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Le ministre de l’économie : » pour des augmentations d’impôts limitées »

Le ministre de l’économie : » pour des augmentations d’impôts limitées »
Le ministre de l’Economie Eric Lombard estime qu’il « peut y avoir des discussions sur des hausses d’impôts, qui devront être très limitées », dans une interview à la Tribune Dimanche, tandis qu’il faudra « des économies supplémentaires » et que le déficit sera prévu « un peu au-dessus de 5% » du PIB pour « protéger la croissance ».

 

 

Dans cette interview, le ministre a fait savoir qu’il souhaitait inviter tous les partis politiques représentés au Parlement à venir dialoguer à Bercy dans les prochains jours, pour favoriser l’adoption d’un budget, a-t-il annoncé samedi.

« À la demande du Premier ministre, je vais appeler les partis politiques représentés à l’Assemblée nationale et au Sénat, ainsi que les groupes parlementaires, à venir dialoguer au ministère avec Amélie de Montchalin, la ministre des Comptes publics, et moi-même », assure le ministre dans une interview à la Tribune Dimanche.

« Je les contacterai (…) à partir de demain matin. En partageant les informations sur la réalité de la situation, je ferai tout mon possible pour qu’un budget soit adopté », assure-t-il.

Le souhait de se concerter avec les partis politiques est louable. Reste que les extrêmes et même le parti socialiste pourraient bien être tentés de préférer le chaos plutôt que de rétablir une certaine « stabilité » financière. Et de toute manière, les marges de manœuvre sont particulièrement étroites pour le nouveau ministre de l’économie. Sans doute encore plus étroites que celle de Barnier. Il y a d’abord  la croissance qui sera encore davantage en retrait donc les recettes fiscales aussi ( à taux de prélèvements obligatoires égal). Concernant les impôts, le nouveau ministre de l’économie ne pourra pas plomber davantage les entreprises et la consommation. Les entreprises devraient au contraire être relativement épargnées  pour ne pas affecter davantage la compétitivité et l’emploi . Et de la même manière la consommation déjà très morose et qui soutient la croissance ne peut pas non plus être plombée par de nouveaux prélèvements. Reste alors le déficit dont on va annoncer qu’il ne dépassera pas 5 % mais qui attendra sans doute les 6 %, comme en 2024. Et on fera des promesses d’économie sur le train de vie de l’État et des collectivités locales qui ne seront pas toutes tenues loin s’en faut !

Limites de la Cop 29: pourquoi ?

Limites de la Cop 29: pourquoi ?

 

Les débats âpres auxquels cette conférence annuelle a donné lieu ont mis en évidence une fragilisation de la diplomatie climatique. Les pays développés ont opposé l’ampleur de l’effort financier demandé à une conjoncture économique et politique défavorable. ( papier du Monde)

 

La conclusion dans une grande confusion, le 24 novembre, de la 29e Conférence des parties sur le climat (COP29), organisée à Bakou (Azerbaïdjan), doit être considérée pour ce qu’elle est : un signal d’alarme. L’accord obtenu de justesse permet certes de ménager les apparences. En mettant en avant les 300 milliards de dollars (287 milliards d’euros) d’aide annuelle promis à l’horizon 2035 aux pays les plus pauvres, qui sont les plus touchés par les effets du changement climatique, les pays développés ont également beau jeu de mettre en avant le triplement, par rapport à leurs engagements précédents, d’une contribution qui ne repose cependant que sur le volontariat.

Il n’empêche. Les débats âpres auxquels cette conférence annuelle a donné lieu ont surtout mis en évidence une fragilisation de la diplomatie climatique, rattrapée par les mêmes effets corrosifs qui minent les autres outils du multilatéralisme. Donald Trump, dont l’ombre a plané sur Bakou et qui prendra place dans le bureau Ovale de la Maison Blanche le 20 janvier 2025, les incarne mieux que quiconque : nationalisme étriqué, primauté de l’unilatéralisme et négation de la réalité même du changement du climat et du lien avec les activités humaines.

L’affrontement Nord-Sud qui s’est matérialisé lors de cette conférence des Nations unies repose sur une équation devenue très difficile à résoudre. Plus les efforts prendront du retard dans la transition énergétique des pays en développement comme dans leur adaptation aux conséquences du changement climatique, plus les besoins vont grandir. C’est la raison pour laquelle ces pays ont campé sur des montants d’aide bien supérieurs aux 300 milliards de dollars qui constituent pourtant le point d’arrivée des négociations, critiquées avec virulence dans les secondes qui ont suivi leur conclusion.

Le petit groupe de pays développés a opposé l’ampleur de l’effort demandé de leur part, reflet de leur responsabilité historique dans la dette climatique à laquelle le monde est confronté, à une conjoncture économique et politique défavorable. Le ralentissement de la croissance, qui entraîne déjà des coupes claires dans leurs programmes d’aides, se double en effet d’un mouvement de contestation dans une partie de leurs opinions publiques contre la légitimité de tels engagements.

Cette bataille sur l’aide n’est pas le seul motif de déception. Un an après la Conférence des parties sur le climat de Dubaï, l’objectif d’une transition écologique hors des combustibles fossiles est resté au stade de l’incantation. Le travail de sape de l’Arabie saoudite et de la Chine a empêché toute avancée concrète. La défiance qui s’est exprimée à Bakou oblige même à considérer un rare point positif avec prudence.

Les règles régissant les marchés du carbone, c’est-à-dire les échanges d’émissions de CO2 entre pays et entreprises, ont enfin été adoptées après presque neuf ans de négociations, mais sans que leur application soit accompagnée d’outils de contrôle adéquats et de la transparence nécessaire.

Survenant juste après l’échec de la COP sur la biodiversité de Cali (Colombie), qui avait déjà achoppé sur la question des financements, les résultats pour le moins mitigés de Bakou font que le prochain rendez-vous prévu en 2025 à Belem, au Brésil, pourrait avoir des allures de quitte ou double pour le climat.

Les limites du SMIC sur la pauvreté des salariés

 

Les limites du SMIC sur la pauvreté des salariés

 

La poussée inflationniste qu’a connue la France en 2022-2023, rappelle qu’une part conséquente des personnes, qui pourtant occupent un emploi, ne parviennent que difficilement, et au prix de nombreuses privations, à atteindre la fin du mois. Certains croyaient la France en partie protégée du phénomène des « travailleurs pauvres » grâce à un salaire minimum dont les mécanismes d’indexation lui évitent de stagner ou de décrocher du reste des salaires. Le smic joue un rôle important pour éviter une course vers des rémunérations toujours plus basses. Mais il ne suffit pas à résoudre la question des bas salaires.

 

par 

  1. Professeur de Sciences économiques, Université de Lille
  2. Maître de conférences en Sciences Economiques, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne dans The Conversation 

D’emblée, des dérogations permettent d’offrir un salaire horaire en deçà du smic. Les apprentis mais aussi les assistantes maternelles forment les bataillons les plus importants de salariés dans cette configuration. Si un ministre a pu déclarer qu’elles gagnaient trois fois le smic, en réalité, leurs (parents-) employeurs peuvent les payer un tiers du smic lorsqu’ils ne font garder qu’un enfant et c’est le cumul de 3 enfants gardés qui conditionne leur accès à un salaire horaire supérieur au smic (Cresson et coll., 2023). Les travailleurs « indépendants », censés être à leur propre compte, comme le sont l’immense majorité des chauffeurs de VTC ou les livreurs à vélo (voir par exemple Lebas, 2020), ne sont pas non plus protégés par le smic.

Au-delà de ces situations spécifiques et légales, des travailleurs sont rémunérés en deçà du smic horaire du fait de comportements frauduleux. Ces situations sont plus fréquentes dans certains secteurs comme l’agriculture, les services à la personne, la restauration, le bâtiment où le travail informel peut être mobilisé. La question du contournement du salaire minimum n’est pas anecdotique : elle donne lieu, dans les pays anglo-saxons à toute une littérature sur le « vol de salaire » (e.g. Kim et Allmang, 2021).

Au total, en France, environ 5 % des salariés de 25 à 65 ans (donc sans les apprentis) ont une rémunération horaire inférieure au salaire minimum… Le processus de collecte des données peut donner lieu à des erreurs. Mais la concentration des cas dans des métiers bien spécifiques (assistantes maternelles, aides à domicile et salariés des services à la personne, les salariés du commerce et de l’hôtellerie-restauration et enfin les nettoyeurs) met à mal l’hypothèse d’un nettoyage insuffisant de la base de données et laisse penser qu’il s’agit bien de situations réelles de non-application d’un salaire horaire minimal que ce soit en raison de dérogations légales ou de pratiques frauduleuses.

L’incapacité du smic à protéger contre des revenus insuffisants tient bien plus fortement au fait que le minimum est défini sur une base horaire alors que le niveau de vie est déterminé sur une base mensuelle, voire annuelle. La rémunération mensuelle dépend à la fois du salaire horaire ET du nombre d’heures de travail durant le mois. Or le temps partiel se concentre sur un petit nombre de métiers dont les taux horaires sont très proche du smic. Les journées y sont fragmentées : elles commencent tôt, finissent tard mais elles demeurent courtes sur la fiche de paie. L’exemple typique est celui des agents d’entretien travaillant de 6h à 9h puis de 18h à 20h soit 25 heures rémunérées par semaine pour des journées de 14 heures… Ce qui débouche sur un salaire mensuel inférieur à 1000€ sans possibilité de travailler plus (Devetter et Valentin, 2024).

