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Gouvernement : la continuation du macronisme pour l’opposition

Gouvernement : la continuation du macronisme pour l’opposition. « Pas un nouveau gouvernement, un remaniement. Pas une révolution, une restauration. La continuation du macronisme… en pire. Les socialistes censureront cette trahison du vote des Français », a ainsi écrit le patron des députés socialistes Boris Vallaud.

« Ce +nouveau+ gouvernement signe le retour du macronisme par une porte dérobée. Ce que les Français ont démocratiquement sanctionné, à deux reprises, ne peut revenir par de lamentables jeux d’appareils et calculs politiciens. C’est donc un gouvernement qui n’a aucun avenir », a affirmé Jordan Bardella sur X.

De son côté, le leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon a appelé samedi à se « débarrasser aussitôt que possible » du gouvernement de Michel Barnier à peine nommé, qui n’a selon lui « ni légitimité ni futur ». « Le casting du nouveau film catastrophe macroniste est connu. Le gouvernement des perdants des élections législatives est dans la main de l’inquiétant ministre de l’Intérieur », le LR Bruno Retailleau, a-t-il estimé.

La gauche a déjà annoncé qu’elle voterait une motion de censure de ce gouvernement à l’Assemblée. Elle aura pour la faire passer besoin des voix de l’extrême droite.

 

Politique et « Macronisme »: Surtout de l’opportunisme

Politique et  « Macronisme »: Surtout de  l’opportunisme

L’usage journalistique et la facilité de langage conduisent souvent à accoler un suffixe en -isme au nom d’une personnalité politique pour désigner un courant politique qui s’incarnerait à travers un responsable. C’est ainsi qu’est apparu « le macronisme. » Dans une acception faible, ce serait un courant plus ou moins organisé désignant un groupe d’élus et militants, et le camp de ses soutiens électoraux. Dans un sens plus fort, cela induirait l’existence d’un corps de doctrine, une idéologie fixant un cap. Or, on peut arguer que ce qu’Emmanuel Macron incarne ne correspond véritablement à aucune de ces deux conceptions.Si beaucoup d’analystes et journalistes politiques se sont éreintés à trouver une définition objective du « macronisme » et de ses paradoxes, c’est que l’action du président n’est pas régie par une ligne directrice constante, mais est dans son essence un opportunisme, un art de saisir le moment, de tenter des coups, parfois avec brio, parfois en échouant, comme pour cette dissolution « ratée ». Ratée au point d’ouvrir sans doute l’ère de l’après-Macron mais pas ratée au point de ne pas offrir de nouvelles opportunités qu’il peut tenter de saisir.

 

par 

Professeur en Information-Communication à l’Institut Français de presse (Université Paris-Panthéon-Assas), Université Paris-Panthéon-Assas dans The Conversation 

 

Un courant politique sans véritable parti ? Le macronisme serait, en parodiant Jean-Luc Mélenchon, une composante « gazeuse ». Loin de former un parti politique au sens classique et institutionnel, avec des cadres dirigeants, une colonne vertébrale qui innerve un corps militant jusqu’à des cellules de base, l’ADN macronien reste indistinct sur le plan organisationnel.

La meilleure preuve est sa propension à changer le nom du parti censé l’incarner, sans même laisser à la marque le temps de s’imposer : En marche (2016 – mi-2017), le parti la République en marche (2017 à 2022), Renaissance (depuis 2022), tout en ayant participé juste avant à une coalition électorale baptisée Ensemble pour la majorité présidentielle, abrégée par Ensemble.

Sur le plan doctrinal, les partis du président de la République n’ont pas œuvré à produire un corps de doctrine qui orienterait le travail législatif. La majorité présidentielle au Parlement a pour principale source d’inspiration le programme du candidat Macron, qui n’a pas été rédigé sous forme d’une motion collective votée par un collectif militant mais uniquement par son fondateur et quelques conseillers. Le macronisme n’est donc pas une doctrine à forte probabilité de survivre à son inventeur.

Les fonctions dévolues habituellement à un parti ne sont pas exercées : incarnation, réseau militant actif et nombreux, formation de cadres ayant vocation à devenir des élus, laboratoire d’idées.

C’est la seule figure de ce chef fondateur qui fait tenir le mouvement et cela grâce à sa victoire inattendue à la présidentielle de 2017. C’est ce coup politique, perçu par ses soutiens comme un coup de génie, un triomphe, qui lui a donné une telle force d’attraction personnelle. Il a ensuite joué la carte d’un président omniprésent, assumant de réaffirmer l’autorité, en adoptant une posture « jupiterienne ».

Sa façon d’assurer dépasser les corps intermédiaires et l’orientation de son action assumant de plus en plus de passer en force, même sans majorité, grâce à tous les atouts donnés par la Ve République (les fameux 49.3), permettent de qualifier son style de gouvernance de bonapartiste.
Emmanuel Macron joue souvent sur l’effet de surprise pour déstabiliser ses adversaires, en tentant des coups politiques. Christophe Ena/AFP
Emmanuel Macron joue souvent sur l’effet de surprise pour déstabiliser ses adversaires, en tentant des coups politiques (rencontres de Saint-Denis avec les leaders de tous les partis, conférences citoyennes, dissolution surprise…). Il s’essaie à une synthèse toute personnelle et personnalisée des idéaux des deux camps (« et de droite et de gauche ») pensant incarner un dépassement : tout comme Napoléon Bonaparte conserva de la Révolution l’idéal de souveraineté populaire et prit en même temps en héritage l’idéal d’autorité impériale pour créer un régime impérial plébiscitaire, centré sur sa personne.L’une des difficultés à saisir le macronisme est liée à ses changements de soutiens électoraux au cours du premier mandat.

En 2017, Emmanuel Macron a atteint le deuxième tour de l’élection présidentielle grâce à une combinaison électorale d’électeurs socialistes et centristes. Selon Ipsos, 47 % des électeurs de François Hollande en 2012 ont voté Macron, de même que 43 % des électeurs de François Bayrou. À l’époque déjà, il mord un peu sur l’électorat plus à droite, puisque le candidat Macron a attiré à lui 17 % des électeurs de Nicolas Sarkozy en 2012.

Si on raisonne par sympathies partisanes, le côté attrape-tout du macronisme initial est évident. Au premier tour de la présidentielle 2017, il rallie sur son nom 19 % des sympathisants écologistes (EELV), 42 % du PS, 46 % du MoDem, 36 % de l’UDI, 9 % des LR.

Au premier tour de la présidentielle 2022, le président sortant fidélise 73 % de ses électeurs de 2017 (il en perd donc 27 %) et il attire 39 % des électeurs Fillon, considéré comme incarnant une droite conservatrice. En 2022, sa perte des électeurs de centre gauche et socialistes, est plus que compensés par des électeurs de la droite traditionnelle au profil sarkozyste.

En 2022, les données Ipsos, le vote Macron n’attire plus que 28 % des sympathisants PS, 13 % des écologistes, mais 25 % des LR. Et le mouvement se poursuit pour le premier tour des législatives de 2024. Selon l’enquête IFOP, les électeurs Renaissance au 1er tour représentent 13 % des sympathisants PS, 12 % des écologistes et 21 % des Républicains. Et on ajoutera que ce parti attire 35 % des (maigres) effectifs de votants pour Valérie Pécresse en 2022.

Le dictionnaire de l’Académie définit l’opportunisme comme une « attitude consistant à régler sa conduite selon les circonstances du moment, à subordonner toute autre considération à son intérêt immédiat ». Emmanuel Macron sait repérer et saisir des opportunités.

En 2017, face à l’affaiblissement du président Hollande, il a vu un espace politique se libérer et s’est engouffré. Dans un appel au « dépassement » du clivage traditionnel droite/gauche, il a croisé la route de François Bayrou dont le soutien a fait décoller sa campagne dans les sondages.

Il a pu alors entamer une campagne placée sous le signe de la « bienveillance » vis-à-vis de ses adversaires, au profit d’un rassemblement transpartisan.

Puis, profitant largement des ennuis judiciaires de François Fillon, il a eu l’opportunité de se retrouver au second tour face à Marine Le Pen, pour bénéficier du vote de « barrage contre l’extrême droite ». Voilà pourquoi, non sans un peu de cynisme, il a fêté avec ses amis sa victoire présidentielle dès le premier tour.

Depuis ce coup de maître, sa gouvernance se révèle difficile à suivre, sans boussole idéologique claire. Il défendait une retraite à points, soutenue par la CFDT, mais il finit par imposer de force une réforme que tous les syndicats et une écrasante majorité de Français rejettent. Il se voulait soucieux des deniers publics et équilibres budgétaires, ses sept années de mandat ont vu la dette publique exploser, au point d’être mis sous surveillance par la Commission européenne. Il défend une solution de compromis âprement négociée avec LR pour la loi sur l’immigration, mais s’empresse de la livrer au Conseil constitutionnel avec l’espoir de la voir largement censurée. Il promet une loi progressiste sur la fin de vie, largement plébiscitée par les Français, mais accouche finalement d’un projet de loi assez restrictif pour essayer de trouver un compromis entre les partis, que la dissolution condamne finalement à retomber dans les limbes.

Sa posture de défiance vis-à-vis du jeu des appareils partisans entre en contradiction avec ses calculs politiciens, jouant sur le fractionnement des partis, à coup de triangulation programmatique, de débauchages individuels et désormais de tractations pour contrer l’arithmétique défavorable sortie des urnes. Il accusait le « vieux système des partis » de vouloir se protéger lors de sa conférence de presse justifiant la dissolution. Voilà que son camp qui a perdu la majorité (déjà que relative), s’emploie pour nouer des alliances compliquées afin de survivre à la tête du gouvernement.
Le président Macron voulait une « clarification », nous sommes face à une grande confusion. Il voulait freiner l’élan du Rassemblement national, ce parti a gagné une cinquantaine de sièges. Pire, de premier pôle parlementaire, son alliance partisane passe seconde. La dissolution semble être un échec stratégique.

Néanmoins, le jeu des « désistements républicains » a permis de sauver Renaissance qui ne sort donc pas du jeu parlementaire. Comme la force du président Macron réside dans son aptitude à croire qu’il peut toujours sauver la situation et saisir une opportunité, il y voit la chance de retrouver les moyens d’avoir un gouvernement conforme à ses ambitions.

En conformité avec toute son action passée, la probabilité la plus forte est que ses efforts tendent vers un scénario idéal ou à défaut vers un scénario minimal qui exclut tout ou une partie de la gauche.

L’idéal serait de profiter de la position « centrale » de son mouvement pour tenter d’agréger dans une grande coalition des députés de la droite LR et des élus de gauche, sauf LFI car rejetée comme extrémiste. Il sortirait ainsi de son échec par la grande porte, celle d’une recomposition politique permettant un accord de gouvernement entre des partis qui s’opposent sur bien des points.

L’autre scénario, s’il n’arrive pas à fracturer le Nouveau Front populaire au profit d’une alliance droite-centre-gauche, serait d’arrimer son groupe parlementaire au groupe LR, avec un contrat de gouvernement penchant clairement à droite. Et peu importe si une bonne partie des députés Renaissance doivent leur réélection à un fort soutien des électeurs de gauche pour faire front contre le RN.

