La situation du logement en France en 2023 ( INSEE)
La croissance nombre de logements se tasse depuis 2007 . Au 1er janvier 2023, la France compte 37,8 millions de logements hors Mayotte , soit 13,4 millions de logements supplémentaires depuis 1983 et 3,4 millions depuis 2013. Depuis le début des années 1980, le parc de logements en France hors Mayotte s’est accru de 1,1 % par an en moyenne. Le taux de croissance du parc a peu évolué sur l’ensemble de la période : il est toutefois un peu moins élevé depuis 2007, et particulièrement sur les cinq dernières années (+0,9 % par an en moyenne, figure 2). Ce ralentissement est notamment porté par le parc en France métropolitaine. Dans le territoire composé des départements et régions d’outre-mer (DOM) hors Mayotte, le parc de logements augmente plus rapidement qu’en France métropolitaine (+2,4 % par an en moyenne depuis 1983). Cependant, l’augmentation du nombre de logements s’atténue depuis 2007, comme en France métropolitaine.
En 2023, en France hors Mayotte, comme en France métropolitaine, sur 100 logements, 82 sont des résidences principales, 10 sont des résidences secondaires ou logements occasionnels, et 8 sont vacants. Cette répartition diffère dans les DOM avec en particulier davantage de logements vacants (81 résidences principales, 6 résidences secondaires ou logements occasionnels et 13 logements vacants).
En France métropolitaine, la part des résidences principales a diminué entre 1983 et 1990, passant de 82,5 % à 82,1 %, puis a augmenté jusqu’en 2006, passant de 82,1 % à 83,9 %, avant de diminuer de nouveau depuis. Elle baisse également dans les DOM hors Mayotte depuis 2007, passant de 86,3 % à 81,3 %. Ces évolutions s’expliquent par une croissance un peu moins soutenue du nombre de résidences principales par rapport à l’ensemble du parc.
La part des résidences secondaires et des logements occasionnels augmente depuis le début des années 2010 en France métropolitaine, passant de 9,5 % en 2011 à 9,9 % en 2023, ainsi que, plus fortement encore, depuis la fin des années 2000 dans les DOM, passant de 3,6 % en 2007 à 6,3 % en 2023. Le nombre de résidences secondaires et de logements occasionnels augmente en effet davantage que l’ensemble du parc sur ces périodes.
En France métropolitaine, la part des logements vacants est en hausse depuis 2007, passant de 6,4 % à 8,1 % en 2018, et se stabilise depuis. Dans les DOM hors Mayotte, la part des logements vacants augmente également depuis 2007, passant de 10,1 % à 12,3 % en 2023. La vacance peut provenir d’une inadéquation de l’offre avec la demande en matière de taille, localisation, prix, par exemple, ou correspondre à des logements en mauvais état. Il peut aussi s’agir de logements inoccupés, sans être pour autant immédiatement habitables. Ils peuvent être proposés à la vente ou à la location, en attente d’occupation ou de règlement de succession, ou encore sans affectation précise (logements à réhabiliter, par exemple). La vacance peut être aussi la conséquence du départ en maison de retraite de personnes âgées, sans que le logement soit mis en vente ou en location.
En 2023, l’habitat individuel représente 55,1 % des logements en France hors Mayotte, soit un demi-point de moins qu’en 1983. Deux tiers des logements ultramarins sont des logements individuels, une proportion nettement plus élevée qu’en France métropolitaine. Ce type d’habitat est majoritaire parmi les résidences principales comme parmi les résidences secondaires ou logements occasionnels. Il est néanmoins en net recul depuis 1983 dans les DOM (77,6 %, contre 66,1 % en 2023) et légèrement depuis 2007 en France métropolitaine (55,3 %, contre 54,8 % en 2023).
En 2023, 57,2 % des ménages sont propriétaires de leur résidence principale en France hors Mayotte (figure 3). Cette part a augmenté entre 1983 et 1990, passant de 51,2 % à 54,9 %, s’est ensuite stabilisée jusqu’en 1997, avant d’augmenter à nouveau de façon continue jusqu’en 2014 (57,8 %). Cependant, depuis 2014, elle diminue très légèrement.
La part des ménages locataires de leur résidence principale se maintient aux environs de 40 % depuis 1983. En 2023, les logements détenus par des bailleurs publics représentent 17,6 % du parc de résidences principales, ceux détenus par des bailleurs privés, 22,6 %. La part des bailleurs publics est stable depuis le début des années 2000, alors qu’elle avait nettement augmenté entre 1983 et 1997. Enfin, la proportion des ménages logés gratuitement a baissé de façon continue depuis 1983, pour atteindre 2,6 % en 2023 contre 8,2 % quarante ans plus tôt.
