Archive pour le Tag 'maladies'

Réchauffement climatique :: les maladies tropicales menacent la France

Réchauffement climatique :: les maladies tropicales menacent la France

Avec la hausse des températures et la destruction de milieux naturels pourraient représenter une véritable menace pour la santé humaine dans le futur. La propagation de certaines maladies, comme celles transmises par le moustique tigre, est déjà en train de s’accélérer partout dans le monde, y compris en France.

En cause, la hausse des températures et la fragilisation des écosystèmes par des pratiques agricoles intensives, la monoculture et les déforestations. Il y a un lien évident entre la perte de la biodiversité et les maladies infectieuses en recrudescence aujourd’hui. «

En temps normal, la circulation d’un agent pathogène est contenue en se diluant au sein des populations animales dites « réservoirs ». Mais dès lors que leur environnement est dégradé, certains animaux peuvent sortir de ces « sanctuaires » pour trouver des espaces plus viables. Ils se rapprochent alors d’autres espèces dont ils étaient jusque-là éloignés et les contaminent : au moins 15 000 transmissions virales entre espèces devraient survenir d’ici à 2070, a révélé une étude américaine publiée fin avril dans la revue scientifique Nature . Ce qui augmente le risque, in fine, que les espèces animales viennent aussi au contact des populations humaines et les infectent également.

Ces maladies transmises de l’animal à l’homme, appelées « zoonoses », peuvent rapidement être à l’origine d’épidémie, en raison de la faible réponse immunitaire des humains. « À l’heure actuelle, ce sont déjà 75 % des maladies infectieuses chez l’homme qui ont une origine animale », relève,la chercheuse Anna-Bella Failloux.

Les infections au virus du chikungunya, de la dengue et du zika, transmis par le moustique tigre, sont particulièrement à la hausse, et pas seulement dans les pays chauds des zones intertropicales d’où elles sont originaires, mais aussi dans les régions tempérées, y compris en France. « Le moustique est un animal à sang froid, il ne peut pas réguler sa température interne, donc dès que les températures augmentent, il va essayer de trouver un environnement compatible à sa survie, se déplacer et ainsi étendre son aire de distribution », détaille Anna-Bella Failloux, spécialiste de cette espèce.

Si bien qu’aujourd’hui, cet insecte a colonisé à une vitesse éclair de nouvelles régions : arrivé en 1990 en Europe depuis l’Asie, le moustique tigre remonte désormais jusqu’à l’Île-de-France. Fin 2021, il était présent dans 67 départements métropolitains sur 96, contre 58 l’année précédente. Quant à la période d’activité des moustiques, elle déborde désormais de l’été et s’étire de mai à novembre dans l’Hexagone. « Par ailleurs, plus le thermomètre grimpe, plus la durée de développement du moustique va se raccourcir : le passage de l’œuf à l’adulte prendra 7 à 10 jours, contre 15 en temps normal », note la chercheuse. « Les moustiques seront donc plus nombreux sur une même période, et vont aussi devenir infectieux beaucoup plus rapidement. »

Autant de facteurs qui débouchent sur l’apparition de cas autochtones en France, c’est-à-dire d’infections de personnes qui n’ont pas quitté le territoire mais contaminées par un moustique ayant piqué un voyageur revenant d’un pays chaud. C’est le cas depuis 2010 pour la dengue et le chikungunya, ainsi que le zika depuis 2019. « On ne peut pas encore parler d’épidémie, mais au vu de la densité croissante des moustiques tigres, le cocktail pour l’émergence d’une telle dynamique est bien là », alerte Anna-Bella Failloux.

Ces contaminations surviennent en particulier à la période estivale, au moment des retours de vacances. « Plus largement, depuis 1965, la mondialisation des épidémies est parfaitement corrélée à l’augmentation du trafic aérien », note Serge Morand, qui décrit une dangereuse « spirale ». « Tout est lié : le transport international aggrave le changement climatique, et comme lui, il favorise la mobilité des vecteurs voire des pathogènes, débouchant potentiellement sur des maladies infectieuses », décortique-t-il. Désormais, aucune région du monde n’est épargnée par le risque épidémique.

Pour tenter de le freiner, les spécialistes insistent sur la nécessité de modifier nos modes de vie et de culture, en vue de limiter les effets du changement climatique. « Il faut des systèmes de santé publique efficaces, résilients, mais aussi veiller à la santé animale », préconise Serge Morand. Reste que ces risques sont particulièrement difficiles à anticiper et à contrer.

Nous sommes une population très vulnérable, qui ne sera jamais préparée à une pandémie

Les aléas climatiques sont délicats à prévoir, et certaines attitudes se révèlent même contre-productives. Parmi elles, le stockage d’eau en période de sécheresse, particulièrement propice au développement des moustiques tigres, relève Anna-Bella Failloux, qui plaide surtout pour une meilleure prévention et la « sensibilisation aux bons réflexes ». D’autant qu’une fois installé, il est impossible pour l’heure de déloger cet insecte.

La façon dont l’épidémie de Covid-19 a pris de court les gouvernements et les systèmes de santé internationaux semble à ce propos de mauvais augure.

Crise climat : les maladies tropicales menacent la France

Crise climat : les maladies tropicales menacent la France

La hausse des températures et la destruction de milieux naturels pourraient représenter une véritable menace pour la santé humaine dans le futur. La propagation de certaines maladies, comme celles transmises par le moustique tigre, est déjà en train de s’accélérer partout dans le monde, y compris en France.

En cause, la hausse des températures et la fragilisation des écosystèmes par des pratiques agricoles intensives, la monoculture et les déforestations. Il y a un lien évident entre la perte de la biodiversité et les maladies infectieuses en recrudescence aujourd’hui. «

En temps normal, la circulation d’un agent pathogène est contenue en se diluant au sein des populations animales dites « réservoirs ». Mais dès lors que leur environnement est dégradé, certains animaux peuvent sortir de ces « sanctuaires » pour trouver des espaces plus viables. Ils se rapprochent alors d’autres espèces dont ils étaient jusque-là éloignés et les contaminent : au moins 15 000 transmissions virales entre espèces devraient survenir d’ici à 2070, a révélé une étude américaine publiée fin avril dans la revue scientifique Nature . Ce qui augmente le risque, in fine, que les espèces animales viennent aussi au contact des populations humaines et les infectent également.

Ces maladies transmises de l’animal à l’homme, appelées « zoonoses », peuvent rapidement être à l’origine d’épidémie, en raison de la faible réponse immunitaire des humains. « À l’heure actuelle, ce sont déjà 75 % des maladies infectieuses chez l’homme qui ont une origine animale », relève,la chercheuse Anna-Bella Failloux.

Les infections au virus du chikungunya, de la dengue et du zika, transmis par le moustique tigre, sont particulièrement à la hausse, et pas seulement dans les pays chauds des zones intertropicales d’où elles sont originaires, mais aussi dans les régions tempérées, y compris en France. « Le moustique est un animal à sang froid, il ne peut pas réguler sa température interne, donc dès que les températures augmentent, il va essayer de trouver un environnement compatible à sa survie, se déplacer et ainsi étendre son aire de distribution », détaille Anna-Bella Failloux, spécialiste de cette espèce.

Si bien qu’aujourd’hui, cet insecte a colonisé à une vitesse éclair de nouvelles régions : arrivé en 1990 en Europe depuis l’Asie, le moustique tigre remonte désormais jusqu’à l’Île-de-France. Fin 2021, il était présent dans 67 départements métropolitains sur 96, contre 58 l’année précédente. Quant à la période d’activité des moustiques, elle déborde désormais de l’été et s’étire de mai à novembre dans l’Hexagone. « Par ailleurs, plus le thermomètre grimpe, plus la durée de développement du moustique va se raccourcir : le passage de l’œuf à l’adulte prendra 7 à 10 jours, contre 15 en temps normal », note la chercheuse. « Les moustiques seront donc plus nombreux sur une même période, et vont aussi devenir infectieux beaucoup plus rapidement. »

Autant de facteurs qui débouchent sur l’apparition de cas autochtones en France, c’est-à-dire d’infections de personnes qui n’ont pas quitté le territoire mais contaminées par un moustique ayant piqué un voyageur revenant d’un pays chaud. C’est le cas depuis 2010 pour la dengue et le chikungunya, ainsi que le zika depuis 2019. « On ne peut pas encore parler d’épidémie, mais au vu de la densité croissante des moustiques tigres, le cocktail pour l’émergence d’une telle dynamique est bien là », alerte Anna-Bella Failloux.