Les aides à domicile, de nombreux salariés du commerce ou de l’hôtellerie-restauration connaissent des situations proches. Ces temps partiels, on le voit, sont loin de faciliter l’articulation des temps familiaux et professionnels. Ils résultent bien plus d’une organisation de l’activité permettant un décompte restrictif de ce qui est considéré comme du travail, en excluant en particulier les temps de pause, de préparation ou de déplacement nécessaires à l’accomplissement du travail. Au total, ce sont environ 16 % des salariés qui, selon l’enquête emploi de 2019, se retrouvent avec un salaire inférieur au smic mensuel. Parallèlement, des temps de travail annuels insuffisants naissent de situation d’instabilité et/ou de la faiblesse de la durée des contrats, notamment en raison de CDD de courtes ou très courtes durées.

_Lecture : parmi l’ensemble des salariés, 1 021 609 personnes appartiennent aux métiers du soin et de l’accompagnement. Parmi elles, 66 % ont un salaire mensuel inférieur au smic mensuel. Elles représentent par ailleurs 20 % des salariés percevant un salaire sous le smic mensuel. Enfin, 50 % d’entre elles touchent un salaire inférieur à 1000 euros. Champ : salariés de 25 à 65 ans. _

Ces situations problématiques le seraient moins si elles relevaient d’une étape d’insertion très transitoire. Or l’absence de progression salariale est particulièrement forte dans les professions où se concentrent les salariés rémunérés à un taux horaire proche du smic. Plus de 50 % des agents d’entretien, des assistantes maternelles, des aides à domiciles, des caissiers, etc. touchent des salaires inférieurs à 1,2 smic. Et dans ces métiers, les perspectives d’évolution sont quasi inexistantes : les compétences sont peu reconnues, l’expérience n’est pas perçue comme développant la productivité, la mobilité professionnelle est, de fait, inexistante. Non seulement les salaires sont bas mais les perspectives de les voir progresser n’existent pas. Les nombreuses mesures d’exonération de cotisations sociales y contribuent : elles ont favorisé le développement des emplois à bas salaires et des modèles organisationnels « low cost » (Palier, 2024) et constituent un frein à l’augmentation salariale.

Le cumul de ces facteurs explique que des pans entiers de la population en emploi se retrouvent coincés avec des salaires mensuels faibles, d’autant que le smic, même à son niveau mensuel, ne permet pas de vivre décemment, en particulier dans le cas des familles monoparentales (Lanseman, 2024), comme le font apparaître les travaux de Pierre Concialdi. Celui-ci souligne en outre que la progression du smic est particulièrement faible en France : « entre janvier 2014 et janvier 2024, la France est le pays où la hausse du salaire minimum a été la plus faible de tous les pays de l’Union européenne ».

En effet, le smic fait l’objet d’une réévaluation annuelle sur la base de l’inflation et de l’évolution du salaire de base des ouvriers et employés. Des « coups de pouce » peuvent être proposés par le gouvernement sur la base du rapport élaboré par le groupe d’experts du smic, mais depuis de nombreuses années maintenant, ce comité s’y oppose. Les politiques préfèrent soutenir le pouvoir d’achat via des prestations sociales conditionnées à l’emploi, comme en témoignent les hausses de la prime d’activité qui ne concernent qu’une partie des travailleurs à bas salaire et qui évitent de questionner la valeur du travail).

Comment alors impulser une hausse des salaires pour ces professions ? La piste la plus directe passe par une revalorisation des minima conventionnels d’autant plus que certaines branches affichent des minimas conventionnels inférieurs au smic. Une négociation sur les temps liés au travail dans ces branches professionnelles paraît également nécessaire. Mais cet objectif se heurte aux inégalités majeures entre partenaires sociaux. Et cela, d’autant plus que dans bien des cas (propreté, sécurité, services à la personne, etc.) les employeurs peuvent rejeter la responsabilité de la dévalorisation du travail sur les clients finaux qui ne prennent pas part aux négociations et poussent la concurrence par des durées de contrats faibles. Une réelle revalorisation de ces métiers nécessiterait une délibération sociale pour une reconnaissance de la valeur sociale de ces activités sous-rémunérées (Devetter et Valentin, 2021).

Mais des leviers de changements plus immédiats peuvent être envisagés et dépendent assez directement des pouvoirs publics. Par la tarification, ils fixent en grande partie le salaire des aides à domicile (via le rôle des départements) et des agents de service hospitaliers. Par l’encadrement de la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje), ils influencent fortement la rémunération des assistantes maternelles. Par les marchés publics, ils déterminent les salaires des agents d’entretien ou de sécurité, la commande publique représentant 25 % du chiffre d’affaires des entreprises qui les emploient. Plus globalement, la diversification et la flexibilisation des temps de travail rendent nécessaire d’ouvrir le vaste chantier d’une nouvelle régulation des temps de travail : encadrement des temps partiels, clarification et extension de la définition des temps commandés par le travail, valorisation des temps atypiques (au-delà de la nuit et du dimanche), réglementation limitant les possibilités de fragmenter les journées de travail (Alexander et Haley-Lock, 2015) ou encore un plus grand encadrement voire une pénalisation de l’usage de contrats très courts sont des pistes à explorer pour redonner au smic une partie de son sens originel, à savoir protéger les salariés de la pauvreté.

Déclaration de politique générale : Les limites de l’exercice de Barnier

Déclaration de politique générale : Les limites de l’exercice de Barnier

interview de ,Professeur émérite des Universités en histoire contemporaine, Université Rennes 2 dans The Conversation 

Dans quel contexte politique s’inscrit ce discours de politique générale ?

Ce discours de Michel Barnier est l’aboutissement d’une séquence qui s’ouvre avec un double échec du président de la République. En juin, ce dernier a perdu les élections européennes, puis perdu son pari de la dissolution rejouant l’affrontement entre néolibéraux européistes et nationalistes identitaires. Son échec tient au fait que les gauches, contre toute attente, font l’union autour du Nouveau Front populaire.

À partir de là, en refusant à la gauche de gouverner, Emmanuel Macron se retrouve nécessairement lié à LR et au Rassemblement national. Michel Barnier est la bonne personne pour cette jonction puisqu’au moment de la primaire interne des LR, il avait annoncé un moratoire sur l’immigration et pris des positions proches de celles défendues par le RN.

Comment avez-vous perçu le discours de Michel Barnier devant l’Assemblée ?

Michel Barnier est un vieux routier de la politique qui sait garder son calme même lorsqu’il y a beaucoup de bruit au Parlement – et ce fut le cas ce mardi. L’homme est solide, il sait faire face, négocier. Il a mis son style au service de sa méthode qui est le dialogue. De toute façon, il ne peut pas faire autrement puisqu’il n’a pas de majorité. Mais selon moi, le point plus important dans ce discours, c’est la contradiction entre le constat – effondrement des services publics, dette financière colossale, dette écologique – et les moyens que Michel Barnier propose pour en sortir.

La situation actuelle de la France me fait penser à la situation du Royaume de France en 1788. Le budget était en déficit, la dette colossale. Cette situation s’expliquait à l’époque par le fait que les gens les plus riches, noblesse et clergé, ne payaient pas d’impôts. On est aujourd’hui dans une situation de déficit considérable parce que depuis 2017 – et même depuis Raymond Barre en 1976 – les plus riches ne payent pas ce qu’ils doivent payer. Et à partir de là, les déficits se sont progressivement creusés. Sans réforme fiscale de fond, il ne peut pas y avoir de sortie de cette crise.

Que pensez-vous de la contribution des plus grandes entreprises voulue par Michel Barnier ?

Certains journaux ont parlé de huit milliards de prélèvements, ce qui est très insuffisant. Par ailleurs, cet impôt sera exceptionnel, sur une seule année. Michel Barnier dit que les deux tiers de l’effort pour réduire le déficit budgétaire consistera en de la réduction des dépenses, donc de l’argent affecté aux services publics, à l’école ou à la santé. L’effort demandé aux très grandes entreprises apparaît comme un petit geste de compensation.

Le discours du premier ministre a commencé par un hommage à Philippine, jeune femme assassinée par un étranger sous OQTF. Que signifie ce choix ?

IL est dramatique que cette jeune femme ait été violée et assassinée. Mais de nombreuses autres femmes sont malheureusement violées et assassinées en France par des hommes qui ne sont pas des étrangers ni sous OQTF. Ce crime est donc utilisé politiquement pour dire qu’il faut expulser davantage d’étrangers. C’est un geste en direction du Rassemblement national. On voit bien que sur les questions d’immigration, les objectifs énoncés par Michel Barnier – allongement de la durée de rétention administrative pour les étrangers, rétablissement des frontières nationales, etc. – sont dictés par le RN.

