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Logement en zone parisienne. Un loyer en moyenne de 1000 € par mois pour 50m2 !

Logement en zone parisienne. Un loyer en moyenne de 1000 € par mois pour 50m2 !


Une double crise du logement en France. Celle qui concerne les loyers des grandes villes notamment en région parisienne où il faut compter 1000 € pour 50 m² ! Et celle des candidats à l’accession dont le nombre ne cesse de se réduire en raison du coût d’achat et des taux d’intérêt.

Près de 1.000 euros. Tel était le loyer moyen en Île-de-France en 2022. Plus précisément, il se situait à 998 euros pour un logement non meublé dans le parc privé, hors charges, selon les calculs définitifs publiés ce vendredi 15 septembre par l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne (Olap).

L’Olap précise que la surface moyenne des logements évalués était de 53 mètres carrés, et augmente à mesure que l’on s’éloigne de Paris…tout comme les prix.

Sans surprise, c’est, en effet, à Paris intra-muros que le loyer moyen est le plus élevé : à 1.230 euros, hors charges, pour une surface moyenne de 50 mètres carrés. Une somme qui descend à 937 euros, pour 52 mètres carrés en moyenne, dans les départements de petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne). En grande couronne (Seine-et-Marne, Yvelines, Essonne, Val-d’Oise), les communes situées dans l’agglomération parisienne ont affiché un loyer moyen de 855 euros, la surface moyenne s’établissant à 57 mètres carrés. Enfin, les plus rurales ou éloignées de la capitale, étudiées avec moins de finesse par l’Olap, affichaient elles un loyer de 783 euros pour des biens de 64 mètres carrés en moyenne.

Par ailleurs, pour les locataires qui voudraient devenir propriétaires, leur part ne cesse de chuter, passant de 27% en 2022 à 23% aujourd’hui, selon un sondage Ifop pour les Notaires du Grand Paris en partenariat avec La Tribune et dévoilé le 14 septembre.

En cause, un contexte de plus en plus difficile d’accès au crédit immobilier en raison de la flambée des taux d’intérêt, désormais proches des 5%. En effet, 78% des Franciliens jugent que les conditions d’accès aux crédits sont devenues plus difficiles. 82% estiment qu’il est beaucoup difficile de devenir propriétaire qu’il y a 20 ans en Île-de-France et que l’accession à la propriété est devenue quasiment impossible pour les jeunes générations.

Comment résoudre la crise du logement

Comment résoudre la crise du logement

« Au-delà des actions immédiates et ponctuelles nécessaires au soutien des acteurs, les pouvoirs publics peuvent (doivent ?) faire de la crise actuelle le creuset d’une réflexion pour assurer à long terme une offre nouvelle de logements locatifs abordables »

par Erwan Le Bot , expert en développement urbain et territorial dans l’Opinion

La crise du logement est désormais reconnue par l’ensemble des acteurs et, depuis peu, par le gouvernement. Surtout elle concerne en priorité certains territoires, pas n’importe lesquels : Paris et sa couronne et la plupart des métropoles de province (accessoirement les zones littorales/touristiques où les problématiques sont largement différentes) c’est-à-dire les territoires qui sont porteurs de l’essentiel du développement économique du pays.

Cette crise du logement concerne d’abord les jeunes, en ménage ou non, qui retardent le moment de quitter le domicile des parents, supportent des conditions de logement dégradées ou s’éloignent des lieux de travail, certains choisissant même de quitter les territoires métropolitains, un phénomène en accélération sur les années 2021 et 2022. La perte d’attractivité des métropoles est d’abord liée aux conditions de logement. C’est-à-dire aux conditions d’un équilibre acceptable entre son coût (loyer et charges) et ses caractéristiques : les qualités du logement en lui-même, les aménités qu’offre sa localisation et le temps de trajet domicile-travail. Rétablir un équilibre entre ces critères dans les métropoles françaises est un enjeu national.

Au-delà des actions immédiates et ponctuelles nécessaires au soutien des acteurs, les pouvoirs publics peuvent (doivent ?) faire de la crise actuelle le creuset d’une réflexion pour assurer à long terme une offre nouvelle de logements locatifs abordables. La première étape du parcours résidentiel des ménages est le logement locatif (moins cher que l’achat). C’est sur cette étape que le gouvernement doit agir en priorité, tant pour le logement social que pour le logement libre.

S’agissant des qualités intrinsèques des logements, et au-delà de la réglementation environnementale (RE 2020), il est sans doute temps de cristalliser les enseignements opérationnels qu’il faut tirer des innovations (techniques, de modes constructifs, de valeurs d’usage) multiples qui se sont multipliées depuis 2010 en matière de logement, souvent dans le cadre de programmes ou d’initiatives soutenues et labellisées par les pouvoirs publics (investissements d’avenir, écoquartiers, appel à projets « réinventer Paris », etc.). En particulier, la domotique ou les modes constructifs permettent, à certaines conditions, une réduction drastique des charges et la valeur d’usage de certains immeubles peut intégrer dans le loyer une plus-value significative en termes de « mieux vivre » dans son logement.

Urbanisme. Des retours d’expérience sont à faire à partir des réalisations échantillonnaires de ces quinze dernières années. Les aménités, parce qu’elles dessinent la vie de quartier, sont une condition de la soutenabilité de la densité, qui, elle-même, est une condition clé du prix de sortie des logements (et de respect des objectifs du zéro artificialisation nette). De nombreuses collectivités locales ont, en particulier, développé des réflexions sur la place du commerce dans les programmes neufs ou anciens (portage des cellules commerciales), des équipements publics (ouvertures partielles/déménagements, etc.) ou des espaces publics (verdissement/espaces verts, élargissement de la trame viaire, sécurité, etc.). La centralité autorise la densité et réciproquement.

« C’est à l’Etat de construire les conditions du rapprochement à court, moyen et long terme des intérêts entre ces différentes parties prenantes (élus locaux, promoteurs, constructeurs, investisseurs institutionnels publics et privés professionnels de la gestion locative) »

Enfin, dans les métropoles, la question du temps de trajet entre domicile et travail, au-delà des enjeux du télétravail, est centrale, elle conditionne la qualité de vie. Le gouvernement, s’appuyant sur l’expérience du Grand Paris Express, affiche la volonté de soutenir le développement de « RER métropolitains », cette volonté n’a de sens que si elle s’accompagne d’une action sur l’urbanisme et la construction de logements autour des gares existantes ou à venir de ces RER.

Dans le Grand Paris comme dans les métropoles de province, des perspectives de long terme de construction de logements neufs doivent s’ouvrir. Un pilotage minimum et un soutien financier raisonnable de la puissance publique doivent permettre de s’assurer que ces logements seront abordables, une programmation et des engagements sur des séries limitées et qualifiées – tirant le meilleur des innovations éparses menées ces dernières années par les acteurs – doivent permettre de tenir cet objectif. Parallèlement les investisseurs existent qui, recueillant l’épargne abondante des Français, cherchent des placements sûrs et disposant des meilleures garanties ESR que, précisément, ces innovations permettent d’assurer. C’est à l’Etat de construire les conditions du rapprochement à court, moyen et long terme des intérêts entre ces différentes parties prenantes (élus locaux, promoteurs, constructeurs, investisseurs institutionnels publics et privés professionnels de la gestion locative).

Au final, pour répondre à la crise du logement dans le Grand Paris comme dans certaines métropoles, il est temps de réécrire avec les outils et les acteurs d’aujourd’hui les enseignements de l’aménagement haussmannien, en gros, de réinventer l’eau chaude, exercice toujours salutaire.

Erwan Le Bot est expert en développement urbain et territorial

Immobilier- Logement : une crise prévisible

Logement : une crise prévisible

Par manque de volontarisme politique, la France n’a pas construit suffisamment pour accompagner les transformations de la société. Comme dans l’éducation ou la santé, la procrastination se paye aujourd’hui.( papier du Monde)

La crise du logement est tout sauf une surprise. Annoncée par les professionnels du secteur depuis des mois, elle semble désormais inéluctable. La remontée des taux d’intérêt entraîne une restriction des crédits immobiliers et une réduction du nombre d’acheteurs potentiels. La faiblesse de la demande commence à peser sur les prix et la fluidité des transactions. Le marché de la construction neuve est en chute libre, avec pour corollaire un impact à venir sur le secteur du BTP.

Cet effet domino intervient alors qu’il existait déjà une pénurie importante de logements. Toute la chaîne menace désormais de se gripper, entre des ménages qui sont dans l’incapacité d’accéder à la propriété, des locataires qui se heurtent à un manque criant d’offres et un secteur social qui n’arrive plus à remplir sa mission.

Si la situation n’a rien de surprenant, le manque d’anticipation est en revanche frappant. Qui croyait sérieusement que la période de l’argent quasi gratuit puisse se prolonger indéfiniment ? Le retour au réel est d’autant plus brutal que planait l’illusion d’une remontée des taux d’intérêt progressive. Le surgissement de l’inflation dans la foulée de la crise pandémique en a décidé autrement. Faute d’avoir préparé les esprits à cette normalisation accélérée, celle-ci ne peut se faire que dans la douleur.

Le logement illustre jusqu’à la caricature les contradictions auxquelles nous sommes confrontés. Il faudrait ainsi calmer l’inflation, qui rogne le pouvoir d’achat, sans pénaliser le crédit, qui facilite l’accession à la propriété. Il serait urgent d’augmenter l’offre de logements au moment où la transition écologique encadre strictement la construction et oblige à retirer du marché de la location les biens mal isolés. Les promoteurs réclament enfin de perpétuer des dispositifs coûteux d’aide à l’investissement, alors que leur efficacité reste médiocre et que la dépense publique est sous contrainte.

Mais la crise ne peut se résumer à ces contradictions. Les politiques du logement peinent à anticiper les mouvements de fond que la société française connaît depuis des décennies. L’augmentation de la population, la décohabitation des ménages, l’explosion du nombre d’étudiants ou encore la concentration de la demande dans les zones les plus attractives ont aggravé le mal-logement. Par manque de volontarisme politique, la France, quelles que soient les majorités au pouvoir, s’est accommodée de ne pas construire suffisamment pour accompagner ces transformations. Comme dans l’éducation ou la santé, la procrastination se paye aujourd’hui.