En 2023, les ménages locataires sont plus nombreux en proportion dans les DOM hors Mayotte (43,2 %) qu’en France métropolitaine (40,2 %), tout comme les ménages logés gratuitement (5,7 %, contre 2,5 % en France métropolitaine). À l’inverse, les ménages propriétaires sont moins nombreux (51,1 %, contre 57,3 % en France métropolitaine), notamment les propriétaires accédants (14,7 %, contre 20,4 % en France métropolitaine). En 1983, le constat était inverse, les ménages locataires étaient moins nombreux dans les DOM hors Mayotte qu’en France métropolitaine, et les ménages propriétaires plus nombreux.
En France métropolitaine, la part de logements dans les unités urbaines hors Paris est plus importante qu’en 1983.
Depuis le début des années 1980, la répartition du parc de logements en France métropolitaine selon la taille de l’unité urbaine a évolué sous l’effet de deux phénomènes. D’une part, la croissance du parc a évolué de façon hétérogène sur le territoire. D’autre part, sa répartition s’est également modifiée avec le phénomène d’extension urbaine, par l’apparition de nouvelles unités urbaines ou l’agrandissement d’unités urbaines déjà existantes.
En 2023, 32,2 % des résidences principales se situent dans une commune urbaine de moins de 100 000 habitants et 31,8 % dans une commune urbaine de plus de 100 000 habitants hors Paris (figure 4). Ces proportions ont légèrement augmenté depuis 1983 (29,7 % dans une commune de moins de 100 000 habitants et 29,3 % dans une commune de plus de 100 000 habitants) au détriment de l’unité urbaine de Paris et des communes hors unité urbaine.
En 2023, 77,0 % des résidences secondaires et des logements occasionnels sont situés dans une commune hors unité urbaine ou dans une unité urbaine de moins de 100 000 habitants. Cette proportion a globalement diminué par rapport à 1983, où elle atteignait 83,4 %. Par ailleurs, en 2023, seules 52,3 % des résidences principales se situent dans une commune hors unité urbaine ou dans une unité urbaine de moins de 100 000 habitants. La proportion des résidences secondaires et des logements occasionnels dans les communes hors unité urbaine a nettement baissé par rapport au début des années 1980, passant de 51,8 % en 1983 à 37,1 % en 2023, alors qu’elle s’est accrue dans les unités urbaines de moins de 100 000 habitants, de 31,6 % à 39,9 %. Ces deux tendances inverses s’expliquent par une évolution plus faible du nombre de résidences secondaires et de logements occasionnels dans les communes hors unité urbaine par rapport aux autres communes, et par l’intégration de communes hors unité urbaine dans l’espace urbain.
La majorité des logements vacants (58,7 %) se situent dans une commune hors unité urbaine ou dans une unité urbaine de moins de 100 000 habitants. L’évolution de la part de logements vacants est différenciée selon le type de commune. La proportion des logements vacants hors unité urbaine s’est réduite par rapport au début des années 1980, passant de 29,9 % en 1983 à 23,9 % en 2023, tout comme au sein de l’unité urbaine de Paris, passant de 16,3 % à 13,3 %. Au contraire, la part des logements vacants dans les unités urbaines de moins de 100 000 habitants a augmenté, passant de 28,9 % en 1983 à 34,8 % en 2023.
Enfin, l’habitat individuel est d’autant plus fréquent que la taille de l’unité urbaine à laquelle appartient la commune est petite, et ce pour toutes les catégories de logements (résidence principale ou autre).
Comment résoudre la crise du logement
Comment résoudre la crise du logement
« Au-delà des actions immédiates et ponctuelles nécessaires au soutien des acteurs, les pouvoirs publics peuvent (doivent ?) faire de la crise actuelle le creuset d’une réflexion pour assurer à long terme une offre nouvelle de logements locatifs abordables »
par Erwan Le Bot , expert en développement urbain et territorial dans l’Opinion
La crise du logement est désormais reconnue par l’ensemble des acteurs et, depuis peu, par le gouvernement. Surtout elle concerne en priorité certains territoires, pas n’importe lesquels : Paris et sa couronne et la plupart des métropoles de province (accessoirement les zones littorales/touristiques où les problématiques sont largement différentes) c’est-à-dire les territoires qui sont porteurs de l’essentiel du développement économique du pays.