Il s’agit en effet d’acter que le barycentre du vote pour le Parlement penche nettement à droite, et ce faisant l’argument est tout trouvé : il ne ferait qu’épouser l’aspiration majoritaire des électeurs : 8,7 millions de voix au second tour se sont portées sur une candidature RN, 1,3 pour une candidature LR-RN, 1,4 million pour LR, 6,3 pour Renaissance, 250 000 Horizons, 1 million divers droite, soit presque 19 millions de voix qui vont du centre droit à l’extrême droite, contre 7 millions pour le Nouveau Front populaire.

Un sursaut… dans le vide ?
L’annonce brutale de la dissolution et la perte importante de députés laissent des rancœurs qui fendillent le camp présidentiel. François Bayrou, comme Edouard Philippe, et même Gabriel Attal commencent à tester leur autonomie vis-à-vis du chef.

Le seul moyen de contrecarrer ces velléités d’autonomie est de leur donner la satisfaction de s’ancrer résolument à droite et de refuser les « égarements » du projet de gauche, décrit comme insensé durant la campagne. À condition néanmoins que ladite « aile gauche » du macronisme ne fasse pas acte d’autonomie en créant son propre groupe au Parlement sous la houlette de Sacha Houlié. Acte qui signerait le début de l’éclatement du « macronisme » comme regroupement de tendances divergentes.

L’alliance, côté LR, serait plus justifiable aussi. La situation est différente de 2022 lorsque pareille alliance fût refusée : il s’agit cette fois de faire barrage à l’arrivée de la gauche au pouvoir, présentée comme extrémiste, communautariste, etc. Hypothèse crédible puisque la gauche crie à sa victoire (malgré ses moins de 200 députés). L’agrégation des forces du centre et de droite donne 234 sièges. Soit 16 de moins seulement que la majorité relative sortante qui a quand même pu gouverner depuis deux années. Impossible donc qu’Emmanuel Macron n’y voit pas un coup à tenter pour conserver le pourvoir malgré sa défaite.

Mais si les jeux de posture de chaque acteur partisan interdisaient toute forme d’alliance, ce sera la paralysie législative d’une chambre introuvable. Pour le président de la République, ce serait l’échec dans l’échec de sa dissolution et la fin potentielle du « macronisme » car cela signifierait qu’il a perdu tout son pouvoir attracteur. Son appel aux électeurs pour un « sursaut démocratique » sera alors devenu pour son courant un sursaut dans le vide.

Le « Macronisme »: Surtout de l’opportunisme

Le « Macronisme »: Surtout de  l’opportunisme

L’usage journalistique et la facilité de langage conduisent souvent à accoler un suffixe en -isme au nom d’une personnalité politique pour désigner un courant politique qui s’incarnerait à travers un responsable. C’est ainsi qu’est apparu « le macronisme. » Dans une acception faible, ce serait un courant plus ou moins organisé désignant un groupe d’élus et militants, et le camp de ses soutiens électoraux. Dans un sens plus fort, cela induirait l’existence d’un corps de doctrine, une idéologie fixant un cap. Or, on peut arguer que ce qu’Emmanuel Macron incarne ne correspond véritablement à aucune de ces deux conceptions.Si beaucoup d’analystes et journalistes politiques se sont éreintés à trouver une définition objective du « macronisme » et de ses paradoxes, c’est que l’action du président n’est pas régie par une ligne directrice constante, mais est dans son essence un opportunisme, un art de saisir le moment, de tenter des coups, parfois avec brio, parfois en échouant, comme pour cette dissolution « ratée ». Ratée au point d’ouvrir sans doute l’ère de l’après-Macron mais pas ratée au point de ne pas offrir de nouvelles opportunités qu’il peut tenter de saisir.

 

par 

Professeur en Information-Communication à l’Institut Français de presse (Université Paris-Panthéon-Assas), Université Paris-Panthéon-Assas dans The Conversation 

 

Un courant politique sans véritable parti ? Le macronisme serait, en parodiant Jean-Luc Mélenchon, une composante « gazeuse ». Loin de former un parti politique au sens classique et institutionnel, avec des cadres dirigeants, une colonne vertébrale qui innerve un corps militant jusqu’à des cellules de base, l’ADN macronien reste indistinct sur le plan organisationnel.

La meilleure preuve est sa propension à changer le nom du parti censé l’incarner, sans même laisser à la marque le temps de s’imposer : En marche (2016 – mi-2017), le parti la République en marche (2017 à 2022), Renaissance (depuis 2022), tout en ayant participé juste avant à une coalition électorale baptisée Ensemble pour la majorité présidentielle, abrégée par Ensemble.

Sur le plan doctrinal, les partis du président de la République n’ont pas œuvré à produire un corps de doctrine qui orienterait le travail législatif. La majorité présidentielle au Parlement a pour principale source d’inspiration le programme du candidat Macron, qui n’a pas été rédigé sous forme d’une motion collective votée par un collectif militant mais uniquement par son fondateur et quelques conseillers. Le macronisme n’est donc pas une doctrine à forte probabilité de survivre à son inventeur.

Les fonctions dévolues habituellement à un parti ne sont pas exercées : incarnation, réseau militant actif et nombreux, formation de cadres ayant vocation à devenir des élus, laboratoire d’idées.

C’est la seule figure de ce chef fondateur qui fait tenir le mouvement et cela grâce à sa victoire inattendue à la présidentielle de 2017. C’est ce coup politique, perçu par ses soutiens comme un coup de génie, un triomphe, qui lui a donné une telle force d’attraction personnelle. Il a ensuite joué la carte d’un président omniprésent, assumant de réaffirmer l’autorité, en adoptant une posture « jupiterienne ».

Sa façon d’assurer dépasser les corps intermédiaires et l’orientation de son action assumant de plus en plus de passer en force, même sans majorité, grâce à tous les atouts donnés par la Ve République (les fameux 49.3), permettent de qualifier son style de gouvernance de bonapartiste.
Emmanuel Macron joue souvent sur l’effet de surprise pour déstabiliser ses adversaires, en tentant des coups politiques. Christophe Ena/AFP
Emmanuel Macron joue souvent sur l’effet de surprise pour déstabiliser ses adversaires, en tentant des coups politiques (rencontres de Saint-Denis avec les leaders de tous les partis, conférences citoyennes, dissolution surprise…). Il s’essaie à une synthèse toute personnelle et personnalisée des idéaux des deux camps (« et de droite et de gauche ») pensant incarner un dépassement : tout comme Napoléon Bonaparte conserva de la Révolution l’idéal de souveraineté populaire et prit en même temps en héritage l’idéal d’autorité impériale pour créer un régime impérial plébiscitaire, centré sur sa personne.L’une des difficultés à saisir le macronisme est liée à ses changements de soutiens électoraux au cours du premier mandat.

En 2017, Emmanuel Macron a atteint le deuxième tour de l’élection présidentielle grâce à une combinaison électorale d’électeurs socialistes et centristes. Selon Ipsos, 47 % des électeurs de François Hollande en 2012 ont voté Macron, de même que 43 % des électeurs de François Bayrou. À l’époque déjà, il mord un peu sur l’électorat plus à droite, puisque le candidat Macron a attiré à lui 17 % des électeurs de Nicolas Sarkozy en 2012.

Si on raisonne par sympathies partisanes, le côté attrape-tout du macronisme initial est évident. Au premier tour de la présidentielle 2017, il rallie sur son nom 19 % des sympathisants écologistes (EELV), 42 % du PS, 46 % du MoDem, 36 % de l’UDI, 9 % des LR.

Au premier tour de la présidentielle 2022, le président sortant fidélise 73 % de ses électeurs de 2017 (il en perd donc 27 %) et il attire 39 % des électeurs Fillon, considéré comme incarnant une droite conservatrice. En 2022, sa perte des électeurs de centre gauche et socialistes, est plus que compensés par des électeurs de la droite traditionnelle au profil sarkozyste.

En 2022, les données Ipsos, le vote Macron n’attire plus que 28 % des sympathisants PS, 13 % des écologistes, mais 25 % des LR. Et le mouvement se poursuit pour le premier tour des législatives de 2024. Selon l’enquête IFOP, les électeurs Renaissance au 1er tour représentent 13 % des sympathisants PS, 12 % des écologistes et 21 % des Républicains. Et on ajoutera que ce parti attire 35 % des (maigres) effectifs de votants pour Valérie Pécresse en 2022.

Le dictionnaire de l’Académie définit l’opportunisme comme une « attitude consistant à régler sa conduite selon les circonstances du moment, à subordonner toute autre considération à son intérêt immédiat ». Emmanuel Macron sait repérer et saisir des opportunités.

En 2017, face à l’affaiblissement du président Hollande, il a vu un espace politique se libérer et s’est engouffré. Dans un appel au « dépassement » du clivage traditionnel droite/gauche, il a croisé la route de François Bayrou dont le soutien a fait décoller sa campagne dans les sondages.

Il a pu alors entamer une campagne placée sous le signe de la « bienveillance » vis-à-vis de ses adversaires, au profit d’un rassemblement transpartisan.

Puis, profitant largement des ennuis judiciaires de François Fillon, il a eu l’opportunité de se retrouver au second tour face à Marine Le Pen, pour bénéficier du vote de « barrage contre l’extrême droite ». Voilà pourquoi, non sans un peu de cynisme, il a fêté avec ses amis sa victoire présidentielle dès le premier tour.

Depuis ce coup de maître, sa gouvernance se révèle difficile à suivre, sans boussole idéologique claire. Il défendait une retraite à points, soutenue par la CFDT, mais il finit par imposer de force une réforme que tous les syndicats et une écrasante majorité de Français rejettent. Il se voulait soucieux des deniers publics et équilibres budgétaires, ses sept années de mandat ont vu la dette publique exploser, au point d’être mis sous surveillance par la Commission européenne. Il défend une solution de compromis âprement négociée avec LR pour la loi sur l’immigration, mais s’empresse de la livrer au Conseil constitutionnel avec l’espoir de la voir largement censurée. Il promet une loi progressiste sur la fin de vie, largement plébiscitée par les Français, mais accouche finalement d’un projet de loi assez restrictif pour essayer de trouver un compromis entre les partis, que la dissolution condamne finalement à retomber dans les limbes.

Sa posture de défiance vis-à-vis du jeu des appareils partisans entre en contradiction avec ses calculs politiciens, jouant sur le fractionnement des partis, à coup de triangulation programmatique, de débauchages individuels et désormais de tractations pour contrer l’arithmétique défavorable sortie des urnes. Il accusait le « vieux système des partis » de vouloir se protéger lors de sa conférence de presse justifiant la dissolution. Voilà que son camp qui a perdu la majorité (déjà que relative), s’emploie pour nouer des alliances compliquées afin de survivre à la tête du gouvernement.
Le président Macron voulait une « clarification », nous sommes face à une grande confusion. Il voulait freiner l’élan du Rassemblement national, ce parti a gagné une cinquantaine de sièges. Pire, de premier pôle parlementaire, son alliance partisane passe seconde. La dissolution semble être un échec stratégique.