Il s’agit d’un échec collectif. Les maires sont les mieux placés pour répondre aux besoins, mais ils font primer la quiétude de leurs administrés sur l’intérêt général, qui réclamerait de construire davantage pour accueillir de nouvelles populations. La rareté du foncier devrait inciter à construire en hauteur pour faire baisser les coûts du logement, mais la France continue à privilégier l’étalement urbain au détriment de la densification. Quant au gouvernement, on peut se demander si c’était le meilleur moment pour limiter l’accès au prêt à taux zéro, sans parler des atermoiements incompréhensibles pour aligner la fiscalité des meublés touristiques sur celle de la location classique.

L’un des objectifs fixé par le Conseil national de la refondation consacré au logement a l’ambition de « redonner aux Français le pouvoir d’habiter ». La crise qui s’annonce risque plutôt de leur laisser le goût amer d’une certaine impuissance.

Le Monde

Inflation et crise du logement vont plomber la croissance

Inflation et crise du logement vont plomber la croissance

Signe de la décélération de l’économie, la croissance est retombée dans le rouge en juillet et août. Par ailleurs, le climat des affaires se détériore sérieusement. Malheureusement, si l’inflation se tasse un peu en Europe avec plus 5 % en moyenne sur un an, le niveau des prix demeure particulièrement excessif en regard de l’évolution du pouvoir d’achat.

Un pouvoir d’achat largement toujours plombé par la hausse de l’alimentaire. Une hausse officiellement de l’ordre de 12 % mais dans la réalité plus proche de 20 %. Résultat, les ménages adaptent en partie leur demande à l’offre en réduisant le volume des achats et en privilégiant géant si possible les prix bas. Cette crise du pouvoir d’achat dans l’alimentaire pèse lourdement sur la consommation des ménages et donc sur la croissance. La France pourrait donc tomber en déflation pour le second semestre de l’année cela d’autant plus que l’énergie demeure à des niveaux de prix importants.

L’autre facteur qui pourrait peser de manière négative sur la croissance est l’activité du logement. Un secteur qui pourrait bien même connaître un crash à partir de la fin de l’année et sans doute pour plusieurs années. En tout cas tant que les prix ne se seront pas adaptés au capacités financières des candidats à l’accession à la propriété. Le marché va dangereusement se réduire à ceux qui possèdent déjà un capital notamment les populations les plus âgés. Pour les jeunes , il est évident qu’on ne peut plus supporter des prix de maisons ou d’appartements de 300 000 à 400 000 € dans la plupart des grandes villes ( ne parlons pas de Paris). Du fait de l’inflation, par exemple la capacité d’emprunt pour un montant de 200 000 € s’est réduite à 160 000 € soit une baisse brutale de capacité d’emprunt de 20 %. Clairement l’offre doit s’adapter et les prix baisser de 20 % aussi pour relancer le marché. Or vraisemblablement les prix ne baisseront que de leur de 10 % d’ici à fin de l’année.

La crise du bâtiment va aussi lourdement peser sur l’activité économique et contribuer aussi à plomber la croissance. Pour éviter la catastrophe économique, la stratégie doit donc prioritairement viser d’une part à soutenir le pouvoir d’achat des ménages, d’autre part à relancer l’activité du bâtiment.

Économie–Inflation et crise du logement vont plomber la croissance

Économie–Inflation et crise du logement vont plomber la croissance

Signe de la décélération de l’économie, la croissance est retombée dans le rouge en juillet et août. Par ailleurs, le climat des affaires se détériore sérieusement. Malheureusement, si l’inflation se tasse un peu en Europe avec plus 5 % en moyenne sur un an, le niveau des prix demeure particulièrement excessif en regard de l’évolution du pouvoir d’achat.

Un pouvoir d’achat largement toujours plombé par la hausse de l’alimentaire. Une hausse officiellement de l’ordre de 12 % mais dans la réalité plus proche de 20 %. Résultat, les ménages adaptent en partie leur demande à l’offre en réduisant le volume des achats et en privilégiant géant si possible les prix bas. Cette crise du pouvoir d’achat dans l’alimentaire pèse lourdement sur la consommation des ménages et donc sur la croissance. La France pourrait donc tomber en déflation pour le second semestre de l’année cela d’autant plus que l’énergie demeure à des niveaux de prix importants.

L’autre facteur qui pourrait peser de manière négative sur la croissance est l’activité du logement. Un secteur qui pourrait bien même connaître un crash à partir de la fin de l’année et sans doute pour plusieurs années. En tout cas tant que les prix ne se seront pas adaptés au capacités financières des candidats à l’accession à la propriété. Le marché va dangereusement se réduire à ceux qui possèdent déjà un capital notamment les populations les plus âgés. Pour les jeunes , il est évident qu’on ne peut plus supporter des prix de maisons ou d’appartements de 300 000 à 400 000 € dans la plupart des grandes villes ( ne parlons pas de Paris). Du fait de l’inflation, par exemple la capacité d’emprunt pour un montant de 200 000 € s’est réduite à 160 000 € soit une baisse brutale de capacité d’emprunt de 20 %. Clairement l’offre doit s’adapter et les prix baisser de 20 % aussi pour relancer le marché. Or vraisemblablement les prix ne baisseront que de leur de 10 % d’ici à fin de l’année.

La crise du bâtiment va aussi lourdement peser sur l’activité économique et contribuer aussi à plomber la croissance. Pour éviter la catastrophe économique, la stratégie doit donc prioritairement viser d’une part à soutenir le pouvoir d’achat des ménages, d’autre part à relancer l’activité du bâtiment.

Inflation et crise du logement vont plomber la croissance

Inflation et crise du logement vont plomber la croissance

Signe de la décélération de l’économie, la croissance est retombée dans le rouge en juillet et août. Par ailleurs, le climat des affaires se détériore sérieusement. Malheureusement, si l’inflation se tasse un peu en Europe avec plus 5 % en moyenne sur un an, le niveau des prix demeure particulièrement excessif en regard de l’évolution du pouvoir d’achat.

Un pouvoir d’achat largement toujours plombé par la hausse de l’alimentaire. Une hausse officiellement de l’ordre de 12 % mais dans la réalité plus proche de 20 %. Résultat, les ménages adaptent en partie leur demande à l’offre en réduisant le volume des achats et en privilégiant géant si possible les prix bas. Cette crise du pouvoir d’achat dans l’alimentaire pèse lourdement sur la consommation des ménages et donc sur la croissance. La France pourrait donc tomber en déflation pour le second semestre de l’année cela d’autant plus que l’énergie demeure à des niveaux de prix importants.

L’autre facteur qui pourrait peser de manière négative sur la croissance est l’activité du logement. Un secteur qui pourrait bien même connaître un crash à partir de la fin de l’année et sans doute pour plusieurs années. En tout cas tant que les prix ne se seront pas adaptés au capacités financières des candidats à l’accession à la propriété. Le marché va dangereusement se réduire à ceux qui possèdent déjà un capital notamment les populations les plus âgés. Pour les jeunes , il est évident qu’on ne peut plus supporter des prix de maisons ou d’appartements de 300 000 à 400 000 € dans la plupart des grandes villes ( ne parlons pas de Paris). Du fait de l’inflation, par exemple la capacité d’emprunt pour un montant de 200 000 € s’est réduite à 160 000 € soit une baisse brutale de capacité d’emprunt de 20 %. Clairement l’offre doit s’adapter et les prix baisser de 20 % aussi pour relancer le marché. Or vraisemblablement les prix ne baisseront que de leur de 10 % d’ici à fin de l’année.

La crise du bâtiment va aussi lourdement peser sur l’activité économique et contribuer aussi à plomber la croissance. Pour éviter la catastrophe économique, la stratégie doit donc prioritairement viser d’une part à soutenir le pouvoir d’achat des ménages, d’autre part à relancer l’activité du bâtiment.

Logement- Les raisons de la crise immobilière (Xavier Lépine)

Logement- Les raisons de la crise immobilière (Xavier Lépine)

Xavier Lépine, président de l’Institut de l’Épargne immobilière et foncière (IEIF), revient sur la crise qui secoue la crise immobilière dans la Tribune

Xavier Lépine A l’heure des injonctions plus contradictoires que jamais – le logement est inabordable pour une partie croissante de la population, les coûts d’adaptation aux dérèglements climatiques sont monstrueux, reconstruire la ville sur la ville – Patrice Vergriete, par la hauteur de vue qu’il amènera, est « l’homme » de la situation. Je n’ai qu’un seul grand regret, que son ministère ne soit que celui du logement et non pas celui de l’immobilier. A l’heure où l’avenir du bureau est questionné, où de très nombreux Français travaillent partiellement de chez eux, où l’immobilier de l’Etat est une partie intégrante de la solution, de mon point de vue, il me semble évident que les barrières des usages sont floutées et qu’une approche plus holistique de l’immobilier (résidentiel et tertiaire) serait plus efficace.

Au-delà de ces mouvements gouvernementaux, faut-il s’attendre à une crise immobilière de grande ampleur ?

L’immobilier est un temps long, très long. Et ce qui arrive aujourd’hui est la conséquence de ce qu’on appelle en mathématiques le modèle de Reasons, c’est-à-dire une accumulation d’événements parfois lointains, sans conséquences systémiques lorsqu’ils sont pris isolément, mais qui provoquent un accident « vital » par leur simple accumulation. Nous sommes entrés dans une crise structurelle qui est la conséquence de quarante années de politique du logement qui n’a fait que creuser les inégalités au lieu de les réduire. Nous sommes en effet dans une situation où en vingt ans les prix de l’immobilier ont doublé alors que les revenus n’ont augmenté que de 30% ; et sur 40 ans ils sont multipliés par 12 alors que les revenus n’ont augmenté que de 5 fois. Un mètre carré reste toujours un m² et le « logement » est devenu dysfonctionnel. Insuffisance de l’offre, vieillissement de la population, décohabitation… C’est vrai partout dans le monde et partout dans le monde il y a ce décalage croissant entre les prix de l’immobilier et les revenus où la valeur d’usage (loyer) n’a plus de relation avec la valeur d’échange (prix). Mais la France a particulièrement échoué, faute d’avoir su faire évoluer ses modèles (notamment d’avoir accepté de faire des financements à 25 ans avec des taux d’intérêts proches de zéro alors que l’offre de logement était insuffisante) et d’avoir trop politisé le débat sur le thème logement social versus privé.

Les politiques publiques en matière d’immobilier sont pourtant très volontaristes, avec des budgets conséquents. Pourquoi jugez-vous aussi sévèrement l’action de l’État ?