Ces contaminations surviennent en particulier à la période estivale, au moment des retours de vacances. « Plus largement, depuis 1965, la mondialisation des épidémies est parfaitement corrélée à l’augmentation du trafic aérien », note Serge Morand, qui décrit une dangereuse « spirale ». « Tout est lié : le transport international aggrave le changement climatique, et comme lui, il favorise la mobilité des vecteurs voire des pathogènes, débouchant potentiellement sur des maladies infectieuses », décortique-t-il. Désormais, aucune région du monde n’est épargnée par le risque épidémique.

Pour tenter de le freiner, les spécialistes insistent sur la nécessité de modifier nos modes de vie et de culture, en vue de limiter les effets du changement climatique. « Il faut des systèmes de santé publique efficaces, résilients, mais aussi veiller à la santé animale », préconise Serge Morand. Reste que ces risques sont particulièrement difficiles à anticiper et à contrer.

Nous sommes une population très vulnérable, qui ne sera jamais préparée à une pandémie

Les aléas climatiques sont délicats à prévoir, et certaines attitudes se révèlent même contre-productives. Parmi elles, le stockage d’eau en période de sécheresse, particulièrement propice au développement des moustiques tigres, relève Anna-Bella Failloux, qui plaide surtout pour une meilleure prévention et la « sensibilisation aux bons réflexes ». D’autant qu’une fois installé, il est impossible pour l’heure de déloger cet insecte.

La façon dont l’épidémie de Covid-19 a pris de court les gouvernements et les systèmes de santé internationaux semble à ce propos de mauvais augure.

Santé–Chine: Pollution et maladies respiratoires en hausse en Chine

Santé–Chine: Pollution et maladies respiratoires en hausse en Chine


Si le transfert de nombreuses activités industrielles en Chine ont permis un vrai développement économique à la Chine, en même temps cela a contribué à créer un environnement particulièrement pollué responsable aujourd’hui d’une accélération des maladies respiratoires. Pour preuve dans plusieurs villes le port du masque est nécessaire pour respirer.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’est inquiétée mercredi 22 novembre e cette progression de la détérioration sanitaire.

L’OMS recommande de prendre «des mesures visant à réduire le risque de maladie respiratoire.» Ces mesures – déjà martelées pendant la pandémie de Covid-19 – comportent notamment la vaccination, la distanciation avec les malades, rester chez soi en cas de symptômes, des tests et soins si nécessaires ainsi que le port du masque si approprié, une bonne ventilation des locaux et le lavage des mains.

. L’organisation onusienne a indiqué que les autorités chinoises ont attribué cette augmentation des maladies respiratoires à la levée des restrictions liées au Covid-19 et à la circulation d’agents pathogènes connus. Lors d’un point de presse le 13 novembre, elles avaient souligné la nécessité d’améliorer la surveillance des maladies dans les établissements de santé et en milieu communautaire, ainsi que de renforcer la capacité du système de santé à prendre en charge les patients, rappelle l’OMS.

L’Organisation n’a donné aucune indication sur l’accueil fait par la Chine à la demande d’informations. L’organisation avait reproché à de nombreuses reprises aux autorités chinoises leur manque de transparence et de coopération lors de la pandémie de Covid-19, dont les premiers cas étaient apparus en Chine fin 2019.

Chine: Pollution et maladies respiratoires en hausse

Chine: Pollution et maladies respiratoires en hausse


Si le transfert de nombreuses activités industrielles en Chine ont permis un vrai développement économique à la Chine, en même temps cela a contribué à créer un environnement particulièrement pollué responsable aujourd’hui d’une accélération des maladies respiratoires. Pour preuve dans plusieurs villes le port du masque est nécessaire pour respirer.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’est inquiétée mercredi 22 novembre e cette progression de la détérioration sanitaire.

L’OMS recommande de prendre «des mesures visant à réduire le risque de maladie respiratoire.» Ces mesures – déjà martelées pendant la pandémie de Covid-19 – comportent notamment la vaccination, la distanciation avec les malades, rester chez soi en cas de symptômes, des tests et soins si nécessaires ainsi que le port du masque si approprié, une bonne ventilation des locaux et le lavage des mains.

. L’organisation onusienne a indiqué que les autorités chinoises ont attribué cette augmentation des maladies respiratoires à la levée des restrictions liées au Covid-19 et à la circulation d’agents pathogènes connus. Lors d’un point de presse le 13 novembre, elles avaient souligné la nécessité d’améliorer la surveillance des maladies dans les établissements de santé et en milieu communautaire, ainsi que de renforcer la capacité du système de santé à prendre en charge les patients, rappelle l’OMS.

L’Organisation n’a donné aucune indication sur l’accueil fait par la Chine à la demande d’informations. L’organisation avait reproché à de nombreuses reprises aux autorités chinoises leur manque de transparence et de coopération lors de la pandémie de Covid-19, dont les premiers cas étaient apparus en Chine fin 2019.

Les moustiques : vecteur de nouvelles maladies

Les moustiques : vecteur de nouvelles maladies

Etant donné la présence croissante du moustique en France et le risque qu’il représente pour la santé publique, la lutte menée contre cet insecte doit être repensée, notamment en vue de réduire au minimum le recours aux substances toxiques, estime dans une tribune au « Monde » le docteur Hamza Leulmi.

Alors qu’une proposition de loi a été déposée, le 24 octobre, pour renforcer les moyens de lutte contre la prolifération des punaises de lit et que des amendements en faveur d’un accompagnement des personnes infestées ont été remis dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, force est de constater que l’effervescence médiatique aura permis à ce sujet de devenir une priorité en l’espace de quelques semaines.

Pourtant, si la punaise de lit représente un enjeu de réputation et de communication majeur pour la France avant les Jeux olympiques (JO) de 2024, le moustique devrait l’être tout autant, si ce n’est plus.

Il aurait en effet été bien plus urgent de s’attaquer enfin à la menace que représente le moustique sur notre territoire. Mais sa place dans l’imaginaire collectif est bien différente de celle de la punaise de lit. Avons-nous oublié que le moustique est l’animal le plus meurtrier au monde ? Près de 800 000 personnes en meurent chaque année en moyenne.

Faudrait-il, pour que le sujet soit pris à bras-le-corps, associer au moustique des images de gonflement des membres, des yeux ensanglantés et de fièvres terrassantes pour qu’il ne soit plus un sujet de second plan et que les maladies qu’il véhicule (dengue, chikungunya, Zika, West Nile…) soient considérées comme une vraie menace sanitaire ?

Sans parler des coûts économiques induits par l’absentéisme que ces maladies provoquent dans le monde du travail, comme nous pouvons le voir dans les régions du monde les plus touchées par le paludisme.

Maladies IA: Des enregistrements vocaux qui permettent de faire un diagnostic?

Maladies IA: Des enregistrements vocaux qui permettent de faire un diagnostic?


D’après BFM Une étude aurait démontré la possibilité de diagnostiquer des maladies à partir d’un court enregistrement vocal. Cette technique, basée sur l’intelligence artificielle, peut notamment identifier des diabétiques.

Il suffirait de six à dix secondes. Selon Klick Labs, un partenaire commercial spécialisé dans la santé, des courts enregistrements vocaux suffiraient à savoir si une personne est atteinte de diabète.

Lors des tests, les patients ont dû enregistrer des messages six fois par jour durant deux semaines. Au total, 18.000 fichiers audios ont été analysés afin de déterminer des différences acoustiques entre les enregistrements de diabétiques et de non-diabétiques.

L’IA a notamment cherché à percevoir un changement de tonalité imperceptible par l’oreille humaine chez les patients atteints de diabète de type 2. Les résultats sont légèrement plus prometteurs chez les femmes que chez les hommes avec une justesse de 89% contre 86%.

Selon Jaycee Kaufman, la responsable de l’étude chez Klick Labs, cette découverte pourrait « transformer » la manière de dépister le diabète.

« Les méthodes actuelles de détection peuvent nécessiter beaucoup de temps, de déplacements et de coûts », explique-t-elle. « La technologie vocale a la possibilité d’éliminer complètement ces obstacles. »
Surtout, le recours aux enregistrements vocaux pourrait aider à identifier d’autres maladies, dont le Covid.

