s’est faite par révolution, par renversement, ou en tout cas par épreuve de force », explique Marc Lambron. Il ajoute : « A la différence de certains pays qui sont plus aptes à la congestion ou au dialogue comme l’Allemagne, là on voit bien qu’on est dans le cas assez français d’une opposition qui devient frontale et peut-être fractale. »

L’académicien estime qu’en ce moment, « il y a une cristallisation sur ce mode insurrectionnel qui appartient à notre histoire » et que cela s’est joué en deux temps. Tout d’abord un phénomène de « dégagisme » qui touche le monde entier et « qui donne des solutions politiques extrêmes comme Trump, le Brexit, les démocratures en Europe de l’Est ». Pour Marc Lambron, « l’élection de 2017 a témoigné d’une certaine sagesse française à cet égard. Il y a eu un dégagisme mais on l’a joué au centre ».

Cependant, dans l’année et demie qui a suivi l’élection d’Emmanuel Macron, il y a eu « le dégagisme de la rue » qui a commencé par les gilets jaunes. « Emmanuel Macron, qui est l’agent d’un coup de balai, se retrouve lui-même comptable – ce qui est finalement pas tout à fait juste au bout de 16 ou 17 mois de présence au pouvoir – de 30 années au moins d’incuries, ou de tergiversations, ou d’immobilisme. C’est un peu ça le sens de la crise aujourd’hui », analyse-t-il.

Les différents mouvements sociaux qu’a connu la France ces derniers mois font dire à l’académicien que « ce que nous affrontons en ce moment sont des systèmes extrêmement protecteurs qui ont été mis en place pendant une phase de prospérité, c’est-à-dire les Trente Glorieuses, et nous nous y sommes habitués ». Il estime toutefois qu’ »il nous faut prendre, d’une façon ou d’une autre, le deuil ou le deuil partiel de ce à quoi nous étions habitués ».

 

 

«Macron épouse les ambiguïtés de la Ve République, y compris dans ses aspects les plus sombres» (Marc Endeweld)

«Macron épouse les ambiguïtés de la Ve République, y compris dans ses aspects les plus sombres» (Marc Endeweld)

 

Marc Endeweld, journaliste d’investigation explique dans le journal l’Opinion l’opa de Macron sur la France et le rôle des réseaux. il traite de la conception très monarchique de Macron.  Il a publié en 2015 la première biographie d’Emmanuel Macron, L’ambigu Monsieur Macron, (Flammarion).

Votre livre décrit la stratégie déployée par Emmanuel Macron dans son ascension, puis à l’Elysée, consistant à « jouer » avec des réseaux déjà existants, et non à construire ses propres réseaux…

Quand Emmanuel Macron se lance à l’assaut de l’Elysée, il n’a ni expérience politique, ni expérience élective. Pour prendre le contrôle de l’Etat, il a donc méthodiquement récupéré les réseaux de ses concurrents, à gauche comme à droite. Il a effectué, avec sa femme Brigitte, un véritable travail de réseautage, mais cela va au-delà. Il ne s’est pas uniquement investi dans les réseaux du monde économique ou de Bercy, dont il était issu, mais aussi dans les réseaux de la défense, de la sécurité, de la diplomatie, ou de la Françafrique, ces réseaux qui traversent l’histoire de la Ve République. Le « en même temps ​» macronien lui a permis de récupérer ce qu’on appelle généralement les réseaux transversaux, qui ont toujours été utilisés par les partis traditionnels de gauche et de droite ces trente dernières années. Dans les coulisses, l’homme du « ​nouveau monde ​» s’est en réalité fortement appuyé sur « ​l’ancien monde ​».

 

En quoi cette stratégie est-elle exceptionnelle ?

Elle est exceptionnelle d’abord par sa rapidité : il est parvenu au pouvoir après à peine deux ans de réseautage proprement politique, avec les fameux dîners à Bercy par exemple. Ce qui est original ensuite, c’est qu’il ne dispose pas de parti traditionnel, comme les autres responsables politiques et donc pas de contre-pouvoir, y compris parmi ses sympathisants. Il est seul, avec ou face à ces réseaux, et surtout il n’existe pas de tampon entre l’Elysée et certaines personnes qui ont pu lui rendre des services au moment de son ascension. Bien sûr, il y a toujours eu des hommes de l’ombre dans la Ve, il y a toujours eu des réseaux particuliers, notamment dans la sécurité, le renseignement. Mais ce qui frappe chez Macron, c’est que, malgré sa jeunesse, il ne renouvelle pas la pratique du pouvoir, contrairement à ce qu’il avait promis aux Français lors de sa campagne de 2017. Au contraire, il épouse les ambiguïtés de la Ve République, y compris dans ses aspects les plus sombres, comme on a pu le voir avec l’affaire Benalla. Aussi, dès qu’il y a un incident, il se retrouve en première ligne. C’est un peu comme s’il manœuvrait une voiture sans amortisseurs : dès qu’il y a un choc sur la route, il est atteint directement.