Nous avons eu après la Seconde guerre mondiale, et pendant près de quarante ans, une politique du logement extrêmement inclusive et bénéfique pour la population. Une succession de lois novatrices, disruptives, ont permis de lancer la machine. La loi de 1948 a certes limité la hausse des loyers mais après les avoir multiplié par trois pour rattraper l’inflation de l’occupation des années 1940 et relancer l’entretien des immeubles. Elle a permis également de développer la copropriété – renforcée à partir de 1965 – qui existait pourtant depuis le Code Napoléon. De même, pour solvabiliser la demande, a été créé le crédit immobilier à taux fixe, que tout le monde nous envie, avec une décision politique très forte à l’origine, celle de ne pas rémunérer les dépôts bancaires et pendant longtemps le monopole du crédit foncier permettant ainsi de « fixer » le coût de l’argent et par la même une très forte visibilité financière pour les ménages. Même la loi Malraux de 1962 sur les monuments historiques a permis de réduire considérablement l’insalubrité, ce qui pourrait d’ailleurs inspirer le gouvernement en matière d’isolation thermique. Enfin, la loi de 1967 a permis de développer un métier qui n’existait pas vraiment en France, celui de promoteur immobilier, pour répondre à une demande qui augmentait en flèche. Cinq ans après les rapatriements d’Algérie et surtout l’impact du baby-boom, les enfants nés par millions – 1 million par année- en 1945 ayant 22 ans en 1967 ! Et toute l’originalité française a été d’inventer la VEFA – la vente en l’état futur d’achèvement – pour développer une activité extrêmement capitalistique sans capitaux propres … à la différence des modèles anglo-saxon des REITS (promoteurs et partiellement investisseurs). Ce sont toutes des décisions extrêmement fortes, courageuses même, qui font que nous sommes passés d’une France de quelques pourcents de propriétaires en ville à une France de 58% de propriétaires. Ce qui reste en-dessous aujourd’hui de la moyenne européenne (70% en Europe avec les deux pays les plus riches d’Europe Suisse – 40% – Allemagne 50% très en dessous de la moyenne) car c’est un pourcentage qui n’augmente que marginalement depuis des années.

A partir de quand alors la politique en matière de logement a pris, selon vous, un mauvais tournant ?

L’arrêt de la convertibilité du dollar en or juillet 1971 – de fait la fin des accords de Bretton Woods – ont créé un nouveau monde et signé la fin des Trente Glorieuses, avec des monnaies instables, le triplement du prix du pétrole en 1973 – le dollar ce n’est plus de l’or et les pays producteurs l’avaient bien compris ! -, des taux d’intérêt qui grimpent, une forte inflation, du chômage et … des faillites de promoteurs en cascade. Puis une série de lois, toutes vertueuses au démarrage, a plutôt involontairement aggravé la situation. En tête, la loi de décentralisation de 1982 qui a donné le pouvoir de construire au maire avant qu’il ne s’aperçoive au bout de quelques années qu’il fallait plutôt faire moins de résidentiel et plus de bureaux pour être réélu. Après la crise immobilière de 1992-1994, la loi Perissol de 1995 incite les Français à investir dans le locatif. Ce qui revient à subventionner les catégories les plus aisées pour qu’elles achètent des logements locatifs pour les catégories les moins aisées avec comme effet de bord une sortie massive des investisseurs institutionnels du résidentiel locatif. Finalement, à chaque fois que l’État a sauvé la construction de logements, cela s’est traduit par une hausse des prix. C’était vrai pour le Perissol, c’était vrai aussi pour le Pinel qui a grandement alimenté la hausse des prix. La loi SRU de 2000 qui impose des quotas de logements sociaux a finalement malheureusement contribué à alimenter les prix du secteur libre.

Cette situation a empiré depuis les années 2000 : forte croissance mondiale très peu inflationniste avec l’arrivée de la Chine dans l’OMC, les taux d’intérêt baissent, les banques allongent la durée des crédits et les prix de l’immobilier explosent. Tout un système économique, social et fiscal dans un contexte de mondialisation qui fait qu’au total, le PIB nominal de la France a été multiplié par 7 en l’espace de quarante ans alors que la création monétaire l’a été de 50 fois. Concrètement, l’excès de croissance monétaire s’est répercuté sur les actifs, financiers bien sûr, mais également le prix de l’immobilier qui s’est envolé alors que les salaires ne suivaient que l’inflation général des prix à la consommation.

Quelle devrait être la réponse de l’État, selon vous ?

Nous avons souvent des réponses fiscales ou circonstancielles comme celles sur les meublés touristiques. Tout ceci est très cosmétique. Il serait grand temps de tout mettre sur la table et de voir vraiment ce qui marche et ce qui ne marche plus et l’État ne peut pas tout faire ; mais il peut être facilitateur. Il n’y a pas de solution unique mais un ensemble de réflexions profondes à mener. Les rénovations thermiques ne sont pas dans les moyens financiers de nombreux propriétaires alors même que l’immobilier est souvent très cher ; profitons de cette situation, l’immobilier peut servir de garantie pour autofinancer les travaux de rénovation énergétique via des prêts avance rénovation dont le capital serait remboursé lors de la mutation. Tous les jours, nous entendons de multiples petites voix qui nous disent que des centaines de milliers de logements ne seront plus louables faute d’avoir la bonne lettre (DPE)… et par ailleurs il faut démultiplier les logements sociaux… Proposons aux bailleurs privés de financer leurs travaux de rénovation en contrepartie d’un engagement à louer à des locataires éligibles au logement social (avec garantie locative). En contrepartie d’une baisse du loyer, nous adaptons le principe, déjà existant, d’un amortissement sur le bien. Cela soulage les organismes de logements sociaux et créé une mixité sociale beaucoup plus forte à l’intérieur des immeubles et nettement moins de coûts pour la collectivité.

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Rénovation énergétique des copropriétés : quand les travaux virent au casse-tête

Et quid des millions de mètres carrés de bureaux obsolètes ?

4 millions de m² de bureaux obsolètes rien qu’en région parisienne, 1,5 millions (3% du stock) de m² de plus chaque année… L’équation financière pour en transformer une partie en logements fonctionne de mieux en mieux car le prix des immeubles obsolètes est en train de chuter, mais se heurte à une lenteur, voire à une opposition de très nombreuses municipalités. A l’heure du ZAN, du recyclage urbain et de la lutte pour le climat c’est plus que choquant. Certains pays ont décidé d’accélérer le processus en réduisant le dispositif juridique à une autorisation de travaux. Nous avons historiquement su être les leaders de l’innovation en matière de logement, retrouvons cette dynamique en associant toutes les parties prenantes au service du logement durable pour tous : élus, règlementation, banques pour financer, investisseurs où chacun doit y trouver son intérêt.

Les banques et les assureurs pourraient-ils jouer un rôle plus important ?

Les banques prêtent moins car le crédit immobilier n’est pas un produit très rentable. Mais la dernière innovation financière dans le domaine du crédit immobilier remonte à 70 ans avec le crédit à taux fixe. Je suis frappé par le conservatisme du système bancaire dans ce domaine. Il existe pourtant une très grande variété de solutions financières. Par exemple, nous pouvons envisager que les propriétaires, qui sont généralement âgés, souscrivent un prêt avance mutation – remboursé au moment du décès – pour financer non seulement les travaux d’isolation thermique mais aussi transmettre par anticipation une fraction de leur héritage et permettre ainsi à leurs enfants ou petits-enfants d’avoir l’apport nécessaire pour acquérir leur logement. Nous parlons beaucoup de la solidarité intergénérationnelle en faveur des seniors mais l’inverse doit exister dans une société où le prix n’est plus accessible pour la majorité des générations montantes. C’est autorisé en France depuis la loi de 2006 mais les banques ne le font pas. Elles sont sans doute effrayées par les excès américains qui ont conduit aux subprimes, leur devoir de conseil sur ces montages et les possibles recours des héritiers. Mais il faut rappeler que le patrimoine immobilier des Français est de 8.000 milliards et est de plus en plus concentré, une aberration économique ! La vertu est au milieu des extrêmes et de nombreux pays proposent ce type de système en les encadrant.

Vous venez de créer une start-up, Neoproprio, qui remet au gout du jour le bail emphytéotique. A quel besoin cela répond-t-il ?

Il faut en effet de nouvelles voies pour débloquer un marché du logement devenu dysfonctionnel. Nous partons d’un constat : il est devenu presque impossible d’accéder à la propriété dans une grande ville. Ne rêvons pas, les prix du neuf comme de l’ancien ne vont pas baisser de 30%, les taux d’intérêts ne reviendront pas de sitôt à 1%, les coûts d’adaptation du logement au dérèglement climatique ne vont pas faire baisser les prix, le foncier continuera d’être rare… Les constructeurs automobiles ont su répondre à cette problématique en proposant « d’acheter en location » en proposant un coût abordable et largement choisi de manière optionnelle par l’acquéreur (apport, durée, option d’achat…) sur un bien dont la valeur résiduelle ne fait que baisser pour terminer à zéro. Neoproprio, c’est l’adaptation, via le concept d’un bail emphytéotique complété par des contrats, au logement… Un bien qui, à la différence essentielle d’une voiture, généralement s’apprécie dans le temps.

Concrètement, comment cela fonctionne-t-il ?

Nous proposons donc de libérer l’accès à la propriété, le dispositif permet de réduire d’un bon 30% le coût mensuel d’acquisition qui devient ainsi très comparable à un loyer. En acquérant son logement pour une durée de 25 ans à moitié prix et bénéficiant d’un engagement de rachat à tout moment, le néopropriétaire a ainsi la certitude de récupérer lors de la revente une part substantielle des mensualités qu’il aura payées : la différence entre le prix de rachat minimum garanti et le remboursement – anticipé – du principal restant dû du crédit immobilier qu’il aura contracté lors de l’acquisition. Une épargne – l’équivalent de trois ans de loyers s’il décide de déménager au terme de dix ans – qui peut alors servir d’apport personnel pour une autre acquisition.

Entre l’État qui subventionne et les banques qui fournissent le crédit, l’intervention d’une foncière dans l’équation permet, de manière rentable pour toutes les parties, de sortir de l’impasse actuelle ! L’immobilier peut constituer un formidable levier pour l’économie et la réduction des inégalités mais il doit être repensé de manière plus financière et moins obsessionnelle. Paradoxalement aux idées généralement reçues, c’est l’insuffisance d’innovations financières dans le secteur du logement alors que le monde s’est financiarisé qui est en partie responsable de la hausse disproportionnée des prix du logement. C’est précisément ce que nous proposons aux investisseurs institutionnels : investir dans le résidentiel de manière rentable avec un impact sociétal très puissant et noble, redonner l’accès à la propriété de leur logement à des générations entières via un partage du risque et de la rentabilité équilibré entre les deux parties.

