Troisième mandat Macron ? Richard Ferrand au Panthéon de la flagornerie
Battu aux dernières élections législatives, Richard Ferrand essaye de revenir en cours et pour cela n’hésite pas à proposer que Macron puisse faire un troisième mandat. Pourquoi pas aussi un quatrième et un cinquième comme Poutine et autres dictateurs. Se remettre dans les bonnes grâces du président, Richard Ferrand n’hésite pas à utiliser les limites de la flagornerie. Notons que la justice indépendante a passé un coup d’éponge sur le petit bénéfice réalisé par sa maîtresse- qui n’avait pas le premier sou- lorsqu’il était président des Mutuelles de Bretagne. Une affaire de plus concernant la majorité enterrée par la justice.
« La limitation du mandat présidentiel dans le temps, le non-cumul des mandats, etc. Tout cela corsète notre vie publique dans des règles qui limitent le libre choix des citoyens », estime l’ancien président de l’Assemblée nationale Richard Ferrand au Figaro ce dimanche 18 juin 2023. Il est vrai que les mandats à vie sont quand même plus confortables.
Selon lui, ces règles affaiblissent « notre vie politique en qualité et en densité, et la rendent moins attractive. » Fustigeant « tout ce qui bride la libre expression de la souveraineté populaire », ce très proche du chef de l’Etat appelle donc à modifier la Constitution pour autoriser la réélection d’Emmanuel Macron, qui ne peut pas se représenter pour un troisième mandat en 2027.
Opérations immobilières suspectes en faveur de sa compagne
rappel des faits par Wikipédia
Faits
Le 23 décembre 2010126, Richard Ferrand signe un compromis de vente avec le propriétaire d’un local de 379 m2, 2 rue George-Sand à Brest127,128,129, avec une clause suspensive en cas de non-location ultérieure par les Mutuelles de Bretagne130.
Le 25 janvier 2011, le conseil d’administration des Mutuelles de Bretagne choisit à l’unanimité la proposition de la Saca, une SCI en cours de constitution130, qui « n’a pas encore d’existence légale » et « n’est même pas encore propriétaire des surfaces qu’elle propose » comme le rappelle Le Canard enchaîné131. Sur le procès-verbal de la réunion du conseil d’administration à aucun moment n’est mentionné le nom de Sandrine Doucen131.
Sandrine Doucen crée le 28 mars 2011 la Saca, une SCI, dont elle détient 99 % des parts132.
Le 1er juillet 2011131, la SCI la Saca achète 402 000 € frais de notaire inclus le bâtiment retenu128, grâce à un crédit remboursable sur quinze ans du Crédit agricole qui finance intégralement l’achat, sans aucun apport, ayant selon Le Canard enchaîné un « traitement réservé aux acquéreurs qui disposent d’un locataire dont les revenus sont garantis ». Revenus garantis par les 42 000 € de loyers annuels versés par les Mutuelles de Bretagne, dont Richard Ferrand est le directeur général.
Les Mutuelles de Bretagne effectuent peu après, sans contrepartie, pour 184 000 euros de travaux dans le local acheté par Sandrine Doucen. Quelques années plus tard, la SCI de Sandrine Doucen est valorisée, lors d’une transaction, à 300 000 €133. Le Canard enchaîné révèle que l’avocate Sandrine Doucen a par ailleurs facturé des conseils juridiques aux Mutuelles de Bretagne en matière de gestion des ressources humaines.
Me Alain Castel, ancien bâtonnier du barreau de Brest, qui a suivi la transaction à l’époque des faits, déclare que « Richard Ferrand allait louer l’immeuble à la mutuelle et il allait s’enrichir avec tous les travaux à la charge de celle-ci. Il faut appeler un chat un chat ». Selon lui, « la vraie question, c’est pourquoi Richard Ferrand n’a pas fait acheter l’immeuble par la mutuelle. C’était l’intérêt de celle-ci ». Il souligne que le procès-verbal de la réunion du conseil d’administration de la mutuelle du 25 janvier 2011, ne mentionne nulle part que Sandrine Doucen sera la gérante de la SCI alors que selon l’article L. 114-32 du Code de la mutualité : toute convention à laquelle « un administrateur ou un dirigeant opérationnel est indirectement intéressé ou dans laquelle il traite avec la mutuelle, union ou fédération, par personne interposée est soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration »127.