Néanmoins, le jeu des « désistements républicains » a permis de sauver Renaissance qui ne sort donc pas du jeu parlementaire. Comme la force du président Macron réside dans son aptitude à croire qu’il peut toujours sauver la situation et saisir une opportunité, il y voit la chance de retrouver les moyens d’avoir un gouvernement conforme à ses ambitions.

En conformité avec toute son action passée, la probabilité la plus forte est que ses efforts tendent vers un scénario idéal ou à défaut vers un scénario minimal qui exclut tout ou une partie de la gauche.

L’idéal serait de profiter de la position « centrale » de son mouvement pour tenter d’agréger dans une grande coalition des députés de la droite LR et des élus de gauche, sauf LFI car rejetée comme extrémiste. Il sortirait ainsi de son échec par la grande porte, celle d’une recomposition politique permettant un accord de gouvernement entre des partis qui s’opposent sur bien des points.

L’autre scénario, s’il n’arrive pas à fracturer le Nouveau Front populaire au profit d’une alliance droite-centre-gauche, serait d’arrimer son groupe parlementaire au groupe LR, avec un contrat de gouvernement penchant clairement à droite. Et peu importe si une bonne partie des députés Renaissance doivent leur réélection à un fort soutien des électeurs de gauche pour faire front contre le RN.

Il s’agit en effet d’acter que le barycentre du vote pour le Parlement penche nettement à droite, et ce faisant l’argument est tout trouvé : il ne ferait qu’épouser l’aspiration majoritaire des électeurs : 8,7 millions de voix au second tour se sont portées sur une candidature RN, 1,3 pour une candidature LR-RN, 1,4 million pour LR, 6,3 pour Renaissance, 250 000 Horizons, 1 million divers droite, soit presque 19 millions de voix qui vont du centre droit à l’extrême droite, contre 7 millions pour le Nouveau Front populaire.

Un sursaut… dans le vide ?
L’annonce brutale de la dissolution et la perte importante de députés laissent des rancœurs qui fendillent le camp présidentiel. François Bayrou, comme Edouard Philippe, et même Gabriel Attal commencent à tester leur autonomie vis-à-vis du chef.

Le seul moyen de contrecarrer ces velléités d’autonomie est de leur donner la satisfaction de s’ancrer résolument à droite et de refuser les « égarements » du projet de gauche, décrit comme insensé durant la campagne. À condition néanmoins que ladite « aile gauche » du macronisme ne fasse pas acte d’autonomie en créant son propre groupe au Parlement sous la houlette de Sacha Houlié. Acte qui signerait le début de l’éclatement du « macronisme » comme regroupement de tendances divergentes.

L’alliance, côté LR, serait plus justifiable aussi. La situation est différente de 2022 lorsque pareille alliance fût refusée : il s’agit cette fois de faire barrage à l’arrivée de la gauche au pouvoir, présentée comme extrémiste, communautariste, etc. Hypothèse crédible puisque la gauche crie à sa victoire (malgré ses moins de 200 députés). L’agrégation des forces du centre et de droite donne 234 sièges. Soit 16 de moins seulement que la majorité relative sortante qui a quand même pu gouverner depuis deux années. Impossible donc qu’Emmanuel Macron n’y voit pas un coup à tenter pour conserver le pourvoir malgré sa défaite.

Mais si les jeux de posture de chaque acteur partisan interdisaient toute forme d’alliance, ce sera la paralysie législative d’une chambre introuvable. Pour le président de la République, ce serait l’échec dans l’échec de sa dissolution et la fin potentielle du « macronisme » car cela signifierait qu’il a perdu tout son pouvoir attracteur. Son appel aux électeurs pour un « sursaut démocratique » sera alors devenu pour son courant un sursaut dans le vide.

Macronisme: Surtout de l’opportunisme

Macronisme: Surtout de  l’opportunisme

L’usage journalistique et la facilité de langage conduisent souvent à accoler un suffixe en -isme au nom d’une personnalité politique pour désigner un courant politique qui s’incarnerait à travers un responsable. C’est ainsi qu’est apparu « le macronisme. » Dans une acception faible, ce serait un courant plus ou moins organisé désignant un groupe d’élus et militants, et le camp de ses soutiens électoraux. Dans un sens plus fort, cela induirait l’existence d’un corps de doctrine, une idéologie fixant un cap. Or, on peut arguer que ce qu’Emmanuel Macron incarne ne correspond véritablement à aucune de ces deux conceptions.Si beaucoup d’analystes et journalistes politiques se sont éreintés à trouver une définition objective du « macronisme » et de ses paradoxes, c’est que l’action du président n’est pas régie par une ligne directrice constante, mais est dans son essence un opportunisme, un art de saisir le moment, de tenter des coups, parfois avec brio, parfois en échouant, comme pour cette dissolution « ratée ». Ratée au point d’ouvrir sans doute l’ère de l’après-Macron mais pas ratée au point de ne pas offrir de nouvelles opportunités qu’il peut tenter de saisir.

 

par 

Professeur en Information-Communication à l’Institut Français de presse (Université Paris-Panthéon-Assas), Université Paris-Panthéon-Assas dans The Conversation 

 

Un courant politique sans véritable parti ? Le macronisme serait, en parodiant Jean-Luc Mélenchon, une composante « gazeuse ». Loin de former un parti politique au sens classique et institutionnel, avec des cadres dirigeants, une colonne vertébrale qui innerve un corps militant jusqu’à des cellules de base, l’ADN macronien reste indistinct sur le plan organisationnel.

La meilleure preuve est sa propension à changer le nom du parti censé l’incarner, sans même laisser à la marque le temps de s’imposer : En marche (2016 – mi-2017), le parti la République en marche (2017 à 2022), Renaissance (depuis 2022), tout en ayant participé juste avant à une coalition électorale baptisée Ensemble pour la majorité présidentielle, abrégée par Ensemble.

Sur le plan doctrinal, les partis du président de la République n’ont pas œuvré à produire un corps de doctrine qui orienterait le travail législatif. La majorité présidentielle au Parlement a pour principale source d’inspiration le programme du candidat Macron, qui n’a pas été rédigé sous forme d’une motion collective votée par un collectif militant mais uniquement par son fondateur et quelques conseillers. Le macronisme n’est donc pas une doctrine à forte probabilité de survivre à son inventeur.

Les fonctions dévolues habituellement à un parti ne sont pas exercées : incarnation, réseau militant actif et nombreux, formation de cadres ayant vocation à devenir des élus, laboratoire d’idées.

C’est la seule figure de ce chef fondateur qui fait tenir le mouvement et cela grâce à sa victoire inattendue à la présidentielle de 2017. C’est ce coup politique, perçu par ses soutiens comme un coup de génie, un triomphe, qui lui a donné une telle force d’attraction personnelle. Il a ensuite joué la carte d’un président omniprésent, assumant de réaffirmer l’autorité, en adoptant une posture « jupiterienne ».

Sa façon d’assurer dépasser les corps intermédiaires et l’orientation de son action assumant de plus en plus de passer en force, même sans majorité, grâce à tous les atouts donnés par la Ve République (les fameux 49.3), permettent de qualifier son style de gouvernance de bonapartiste.
Emmanuel Macron joue souvent sur l’effet de surprise pour déstabiliser ses adversaires, en tentant des coups politiques. Christophe Ena/AFP
Emmanuel Macron joue souvent sur l’effet de surprise pour déstabiliser ses adversaires, en tentant des coups politiques (rencontres de Saint-Denis avec les leaders de tous les partis, conférences citoyennes, dissolution surprise…). Il s’essaie à une synthèse toute personnelle et personnalisée des idéaux des deux camps (« et de droite et de gauche ») pensant incarner un dépassement : tout comme Napoléon Bonaparte conserva de la Révolution l’idéal de souveraineté populaire et prit en même temps en héritage l’idéal d’autorité impériale pour créer un régime impérial plébiscitaire, centré sur sa personne.L’une des difficultés à saisir le macronisme est liée à ses changements de soutiens électoraux au cours du premier mandat.

En 2017, Emmanuel Macron a atteint le deuxième tour de l’élection présidentielle grâce à une combinaison électorale d’électeurs socialistes et centristes. Selon Ipsos, 47 % des électeurs de François Hollande en 2012 ont voté Macron, de même que 43 % des électeurs de François Bayrou. À l’époque déjà, il mord un peu sur l’électorat plus à droite, puisque le candidat Macron a attiré à lui 17 % des électeurs de Nicolas Sarkozy en 2012.

Si on raisonne par sympathies partisanes, le côté attrape-tout du macronisme initial est évident. Au premier tour de la présidentielle 2017, il rallie sur son nom 19 % des sympathisants écologistes (EELV), 42 % du PS, 46 % du MoDem, 36 % de l’UDI, 9 % des LR.

Au premier tour de la présidentielle 2022, le président sortant fidélise 73 % de ses électeurs de 2017 (il en perd donc 27 %) et il attire 39 % des électeurs Fillon, considéré comme incarnant une droite conservatrice. En 2022, sa perte des électeurs de centre gauche et socialistes, est plus que compensés par des électeurs de la droite traditionnelle au profil sarkozyste.

En 2022, les données Ipsos, le vote Macron n’attire plus que 28 % des sympathisants PS, 13 % des écologistes, mais 25 % des LR. Et le mouvement se poursuit pour le premier tour des législatives de 2024. Selon l’enquête IFOP, les électeurs Renaissance au 1er tour représentent 13 % des sympathisants PS, 12 % des écologistes et 21 % des Républicains. Et on ajoutera que ce parti attire 35 % des (maigres) effectifs de votants pour Valérie Pécresse en 2022.

Le dictionnaire de l’Académie définit l’opportunisme comme une « attitude consistant à régler sa conduite selon les circonstances du moment, à subordonner toute autre considération à son intérêt immédiat ». Emmanuel Macron sait repérer et saisir des opportunités.

En 2017, face à l’affaiblissement du président Hollande, il a vu un espace politique se libérer et s’est engouffré. Dans un appel au « dépassement » du clivage traditionnel droite/gauche, il a croisé la route de François Bayrou dont le soutien a fait décoller sa campagne dans les sondages.

Il a pu alors entamer une campagne placée sous le signe de la « bienveillance » vis-à-vis de ses adversaires, au profit d’un rassemblement transpartisan.

Puis, profitant largement des ennuis judiciaires de François Fillon, il a eu l’opportunité de se retrouver au second tour face à Marine Le Pen, pour bénéficier du vote de « barrage contre l’extrême droite ». Voilà pourquoi, non sans un peu de cynisme, il a fêté avec ses amis sa victoire présidentielle dès le premier tour.

Depuis ce coup de maître, sa gouvernance se révèle difficile à suivre, sans boussole idéologique claire. Il défendait une retraite à points, soutenue par la CFDT, mais il finit par imposer de force une réforme que tous les syndicats et une écrasante majorité de Français rejettent. Il se voulait soucieux des deniers publics et équilibres budgétaires, ses sept années de mandat ont vu la dette publique exploser, au point d’être mis sous surveillance par la Commission européenne. Il défend une solution de compromis âprement négociée avec LR pour la loi sur l’immigration, mais s’empresse de la livrer au Conseil constitutionnel avec l’espoir de la voir largement censurée. Il promet une loi progressiste sur la fin de vie, largement plébiscitée par les Français, mais accouche finalement d’un projet de loi assez restrictif pour essayer de trouver un compromis entre les partis, que la dissolution condamne finalement à retomber dans les limbes.