Arrêt de l’artificialisation-des-sols: risque de hausse du prix du logement

Arrêt de l’artificialisation-des-sols: risque de hausse du prix du logement


La loi Climat et résilience entend combattre l’artificialisation des sols, mais elle risque d’accroître la crise du logement, en opérant des transferts de richesse de jeunes générations vers des propriétaires plus âgés, alerte, dans une tribune au « Monde », l’économiste Carl Gaigné.

Le constat est le suivant. Le prix du logement a explosé de manière disproportionnée dans de nombreux territoires. Les raisons évoquées dans le discours d’Elisabeth Borne, lundi 5 juin, sont les coûts de la construction et, plus récemment, du crédit immobilier. Les aides publiques, comme le rappelle la première ministre, peuvent également avoir des effets inflationnistes sur les prix du logement.

Un facteur important manque néanmoins à l’appel. La hausse du prix de l’immobilier est attribuable en très grande partie à la hausse du prix des terres en ville, un constat partagé par différentes études économiques, autour de 80 %. La valeur du sol urbain dépend fortement de sa localisation, c’est-à-dire de la qualité de l’environnement local, et de l’accessibilité aux emplois et services.

Un même logement a une valeur très différente selon sa localisation. Une note de l’Insee soulignait que le prix d’un appartement de 60 mètres carrés est de 90 000 euros à Provins et de 780 000 euros dans le 6e arrondissement, à Paris. Les coûts de construction et du crédit variant très faiblement entre les communes, l’écart de prix, près de 700 000 euros, s’explique en grande partie par l’écart dans la valeur du foncier urbain.

La valeur foncière représente en moyenne près de la moitié de la valeur d’un logement. C’est pourquoi l’accession à la propriété par les ménages de la classe moyenne s’est traduite par un étalement des villes, afin de bénéficier entre autres de prix abordables. En parallèle, le gouvernement fait de la lutte contre l’artificialisation des sols une réforme prioritaire. Dans le cadre de la loi Climat et résilience, le gouvernement souhaite protéger les espaces naturels, en instaurant l’objectif de zéro artificialisation nette. Il s’agit de stopper l’agrandissement des zones urbanisées ou de rendre à la nature l’équivalent des superficies absorbées par l’urbanisation.

Logement : « L’accès à la propriété , un enjeu démocratique

Logement : « L’accès à la propriété , un enjeu démocratique

par
Nicolas Darbo

Consultant spécialisé dans les banques et l’immobilier chez Accuracy

Charles Mazé

Consultant spécialisé dans les banques et l’immobilier chez Accuracy

Nicolas Paillot de Montabert

Consultant spécialisé dans les banques et l’immobilier chez Accuracy

Trois experts de l’immobilier, Nicolas Darbo, Charles Mazé et Nicolas Paillot de Montabert, proposent dans une tribune au « Monde » deux mécanismes pour faciliter l’acquisition d’un logement : des prêts d’Etat et la séparation entre nue-propriété et usufruit.


Notre pays peut-il se permettre une nouvelle crise du logement ? Si l’emploi se porte bien, l’un des autres principaux moteurs de la progression sociale est en panne. Pénalisée depuis vingt ans par la forte croissance des prix, et plus récemment par la remontée brutale des taux d’intérêt, l’accession à la propriété immobilière est pour beaucoup devenue un rêve inaccessible. De quoi nourrir un dangereux sentiment de stagnation sociale.

La propriété immobilière joue trois rôles-clés dans le modèle social français. Elle est l’un des principaux leviers d’accès à l’autonomie financière et à la constitution d’un patrimoine. Elle permet aux retraités de conserver un bon niveau de vie après leur départ à la retraite en dépit de la baisse de leurs revenus. Enfin, elle crée un lien patrimonial et affectif entre les générations, par la transmission dont elle est l’objet.

L’accès à la propriété immobilière n’est donc pas juste un sujet technique : c’est un sujet social et politique. Et, par symétrie, lorsque l’accès à la propriété immobilière devient plus difficile, la société s’en trouve affaiblie. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si, depuis quarante ans, des politiques publiques volontaristes et des incitations fiscales sont mises en œuvre par l’Etat pour faciliter l’accès à la propriété foncière et pallier le manque structurel de logements.

Depuis mi-2022, la situation s’est sérieusement tendue sur le marché du logement. Les tensions macroéconomiques liées à la guerre en Ukraine s’ajoutent à un contexte post-Covid tendu et interviennent dans une période de renforcement de plusieurs réglementations structurantes pour le marché du logement.

Côté offre, l’inflation sur le prix des terrains et les matériaux de construction, la diminution du nombre de permis de construire accordés par les autorités locales et les nouvelles normes environnementales, renchérissent les coûts de construction.

Côté demande, la hausse des taux d’intérêt limite la capacité d’endettement des ménages, dans un contexte de durcissement des règles de financement par le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF). Les prix se maintiennent pour le moment, mais le coût de la dette et la pression réglementaire augmentent : c’est un cocktail détonant.

Immobilier -Crise du logement : la maison individuelle remise en cause ?

Immobilier -Crise du logement : la maison individuelle remise en cause ?

par Fabien Jannic-Cherbonnel , France Télévisions

Un article intéressant mais qui milite quand même pour la densification et la sur urbanisation résultat d’un modèle qui favorise la mètropolitisation et les grandes villes. La question de l’aménagement du territoire avec un meilleur équilibre et une meilleure répartition de l’habitat et de l’emploi n’est pas posée. NDLR

Considéré comme « moche » par certains, le pavillon reste privilégié par les Français et les Françaises. Mais face aux objectifs de zéro artificialisation des sols et à l’envolée des coûts de construction, il est remis en cause. Une rangée de maisons, chacune au milieu d’un jardin, une route qui se termine en cul-de-sac, le tout dans la périphérie d’une ville, en bordure de champs. C’est, en une phrase, la façon dont on pourrait décrire le modèle pavillonnaire à la française, mis en place dans les années 1970. Accusé de rendre la France « moche » par le magazine Télérama en 2010, de grignoter les terres agricoles, de favoriser l’endettement des ménages et d’être incompatible avec la transition écologique, ce modèle est de plus en plus remis en cause.

« Il faut en finir avec la maison individuelle », avait même lancé Emmanuelle Wargon, alors ministre du Logement, en 2021, rappelle Le Figaro. Des propos qui avaient fait polémique, alors que la maison individuelle est encore vue comme un idéal par une large majorité des Français. Mais la future loi zéro artificialisation nette, qui empêchera théoriquement la création de lotissements sur des terres agricoles ou naturelles, risque de venir doucher ces aspirations. Et de signer la fin du pavillon, cette « passion française » selon l’expression des sociologues Hervé Marchal et Jean-Marc Stébé.

Rembobinons. Nous sommes au milieu des années 1970. Les autorités, après avoir fortement développé l’habitat collectif au sortir de la Seconde Guerre mondiale, décident de changer de braquet. « Ce que l’on appelle le modèle pavillonnaire est une construction politique et économique, mis notamment en place après l’élection de Valéry Giscard d’Estaing en 1977, et qui promet un logement à tous grâce à l’accession à la propriété », détaille Lionel Rougé, maître de conférences à l’université de Toulouse 2 et spécialiste du sujet.

Très vite, les lotissements fleurissent un peu partout en France, presque toujours en périphérie des villes. Eloignés des lieux de travail, des centres-villes ou des écoles, ces lotissements s’y font dortoirs et la voiture y est reine. La France « a choisi de s’inspirer du modèle américain », souligne Lucile Mettetal, géographe et chargée d’études et de projets à l’institut Paris Région. Les maisons y sont construites « au milieu d’un jardin », à l’inverse de ce qui se fait dans d’autres pays comme le Royaume-Uni ou l’Allemagne, où les maisons sont fréquemment mitoyennes. A la clé, la promesse d’un environnement sécurisant, où l’on peut s’épanouir en bricolant ou jardinant, à l’abri des regards des voisins.

Ce modèle, poussé par les politiques locales d’aménagement du territoire, mais aussi par des dispositifs nationaux comme le prêt à taux zéro depuis les années 1990, permet aux classes moyennes et populaires d’accéder à la propriété. Près de 62% des ménages français étaient ainsi propriétaires de leur résidence principale en 2020, contre 44% en Allemagne, d’après l’OCDE. Et parmi ces logements, la maison est reine : selon les derniers chiffres du ministère de la Transition écologique, 79% des ménages propriétaires habitent dans une maison.

Malgré son succès, le pavillon est la cible de critiques régulières, d’abord pour l’imaginaire qu’il charrie, comme Télérama dézinguant « la France moche ». La cible à abattre ? Ces longues rues bordées de maisons similaires, situées à l’entrée d’une commune et proches d’une zone commerciale. « Les zones pavillonnaires sont le symbole d’un monde urbain qui grignote la campagne », résume Hervé Marchal, professeur de sociologie à l’université de Bourgogne. Une contradiction forte pour un type d’habitat censé rapprocher ses habitants de la nature.

Au-delà de l’aspect esthétique, le modèle pavillonnaire est surtout critiqué pour son impact sur l’environnement. « Ce développement par zones – pavillonnaires, d’activités et commerciales – séparées est problématique », explique Christine Leconte, présidente de l’Ordre des architectes. C’est « un urbanisme totalement tourné vers la voiture » qui, en plus de forcer les habitants à faire des kilomètres pour se rendre au travail, a « fait perdre aux enfants énormément d’autonomie », ajoute-t-elle.

Malgré ces critiques, l’attrait de la maison individuelle reste important. « Le désir de maison n’a pas faibli, il a même été réactivé par les confinements et l’étendue du télétravail », souligne Lucile Mettetal. Ainsi, 84% des personnes interrogées préféreraient vivre dans ce type de logement, selon un sondage Ifop de la Fédération française des constructeurs de maisons individuelles réalisé en mars et rapporté par Le Journal de l’Agence.

Si tous les Français, ou presque, ont le même rêve, ils n’habitent pas tous de la même façon. « Toutes les maisons ne se valent pas, souligne Lionel Rougé. On voit les classes supérieures investir les zones pavillonnaires, souvent construites dans les années 1970, qui sont désormais bien insérées dans le milieu urbain. » Ce « pavillon enchanté », comme l’appelle Hervé Marchal, a tout pour lui : il est connecté à la ville, aux transports en commun et aux services.