Les déclarations récentes de Bruno Retailleau affirmant au Journal du Dimanche de Vincent Bolloré que « l’état de droit n’est pas intangible ni sacré », rappellent étrangement celles de l’extrême droite. Rappelons que cela dure depuis Pasqua en 1986, avec le rapatriement des Maliens par charter. La droite française a joué cette stratégie avant que le Front national ne soit puissant. Dès 1977, Lionel Stoléru, ministre de l’immigration, expliquait que chômage des Français et immigration étaient liés. Le lit du FN a été creusé par la droite giscardo-chiraquienne.

En vérité, des millions d’emplois ont été détruits pour les classes populaires du fait de la mondialisation néolibérale. Et, pour détourner l’attention de ce problème, on stigmatise les étrangers – ceux-là mêmes dont on avait besoin lorsqu’on n’avait pas assez de main-d’œuvre au temps des trente glorieuses.

Michel Barnier veut aussi rétablir le contrôle aux frontières et contrôler l’immigration…

C’est la suite des concessions faites au RN qui ne cessent de se multiplier depuis des années, notamment avec Gérald Darmanin. Michel Barnier prétend contrôler l’immigration mais rien ne peut stopper les étrangers qui viennent en France ou en Europe : ces gens sont prêts à mourir pour fuir leur pays.

La seule solution valable serait de trouver des moyens pour que les personnes ne partent pas et pour cela il faut arrêter de soutenir les dictatures et avoir une politique de développement à rebours de la mondialisation financiarisée. Dans les années 2000, il y avait moins de Maliens qui venaient en France parce qu’il y avait une politique de soutien aux femmes agricultrices en lien avec les ONG et l’État. Finalement, tout ça a été abandonné par les gouvernements successifs à partir de Nicolas Sarkozy, avant que les djihadistes ne liquident ces associations.

Comment interprétez-vous la réaction de Marine Le Pen au discours de Michel Barnier.

Marine Le Pen, c’est la corde qui tient le pendu. Tout en envoyant des compliments au Premier ministre et à son ministre de l’intérieur, elle a dit qui allait surveiller le gouvernement, lui imposer son point de vue ou le faire tomber.

Michel Barnier a annoncé vouloir dialoguer avec les partenaires sociaux sur les retraites progressives, l’égalité entre les femmes et les hommes, l’emploi des seniors. Pensez qu’il y aura des gestes significatifs ?

S’il s’agit de confier une nouvelle mouture de la réforme des retraites à une négociation entre le Medef et les syndicats de salariés, cela n’aboutira pas puisque le Medef soutient la réforme des retraites. Peut-être y aura-t-il des gestes pour les métiers pénibles, l’égalité homme-femme, mais pour l’instant, aucune précision n’est donnée.

Michel Barnier a clairement défendu l’IVG, le mariage pour tous, la PMA. À qui étaient adressés ces messages ?

Michel Barnier a choisi cette position ferme contre Bruno Retailleau et contre les ministres LR liés à la Manif pour tous. On voit que sa situation est compliquée, pris entre les positions de certains ministres et la force principale de sa majorité constituée par Renaissance et le MoDem qui ont une approche différente de ces questions « sociétales ». Il doit donner des gages aux uns et aux autres.

La séquence à venir semble très fermée, avec un gouvernement extrêmement fragile qui peut chuter à tout moment. Quelle pourrait être l’issue ?

Le gouvernement Barnier est cerné de toutes parts, son sort semble condamné à terme. Vu qu’il est impossible de dissoudre l’Assemblée avant juin 2025, la seule solution à cette situation politique intenable serait que le président de la République démissionne. Mais s’il démissionnait, Marine Le Pen serait bien placée pour l’emporter.

Économie : rôle et limites de la dette publique

Économie : rôle et limites de la dette publique

 

La dette publique est souvent perçue comme un élément incontournable des politiques économiques modernes. Elle agirait comme un relais naturel de la dette privée dans un contexte où l’épargne globale dépasse l’investissement. Mais cette perception mérite d’être nuancée, car elle repose sur plusieurs hypothèses qui peuvent être remises en question. À première vue, la dette publique semble remplir une fonction cruciale dans une économie où l’épargne globale, tant celle des ménages que des entreprises, dépasse les besoins d’investissement. En effet, les entreprises, tout comme les ménages, sont souvent en position de créanciers nets. Cette situation génère un surplus d’épargne qui doit être absorbé par d’autres acteurs économiques, notamment les gouvernements, qui peuvent emprunter ces fonds pour financer des dépenses publiques.

 

par

Économie : rôle et limites de la dette publique
par Serge Besanger
Professeur à l’ESCE International Business School, INSEEC U Research Center, ESCE International Business School,  consulting expert au Fonds Monétaire International (FMI) dans The Conversation . 

Ce mécanisme, en apparence, confère à la dette publique un rôle stabilisateur : elle permet de recycler l’excès d’épargne sous forme de dépenses publiques, stimulant ainsi l’économie et évitant une stagnation due à un manque de demande. Cependant, cette approche fait abstraction des effets secondaires et des comportements anticipateurs des acteurs économiques.
Une autre explication possible du surplus d’épargne provient de ce que l’on appelle l’équivalence ricardienne. Selon cette théorie, les ménages et les entreprises anticipent des hausses futures de la fiscalité en réponse à l’augmentation de la dette publique. Ils épargnent donc davantage aujourd’hui en prévision de l’augmentation future des impôts, nécessaire pour rembourser cette dette. En conséquence, ce surcroît d’épargne n’est pas nécessairement un excès, mais une réponse rationnelle à la politique budgétaire actuelle trop dépensière.
Ce phénomène peut créer un cercle vicieux : les entreprises épargnent « trop » par crainte d’une future hausse des impôts, ce qui limite l’investissement privé, renforce le rôle du gouvernement dans l’économie et justifie encore davantage l’endettement public. En d’autres termes, loin d’être une solution indispensable, la dette publique pourrait en réalité être un symptôme de comportements économiques anticipatifs. Son rôle de relais nécessaire pour soutenir la demande globale serait partiellement en trompe-l’œil.

Les dangers d’une dette publique trop élevée
Quelle que soit l’explication retenue pour justifier l’existence de la dette publique, il est indéniable que des niveaux trop élevés de dette posent des risques importants pour l’économie d’un pays. Parmi les effets bien connus d’une dette publique excessive, on trouve :

le coût croissant du service de la dette : lorsque la dette augmente, les paiements d’intérêts deviennent une part de plus en plus importante du budget de l’État, réduisant ainsi la marge de manœuvre pour financer d’autres priorités (régaliennes, éducation, santé, infrastructures…) ;

le risque de crise de confiance : si les marchés perdent confiance dans la capacité d’un État à rembourser sa dette, cela peut entraîner une augmentation des taux d’intérêt, accentuant encore davantage le coût de la dette et pouvant mener à une crise budgétaire ;

enfin un effet d’éviction sur l’investissement privé : une dette publique excessive peut avoir pour effet de « chasser » les investissements privés, car les fonds disponibles pour prêter aux entreprises sont absorbés par le financement de la dette publique.

 

Certains seuils devraient alerter les décideurs, toutes choses égales par ailleurs :

tout d’abord, le ratio de la dette publique au PIB : un ratio supérieur à 60 % est souvent considéré comme un seuil préoccupant. Cela signifie que la dette publique représente plus de la moitié de la production économique annuelle d’un pays ;

le ratio des intérêts de la dette sur les recettes publiques : si ce ratio dépasse 10 %, cela indique que plus de 10 % des recettes fiscales sont consacrées au paiement des intérêts de la dette, limitant ainsi la capacité d’investissement de l’État ;

le rapport entre la croissance des dépenses publiques et la croissance économique : si les dépenses publiques augmentent plus rapidement que la croissance du PIB sur plusieurs années, cela peut signaler un risque de déséquilibre budgétaire et une accumulation insoutenable de la dette.

De ces trois points de vue, la dette française est jugée préoccupante, notamment du point de vue de l’équité générationnelle.

Les dangers d’une dette publique « trop faible »
La dette publique est donc souvent perçue sous un angle négatif, associée à des risques de surendettement, de crise budgétaire et de charges d’intérêts élevées. Cependant, il ne faut pas oublier que la dette publique, lorsqu’elle est gérée de manière prudente, peut jouer un rôle clé dans le bon fonctionnement de l’économie d’un pays. Une dette publique trop faible – ou son absence – peut également comporter des risques et priver un État d’un levier important pour gérer l’économie.

 

Pis encore, une dette publique faible, ou l’absence de dette, n’est pas nécessairement un signe de bonne santé économique. Une dette publique trop faible limite les possibilités de financement de projets régaliens, d’infrastructure, d’éducation, de recherche ou de santé. Ces investissements sont pourtant essentiels pour le développement économique à long terme. Sans dette, l’État peut être contraint de financer ces projets uniquement via des recettes fiscales, ce qui peut entraîner une augmentation des impôts ou une diminution des investissements, freinant ainsi la croissance.

La dette publique permet aux gouvernements de répondre rapidement en cas de crise économique, comme une récession, une pandémie, ou une catastrophe naturelle. Sans la possibilité de s’endetter, un pays serait contraint de réduire ses dépenses ou d’augmenter ses impôts en pleine crise, aggravant la situation. La dette publique sert donc de levier pour soutenir la demande globale et éviter des effets récessifs trop sévères.