Sa posture de défiance vis-à-vis du jeu des appareils partisans entre en contradiction avec ses calculs politiciens, jouant sur le fractionnement des partis, à coup de triangulation programmatique, de débauchages individuels et désormais de tractations pour contrer l’arithmétique défavorable sortie des urnes. Il accusait le « vieux système des partis » de vouloir se protéger lors de sa conférence de presse justifiant la dissolution. Voilà que son camp qui a perdu la majorité (déjà que relative), s’emploie pour nouer des alliances compliquées afin de survivre à la tête du gouvernement.
Le président Macron voulait une « clarification », nous sommes face à une grande confusion. Il voulait freiner l’élan du Rassemblement national, ce parti a gagné une cinquantaine de sièges. Pire, de premier pôle parlementaire, son alliance partisane passe seconde. La dissolution semble être un échec stratégique.

Néanmoins, le jeu des « désistements républicains » a permis de sauver Renaissance qui ne sort donc pas du jeu parlementaire. Comme la force du président Macron réside dans son aptitude à croire qu’il peut toujours sauver la situation et saisir une opportunité, il y voit la chance de retrouver les moyens d’avoir un gouvernement conforme à ses ambitions.

En conformité avec toute son action passée, la probabilité la plus forte est que ses efforts tendent vers un scénario idéal ou à défaut vers un scénario minimal qui exclut tout ou une partie de la gauche.

L’idéal serait de profiter de la position « centrale » de son mouvement pour tenter d’agréger dans une grande coalition des députés de la droite LR et des élus de gauche, sauf LFI car rejetée comme extrémiste. Il sortirait ainsi de son échec par la grande porte, celle d’une recomposition politique permettant un accord de gouvernement entre des partis qui s’opposent sur bien des points.

L’autre scénario, s’il n’arrive pas à fracturer le Nouveau Front populaire au profit d’une alliance droite-centre-gauche, serait d’arrimer son groupe parlementaire au groupe LR, avec un contrat de gouvernement penchant clairement à droite. Et peu importe si une bonne partie des députés Renaissance doivent leur réélection à un fort soutien des électeurs de gauche pour faire front contre le RN.

Il s’agit en effet d’acter que le barycentre du vote pour le Parlement penche nettement à droite, et ce faisant l’argument est tout trouvé : il ne ferait qu’épouser l’aspiration majoritaire des électeurs : 8,7 millions de voix au second tour se sont portées sur une candidature RN, 1,3 pour une candidature LR-RN, 1,4 million pour LR, 6,3 pour Renaissance, 250 000 Horizons, 1 million divers droite, soit presque 19 millions de voix qui vont du centre droit à l’extrême droite, contre 7 millions pour le Nouveau Front populaire.

Un sursaut… dans le vide ?
L’annonce brutale de la dissolution et la perte importante de députés laissent des rancœurs qui fendillent le camp présidentiel. François Bayrou, comme Edouard Philippe, et même Gabriel Attal commencent à tester leur autonomie vis-à-vis du chef.

Le seul moyen de contrecarrer ces velléités d’autonomie est de leur donner la satisfaction de s’ancrer résolument à droite et de refuser les « égarements » du projet de gauche, décrit comme insensé durant la campagne. À condition néanmoins que ladite « aile gauche » du macronisme ne fasse pas acte d’autonomie en créant son propre groupe au Parlement sous la houlette de Sacha Houlié. Acte qui signerait le début de l’éclatement du « macronisme » comme regroupement de tendances divergentes.

L’alliance, côté LR, serait plus justifiable aussi. La situation est différente de 2022 lorsque pareille alliance fût refusée : il s’agit cette fois de faire barrage à l’arrivée de la gauche au pouvoir, présentée comme extrémiste, communautariste, etc. Hypothèse crédible puisque la gauche crie à sa victoire (malgré ses moins de 200 députés). L’agrégation des forces du centre et de droite donne 234 sièges. Soit 16 de moins seulement que la majorité relative sortante qui a quand même pu gouverner depuis deux années. Impossible donc qu’Emmanuel Macron n’y voit pas un coup à tenter pour conserver le pourvoir malgré sa défaite.

Mais si les jeux de posture de chaque acteur partisan interdisaient toute forme d’alliance, ce sera la paralysie législative d’une chambre introuvable. Pour le président de la République, ce serait l’échec dans l’échec de sa dissolution et la fin potentielle du « macronisme » car cela signifierait qu’il a perdu tout son pouvoir attracteur. Son appel aux électeurs pour un « sursaut démocratique » sera alors devenu pour son courant un sursaut dans le vide.

Obsèques politiques –Olivier Dussopt chargé des restes du macronisme !

Obsèques politiques –Olivier Dussopt chargé des restes du macronisme !

En prévision sans doute de la fin probable du macronisme, le chef de l’État a choisi Olivier Dussopt pour gérer les restes de « Renaissance. » Un parti qui évidemment n’a jamais eu de consistance et va disparaître avec Macron. Le pire c’est que Macron confie la gestion du décès à un responsable qui n’a guère manifesté de grandes compétences encore moins de charisme et qui a navigué à peu près dans tous les courants du parti socialiste et de Macron.

Le  transfuge du Parti socialiste, qui a rallié le camp présidentiel en 2017, n’en conserve pas moins l’estime du chef de l’État. Ce bon soldat a mené les réformes de l’assurance-chômage, de Pôle emploi et surtout la douloureuse bataille des retraites l’an dernier. Emmanuel Macron a une nouvelle mission à lui confier, cette fois à Renaissance, où Olivier Dussopt prend du galon, comme l’avait révélé Politico. Déjà secrétaire général délégué aux fédérations, il devient officiellement secrétaire général exécutif, une nomination que le bureau exécutif du parti devait avaliser jeudi soir, en même temps que la désignation de Valérie Hayer comme tête de liste pour les élections européennes.

Notons que si Macon a choisi une cloche pour gérer ce qui restera du partie Renaissance c’est que sans doute le président n’a pas éliminé l’hypothèse de ce représenter un jour et de reprendre la tête de son parti. Il n’aurait sans doute pas confié son parti à une personnalité de poids.

Obsèques–Olivier Dussopt chargé des restes du macronisme !

Obsèques–Olivier Dussopt chargé des restes du macronisme !

En prévision sans doute de la fin probable du macronisme, le chef de l’État a choisi Olivier Dussopt pour gérer les restes de « Renaissance. » Un parti qui évidemment n’a jamais eu de consistance et va disparaître avec Macron. Le pire c’est que Macron confie la gestion du décès à un responsable qui n’a guère manifesté de grandes compétences encore moins de charisme et qui a navigué à peu près dans tous les courants du parti socialiste et de Macron.

Le  transfuge du Parti socialiste, qui a rallié le camp présidentiel en 2017, n’en conserve pas moins l’estime du chef de l’État. Ce bon soldat a mené les réformes de l’assurance-chômage, de Pôle emploi et surtout la douloureuse bataille des retraites l’an dernier. Emmanuel Macron a une nouvelle mission à lui confier, cette fois à Renaissance, où Olivier Dussopt prend du galon, comme l’avait révélé Politico. Déjà secrétaire général délégué aux fédérations, il devient officiellement secrétaire général exécutif, une nomination que le bureau exécutif du parti devait avaliser jeudi soir, en même temps que la désignation de Valérie Hayer comme tête de liste pour les élections européennes.

Notons que si Macon a choisi une cloche pour gérer ce qui restera du partie Renaissance c’est que sans doute le président n’a pas éliminé l’hypothèse de ce représenter un jour et de reprendre la tête de son parti. Il n’aurait sans doute pas confié son parti à une personnalité de poids.

Darmanin, symbole des illusions perdues du macronisme

Darmanin, symbole des illusions perdues du macronisme

Le projet de loi sur l’immigration était annoncé comme un moment décisif pour les différents acteurs de la vie politique française et en particulier pour Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur. Il constitue sans doute un tournant important pour l’homme politique et illustre a plusieurs égards les difficultés auxquelles font face Emmanuel Macron, le macronisme et le système politique français dans son ensemble. Les derniers événements ont été particulièrement difficiles pour le ministre même si celui qui a remis sa lettre de démission, refusée par l’Élysée (suite au vote de la motion de rejet de la loi sur l’immigration) se félicite aujourd’hui de la séquence politique qui a vu l’adoption de cette même loi. L’homme politique est-il pour autant renforcé de cet épisode et que nous dit-il de l’état du macronisme ?

Par Olivier Guyottot, INSEEC Grande École dans La Tribune

Si Gérald Darmanin a pu publiquement interroger sa volonté de se positionner dans la course pour le poste de président de la République, il fait très clairement parti des personnes qui pourraient prétendre à la succession d’Emmanuel Macron.

Darmanin s’est construit une image d’homme de droite attaché au respect de l’ordre et son rôle de ministre de l’Intérieur a donné corps à ce positionnement. Mais plusieurs ratés (incidents du Stade de France, attaques terroristes…) et polémiques (affaire Karim Benzema, accusation de viol…) ont écorné sa réputation d’efficacité et de rigueur. Le rejet de « son » projet de loi sur l’immigration porte un coup certain à ses ambitions personnelles qui s’appuyaient en grande partie sur sa légitimité en matière de sécurité.

Difficile pourtant de prévoir ce qu’il adviendra des ambitions présidentielles de Darmanin tant la période qui s’ouvre est inédite sous la Ve République. Pour la première fois, un président encore jeune quittera la présidence sans avoir été battu… alors que la possibilité qu’il puisse se représenter de manière non consécutive n’est pas écartée.

Jamais, une telle situation n’était arrivée et la succession d’Emmanuel Macron risque donc de réserver des stratégies et des montages politiques nouveaux.

Pour la première fois, la favorite des sondages et de l’élection présidentielle pourrait être Marine Le Pen, la candidate du parti représentant l’extrême droite française. Dans ce contexte, le positionnement d’homme de droite de Darmanin et sa connaissance des dossiers régaliens, légitimés par son passage place Beauvau, seront sans doute recherchés par ceux qui décideront de se lancer dans la bataille face à Marine Le Pen.

Lors de sa première élection présidentielle, Emmanuel Macron s’était fait élire en promettant de dépasser le clivage droite/gauche.

Les sujets mis en avant, à l’image de l’immigration, et les mesures prises, comme dans le cadre de la réforme des retraites, semblent entériner l’idée que le parti présidentiel penche désormais fortement à droite.

Le départ d’anciens alliés issus de la gauche, à l’instar tout récemment de Daniel Cohn Bendit, parait d’ailleurs confirmer ce virage.

Lors de la seconde élection, il avait déclaré que le résultat morcelé du premier tour l’obligeait à faire de la politique autrement et qu’il avait compris le message. L’épisode des échanges et négociations entre Darmanin et Les Républicains (LR) lors de la loi sur l’immigration donne pourtant l’image de manœuvres politiciennes peu en accord avec l’idée de nouvelles pratiques politiques et de la recherche d’un consensus autour d’un projet commun. Alors que certains en appellent à une VIᵉ république, la façon dont les jeux de pouvoir s’organisent sous et autour d’Emmanuel Macron rappelle en tous points celles des époques précédentes.