A l’inverse, les classes populaires peinent de plus en plus à trouver des maisons à prix abordable. « Ceux qui allaient dans le périurbain sont dorénavant forcés d’aller encore plus loin », résume Lionel Rougé, qui s’alarme de voir des ménages « s’installer à 70 km de Toulouse pour accéder à une maison ». « Ce pavillonnaire désenchanté va fréquemment de pair avec un ressentiment de ses habitants », résume le chercheur.

« Loin de tout, ils ont le sentiment d’être oubliés. Les façades en crépi, l’état des fenêtres sont autant de choses qui rappellent aux gens qu’ils sont moins bien lotis. »

Hervé Marchal, professeur de sociologie à l’université de Bourgogne à franceinfoCe sentiment d’exclusion, « l’un des moteurs derrière la colère des ‘gilets jaunes’ », rappelle Christine Leconte, pourrait encore s’exacerber avec l’augmentation des prix de l’énergie liée à la guerre en Ukraine. D’autant que les constructions neuves ont fortement ralenti en 2022, rapporte Le Monde. En cause, la poussée des coûts de construction, de 8,8% sur un an selon l’Insee, ainsi que la hausse des taux d’intérêts qui freine l’accession aux prêts immobiliers.

A ces difficultés conjoncturelles s’ajoute une problématique de long terme : celle de la transition écologique. Le pavillon et sa voiture quasi obligatoire semblent peu compatibles avec la lutte contre le réchauffement climatique. Et l’objectif de zéro artificialisation nette d’ici à 2050, inclus dans la loi Climat, risque bien de remettre en cause tout le modèle de développement urbain français. Le gouvernement veut d’ailleurs faire adopter un nouveau texte, pour préserver la biodiversité et empêcher l’étalement urbain en incitant la construction sur des friches ou des espaces vacants dans les villages. La future loi, pour l’instant votée par le Sénat, inquiète les maires de petites villes, qui craignent de ne plus attirer de ménages. Logique, souligne Hervé Marchal, « car pendant longtemps, la figure d’un bon maire a été celle de l’élu qui attirait sans cesse de nouveaux habitants ».

De quoi signer la fin du pavillon ? « Non », répond Lionel Rougé, pour qui l’on assiste « à un renouvellement du modèle pavillonnaire » plutôt qu’à sa mort. Pour se réinventer, les zones pavillonnaires vont donc devoir évoluer. « L’une des clés est la densification des zones périurbaines, souligne Christine Leconte. Il va falloir se préoccuper de l’intégration de ces zones dans le tissu urbain, rapprocher les gens des services publics et sortir du tout-voiture. » Une « clé de la transition écologique » qui demande de diversifier l’usage des zones pavillonnaires, pour en faire des lieux de vie.

Reste à savoir comment densifier. Lucile Mettetal distingue « la densification dure », qui remplace des zones pavillonnaires par des barres d’immeubles, à l’œuvre notamment en petite et moyenne couronne en Ile-de-France, comme le raconte Le Monde, de « la densification douce » : « Il s’agit d’une division des parcelles ou d’un remplissage des dents creuses. » Par exemple, un couple qui vend une partie de son jardin pour rénover sa maison achetée dans les années 1970.

Réenchanter la zone pavillonnaire ne se fera en tout cas pas sans ses habitants. « Nous n’avons pas d’autre solution que de travailler avec les personnes qui y habitent », met en garde Christine Leconte. « Il ne faut pas diaboliser les zones pavillonnaires, mais plutôt y mettre de la pensée urbaine, ajoute Lionel Rougé. Il faut réfléchir à une manière de les agencer et de les urbaniser qui soit démocratique. Les gens souhaitent de la ville à la campagne, il faut les laisser l’inventer. »

La France pourrait s’inspirer de certains de ses voisins européens, alors que « notre pays est le champion du mitage [l'implantation d'édifices dispersés dans un paysage naturel]« , s’exclame Hervé Marchal. Le chercheur suggère de regarder vers « le Royaume-Uni, où le pavillonnaire mitoyen est plus développé et intégré dans les villes ». Lucile Mettetal invite le législateur à se poser la question du partage de l’habitat : « On pourrait regarder en Allemagne, où les générations cohabitent plus fréquemment. »

Si la France n’en est pas encore à révolutionner son habitat, certaines envies semblent être en train d’évoluer, selon les observateurs et professionnels du secteur. Les jeunes ménages n’ont plus tout à fait les mêmes aspirations que leurs parents. « La place du jardin est toujours importante, mais il n’a pas besoin d’être très grand. Surtout, l’envie d’avoir une maison avec quatre faces est moins forte aujourd’hui et les ménages ne veulent pas être trop loin du centre-ville », souligne Lionel Rougé.

Est-ce un signe que le discours écologique est en train d’infuser ? « La réduction de la taille des maisons et des jardins est notamment liée à une question d’économies et de confort, mais quelque part, ça pénètre », pense Christine Leconte. Au législateur d’arriver à convaincre les Français de changer leurs aspirations, et de répondre aux contradictions qui poussent les ménages à « vouloir habiter à proximité de la nature, tout en étant intégrés au tissu urbain », résume Hervé Marchal.

Immobilier -Crise du logement : le pavillon remis en cause ?

Immobilier -Crise du logement : le pavillon remis en cause ?

par Fabien Jannic-Cherbonnel , France Télévisions

Un article intéressant mais qui milite quand même pour la densification et la sur urbanisation résultat d’un modèle qui favorise la mètropolitisation et les grandes villes. La question de l’aménagement du territoire avec un meilleur équilibre et une meilleure répartition de l’habitat et de l’emploi n’est pas posée. NDLR

Considéré comme « moche » par certains, le pavillon reste privilégié par les Français et les Françaises. Mais face aux objectifs de zéro artificialisation des sols et à l’envolée des coûts de construction, il est remis en cause. Une rangée de maisons, chacune au milieu d’un jardin, une route qui se termine en cul-de-sac, le tout dans la périphérie d’une ville, en bordure de champs. C’est, en une phrase, la façon dont on pourrait décrire le modèle pavillonnaire à la française, mis en place dans les années 1970. Accusé de rendre la France « moche » par le magazine Télérama en 2010, de grignoter les terres agricoles, de favoriser l’endettement des ménages et d’être incompatible avec la transition écologique, ce modèle est de plus en plus remis en cause.

« Il faut en finir avec la maison individuelle », avait même lancé Emmanuelle Wargon, alors ministre du Logement, en 2021, rappelle Le Figaro. Des propos qui avaient fait polémique, alors que la maison individuelle est encore vue comme un idéal par une large majorité des Français. Mais la future loi zéro artificialisation nette, qui empêchera théoriquement la création de lotissements sur des terres agricoles ou naturelles, risque de venir doucher ces aspirations. Et de signer la fin du pavillon, cette « passion française » selon l’expression des sociologues Hervé Marchal et Jean-Marc Stébé.

Rembobinons. Nous sommes au milieu des années 1970. Les autorités, après avoir fortement développé l’habitat collectif au sortir de la Seconde Guerre mondiale, décident de changer de braquet. « Ce que l’on appelle le modèle pavillonnaire est une construction politique et économique, mis notamment en place après l’élection de Valéry Giscard d’Estaing en 1977, et qui promet un logement à tous grâce à l’accession à la propriété », détaille Lionel Rougé, maître de conférences à l’université de Toulouse 2 et spécialiste du sujet.

Très vite, les lotissements fleurissent un peu partout en France, presque toujours en périphérie des villes. Eloignés des lieux de travail, des centres-villes ou des écoles, ces lotissements s’y font dortoirs et la voiture y est reine. La France « a choisi de s’inspirer du modèle américain », souligne Lucile Mettetal, géographe et chargée d’études et de projets à l’institut Paris Région. Les maisons y sont construites « au milieu d’un jardin », à l’inverse de ce qui se fait dans d’autres pays comme le Royaume-Uni ou l’Allemagne, où les maisons sont fréquemment mitoyennes. A la clé, la promesse d’un environnement sécurisant, où l’on peut s’épanouir en bricolant ou jardinant, à l’abri des regards des voisins.

Ce modèle, poussé par les politiques locales d’aménagement du territoire, mais aussi par des dispositifs nationaux comme le prêt à taux zéro depuis les années 1990, permet aux classes moyennes et populaires d’accéder à la propriété. Près de 62% des ménages français étaient ainsi propriétaires de leur résidence principale en 2020, contre 44% en Allemagne, d’après l’OCDE. Et parmi ces logements, la maison est reine : selon les derniers chiffres du ministère de la Transition écologique, 79% des ménages propriétaires habitent dans une maison.

Malgré son succès, le pavillon est la cible de critiques régulières, d’abord pour l’imaginaire qu’il charrie, comme Télérama dézinguant « la France moche ». La cible à abattre ? Ces longues rues bordées de maisons similaires, situées à l’entrée d’une commune et proches d’une zone commerciale. « Les zones pavillonnaires sont le symbole d’un monde urbain qui grignote la campagne », résume Hervé Marchal, professeur de sociologie à l’université de Bourgogne. Une contradiction forte pour un type d’habitat censé rapprocher ses habitants de la nature.

Au-delà de l’aspect esthétique, le modèle pavillonnaire est surtout critiqué pour son impact sur l’environnement. « Ce développement par zones – pavillonnaires, d’activités et commerciales – séparées est problématique », explique Christine Leconte, présidente de l’Ordre des architectes. C’est « un urbanisme totalement tourné vers la voiture » qui, en plus de forcer les habitants à faire des kilomètres pour se rendre au travail, a « fait perdre aux enfants énormément d’autonomie », ajoute-t-elle.

Malgré ces critiques, l’attrait de la maison individuelle reste important. « Le désir de maison n’a pas faibli, il a même été réactivé par les confinements et l’étendue du télétravail », souligne Lucile Mettetal. Ainsi, 84% des personnes interrogées préféreraient vivre dans ce type de logement, selon un sondage Ifop de la Fédération française des constructeurs de maisons individuelles réalisé en mars et rapporté par Le Journal de l’Agence.

Si tous les Français, ou presque, ont le même rêve, ils n’habitent pas tous de la même façon. « Toutes les maisons ne se valent pas, souligne Lionel Rougé. On voit les classes supérieures investir les zones pavillonnaires, souvent construites dans les années 1970, qui sont désormais bien insérées dans le milieu urbain. » Ce « pavillon enchanté », comme l’appelle Hervé Marchal, a tout pour lui : il est connecté à la ville, aux transports en commun et aux services.