Aujourd’hui, le dépistage du diabète passe par une prise de sang et une analyse d’urine. Face aux symptômes généraux ou non existants, 90% des adultes britanniques restent plusieurs années sans être diagnostiqués.

Maladies tropicales. Un cas dengue en France

Maladies tropicales. Un cas dengue en France

Un cas de dengue a été découvert le mercredi 11 octobre dernier dans le Val-de-Marne; la maladie a été contractée par une personne n’ayant pas voyagé récemment dans une zone où circule le virus. Elle a donc été infectée dans la région francilienne .

« C’est une évolution naturelle (…) Il suffit que quelqu’un arrive d’un pays où il y a la dengue avec le virus dans le sang, pour que nos moustiques présents sur le territoire national se contaminent et contaminent d’autres personnes », assure Arezki Izri, parasitologue, à BFM Paris Île-de-France.
« C’est la première fois qu’on voit autant de départements en vigilance orange en automne (…) On va s’habituer car ça ne sera pas la dernière fois que cela arrive, en particulier sur la partie nord de la France, il faudra s’habituer à avoir une saison des moustiques qui dure », complète Stéphane Robert, président vigilance moustique.

La dengue est, en effet, transmise par le moustique tigre, vecteur également du zika et du chikungunya. Dans la plupart des cas, la maladie se contracte dans les zones tropicales où la maladie est très présente comme en Guadeloupe.

Maladies- Progression des virus exotiques

Maladies- Progression des virus exotiques

Virus Usutu, virus Zika, virus du chikungunya ou de la dengue… Au cours des dernières années, ces noms aux consonances exotiques se sont fait une place dans les médias français. Et pour cause : responsables de maladies qui ne sévissaient jusqu’à présent que dans des régions éloignées, ces virus sont en train de s’extraire des régions où ils ont longtemps été endémiques pour partir à la conquête de notre planète. La France n’est pas à l’abri de cette menace, ni dans les outre-mer ni dans les régions métropolitaines, comme en témoignent les implantations en cours de certains de ces virus autour de l’arc méditerranéen.

par Yannick Simonin
Virologiste spécialiste en surveillance et étude des maladies virales émergentes. Professeur des Universités, Université de Montpellier dans the conversation

Alors que l’année 2022 a vu exploser en France métropolitaine les cas de dengue « autochtones » (autrement dit contractée en métropole), et qu’une infection – elle aussi autochtone – par le virus du Nil occidental a été détectée pour la première fois en Nouvelle-Aquitaine, où en est la situation ? Quels sont les virus à surveiller en priorité ?

Bon nombre de maladies infectieuses émergentes sont transmises à l’être humain par l’intermédiaire d’un animal «vecteur», souvent un arthropode suceur de sang tels que les moustiques, les moucherons culicoides, les phlébotomes ou encore les tiques.

Dans un tel cas, si la maladie est causée par un virus, on parle d’«arbovirose», et le virus impliqué est décrit comme un «arbovirus» (de l’anglais «arthropod-borne virus», «virus transmis par les arthropodes»).

Dans la liste des maladies prioritaires que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) établit chaque année depuis 2015, ne figurent que des maladies virales, parmi lesquelles trois arboviroses (sur neuf maladies recensées) : maladie à virus Zika, fièvre hémorragique de Crimée-Congo et fièvre de la vallée du Rift.

Un point important à souligner concernant les arboviroses est qu’il s’agit pour la plupart de zoonoses. Autrement dit, elles proviennent initialement d’animaux domestiques ou sauvages porteurs de l’agent de la maladie. Celui-ci est transmis dans un second temps à l’être humain, lorsque ce dernier est piqué par un arthropode vecteur qui a auparavant prélevé le sang d’un animal infecté. Ce qui se passe ensuite dépend notamment de l’arbovirus transmis.

Certains peuvent passer d’un être humain à l’autre, toujours par l’intermédiaire d’un vecteur. D’autres pourront aussi se propager en parallèle grâce à d’autres modes de transmission (le virus Zika peut être transmis par les moustiques et par voie sexuelle, par exemple). Il arrive aussi que certains arbovirus ne se transmettent pas entre êtres humains : on dit alors que l’humain est une «impasse épidémiologique». C’est le cas par exemple du virus West Nile ou du virus de la vallée du Rift.

Parmi les principaux acteurs de la propagation des arboviroses figurent les moustiques, en particulier le moustique tigre (Aedes albopictus). Parti récemment à l’assaut de notre territoire, il s’y est rapidement installé. Or, à lui seul, il est en mesure de propager plusieurs virus «exotiques».

Catalysée par le commerce international, l’expansion du moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur de plusieurs virus «exotiques» s’est avérée très rapide.

Originaire d’Asie, ce petit moustique noir au corps et aux pattes rayés de blanc à été détecté pour la première fois dans le sud de la France en 2004, à Menton. Moins de vingt ans plus tard, il est présent dans 71 départements métropolitains sur 96 (contre 64 en 2021 et 58 en 2020). Dans les années à venir, l’extension de son territoire sera inexorable.

En moins de deux décennies, le moustique tigre a envahi la majeure partie du territoire français métropolitain. Ministère des Solidarités et de la Santé – Direction générale de la Santé

Une des particularités de ce moustique est sa capacité à transmettre divers virus responsables de maladies, dont les plus connus sont probablement le virus Zika, celui du chikungunya, ou encore celui de la dengue.

La dengue : une tendance à la hausse des cas autochtones
Le virus de la dengue semble avoir trouvé dans les régions du sud de notre pays un terrain de jeu propice. En effet, si le nombre de cas de dengue reste limité en France métropolitaine, estimé à moins d’une trentaine ces dernières années, la tendance à la hausse se confirme néanmoins.

En témoigne la multiplication des cas dits «autochtones», ce qui signifie que la maladie a été contractée sur notre territoire, contrairement aux infections importées, qui se déclarent en France mais ont été contractés à l’étranger, lors d’un voyage. Les départements du sud et du sud-est de la France tels que l’Hérault, le Gard, le Var ou les Alpes-Maritimes sont les plus exposés à la maladie notamment en raison de la conjonction d’une forte densité de moustiques tigres et de zones fortement urbanisées.

L’année 2022 a été exceptionnelle en termes de circulation de la dengue dans l’hexagone : 66 cas ont été identifiés au cours de neuf épisodes de transmission autochtone ayant touché 6 départements.

Le moustique tigre Aedes albopictus est reconnaissable aux bandes blanches qui strient ses pattes. Il est notamment le vecteur des virus de la dengue et du chikungunya ainsi que du virus Zika.

Mais ce nombre de cas est certainement largement sous-estimé, car la dengue est largement asymptomatique (dans 50 % à 90 % des cas selon les épidémies). Par ailleurs, chez les personnes symptomatiques, les symptômes de la maladie (fièvre, maux de tête, douleurs musculaires…) peuvent facilement être confondus avec ceux de la grippe ou plus récemment du Covid.

Si l’affection provoquée par le virus de la dengue est le plus souvent bénigne, celui-ci peut néanmoins entraîner une forme potentiellement mortelle, dans environ 1 % des cas. Cette forme de dengue est dite «hémorragique», car s’accompagnant de saignements au niveau de multiples organes. Par ailleurs, certaines atteintes neurologiques ont également été rapportées.

Identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé pendant plusieurs décennies en Afrique, en Inde et en Asie, ainsi que dans l’océan Indien. C’est d’ailleurs l’épidémie qui a frappé la Réunion, l’Île Maurice, Mayotte et les Seychelles en 2005 qui a participé à le faire connaître du public français.

La «maladie de l’homme courbé» (traduction possible de «chikungunya», un terme issu du Makondé, langue bantoue parlée en Tanzanie) se caractérise notamment par l’apparition de fièvre et de douleurs articulaires sévères. Très invalidantes, ces dernières touchent souvent les mains, les poignets, les chevilles ou les pieds. Des maux de tête et des douleurs musculaires, ainsi que des saignements des gencives ou du nez ont été fréquemment décrits. La convalescence peut durer plusieurs semaines, et les douleurs peuvent persister parfois pendant plusieurs années.

Les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été détectés en France en 2010, dans le Var. Depuis, une trentaine de cas autochtones ont été répertoriés dont deux foyers importants, un dans la ville de Montpellier en 2014 (11 cas confirmés et 1 cas probable) et le second dans le var en 2017 avec 17 cas répertoriés.