On a beaucoup dit, au moment de l’affaire Benalla, qu’Emmanuel Macron n’avait pas de réseau dans la police. Est-ce le cas ?

Oui et non. Comme dans tous les ministères purement régaliens, il avait effectivement peu de réseaux. Mais place Beauvau, il s’est appuyé sur les réseaux historiques de Pierre Joxe, qui sont encore puissants trente ans après, et il a utilisé les réseaux Sarkozy. Macron a par exemple régulièrement reçu, pendant la campagne, les conseils d’Ange Mancini (N.D.L.R.: ancien coordonnateur national du renseignement auprès de l’Elysée). Pour autant, il s’est retrouvé en difficulté avec ce ministère. Il n’a pas réussi à contrôler entièrement cette administration. Peut-être parce qu’il n’a pas mis à Beauvau de ministres forts : Collomb n’avait pas de réel pouvoir, et le directeur de cabinet de Castaner a été choisi par l’Elysée. Plus généralement, Macron est un colosse aux pieds d’argile : il concentre beaucoup de choses sur sa personne ou sur l’Elysée, or il ne peut tout contrôler. Il est dans ce rêve de toute-puissance, mais dans ces institutions de la République complexes, c’est extrêmement difficile.

Vous consacrez un chapitre à l’Afrique : Emmanuel Macron met-il en œuvre une diplomatie parallèle en Afrique?

Je démontre que les réseaux de la Françafrique, notamment ceux de Sassou-Nguesso au Congo Brazzaville, ont parfois été en contact direct avec Macron, bien en amont de la présidentielle. C’est le cas de l’Algérie également : lors de son voyage à Alger de février 2017, derrière ses déclarations sur « ​les crimes contre l’humanité ​» qui ont attiré l’attention des médias, Emmanuel Macron a rencontré en coulisses les réseaux affairistes algériens, alors au pouvoir, sans prendre beaucoup de précautions. Ces oligarques autour de Bouteflika sont aujourd’hui en prison, du fait des événements. Mais j’ai surtout découvert qu’Alexandre Benalla était au cœur de réseaux qui ont aidé Macron sur l’Algérie, et qui, pour certains, sont « ​nouveaux ​» de l’aveu même d’un ancien responsable algérien. Cette « ​affaire Benalla ​» n’a donc pas qu’un volet russe, elle a aussi une clé algérienne.

« A l’heure du 2.0, Macron est un Président qui court-circuite beaucoup les jeux de pouvoir institutionnels, de par ses multiples prises de contact informelles, via la messagerie Telegram. Cela lui permet de récupérer en direct beaucoup d’informations »

Le Président a-t-il partie liée avec ces réseaux algériens qui l’ont aidé ?

En « ​off ​», beaucoup de mes interlocuteurs s’interrogeaient sur la gêne et le silence de l’Elysée ces derniers mois sur le dossier algérien. Macron a surtout un rapport de realpolitik en diplomatie, il ne fait pas de morale. Par exemple, comment expliquer autrement le fait que Sassou-Nguesso, plutôt mis à l’écart par François Hollande, ait pu participer en bonne place à une conférence diplomatique sur la Libye organisée par la France ? Par ailleurs, à l’heure du 2.0, Macron est un Président qui court-circuite beaucoup les jeux de pouvoir institutionnels, de par ses multiples prises de contact informelles, via la messagerie Telegram. Cela lui permet de récupérer en direct beaucoup d’informations. Les diplomates s’en plaignent. Le Quai se sent dépossédé par une pratique extrêmement personnelle et secrète d’Emmanuel Macron.

On a beaucoup présenté Emmanuel Macron comme le candidat, puis le Président, des grandes fortunes du CAC 40. Est-ce effectivement le cas, selon vous ?