A l’inverse, les classes populaires peinent de plus en plus à trouver des maisons à prix abordable. « Ceux qui allaient dans le périurbain sont dorénavant forcés d’aller encore plus loin », résume Lionel Rougé, qui s’alarme de voir des ménages « s’installer à 70 km de Toulouse pour accéder à une maison ». « Ce pavillonnaire désenchanté va fréquemment de pair avec un ressentiment de ses habitants », résume le chercheur.

« Loin de tout, ils ont le sentiment d’être oubliés. Les façades en crépi, l’état des fenêtres sont autant de choses qui rappellent aux gens qu’ils sont moins bien lotis. »

Hervé Marchal, professeur de sociologie à l’université de Bourgogne à franceinfoCe sentiment d’exclusion, « l’un des moteurs derrière la colère des ‘gilets jaunes’ », rappelle Christine Leconte, pourrait encore s’exacerber avec l’augmentation des prix de l’énergie liée à la guerre en Ukraine. D’autant que les constructions neuves ont fortement ralenti en 2022, rapporte Le Monde. En cause, la poussée des coûts de construction, de 8,8% sur un an selon l’Insee, ainsi que la hausse des taux d’intérêts qui freine l’accession aux prêts immobiliers.

A ces difficultés conjoncturelles s’ajoute une problématique de long terme : celle de la transition écologique. Le pavillon et sa voiture quasi obligatoire semblent peu compatibles avec la lutte contre le réchauffement climatique. Et l’objectif de zéro artificialisation nette d’ici à 2050, inclus dans la loi Climat, risque bien de remettre en cause tout le modèle de développement urbain français. Le gouvernement veut d’ailleurs faire adopter un nouveau texte, pour préserver la biodiversité et empêcher l’étalement urbain en incitant la construction sur des friches ou des espaces vacants dans les villages. La future loi, pour l’instant votée par le Sénat, inquiète les maires de petites villes, qui craignent de ne plus attirer de ménages. Logique, souligne Hervé Marchal, « car pendant longtemps, la figure d’un bon maire a été celle de l’élu qui attirait sans cesse de nouveaux habitants ».

De quoi signer la fin du pavillon ? « Non », répond Lionel Rougé, pour qui l’on assiste « à un renouvellement du modèle pavillonnaire » plutôt qu’à sa mort. Pour se réinventer, les zones pavillonnaires vont donc devoir évoluer. « L’une des clés est la densification des zones périurbaines, souligne Christine Leconte. Il va falloir se préoccuper de l’intégration de ces zones dans le tissu urbain, rapprocher les gens des services publics et sortir du tout-voiture. » Une « clé de la transition écologique » qui demande de diversifier l’usage des zones pavillonnaires, pour en faire des lieux de vie.

Reste à savoir comment densifier. Lucile Mettetal distingue « la densification dure », qui remplace des zones pavillonnaires par des barres d’immeubles, à l’œuvre notamment en petite et moyenne couronne en Ile-de-France, comme le raconte Le Monde, de « la densification douce » : « Il s’agit d’une division des parcelles ou d’un remplissage des dents creuses. » Par exemple, un couple qui vend une partie de son jardin pour rénover sa maison achetée dans les années 1970.

Réenchanter la zone pavillonnaire ne se fera en tout cas pas sans ses habitants. « Nous n’avons pas d’autre solution que de travailler avec les personnes qui y habitent », met en garde Christine Leconte. « Il ne faut pas diaboliser les zones pavillonnaires, mais plutôt y mettre de la pensée urbaine, ajoute Lionel Rougé. Il faut réfléchir à une manière de les agencer et de les urbaniser qui soit démocratique. Les gens souhaitent de la ville à la campagne, il faut les laisser l’inventer. »

La France pourrait s’inspirer de certains de ses voisins européens, alors que « notre pays est le champion du mitage [l'implantation d'édifices dispersés dans un paysage naturel]« , s’exclame Hervé Marchal. Le chercheur suggère de regarder vers « le Royaume-Uni, où le pavillonnaire mitoyen est plus développé et intégré dans les villes ». Lucile Mettetal invite le législateur à se poser la question du partage de l’habitat : « On pourrait regarder en Allemagne, où les générations cohabitent plus fréquemment. »

Si la France n’en est pas encore à révolutionner son habitat, certaines envies semblent être en train d’évoluer, selon les observateurs et professionnels du secteur. Les jeunes ménages n’ont plus tout à fait les mêmes aspirations que leurs parents. « La place du jardin est toujours importante, mais il n’a pas besoin d’être très grand. Surtout, l’envie d’avoir une maison avec quatre faces est moins forte aujourd’hui et les ménages ne veulent pas être trop loin du centre-ville », souligne Lionel Rougé.

Est-ce un signe que le discours écologique est en train d’infuser ? « La réduction de la taille des maisons et des jardins est notamment liée à une question d’économies et de confort, mais quelque part, ça pénètre », pense Christine Leconte. Au législateur d’arriver à convaincre les Français de changer leurs aspirations, et de répondre aux contradictions qui poussent les ménages à « vouloir habiter à proximité de la nature, tout en étant intégrés au tissu urbain », résume Hervé Marchal.

Crise du logement : le pavillon remis en cause ?

Crise du logement : le pavillon remis en cause ?

par Fabien Jannic-Cherbonnel , France Télévisions

Un article intéressant mais qui milite quand même pour la densification et la sur urbanisation résultat d’un modèle qui favorise la mètropolitisation et les grandes villes. La question de l’aménagement du territoire avec un meilleur équilibre et une meilleure répartition de l’habitat et de l’emploi n’est pas posée. NDLR

Considéré comme « moche » par certains, le pavillon reste privilégié par les Français et les Françaises. Mais face aux objectifs de zéro artificialisation des sols et à l’envolée des coûts de construction, il est remis en cause. Une rangée de maisons, chacune au milieu d’un jardin, une route qui se termine en cul-de-sac, le tout dans la périphérie d’une ville, en bordure de champs. C’est, en une phrase, la façon dont on pourrait décrire le modèle pavillonnaire à la française, mis en place dans les années 1970. Accusé de rendre la France « moche » par le magazine Télérama en 2010, de grignoter les terres agricoles, de favoriser l’endettement des ménages et d’être incompatible avec la transition écologique, ce modèle est de plus en plus remis en cause.

« Il faut en finir avec la maison individuelle », avait même lancé Emmanuelle Wargon, alors ministre du Logement, en 2021, rappelle Le Figaro. Des propos qui avaient fait polémique, alors que la maison individuelle est encore vue comme un idéal par une large majorité des Français. Mais la future loi zéro artificialisation nette, qui empêchera théoriquement la création de lotissements sur des terres agricoles ou naturelles, risque de venir doucher ces aspirations. Et de signer la fin du pavillon, cette « passion française » selon l’expression des sociologues Hervé Marchal et Jean-Marc Stébé.

Rembobinons. Nous sommes au milieu des années 1970. Les autorités, après avoir fortement développé l’habitat collectif au sortir de la Seconde Guerre mondiale, décident de changer de braquet. « Ce que l’on appelle le modèle pavillonnaire est une construction politique et économique, mis notamment en place après l’élection de Valéry Giscard d’Estaing en 1977, et qui promet un logement à tous grâce à l’accession à la propriété », détaille Lionel Rougé, maître de conférences à l’université de Toulouse 2 et spécialiste du sujet.

Très vite, les lotissements fleurissent un peu partout en France, presque toujours en périphérie des villes. Eloignés des lieux de travail, des centres-villes ou des écoles, ces lotissements s’y font dortoirs et la voiture y est reine. La France « a choisi de s’inspirer du modèle américain », souligne Lucile Mettetal, géographe et chargée d’études et de projets à l’institut Paris Région. Les maisons y sont construites « au milieu d’un jardin », à l’inverse de ce qui se fait dans d’autres pays comme le Royaume-Uni ou l’Allemagne, où les maisons sont fréquemment mitoyennes. A la clé, la promesse d’un environnement sécurisant, où l’on peut s’épanouir en bricolant ou jardinant, à l’abri des regards des voisins.

Ce modèle, poussé par les politiques locales d’aménagement du territoire, mais aussi par des dispositifs nationaux comme le prêt à taux zéro depuis les années 1990, permet aux classes moyennes et populaires d’accéder à la propriété. Près de 62% des ménages français étaient ainsi propriétaires de leur résidence principale en 2020, contre 44% en Allemagne, d’après l’OCDE. Et parmi ces logements, la maison est reine : selon les derniers chiffres du ministère de la Transition écologique, 79% des ménages propriétaires habitent dans une maison.

Malgré son succès, le pavillon est la cible de critiques régulières, d’abord pour l’imaginaire qu’il charrie, comme Télérama dézinguant « la France moche ». La cible à abattre ? Ces longues rues bordées de maisons similaires, situées à l’entrée d’une commune et proches d’une zone commerciale. « Les zones pavillonnaires sont le symbole d’un monde urbain qui grignote la campagne », résume Hervé Marchal, professeur de sociologie à l’université de Bourgogne. Une contradiction forte pour un type d’habitat censé rapprocher ses habitants de la nature.

Au-delà de l’aspect esthétique, le modèle pavillonnaire est surtout critiqué pour son impact sur l’environnement. « Ce développement par zones – pavillonnaires, d’activités et commerciales – séparées est problématique », explique Christine Leconte, présidente de l’Ordre des architectes. C’est « un urbanisme totalement tourné vers la voiture » qui, en plus de forcer les habitants à faire des kilomètres pour se rendre au travail, a « fait perdre aux enfants énormément d’autonomie », ajoute-t-elle.

Malgré ces critiques, l’attrait de la maison individuelle reste important. « Le désir de maison n’a pas faibli, il a même été réactivé par les confinements et l’étendue du télétravail », souligne Lucile Mettetal. Ainsi, 84% des personnes interrogées préféreraient vivre dans ce type de logement, selon un sondage Ifop de la Fédération française des constructeurs de maisons individuelles réalisé en mars et rapporté par Le Journal de l’Agence.