Le virus du chikungunya se fait discret en France ces dernières années, avec 3 cas importés en 2021 et 5 pour l’année en cours, selon le décompte de Santé publique France. Cependant, ce virus reste très surveillé, notamment parce que sa dissémination par le moustique tigre dans les régions européennes tempérées n’est pas à exclure.

Le virus Zika avait quant à lui a défrayé la chronique en 2015-2016. Il avait été à l’origine d’une épidémie de très grande ampleur, principalement en Amérique latine. Plus d’un million de personnes avaient été infectées. L’atteinte la plus grave associée à ce virus est le développement d’une microcéphalie (réduction du périmètre crânien du fœtus) chez les femmes enceintes infectées.

En France deux cas autochtones avaient été identifiés en 2019, dans le département du Var, sans que les chaînes de transmission, notamment vectorielles, n’aient pu être clairement établies.

Figurant toujours sur la liste des 10 maladies les plus à risque établie par l’Organisation mondiale de la santé, ce virus a cependant mystérieusement quasiment disparu des radars depuis quelques années. Son retour sur le devant de la scène virale est toutefois très loin d’être exclu : il a notamment fait à nouveau parler de lui très récemment en Thaïlande, et 5 voyageurs ont développé la maladie en Allemagne, Royaume-Uni et Israël, après avoir visité ce pays d’Asie du Sud-Est.

Même si les mécanismes favorisant l’émergence du virus Zika sont peu connus, des études de séroprévalence (présence d’anticorps dans le sang) montrent qu’il circule toujours activement dans certains territoires (notamment sur le continent africain).

Sa surveillance nécessite une vigilance particulière de la communauté scientifique, afin de se préparer à une réapparition potentielle.

Un de nos moustiques «traditionnels», Culex pipiens, présent sur l’ensemble du territoire français, est également capable de nous transmettre des virus «exotiques». C’est notamment le cas des virus West Nile (virus du Nil occidental) et Usutu, deux virus très proches pouvant occasionnellement engendrer des atteintes neurologiques sévères telles qu’encéphalites (inflammation du cerveau), méningites (inflammation des méninges) ou encore méningo-encéphalites (inflammation des méninges et du cerveau) chez l’humain.

Une étude menée par notre équipe et publiée en 2022, en collaboration avec l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), a montré que ces deux virus sont en train de s’installer durablement sur certaines zones de notre territoire, plus particulièrement dans la grande région camarguaise.

On les retrouve en effet de façon régulière non seulement dans des échantillons de sang humain, mais aussi chez des animaux tels que les oiseaux (leurs réservoirs naturels), les chiens, les chevaux et les moustiques.

De nombreux moustiques, y compris ceux du genre Culex classiquement présents en France, peuvent transmettre des virus « exotiques ». Shutterstock
Jusqu’à présent, leur impact sur la santé humaine demeure faible : deux infections par le virus Usutu ont été identifiées en France, à Montpellier en 2016 et dans les landes en 2022, tandis qu’une trentaine de cas de West Nile ont été dénombrés sur les cinq dernières années.

Il est néanmoins important de surveiller la dynamique de propagation de ces virus, car plusieurs lignées possédant des degrés de virulence plus ou moins importants circulent actuellement, ce qui incite à la prudence. D’autant plus qu’une épidémie importante a frappé l’Europe en 2018, avec plus de 2 000 cas identifiés et plus de 180 décès rapportés. En 2022 le sud de l’Europe a été à nouveau touché : l’Italie a notamment répertorié 723 cas et 51 décès associés.

En France, fin juillet 2023, un premier cas d’infection par le virus West Nile a été détecté en Nouvelle-Aquitaine, plus précisément dans la région de Bordeaux, ce qui témoigne d’une tendance à la propagation de ce virus plus au nord de l’Hexagone. En effet, les précédents cas d’infection de ce virus avaient été détectés uniquement sur le pourtour méditerranéen (en régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie).

Le passage d’une maladie de l’animal à l’être humain n’est pas forcément synonyme de flambée épidémique, ni d’épidémie à large échelle, de pandémie ou d’implantation dans de nouveaux territoires. Pour que cela se produise, de nombreux événements doivent entrer en conjonction.

Le problème est que les échanges commerciaux ou touristiques, qui progressent de façon exponentielle dans notre monde hyperconnecté, peuvent faciliter la dissémination de certains vecteurs et donc le risque de propagation des maladies.

Ce risque est encore augmenté par les changements environnementaux et climatiques. Les conditions météorologiques, en particulier la température, l’humidité de l’air et les précipitations, affectent la répartition géographique, l’activité, le taux de reproduction et la survie de ces vecteurs, notamment des moustiques.

Par ailleurs les modifications du climat et l’impact de l’être humain sur son environnement influencent parfois le comportement animal, en modifiant par exemple l’aire de répartition de certaines espèces, ce qui peut favoriser les interactions entre animaux et humains.

De tels changements environnementaux ont été à l’origine d’épidémies de fièvre hémorragique argentine, due au virus Junin. Dans les années 1950, pour intensifier la culture du maïs, des défrichages massifs ont été effectués grâce, notamment à l’emploi d’herbicides. Ce changement d’environnement a entraîné une prolifération de rongeurs dont certains étaient porteurs du virus, faisant passer la maladie au stade épidémique, notamment parmi les travailleurs agricoles. Des milliers de personnes ont alors été contaminées. Une situation similaire a aussi été observée en Asie de l’Est lors de la conversion de terres pour la culture du riz, avec le virus Hantaan responsable de la «fièvre hémorragique de Corée».

Parmi les autres facteurs favorisant les émergences de nouvelles maladies, citons notamment les facteurs socio-économiques, tels que l’augmentation des transports de bien et de personnes, notamment via le transport aérien intercontinental, ou encore l’essor toujours croissant des zones urbaines. Les fortes densités de population, qui favorisent la transmission rapide de maladies, ainsi que les difficultés d’adduction d’eau liées à l’urbanisation rapide, contribuent notamment à la prolifération de moustiques potentiellement porteurs de virus.

Preuve de l’importance de ces facteurs, durant la pandémie de Covid-19, le nombre de cas d’infections «exotiques» importés (autrement dit, rapportées de voyage) a considérablement diminué, essentiellement en raison de la baisse drastique du transport aérien international. Avec la nette reprise dudit trafic, une hausse de ces cas est en revanche attendue en 2023.

Cette situation pourrait avoir un impact sur l’apparition de foyers de cas en France, car une personne infectée arrivant sur notre territoire peut en effet transmettre à son tour la maladie à d’autres personnes, notamment si les vecteurs transmetteurs de la maladie sont présents.

En l’absence d’antiviral efficace ou de vaccin, comme dans le cas du chikungunya ou du Zika, ou lorsque le vaccin présente certaines limites (comme dans le cas de la dengue, contre laquelle le seul vaccin actuellement homologué présente l’inconvénient d’augmenter le risque d’hospitalisation et de dengue grave chez les personnes non antérieurement infectées par le virus de la dengue), la seule solution est d’anticiper l’émergence de ces pathogènes.

Le meilleur moyen d’y parvenir est de mettre en place des réseaux adaptés et réactifs, au plus près du terrain, afin d’étudier efficacement les interactions entre les animaux, les humains et leurs divers environnements, selon une approche qualifiée de One Health («Une seule santé», humaine et environnementale).

Depuis la pandémie de Covid-19, les réseaux de surveillance des maladies virales nationaux et internationaux se sont développés. Leurs capacités restent malheureusement bien en deçà de ce qui est nécessaire pour effectuer un suivi efficace de la circulation des virus à risque, non seulement dans les pays endémiques, mais aussi dans les pays où ils émergent.

L’émergence, puis la propagation rapide en 2020, du coronavirus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19, a eu un impact majeur sur notre santé, nos comportements et nos vies quotidiennes. Cette situation nous a fait brutalement prendre conscience de l’importance de surveiller et d’étudier les «nouveaux» virus.

Au-delà de ces virus jusque-là «inédits», il est aussi essentiel de se pencher sur les virus «négligés» car responsables de maladies sévissant loin de nos territoires. La propagation hors du continent africain, et en particulier en Europe, du virus Mpox, anciennement appelé variole du singe, est venu nous rappeler les enjeux liés à une telle surveillance…

Santé- : les maladies tropicales menacent la France

Santé- : les maladies tropicales menacent la France

La hausse des températures et la destruction de milieux naturels pourraient représenter une véritable menace pour la santé humaine dans le futur. La propagation de certaines maladies, comme celles transmises par le moustique tigre, est déjà en train de s’accélérer partout dans le monde, y compris en France.

