« contre l’ultralibéralisme pour le climat »
Une réponse d’un collectif de professeurs de collège, de lycée et de l’université à une récente tribune signée par des étudiants et des lycéens appelant leurs enseignants à ne pas s’engager seulement contre la réforme des retraites, mais aussi contre le réchauffement climatique.
« La conclusion inhérente à toute pensée écologique, c’est que l’économie actuelle est néfaste pour la planète, car une économie mondiale de la croissance continue exige l’équivalent des ressources de quatre planètes, et que nous n’en avons qu’une à notre disposition. »
Tribune.
Chères étudiantes, chers étudiants, nous avons lu votre tribune (« Chers professeurs, pourquoi ne faites-vous pas massivement grève pour le climat ? », Le Monde du 12 février) et entendu votre cri de colère, qui est aussi un cri de ralliement : vous appelez toute une génération, la nôtre, à s’engager dans la lutte contre le dérèglement climatique avec la même détermination que celle dont nous faisons preuve aujourd’hui dans notre lutte contre la réforme des retraites.
Vous avez raison de nous rappeler à la nécessité du combat contre le dérèglement climatique. Ne laissons cependant pas s’installer l’idée d’une guerre des perspectives ou celle, stérile, d’une guerre des générations. Joignons au contraire nos forces et œuvrons à la convergence des générations. Car en luttant contre les réformes ultralibérales, nous luttons pour la même chose que vous.
Il n’y a ni cécité, comme vous le supposez, ni déni de réalité dans la génération qui vous précède. Nous sommes déjà, pour bon nombre d’entre nous, présents dans les marches pour le climat et engagés dans les luttes écologiques.
Bien sûr, notre génération a découvert tardivement la réalité du réchauffement climatique et a dû progressivement s’éveiller à la conscience du processus de destruction de la biosphère ; vous êtes nés avec et votre conscience du monde s’est structurée d’emblée de manière écologique ; vous faites maintenant le chemin vers les causes politiques de la destruction. Notre conscience générationnelle s’est structurée de manière essentiellement politique et notre cheminement de pensée va des causes politiques aux effets écologiques.
Nous avons grandi pendant les décennies où la mondialisation ultralibérale déferlait sur la planète. Nous avons progressivement pris conscience que la mondialisation, qu’on nous présentait comme un bienfait pour l’humanité, signifiait en réalité la mondialisation d’un régime de croissance économique continue, nourri par la surproduction, et reposant sur la surexploitation des êtres humains comme des ressources naturelles de la planète. Nous avons vu se produire la subversion mondiale des Etats par le marché, nous avons vu des Etats mis au pas et sommés de servir d’outil à la libéralisation, autorisant la dérégulation généralisée des services – santé, justice, transports, éducation, énergie.
Ne laissons donc pas les points de vue générationnels se heurter. Nous disons et nous voulons la même chose. Faisons un pas les uns en direction des autres