Cette crise du logement concerne d’abord les jeunes, en ménage ou non, qui retardent le moment de quitter le domicile des parents, supportent des conditions de logement dégradées ou s’éloignent des lieux de travail, certains choisissant même de quitter les territoires métropolitains, un phénomène en accélération sur les années 2021 et 2022. La perte d’attractivité des métropoles est d’abord liée aux conditions de logement. C’est-à-dire aux conditions d’un équilibre acceptable entre son coût (loyer et charges) et ses caractéristiques : les qualités du logement en lui-même, les aménités qu’offre sa localisation et le temps de trajet domicile-travail. Rétablir un équilibre entre ces critères dans les métropoles françaises est un enjeu national.
Au-delà des actions immédiates et ponctuelles nécessaires au soutien des acteurs, les pouvoirs publics peuvent (doivent ?) faire de la crise actuelle le creuset d’une réflexion pour assurer à long terme une offre nouvelle de logements locatifs abordables. La première étape du parcours résidentiel des ménages est le logement locatif (moins cher que l’achat). C’est sur cette étape que le gouvernement doit agir en priorité, tant pour le logement social que pour le logement libre.
S’agissant des qualités intrinsèques des logements, et au-delà de la réglementation environnementale (RE 2020), il est sans doute temps de cristalliser les enseignements opérationnels qu’il faut tirer des innovations (techniques, de modes constructifs, de valeurs d’usage) multiples qui se sont multipliées depuis 2010 en matière de logement, souvent dans le cadre de programmes ou d’initiatives soutenues et labellisées par les pouvoirs publics (investissements d’avenir, écoquartiers, appel à projets « réinventer Paris », etc.). En particulier, la domotique ou les modes constructifs permettent, à certaines conditions, une réduction drastique des charges et la valeur d’usage de certains immeubles peut intégrer dans le loyer une plus-value significative en termes de « mieux vivre » dans son logement.
Urbanisme. Des retours d’expérience sont à faire à partir des réalisations échantillonnaires de ces quinze dernières années. Les aménités, parce qu’elles dessinent la vie de quartier, sont une condition de la soutenabilité de la densité, qui, elle-même, est une condition clé du prix de sortie des logements (et de respect des objectifs du zéro artificialisation nette). De nombreuses collectivités locales ont, en particulier, développé des réflexions sur la place du commerce dans les programmes neufs ou anciens (portage des cellules commerciales), des équipements publics (ouvertures partielles/déménagements, etc.) ou des espaces publics (verdissement/espaces verts, élargissement de la trame viaire, sécurité, etc.). La centralité autorise la densité et réciproquement.
« C’est à l’Etat de construire les conditions du rapprochement à court, moyen et long terme des intérêts entre ces différentes parties prenantes (élus locaux, promoteurs, constructeurs, investisseurs institutionnels publics et privés professionnels de la gestion locative) »
Enfin, dans les métropoles, la question du temps de trajet entre domicile et travail, au-delà des enjeux du télétravail, est centrale, elle conditionne la qualité de vie. Le gouvernement, s’appuyant sur l’expérience du Grand Paris Express, affiche la volonté de soutenir le développement de « RER métropolitains », cette volonté n’a de sens que si elle s’accompagne d’une action sur l’urbanisme et la construction de logements autour des gares existantes ou à venir de ces RER.
Dans le Grand Paris comme dans les métropoles de province, des perspectives de long terme de construction de logements neufs doivent s’ouvrir. Un pilotage minimum et un soutien financier raisonnable de la puissance publique doivent permettre de s’assurer que ces logements seront abordables, une programmation et des engagements sur des séries limitées et qualifiées – tirant le meilleur des innovations éparses menées ces dernières années par les acteurs – doivent permettre de tenir cet objectif. Parallèlement les investisseurs existent qui, recueillant l’épargne abondante des Français, cherchent des placements sûrs et disposant des meilleures garanties ESR que, précisément, ces innovations permettent d’assurer. C’est à l’Etat de construire les conditions du rapprochement à court, moyen et long terme des intérêts entre ces différentes parties prenantes (élus locaux, promoteurs, constructeurs, investisseurs institutionnels publics et privés professionnels de la gestion locative).
Au final, pour répondre à la crise du logement dans le Grand Paris comme dans certaines métropoles, il est temps de réécrire avec les outils et les acteurs d’aujourd’hui les enseignements de l’aménagement haussmannien, en gros, de réinventer l’eau chaude, exercice toujours salutaire.
Erwan Le Bot est expert en développement urbain et territorial