Transports collectifs locaux : crise du financement
« La situation n’est pas tenable à terme. La hausse des recettes est inférieure à la hausse des dépenses », alerte le président de l’UTP (Union des transports publics) et PDG de l’opérateur Transdev Jean-Marc Janaillac. Entre 2002 et 2012, la fréquentation des transports publics a augmenté de 27%, mais, sur la même période, le prix moyen d’un ticket à l’unité, sur les réseaux de province, a chuté de 4,4% en euros constants. En règle générale, les collectivités paient les investissements de départ (aménagement et matériel), puis, financent le déficit d’exploitation. »Pour la première fois au premier semestre 2013, l’offre kilométrique a baissé. La variable d’ajustement a été la diminution de l’offre », ajoute Aurélien Braud, directeur marketing de Keolis, filiale de la SNCF. Le montant des besoins de financement des transports urbains en 2011 était de 7,5 milliards d’euros, estime le GART (Groupement des autorités responsables de transport), présidé par le sénateur-maire (PS) de Strasbourg Roland Ries, qui organise avec l’UTP les 24es Rencontres nationales du transport public, de mercredi à vendredi à Bordeaux. Extension des réseaux vers des zones péri-urbaines, hausse des coûts liée à une technicité plus élevée, mais aussi diminution du financement public aux collectivités: autant de facteurs pour expliquer une situation financière difficile, face à une demande en hausse permanente. Ainsi un client ne paie que 31,5% du coût total de son trajet, le reste étant supporté par les collectivités. Selon Jean-Pierre Farandou, président du groupement d’intérêt économique (GIE) Transports publics, qui regroupe UTP et GART, et président de Keolis, « il y a une vingtaine d’années, les clients payaient 50% du coût de leur transport ». Pour tenter d’inverser la tendance, GART et UTP préconisent trois leviers: hausse des tarifs, aménagements urbains qui facilitent le fonctionnement des transports publics, et offre plus attrayante. »Il faut augmenter les tarifs, c’est le levier que nous privilégions. A minima suivre l’inflation », estime Aurélien Braud. Jean-Pierre Farandou suggère de « faire payer les gens en fonction de ce qu’ils peuvent payer », citant l’exemple de Strasbourg, où, depuis un an, les tarifs ont globalement augmenté, mais sont désormais déterminés selon le revenu de l’utilisateur. Ainsi, le prix d’un abonnement mensuel s’étale de 2,6 à 43 euros par mois. Une expérience réussie, selon lui : « il y a eu une progression de trafic, et une hausse de revenu ». »L’utilisation des transports publics n’est pas déterminée par le prix mais par l’offre », affirme Jean-Marc Janaillac. L’amplitude horaire, la fréquence, le confort et la régularité doivent donc progresser, estiment les deux organisations, qui plaident également pour la multiplication des couloirs de bus, afin d’accroître la vitesse et de rendre ces transports plus attractifs. Des solutions de transport à la demande, qui évitent que des bus ne roulent à vide, existent déjà, et doivent être développées, souligne Jean-Pierre Farandou. Pour la FNAUT, une fédération d’usagers, via son vice-président Jean Sivardière, « pas besoin, sous prétexte du droit au transport, d’étendre la gratuité à tous les usagers ». »La gratuité prive de recettes les transports publics au moment où il faudrait (les) développer. (…) Il est possible de diminuer les coûts de production des transports publics », à travers des voies réservées, a-t-il encore souligné. Leur credo: faire baisser l’attractivité de la voiture par rapport aux transports en commun.