Une phrase est revenue souvent dans mon enquête : « ​Macron séduit, il utilise, il jette ​». S’il est redevable à beaucoup de gens, il leur rend peu. Et s’il a profité de proximités avec des grands patrons, il n’a pas bénéficié du soutien de l’ensemble du CAC 40. Il ne faut pas oublier qu’à la présidentielle, une partie d’entre eux soutenait François Fillon. Le grand patronat est un univers divers : il ne faut pas sous-estimer les luttes internes et les intérêts contradictoires en son sein. Et paradoxalement, le candidat Macron, qu’on a présenté comme le candidat de la « ​nouvelle économie ​», n’a pas reçu suffisamment d’argent dans un premier temps ​​: fin 2016, il n’avait levé que 5 millions d’euros via les dîners de collecte et les dons sur internet. Enfin, certains grands patrons sont aujourd’hui assez déçus par la pratique du pouvoir d’Emmanuel Macron. Le climat social dans le pays s’est extrêmement dégradé avec les Gilets jaunes. Ils s’aperçoivent qu’un homme seul, y compris dans le cadre de la Ve République, ne peut avoir toutes les solutions aux blocages du pays.

 

 

 

« La “peuplecratie » est un défi pour la démocratie» (Marc Lazar)

 « La “peuplecratie » est un défi pour la démocratie» (Marc Lazar)

Marc Lazar, sociologue et historien s’interroge sur la peuplecratie dans une tribune au Monde (extraits)

« Pourquoi ce néologisme un peu lourd de « peuplecratie », alors que l’étymologie grecque de démocratie, c’est « le pouvoir du peuple » ?

Je dois reconnaître qu’en italien cela sonne mieux : popolocrazia.Ilvo Diamanti, avec qui j’ai écrit ce livre, est aussi un éditorialiste de talent, inventeur de mots. L’émergence de nouvelles pratiques politiques, voire de nouveaux régimes, nécessite de forger de nouvelles notions. Ainsi, dans les années 1930 et 1950, celle de « totalitarisme » pour tenter d’appréhender ce que pouvaient avoir en commun le bolchevisme, le fascisme et le nazisme.

Or, qu’ils soient au pouvoir ou dans l’opposition, les mouvements populistes d’aujourd’hui sont en train de faire muter les bases mêmes de la démocratie libérale et représentative.

La démocratie, dans sa pratique moderne, se fonde sur la séparation des pouvoirs et sur tout ce qui relève de l’Etat de droit né des Lumières. Nous entrons maintenant, sous la pression de ces mouvements, dans une tout autre période…

Ces mouvements populistes et leurs leaders martèlent que la souveraineté du peuple est sans limite. Tous les contre-pouvoirs doivent céder le pas au suffrage universel.

Le deuxième élément qui les caractérise est la mise en avant non seulement d’une démocratie directe mais aussi d’une démocratie immédiate, sans aucune forme de médiation, passant outre les corps intermédiaires et les partis.

Leur discours est celui d’une urgence permanente. Ils clament qu’il y a des solutions simples pour tous les problèmes, d’où leur demande d’une pratique référendaire systématique. Ils ont compris aussi la révolution que représentent les réseaux sociaux, qu’ils utilisent à fond.

La « peuplecratie » serait donc à la fois une nouvelle phase de la démocratie et une menace pour celle-ci ?

La « peuplecratie » n’a pas encore vaincu, mais elle est là comme un grand défi pour la démocratie libérale et représentative. »

L’erreur stratégique en matière de croissance de Macron (Marc Guyot et Radu Vranceanu)

L’erreur stratégique en matière de croissance de Macron (Marc Guyot et Radu Vranceanu)

 

Hausse de fiscalité pour compenser l’impuissance de Macron à reformer l’Etat constitue une erreur stratégique grave pour la croissance estiment Marc Guyot et Radu Vranceanu, Professeurs à l’ESSEC. (La Tribune)

 