La loi sur l’immigration symbolise à plusieurs égards la « politique à l’ancienne » que l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron devait faire disparaître. En ce sens, elle illustre l’échec de la tentative de faire de la politique autrement. La décision de certains élus macronistes de ne pas rempiler suite au premier quinquennat, avaient déjà en partie mis en exergue ce phénomène. Force est constater que l’utilisation répétée du 49.3 semble témoigner des difficultés du camp présidentiel à co-construire, à négocier, à convaincre.

L’incapacité de parvenir à mettre en place de nouvelles pratiques politiques illustre un phénomène plus profond pour la Ve République et le système démocratique : celui du décalage entre la façon dont les décideurs politiques comprennent les messages des urnes et des élections et la réalité des aspirations des électeurs et de la population. L’affaire de la loi sur l’immigration vient rappeler que le macronisme n’est pas parvenu à combler ce décalage… qui s’est sans doute amplifié au cours des dernières années suite à des scandales comme l’affaire Benalla ou la crise des « gilets jaunes ».

Mais l’épisode de la loi sur l’immigration est aussi un tournant politique car la motion de rejet de la loi sur l’immigration a donné lieu à un vote uni de LR, du Rassemblement national (RN) et de la gauche. Cette alliance, bien que de circonstance, montre à quel point le Rassemblement national est devenu un parti comme les autres au sein de la vie politique française.

Le Front Républicain contre l’extrême droite s’est transformé en un Arc Républicain visant tous les extrêmes. Et les partis « traditionnels » s’allient désormais de plus en plus avec le RN au hasard des circonstances. La stratégie de Marine Le Pen visant à cultiver une image sérieuse et modérée à l’Assemblée Nationale semble donc porter ses fruits, d’autant plus qu’elle positionne son groupe parlementaire en complète opposition avec la stratégie volontiers provocatrice et belliqueuse de LFI et de certaines personnalités de gauche.

Comme ses prédécesseurs, Emmanuel Macron, qui avait affirmé qu’il parviendrait à faire baisser l’extrême droite en France, ne parvient pas à empêcher l’expansion du RN. Les figures comme Gérald Darmanin semblaient pourtant destinées à élargir le spectre du parti présidentiel et devaient faire barrage au parti d’extrême droite en se positionnant sur ses thématiques et ses idées. Les déboires du ministre de l’Intérieur illustrent au contraire les limites des stratégies de lutte contre l’extrême droite visant à s’appuyer sur des personnalités censées reprendre et représenter leurs idées pour attirer les électeurs.

Mais l’expansion du RN est à mettre en perspective avec les succès des partis d’extrême droite dans plusieurs pays d’Europe comme en Italie ou au Pays Bas ou par exemple en Argentine. L’exemple français n’est pas exceptionnel et ces succès donnent un parfum de fatalité à l’incapacité d’Emmanuel Macron et du camp présidentiel à contrer l’expansion du parti présidé par Jordan Bardella.

La période de turbulences économiques, sociales, géopolitiques et environnementales actuelle est aussi un terrain particulièrement fertile pour la montée des extrêmes et des populismes. Dans le cas de la France, cette montée ne pourra être un tant soit peu contenue que si des personnes comme Gérald Darmanin et Emmanuel Macron parviennent à éviter des séquences comme celle de la loi sur l’immigration tant elles mettent en lumière les illusions perdues de leur aventure politique.

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Par Olivier Guyottot, Enseignant-chercheur en stratégie et en sciences politiques, INSEEC Grande École

Politique: Loi Immigration : le début de la fin du macronisme

Politique: Loi Immigration : le début de la fin du macronisme

Difficile de considérer que c’est la fin d’un courant politique qui en réalité ne s’est jamais installé dans le paysage politique. Le macronisme, c’est en effet une sorte de même temps contradictoire. Mais cette fois, la majorité elle-même éclate sous les contradictions. Bref le début de la fin sans doute pour le macronisme en crise politique. En effet à l’occasion du vote de la loi immigration, les soutiens aux textes sont plus enthousiastes chez les « républicains » et l’extrêmes droite que dans la majorité. Bref un texte obtenu avec un soutien non souhaité mais réel du RN.

Dans cette affaire Macron perd la main sur sa majorité qui progressivement va éclater entre les responsables qui penchent à gauche et les responsables qui pencheraient plutôt à droite. De toute manière, le calendrier va confirmer l’état de crise car de plus en plus de responsables de la majorité vont prendre de la distance par rapport à un président qui ne maîtrise plus grand-chose y compris dans son propre parti.

Le texte immidration a en effet mis le feu aux poudres dans la majorité présidentielle et le gouvernement, avec notamment la démission du ministre de la Santé Et le vote contre de 25 % des députés macronistes.

Aurélien Rousseau, ancien directeur de cabinet d’Elisabeth Borne, n’est pas le seul ministre hostile à la loi votée mardi soir. Figurent également d’autres ministres Sylvie Retailleau (Enseignement supérieur), Patrice Vergriete (Logement) ou encore Clément Beaune (Transports).

Selon un député Renaissance, macroniste de la première heure, le soutien du RN est un « baiser de la mort pour la majorité ». « On est dans la main du RN, on a perdu sur tous les tableaux » et Marine Le Pen « a tout gagné », a de son côté confié à l’AFP une députée du groupe centriste.

Depuis le vote de la CMP, le RN mais aussi LR se gargarisent en effet du contenu du texte – « notre texte », selon le président de LR Éric Ciotti- , qui traduit selon Marine Le Pen une « victoire idéologique du Rassemblement national puisqu’il est inscrit maintenant dans cette loi la priorité nationale ».

Numériquement, les voix du RN ont pourtant pencher la balance. Et pour cause : les divisions sont telles au sein du camp présidentiel que le projet de loi controversé adopté mardi par une commission parlementaire à l’issue d’un accord entre la droite et la majorité risquait de ne passer, à l’Assemblée nationale, que grâce aux voix des députés de Marine Le Pen.

Les opposants à un texte trop dur ont également reçu le soutien du Medef, par la voix de son patron Patrick Martin, qui a souligné que l’économie française aurait « massivement » besoin de « main-d’œuvre immigrée » dans les prochaines décennies. Parallèlement, une cinquantaine d’associations, syndicats et ONG, dont la Ligue des droits de l’Homme, dénoncent le texte « le plus régressif depuis au moins 40 ans » en France.

Loi Immigration : le début de la fin du macronisme

Loi Immigration : le début de la fin du macronisme

Difficile de considérer que c’est la fin d’un courant politique qui en réalité ne s’est jamais installé dans le paysage politique. Le macronisme, c’est en effet une sorte de même temps contradictoire. Mais cette fois, la majorité elle-même éclate sous les contradictions. Bref le début de la fin sans doute pour le macronisme en crise politique. En effet à l’occasion du vote de la loi immigration, les soutiens aux textes sont plus enthousiastes chez les « républicains » et l’extrêmes droite que dans la majorité. Bref un texte obtenu avec un soutien non souhaité mais réel du RN.

Dans cette affaire Macron perd la main sur sa majorité qui progressivement va éclater entre les responsables qui penchent à gauche et les responsables qui pencheraient plutôt à droite. De toute manière, le calendrier va confirmer l’état de crise car de plus en plus de responsables de la majorité vont prendre de la distance par rapport à un président qui ne maîtrise plus grand-chose y compris dans son propre parti.

Le texte immidration a en effet mis le feu aux poudres dans la majorité présidentielle et le gouvernement, avec notamment la démission du ministre de la Santé Et le vote contre de 25 % des députés macronistes.

Aurélien Rousseau, ancien directeur de cabinet d’Elisabeth Borne, n’est pas le seul ministre hostile à la loi votée mardi soir. Figurent également d’autres ministres Sylvie Retailleau (Enseignement supérieur), Patrice Vergriete (Logement) ou encore Clément Beaune (Transports).

Selon un député Renaissance, macroniste de la première heure, le soutien du RN est un « baiser de la mort pour la majorité ». « On est dans la main du RN, on a perdu sur tous les tableaux » et Marine Le Pen « a tout gagné », a de son côté confié à l’AFP une députée du groupe centriste.

Depuis le vote de la CMP, le RN mais aussi LR se gargarisent en effet du contenu du texte – « notre texte », selon le président de LR Éric Ciotti- , qui traduit selon Marine Le Pen une « victoire idéologique du Rassemblement national puisqu’il est inscrit maintenant dans cette loi la priorité nationale ».

Numériquement, les voix du RN ont pourtant pencher la balance. Et pour cause : les divisions sont telles au sein du camp présidentiel que le projet de loi controversé adopté mardi par une commission parlementaire à l’issue d’un accord entre la droite et la majorité risquait de ne passer, à l’Assemblée nationale, que grâce aux voix des députés de Marine Le Pen.

Les opposants à un texte trop dur ont également reçu le soutien du Medef, par la voix de son patron Patrick Martin, qui a souligné que l’économie française aurait « massivement » besoin de « main-d’œuvre immigrée » dans les prochaines décennies. Parallèlement, une cinquantaine d’associations, syndicats et ONG, dont la Ligue des droits de l’Homme, dénoncent le texte « le plus régressif depuis au moins 40 ans » en France.

Marlène Schiappa: Incarnation du degré zéro du macronisme

Marlène Schiappa: Incarnation du degré zéro du macronisme

C’est la conséquence du choix à l’aveuglette des responsables du où nombre d’opportunistes ont profité de la situation. On se demande bien sur quel critère Marlène Chiappa a été choisi pour devenir ministre.
Sans doute parce qu’elle tenait une rubrique à la télé. Elle a aussi grenouillé chez les socialistes avant de rejoindre Macron. Son passé intellectuel ( elle a écrit un livre sur les nouvelles pratiques sexuelles ! ) et politique est vide et elle s’exprime comme dans une émission de télé réalité. Cette fois en condamnant sans autre forme de procès tous les anti réforme des retraites qui seraient aussi anti-républicains.E n renvoyant aux «extrêmes» tous les opposants à une réforme des retraites, la secrétaire d’Etat à l’Economie sociale et solidaire joue d’une rhétorique déplacée et reflète le vide idéologique du macronisme.

«Il y a une forme de consensus […] dans le camp républicain en dehors des extrêmes sur la nécessité de mener une réforme des retraites.» Voilà comment Marlène Schiappa, en une simple phrase sur LCP lundi, renvoie toute la gauche, politique et syndicale, et 75 % des Français (sondage Elabe du 1er décembre) dans le camp des «extrêmes». Et surtout hors de la République.

Marlène Chiappa réussi au moins à être l’incarnation la plus proche du degré zéro du macronisme sur le plan intellectuel et politique. Elle aurait sans doute mieux sa place comme animatrice de touche pas à mon poste que comme ministre

Nouveau gouvernement : l’épuisement du macronisme

 Nouveau gouvernement :  l’épuisement du macronisme

 

 

«La physique des forces politiques s’impose à un président qui, à force de trianguler, s’est entravé lui-même et est contraint au repli.» Le Figaro

FIGARO-TRIBUNE-Arnaud BenedettiLe gouvernement Borne II, marqué par le retour de plusieurs ministres, est le signe que le président de la République a perdu de son attractivité, affirme le spécialiste en communication.