Si tous les Français, ou presque, ont le même rêve, ils n’habitent pas tous de la même façon. « Toutes les maisons ne se valent pas, souligne Lionel Rougé. On voit les classes supérieures investir les zones pavillonnaires, souvent construites dans les années 1970, qui sont désormais bien insérées dans le milieu urbain. » Ce « pavillon enchanté », comme l’appelle Hervé Marchal, a tout pour lui : il est connecté à la ville, aux transports en commun et aux services.

A l’inverse, les classes populaires peinent de plus en plus à trouver des maisons à prix abordable. « Ceux qui allaient dans le périurbain sont dorénavant forcés d’aller encore plus loin », résume Lionel Rougé, qui s’alarme de voir des ménages « s’installer à 70 km de Toulouse pour accéder à une maison ». « Ce pavillonnaire désenchanté va fréquemment de pair avec un ressentiment de ses habitants », résume le chercheur.

« Loin de tout, ils ont le sentiment d’être oubliés. Les façades en crépi, l’état des fenêtres sont autant de choses qui rappellent aux gens qu’ils sont moins bien lotis. »

Hervé Marchal, professeur de sociologie à l’université de Bourgogne à franceinfoCe sentiment d’exclusion, « l’un des moteurs derrière la colère des ‘gilets jaunes’ », rappelle Christine Leconte, pourrait encore s’exacerber avec l’augmentation des prix de l’énergie liée à la guerre en Ukraine. D’autant que les constructions neuves ont fortement ralenti en 2022, rapporte Le Monde. En cause, la poussée des coûts de construction, de 8,8% sur un an selon l’Insee, ainsi que la hausse des taux d’intérêts qui freine l’accession aux prêts immobiliers.

A ces difficultés conjoncturelles s’ajoute une problématique de long terme : celle de la transition écologique. Le pavillon et sa voiture quasi obligatoire semblent peu compatibles avec la lutte contre le réchauffement climatique. Et l’objectif de zéro artificialisation nette d’ici à 2050, inclus dans la loi Climat, risque bien de remettre en cause tout le modèle de développement urbain français. Le gouvernement veut d’ailleurs faire adopter un nouveau texte, pour préserver la biodiversité et empêcher l’étalement urbain en incitant la construction sur des friches ou des espaces vacants dans les villages. La future loi, pour l’instant votée par le Sénat, inquiète les maires de petites villes, qui craignent de ne plus attirer de ménages. Logique, souligne Hervé Marchal, « car pendant longtemps, la figure d’un bon maire a été celle de l’élu qui attirait sans cesse de nouveaux habitants ».

De quoi signer la fin du pavillon ? « Non », répond Lionel Rougé, pour qui l’on assiste « à un renouvellement du modèle pavillonnaire » plutôt qu’à sa mort. Pour se réinventer, les zones pavillonnaires vont donc devoir évoluer. « L’une des clés est la densification des zones périurbaines, souligne Christine Leconte. Il va falloir se préoccuper de l’intégration de ces zones dans le tissu urbain, rapprocher les gens des services publics et sortir du tout-voiture. » Une « clé de la transition écologique » qui demande de diversifier l’usage des zones pavillonnaires, pour en faire des lieux de vie.

Reste à savoir comment densifier. Lucile Mettetal distingue « la densification dure », qui remplace des zones pavillonnaires par des barres d’immeubles, à l’œuvre notamment en petite et moyenne couronne en Ile-de-France, comme le raconte Le Monde, de « la densification douce » : « Il s’agit d’une division des parcelles ou d’un remplissage des dents creuses. » Par exemple, un couple qui vend une partie de son jardin pour rénover sa maison achetée dans les années 1970.

Réenchanter la zone pavillonnaire ne se fera en tout cas pas sans ses habitants. « Nous n’avons pas d’autre solution que de travailler avec les personnes qui y habitent », met en garde Christine Leconte. « Il ne faut pas diaboliser les zones pavillonnaires, mais plutôt y mettre de la pensée urbaine, ajoute Lionel Rougé. Il faut réfléchir à une manière de les agencer et de les urbaniser qui soit démocratique. Les gens souhaitent de la ville à la campagne, il faut les laisser l’inventer. »

La France pourrait s’inspirer de certains de ses voisins européens, alors que « notre pays est le champion du mitage [l'implantation d'édifices dispersés dans un paysage naturel]« , s’exclame Hervé Marchal. Le chercheur suggère de regarder vers « le Royaume-Uni, où le pavillonnaire mitoyen est plus développé et intégré dans les villes ». Lucile Mettetal invite le législateur à se poser la question du partage de l’habitat : « On pourrait regarder en Allemagne, où les générations cohabitent plus fréquemment. »

Si la France n’en est pas encore à révolutionner son habitat, certaines envies semblent être en train d’évoluer, selon les observateurs et professionnels du secteur. Les jeunes ménages n’ont plus tout à fait les mêmes aspirations que leurs parents. « La place du jardin est toujours importante, mais il n’a pas besoin d’être très grand. Surtout, l’envie d’avoir une maison avec quatre faces est moins forte aujourd’hui et les ménages ne veulent pas être trop loin du centre-ville », souligne Lionel Rougé.

Est-ce un signe que le discours écologique est en train d’infuser ? « La réduction de la taille des maisons et des jardins est notamment liée à une question d’économies et de confort, mais quelque part, ça pénètre », pense Christine Leconte. Au législateur d’arriver à convaincre les Français de changer leurs aspirations, et de répondre aux contradictions qui poussent les ménages à « vouloir habiter à proximité de la nature, tout en étant intégrés au tissu urbain », résume Hervé Marchal.

Logement : un enjeu de santé publique

Logement : un enjeu de santé publique

Par Yankel Fijalkow
Professeur, sociologue et urbaniste, Laboratoire LAVUE UMR 7218 CNRS, École nationale supérieure d’architecture de Paris Val de Seine (ENSAPVS) – USPC

Yaneira Wilson
Architecte – Docteure en Urbanisme, École nationale supérieure d’architecture de Paris Val de Seine (ENSAPVS) – USPC

Le gouvernement vient de proposer des mesures pour relancer la construction, la rénovation et l’accession à la propriété. Mais ces mesures prendront-elles en compte les pollutions que présentent certains habitats ? En effet on considère souvent – à tort – les logements comme des abris à l’écart des toxicités de la vie urbaine. Celles-ci sont par ailleurs élevées. Selon le The _Lancet_Planetary Health du 18 mai 2022, neuf millions de personnes meurent ainsi chaque année dans le monde à cause de la pollution, de l’air, de l’eau ou des sols soit trois fois plus que les morts cumulés des suites du sida, de la tuberculose et du paludisme. En Île-de-France, le nombre de décès évitable est estimé à 8000 par an.

Or, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a montré le rôle primordial de la qualité du logement dans la prise en charge de ces questions. Ainsi les maladies respiratoires et cardiovasculaires, les dépressions et le stress sont aussi à mettre en rapport avec la qualité de l’air et des matériaux, l’humidité, l’isolation phonique et thermique, le manque d’espace de nos logements.

Depuis une dizaine d’années, plusieurs équipes d’experts réfléchissent à la mise au point d’un index des qualités de l’habitat en matière de santé.

Cependant, les mesures établies par ces chercheurs, qu’il s’agisse de l’Indice de salubrité du logement (2014), Healthy Homes Barometer (2015), HEQI (2019), ou Domiscore (2020), considèrent peu la santé comme un état de bien-être physique et mental (définition de l’OMS de 1946), et ne s’intéressent pas aux immeubles ordinaires non classés comme insalubres.

De plus les études nécessitent de tenir compte des évolutions démographiques comme le vieillissement de la population, ou l’augmentation des familles monoparentales qui montrent que les qualités attendues de l’habitat sont aussi plurielles que liées à la santé physique et mentale (chutes, accidents domestiques, stress…).

La qualité architecturale des logements… sans la santé  !
Le problème de la qualité des logements est en effet général. Depuis une dizaine d’années, les architectes et les constructeurs réfléchissent à cette question. Après la loi Élan (2018) qui propose de « construire plus, mieux et moins cher », trois rapports officiels abordent le sujet.

Le rapport Lemas/Badia (2020), met l’accent sur la question des surfaces des logements sociaux, leur modularité et leur adaptabilité, leur luminosité et leur rapport à l’extérieur.

Le rapport Laurent Girometti et François Leclerq (2021) qui soutiennent « un référentiel destiné à améliorer la qualité d’usage des logements pour répondre aux nouveaux besoins des occupants et retrouver le désir d’habiter en ville ».

Le rapport de l’Institut des Hautes Études pour l’Action dans le Logement IDHEAL (2021) souligne la méconnaissance des usages et modes de vie de la part des concepteurs. Sur la base d’une analyse de 200 plans d’appartements construits depuis vingt ans, il constate une détérioration des surfaces aménageables dans les appartements, notamment la surface des pièces, les cuisines ouvertes, et les espaces extérieurs.

En 2021, le gouvernement a lancé un vaste appel d’idées et d’expérimentations sur « la qualité du logement de demain » et désigné une centaine de lauréats faisant l’objet d’un suivi scientifique et technique.

Cependant, dans ces consultations, la notion de santé n’apparaît pas ou peu, du moins de façon explicite. Ceci illustre les difficultés des deux domaines du logement et de la santé à dialoguer, ce qui n’a pas toujours été cas.

Le XIXe siècle correspond à l’entrée du logement comme question politique. En France, la loi sur l’habitat insalubre, adoptée en 1850, vise les appartements loués dont les caractéristiques sont « susceptibles de nuire à la vie ou à la santé des habitants ». En 1891, le docteur Jacques Bertillon, qui publie le premier recensement des conditions de logement et cartographie le surpeuplement des ménages, compare cette carte avec celle des décès (Bertillon, 1894).

Les architectes du mouvement moderne, guidé par Le Corbusier, mettront à profit ces constats. Au nom de l’hygiène, ils préconisent des logements aérés, lumineux et respectant des dimensions standardisées devant procurer à l’habitant un sentiment de bien-être et de confort.

De son côté, la statistique publique des conditions de logement se fonde depuis l’après-guerre sur la présence d’équipements sanitaires comme indice de salubrité. À partir de 2000, observant que plus de 90 % des logements sont équipés, des chercheurs de l’Insee ont montré que d’autres défauts affectent l’habitat et la santé.

Ainsi, la qualité de l’habitat ne se réduit pas à des dimensions techniques. Elle comprend la possibilité pour l’habitant de partir ou de déménager (principe de mobilité)  ; le principe d’adaptabilité du logement à tous les âges et cycles de la vie  ; le principe d’identité qui permet ou non à l’habitant de se reconnaître dans son lieu de vie et d’en parler (principe de narrativité).