Défense de Ferrand et révélations sur les liens familiaux qu’il niait
En mai 2017 à la suite des révélations du Canard enchaîné, Richard Ferrand déclare que l’opération n’a « rien d’illégal »134,135 et que l’entreprise de sa compagne offrait « le meilleur prix » parmi les réponses à l’appel d’offres136. Il déclare que s’il était directeur général de l’établissement mutualiste à l’époque, il ne siégeait pas à son conseil d’administration. Richard Ferrand argue qu’il n’est ni marié ni pacsé avec Sandrine Doucen, qu’ils ne vivent pas sous le régime matrimonial et n’ont pas de patrimoine commun et conclut qu’« on peut se séparer demain, chacun gardera ses biens »137.
Cependant, Mediapart révèle « les statuts de la SCI mis à jour en février 2017, qu’un Pacs aurait été conclu entre Richard Ferrand et sa compagne en janvier 2014 »138,139. De plus, Louise Ferrand, la fille du couple, née en 2004, est détentrice de la SCI à 1 % qui est représentée devant le notaire, par sa mère et son père, « agissant en tant qu’administrateurs légaux des biens de mademoiselle »138,140.
Déclaration des Mutuelles de Bretagne
Joëlle Salaün, qui a succédé à Richard Ferrand une fois celui-ci élu député, à la tête des Mutuelles de Bretagne après avoir été son adjointe – dont le compagnon Hervé Clabon a été embauché comme assistant parlementaire par Richard Ferrand123 – affirme qu’il n’existe pas de « lien juridique ou patrimonial » entre Richard Ferrand et Sandrine Doucen131, alors que le couple a eu une fille en 2004 (qui possède aujourd’hui 1 % de la SCI), et s’est pacsé en 2014138.
Joëlle Salaün déclare également : « Sauf siège social, une mutuelle n’a pas vocation à investir dans l’immobilier. En cela, nous ne faisons d’ailleurs que suivre les préconisations du conseil départemental. Cette manière de fonctionner nous permet de conserver une souplesse que nous n’aurions pas si nous étions propriétaires. Si le local ne convient plus, s’il n’est plus adapté ou si cela ne fonctionne pas, ou si notre activité est en régression ou au contraire en augmentation, on peut ainsi réagir et changer rapidement »141. Renaud Lecadre écrit dans Libération que « la comptabilité financière peut justifier ce choix (le non-achat du local), qui reste néanmoins discutable »142.
Dans un communiqué, les Mutuelles de Bretagne déclarent avoir « fait le choix de gestion de privilégier l’investissement dans l’outil de travail plutôt que dans l’immobilier »143.
Défense de LREM sur le soupçon de détournement de fonds publics
Le 24 mai 2017, Benjamin Griveaux, porte-parole de La République en marche affirme sur France Info qu’il n’y avait « pas (eu) d’argent public » dans cette opération immobilière144, mais deux semaines après, le 8 juin, BFM TV révèle que 55 000 € d’argent public a servi à installer les Mutuelles de Bretagne dans le bâtiment loué à la compagne de Richard Ferrand145 afin d’abriter un centre de soins pour personnes âgées146. Benjamin Griveaux affirme que ces subventions ont servi à acheter de l’équipement, comme « de la bureautique, des blouses, du matériel informatique »147. Dans un communiqué, les Mutuelles de Bretagne rappellent qu’elles sont « un organisme privé (…) qui gère des services d’accès aux soins, d’aides à domicile et des établissements de santé » et qu’elles font des demandes de subventions à ce titre. Selon elles, « toutes les subventions accordées et leur utilisation sont parfaitement encadrées »118, et, sans ces subventions, certaines activités ne pourraient pas être mises en place ou maintenues148.