France versus Paraguay
Une dette publique trop faible peut également engendrer des déséquilibres sur les marchés financiers. Les obligations d’État jouent un rôle crucial en tant qu’actifs sûrs, offrant aux investisseurs une source de stabilité dans un environnement financier souvent volatile. Ainsi, la France maintient un niveau de dette publique élevé, ce qui lui permet d’émettre régulièrement des obligations d’État. Cette politique assure une liquidité sur le marché et permet aux investisseurs de se tourner vers ces actifs sûrs en période d’incertitude.

Dans le cas de l’Équateur et du Paraguay en revanche, pays où le niveau de la dette publique est compris entre seulement 30 et 40 % du PIB, l’émission d’obligations est plus irrégulière, et les investisseurs ne trouvent pas suffisamment d’actifs sûrs pour diversifier leurs portefeuilles. Cette situation mène à une volatilité accrue, car les investisseurs cherchent des alternatives, souvent dans des actifs plus risqués.

En somme, tandis qu’une dette publique excessive peut « chasser » les investissements privés et nuire à l’économie dans son ensemble, une dette trop faible peut également déséquilibrer les marchés financiers en réduisant l’offre d’actifs sûrs. Il est donc crucial de trouver un équilibre approprié qui permette de soutenir la croissance économique tout en maintenant la stabilité financière.
Banque de France.
La dette publique est un outil puissant pour stimuler l’investissement et la demande, notamment en période de récession. Lorsque le secteur privé réduit ses investissements, l’État peut intervenir en augmentant ses dépenses publiques, financées par l’emprunt, pour maintenir l’activité économique et limiter les effets d’une crise. Cela permet également de stabiliser l’emploi et d’éviter une augmentation trop brutale du chômage.

Certains pays, comme Singapour, montrent qu’il peut y avoir une gestion stratégique de la dette. Cependant, utiliser la dette comme une solution de facilité pour financer des déficits récurrents n’est pas viable. Une gestion responsable nécessite une coordination entre politique budgétaire et monétaire, ainsi qu’une fiscalité pour garantir une croissance durable. L’équilibre entre soutien à l’économie et viabilité à long terme est essentiel pour préserver la prospérité future. L’équivalence ricardienne nous rappelle que les acteurs économiques ne sont pas passifs et qu’une dette trop élevée peut in fine nuire à l’économie.

IA: les limites

IA: les limites

 

Désormais, les IA génératives telles que ChatGPT, ou Midjourney sont démocratisées. Cependant, malgré leurs prouesses remarquables, il reste des points sur lesquels ces technologies peuvent être améliorées. Polytechnique Insights, la revue de l’institut Polytechnique, décrypte les enjeux de cette technologie.

Les IA génératives se perfectionnent chaque jour, mais la fiabilité des réponses données est encore incertaine. Bien qu’elles calculeront toujours plus vite que nous, leur intelligence n’est pas comparable à l’intelligence humaine par manque de vraie compréhension des informations contenues dans les données qu’elles traitent. Des erreurs peuvent se produire.

Éric Moulines, professeur en apprentissage de statistique à l’École polytechnique (IP Paris) admet que « ce type d’IA est incapable d’évaluer la véracité des réponses qu’elle donne et il est possible [pour ChatGPT] de générer des contenus qui semblent plausibles, mais qui sont rigoureusement faux ». Ce phénomène, dit d’ »hallucinations », s’explique par des erreurs ou des biais dans les bases de données d’entraînement.

 Comme pour tout traitement de « big data » en numérique, les IA génératives fonctionnent grâce à d’énormes serveurs qui nécessitent beaucoup d’énergie et requièrent des méthodes de refroidissement énergivores. Avec un nombre toujours croissant d’usagers, ce besoin ne fait que grandir.

« L’IA générative ne pourra se développer sans une remise en question de son empreinte écologique », assure Laure Soulier maîtresse de conférences à Sorbonne Université. Ainsi, les scientifiques travaillent déjà sur l’optimisation de ces systèmes avec de l’ »IA frugale ». Le but: réduire les ressources nécessaires à leur fonctionnement afin de limiter au maximum leur empreinte carbone.

Pour créer du contenu original comme du texte ou de l’image, les IA génératives établissent des liens et font des déductions en s’appuyant sur une base de données préexistante. De ce fait, il y a un risque persistant concernant la sécurité des données. La majorité des IA génératives sont américaines et sont donc hébergées sur des serveurs outre-Atlantique.

En vertu du « Patriot Act » et du « Cloud Act »ces données peuvent, en principe, être récupérées par les autorités américaines. Cela représente un risque, en particulier pour les entreprises, qui voient la sécurité et la confidentialité de leurs données menacées. En 2023, le Parlement européen s’est mis d’accord sur un premier « AI Act » qui encadrera leur usage sur le territoire européen.

Certes, certains métiers tendent à disparaître avec cette technologie, comme ce fut le cas dans les secteurs de l’information et des médias, de la musique ou encore des services avec la première vague innovations dans l’IA. Avec l’IA générative, les emplois menacés sont caractérisés par des tâches répétitives et non-intellectuelles. Ces IA permettront de libérer du temps, au profit de la productivité.

  »Les employés de centres d’appels, les secrétaires, les opérateurs de saisie, des activités linéaires et simples, avec peu de variations dans les tâches, peu d’interactions avec autrui, pourraient être remplacés par des bots », précise Janine Berg économiste à l’Organisation internationale du travail de l’ONU. Ainsi, de nouveaux métiers émergeront de cette révolution numérique conduisant à une évolution et non à une perte d’emploi.

Puits de carbone océaniques : Opportunités et limites

 

 

Encore peu connu, le rôle des puits de carbone océaniques et continentaux est pourtant majeur dans la lutte pour atténuer le changement climatique : en absorbant d’importantes quantités de CO2 chaque année, ils contribuent en effet à ralentir la vitesse à laquelle le climat se réchauffe.

 

par 

Research scientist, CNRS, Sorbonne Université dans The Conversation

La concentration de CO2 dans l’atmosphère est passée de 285 parties par million (ppm) au début de l’ère industrielle (1850) à 417 ppm en 2022. Sans l’existence de ces puits de carbone, elle atteindrait environ 600 ppm.

Ce sont 32 % des émissions anthropiques de CO2 depuis 1850 qui ont déjà été absorbées par les plantes et les sols (appelés ensemble « puits de carbone continental »). Pour les océans, cette proportion s’éleverait à environ 26 % (« puits de carbone océanique »).

Compte tenu de la difficulté à décarboner les activités anthropiques et l’économie mondiale, renforcer ces puits de carbone naturels apparaît indispensable si l’on ne veut pas dépasser les seuils de réchauffement de 1,5 ou 2 °C.

Ces techniques, regroupées sous le terme de « Carbon Dioxide Removal » (CDR), comprennent des approches conventionnelles telles que le reboisement, ainsi que des propositions controversées visant à améliorer le puits de carbone marin (on les appelle « Marine Carbon Dioxide Removal », ou mCDR).

Une partie de l’intérêt à renforcer le puits de carbone océanique découle de l’ampleur de ce stock : l’océan contient 38 000 milliards de tonnes (ou gigatonnes, Gt) de carbone, soit 50 fois plus que l’atmosphère et 17 fois plus que le puits de carbone de la biosphère continentale.

Sa capacité de stockage s’explique par le fait que le CO2 absorbé se transforme en deux autres formes inorganiques (les ions bicarbonate (HCO3⁻) et carbonate (CO32⁻) qui représentent ensemble environ 98 % du stock de carbone océanique et n’interagissent pas avec l’atmosphère. Dans les océans, les organismes vivants ne représentent qu’une infime fraction du carbone total (0,01 %).

 

Contrairement à la biosphère continentale, où le contact avec l’atmosphère est constant, les flux de CO2 entre l’atmosphère et l’océan sont pilotés par des processus physico-chimiques déterminés par le gradient de CO₂ à l’interface air-mer.

Deux propriétés chimiques de l’océan sont essentielles pour comprendre les différentes techniques de mCDR proposées :

  • La première est sa capacité à stocker le carbone sous forme de carbone inorganique dissous (ou DIC) : c’est la somme des trois formes qui existent dans l’océan (CO2 + HCO3⁻ + CO32⁻).
  • La seconde est l’alcalinité de l’océan, c’est-à-dire la capacité de l’eau à neutraliser les acides – soit l’équilibre entre les ions capables de céder ou recevoir un proton présents dans l’océan. C’est elle qui explique la répartition du carbone inorganique dissous entre ses trois formes possibles.

 

Les approches qui veulent renforcer les puits de carbone marins se concentrent sur la réduction de la concentration de CO2 dans les eaux de surface, afin d’amplifier le flux de carbone en provenance de l’atmosphère.

Pour y parvenir, il est possible de réduire la concentration de carbone inorganique dissous, par exemple en augmentant la quantité d’organismes marins pratiquant la photosynthèse, comme le phytoplancton ou les macroalgues.