« Après 10 années de croissance continue de la pression fiscale sur les classes moyennes, les dernières mesures « anti-automobile » ont déclenché un mouvement de protestation et de contestation du pouvoir sans précédent. Le 10 décembre, lors de son allocution télévisée, le président Emmanuel Macron a révélé une série de mesures visant l’amélioration du pouvoir d’achat des travailleurs à faible et moins faible revenu, à hauteur de 10 milliards d’euros ainsi que la suppression de la taxe controversée. Surfant sur la révolte des gilets jaunes contre la taxation excessive des classes moyennes, certains essayent de la transformer en révolte contre la redistribution supposée injuste de la richesse. Ces voix réclament notamment plus de taxes sur les revenus et patrimoines élevés, sur les grandes entreprises et le rétablissement de l’ancien ISF. Il y a un lien entre redistribution des richesses et création de richesses, mais ce lien n’est pas linéaire. Un excès d’inégalités des revenus peut affaiblir la croissance, tout comme un excès d’égalitarisme, résultant d’un excès de charges sur les entreprises ou les hauts revenus. Dans un monde de mobilité des capitaux, la taxation excessive fait fuir les capitaux et les emplois que l’investissement aurait soutenus. Il nous apparaît que le problème de la France d’aujourd’hui n’est pas celui d’un déficit d’égalitarisme, mais son excès. En effet, en termes de création de richesse, la France est mal en point comparée à ses partenaires commerciaux. Cela fait bientôt 20 ans que la France a rejoint l’euro et le nouveau souffle promis n’a jamais été au rendez-vous. Pendant ces vingt années, la France a doucement mais sûrement décroché vis-à-vis de ses partenaires traditionnels et l’examen des chiffres avec l’Allemagne et les Etats-Unis est inquiétant. Le PIB par habitant de la France en 2017 était de 42.600 dollars (38.600 en parité de pouvoir d’achat), contre 46.000 dollars (44.400) pour l’Allemagne, et 53.100 dollars (54.000) pour les Etats-Unis (données Trading Economics). Pour rattraper ce retard en création de richesse, il faudrait à la France entre six et sept ans d’une croissance de deux points de pourcentage supérieure à celle des Etats-Unis. S’il est vrai que la France compensait sa richesse par habitant plus faible par un taux de pauvreté plus faible, cela reste légèrement vrai face aux Etats-Unis mais pas face à l’Allemagne. De même, les salaires des travailleurs non-qualifiés sont inférieurs en France à ceux des Etats-Unis ou d’Allemagne (Trading Economics) où la distribution des revenus est plus égalitaire (Banque Mondiale). Enfin, le taux de chômage français est plus du double des taux de chômage allemand et américain (9% contre moins de 4%). Le gouvernement actuel n’est bien sûr pas le seul responsable du décrochage de l’économie française. A son actif, il a tenté de mettre en place des mesures destinées à alléger le carcan de règles et le poids des taxes qui freinent la croissance des entreprises et donc de l’emploi. Si ces réformes vont dans la bonne direction, outre d’être timides et largement insuffisantes, elles ont été plutôt mal expliquées par ce gouvernement dont la communication n’est pas le point fort. De plus, des réformes structurelles urgentes comme la réforme du code du travail, que le gouvernement avait su accompagner, sont mises en danger par des décisions budgétaires brutales, comme la taxe sur les carburants, insuffisamment expliquées et qui pouvaient attendre. En revanche, le gouvernement n’a pas osé remettre en cause des facteurs clefs comme les 35 heures, la protection excessive du CDI ou le salaire minimum unique. Les syndicats ont eu gain de cause sur l’inversion des normes ou la gestion de l’assurance chômage, perpétrant ainsi une organisation du travail inefficace, dont les origines corporatistes remontent à la seconde guerre mondiale. On a cru qu’Emmanuel Macron allait réussir à ramener la France à un déficit inférieur à 3% du PIB, mais il semble que ça ne sera pas le cas avec ces 10 milliards de dépenses supplémentaires. Emmanuel Macron, comme ses prédécesseurs, n’a mis en place aucune mesure crédible de réduction des dépenses publiques alors que son niveau est excessif, équivalent à 56,4% du PIB, et est le plus élevé des économies avancées. Pour le réduire, il aurait fallu profondément réorganiser l’Etat en sortant de la sphère publique plusieurs activités, tout en renforçant les fonctions régaliennes. Tout particulièrement le gouvernement s’est refusé à s’attaquer aux dépenses de fonctionnement excessives de l’Etat qui représentent un tiers des dépenses et sont pointées du doigt par la Cour des Comptes. De même, il n’a pas lancé de réforme courageuse des retraites. Sans contester la réalité de certaines retraites modestes, il faut savoir que le montant moyen des retraites en France est parmi les plus élevés des pays de l’OCDE et l’âge effectif de départ à la retraite des hommes est le second le plus faible devant le Luxembourg (données OCDE, 2017).[1] Le poids des dépenses publiques de retraite dans le PIB est de 14,9% en moyenne sur 2013-2015, comparé à 10% pour l’Allemagne. La crise des gilets jaunes révèle que la stratégie de multiples réformes à petits pas, sans réduction du poids de l’Etat et accompagnée d’augmentation des taxes n’a pas permis au pays de retrouver son dynamisme économique. Pire encore, cet échec risque de compromettre le message réformateur que portait Emmanuel Macron et ouvre la porte au discours populiste redistributif d’une richesse qui ne risque pas de croître si les préconisations des populistes sont mises en œuvre. »