Première enquête et classement pour prescription
Le 31 mai 2017, l’association Anticor porte plainte au parquet de Brest contre X pour délit d’abus de confiance en visant « Richard Ferrand, mais également les membres du conseil d’administration des Mutuelles de Bretagne [qu'il dirigeait] ainsi que la bénéficiaire de l’opération, à savoir la compagne de monsieur Ferrand ». Jérôme Karsenti, l’avocat de l’association Anticor motive cette plainte en déclarant que « la question est de savoir si la convention de bail qui liait les Mutuelles de Bretagne à la compagne de M. Ferrand à travers une SCI a été réalisée ou conclue dans l’intérêt des Mutuelles ou dans l’intérêt de cette proche en violation des droits des adhérents qui versent des cotisations, ce qui serait constitutif d’un enrichissement personnel »149.
Le 13 octobre 2017, l’affaire est classée sans suite par le parquet de Brest. Celui-ci considère que, faute d’un préjudice avéré, les infractions d’abus de confiance et d’escroquerie ne sont pas avérées, et que l’infraction de prise illégale d’intérêts, sur laquelle la jurisprudence ne permet pas de statuer avec certitude, est de toute façon prescrite, aucun élément de dissimulation avérée n’ayant été mis à jour par les investigations150,151.
Réouverture d’une enquête et mise en examen pour prise illégale d’intérêts
En novembre 2017, l’association Anticor dépose une nouvelle plainte afin de relancer l’enquête, elle s’inscrit en effet en désaccord avec l’analyse du procureur ayant conduit à la prescription du délit de prise illégale d’intérêts. Pour Anticor, celui-ci n’a pas tenu compte de la dissimulation des liens qui unissaient Richard Ferrand avec la propriétaire du local, et donc de sa volonté de dissimuler ce conflit d’intérêt. Pour l’association anti-corruption, le délai de prescription concernant cette affaire devrait donc commencer à courir à partir de la date de la parution d’articles dans Le Canard enchaîné, soit le 24 mai 2017152. Le 18 janvier 2018, le parquet ouvre une information judiciaire pour « prise illégale d’intérêts »153. En octobre 2018, trois juges d’instruction de Lille, où a été délocalisée l’affaire, sont désignés pour instruire cette affaire immobilière non prescrite154.
Le 11 septembre 2019, le parquet de Lille annonce la mise en examen de Richard Ferrand pour prise illégale d’intérêts155. À la suite de cette annonce, il affirme ne pas vouloir démissionner et garder « toute la confiance » du président de la République, Emmanuel Macron, alors que son départ est réclamé par l’opposition156,157. Libération estime que le soutien du président de la République met en question la séparation des pouvoirs législatif et exécutif158.
Prescription et fin de l’affaire
En octobre 2022, la Cour de cassation confirme la prescription des faits sans conclure sur le fond de l’affaire. L’arrêt de la Cour devrait mettre fin aux poursuites contre Richard Ferrand159.
Soupçons de conflits d’intérêts entre le député et les Mutuelles de Bretagne
Le 30 mai 2017, Le Monde révèle que Richard Ferrand est resté chargé de mission des Mutuelles de Bretagne, rémunéré 1 250 euros par mois, pendant tout son mandat de député, après avoir cosigné en octobre 2012 une proposition de loi PS visant « à permettre aux mutuelles de mettre en place des réseaux de soins », aux tarifs avantageux réservés à ses adhérents8. Jean-Louis Span, président de la Fédération Diversité Proximité mutualiste, explique le même jour que c’est « lors de l’adoption de la loi Le Roux sur les réseaux de soins mutualistes que Richard Ferrand endossait véritablement un rôle de lobbyiste »160, tandis que Catherine Lemorton, présidente PS de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, dénonce, également le 30 mai, les « liens d’intérêts qu’entretenait » M. Ferrand avec les Mutuelles de Bretagne161. Le Canard enchaîné du 7 juin affirme à son tour que Richard Ferrand n’aurait « cessé de veiller aux intérêts de son employeur, les Mutuelles de Bretagne »162