On peut également y parvenir en augmentant l’alcalinité de l’eau de mer. On peut par exemple ajouter de la soude. Au final, cela permettrait d’augmenter la part de carbone inorganique dissoute sous forme de bicarbonate et de carbonate.

En théorie, chacune de ces approches permettrait d’augmenter les quantités de carbone stocké dans les océans :

  • Soit en augmentant les flux dans les régions océaniques qui absorbent le CO2 atmosphérique (par exemple, l’Atlantique Nord et l’océan Austral),
  • Soit en diminuant les flux dans les régions où le dégazage de CO₂ dans l’atmosphère se produit (par exemple, le Pacifique équatorial).

Les simulations numériques pour les propositions de mCDR précedentes ont néanmoins mis en lumière plusieurs contraintes physico-chimiques et biologiques. Elles ont revu leur potentiel à la baisse.

L’amélioration de l’absorption biologique du carbone inorganique dissous, à travers par exemple la culture d’algues, semble prometteuse. Mais son efficacité varie énormément d’une région à l’autre et ne produit souvent pas les résultats attendus en termes d’élimination du carbone.

Contrairement au puits de carbone continental, où une augmentation de la production primaire nette de carbone entraîne une réduction équivalente du CO2 atmosphérique, ce n’est pas le cas dans les océans.

  • D’abord parce que le carbone inorganique dissous dans l’eau par des processus biologiques ne réduit pas toujours les concentrations de CO2 dans l’eau.
  • Et d’autre part parce que la circulation des masses d’eau signifie que les temps de résidence de l’eau de mer de surface sont souvent insuffisants pour maximiser le transfert de CO2 de l’atmosphère vers l’océan.

Dans les simulations globales réalisées, seuls 70 à 80 % du carbone inorganique dissous capturé par par d’hypothétiques fermes de macroalgues sont effectivement remplacés par du carbone provenant de l’atmosphère.

Cette part peut même descendre à moins de 60 % lorsque les simulations prennent en compte les nutriments que doivent absorber les algues et les impacts sur le phytoplancton marin naturel, qui contribue également à réduire les concentrations de CO₂ dans la partie supérieure de l’océan.

La plus grande difficulté concernant le recours aux techniques de mCDR réside probablement dans la surveillance, le reporting et la vérification de l’augmentation du stockage de carbone dans l’océan dans le monde réel.

C’est pourtant une condition préalable avant l’attribution de crédits carbone, l’intégration dans les contributions déterminées au niveau national (ou CDN, NDC en anglais, qui représentent les engagements des États dans le cadre de l’accord de Paris, ndlr), ou même l’actualisation des stocks de carbone à l’échelle mondiale.

Il n’est pas surprenant que l’eau de mer se déplace et que des actions comme la culture d’algues ou l’alcalinisation à un endroit donné puissent influencer l’absorption et le stockage du carbone océanique à des centaines de kilomètres de là.

Ces effets à distance, ainsi que la dissociation entre les flux de CO2 air-mer en surface et le stockage du carbone dans l’océan en profondeur (contrairement à ce qui se produit sur terre) signifient que des réseaux d’observation étendus, des traceurs d’échanges gazeux et des simulations numériques seront probablement nécessaires pour permettre un tel ce suivi.

Même dans ces conditions, tout accroissement du stockage de carbone en mer serait une goutte d’eau dans l’océan, étant donné la quantité de carbone qui y est naturellement présente, et serait donc extrêmement difficile à quantifier.

Reste la question : quelle quantité de carbone ces méthodes pourraient-elles extraire de l’atmosphère et quelles pourraient en être les implications ?

L’augmentation de l’alcalinité des océans à l’aide d’un minéral alcalin abondant tel que l’olivine a été estimée, dans le meilleur des cas, à un accroissement du stockage de carbone dans l’océan d’environ un Gt de CO2 par Gt d’olivine ajoutée.

Si l’on voulait accroître l’absorption du carbone atmosphérique par les océans de 1 Gt de CO2 par an (ce qui représente une augmentation d’environ 10 % par rapport au puits océanique en 2023), il faudrait donc transporter 1 Gt d’olivine vers les régions océaniques d’intérêts, soit 13 fois le poids de la pêche marine mondiale actuelle !

Compte tenu des émissions humaines actuelles, qui sont de 40 Gt de CO₂ par an, et de la nécessité d’atteindre des émissions nettes nulles au cours des prochaines décennies pour stabiliser le réchauffement à un niveau acceptable, l’élimination du dioxyde de carbone par les techniques de mCDR ne pourra pas se substituer à des réductions drastiques des émissions. Cette élimination pourrait permettre cependant de compenser des émissions résiduelles dans des secteurs difficiles à décarboner.

Justice : les limites des chaînes d’info et autres pétitions

 Justice: Ne pas lui substituer les chaînes d’info, les réseaux sociaux et les pétitions

simple mise en accusation emporte malheureusement avec elle le droit de s’exprimer, de travailler ou de se défendre, regrettent les avocats Mathias Chichportich et Pierre-Olivier Sur dans une tribune au « Monde ».

 

La justice et la presse poursuivent la même aspiration : la manifestation de la vérité. Leurs deux légitimités s’entrechoquent autour de deux temporalités : le temps judiciaire, ponctué par les différentes étapes d’une procédure contradictoire et l’annonce d’un jugement qui prend parfois des années, et le temps médiatique, cristallisé en une fraction de seconde par l’image d’un célèbre acteur dont le comportement est manifestement outrageant ou l’annonce d’une garde à vue sur un bandeau « Urgent » diffusé sur une chaîne d’information en continu.

Le « vu à la télé », c’est un jugement moral sans appel qui se propage par cercles concentriques et par la viralité des réseaux sociaux. Au sein de ce prétoire virtuel, il n’y a pas de juge indépendant pour dire le droit, ni d’avocat pour assurer les droits de la défense. La foule numérique fixe ses propres normes dans un tribunal où l’opinion majoritaire impose la vérité de l’instant.La peine doit alors être immédiate : les appels à la déprogrammation des films et au retrait de la légion de l’honneur pour consacrer « la chute de l’ogre » du cinéma français. A Sciences Po, un mur d’affiches aux couleurs du soleil couchant réclame une démission. Des procédures de retrait pour les uns, des promesses d’avenir pour les autres et une sanction immédiate pour tous, y compris pour la plupart des plaignantes qui ne recherchent pas la lumière et dont la finalité de la démarche est dévoyée.

Ces affaires sont très différentes tant du point de vue des comportements incriminés que du stade de la procédure judiciaire auquel elles se situent, mais à l’heure où chacun est sommé de choisir son camp par pétition interposée, il nous paraît essentiel d’affirmer qu’il est absurde d’opposer la lutte légitime contre les violences faites aux femmes et les principes essentiels de la justice pénale.

Les limites de la restauration de la nature

Les limites de la restauration de la nature

En juillet 2023, au comble de la torpeur estivale, une question brûlante échauffait l’hémicycle du Parlement européen. L’Europe en fait-elle assez pour protéger l’environnement ? Au-delà de la protection de la nature, ne faudrait-il pas s’engager un cran plus loin, proactivement, à la « restaurer » ? Cette idée était au centre d’une proposition de règlement adoptée à une très courte majorité, le 11 juillet 2023, après un parcours législatif particulièrement houleux au sein de la Commission agriculture. L’essentiel des débats a porté sur le périmètre de ce règlement (dont les terres agricoles ont finalement été exclues) ainsi que sur le niveau de contrainte qu’elle exerce sur les États membres.

par Nassima Abdelghafour
chercheuse post-doc en sciences sociales, École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS)

François Thoreau
Sciences Techniques et Société, Humanités environnementales, Université de Liège dans The Conversation

Pour les résumer succinctement, les débats mettaient en scène l’habituelle opposition entre la protection de l’environnement, plutôt soutenue à gauche et par les verts, et la protection de l’économie et des activités agricoles, plutôt soutenue à droite et, en particulier, par le Parti populaire européen.

Si personne n’était d’accord sur la réponse à apporter, le constat de départ fait consensus. Il est celui d’une perte considérable de biodiversité et d’une incapacité à endiguer la déplétion des écosystèmes terrestres et marins. Ce constat, établi par un rapport de l’Agence européenne de l’environnement, désigne les facteurs responsables de cette situation : l’emprise toujours croissante du bâti, des modèles agricoles très intensifs mais encore et surtout une incapacité du cadre réglementaire actuel à produire des effets concrets. Ce diagnostic a conduit la Commission à faire de la restauration de la nature un enjeu politique majeur de son Pacte vert, en renforçant le caractère contraignant des mesures.

Mais ni la notion de restauration elle-même, ni le type de démarche que cette notion implique n’ont été discutés.

Pourtant, cette idée ne va pas de soi, et la question mérite d’être posée : peut-on seulement « restaurer » la nature ? Le terme de restauration suggère un retour, sinon à un état initial, du moins à un état antérieur. Dès lors, comment déterminer quel état antérieur fait référence ? Faut-il revenir à la situation qui existait il y a 10, 20, 50 ou 100 ans ? Et comment caractériser l’état auquel il faudrait revenir ? Parmi les innombrables espèces végétales et animales peuplant les sites concernés, lesquelles seront prises en compte dans une démarche de restauration de l’écosystème ? Comment établir la liste des entités qui ont souffert (sols, animaux, humains, rivières, végétation, etc.) ? Comment faire le tri entre ce qui compte et ce qui sera négligé ? En pratique, les réponses à de telles questions dépendent toujours de circonstances situées.