[1] http://www.oecd.org/els/emp/average-effective-age-of-retirement.htm Panorama des pensions 2017. Les indicateurs de l’OCDE et du G20 DOI:https://doi.org/10.1787/pension_glance-2017-fr

Marc de café : L’Insee prévoit une progression de la consommation des ménages

Marc de café : L’Insee prévoit une progression de la consommation des ménages

 

Pour redonner le moral aux acteurs économiques le gouvernement ne cesse de solliciter les différents instituts afin de redonner un coup de peinture rose à une conjoncture très grisâtre au premier semestre. Les Français ont en effet le moral dans les chaussettes qu’il s’agisse des ménages ou des entreprises. L’INSEE sort de son chapeau l’annonce d’une progression de la consommation des ménages de 1,1 %. Au premier semestre l’activité a nettement et a été marquée par un repli de la consommation et une baisse du pouvoir d’achat. Pour les économistes de l’institut de statistiques, « le trou d’air de la première partie de l’année » est passé…….. Mais « les incertitudes internationales persistent. » Des économistes qui oublient que la France fait moins bien que la moyenne de l’union européenne. Après avoir longtemps soutenu comme le gouvernement que la croissance française progresserait de 2 % courent de l’année 2018, l’INSEE est bien contrainte de s’aligner sur les prévisions des organismes internationaux et ne prévoit plus que 1,6 % pour la croissance du Pib. L’organisme anticipe une croissance du PIB à 0,5 % au troisième trimestre et 0,4 % aux derniers trimestres après 0,2 % sur les six premiers mois de l’année. Parmi les facteurs avancés pour expliquer ce rebond, l’Insee prévoit un regain du pouvoir d’achat des Français jusqu’à fin décembre. On se demande bien par quel miracle car malheureusement si la croissance se tasse, l’inflation, elle, reprend de la vigueur puisqu’elle est actuellement sur un rythme annuel de 2,3 %. Or les salaires, les pensions et des prestations sociales ne seront pas revalorisées à cette hauteur. Et l’INSEE d’avancer une merveilleuse explication : « Les ménages ne semblent pas encore avoir intégré dans leurs anticipations la hausse à venir de leur pouvoir d’achat : leur comportement de consommation pourrait donc surprendre, à la hausse comme à la baisse. » Bref des prévisions qui ressemblent à celles de Madame Irma !

 

L’échec de l’impôt à la source : Marc Bidan

L’échec de l’impôt à la source : Marc Bidan

Par Marc Bidan,  Professeur des Universités – Management des systèmes d’information – Polytech Nantes, Université de Nantes

« Il s’agit ici d’aborder les raisons de l’échec annoncé du déploiement du projet de prélèvement de l’impôt à la source en France. Concrètement, il s’agirait dans un premier temps d’un report plutôt que d’un abandon ou d’un arrêt.

À ce propos, l’entrevue programmée ce mardi 4 septembre à Paris afin que G. Darmanin apporte « des réponses claires » au premier ministre et au président de la République signera probablement la fin du cafouillage médiatique. Elle signera aussi a minima le report de cette réforme de l’impôt sur le revenu (IR) juste avant le conseil des ministres réunissant le nouveau gouvernement avec le ou la remplaçant·e de Nicolas Hulot.

Un préambule sur la nature du changement envisagé

Comme souvent dans le cas de vastes projets publics ou privés, présentés un peu rapidement comme simplement informatiques ou techniques, les enjeux et les défis dépassent largement ce périmètre opérationnel pour devenir organisationnels, économiques, sociaux, contextuels et politiques. Il s’agit de bien appréhender la transformation organisationnelle déclenchée en partie par la transformation informatique.