Ce remaniement signe d’ores et déjà une forme d’impasse, pour ne pas dire d’échec. Il n’est en aucun cas à la mesure d’un rebond ou d’un renouvellement, il est contraint au millimètre près par le résultat des législatives, et d’ailleurs il ne pouvait en être autrement. Son annonce, au demeurant, n’aura jamais autant donné prise à des fuites savamment calculées, comme s’il s’agissait d’amortir une trop grande solennité qui aurait sursouligné la faiblesse des gains politiques. On a égrené les petits cailloux pour les ramasser dans un communiqué officiel.

Le secrétaire général de l’Élysée est ainsi resté dans son bureau. Ce remaniement est banal comme un changement d’équipe sous la IVe République. Emmanuel Macron a perdu de son attractivité, sa réélection s’est gagée sur une campagne empêchée, et le scrutin législatif a donné, lui, la vraie photographie du paysage politique. Le macronisme est non seulement en rétractation, il est entré en entropie (en physique, inaptitude de l’énergie contenue dans un système à fournir du travail, NDLR). On chercherait en vain le signe de conquête ou même d’extension que pourrait signifier ce gouvernement Borne II.

Le retour de Marlène Schiappa dans un énième portefeuille et le déplacement d’Olivier Véran du ministère des relations avec le Parlement au porte-parolat doivent être lus comme l’épuisement de la biodiversité macroniste.

Évidemment, les commentateurs trouveront toujours à certifier qu’il existe des éléments à relever dans ce qui constitue sur le fond un nano-événement: la promotion de deux ministres issus de la droite (Christophe Béchu et Caroline Cayeux), l’extension des missions de Gérald Darmanin, l’entrée d’un ancien socialiste Olivier Klein, maire de Clichy-sous-Bois ou le renforcement du poids du MoDem, soit: une grosse pincée à droite, une petite à gauche, une coloration un peu plus centriste, quelques personnalités de la société civile ou de la haute fonction publique, voilà du déjà-vu dont on peut dire sans trop de risque qu’il n’impactera pas l’opinion.

Il y a quelque chose d’inévitablement usé dans une formule sans élan, ni signification autre qu’Emmanuel Macron est à cours de ressources et ne peut plus compter que sur son réduit originel. À cet égard, le retour de Marlène Schiappa dans un énième portefeuille et le déplacement d’Olivier Véran du ministère des relations avec le Parlement au porte-parolat doivent être lus comme l’épuisement de la biodiversité macroniste.

Le président acte une cartographie parlementaire dont il ne peut qu’espérer qu’elle lui permette un cabotage au gré des textes et au jour le jour.

Cette absence d’originalité et les limites qu’elle traduit font sens dans la composition de cette nouvelle équipe gouvernementale. La physique des forces politiques s’impose à un président qui, à force de trianguler, s’est entravé lui-même et est contraint au repli. De facto il acte une cartographie parlementaire dont il ne peut qu’espérer qu’elle lui permette une sorte de cabotage au gré des textes et au jour le jour.

C’est bien dans cette passe incertaine que pénètre le navire d’un pouvoir qui a bâti manifestement un édifice dans la plus grande des difficultés. Ce gouvernement, d’emblée, est frappé comme du sceau de son extrême fragilité, il est comme tissé du fil des étoffes d’une dernière partie de quinquennat, à moins qu’il n’offre comme l’image d’une transition. Il se présente à coup sûr comme l’enseigne que l’on voudrait la moins répulsive possible en vue d’une extension du domaine d’une majorité présidentielle sans réelle majorité législative.

Reste à parier sur sa durée après l’été et l’automne venant. L’incertitude de tous les instants plane déjà au-dessus d’un attelage qui ressemble plus du produit de circonstances contrariées que d’une dynamique politique.

Macronisme : un néo-libéralisme qui ne dit pas son nom

 Macronisme  : un néo-libéralisme qui ne dit pas son nom

Deux ouvrages dressent un bilan très néo-libéral du quinquennat d’Emmanuel Macron en matière de politiques publiques. Par Christophe Bouillaud, Université Grenoble Alpes (UGA) dans la « Tribune ».

Pour résumer à outrance, depuis Sarkozy notamment en passant par Hollande, l’orientation politique est d’installer derrière le masque du pragmatisme un projet de société de marché ou néo libéralisme.

De nombreux livres sur le style de gouvernance d’Emmanuel Macron ou sur certains aspects des politiques publiques menées de 2017 à 2022 ont été publiés par des journalistes pour aider le grand public à former son jugement à la veille de l’élection présidentielle. Ne serait-ce qu’en raison du temps nécessaire pour mener une recherche académique, ceux rédigés par des universitaires s’avèrent eux bien plus rares à ce stade.

Il faut donc saluer la publication en février 2022 de deux ouvrages qui tentent de faire un premier bilan à chaud des années 2017-2022 en respectant les contraintes de la vie académique. Le premier est le fruit d’un travail collectif dirigé par Bernard Dolez, Anne-Cécile Douillet, Julien Fretel, et Rémi Lefebvre, L’entreprise Macron à l’épreuve du pouvoir (PUG/UGA Editions, Fontaine/Grenoble).

En rassemblant pas moins de 29 spécialistes, l’ouvrage ambitionne d’établir un bilan de l’exercice du pouvoir par Emmanuel Macron et sa majorité. Le second, Les politiques sociales sous Macron (PUG/UGA Editions, Fontaine/Grenoble) résulte au contraire de l’enquête menée par un seul chercheur, Mehdi Arrignon. Ce dernier se focalise sur les seules politiques sociales, à la fois à travers les statistiques disponibles, les changements législatifs et réglementaires en la matière, et des entretiens avec des acteurs de ces dernières du haut en bas de la hiérarchie politico-administrative.

Pour ce qui concerne les politiques publiques proprement dites (en laissant ici de côté les aspects électoraux et partisans aussi traités par l’ouvrage collectif), les deux ouvrages se rejoignent dans leur diagnostic : le macronisme des années 2017-2022 fut bel et bien un néo-libéralisme.

Rappelons que le néo-libéralisme, c’est cette doctrine, énoncée par exemple par Milton Friedman ou Friedrich Hayek dès les années 1960, qui entend mettre la puissance de l’État au service du développement harmonieux de tous les marchés pour atteindre les optima sociaux désirables, que ce soit une meilleure santé, une meilleure éducation, une bonne retraite ou du travail pour tous.

De cette idéologie bien présente dans les discours de Margaret Thatcher ou de Ronald Reagan dans les années 1980, on ne trouve certes guère de trace aussi directe dans les discours tenus depuis 2017 par Emmanuel Macron ou ses proches, tous les auteurs ici cités en sont d’accord.

Le macronisme se présente lui-même, soit comme un pragmatisme qui applique au cas par cas les bonnes solutions aux problèmes rencontrés, soit comme un élan modernisateur qui ne dépend d’aucune idéologie autre qu’un vague progressisme. Seule la technophilie, l’idée d’un salut par l’innovation, distingue alors vraiment le macronisme.

Céder sur l’accessoire pour préserver l’essentiel

Tous les auteurs cités s’accordent cependant sur le fait que les changements ou inflexions de politiques publiques entre 2017 et 2022 sont toujours allés dans la direction qu’indique depuis des décennies désormais la boussole néo-libérale : plus de marchés ou plus de poids donné aux forces du marché (entreprises, concurrence, innovation) et moins de sources structurelles de dépenses publiques pour permettre des baisses d’impôt sur les « premiers de cordées » (en particulier moins de dépenses sociales dites « passives » d’indemnisation, comme celles du chômage).

Rappelons parmi les grandes décisions d’Emmanuel Macron la suppression de l’ISF (Impôt de solidarité sur la fortune) au nom de la théorie dite du « ruissellement » selon laquelle la moindre imposition des plus riches amène à plus d’investissements et donc à plus d’emplois et à une élévation à terme du niveau de vie des plus pauvres. Ou encore la baisse des APL de cinq euros par foyer au nom de la lutte contre la rente foncière censée capter à son seul profit les subventions publiques aux loyers des plus modestes.

Les diverses crises qu’a connues le mandat d’Emmanuel Macron (« gilets jaunes », Covid et désormais l’invasion russe de l’Ukraine) ont pu donner l’impression que les décisions prises au jour le jour s’éloignaient de cette intention fondamentale, avec le désormais célèbre « quoi qu’il en coûte ». Les auteurs montrent plutôt qu’Emmanuel Macron et ses proches ont su à chaque fois céder sur l’accessoire pour préserver l’essentiel.

L’essence du macronisme

Quel est cet essentiel ? En matière économique et sociale, c’est à une priorité au « retour au travail » de tous que l’on assiste depuis 2017. Comme le montre Mehdi Arrignon, dans son chapitre 14, « Justice sociale : les conceptions implicites » (p. 199-208), c’est de fait à un retournement complet de l’idée même de protection sociale que l’on assiste. Il s’agit de forcer tout un chacun à devenir économiquement autonome de toute aide publique, à prendre des risques, à « traverser la rue ».

Les diverses réformes étudiées par M. Arrignon vont en effet toutes dans ce sens : faire du retour au travail rémunéré la solution unique à tous les problèmes rencontrés par les individus.

Les contributions rassemblées dans l’ouvrage collectif portant sur d’autres politiques publiques (sans pouvoir les couvrir toutes cependant) dressent le même diagnostic : sur la politique du logement laissée aux bons soins du marché (Sylvie Fol, Matthieu Gimat, Yoan Miot), sur la fiscalité favorisant les hauts revenus issus du capital mobilier (Kevin Bernard, Camille Herlin-Giret), sur la politique territoriale misant sur l’autonomie de territoires mis en concurrence (Eleanor Breton, Patrick Le Lidec), sur la santé contrainte par un corset financier d’acier trempé (Frédéric Pierru), sur le sort des grandes réformes (retraites, assurances chômage, etc.) maintenues de fait pendant les crises des « gilets jaunes » et du Covid (Rafael Cos, Fabien Escalona).

Le néo-libéralisme demeure au cœur des décisions, à la fois sous son aspect financier, sous la priorité qu’il donne aux marchés et aux entreprises, et enfin pour responsabiliser chacun de son propre sort. Il est noter qu’aucune des contributions ici rassemblées ne fait allusion à un renouvellement de la réflexion au cours des années 2017-2022 de la part des acteurs aux commandes des différentes politiques étudiées. Il n’y a donc pas lieu d’attendre quelque correction de trajectoire de leur part pour les années à venir.

Une grande continuité avec les deux mandats présidentiels précédents

Cependant, tous ces auteurs insistent aussi sur la continuité de ces politiques néo-libérales avec les deux précédents quinquennats (Sarkozy, Hollande). Il n’y a donc pas véritablement rupture, pas de « révolution » telle que promise dans le livre-programme d’Emmanuel Macron de 2016, mais approfondissement d’un sillon déjà bien labouré.