Prenons le cas de l’exploitation de l’or alluvionnaire en forêt tropicale, en Guyane française. Ce type d’exploitation consiste à creuser le lit argileux d’un cours d’eau pour en extraire de l’or, ce qui implique nécessairement de détruire une zone de forêt et de détourner un cours d’eau. La fine couche de sol fertile est rapidement dispersée par les pluies, laissant à nu un sol stérile et en proie à une érosion rapide. Depuis les années 2000, les exploitants ont l’obligation légale de réhabiliter et de revégétaliser les sites miniers. Il est notamment attendu des opérateurs miniers qu’ils effectuent des travaux de terrassement afin de reboucher les trous qu’ils ont creusés et de recréer les méandres de la rivière, et qu’ils replantent des arbres sur au moins 30 % de la surface déboisée. Mais, en pratique, un flou persiste sur les critères permettant de juger si les travaux de réhabilitation et de revégétalisation sont satisfaisants, afin de libérer (ou non) l’exploitant minier de ses obligations.

Agents de l’ONF (office national des forêts), experts travaillant dans des bureaux d’étude, chercheurs et fonctionnaires de l’administration impliqués dans les processus de reforestation se penchent sur le problème et y apportent des réponses différentes. Certains acteurs insistent sur le rétablissement d’un couvert végétal sur le sol déboisé, d’autres sur le retour d’une activité microbienne dans le sol, d’autres encore sur la présence d’arbres « charismatiques », endémiques de la Guyane. Quant à la rivière, certains acteurs insistent sur un reprofilage du cours d’eau fidèle aux tracés d’origine, quand d’autres préfèrent des méthodes qui portent moins sur la reconstruction d’un paysage que sur le retour de la vie aquatique.

Dans un contexte de ressources techniques et financières limitées – les entreprises impliquées dans l’exploitation de l’or alluvionnaire, souvent décrites comme « artisanales », opèrent avec relativement peu de moyens – il est difficile de mettre en pratique ces diverses exigences. Pour prendre la mesure de ces limites techniques et financières, on peut citer par exemple le cas de très petites entreprises travaillant avec une ou deux pelles mécaniques et qui jugent trop chers les services des bureaux d’étude spécialisés dans les travaux de réhabilitation et de revégétalisation. Dans ces cas-là, les travaux de réhabilitation sont conduits en interne, par les mêmes ouvriers qui ont creusé le flat alluvionnaire. Une autre difficulté souvent évoquée est liée à l’approvisionnement en graines ou en plants en grande quantité, au vu du petit nombre de pépinières spécialisées dans la revégétalisation des sites endommagés par l’activité minière.

Finalement, l’ambition d’un retour à un état antérieur aux perturbations liées à l’activité humaine peut se révéler discutable si elle se fonde sur une vision de la nature dans laquelle les humains n’ont pas de place et sont pensés comme extérieurs. C’est en particulier un problème pour des groupes humains autochtones dont les modes de vie et de subsistance sont étroitement liés au milieu. Des politiques fondées sur une telle vision de la nature peuvent par exemple conduire à exclure certaines activités humaines (chasse, pêche, cueillette), en favoriser d’autres (tourisme vert) et ainsi définir de bons et mauvais usages d’un milieu naturel. Par ailleurs, les paysages pensés comme naturels sont souvent le résultat d’interventions humaines et portent donc la trace d’événements et d’organisations sociales et politiques passés, impliquant souvent de multiples oppressions. Ainsi, la forêt tropicale guyanaise est un espace qui ne peut être envisagé comme « vierge » et vide d’humains que parce que l’arrivée des colons européens a provoqué, par la violence et la propagation de maladies, une chute tristement spectaculaire de la population autochtone qui la peuplait.

On le voit, au travers de situations concrètes faites de contraintes financières, d’incertitudes scientifiques et de difficultés techniques, l’ambition de restaurer la nature se traduit par un geste partiel et partial, qui suppose une réinvention et une réinterprétation a minima d’un milieu naturel plutôt qu’un retour à l’identique. Les acteurs impliqués dans le contrôle des travaux de réhabilitation des zones endommagées par l’exploitation minière ont d’ailleurs cessé d’employer le terme de restauration, estimant qu’un retour à l’identique des sites est impossible, et que la destruction causée par les mines d’or est en partie irrémédiable.

En plus d’idéaliser le passé, la notion de « restauration » dépolitise le futur. En effet, l’idée qu’une restauration de la nature est possible peut se révéler délétère si elle est employée pour justifier de nouveaux projets impliquant des dommages environnementaux. Nous proposons de mettre en avant la notion de remédiation écologique.

D’abord, remédier signifie apporter un remède : ce terme insiste sur le dommage causé et rappelle ainsi l’existence d’une situation problématique nécessitant de l’attention et du soin. Plutôt qu’un retour en arrière ou à l’identique, la « remédiation » évoque un processus de transformation à l’issue incertaine, qui laisse visibles non seulement les traces des destructions écologiques passées, mais aussi les traces des gestes de réparation accomplis sur un milieu. En effet, certaines opérations de remédiation peuvent échouer tout à fait, ou ne réussir que partiellement. Dans le cas de la forêt guyanaise par exemple, les arbres replantés sur les sites miniers ne survivent pas toujours sur un sol stérile, ou bien forment un couvert végétal qui améliore la situation en limitant l’érosion sans pour autant évoluer vers un retour de la forêt tropicale.

Plutôt que de revenir à un passé figé, la notion de remédiation invite à fabriquer de nouvelles médiations écologiques, et donc à poser explicitement la question inévitable de ce qui est considéré comme important et précieux dans une situation donnée. En d’autres termes, elle rend visibles et débattable les choix qui doivent être faits. En effet, les différentes options techniques favorisent différents types d’êtres (arbres, animaux, micro-organismes, etc.) en organisant des conditions propices à leur implantation à partir de la situation de dégât écologique. Il s’agit donc de réinterpréter les relations entre les êtres peuplant un milieu qui a changé, souvent avec des moyens limités.

Au-delà de la question sémantique, le choix d’un terme pour décrire des opérations de réparation de la nature implique différents rapports à la nature, aux torts qui ont été causés aux milieux et aux façons d’y répondre. Ainsi, « restaurer » naturalise un état auquel il faudrait revenir alors que « remédier » implique de fabriquer de nouvelles médiations tout en faisant exister, de façon pratique, le fait même que ces relations aient été endommagées en premier lieu – et donc la nécessité de les réparer. En ce sens, le terme de remédiation nous semble mieux indiqué pour tendre vers une réinvention des relations entre humains et non-humains, réunis dans une seule communauté de destin. Finalement, la notion de remédiation écologique offre une ligne de fuite entre une position cynique, postulant que les écosystèmes sont irrémédiablement détruits, et une position prométhéenne utilisant les possibilités de restauration comme argument pour justifier qu’on continue à produire et à exploiter comme avant.

Futur de la terre: Des limites planétaires déjà dépassées

Futur de la terre: Des limites planétaires déjà dépassées


Si elle pouvait parler, la Terre nous dirait que notre existence et celle de nos enfants dépendent de sa bonne santé, car nous faisons partie d’elle. Elle nous expliquerait que si nous ne sentons pas encore toutes les implications de ses dysfonctionnements, c’est parce que son temps est plus long que le nôtre et que les effets réels tardent encore à se manifester pleinement. Enfin, elle insisterait sur le fait qu’il est grand temps de la régénérer. Pour cela, c’est toute l’allocation de notre capital que nous devons repenser !

par Alain Desvigne est PDG d’Amarenco. dans les » Echos ».

Création continue, croissance limitée, principe de décentralisation, recyclage, sous-optimalité… Appliquons les principes du vivant

Six limites planétaires sur neuf ont été franchies : le climat, la biodiversité, le cycle biochimique de l’azote et du phosphore, les sols, les eaux douces et la pollution liée aux activités humaines. Concrètement, cela signifie que nous épuisons littéralement notre Terre et donc, notre maison, celle qui nous permet de nous alimenter et de respirer.

Aujourd’hui, nous devons agir sans attendre, en nous appuyant sur les neuf principes fondamentaux du vivant pour restaurer ces limites : la création continue, la croissance limitée, le principe de décentralisation, la diversité, l’équilibre dynamique, l’interdépendance, le recyclage des déchets, la singularité et, enfin la sous-optimalité.

Se contenter de remplacer les énergies fossiles par des solutions durables ne traite pas le fond du problème. Autour des centrales solaires, il faut mener des programmes de régénération des sols, afin de leur permettre de mieux capter l’eau, le carbone et, donc, de redonner le potentiel de vie
Ces grands principes doivent être adressés de façon systémique et nous inspirer. Nos entreprises doivent s’engager collectivement sur le chemin de la régénération, à savoir une organisation qui opère comme un système vivant dans le respect des limites planétaires.