C’est le cas de ce projet de prélèvement de l’impôt à la source – par l’employeur pour le fisc – qui se devait de remplacer l’acquittement de l’impôt – par le contribuable pour le fisc – en vigueur dans sa forme actuelle depuis de nombreuses années. Cette inversion de la logique du règlement de l’impôt n’est certes pas anodine. D’une part sur le fond une implication volontaire (l’acquittement de l’impôt par le contribuable) est remplacée par un acte subit (le prélèvement de l’impôt par le fisc) et d’autre part sur la forme l’arrivée d’un tiers (l’employeur) implique la délicate interconnexion puis interopérabilité de son (ou ses) système d’information avec celui (ou ceux) du fisc.

Notons également que cette dématérialisation de l’acte, cette mécanisation du paiement et in fine cette déresponsabilisation du contribuable prélevé sont également des questions importantes liées à cette réforme. Cela peut renvoyer à l’interrogation sur des Français qui seraient (ou pas) « pschychologiquement prêt » évoquée par le ministre G. Darmanin le 1 9 2018.

Néanmoins, nous n’aborderons ici que les facteurs qui ont pu condamner, une Nième fois en France, le projet de prélèvement à la source sans entrer dans les débats sur la pertinence même de ce choix particulier de collecte de l’impôt. En effet, face à de tels projets qui ne sont certes pas uniquement informatiques, nous pouvons insister sur trois autres types de facteurs à l’origine du (futur) report.

Des facteurs informatiques

Face à de tels projets informatiques complexes dont le périmètre est vaste, la nature est sensible et dont les aspects sont à la fois techniques, juridiques, humains et organisationnels, les risques d’échec ne sont pas négligeables. Si nous évoquons bien là un certain type de bug, c’est surtout au sens d’une non-conformité entre ce qui est souhaité (théoriquement) par le concepteur et porteur du projet (l’état, le fisc) et ce qui est constaté (réellement) par le client final (le contribuable).

Ce type de bugs, de non-conformité et/ou de dysfonctionnement opérationnels s’expliquent en général par une double complexité qui peut parfois mener à l’échec. De plus, dans le cas de cette réforme, cet effet ciseau est renforcé par une difficulté logique – qui nous différencie de nos voisins européens – celle d’un calcul à effectuer par contribuable (individu) et non plus par foyer fiscal (famille).

Dans un premier temps, à la suite des problèmes de fond liés à la conception, à l’architecture et au schéma directeur même du système d’information (SI) qui ont du être correctement pensés et pilotés par Bercy depuis ces derniers mois, il est fréquent de clairement sous-estimer la difficulté opérationnelle à modéliser, à programmer, à paramétrer, à interconnecter et à intégrer les divers bases de données, logiciels, sous-systèmes et systèmes d’information (ici ceux de l’administration fiscale) avec ceux des autres acteurs impliqués qui peuvent être très différents (ici ceux des caisses de retraite, employeurs – grands comptes, PME, TPE… –, Urssaf et de très nombreux autres opérateurs).

Ainsi nous pouvons lister, les risques de bugs de type 1 concernant les montants prélevés (ex : plusieurs fois) et/ou de type 2 concernant les individus prélevés (ex : homonymie) et/ou encore les risques classiques liés à l’ambiguïté, aux doublons, aux aléas ou aux redondances (ex : foyer/individu/adresse) sont réels. De plus, ils sont massifs comme le souligne une note interne de la DGFiP parue ce dimanche et évoquant un effet « marée noire ». Enfin, ce type de processus d’intégration informationnelle est toujours complexe et repose sur trois phases délicates :

  1. homogénéisation et intégration des bases de données (avec le passage de la familiarisation à l’individualisation) ;
  2. standardisation et intégration applicative (des imposants ERP/PGI aux modestes suites bureautiques) ;
  3. urbanisation et intégration organisationnelle.

Dans un second temps, il est fréquent de surestimer les ressources (matérielles, financières et personnelles) mais aussi le temps et les données réellement disponibles pour déployer ce type de système d’information inter organisationnel (SIIO) à très large périmètre. L’histoire récente ne manque pas d’exemples de bugs et de désillusions à commencer par ce qui est arrivé lors du rapatriement du régime social des indépendants (RSI) dans le régime général ou depuis le déploiement du chaotique système intégré de paiement des soldes des militaires (Louvois).