En cause, la hausse des températures et la fragilisation des écosystèmes par des pratiques agricoles intensives, la monoculture et les déforestations. Il y a un lien évident entre la perte de la biodiversité et les maladies infectieuses en recrudescence aujourd’hui. «

En temps normal, la circulation d’un agent pathogène est contenue en se diluant au sein des populations animales dites « réservoirs ». Mais dès lors que leur environnement est dégradé, certains animaux peuvent sortir de ces « sanctuaires » pour trouver des espaces plus viables. Ils se rapprochent alors d’autres espèces dont ils étaient jusque-là éloignés et les contaminent : au moins 15 000 transmissions virales entre espèces devraient survenir d’ici à 2070, a révélé une étude américaine publiée fin avril dans la revue scientifique Nature . Ce qui augmente le risque, in fine, que les espèces animales viennent aussi au contact des populations humaines et les infectent également.

Ces maladies transmises de l’animal à l’homme, appelées « zoonoses », peuvent rapidement être à l’origine d’épidémie, en raison de la faible réponse immunitaire des humains. « À l’heure actuelle, ce sont déjà 75 % des maladies infectieuses chez l’homme qui ont une origine animale », relève,la chercheuse Anna-Bella Failloux.

Les infections au virus du chikungunya, de la dengue et du zika, transmis par le moustique tigre, sont particulièrement à la hausse, et pas seulement dans les pays chauds des zones intertropicales d’où elles sont originaires, mais aussi dans les régions tempérées, y compris en France. « Le moustique est un animal à sang froid, il ne peut pas réguler sa température interne, donc dès que les températures augmentent, il va essayer de trouver un environnement compatible à sa survie, se déplacer et ainsi étendre son aire de distribution », détaille Anna-Bella Failloux, spécialiste de cette espèce.

Si bien qu’aujourd’hui, cet insecte a colonisé à une vitesse éclair de nouvelles régions : arrivé en 1990 en Europe depuis l’Asie, le moustique tigre remonte désormais jusqu’à l’Île-de-France. Fin 2021, il était présent dans 67 départements métropolitains sur 96, contre 58 l’année précédente. Quant à la période d’activité des moustiques, elle déborde désormais de l’été et s’étire de mai à novembre dans l’Hexagone. « Par ailleurs, plus le thermomètre grimpe, plus la durée de développement du moustique va se raccourcir : le passage de l’œuf à l’adulte prendra 7 à 10 jours, contre 15 en temps normal », note la chercheuse. « Les moustiques seront donc plus nombreux sur une même période, et vont aussi devenir infectieux beaucoup plus rapidement. »

Autant de facteurs qui débouchent sur l’apparition de cas autochtones en France, c’est-à-dire d’infections de personnes qui n’ont pas quitté le territoire mais contaminées par un moustique ayant piqué un voyageur revenant d’un pays chaud. C’est le cas depuis 2010 pour la dengue et le chikungunya, ainsi que le zika depuis 2019. « On ne peut pas encore parler d’épidémie, mais au vu de la densité croissante des moustiques tigres, le cocktail pour l’émergence d’une telle dynamique est bien là », alerte Anna-Bella Failloux.

Ces contaminations surviennent en particulier à la période estivale, au moment des retours de vacances. « Plus largement, depuis 1965, la mondialisation des épidémies est parfaitement corrélée à l’augmentation du trafic aérien », note Serge Morand, qui décrit une dangereuse « spirale ». « Tout est lié : le transport international aggrave le changement climatique, et comme lui, il favorise la mobilité des vecteurs voire des pathogènes, débouchant potentiellement sur des maladies infectieuses », décortique-t-il. Désormais, aucune région du monde n’est épargnée par le risque épidémique.

Pour tenter de le freiner, les spécialistes insistent sur la nécessité de modifier nos modes de vie et de culture, en vue de limiter les effets du changement climatique. « Il faut des systèmes de santé publique efficaces, résilients, mais aussi veiller à la santé animale », préconise Serge Morand. Reste que ces risques sont particulièrement difficiles à anticiper et à contrer.

Nous sommes une population très vulnérable, qui ne sera jamais préparée à une pandémie

Les aléas climatiques sont délicats à prévoir, et certaines attitudes se révèlent même contre-productives. Parmi elles, le stockage d’eau en période de sécheresse, particulièrement propice au développement des moustiques tigres, relève Anna-Bella Failloux, qui plaide surtout pour une meilleure prévention et la « sensibilisation aux bons réflexes ». D’autant qu’une fois installé, il est impossible pour l’heure de déloger cet insecte.

La façon dont l’épidémie de Covid-19 a pris de court les gouvernements et les systèmes de santé internationaux semble à ce propos de mauvais augure.

Climat- : les maladies tropicales menacent la France

Climat- : les maladies tropicales menacent la France

La hausse des températures et la destruction de milieux naturels pourraient représenter une véritable menace pour la santé humaine dans le futur. La propagation de certaines maladies, comme celles transmises par le moustique tigre, est déjà en train de s’accélérer partout dans le monde, y compris en France.

En cause, la hausse des températures et la fragilisation des écosystèmes par des pratiques agricoles intensives, la monoculture et les déforestations. Il y a un lien évident entre la perte de la biodiversité et les maladies infectieuses en recrudescence aujourd’hui. «

En temps normal, la circulation d’un agent pathogène est contenue en se diluant au sein des populations animales dites « réservoirs ». Mais dès lors que leur environnement est dégradé, certains animaux peuvent sortir de ces « sanctuaires » pour trouver des espaces plus viables. Ils se rapprochent alors d’autres espèces dont ils étaient jusque-là éloignés et les contaminent : au moins 15 000 transmissions virales entre espèces devraient survenir d’ici à 2070, a révélé une étude américaine publiée fin avril dans la revue scientifique Nature . Ce qui augmente le risque, in fine, que les espèces animales viennent aussi au contact des populations humaines et les infectent également.

Ces maladies transmises de l’animal à l’homme, appelées « zoonoses », peuvent rapidement être à l’origine d’épidémie, en raison de la faible réponse immunitaire des humains. « À l’heure actuelle, ce sont déjà 75 % des maladies infectieuses chez l’homme qui ont une origine animale », relève,la chercheuse Anna-Bella Failloux.

Les infections au virus du chikungunya, de la dengue et du zika, transmis par le moustique tigre, sont particulièrement à la hausse, et pas seulement dans les pays chauds des zones intertropicales d’où elles sont originaires, mais aussi dans les régions tempérées, y compris en France. « Le moustique est un animal à sang froid, il ne peut pas réguler sa température interne, donc dès que les températures augmentent, il va essayer de trouver un environnement compatible à sa survie, se déplacer et ainsi étendre son aire de distribution », détaille Anna-Bella Failloux, spécialiste de cette espèce.

Si bien qu’aujourd’hui, cet insecte a colonisé à une vitesse éclair de nouvelles régions : arrivé en 1990 en Europe depuis l’Asie, le moustique tigre remonte désormais jusqu’à l’Île-de-France. Fin 2021, il était présent dans 67 départements métropolitains sur 96, contre 58 l’année précédente. Quant à la période d’activité des moustiques, elle déborde désormais de l’été et s’étire de mai à novembre dans l’Hexagone. « Par ailleurs, plus le thermomètre grimpe, plus la durée de développement du moustique va se raccourcir : le passage de l’œuf à l’adulte prendra 7 à 10 jours, contre 15 en temps normal », note la chercheuse. « Les moustiques seront donc plus nombreux sur une même période, et vont aussi devenir infectieux beaucoup plus rapidement. »

Autant de facteurs qui débouchent sur l’apparition de cas autochtones en France, c’est-à-dire d’infections de personnes qui n’ont pas quitté le territoire mais contaminées par un moustique ayant piqué un voyageur revenant d’un pays chaud. C’est le cas depuis 2010 pour la dengue et le chikungunya, ainsi que le zika depuis 2019. « On ne peut pas encore parler d’épidémie, mais au vu de la densité croissante des moustiques tigres, le cocktail pour l’émergence d’une telle dynamique est bien là », alerte Anna-Bella Failloux.