Cette continuité et cet approfondissement que représente le macronisme au pouvoir, largement lié à une continuité des élites politico-administratives (hauts fonctionnaires déjà à la manœuvre dans un domaine de politique publique avant 2017 repérés par les diverses contributions des deux ouvrages cités entre 2017 et 2022, ou élus venus du Parti socialiste ou des Républicains et ralliés en 2017 ou après à Emmanuel Macron comme députés ou ministres) qui conçoivent et mettent en œuvre ces réformes, expliquent sans doute l’insatisfaction des Français face à une bonne part de ces politiques publiques, et surtout à l’égard des institutions où ces politiques publiques sont décidées.

Un programme visant à fonder une société de marché

Selon les données du Baromètre de la confiance politiquel’enquête régulière menée par le CEVIPOF), jamais aucune institution politique nationale ou européenne (Président de la République, Parlement, Sénat, Conseil constitutionnel, Conseil économique social et environnemental, Union européenne) n’a dépassé depuis qu’il existe (2009), et ce jusqu’en janvier 2022, le seuil des 50 % de satisfaits (vague 13, janvier 2022).

L’insatisfaction à l’égard des pouvoirs les plus éloignés est ainsi devenu un très majeur de notre démocratie. Seuls les pouvoirs locaux (Conseil municipal, et, dans une moindre mesure, Conseil départemental et Conseil régional) recueillent encore régulièrement la confiance de plus de 50 % des Français. Quant aux partis politiques, ils représentent de longue date l’institution dans laquelle les Français ont de loin le moins confiance (21 % en janvier 2022).

Le programme en matière économique et sociale présenté par E. Macron le 17 mars 2022 en vue de sa réélection s’avère pourtant en parfaite continuité avec les décisions du quinquennat qui s’achève (retraite à 65 ans, obligation d’avoir une activité partielle pour les bénéficiaires du RSA, fusion de toutes les aides sociales, etc.).

La réélection d’Emmanuel Macron validera donc ce choix d’une « société de marché », comme aurait dit Lionel Jospin (PS) en son temps, alors qu’il refusait justement l’évolution du socialisme français vers le néo-libéralisme.

Une « société de marché » correspondrait à l’idéal néo-libéral enfin réalisé, où le devenir de chaque personne serait très strictement indexé sur sa réussite économique sur le marché. Elle correspond aussi à la volonté d’E. Macron de garantir une égalité aussi parfaite que possible des chances au départ de cette lutte pour profiter des agréments de la vie ou pour éviter ses désagréments, mais de n’offrir que des filets de sécurité les plus minimaux possibles pour les perdants de cette course. Cependant il n’est pas sûr que la pérennisation de ce nouveau modèle (anti-)social français n’accroisse pas encore la défiance d’une bonne part de la population à l’encontre de l’État, des élites, de la politique, voire même de toute autorité instituée.

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Par Christophe Bouillaud Professeur de science politique, Université Grenoble Alpes (UGA)

Cet article a été publié dans le cadre du partenariat avec le site Poliverse.fr.

Macronisme : un néo-libéralisme qui ne dit pas son nom

 Macronisme  : un néo-libéralisme qui ne dit pas son nom

Deux ouvrages dressent un bilan très néo-libéral du quinquennat d’Emmanuel Macron en matière de politiques publiques. Par Christophe Bouillaud, Université Grenoble Alpes (UGA) dans la « Tribune ».

Pour résumer à outrance, depuis Sarkozy notamment en passant par Hollande, l’orientation politique est d’installer derrière le masque du pragmatisme un projet de société de marché ou néo libéralisme.

De nombreux livres sur le style de gouvernance d’Emmanuel Macron ou sur certains aspects des politiques publiques menées de 2017 à 2022 ont été publiés par des journalistes pour aider le grand public à former son jugement à la veille de l’élection présidentielle. Ne serait-ce qu’en raison du temps nécessaire pour mener une recherche académique, ceux rédigés par des universitaires s’avèrent eux bien plus rares à ce stade.

Il faut donc saluer la publication en février 2022 de deux ouvrages qui tentent de faire un premier bilan à chaud des années 2017-2022 en respectant les contraintes de la vie académique. Le premier est le fruit d’un travail collectif dirigé par Bernard Dolez, Anne-Cécile Douillet, Julien Fretel, et Rémi Lefebvre, L’entreprise Macron à l’épreuve du pouvoir (PUG/UGA Editions, Fontaine/Grenoble).

En rassemblant pas moins de 29 spécialistes, l’ouvrage ambitionne d’établir un bilan de l’exercice du pouvoir par Emmanuel Macron et sa majorité. Le second, Les politiques sociales sous Macron (PUG/UGA Editions, Fontaine/Grenoble) résulte au contraire de l’enquête menée par un seul chercheur, Mehdi Arrignon. Ce dernier se focalise sur les seules politiques sociales, à la fois à travers les statistiques disponibles, les changements législatifs et réglementaires en la matière, et des entretiens avec des acteurs de ces dernières du haut en bas de la hiérarchie politico-administrative.

Pour ce qui concerne les politiques publiques proprement dites (en laissant ici de côté les aspects électoraux et partisans aussi traités par l’ouvrage collectif), les deux ouvrages se rejoignent dans leur diagnostic : le macronisme des années 2017-2022 fut bel et bien un néo-libéralisme.

Rappelons que le néo-libéralisme, c’est cette doctrine, énoncée par exemple par Milton Friedman ou Friedrich Hayek dès les années 1960, qui entend mettre la puissance de l’État au service du développement harmonieux de tous les marchés pour atteindre les optima sociaux désirables, que ce soit une meilleure santé, une meilleure éducation, une bonne retraite ou du travail pour tous.

De cette idéologie bien présente dans les discours de Margaret Thatcher ou de Ronald Reagan dans les années 1980, on ne trouve certes guère de trace aussi directe dans les discours tenus depuis 2017 par Emmanuel Macron ou ses proches, tous les auteurs ici cités en sont d’accord.

Le macronisme se présente lui-même, soit comme un pragmatisme qui applique au cas par cas les bonnes solutions aux problèmes rencontrés, soit comme un élan modernisateur qui ne dépend d’aucune idéologie autre qu’un vague progressisme. Seule la technophilie, l’idée d’un salut par l’innovation, distingue alors vraiment le macronisme.

Céder sur l’accessoire pour préserver l’essentiel

Tous les auteurs cités s’accordent cependant sur le fait que les changements ou inflexions de politiques publiques entre 2017 et 2022 sont toujours allés dans la direction qu’indique depuis des décennies désormais la boussole néo-libérale : plus de marchés ou plus de poids donné aux forces du marché (entreprises, concurrence, innovation) et moins de sources structurelles de dépenses publiques pour permettre des baisses d’impôt sur les « premiers de cordées » (en particulier moins de dépenses sociales dites « passives » d’indemnisation, comme celles du chômage).

Rappelons parmi les grandes décisions d’Emmanuel Macron la suppression de l’ISF (Impôt de solidarité sur la fortune) au nom de la théorie dite du « ruissellement » selon laquelle la moindre imposition des plus riches amène à plus d’investissements et donc à plus d’emplois et à une élévation à terme du niveau de vie des plus pauvres. Ou encore la baisse des APL de cinq euros par foyer au nom de la lutte contre la rente foncière censée capter à son seul profit les subventions publiques aux loyers des plus modestes.

Les diverses crises qu’a connues le mandat d’Emmanuel Macron (« gilets jaunes », Covid et désormais l’invasion russe de l’Ukraine) ont pu donner l’impression que les décisions prises au jour le jour s’éloignaient de cette intention fondamentale, avec le désormais célèbre « quoi qu’il en coûte ». Les auteurs montrent plutôt qu’Emmanuel Macron et ses proches ont su à chaque fois céder sur l’accessoire pour préserver l’essentiel.

L’essence du macronisme

Quel est cet essentiel ? En matière économique et sociale, c’est à une priorité au « retour au travail » de tous que l’on assiste depuis 2017. Comme le montre Mehdi Arrignon, dans son chapitre 14, « Justice sociale : les conceptions implicites » (p. 199-208), c’est de fait à un retournement complet de l’idée même de protection sociale que l’on assiste. Il s’agit de forcer tout un chacun à devenir économiquement autonome de toute aide publique, à prendre des risques, à « traverser la rue ».

Les diverses réformes étudiées par M. Arrignon vont en effet toutes dans ce sens : faire du retour au travail rémunéré la solution unique à tous les problèmes rencontrés par les individus.

Les contributions rassemblées dans l’ouvrage collectif portant sur d’autres politiques publiques (sans pouvoir les couvrir toutes cependant) dressent le même diagnostic : sur la politique du logement laissée aux bons soins du marché (Sylvie Fol, Matthieu Gimat, Yoan Miot), sur la fiscalité favorisant les hauts revenus issus du capital mobilier (Kevin Bernard, Camille Herlin-Giret), sur la politique territoriale misant sur l’autonomie de territoires mis en concurrence (Eleanor Breton, Patrick Le Lidec), sur la santé contrainte par un corset financier d’acier trempé (Frédéric Pierru), sur le sort des grandes réformes (retraites, assurances chômage, etc.) maintenues de fait pendant les crises des « gilets jaunes » et du Covid (Rafael Cos, Fabien Escalona).

Le néo-libéralisme demeure au cœur des décisions, à la fois sous son aspect financier, sous la priorité qu’il donne aux marchés et aux entreprises, et enfin pour responsabiliser chacun de son propre sort. Il est noter qu’aucune des contributions ici rassemblées ne fait allusion à un renouvellement de la réflexion au cours des années 2017-2022 de la part des acteurs aux commandes des différentes politiques étudiées. Il n’y a donc pas lieu d’attendre quelque correction de trajectoire de leur part pour les années à venir.

Une grande continuité avec les deux mandats présidentiels précédents

Cependant, tous ces auteurs insistent aussi sur la continuité de ces politiques néo-libérales avec les deux précédents quinquennats (Sarkozy, Hollande). Il n’y a donc pas véritablement rupture, pas de « révolution » telle que promise dans le livre-programme d’Emmanuel Macron de 2016, mais approfondissement d’un sillon déjà bien labouré.

Cette continuité et cet approfondissement que représente le macronisme au pouvoir, largement lié à une continuité des élites politico-administratives (hauts fonctionnaires déjà à la manœuvre dans un domaine de politique publique avant 2017 repérés par les diverses contributions des deux ouvrages cités entre 2017 et 2022, ou élus venus du Parti socialiste ou des Républicains et ralliés en 2017 ou après à Emmanuel Macron comme députés ou ministres) qui conçoivent et mettent en œuvre ces réformes, expliquent sans doute l’insatisfaction des Français face à une bonne part de ces politiques publiques, et surtout à l’égard des institutions où ces politiques publiques sont décidées.

Un programme visant à fonder une société de marché

Selon les données du Baromètre de la confiance politiquel’enquête régulière menée par le CEVIPOF), jamais aucune institution politique nationale ou européenne (Président de la République, Parlement, Sénat, Conseil constitutionnel, Conseil économique social et environnemental, Union européenne) n’a dépassé depuis qu’il existe (2009), et ce jusqu’en janvier 2022, le seuil des 50 % de satisfaits (vague 13, janvier 2022).