Ces éléments correspondent à la notion de santé dans le sens de l’OMS (un sentiment de bien-être physique et mental) on peut étudier l’effet de la représentation par les habitants de leur habitat sur leur santé. La qualité des habitats peut-elle être évaluée à partir de la notion de santé  ?

La qualité des habitats peut-elle être évaluée à partir de la notion de santé  ? Tel est le projet du programme SAPHIR, soutenu par l’Agence Régionale pour la Santé. Il consiste en une recherche-action dans le cadre d’un partenariat entre le bailleur social Paris Habitat et IDHEAL.

Il s’appuie sur une typologie de 12 immeubles représentatifs, par leur taille, l’époque de construction du Nord-est parisien. Ils reflètent une gamme diversifiée de logements sociaux et très sociaux. Auprès des habitants de ces immeubles, il s’agit de mesurer la capacité des habitants à se saisir des questions d’habitat par le biais de la santé, qu’il s’agisse du chauffage, de l’humidité, de la qualité de l’air, des nuisances sonores, etc.

La recherche de la santé et le bien-être dans le logement sont ainsi des occasions d’évoquer le rapport des habitants à l’architecture qu’ils habitent, aux dispositifs techniques, et au gestionnaire.

Concrètement, dans chaque immeuble l’intervention des chercheurs correspond à plusieurs étapes  :

Un « café pédagogique » où les habitants sont abordés dans l’espace d’accueil au moyen d’une affiche grand format présentant la recherche et les affections probables dans le logement

Une campagne d’entretiens individuels amenant les locataires à expliciter leurs parcours résidentiels, leurs pratiques de l’habitat et du quartier, leurs difficultés et le lien qu’ils font ou non avec les questions de santé.

Un premier focus group d’habitants dressant des éléments de diagnostics et de bilan partagés sur la qualité des logements. Il développe, amplifie ou minimise les éléments apparus lors des entretiens individuels.

Un second focus avec les équipes techniques.

Les premiers résultats de la recherche montrent que si la préoccupation de la santé dans l’habitat se développe, elle n’aborde pas les mêmes thèmes selon les types d’immeubles et les phases du cycle de vie. De nouveaux critères de qualité de l’habitat émergent (comme la qualité de l’air, l’isolation phonique et thermique) à la fois plus subjectifs et techniques.

Des modalités de dialogues entre habitants et gestionnaires sont à inventer, les chercheurs ayant joué un rôle d’éveilleur, en posant la question de la santé comme un problème collectif. Cependant le rôle de la recherche ne s’arrête pas là. Elle consiste aussi à interroger les concepteurs, car si le consommateur d’aujourd’hui est exigeant à l’égard des produits qui lui sont proposés, il est permis de penser que l’habitant de demain le sera vis-à-vis de son cadre de vie.

Crise du logement : des propositions complètement cosmétiques du gouvernement

Crise du logement : des propositions complètement cosmétiques du gouvernement


Finalement le gouvernement commet une erreur d’appréciation grave en considérant que la crise du logement est seulement conjoncturelle et non pas structurelle. Un gouvernement qui oublie notamment de prendre en compte le coût énorme du foncier qui représente à peu près en moyenne la moitié du prix du logement. Le gouvernement a donc annoncé des mesures cosmétiques qui ne répondent pas à la crise fondamentale concernant aussi bien le neuf que la location. Le problème fondamental est en effet la perte de solvabilité d’un nombre croissant de candidats à l’accession du fait des taux d’intérêt, de l’inflation qui affecte le pouvoir d’achat et surtout de la folle envolée des prix (En 20 ans les prixont doublé mais le pouvoir d’achat des ménages n’a augmenté que de 40 ans). Côté location, l’offre est gelée du fait du prix exorbitant de la mise aux normes. Côté neuf, il y a un assèchement faute de solvabilité des acquéreurs potentiels. Le gouvernement aggrave en outre encore la situation avec l’objectif de zéro artificialisation des sols)

Cinq axes retenus par le gouvernement

Il s’agit de favoriser l’accession à la propriété, l’accès à la location, de soutenir la production et la rénovation des logements sociaux, de relancer la production de logements, et enfin d’amplifier la rénovation énergétique et thermique des logements du parc privé.

Au premier chapitre sur l’accession à la propriété, la mensualisation de la révision du taux d’usure sera prolongée « jusqu’à la fin de l’année » De même que les règles d’octroi du crédit immobilier vont être « assouplis » pour faciliter l’accès au crédit pour les primo-accédants et pour les investissements locatifs.

Aujourd’hui, les taux d’intérêt sont si élevés et mécaniquement les taux d’efforts si soutenus que plus de la majorité des demandes de prêt sont refusées par les banques. Réponse le 13 juin à l’issue de la réunion du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) qui fait la pluie et le beau temps.

En attendant, l’exécutif pense avoir trouvé la parade : le prêt à taux zéro (PTZ) ne s’arrêtera fin 2023 et sera prolongé jusqu’en 2027 mais dans deux cas de figure pour l’achat d’un bien neuf en immobilier collectif ou pour l’acquisition d’un habitat ancien en zone tendue, c’est-à-dire où la demande excède largement neuf, sous réserve de le rénover.

Pour favoriser l’accès à la location pour les classes moyennes, le cabinet d’Elisabeth Borne annonce que le logement locatif intermédiaire (LLI) sera ouvert à davantage de communes et au rachat de logements dans l’ancien pour les rénover. En cela, il ne fait que traduire en actes les paroles du chef de l’Etat dans Challenges qui avait invité à « regarder comment développer beaucoup plus de LLI pour baisser les prix, parce que la crise du logement se situe là ».

Par logement locatif intermédiaire, il faut entendre des habitats réservés à des populations trop riches pour accéder au logement social et trop pauvres pour acquérir du logement sur le marché libre, et qui ais restent aujourd’hui cantonnés à l’immobilier neuf et réservés aux zones A, A Bis et B1, des zones tendues où la demande prime sur l’offre.

La Première ministre assure aussi travailler sur une remise à plat de la fiscalité des locations pour favoriser les locations de longue durée, et ce alors qu’une proposition de loi transpartisane devait être examinée à l’Assemblée la semaine prochaine avant d’être reportée, et qu’une loi de la majorité présidentielle propose d’agir dessus pour faire baisser les prix dans les zones tendues. Par ailleurs, un rapport de l’Inspection générale des Finances préconise la fin des ristournes sur les meublés touristiques de courte durée.

Autre piste : une convention signée avec Action Logement, le premier bailleur social et le premier producteur de logements sociaux. Il va acquérir 30.000 logements en vente en état futur d’achèvement (VEFA) auprès des promoteurs immobiliers, mais à la différence de CDC Habitat qui en achète 17.000, les modalités de financement ne sont pas (encore ?) connues. Ce n’est pas tout, le gouvernement et l’organisme qui collecte la participation de l’employeur à l’effort de construction (PEEC) vont signer une convention visant à doubler le nombre de bénéficiaires de la garantie Visale, caution ouverte à tous les moins de 30 ans.

L’Etat sera lui-même « exemplaire », dit-on encore à Matignon. Il est question en effet d’accélérer la transformation du foncier de l’État et de ses opérateurs en faisant notamment évoluer les règles des Domaines pour contribuer à la modération des prix. Est-ce à dire que les ventes aux enchères seront interdites ? Rien n’est moins sûr…

Il est également prévu de lever les derniers freins juridiques pour favoriser la production de logements compatibles avec les objectifs de sobriété foncière pour accélérer la transformation des bureaux en logements par exemple. D’autant que le temps presse: à horizon 2031, la consommation foncière devra avoir diminué de moitié, avant d’être arrêtée d’ici à 2050 avec la politique de zéro artificialisation nette (ZAN) des sols.

Sauf que les freins sont avant tout financiers. Les propriétaires d’actifs en mutation continuent de s’acquitter de la taxe foncière et de la taxe d’équipement le temps des travaux, à la différence de ceux qui détruisent tout pour reconstruire aussi. La réponse viendra peut-être du « hors site » dont l’exécutif veut bâtir « une filière d’excellence ».

Dernier point : l’amplification de la rénovation énergétique et thermique des logements du parc privé. Comment ? En poursuivant le développement de Ma Prime Rénov « renforcée en moyens » avec un objectif de 200.000 rénovations « performantes », sans révéler ce que signifie concrètement cet adjectif.

Crise logement: La conséquence d’une urbanisation folle

Crise logement: La conséquence d’une urbanisation folle


Comme souvent, il y a bien sûrs plusieurs facteurs explicatifs pour tenter de comprendre la grave crise du logement qui se prépare et pourrait déboucher sur l’éclatement d’une bulle. En clair sur un effondrement de la production en même temps que des prix. Parmi les facteurs explicatifs, il faut surtout prendre en compte le coût du foncier qui en moyenne équivaut à peu près à la moitié du prix du logement. Des prix qui se sont envolés car la demande est surtout concentrée dans les métropoles et autres grandes villes où on a aussi concentré l’emploi. Du coup même à 10 ou 20 km du centre, le foncier a enregistré des augmentations qui d’une certaine manière tuent l’activité du logement. Des augmentations du foncier économiquement non fondées et qui sont le résultat de la pure spéculation.

Pour résoudre ce problème il faudrait évidemment remettre en cause la philosophie de la métropolisation qui a pour objet de concentrer la population dans 10 à 15  villes de plus d’un million d’habitants. Le reste du territoire étend abandonné aux moins favorisés contraints de faire des déplacements domicile travail de 40,60, voire 100 kms par jour. Ce qui est en cause c’est évidemment le concept d’aménagement du territoire.

Les mesures cosmétiques du gouvernement ne sont évidemment pas à la hauteur de l’enjeu. Les mesures cosmétiques du gouvernement ne sont évidemment pas à la hauteur de l’enjeu. La situation est problématique tant dans le neuf que sur le marché de la location. . Sur les trois premiers mois, les ventes de logements collectifs se sont effondrées de 34 % par rapport à la même période de l’année précédente. Et la chute atteint 46 % par rapport au premier trimestre 2019. Les acheteurs-habitants sont en très fort recul (- 31 %), mais c’est encore pire du côté des investisseurs (- 52 %). Cette dégringolade du marché du neuf a forcément ses conséquences sur l’activité des professionnels de la construction. La Fédération française du bâtiment (FFB) estime à 100.000 le nombre d’emplois menacés à un horizon de 18 à 24 mois.

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