Ces contaminations surviennent en particulier à la période estivale, au moment des retours de vacances. « Plus largement, depuis 1965, la mondialisation des épidémies est parfaitement corrélée à l’augmentation du trafic aérien », note Serge Morand, qui décrit une dangereuse « spirale ». « Tout est lié : le transport international aggrave le changement climatique, et comme lui, il favorise la mobilité des vecteurs voire des pathogènes, débouchant potentiellement sur des maladies infectieuses », décortique-t-il. Désormais, aucune région du monde n’est épargnée par le risque épidémique.

Pour tenter de le freiner, les spécialistes insistent sur la nécessité de modifier nos modes de vie et de culture, en vue de limiter les effets du changement climatique. « Il faut des systèmes de santé publique efficaces, résilients, mais aussi veiller à la santé animale », préconise Serge Morand. Reste que ces risques sont particulièrement difficiles à anticiper et à contrer.

Nous sommes une population très vulnérable, qui ne sera jamais préparée à une pandémie

Les aléas climatiques sont délicats à prévoir, et certaines attitudes se révèlent même contre-productives. Parmi elles, le stockage d’eau en période de sécheresse, particulièrement propice au développement des moustiques tigres, relève Anna-Bella Failloux, qui plaide surtout pour une meilleure prévention et la « sensibilisation aux bons réflexes ». D’autant qu’une fois installé, il est impossible pour l’heure de déloger cet insecte.

La façon dont l’épidémie de Covid-19 a pris de court les gouvernements et les systèmes de santé internationaux semble à ce propos de mauvais augure.

Climat et maladies tropicales

Climat et maladies tropicales
par
Benoît Tonson
Chef de rubrique Science + Technologie, The Conversation France

Éric Cardinale
Vétérinaire spécialisé dans les domaines de la microbiologie et de l’épidémiologie,, Cirad

Stéphan Zientara
Vétérinaire et virologiste, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)

« Zootopique » est une série de podcasts réalisés en partenariat avec l’Anses (Agence nationale sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) qui interroge nos relations avec les animaux au prisme de la santé. Après une première saison portant sur des thèmes aussi variés que le déclin des abeilles ou les maladies portées par les moustiques et les tiques, nous vous proposons une deuxième saison.

Pour ce dernier épisode de la saison, intéressons-nous à ces maladies tropicales qui finissent par s’acclimater et se développer sur notre territoire en raison du changement climatique. Par exemple, en 2022, 65 cas de dengue autochtones ont été enregistrés dans le sud de la France.

D’autres maladies humaines ou animales émergeront à l’avenir. Alors, de quelles maladies parle-t-on ? Le changement climatique est-il vraiment l’unique facteur en cause ? Comment faire face à ces nouvelles menaces ?

Avec Stéphan Zientara, vétérinaire et virologiste, directeur de l’unité mixte de recherche Anses-Inrae-Ecole vétérinaire de Maisons-Alfort et Éric Cardinale, vétérinaire spécialisé dans les domaines de la microbiologie et de l’épidémiologie, directeur adjoint de l’Unité mixte de recherche ASTRE Cirad-Inrae.

Climat en hausse et maladies tropicales qui s’acclimatent

Climat en hausse et maladies qui s’acclimatent
par
Benoît Tonson
Chef de rubrique Science + Technologie, The Conversation France

Éric Cardinale
Vétérinaire spécialisé dans les domaines de la microbiologie et de l’épidémiologie,, Cirad

Stéphan Zientara
Vétérinaire et virologiste, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)

« Zootopique » est une série de podcasts réalisés en partenariat avec l’Anses (Agence nationale sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) qui interroge nos relations avec les animaux au prisme de la santé. Après une première saison portant sur des thèmes aussi variés que le déclin des abeilles ou les maladies portées par les moustiques et les tiques, nous vous proposons une deuxième saison.

Pour ce dernier épisode de la saison, intéressons-nous à ces maladies tropicales qui finissent par s’acclimater et se développer sur notre territoire en raison du changement climatique. Par exemple, en 2022, 65 cas de dengue autochtones ont été enregistrés dans le sud de la France.

D’autres maladies humaines ou animales émergeront à l’avenir. Alors, de quelles maladies parle-t-on ? Le changement climatique est-il vraiment l’unique facteur en cause ? Comment faire face à ces nouvelles menaces ?

Avec Stéphan Zientara, vétérinaire et virologiste, directeur de l’unité mixte de recherche Anses-Inrae-Ecole vétérinaire de Maisons-Alfort et Éric Cardinale, vétérinaire spécialisé dans les domaines de la microbiologie et de l’épidémiologie, directeur adjoint de l’Unité mixte de recherche ASTRE Cirad-Inrae.

Maladies génétiques : un champignon comestible pour corriger notre ADN

Maladies génétiques : un champignon comestible pour corriger notre ADN
par
Fabrice Lejeune, Chercheur Inserm au sein du laboratoire CANcer Heterogeneity, Plasticity and Resistance to THERapies (Inserm/ CNRS/ Université de Lille/Institut Pasteur de Lille/CHU Lille), Université de Lille dans the Conversation

Mucoviscidose, myopathies, hémophilies… Les maladies génétiques touchent une personne sur vingt dans le monde. En règle générale, elles apparaissent durant l’enfance, et sont liées à l’absence ou au dysfonctionnement d’une protéine. Leur issue est malheureusement souvent fatale, car les traitements permettant d’y remédier sont encore trop rares. Parmi les problèmes moléculaires qui peuvent mener au développement d’une maladie génétiques figurent notamment certaines mutations particulières appelées mutations « non-sens » ou « STOP ». De telles mutations touchent environ 10 % des patients atteints de maladies génétiques. Or, à l’heure actuelle, aucun traitement ne permet de les soigner, même si quelques pistes thérapeutiques sont à l’étude.
Nos travaux pourraient cependant ajouter une corde à l’arc des scientifiques qui cherchent à réparer ces anomalies de l’ADN. Nous avons en effet identifié, dans un champignon commun qui pousse notamment dans les forêts françaises, une molécule capable de corriger les mutations « STOP », non seulement dans des cellules en culture, mais aussi chez la souris. Et peut-être, demain, chez l’être humain…

L’ADN qui compose nos chromosomes peut être considéré comme une longue chaîne constituée d’une succession de plus petites molécules, les nucléotides. Ces « maillons » sont de quatre types, symbolisés par les lettres A (Adénine), T (Thymine), G (Guanine) et C (Cytosine). L’enchaînement de ces quatre nucléotides constitue la « séquence » de l’ADN.

Certaines portions de cette séquence correspondent à des gènes, autrement dit des régions qui contiennent les informations nécessaires à la fabrication de protéines.

En temps normal, la séquence d’un gène permet de produire une protéine qui fonctionne correctement. Mais il arrive que l’ADN soit endommagé ou modifié. Dans certains cas, les modifications de séquence des gènes (ou « mutation ») qui en résulte font que les protéines correspondantes ne peuvent plus être fabriquées correctement. C’est par exemple le cas lorsqu’une mutation « non sens » (aussi appelée mutation « STOP ») est introduite dans l’ADN.

Ce type de mutation fonctionne comme un signal d’arrêt : lorsque le gène muté est utilisé pour produire la protéine correspondante, la fabrication de cette dernière s’interrompt prématurément. Conséquence : soit la protéine n’est pas produite, soit elle est trop courte, et ne fonctionne pas correctement.

Or, les protéines jouent d’innombrables rôles dans notre organisme. Les hormones, les anticorps, les récepteurs cellulaires, les enzymes, entre autres, sont des protéines. Si certaines d’entre elles sont non fonctionnelles, absentes ou anormales, des maladies peuvent donc rapidement survenir.

Corriger les mutations non-sens grâce à un champignon ?
Créée en 2003, la chimiothèque nationale est à la chimie ce que la bibliothèque nationale est à la littérature : une immense collection de plus de 80 000 composés chimiques et 15 000 extraits naturels originaux, mis à la disposition des équipes de recherche.

En 2012, 20 000 extraits de plantes, micro-organismes et champignons issus de cette chimiothèque nationale ont été testés via un protocole permettant d’identifier les composés capables de corriger efficacement les mutations non-sens dans des cellules humaines cultivées en laboratoire.

Ce criblage a permis de détecter une activité correctrice de mutations non-sens intéressante dans un extrait provenant de Lepista inversa (ou clitocybe inversé). Ce champignon commun, comestible quoique peu savoureux, peut être ramassé dans les forêts d’Europe, d’Amérique du Nord ou d’Afrique du Nord.