En règle générale, même si l’expression et l’interprétation des besoins d’une organisation reste très délicate à rédiger, lors de l’intégration puis de la mise en œuvre de tels systèmes d’information inter-organisationnels, un maximum de 80 % du livrable final apparaît réellement conforme à ce qui avait spécifié dans le cahier des charges fonctionnel. Les 20 % restants ne sont ni testés ni validés et peuvent donc être à l’origine de dysfonctionnements d’autant plus lourds que les sous-systèmes d’origine étaient hétérogènes. Concernant l’IR, l’État peut-il risquer de se priver de 20 % de ses 75 milliards annuels de rentrées fiscales ?

Des facteurs économiques

Les dimensions économiques ne sont pas négligeables car les voyants ne sont plus – comme l’an passé – au vert. La croissance montre des signes de faiblesse, les taux d’intérêt remontent et le prix de l’énergie aussi (pétrole, gaz…). Il ne faudrait pas en plus mécontenter les offreurs – les entreprises – et faire douter les demandeurs – les contribuables – même si la moitié des foyers ne paient pas l’IR !

Du côté de l’offre, les entreprises ont clairement annoncé lors de leur récente université d’été qu’elles étaient défavorables à cette réforme (elles souhaitent un moratoire d’un an) car elles redoutent une bureaucratisation chronophage et complexe en devenant collecteur d’impôt. De plus, même si des dispositions ont déjà été prises en ce sens, elles refusent également une quelconque responsabilité juridique en cas d’éventuelles erreurs ou anomalies dans la collecte. Plus largement, les familles avec emplois à domicile (cas déjà reporté d’un an), les professions libérales, les petites et moyennes entreprises, les commerçants et artisans sont opposées à ce surcroît de travail et le font allègrement savoir.

D’autre part, du côté de la demande, les 16 millions de foyers fiscaux qui paient l’impôt sur le revenu restent partagés, moins de la moitié y sont favorables. Ils redoutent, notamment outre les classiques problématiques liées à la transparence et la confidentialité avec leur employeur, le fameux mois de janvier 2019 lorsqu’ils verront leur premier salaire net amputé par le prélèvement à la source. Cette perte de pouvoir d’achat perçue risque de se traduire immédiatement sur la consommation des ménages et la croissance globale risque d’être impactée. L’effet – couplé avec la baisse perçue du pouvoir d’achat des retraités et avec une épargne de précaution massive – serait catastrophique.

Économiquement, le calendrier n’est certes pas favorable…

Des facteurs contextuels

Rien ne presse. Cette réforme est dans les tuyaux de Berçy depuis longtemps. Un an de délai supplémentaire ne serait aucunement une catastrophe pour une réforme perçue – à tort – en cette rentrée dans la population française comme purement technocratique !

Elle est apparue en 1939 en France puis abandonnée. Elle réapparaît sous le gouvernement de M. Rocard, alors que celui-ci tentait de démocratiser la mensualisation. Puis cette réforme fut réactualisée et programmée sous la présidence de F Hollande avec E. Macron dans le gouvernement. Ce dernier en a hérité à son arrivée au pouvoir en 2017 sans jamais réellement en faire une réforme de premier plan.

Le calendrier ne plaide pas pour le déploiement dans l’urgence de cette réforme – de plus l’IR, avec la TVA, est l’un des impôts qui « rentre » le mieux – et un an de plus ou de moins ne serait aucunement une catastrophe !

Contextuellement non plus, la réforme ne semble pas opportune…

Et des facteurs politiques

Le président E. Macron est dans une situation fragilisée. Son été fut pollué par l’affaire A. Benala, sa rentrée est perturbée par la démission de N. Hulot, il serait bon que son hiver ne soit pas être gâché par les bugs, dysfonctionnements et autres couacs du déploiement raté du prélèvement à la source. La perception 1) d’une baisse du pouvoir d’achat et 2) d’un flottement politique et administratif ne ferait que renforcer une défiance qui gronde.

De plus, le président s’est promis de relancer son leadership européen (et celui de la France) et de contribuer à remporter les élections européennes à la tête du camp progressiste. Ce type de couacs serait catastrophique en France mais peut être aussi au niveau européen où sa crédibilité réformatrice serait amoindrie.

Enfin, en renonçant, donc en désavouant son ministre de l’Action et des Comptes publics et la haute administration qu’il dirige, le président pourrait se prévaloir d’un nouveau rôle… celui de protecteur des français et en particulier des contribuables. Il montrerait ainsi qu’il peut accepter de perdre de sa superbe et s’adapter à un contexte économico-politique moins favorable pour renoncer à un projet devenu anxiogène.