L’insatisfaction à l’égard des pouvoirs les plus éloignés est ainsi devenu un très majeur de notre démocratie. Seuls les pouvoirs locaux (Conseil municipal, et, dans une moindre mesure, Conseil départemental et Conseil régional) recueillent encore régulièrement la confiance de plus de 50 % des Français. Quant aux partis politiques, ils représentent de longue date l’institution dans laquelle les Français ont de loin le moins confiance (21 % en janvier 2022).

Le programme en matière économique et sociale présenté par E. Macron le 17 mars 2022 en vue de sa réélection s’avère pourtant en parfaite continuité avec les décisions du quinquennat qui s’achève (retraite à 65 ans, obligation d’avoir une activité partielle pour les bénéficiaires du RSA, fusion de toutes les aides sociales, etc.).

La réélection d’Emmanuel Macron validera donc ce choix d’une « société de marché », comme aurait dit Lionel Jospin (PS) en son temps, alors qu’il refusait justement l’évolution du socialisme français vers le néo-libéralisme.

Une « société de marché » correspondrait à l’idéal néo-libéral enfin réalisé, où le devenir de chaque personne serait très strictement indexé sur sa réussite économique sur le marché. Elle correspond aussi à la volonté d’E. Macron de garantir une égalité aussi parfaite que possible des chances au départ de cette lutte pour profiter des agréments de la vie ou pour éviter ses désagréments, mais de n’offrir que des filets de sécurité les plus minimaux possibles pour les perdants de cette course. Cependant il n’est pas sûr que la pérennisation de ce nouveau modèle (anti-)social français n’accroisse pas encore la défiance d’une bonne part de la population à l’encontre de l’État, des élites, de la politique, voire même de toute autorité instituée.

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Par Christophe Bouillaud Professeur de science politique, Université Grenoble Alpes (UGA)

Cet article a été publié dans le cadre du partenariat avec le site Poliverse.fr.

La conversion de Chevènement au macronisme !

La conversion de Chevènement au macronisme

 

La conversion de Chevènement au macronisme !

 

Encore un socialiste, considéré comme pur et dur, qui se convertit tardivement au macronisme. La preuve sans doute que la plupart des courants et des représentants du parti socialiste sont solubles dans toutes les eaux troubles et dans tous les partis. D’un point de vue idéologique ,on aurait plutôt attendu que Jean-Pierre Chevènement, étatiste comme Mélenchon ,soutiennele leader des « insoumi »s. Notons que paradoxalement, c’est Ségolène Royal qui rejoint Mélenchon. Il est vrai que Mitterrand n’avait pas tenu longtemps sur ses convictions socialistes et s’était ,lui aussi, converti aux délices du capitalisme deux ans après son élection seulement. Quant au programme socialiste de Chevènement, il avait été enterré par Mitterrand avant même les élections de 1981 .NDLR

L’ancien ministre socialiste Jean-Pierre Chevènement apporte son soutien à Emmanuel Macron dans une tribune au « Monde ». Il souligne la volonté du président à poursuivre le redressement industriel du pays et souhaite la création d’un puissant ministère de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la culture, afin de refonder la République.

La réélection d’Emmanuel Macron est essentielle pour que la France surmonte les fractures qui la traversent, économiques et sociales, mais aussi et peut-être surtout culturelles. La désindustrialisation frappe la France depuis quatre décennies, plus que tout autre pays européen. Arrêtons-nous d’abord sur ces fractures économiques et sociales.

La crise liée au Covid-19 a révélé l’étendue et la profondeur de nos dépendances. Le déficit commercial a atteint 85 milliards d’euros en 2021. Dans le même temps, l’excédent commercial allemand tutoyait, chaque année, les 200 milliards d’euros. Cela veut dire que, depuis près de vingt ans, la position extérieure nette de la France n’a cessé de se dégrader. Ce n’est pas ainsi qu’on prépare l’avenir du pays.

Ce n’est donc pas un hasard si Emmanuel Macron a placé le « pacte productif » au cœur de son projet. La réindustrialisation est l’âme de notre nation et une nécessité impérieuse pour quiconque entend protéger notre « Etat-providence » et nos grandes conquêtes sociales de l’après-seconde guerre mondiale. C’est le sens de l’action d’Emmanuel Macron au cours des dernières années.

En fixant le cap de la reconquête de l’indépendance industrielle, Emmanuel Macron a mis fin à l’hémorragie dont la France souffrait. S’il reste du chemin à parcourir, les premiers résultats sont au rendez-vous. Depuis 2017, la création nette d’emplois industriels a repris, situation que la France n’avait pas connue au cours des deux dernières décennies. En 2021, on comptait deux fois plus d’ouvertures que de fermetures de sites industriels en France.

A titre de comparaison, en 2009, le nombre de fermetures d’usines excédait très largement celui des ouvertures (– 225 sites). Grâce au volontarisme conjugué de notre gouvernement, de notre appareil administratif et de nos industriels, la France est devenue l’un des pays européens les plus attractifs pour les investissements industriels étrangers, condition essentielle à l’innovation.

C’est précisément dans cette ambition d’innovation que s’inscrit le plan de relance France 2030. Il s’agit de placer la France sur tous les « créneaux porteurs » : énergie décarbonée, électronucléaire, hydrogène, batteries électriques, composants électroniques, aérospatial, véhicules électriques. Mais ce serait une grave erreur que de délaisser les industries traditionnelles : textile, habillement, agroalimentaire…

Dans tous les secteurs, il faut développer la recherche technologique. Enfin, et surtout, former des hommes à tous les niveaux de qualification, de l’apprentissage aux écoles d’ingénieurs. Pour permettre la réindustrialisation de la France, il ne suffit pas d’abaisser les impôts qui pèsent sur la production. Il faut flécher l’investissement, ressusciter la planification indicative.

«Le macronisme : libéralisme ou protectionnisme ? »

«Le macronisme : libéralisme ou protectionnisme ? ».

Bruno Alomar, économiste, est ancien haut fonctionnaire à la direction générale de la concurrence de la Commission européenne s’interroge sur les contradictions entre les intentions initiales de Macron et ses évolutions dans la conjoncture actuelle (tribune dans l’opinion)

Au feu des responsabilités, le macronisme, qui se voulait un progressisme capable de renverser les conservatismes économiques, a-t-il perdu sa boussole ? Blairisme à la française, il avait placé au centre de son analyse l’économie française, et la nécessité absolue de la moderniser. De là toutes les réformes du début du quinquennat, depuis la transformation de l’ISF en IFI jusqu’à celle du marché du travail, en passant par la baisse de l’impôt sur les sociétés et une plus grande attention portée aux impôts de production.

Bien sûr la crise est passée par là et a considérablement remisé les ambitions initiales. Le mouvement des Gilets jaunes, l’augmentation puissante des déficits publics, la confirmation d’un déficit extérieur élevé, sont autant de pierres dans le jardin du bilan économique du pouvoir en place.

Pourtant, si une analyse objective impose de prendre en compte des rigidités qui ont pu être sous-estimées et une crise économique — comme celle de 2008 — qui n’est pas née en France, force est de constater un glissement de la doctrine économique gouvernementale. Car, en fait d’ouverture au monde et à la technologie, qui se voulaient ses marques de fabrique, voici que la politique gouvernementale emboîte le pas aux souverainistes et place au cœur de son action le concept de « souveraineté », devenu subitement à la mode. Ce faisant, c’est bien un message protectionniste que la France ne craint plus d’envoyer. Deux exemples l’attestent.

« Péril québécois ». Le premier concerne les rapprochements entre entreprises. Déjà l’affaire Alstom-Siemens en 2019 avait constitué une première alerte. Les autorités françaises, prises d’une bouffée de protectionnisme, avaient considéré le rejet de l’opération comme un « crime », suscitant l’incompréhension de la plupart de ses partenaires. Elles avaient brandi une menace chinoise non étayée. Après cette opération, pourtant présentée comme « de la dernière chance, » Alstom avait finalement — et heureusement — trouvé un autre accord avec Bombardier.

Et voici que, la semaine dernière, à la stupeur de beaucoup d’observateurs, le gouvernement interdit à Carrefour de discuter une offre amicale, alors même que l’Etat ne dispose d’aucune part au capital de ce dernier, en brandissant cette fois un risque pour la « souveraineté alimentaire », là encore peu étayé. Bruno Le Maire a d’ailleurs insisté sur le fait que faire obstacle à une offre étrangère concernant la chaîne Carrefour n’était, après tout, une question purement politique. Après le « péril jaune », le « péril québécois ».

« Le macronisme, à l’origine, n’avait pas de mots assez enthousiastes pour promouvoir la “start-up nation”. Or, la politique gouvernementale s’évertue désormais surtout à rendre les grandes entreprises américaines responsables des retards français en la matière »

Le second concerne le numérique. Le macronisme, à l’origine, n’avait pas de mots assez enthousiastes pour promouvoir la « start-up nation ». Or, la politique gouvernementale s’évertue désormais surtout à rendre les grandes entreprises américaines responsables des retards français en la matière. La France s’est ainsi enorgueillie de sa croisade pour l’imposition des Gafam, sans prendre le temps de mener sereinement une analyse coûts/avantages de leur influence globale qu’un pays comme l’Irlande, qui n’est pas moins bien géré, a pourtant faite.

Entraves. Le gouvernement se félicite aussi de pousser au niveau européen un agenda numérique souverainiste, avec comme héraut le commissaire Thierry Breton, notamment dans le domaine du droit de la concurrence (digital market act [DMA]). Ceci sans se rendre compte qu’opérer un deux poids deux mesures en défaveur de tel ou tel et au bénéfice des acteurs français c’est non seulement rompre de subtils équilibres entre Européens, mais également encourager les Etats-Unis, ou la Chine à des contre-mesures équivalentes.

Bien sûr, le gouvernement peut décider d’enfourcher le cheval du protectionnisme. Encore faut-il l’assumer et disposer d’une doctrine lisible par les agents économiques. Si la France veut faire obstacle à la liberté des capitaux, elle doit être prête à recevoir moins d’investissements directs étrangers, domaine dans lequel elle occupait le premier rang européen en 2019. Si elle souhaite empêcher les rachats de start-up européennes dans le domaine numérique sans baisser parallèlement la fiscalité pour la mettre au niveau de ses concurrents, elle le peut : qu’elle ne vienne pas ensuite se plaindre que les talents dans le domaine numérique préfèrent s’exporter.

Protéger l’économie est une chose, et tout n’est pas, soit à vendre, soit sans lien avec des intérêts de sécurité nationale. Dans le domaine militaire, la France a sans doute eu raison de s’opposer au rachat de Photonis par Teledyne. En prendre acte est une chose, et mobiliser occasionnellement les dispositifs de protection n’est pas illégitime. Prétendre en revanche poursuivre l’ouverture de l’économie française au vaste monde en multipliant, en réalité, les entraves et en assumant à mots à peine couverts un vrai glissement protectionniste en est une autre. Le « en même temps » y atteint ses limites.

Bruno Alomar, économiste, est ancien haut fonctionnaire à la direction générale de la concurrence de la Commission européenne.

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