Suite à cette découverte, nous avons entamé une collaboration avec les scientifiques du Muséum national d’histoire naturelle de Paris (qui avaient initialement préparé cet extrait pour le mettre en collection) afin de purifier la molécule impliquée dans cette activité.

C’est ainsi que nous avons identifié la 2,6-diaminopurine, ou DAP. Étonnamment, cette molécule n’était pas connue pour posséder une telle capacité de correction.
Après avoir purifié la DAP, nous avons comparé son activité à celle d’autres molécules correctrices de mutations non-sens déjà connues. La molécule de champignon s’est montrée bien plus efficace que ses concurrentes pour corriger des mutations dans des cellules en culture.
La 2,6-diaminopurine présente la capacité de corriger les mutations « non-sens » Yikrazuul / Wikimedia Commons
L’étape suivante a été d’évaluer sa toxicité : bonne nouvelle, la DAP ne présente pas ou peu de toxicité sur les cellules en culture. Enfin, il a fallu élucider son mode d’action, autrement dit, la façon dont elle fonctionne. Ce dernier point est très important, car il permet d’anticiper de possibles effets secondaires.

Nous avons découvert que la DAP inhibe l’activité d’une enzyme qui agit sur la machinerie cellulaire impliquée dans la fabrication des protéines. Sans entrer dans les détails : l’inhibition de cette enzyme a pour conséquence de rendre « lisible » la séquence de mutation « STOP ».

En absence de DAP, une telle séquence est perçue comme un signal d’arrêt par la machinerie cellulaire qui fabrique les protéines. Mais après l’ajout de DAP, la machinerie cellulaire qui fabrique les protéines n’est plus arrêtée par la présence d’une séquence « STOP ».

Point particulièrement intéressant, ce mécanisme fonctionne seulement lorsque la séquence « STOP » résulte d’une mutation. Les « stops » physiologiques, qui sont normalement présents à la fin des séquences destinées à produire les protéines, ne sont pas affectés par la DAP. La production des protéines « normales » ne devrait donc pas être modifiée.

Après ces premières recherches menées sur des cellules en culture, nous avons poursuivi l’étude de cette molécule. Nous avons notamment cherché à savoir si elle pouvait corriger des mutations non-sens responsables d’une maladie génétique, la mucoviscidose.

La DAP comme approche thérapeutique de la mucoviscidose
La mucoviscidose est une maladie génétique rare qui touche principalement les voies respiratoires et le système digestif. En France, et plus généralement dans les pays occidentaux, c’est l’une des maladies génétiques les plus fréquentes. Elle affecte environ 6000 personnes dans notre pays, où 200 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année.

La mucoviscidose est due à une mutation du gène qui permet de fabriquer la protéine CFTR. Présente dans la membrane des cellules de diverses muqueuses (muqueuse respiratoire, muqueuse digestive…), CFTR forme un canal qui permet la sécrétion d’ions chlorure vers l’extérieur des cellules. Chez les personnes atteintes de mucoviscidose, ce canal dysfonctionne.

Les poumons des malades atteints de mucoviscidose sont peu à peu détruits par une inflammation anormale. Shutterstock
En conséquence, les cellules sécrètent moins de chlorure et, surtout, moins d’eau. Moins hydraté, le mucus qui recouvre les muqueuses devient visqueux, collant, et ne remplit plus correctement sa fonction de protection vis-à-vis des microbes. Bactéries et champignons restent piégés dans les bronches, ce qui provoque des infections répétées et une inflammation durable qui dégrade peu à peu les poumons, entraînant des difficultés à respirer et, à terme, le décès des malades.

Avec l’aide de l’association Vaincre la mucoviscidose, nous avons dans un premier temps évalué le potentiel thérapeutique de la DAP sur des cellules en culture.

Nos résultats ont révélé que l’ajout de DAP corrige effectivement les mutations non-sens présentes dans le gène CFTR de telles cellules et permet de restaurer la fonction de la protéine correspondante. Sur des cellules de patients atteints de mucoviscidose due à une mutation non-sens, le rétablissement de la fonction de CFTR a été observé en moins de 24 heures.

L’étape suivante a consisté à tester la capacité de la molécule à corriger les mutations non-sens au sein d’une organisation cellulaire s’approchant de celle d’un organe.

Grâce à une collaboration avec l’équipe de Jeff Beekman, aux Pays-Bas, nous avons pu tester la DAP sur des organoïdes intestinaux.

Ces « mini-organes » sont des assemblages de cellules dont l’organisation rappelle celle de l’organe dont ils sont issus (dans notre cas, l’intestin, car les cellules utilisées dérivaient de cellules issues d’une biopsie rectale). L’intérêt est d’obtenir une architecture et des fonctionnalités proches de celle de l’organe originel.

L’ajout de DAP dans le milieu de culture de ces organoïdes a permis, là encore, de restaurer la fonction de la protéine CFTR. Et ce, avec une efficacité comparable à celle d’un médicament déjà utilisé pour traiter des patients atteints de formes de mucoviscidose dues à un autre type de mutation que des mutations non-sens.

Ce résultat corrobore l’hypothèse que la DAP pourrait constituer un candidat médicament pertinent pour le traitement des mucoviscidoses liées à des mutations non-sens.

Enfin, pour se rapprocher encore davantage de la physiologie rencontrée chez les patients, nous avons effectué des expérimentations chez la souris.

Chez ce rongeur, l’absence de protéine CFTR conduit à une forte mortalité non seulement durant la gestation, mais aussi pendant les premiers jours qui suivent la naissance.

En nourrissant quotidiennement avec de la DAP, trois jours durant, des souris adultes porteuses d’une mutation non-sens dans le gène CFTR, nous avons montré que nous effacions les conséquences de cette dernière : ce traitement a en effet permis de restaurer la production et la fonction de la protéine CFTR.

De manière encore plus remarquable, ces travaux ont révélé qu’il est possible de restaurer l’expression et la fonction de CFTR chez le fœtus, en administrant de la DAP à une femelle gestante. À la naissance, la protéine CFTR était présente chez les souriceaux, et le pourcentage de souris porteuses de la mutation correspondait au pourcentage attendu pour une mutation non mortelle. Ces résultats indiquent que la DAP est donc capable de passer la barrière du placenta.

Nous nous sommes aussi aperçus que nous pouvions prolonger l’exposition des petits après la naissance en poursuivant le traitement de la mère. En effet, la DAP passe aussi dans le lait maternel. Les souriceaux sont donc exposés à la molécule pendant toute la période d’allaitement.

Enfin, la DAP est également connue pour sa capacité à traverser la barrière hémato-encéphalique, qui protège le cerveau, ce qui laisse entrevoir la possibilité de l’utiliser afin de traiter des mutations non-sens dans cet organe.

Ce type d’intervention n’est cependant pas encore à l’ordre du jour : plusieurs étapes restent à franchir avant de pouvoir envisager d’utiliser la DAP comme médicament chez l’être humain.

On peut aujourd’hui raisonnablement considérer la DAP comme une candidate solide pour la mise au point d’un traitement des formes de mucoviscidose dues aux mutations non-sens. Cependant, elle ne peut pas encore être administrée en l’état à l’être humain. Avant d’en arriver là, deux étapes majeures doivent encore être franchies.

Il faudra tout d’abord trouver une formulation pharmacologique qui permettra de rendre la DAP facilement administrable, et qui optimisera sa distribution dans l’organisme au cours du traitement.

Surtout, il faudra tester sa toxicité potentielle chez l’animal et l’être humain. Des tests réglementaires permettront de déterminer si la DAP peut entrer en phase d’essais cliniques (durant laquelle elle sera administrée à des patients) ou si elle est au contraire trop dangereuse pour être administrée aux malades.

Ces deux étapes nécessitant des budgets très importants, elles seront entreprises par une jeune start-up, Genvade Therapeutics.

Jusqu’à présent, seules deux molécules correctrices de mutations non-sens ont atteint la phase des essais cliniques (ataluren et ELX-02). Malheureusement, ni l’une ni l’autre n’a permis d’améliorer significativement les symptômes des patients. Une des raisons avancées pour expliquer cet échec est que l’efficacité de ces molécules pourrait être trop faible pour se traduire par un bénéfice thérapeutique.