Politiquement, paradoxalement, un report pourrait être bienvenu…

Report, moratoire, abandon ou arrêt

Le sort de cette réforme semble scellé. Le report est probablement déjà acté et la question de son « arrêt », selon les mots du ministre en matinée le 1er septembre, est même clairement abordée. Un plan bis est déjà savamment livré en pâture à la réflexion des observateurs…

Il s’agirait d’une année 2018 qui resterait blanche, puis d’une année 2019 durant laquelle la mensualisation deviendrait obligatoire – mais calculée sur 12 mois et non plus sur 10 mois – puis d’une année 2020 durant laquelle le prélèvement à la source serait bien déployé mais serait effectué directement par le fisc lui-même sur les comptes bancaires des contribuables et non sur leur bulletin de salaire.

 

Cette perte de pouvoir d’achat ressenti comme tel risque de se traduire immédiatement sur la consommation des ménages et la croissance globale risque d’être impactée. L’effet – couplé avec la baisse perçue du pouvoir d’achat des retraités et avec une épargne de précaution massive – serait catastrophique.

Économiquement, le calendrier n’est certes pas favorable… 26 s

Des facteurs contextuels

Rien ne presse. Cette réforme est dans les tuyaux de Berçy depuis longtemps. Un an de délai supplémentaire ne serait aucunement une catastrophe pour une réforme perçue – à tort – en cette rentrée dans la population française comme purement technocratique !

Elle est apparue en 1939 en France puis abandonnée. Elle réapparaît sous le gouvernement de M. Rocard, alors que celui-ci tentait de démocratiser la mensualisation. Puis cette réforme fut réactualisée et programmée sous la présidence de F Hollande avec E. Macron dans le gouvernement. Ce dernier en a hérité à son arrivée au pouvoir en 2017 sans jamais réellement en faire une réforme de premier plan.

Le calendrier ne plaide pas pour le déploiement dans l’urgence de cette réforme – de plus l’IR, avec la TVA, est l’un des impôts qui « rentre » le mieux - et un an de plus ou de moins ne serait aucunement une catastrophe !

Contextuellement non plus, la réforme ne semble pas opportune…

Et des facteurs politiques

Le président E. Macron est dans une situation fragilisée. Son été fut pollué par l’affaire A. Benala, sa rentrée est perturbée par la démission de N. Hulot, il serait bon que son hiver ne soit pas être gâché par les bugs, dysfonctionnements et autres couacs du déploiement raté du prélèvement à la source. La perception 1) d’une baisse du pouvoir d’achat et 2) d’un flottement politique et administratif ne ferait que renforcer une défiance qui gronde.

De plus, le président s’est promis de relancer son leadership européen (et celui de la France) et de contribuer à remporter les élections européennes à la tête du camp progressiste. Ce type de couacs serait catastrophique en France mais peut être aussi au niveau européen où sa crédibilité réformatrice serait amoindrie.

Enfin, en renonçant, donc en désavouant son ministre de l’Action et des Comptes publics et la haute administration qu’il dirige, le président pourrait se prévaloir d’un nouveau rôle… celui de protecteur des français et en particulier des contribuables. Il montrerait ainsi qu’il peut accepter de perdre de sa superbe et s’adapter à un contexte économico-politique moins favorable pour renoncer à un projet devenu anxiogène.

Politiquement, paradoxalement, un report pourrait être bienvenu…

Report, moratoire, abandon ou arrêt

Le sort de cette réforme semble scellé. Le report est probablement déjà acté et la question de son « arrêt », selon les mots du ministre en matinée le 1er septembre, est même clairement abordée. Un plan bis est déjà savamment livré en pâture à la réflexion des observateurs…

Il s’agirait d’une année 2018 qui resterait blanche, puis d’une année 2019 durant laquelle la mensualisation deviendrait obligatoire – mais calculée sur 12 mois et non plus sur 10 mois – puis d’une année 2020 durant laquelle le prélèvement à la source serait bien déployé mais serait effectué directement par le fisc lui-même sur les comptes bancaires des contribuables et non sur leur bulletin de salaire.

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 Par Marc Bidan, Professeur des Universités – Management des systèmes d’information – Polytech Nantes, Université de Nantes

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation

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