Cette volonté est aujourd’hui freinée par une approche en silo, principale maladie de notre ère industrielle. Prenons l’exemple de la finance : d’un côté, nous avons les infrastructures, qui rassemblent les énergies renouvelables et fossiles et, de l’autre, les solutions fondées sur la nature. Ces typologies d’actifs sont adressées de façon indépendante par des investisseurs différents, avec des horizons d’investissement pourtant similaires, c’est-à-dire long, voire très long terme. Continuer à les séparer, c’est continuer à siloter le vivant et, donc, aller droit dans le mur.

Se contenter de remplacer les énergies fossiles par des solutions durables ne traite pas le fond du problème. Autour des centrales solaires, il faut mener des programmes de régénération des sols, afin de leur permettre de mieux capter l’eau, le carbone et, donc, de redonner le potentiel de vie. C’est ainsi que nous pourrons revenir à un équilibre planétaire.

L’enjeu numéro 1 est de réintégrer, à la fois dans nos entreprises et au sein des territoires, une approche holistique, intégrative. Pour débloquer les fonds nécessaires aux financements de cette révolution, la volonté politique sera la clé. Tout se joue dans l’allocation du capital. La finance est le nerf de la guerre pour transformer nos façons de produire. Là encore, il faut désiloter, afin que les ministères des finances, de l’écologie et de l’énergie communiquent entre eux. Actuellement, les réponses apportées ne sont pas coordonnées, avec des conséquences dramatiques pour notre planète.

Au problème de l’approche fragmentée s’ajoute notre vision court-termiste des enjeux, avec une réflexion qui se fait uniquement à travers le prisme de la meilleure rentabilité. Tant que les gouvernements ne feront pas de choix très clairs en taxant davantage les énergies fossiles, dont le TRI (Taux de Rendement Interne) est bien supérieur à celui des énergies renouvelables, la finance continuera d’allouer des fonds insuffisants aux solutions permettant d’assurer la vie humaine sur notre planète. Il est temps d’en finir avec un système qui privilégie une recherche de profit déraisonnable. La Terre nous montre la voie à suivre depuis 3,5 milliards d’années. Qu’attendons-nous pour l’écouter ?

Alain Desvigne est PDG d’Amarenco.

Environnement et Avenir de la terre: Des limites planétaires déjà dépassées

Environnement et Avenir de la terre: Des limites planétaires déjà dépassées


Si elle pouvait parler, la Terre nous dirait que notre existence et celle de nos enfants dépendent de sa bonne santé, car nous faisons partie d’elle. Elle nous expliquerait que si nous ne sentons pas encore toutes les implications de ses dysfonctionnements, c’est parce que son temps est plus long que le nôtre et que les effets réels tardent encore à se manifester pleinement. Enfin, elle insisterait sur le fait qu’il est grand temps de la régénérer. Pour cela, c’est toute l’allocation de notre capital que nous devons repenser !

par Alain Desvigne est PDG d’Amarenco. dans les » Echos ».

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Six limites planétaires sur neuf ont été franchies : le climat, la biodiversité, le cycle biochimique de l’azote et du phosphore, les sols, les eaux douces et la pollution liée aux activités humaines. Concrètement, cela signifie que nous épuisons littéralement notre Terre et donc, notre maison, celle qui nous permet de nous alimenter et de respirer.

Aujourd’hui, nous devons agir sans attendre, en nous appuyant sur les neuf principes fondamentaux du vivant pour restaurer ces limites : la création continue, la croissance limitée, le principe de décentralisation, la diversité, l’équilibre dynamique, l’interdépendance, le recyclage des déchets, la singularité et, enfin la sous-optimalité.

Se contenter de remplacer les énergies fossiles par des solutions durables ne traite pas le fond du problème. Autour des centrales solaires, il faut mener des programmes de régénération des sols, afin de leur permettre de mieux capter l’eau, le carbone et, donc, de redonner le potentiel de vie
Ces grands principes doivent être adressés de façon systémique et nous inspirer. Nos entreprises doivent s’engager collectivement sur le chemin de la régénération, à savoir une organisation qui opère comme un système vivant dans le respect des limites planétaires.

Cette volonté est aujourd’hui freinée par une approche en silo, principale maladie de notre ère industrielle. Prenons l’exemple de la finance : d’un côté, nous avons les infrastructures, qui rassemblent les énergies renouvelables et fossiles et, de l’autre, les solutions fondées sur la nature. Ces typologies d’actifs sont adressées de façon indépendante par des investisseurs différents, avec des horizons d’investissement pourtant similaires, c’est-à-dire long, voire très long terme. Continuer à les séparer, c’est continuer à siloter le vivant et, donc, aller droit dans le mur.

Se contenter de remplacer les énergies fossiles par des solutions durables ne traite pas le fond du problème. Autour des centrales solaires, il faut mener des programmes de régénération des sols, afin de leur permettre de mieux capter l’eau, le carbone et, donc, de redonner le potentiel de vie. C’est ainsi que nous pourrons revenir à un équilibre planétaire.

L’enjeu numéro 1 est de réintégrer, à la fois dans nos entreprises et au sein des territoires, une approche holistique, intégrative. Pour débloquer les fonds nécessaires aux financements de cette révolution, la volonté politique sera la clé. Tout se joue dans l’allocation du capital. La finance est le nerf de la guerre pour transformer nos façons de produire. Là encore, il faut désiloter, afin que les ministères des finances, de l’écologie et de l’énergie communiquent entre eux. Actuellement, les réponses apportées ne sont pas coordonnées, avec des conséquences dramatiques pour notre planète.

Au problème de l’approche fragmentée s’ajoute notre vision court-termiste des enjeux, avec une réflexion qui se fait uniquement à travers le prisme de la meilleure rentabilité. Tant que les gouvernements ne feront pas de choix très clairs en taxant davantage les énergies fossiles, dont le TRI (Taux de Rendement Interne) est bien supérieur à celui des énergies renouvelables, la finance continuera d’allouer des fonds insuffisants aux solutions permettant d’assurer la vie humaine sur notre planète. Il est temps d’en finir avec un système qui privilégie une recherche de profit déraisonnable. La Terre nous montre la voie à suivre depuis 3,5 milliards d’années. Qu’attendons-nous pour l’écouter ?

Alain Desvigne est PDG d’Amarenco.

Avenir de la terre: Des limites planétaires déjà dépassées

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Si elle pouvait parler, la Terre nous dirait que notre existence et celle de nos enfants dépendent de sa bonne santé, car nous faisons partie d’elle. Elle nous expliquerait que si nous ne sentons pas encore toutes les implications de ses dysfonctionnements, c’est parce que son temps est plus long que le nôtre et que les effets réels tardent encore à se manifester pleinement. Enfin, elle insisterait sur le fait qu’il est grand temps de la régénérer. Pour cela, c’est toute l’allocation de notre capital que nous devons repenser !

par Alain Desvigne est PDG d’Amarenco. dans les » Echos ».

Création continue, croissance limitée, principe de décentralisation, recyclage, sous-optimalité… Appliquons les principes du vivant

Six limites planétaires sur neuf ont été franchies : le climat, la biodiversité, le cycle biochimique de l’azote et du phosphore, les sols, les eaux douces et la pollution liée aux activités humaines. Concrètement, cela signifie que nous épuisons littéralement notre Terre et donc, notre maison, celle qui nous permet de nous alimenter et de respirer.

Aujourd’hui, nous devons agir sans attendre, en nous appuyant sur les neuf principes fondamentaux du vivant pour restaurer ces limites : la création continue, la croissance limitée, le principe de décentralisation, la diversité, l’équilibre dynamique, l’interdépendance, le recyclage des déchets, la singularité et, enfin la sous-optimalité.

Se contenter de remplacer les énergies fossiles par des solutions durables ne traite pas le fond du problème. Autour des centrales solaires, il faut mener des programmes de régénération des sols, afin de leur permettre de mieux capter l’eau, le carbone et, donc, de redonner le potentiel de vie
Ces grands principes doivent être adressés de façon systémique et nous inspirer. Nos entreprises doivent s’engager collectivement sur le chemin de la régénération, à savoir une organisation qui opère comme un système vivant dans le respect des limites planétaires.

Cette volonté est aujourd’hui freinée par une approche en silo, principale maladie de notre ère industrielle. Prenons l’exemple de la finance : d’un côté, nous avons les infrastructures, qui rassemblent les énergies renouvelables et fossiles et, de l’autre, les solutions fondées sur la nature. Ces typologies d’actifs sont adressées de façon indépendante par des investisseurs différents, avec des horizons d’investissement pourtant similaires, c’est-à-dire long, voire très long terme. Continuer à les séparer, c’est continuer à siloter le vivant et, donc, aller droit dans le mur.

Se contenter de remplacer les énergies fossiles par des solutions durables ne traite pas le fond du problème. Autour des centrales solaires, il faut mener des programmes de régénération des sols, afin de leur permettre de mieux capter l’eau, le carbone et, donc, de redonner le potentiel de vie. C’est ainsi que nous pourrons revenir à un équilibre planétaire.