La DAP présente toutefois un profil plus prometteur, puisque son efficacité est très largement supérieure à celle de ces composés. Si les espoirs qu’elle soulève s’avèrent fondés, elle pourrait en théorie être utilisée pour traiter d’autres maladies génétiques, comme la myopathie de Duchenne ou l’hémophilie par exemple. Mais pour cela, de nombreux travaux complémentaires seront nécessaires.

Une chose est certaine : quelle que soit l’issue de ces recherches, elles auront été riches d’enseignements. Elles nous auront notamment rappelé que la biodiversité qui nous entoure est une richesse à préserver. En effet, qui aurait pu prévoir qu’un champignon aussi banal que le clitocybe inversé abritait une molécule potentiellement capable de corriger notre ADN ?

Réchauffement climatique : les maladies tropicales menacent la France

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La hausse des températures et la destruction de milieux naturels pourraient représenter une véritable menace pour la santé humaine dans le futur. La propagation de certaines maladies, comme celles transmises par le moustique tigre, est déjà en train de s’accélérer partout dans le monde, y compris en France.

En cause, la hausse des températures et la fragilisation des écosystèmes par des pratiques agricoles intensives, la monoculture et les déforestations. Il y a un lien évident entre la perte de la biodiversité et les maladies infectieuses en recrudescence aujourd’hui. «

En temps normal, la circulation d’un agent pathogène est contenue en se diluant au sein des populations animales dites « réservoirs ». Mais dès lors que leur environnement est dégradé, certains animaux peuvent sortir de ces « sanctuaires » pour trouver des espaces plus viables. Ils se rapprochent alors d’autres espèces dont ils étaient jusque-là éloignés et les contaminent : au moins 15 000 transmissions virales entre espèces devraient survenir d’ici à 2070, a révélé une étude américaine publiée fin avril dans la revue scientifique Nature . Ce qui augmente le risque, in fine, que les espèces animales viennent aussi au contact des populations humaines et les infectent également.

Ces maladies transmises de l’animal à l’homme, appelées « zoonoses », peuvent rapidement être à l’origine d’épidémie, en raison de la faible réponse immunitaire des humains. « À l’heure actuelle, ce sont déjà 75 % des maladies infectieuses chez l’homme qui ont une origine animale », relève,la chercheuse Anna-Bella Failloux.

Les infections au virus du chikungunya, de la dengue et du zika, transmis par le moustique tigre, sont particulièrement à la hausse, et pas seulement dans les pays chauds des zones intertropicales d’où elles sont originaires, mais aussi dans les régions tempérées, y compris en France. « Le moustique est un animal à sang froid, il ne peut pas réguler sa température interne, donc dès que les températures augmentent, il va essayer de trouver un environnement compatible à sa survie, se déplacer et ainsi étendre son aire de distribution », détaille Anna-Bella Failloux, spécialiste de cette espèce.

Si bien qu’aujourd’hui, cet insecte a colonisé à une vitesse éclair de nouvelles régions : arrivé en 1990 en Europe depuis l’Asie, le moustique tigre remonte désormais jusqu’à l’Île-de-France. Fin 2021, il était présent dans 67 départements métropolitains sur 96, contre 58 l’année précédente. Quant à la période d’activité des moustiques, elle déborde désormais de l’été et s’étire de mai à novembre dans l’Hexagone. « Par ailleurs, plus le thermomètre grimpe, plus la durée de développement du moustique va se raccourcir : le passage de l’œuf à l’adulte prendra 7 à 10 jours, contre 15 en temps normal », note la chercheuse. « Les moustiques seront donc plus nombreux sur une même période, et vont aussi devenir infectieux beaucoup plus rapidement. »

Autant de facteurs qui débouchent sur l’apparition de cas autochtones en France, c’est-à-dire d’infections de personnes qui n’ont pas quitté le territoire mais contaminées par un moustique ayant piqué un voyageur revenant d’un pays chaud. C’est le cas depuis 2010 pour la dengue et le chikungunya, ainsi que le zika depuis 2019. « On ne peut pas encore parler d’épidémie, mais au vu de la densité croissante des moustiques tigres, le cocktail pour l’émergence d’une telle dynamique est bien là », alerte Anna-Bella Failloux.

Ces contaminations surviennent en particulier à la période estivale, au moment des retours de vacances. « Plus largement, depuis 1965, la mondialisation des épidémies est parfaitement corrélée à l’augmentation du trafic aérien », note Serge Morand, qui décrit une dangereuse « spirale ». « Tout est lié : le transport international aggrave le changement climatique, et comme lui, il favorise la mobilité des vecteurs voire des pathogènes, débouchant potentiellement sur des maladies infectieuses », décortique-t-il. Désormais, aucune région du monde n’est épargnée par le risque épidémique.

Pour tenter de le freiner, les spécialistes insistent sur la nécessité de modifier nos modes de vie et de culture, en vue de limiter les effets du changement climatique. « Il faut des systèmes de santé publique efficaces, résilients, mais aussi veiller à la santé animale », préconise Serge Morand. Reste que ces risques sont particulièrement difficiles à anticiper et à contrer.

Nous sommes une population très vulnérable, qui ne sera jamais préparée à une pandémie

Les aléas climatiques sont délicats à prévoir, et certaines attitudes se révèlent même contre-productives. Parmi elles, le stockage d’eau en période de sécheresse, particulièrement propice au développement des moustiques tigres, relève Anna-Bella Failloux, qui plaide surtout pour une meilleure prévention et la « sensibilisation aux bons réflexes ». D’autant qu’une fois installé, il est impossible pour l’heure de déloger cet insecte.

La façon dont l’épidémie de Covid-19 a pris de court les gouvernements et les systèmes de santé internationaux semble à ce propos de mauvais augure.

Hôpital et Covid: la lourdeur des maladies chroniques

Hôpital et Covid: la lourdeur des maladies chroniques 

Le Collectif inter-associatif pour la santé environnementale considère dans une tribune au « Monde » qu’il est urgent de lutter contre les causes des maladies chroniques qui pèsent de plus en plus lourd sur l’hôpital.

 

Tribune. 

 

La crise sanitaire a jeté une lumière crue sur les failles de notre système de santé qui était déjà sous tension avant même l’émergence de la pandémie. Ce système repose en grande partie sur l’abnégation des personnels dont nous soutenons la mobilisation du 4 décembre 2021 pour la défense de l’hôpital public.

Ces difficultés structurelles ont des causes multiples, certaines intrinsèques à l’organisation du soin et au manque de moyens, d’autres sont plus profondes, en lien avec l’épidémie de maladies chroniques qui s’observe depuis ces dernières décennies, dont l’origine environnementale est aujourd’hui scientifiquement établie.

Les victimes du Covid sont prioritairement les personnes atteintes de maladies chroniques (obésité, hypertension, diabète, maladies cardiovasculaires, etc.) et 15 % des décès dus au coronavirus sont par ailleurs liés à la pollution de l’air. En février 2021, Epi-phare (Caisse nationale d’Assurance-maladie-CNAM/Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé-ANSM) a réalisé une analyse des données de l’intégralité de la population française, soit 67 millions de personnes, afin d’identifier les maladies chroniques et les facteurs tels que l’âge ou le genre susceptibles d’induire un sur-risque d’hospitalisation ou de décès pour le Covid-19.

Le doublement des maladies chroniques

Le constat est sans appel. Sur 47 affections chroniques analysées, 46 sont associées à des risques accrus d’hospitalisation et de décès pour le Covid-19. Certes, l’âge et le sexe sont des facteurs importants, mais, après ajustement sur ces deux facteurs, l’augmentation du risque d’hospitalisation et de décès est de 150 % pour l’obésité et l’insuffisance cardiaque, de 100 % pour le diabète ou les maladies respiratoires chroniques… Le risque est doublé chez les populations les plus défavorisées.

Richard Horton, rédacteur en chef du Lancet, a pu parler à ce propos de « syndémie », c’est-à-dire une pandémie dont l’ampleur provient d’autres facteurs que la cause infectieuse. En France, le nombre des malades chroniques a doublé au cours des deux dernières décennies et ce phénomène s’accentuera si rien n’est fait.


Le rapport de la CNAM publié en 2021 donne la réalité de l’épidémie de maladies chroniques en 2018 : 21 millions de personnes atteintes et une projection de 23 millions pour 2023. Entre 2012 et 2018, les maladies cardiovasculaires sont passées de 3,5 millions à 4,9 millions (prévision 2023 : 5,5 millions), et le diabète de 2,9 millions à 3,9 millions (projection 2023 : 4,4 millions).

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