L’enjeu numéro 1 est de réintégrer, à la fois dans nos entreprises et au sein des territoires, une approche holistique, intégrative. Pour débloquer les fonds nécessaires aux financements de cette révolution, la volonté politique sera la clé. Tout se joue dans l’allocation du capital. La finance est le nerf de la guerre pour transformer nos façons de produire. Là encore, il faut désiloter, afin que les ministères des finances, de l’écologie et de l’énergie communiquent entre eux. Actuellement, les réponses apportées ne sont pas coordonnées, avec des conséquences dramatiques pour notre planète.

Au problème de l’approche fragmentée s’ajoute notre vision court-termiste des enjeux, avec une réflexion qui se fait uniquement à travers le prisme de la meilleure rentabilité. Tant que les gouvernements ne feront pas de choix très clairs en taxant davantage les énergies fossiles, dont le TRI (Taux de Rendement Interne) est bien supérieur à celui des énergies renouvelables, la finance continuera d’allouer des fonds insuffisants aux solutions permettant d’assurer la vie humaine sur notre planète. Il est temps d’en finir avec un système qui privilégie une recherche de profit déraisonnable. La Terre nous montre la voie à suivre depuis 3,5 milliards d’années. Qu’attendons-nous pour l’écouter ?

Alain Desvigne est PDG d’Amarenco.

Politique- Chine: Les limites de la gestion économique étatique

Politique- Chine: Les limites de la gestion économique étatique

Les économistes Alexander Brown, François Chimits et Gregor Sebastian décrivent le système pyramidal mis en place par le gouvernement central de Pékin .

La faiblesse actuelle de la croissance chinoise et la crise financière notamment dans l’immobilier découlent directement de la tutelle du parti communiste sur l’économie. La bureaucratie, la rigidité centraliste et aussi la corruption illustrent la perversité du régime et son inefficacité économique. Du coup pour rééquilibrer cette politique très centraliste, les communistes veulent désormais miser sur les PME. Un pari hypothétique qui devra passer par les filtres locaux du parti communiste NDLR

Le retour du dirigisme économique en Chine, sous la férule de Xi Jinping, ne fait plus guère débat. Il serait en revanche trompeur d’y voir le retour à un modèle soviétique. L’ambition de Pékin de construire une nouvelle articulation entre pouvoirs publics et forces de marché espère bien bénéficier des vertus de ces dernières. Les politiques à l’endroit des PME innovantes en offrent une illustration riche d’enseignements.

Depuis environ cinq ans, ces PME sont devenues une composante essentielle des discours et des politiques de Pékin dans la poursuite de son nouvel objectif d’indépendance en matière de technologies stratégiques. A cette fin, les autorités chinoises ont bâti un imposant système pyramidal de labélisation.

Il échoit aux autorités locales de sélectionner un large éventail de petites et moyennes entreprises « innovantes » selon un cahier des charges établi par Pékin, dans lequel la capacité à se substituer aux technologies étrangères figure en bonne place, au côté de considérations commerciales. Les gouvernements provinciaux effectuent ensuite leur propre sélection, notamment à partir de cette première liste, pour identifier les « PME spécialisées », puis les autorités nationales font de même pour identifier les « petits géants ». Une fois matures, ces derniers peuvent décrocher le statut de « champion industriel ».

Ces listes sont soumises à des revues régulières. Le nombre important de non-renouvellement plaide pour le sérieux de ces exercices. En outre, l’intérêt de chaque échelon à voir ses poulains sélectionnés au niveau supérieur offre une certaine garantie sur la qualité des sélections. Le système semble donc en mesure d’écarter les obstacles de la rigidité et des collusions, deux des faiblesses habituelles des politiques industrielles.

Une fois sélectionnées, les PME bénéficient d’une myriade d’avantages allant croissant avec le niveau du label. Les subventions traditionnelles (c’est-à-dire le transfert direct de ressources financières des pouvoirs publics) sont bien évidemment au rendez-vous. Principalement fournies par les autorités locales, donc plus difficiles à comptabiliser de manière exhaustive, elles semblent in fine relativement modestes.

Chine : les limites de la mainmise centralisée du parti communiste sur l’économie

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Les économistes Alexander Brown, François Chimits et Gregor Sebastian décrivent le système pyramidal mis en place par le gouvernement central de Pékin .

La faiblesse actuelle de la croissance chinoise et la crise financière notamment dans l’immobilier découlent directement de la tutelle du parti communiste sur l’économie. La bureaucratie, la rigidité centraliste et aussi la corruption illustrent la perversité du régime et son inefficacité économique. Du coup pour rééquilibrer cette politique très centraliste, les communistes veulent désormais miser sur les PME. Un pari hypothétique qui devra passer par les filtres locaux du parti communiste NDLR

Le retour du dirigisme économique en Chine, sous la férule de Xi Jinping, ne fait plus guère débat. Il serait en revanche trompeur d’y voir le retour à un modèle soviétique. L’ambition de Pékin de construire une nouvelle articulation entre pouvoirs publics et forces de marché espère bien bénéficier des vertus de ces dernières. Les politiques à l’endroit des PME innovantes en offrent une illustration riche d’enseignements.

Depuis environ cinq ans, ces PME sont devenues une composante essentielle des discours et des politiques de Pékin dans la poursuite de son nouvel objectif d’indépendance en matière de technologies stratégiques. A cette fin, les autorités chinoises ont bâti un imposant système pyramidal de labélisation.

Il échoit aux autorités locales de sélectionner un large éventail de petites et moyennes entreprises « innovantes » selon un cahier des charges établi par Pékin, dans lequel la capacité à se substituer aux technologies étrangères figure en bonne place, au côté de considérations commerciales. Les gouvernements provinciaux effectuent ensuite leur propre sélection, notamment à partir de cette première liste, pour identifier les « PME spécialisées », puis les autorités nationales font de même pour identifier les « petits géants ». Une fois matures, ces derniers peuvent décrocher le statut de « champion industriel ».

Ces listes sont soumises à des revues régulières. Le nombre important de non-renouvellement plaide pour le sérieux de ces exercices. En outre, l’intérêt de chaque échelon à voir ses poulains sélectionnés au niveau supérieur offre une certaine garantie sur la qualité des sélections. Le système semble donc en mesure d’écarter les obstacles de la rigidité et des collusions, deux des faiblesses habituelles des politiques industrielles.

Une fois sélectionnées, les PME bénéficient d’une myriade d’avantages allant croissant avec le niveau du label. Les subventions traditionnelles (c’est-à-dire le transfert direct de ressources financières des pouvoirs publics) sont bien évidemment au rendez-vous. Principalement fournies par les autorités locales, donc plus difficiles à comptabiliser de manière exhaustive, elles semblent in fine relativement modestes.

Chine: Les limites de la gestion économique étatique

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La faiblesse actuelle de la croissance chinoise et la crise financière notamment dans l’immobilier découlent directement de la tutelle du parti communiste sur l’économie. La bureaucratie, la rigidité centraliste et aussi la corruption illustrent la perversité du régime et son inefficacité économique. Du coup pour rééquilibrer cette politique très centraliste, les communistes veulent désormais miser sur les PME. Un pari hypothétique qui devra passer par les filtres locaux du parti communiste NDLR

Le retour du dirigisme économique en Chine, sous la férule de Xi Jinping, ne fait plus guère débat. Il serait en revanche trompeur d’y voir le retour à un modèle soviétique. L’ambition de Pékin de construire une nouvelle articulation entre pouvoirs publics et forces de marché espère bien bénéficier des vertus de ces dernières. Les politiques à l’endroit des PME innovantes en offrent une illustration riche d’enseignements.

Depuis environ cinq ans, ces PME sont devenues une composante essentielle des discours et des politiques de Pékin dans la poursuite de son nouvel objectif d’indépendance en matière de technologies stratégiques. A cette fin, les autorités chinoises ont bâti un imposant système pyramidal de labélisation.

Il échoit aux autorités locales de sélectionner un large éventail de petites et moyennes entreprises « innovantes » selon un cahier des charges établi par Pékin, dans lequel la capacité à se substituer aux technologies étrangères figure en bonne place, au côté de considérations commerciales. Les gouvernements provinciaux effectuent ensuite leur propre sélection, notamment à partir de cette première liste, pour identifier les « PME spécialisées », puis les autorités nationales font de même pour identifier les « petits géants ». Une fois matures, ces derniers peuvent décrocher le statut de « champion industriel ».

Ces listes sont soumises à des revues régulières. Le nombre important de non-renouvellement plaide pour le sérieux de ces exercices. En outre, l’intérêt de chaque échelon à voir ses poulains sélectionnés au niveau supérieur offre une certaine garantie sur la qualité des sélections. Le système semble donc en mesure d’écarter les obstacles de la rigidité et des collusions, deux des faiblesses habituelles des politiques industrielles.

Une fois sélectionnées, les PME bénéficient d’une myriade d’avantages allant croissant avec le niveau du label. Les subventions traditionnelles (c’est-à-dire le transfert direct de ressources financières des pouvoirs publics) sont bien évidemment au rendez-vous. Principalement fournies par les autorités locales, donc plus difficiles à comptabiliser de manière exhaustive, elles semblent in fine relativement modestes.

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